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Opération ramasse miettes.


Et quand il croit ouvrir ses bras, son ombre est celle d’une croix.



Ne cessait de répéter un vieux révolutionnaire qui avait écopé de la prison à perpétuité. Qui sait, peut-être un jour Ils comprendraient, puisque c’était mon cas.

J’avais navigué sur les quatre mers avec pour seul objectif de planter un peu de paix. Pour quoi ? Vivre d’horribles guerres, voir les camarades d’infanteries crever, je les avais vu, leur cervelle exploser et pour certain il n’avait fallu que d’un clic. Ils partaient confiants, souriants, puis à la fin on ne retrouvait même plus leur visage. J’avais vogué, bravé, craqué os, brisé mâchoires sans jamais penser à tuer sous l’ordre de quelqu’un. Parce qu’il le fallait, parce que d’après cette personne c’était la seule alternative. A quoi ? A rien. Parce que cette personne était le pantin d’une autre. J’avais vu des hauts gradés sacrifier des vies en connaissance de cause, et pour rien. Jamais je ne m’étais lamenté, jamais je n’avais pleuré. Il y avait deux côtés, et j’avais choisi le mien.

Ils étaient tous pourris. Pourris jusqu’à la moelle épinière. Je m’y étais fait. Hélas, je gardais en moi une rage qui briserait le masque tôt ou tard. Mais je luttais. Parce que, il y avait deux côtés. Et j’avais choisi le mien.

Quarante ans de vie. Dont un tiers à se voiler la face. Il me restait quoi ? Dix ans de lucidité. Trente ans pour qu’il, moi, arrête de sommeiller. Et puis, il y avait eu ce procès. Peut-être, je me dis, que j’aurais préféré la peine de mort, tout de même. Pour moi, cette faction n’avait rien d’élitiste, c’était une horreur. Chaque appel, chaque ordre… C’est affreux d’avoir comme travail de se battre jusqu’à ce qu’un des opposants posent genoux à terre. Ma vie était un pile ou face où s’affrontaient la vie et la mort. Je me détestais de ne pas être inquiet du sort que me réservait la pièce. S’arrêter ou continuer. Continuer et voir d’autres camarades, eux, s’arrêter ou continuer ? S’arrêter, c’était suivre ceux qui étaient déjà tombés. Mais s’arrêter tout de suite, c’était ne jamais trouver le repos pur et absolu. C’était, même au fond d’une tombe, avoir des remords. Parce qu’on ne vit pas quand on est marine d’élite. On survit aujourd’hui pour survivre demain. Par contre, on ne laisse pas le choix aux adversaires.

Goa était en deuil. La révolution, la marine et les magouilles avaient fait fleurir de beaux arbres. Conspiration, massacres, destruction, pauvreté et désespoir en étaient les fleurs. On fuyait le Royaume abîmé, on avait peur. “Même les riches pouvaient mourir”, qu’on voyait dans les yeux des survivants qui allaient se loger à Fuschia. C’était maintenant une ville maudite. Personne n’avait plus envie d’y vivre. La Marine de Goa, qui était en fait les hommes du Vice Amiral Fenyang, s’afférait à reconstruire le Royaume tandis qu’on avait envoyé les bons soldats de l’élite sous le vestige qu’était le Grey Terminal. De la poussière et du sang. Et dans les souterrains, peut-être d’anciens résidents, peut-être d’autres révolutionnaires. Fenyang s’en fichait, il ne voulait plus d’autres attaques. C’était tout. Les ordres qu’on recevait étaient toujours simple et précis, et là en l’occurrence il s’agissait de traquer la moindre bête grise. Jusqu’à ce que l’île de Dawn en soit lavée une bonne fois pour toute. Toute l’île !

Et pour ça, on exécuterait un autre genre d’opération des trois tout : Coffrer tout, détruire tout, reprendre tout.

Sergent ? Les derniers vont pas tarder à arriver. On part dès qu’ils sont là, Fenyang veut des résultats… et des têtes.

Encore des marines d’élite qu’on envoie ?

Sûr. Ils ont même mobilisé le Ciphor Pol 5, c’est dire. C’est terrible de l’avouer mais c’est les événements passés qu’ont permis de rassembler autant de forces pour faire le nettoyage... Les nobles auraient jamais permis que toute une cavalerie d’hommes débarquent sur Dawn foutre le bordel sur leur si précieuse terre.

Hé bah voilà à quoi elle ressemble, leur terre, maintenant… J’arrive.

Dehors, c’étaient des centaines de casques bleus qui étaient alignés en rang. Il y avait parmi eux la marine d’élite et la marine de Goa. Devant, le Vice Amiral Fenyang, Lord Vendetta, Mendoza et une flopée d’officiers que j’allais rejoindre. Encore quelques caravelles et un croiseur puis on pourrait partir à la traque révolutionnaire, c’est qu’on avait beaucoup à investir, les alliés de Rafaelo étaient encore nombreux, pour sûr. On surveillait les bateaux qui partaient de l’île, tous, sous ordre. Aussi bien de Fuschia que d’un port aménagé, ailleurs.

Et les yeux dans le vide, j’y repensais. Certainement l’image des dépouilles civils, marines et révolutionnaires que je n’avais pas vue, mais que j’imaginais très, trop bien. ça me rappelait la guerre.

Et quand il croit ouvrir ses bras, son ombre est celle d’une croix.

Qu’il n’arrêtait pas de répéter. Je ne comprenais pas. Malheureusement, je sais, maintenant.
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« Il s’agit de savoir comment on gouvernera. Depuis toujours, il n’y a que deux méthodes : la force ou la ruse. »

C’est un genre de tordu psychopathe du CP 5 qui a l’habitude de dire ça. Il classe les gens en deux catégories. Pas que ça soit impossible d’aller d’une catégorie à une autre. Juste que mêler correctement les deux est selon lui un objectif à la limite de l’inatteignable.
Comme c’est un chef d’équipe, tout le monde fait mine de l’écouter quand il cause de ça. C’est son dada, du coup, si on y prête pas suffisamment attention, c’est voyage dans un coin paumé à faire une mission moisie en bas de la hiérarchie. Jörg, qu’il s’appelle, même.

J’secoue la tête. Il est pas là. Sur l’Île de Dawn, que j’suis. J’remue mon bras gauche. A peu près revenu à la normale, celui-là. Ma main bouge impec’ aussi. J’ai pas les galons mais l’affaire avec Luvneel et Kaltershaft m’a promu Agent de Catégorie Un.
J’lève les yeux, ignorant les groupes de gens autour de moi. La plupart sont placés en rang par équipages, divisions, ou n’importe quelle autre unité de marine. Nous, le Cipher Pol, on est plus en tas, sans ordre. Quelques-uns discutent entre eux.
J’mate du côté des grands patrons. Ca discute calmement, ça fignole les derniers détails. Probablement pas de ce qui nous attend. J’suis prêt à parier que ça cause du banquet de ce soir, ou un truc du genre. J’m’allume une cigarette et j’tire doucement dessus.

J’souffle la fumée en l’air en repensant à Jörg. J’me suis toujours plutôt trouvé côté ruse, j’crois bien. C’est pas que j’suis pas capable de faire côté force, j’suis même plutôt équipé pour ça. Mais les fruits qu’on cueille sont différents.
Si on imagine un arbre trop haut pour qu’on le déleste de ce qu’il produit, la force le coupe à la hache alors que la ruse grimpe pour voler les fruits. Ou quelque chose du genre. L’usage de la force a toujours eu ce côté sans retour que j’ai jamais trop aimé. Ce côté où si ça casse, ben c’est cassé.

Tuer du révolutionnaire en masse, j’crois pas avoir déjà fait ça. Dans une opération conjointe avec la Marine en prime. J’ai envie d’dire que c’est pas mon boulot, que y’a des trucs plus intéressants à faire. J’aime bien mon métier, au fond. Ca m’chagrine de devoir assassiner, comploter, voler, infiltrer des gens. Ou plutôt, ça me rend chagrin qu’il y ait des gens comme ça au point que ça nécessite que j’taffe.
Finalement, j’aime bien trouver comme accomplir ma mission. C’est comme un puzzle, faut trouver le chemin optimal, la mécanique ultime qui permet, tout en marchant sur le fil entre succès et échec, d’avoir le même résultat. J’ai pas la prétention d’y être parvenu à chaque fois. Mais j’pense pas être mauvais.

Puis, bon, j’me leurre pas plus que ça, ça satisfait bien mon ego aussi. Ma conception de la justice, j’l’impose aux autres sans le moindre scrupule. Faut bien que quelqu’un le fasse, ou ce sera le chaos. Du coup, apprendre que j’ai été choisi pour nettoyer les gris créchant encore au Grey Terminal, ça m’fait ni chaud ni froid. J’écrase ma clope par terre avant d’en allumer une nouvelle.
C’est ma mission du jour, elle est logique. Vu l’état de l’île, de toute façon, un massacre de plus ou de moins, ils sont visiblement plus à ça près. Et puis d’abord, s’il y avait pas eu de révolutionnaires pour commencer, y’aurait pas eu de révolte populaire s’achevant dans le sang. Et y’aurait pas eu d’expédition du Gouvernement Mondial pour achever de purger le coin. Pas qu’on se limite au Grey T. S’il faut, j’irai les chercher jusque dans les narines des grands patrons. Et le Vice-Amiral pense pareil, lui qu’est connu pour sa haine virulente du traitre au GM.

J’commence à peine à tirer sur ma cigarette qu’on nous signale qu’il va être temps de se mettre en route. J’crois que j’ai loupé le discours d’encouragement, perdu dans mes pensées. En tout cas, les Marines ont des visages déterminés. Les CP, eux, sont plus difficiles à déchiffrer, j’trouve. Le métier qui veut ça, p’tet. J’ai trop tendance à lire sur les tronches des autres ce que j’analyse comme mon propre état d’esprit. Ce qui est pas très logique, on est pas tous là pour la même raison.

Y’a un ordre de marche globalement bien respecté par les Marines. L’Elite, eux, ils sont plus tranquilles, m’semble, ce qui colle pas mal à leur style de bourrins voguant sur les mers. La force, en tout cas, pas la ruse. J’trainasse. J’tranche un peu sur le style uniforme, avec ma chemise, mon costard. Faudra que j’vois à chourer un uniforme de marine. Pas seconde classe ou quoi, un truc un peu prestige, hein.  Juste histoire de rester discret, par principe.

En attendant, j’remonte mon écharpe et le col de mon manteau pour que ça couvre bien tout le bas de mon visage, jusqu’au nez. Ca suffira pour le moment. La respiration est un poil plus difficile, mais ça vaut le coup. J’veux pas de sombre histoire de vengeance, de spectres du passé qui m’traquent. C’est pénible.

Allez, putain, allez ! Allons buter du gris au Grey T !

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Modokoyoloatef est descendu du bateau avec tout le monde, la tête haute et les muscles à l’air. Ce n’est pas aujourd’hui que Modokoyoloatef mettra une chemise, Vice-Amiral ou pas. On a dit à Modokoyoloatef qu’il devrait faire un effort, au moins pour le débarquement jusqu’au début de la mission, mais Modokoyoloatef n’a pas envie. Modokoyoloatef n’est pas motivé. Il avance la tête haute certes, mais le cou rentré légèrement dans les épaules. On pourrait presque croire qu’il boude mais ce n’est pas vrai. Modokoyoloatef est un grand garçon après tout. Ce serait immature comme attitude juste parce que la mission qu’on lui a confié le laisse un peu… En fait Modokoyoloatef ne sait même pas comment il la sent cette mission. Modokoyoloatef s’est renseigné sur l’ile de Dawn avant de venir. Il a lu plein de livres et de journaux. Bilan, très peu étaient d’accord. Certains parlaient du royaume en bien et d’autres en mal. Modokoyoloatef lui a surtout retenu une chose ! Ils sont compliqués à Goa. Modokoyoloatef ne sait pas si c’est parce que c’est car les gens sont plus nombreux qu’à Torino ou si c’est autre chose, mais leur système c’est trop compliqué pour Modokoyoloatef. Modokoyoloatef n’aime pas quand c’est compliqué, mais il va persévérer pendant son séjour ici, pour comprendre.


Tout d’abord il y a la noblesse. Apparemment c’est une sorte de bagarre pour savoir qui sera le chef. Sauf qu’ici on ne choisit pas forcement le plus compétent et tout le monde n’a pas le droit de postuler. Modokoyoloatef n’a pas encore compris l’utilité, mais il espère avoir une réponse prochainement. Sauf qu’apparemment le système va peut-être changer après la révolution ici, c’est pas encore sûr. Modokoyoloatef demandera à des gens plus tard.


La révolution ensuite donc. C’est le point important de la mission de Modokoyoloatef car il faut les combattre et les arrêter. Modokoyoloatef est marine, ils ne sont pas nouveaux pour lui, mais il a toujours un peu de mal avec ceux là aussi. Ils ne sont pas d’accord avec pleins de choses et pour faire changer les choses ils se battent. Modokoyoloatef ne s'intéresse pas à la politique, mais Modokoyooatef n’aime pas trop les gens qui usent de la force pour imposer leurs idées. Modokoyoloatef préfère les épreuves et les rituels pour décider de qui a raison et de qui est digne. Modokoyoloatef leur laissera une chance de se rendre et d’arrêter, mais s’ils ne sont pas raisonnable alors Modokoyoloatef les arrêtera. Tant pis. Il n’y aura pas d’autres maisons détruites et de gens innocents blessés tant que Modokoyoloatef sera là, il y veillera.


Le dernier point qui chagrine Modokoyoloatef dans ce pays, c’est comment ils utilisent leurs terres. Ils ont installé leur ville loin de la forêt et de ses ressources et ils ont mis une grande décharge entre les deux. Ils ont aussi installé le seul autre village à l’opposé de l'île. C’est loin, c’est pas pratique surtout avec la montagne au milieu. Ils utiliseraient cette raison comme un prétexte de parcours d'entraînement, Modokoyoloatef comprendrait mais ce n’est pas le cas. Les gens préfèrent la décharge à la place. Il parait que la forêt est dangereuse, mais Modokoyoloatef préfère. On peut se battre avec des animaux féroces et gagner son territoire et sa nourriture. Dans une décharge il n’y a rien à manger et on ne peut pas se battre avec la maladie. Une différence culturelle certainement, mais Modokoyoloatef ne comprend pas. D’un autre côté Modokoyoloatef n’a encore jamais chassé dans une décharge. Il a hâte d’essayer et voir comment les gens là-bas se débrouillent. Il aura sûrement beaucoup de pages à rajouter au livre de ses ancêtres sur la survie.


La place est en vue à présent. Le drapeau de la marine n’est pas loin derrière. Le dos de tous les hommes rassemblés pour cette expédition aussi est visible. Beaucoup de blanc. Beaucoup de dos. Modokoyoloatef n’aime pas cela, cela fait beaucoup de monde pour achever des proies déjà acculées. Dos au mur, leurs adversaires n’en seront que plus hargneux et mordant. Ce n’est pas le style de Modokoyoloatef, mais Modokoyoloatef n’y peut rien. Modokoyoloatef n’aura qu’à être plus rapide que tout le monde et les attraper avant que cela tourne mal. Le problème maintenant de Modokoyoloatef, c’est trouver du papier pour écrire.

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Pied droit, pied gauche, pied droit, pied gauche, tempo militari, la mort au bout du canon et en avant. Au milieu de ses camarades, Spleen suit la cadence. Au milieu des dos sans visages, Zachary suit le mouvement. Au milieu de ces hommes transparents, Zachary n'est plus que l'ombre de lui-même.
Depuis l'asile, depuis cet établissement horrifique, plus rien ne semble vrai.
Les cauchemars sont revenus, des brides de son amnésie, les souvenirs du lapin et des monstres peuplant ce lieu impie. Comment s'appelait cette femme, une lieutenante. Sephania peut être.

La petite Fleur est restée au camp, là où tout n'est que calme et tranquillité, là où la faucheuse ne rôde pas. C'n'est pas une mission pour une jeune fille. Aujourd'hui, au menu, c'est chasse à l'homme. Ainsi va la vie et la voie des hommes. Pour que certains montent, d'autres doivent tomber. Aujourd'hui en est la preuve. Plongé dans ses demi-souvenirs, le speech est passé bien au-dessus de sa conscience. Seuls quelques mots se sont faufilés, "Grey Terminal" "Chasse aux révos".

L'ancien détective soupire, des corbeaux croassent non loin et volent les uns vers les autres : présage de guerre et de mort. Une journée noire se profile.
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Hou que ça me plait pas du tout cette tripotée d'abrutis en rangs d'oignons, tous prêts à en découdre. J'vais pourtant pas trop moufter. Si on m'a envoyé ici, c'est pas par souci de rajouter des troupes au casse-pipe du siècle. Parce que moi et mes deux bras, on fait pas beaucoup de poids dans une affaire comme celle-ci. C'est qu'ils ont rameuté beaucoup de monde. J'pense pas qu'ils tentent la collaboration. Et ça marcherait pas de toute façon. Mais c'est pas pour ça que je suis venu, si j'suis venu c'est plus pour calmer les tempéraments que pour réellement faire les choses selon mes méthodes.

J'allume une tige et j'regarde de loin le petit groupe d'état major. J'y reconnais une tête, et j'souris. Tout à fait son genre à ce vieux Jäak, de participer à ce genre de rixe pour la paix. La paix mon œil. La soumission des factions adverses si on veut pouvoir parler franchement. À côté de lui d'autres gusses au physique plus ou moins original. Un rouk'moute au look sauvage, quelques idiots dépareillés, mais celui que j'attends c'est bien le Morneplume. J'aime bien les gars un peu trop coincés dans leurs idéaux, ils me font marrer. N'empêche, que c'est bien lui qu'on m'a demandé de modérer. Ça va pas être une partie de plaisir. Il est plus gradé que moi le drôle.

Alors j'me faufile dans les rangs pour m'approcher de la petite troupe. J'préfère pas m'y mêler pour le moment. J'finis tranquillement ma clope, serrant les mains au passage à quelques hommes pas franchement rassurés. J'leur cause un poil. Ça doit leur faire du bien de croiser quelqu'un que la tension n'a pas encore mis à mal. C'est vrai qu'à bien y réfléchir, c'est flippant d'aller bourriner la gueule de pauvres révolutionnaires qui n'ont rien demandé d'autre qu'à faire passer leurs idées. Surtout en ne sachant pas si l'on va revenir se pieuter au coin de sa petite femme une fois tout ça fini. De tous ceux à qui j'serre la main, combien reviendront des combats ? Trop peu à mon goût.

Heureusement qu'moi ma p'tite femme, j'lui ai rien promis. J'veux pas m'engager. D'abord pour ce risque constant de crever au combat, mais aussi parce que mon palpitant me cause quelques problèmes. Et j'parle pas là des quelques infidélités qui ont bien du m'arriver de temps en temps, mais bien de ce salopiaud et de ses ventricules, qui enfle régulièrement. J'ai le cœur gros, c'est pas d'bol.

Et voilà que j'ai fini de traverser cette petite masse de sympathiques Marins. Ça s'est un peu détendu derrière moi. Certains ont quitté le garde à vous fixe réglementaire pour s'autoriser un peu de décontraction. Ils fixent tout de même le coin des sergents et autres gradés, au cas où on viendrait leur taper sur les doigts pour indiscipline. Alors, j'me rapproche un peu plus, j'fais un signe de tête à Jäak, qui me renvoie mon salut doublé d'un grognement amical. Toujours un peu bourru l'ami. J'souris, j'fixe un instant la foule, et j'souris.
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« Rien n'est jamais acquis à l'homme. »

Ça, c'est le vieux Howard Turner, le juge l'ayant condamné à quinze ans d'incarcération, qui lui a dit, à Edwin. Et comme de fait, il avait raison, Howard Turner. Rien n'est acquis à ceux qui marchent le long de la route des hommes. Dans le monde des hommes, tout doit s'acquérir, se mériter. Morneplume, lui, trime depuis tant d'années déjà à n'obtenir qu'une chose; son salut. Il s'échine à punir les dissidents et les malicieux, à pourchasser les criminels et les meurtriers, à terrasser les ennemis de la Justice. Tout ça parce qu'il ne peut se résoudre à mourir en ne se sachant pas pardonné de ses exactions. Il veut le pardon de la Justice, sa maîtresse.

Et comme elle est insatiable, cette impérieuse amante.

Le vieux Howard lui avait soufflé ces mots à sa sortie de prison, alors qu'il se cherchait des repères dans un monde qui avait évolué sans lui. La phrase avait éclairé son chemin, s'était elle-même creusé un chemin de sens et de logique dans l'esprit de Morneplume. Rien n'est jamais acquis à l'homme, mais c'est par la force de son front qu'Edwin peut s'assurer de gagner son juste dû. Il s'est muni des yeux vides de Thémis pour juger ses semblables. Triste légende sur North Blue, le Morneplume, que déjà on lui mentionne le nom de Keegan Fenyang. On lui parle de purge. On lui parle de traque. Il doit être là. Il doit lui aussi mettre sa main dans la fange qu'est devenue Goa. Il sera là.

Il est là. Long trench-coat sombre, chapeau haut-de-forme, cigarette coincée entre les lèvres, le regard acéré, paralysant chaque soldat osant défier ses iris. Il se tient tout près des officiers massés devant le gros des troupes, les dépassant tous d'une bonne tête, quand l'ordre est sonné. Il souffre toujours de ses blessures face à Kaltershaft, mais le laisser paraître reviendrait à trahir sa propre doctrine. Se laisser ralentir par de telles broutilles tiendrait du suicide moral. Non. Morneplume ne s'arrête pas pour le repos. Envahir les souterrains, la voilà, leur mission. Prendre la place et y éliminer la vermine. Mission simple pour le Lieutenant qui avance déjà en solo vers l'entrée des tunnels, suscitant les chuchotements des autres gradés -pour la majorité des Sergents- qui semblent le reconnaître ou tout du moins lui prêter une attention certaine. Une chose s'impose à l'esprit de plusieurs. Suivre Morneplume, c'est courir ou mourir.

C'est ne pas se savoir en sécurité, mais aussi se battre pour se garder en vie. Ça, ce sont des choses qui se sentent, mais aussi qui se savent, comme pour l'Agent Rinwald, à qui Morneplume jette un regard froid et désintéressé. Qu'il le suive, Morneplume a besoin d'hommes efficaces avec lui, pas de simples matons révérencieux de la Régulière, il a besoin d'instruments bien outillés pour appliquer sa Justice. Signe du menton au Cipher Pol, mais aussi à ce rouquin qui semble bien campé, efficace et habile, quoique légèrement barbare. Des trappes occultes révélées à tous, des pans de tunnels dynamités à ciel ouvert, à travers des éboulements de gravas et des panaches de fumée, la Marine s'engouffre dans les souterrains révolutionnaires comme un flot braillant et grognant d'hommes armés jusqu'au dent.

C'est la chasse aux gibiers. La sortie du seigneur Keegan et de sa meute de chiens baveux. Morneplume, lui, est ce loup assez rusé qui sait trouver proie même sous le tumulte de tant d'hommes, si bien qu'il s'enfonce dans des tunnels plus sombre, à l'écart de la masse folle de soldats en plein raid des lieux, bousculant au passage un homme qu'il n'a pas revu depuis longtemps déjà.

Écarte-toi, Jäak, je n'ai pas de temps à perdre en m'empêtrant dans ton laxisme.

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Sa vie est un étrange et douloureux divorce.

 J’avais les yeux rivés sur le néant tandis que la pelotée d’officiers donnaient les ordres. On m’avait mis à la tête d’une équipe hétérogène : sous-officiers de la Mouette et leurs hommes, quelques agents du Ciphor Pol. Je regardais le Monde Bleu se ruer vers le Grey Terminal, impatient de débarrasser un territoire déjà meurtri de gens blessés et sans avenir. Pas moi.

 
Edwin lui par contre était toujours le même, anti-lésinerie, agissant parfois excessivement avec des méthodes que même nos supérieurs ne comprenaient pas. Je ne le suivrais pas où je sentais que mes souvenirs allaient encore être nourri d’instant tragique. Pour les autres et pour mon mental. Sans me presser, les mains derrière le dos j’allais à la rencontre des officiers qui m’assisteraient pour l’opération. Je gardais néanmoins un œil sensible et lointain sur mes pensées.
 
Bonjour à vous messieurs… On a pas vraiment le temps, j’aurais proposé du thé mais là… Bon, on a pas des masses d’infos. Keegan est pas un bavard, il veut juste qu’on colle des menottes à un maximum de personne. Non… Non à tous. Et il sait qu’ils sont là. Goa se fait encore piller par des brigands. Qu’est-ce que vous en pensez ?

Je les regardais un instant, rhétorique, je reprenais.

En tout cas moi je pense que c’est sûrement pas au Grey Terminal que les types se cachent. L’assaut, Keegan le prépare depuis un bout de temps. Les révolutionnaires savent se tenir informés. On l’a vu avec l’attaque surprise de Rafaelo. Alors faudra chercher plus loin… On verra ça après.

Mais une seule chose. Que ceux qui sont là pour s’amuser, tuer et s’en vanter après, prennent leurs hommes et suivent le Lieutenant d’élite Morneplume. Je prends le Cœur, lui l’Index.


Aucun mouvement, pas un souffle. Ici, on ne tuerait que lorsque ce serait nécessaire. Et puis on montrerait à cet imbécile, l’élancé au Chapeau Haut, qu’il y avait une autre Justice. J’avais déjà vu trop de morts… Mais je n’oubliais rien de la guerre et de ses stratégies. Mission de grande, faible envergure ou pas, je ne changeais pas mes méthodes de vieux vétérans.
 
Pour ce qui est de la manœuvre : je vais en première ligne : les marines de la régulière viennent ensuite, puis leurs officiers. Ensuite, les officiers d’élite et leurs hommes en ligne de fond. Avec moi, des volontaires ? 

En temps de guerre, la première ligne, on l’appelait celle des sacrifiés. Mais c’est par le courage des hommes qui la composaient que les autres étaient capables de prendre le relais, suivre le mouvement. La nôtre serait assez puissante pour affaiblir l’ennemi, tant, qu’on l’intercepterait dès la seconde… C’était le plan.
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Ce n'est pas le chemin qui est difficile, c'est le difficile qui est le chemin.

Morneplume ne m’avait pas échappé. J’savais pas qu’il serait là. Il était plutôt sur North Blue, me semblait-il. Remarque, il était venu à Luvneel, tout de même… Probablement pour, justement, l’éloigner des lieux de son massacre. Et voilà qu’il était envoyé ici pour une autre tuerie. Ca lui allait bien.
Machinalement, j’touche du bout des doigts mon épaule. A travers le tissu de ma chemise, j’sens la peau cicatrisée, plus dure, moins souple. J’me suis bien remis. Suffisamment pour assurer cette mission.

Malgré tous ses défauts, Morneplume fait le travail quand il s’agit de massacrer des gens. Il a eu Lowell, le Valet de la Révolution qui dirigeait l’escouade de Luvneel. Je ne l’ai pas vu, mais je l’ai su. Il s’est battu avec Kaltershaft, aussi. Le pirate devenu révolutionnaire a pu s’échapper. Ce serait dramatique qu’il soit maintenant présent ici. Dramatique et cruellement ironique. Un round trois ferait sûrement plaisir à l’autre croquemort avec son haut-de-forme.
Du coup, comme le Lieutenant d’Elite est efficace, j’m’apprête à lui emboîter le pas. Mais mon radar à bons plans se met à vibrer fort quand mes esgourdes captent quelques mots. Le nom de Morneplume, aussi. Un petit groupe est légèrement à l’écart du flot de marines qui marchent, qui trottent, qui courent au massacre et à la mort. La leur, possiblement.

Chacun sa merde.

Moi, j’suis pas là uniquement pour buter du péquore révolutionnaire. J’suis pas un larbin de la mouette qui se contente d’obéir aux ordres sans faire preuve de la moindre autonomie, de la moindre réflexion. Sinon, j’aurais pas rejoint le Cipher Pol. J’préfère, comme toujours, frapper là où ça fait mal. Et, à la guerre comme au combat, la tête, ça marche bien.
C’est sûr, c’est plus dur que de faire le chienchien, et d’aller chercher la baballe pour la rattraper. Ça demande à cerveau. Pour ça que la collaboration avec la Marine est généralement difficile. Il faut leur tenir la queue pour aller pisser. Et même quand on leur donne des instructions précises, ils sont pas foutues de les suivre, cette bande de branquignoles. Ou alors c’est juste Morneplume.

Du coup, forcément, j’m’ajoute à ce petit groupe. Le visage engoncé comme il l’est dans mes vêtements, personne devrait me reconnaître. Le seul défaut, c’est que ça m’empêche de fumer. J’tiendrai le coup le temps de l’assaut.
Le plan, apparemment, c’est de foncer en première ligne, couper à travers l’ennemi pour aller direct au poste de commandement. Ça les empêchera de s’enfuir. Ça encouragera les copains, ce dont je me fous royalement. Voilà qui colle exactement à mon état d’esprit, tracer vers les pontes et pas m’occuper du menu fretin. J’marque mon assentiment d’un signe de la tête. Quelques autres en sont, j’m’intéresse pas vraiment à eux. J’vérifie juste qu’ils aient l’air de tenir le coup.
On part au pas de course, nous aussi, du coup. On a pris du retard sur le peloton de tête, déjà prêt à engager l’ennemi.

Et v’là qu’on arrive dans la zone des combats, dans ses putains de souterrains insalubres du Grey Terminal. Ca sera pas facile, mais ça sera.



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Les choses n’ont pas trainé et Modokoyoloatef non plus. Trouver du papier a été facile il faut dire, les sacoches à sa ceinture sont remplis de son équipement habituel. Du coup quand la traque démarre Modokoyoloatef est en première ligne. Le grand homme au grand chapeau ayant pris les choses en main semble lui avoir fait signe de suivre après tout, et c’est bien ce que Modokoyoloatef comptait faire. La réflexion attendra, d’abord la prise d’information. Première approche ? La force ! Les marins rentrent en masse faisant exploser au fur et à mesure les plafonds des tunnels. Rien ne tombera sur la tête de Modokoyoloatef et ses hommes il faut croire. Stratégie simple mais efficace, un peu. C’est bruyant et cela ne marche que dans les zones inhabitées. Modokoyoloatef accélère d’avantage. Tout cela n’est pas le style de Modokoyoloatef après tout. Les tunnels descendent plus profondemment et se dispersent, s’assombrissent, la lumière résistant encore par la flamme des bougies. Trop étroit, trop de monde, le moment de la séparation est venue et les chemins se séparent. Le lieutenenant a pris la première à gauche, Modokoyoloatef prend la deuxième. Et la partie commence vraiment.


Modokoyoloatef trouve ces galeries très différentes de celles de chez lui. Tous ces déchets incorporés dans les murs ne semblent pas rendre tout cela très solide. Le plus dérengeant reste cependant l’odeur. Modokoyoloatef n’est pas chien de chasse, mais Modokoyoloatef aime à pouvoir sentir un minimum l’ennemi. Il est difficile d’affuter ses sens aux lieux quand il faut en restreindre un en même temps. C’est à noter. D’un geste Modokoyoloatef arrête ceux qui l’ont suivi, quelques hommes à lui aussi sélectionner pour cette mission, ainsi que d’autres marins d’élites ou non et même quelques hommes du CP. Il sort alors son livre et y rajoute un feuillet. Modokoyoloatef écrit ses premières constatations sur la survie dans un milieu de ce genre. Première ligne dont il prendra compte pour la prochaine fois, prendre un pince-nez. Au loin on entend de nombreux sons, des cris, des coups de feux et d’autres sons que Modokoyoloatef ne parvient pas encore à identifier. Rien pour la galerie de Modokoyoloatef encore en revanche. Certains s’en inquiètent, d’autres restent calmes et d’autres enfin s’impatientent voulant repartir. Il n’y a pas le feu pourtant, la patience est l’amie du chasseur, elle doit aussi être l’amie du traqueur. Puis surtout Modokoyoloatef a un plan.


Il est sommaire et à beaucoup de pliures et de taches mais la marine a quand même réussi à obtenir plusieurs plans des galeries à force de persévérance. Dommage qu’il ne soit pas complet mais Modokoyoloatef compte bien y remédier. Il faudra du temps pour nettoyer ces galeries après tout, alors autant ne pas négliger le travail de fond. Se remettant en marche avant Modokoyoloatef peut déjà voir le premier problème car le chemin se sépare en trois là ou il ne devrait se couper qu’en deux. Comme c’est … divertissant, le terrain est tellement plus restreint que les bois. Les conditions n’ont vraiment rien à voir.


Modokoyoloatef se demande comment les gens ici se battent dans ce milieu.

On va pas tarder à le savoir chef.


Danny est un homme de Modokoyoloatef ayant l’ouïe encore plus fine que la sienne. La lumière venant de deux tunnels ainsi que derrière la troupe de Modokoyoloatef semble lui donner raison. Ami ou ennemi et combien ? Modkoyoloatef ne le sait pas encore, mais il se demande si tout le monde à le droit à autant d’animation.

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Le cynique est celui qui, lorsqu’il sent un parfum de fleurs, cherche le cercueil.

Et là, j’sentais pas un parfum de fleurs. De la terre, de l’humidité, du moisi. L’odeur des gens à côté desquels j’marchais, aussi, même si j’m’en serais bien passé. Et bientôt, la poudre, le sang, les tripes. J’remonte mon écharpe, confirmant qu’elle cache bien une grosse moitié de ma tronche. Le seul problème dans tout ça, c’est que j’peux pas en griller une.
Je hausse les épaules. On est plutôt profond, maintenant, avec mon groupe. J’sais pas trop comment ils s’appellent, mais c’est pas le plus important. J’essaie de voir lequel reviendra pas. Enfin j’essaierai de les aider, si besoin est. J’me sens en forme. Le temps passé en convalescence –en trajet, en fait, le temps de guérir, fait que j’brûle presque d’en découdre. C’est pas comme moi, ça.

Un rictus moqueur envers moi-même est caché par l’écharpe. J’passe le coude d’un couloir. Des révolutionnaires étaient cachés par un virage. Une dizaine accroupis, une dizaine debout. Tous avec un fusil armé dans les pognes. Ils font feu. Un rapide pas en arrière me replanque derrière le mur mais des éclats dus aux balles s’écrasent sur moi. Mon palpitant loupe un battement.
Plus de peur que d’mal, j’crois que j’ai juste été coupé à la pommette par un caillou un peu tranchant. Heh, qui brûle d’en découdre se brûle les ailes ? J’me colle un taquet pour m’remettre les idées en place. Puis j’cause au groupe de gens qui sont avec moi.

« Hé, ‘sont une vingtaine. Deux rangs de dix. Ils ont fait feu, mais j’pense pas tous. Les autres doivent être en train de recharger. »
Le meneur acquiesce.
« Prenez vos armes à feu si vous en avez. On se décale, on tire, on avise. »
Avec un grognement, j’dégaine un mousquet de mon manteau. Pas mon truc, mais j’devrais réussir à toucher quelqu’un. Pas de mon camp. J’l’arme avec un temps de retard sur les autres, le manque d’entrainement, sans doute.

On jaillit du coin, on tire sans trop viser, on se jette par terre. Les premiers adversaires tombent à terre sous la salve. J’crois que quelque personnes se font toucher de mon côté aussi. Pas moi. J’ai utilisé le Tekkai, au cas où. Le deuxième rang de révolutionnaires est en train de recharger, aussi. J’ai pas envie d’échanger des coups de feu, personnellement.
Un Soru m’amène au milieu de leur groupe. J’lâche mon flingue, il me servira à rien. Deux surins apparaissent dans mes mains, les ennemis paniquent. A retardement, j’me dis que m’foutre en plein dans les révos risque de m’offrir aux coups de feu de mes p’tits camarades. J’essaie de pas m’interposer.

J’fais plutôt m’faire discret, j’suis trop enthousiaste, là, j’fais des conneries, j’ai l’impression. Ma diversion a permis aux copains de venir au corps à corps. Les révolutionnaires, surpris, ont été froidement tués. J’ai écopé de rien, en plus. J’me suis même pas tellement senti en danger. C’est ça qu’est dangereux. La perte de vue de la possibilité de mourir.

Putain, faut que j’me surveille.

Mais, hé, on va pas s’arrêter là, si ? Les tunnels continuent.

Au turbin.


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Les soldats en première ligne malgré des carrures à faire fuir un triple champion de boxe gloussaient face à la violence du terrain. Humide, obscur, froid et rempli de cadavres. D’un camp ou d’un autre, ça faisait toujours peur de se retrouver dans un tunnel où la mort égouttaient ses maux. J’avais connu ça et je continuerai à le connaître, la mélodie des explosions et des tirs de masse. Le bouillie de cervelles, la chair à canons. En moyenne, pour trois tirs, il y avait un mort. Mais le plus effrayant dans tout ça c’était que pour un seul mort, il y avait des milliers de séquelles. Certains s’immobilisaient, l’œil hagard, suppliant le pardon, d’autres faisaient mine de ne pas être touchés, après tout, nous sommes la Justice, nous aidons le Peuple, nous faisons ça pour le bien du Monde ?

En observant les vies de plusieurs hommes s’arrêter, ce n’était plus si simple de répondre affirmativement aux questions qu’étaient censées nous rassurer. On voyait des visages figées, des doigts qui tenaient fermement fusils et couteaux comme s’ils faisaient parties du corps. Mais ils étaient morts. Et plus nous gagnions du terrain dans ces tunnels, plus j’abhorrais mes supérieurs. Plus que mon cœur, c’était mon âme qui se déchirait. Les sifflements, l’odeur et les pas fragilisaient mon commandement, mais je tenais bon. Comme je l’avais toujours fait.

On s’arrête !

Plusieurs tunnels. Plusieurs chemins.

Formez cinq groupes, rapidement ! Pas de groupes sans officiers, vérifiez les entrées. Un coup, des ennemis, deux coups, R.A.S, plusieurs coups… des ennemis. Vite !

Sans attendre, je prenais celui qui semblait être le plus dangereux, celui du milieu. Ça ne pouvait pas être une impasse, certainement le prolongement de celui dans lequel on circulait, alors, ça signifiait des hommes armées. On tirait deux coups au loin, premier R.A.S, et on venait nous rejoindre aussitôt.

Ancienne habitation de notre côté… Des morts et des rats. C’est tout.

Deux autres coups…

Bien, on continue !

Au fur et à mesure qu’on avançait, l’air puait de plus en plus, et ça devenait difficile de respirer. Les gouttelettes pullulaient les alentours et c’est là que j’ai sentis la merde. Baisés… Mais c’était trop tard.

Plusieurs coups qui venaient des deux autres tunnels. Et nous, on était dans une impasse. Des corps sans vie, des restes de vie, c’était pas le bon tunnel.

Merde ! On va au renfort !

Affaiblis, mais pas débiles. Et ils nous avaient eus, prévoyant le chemin que j’allais prendre.
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Le temps d'apprendre à vivre, il est déjà trop tard.

Il pourrait hurler, il pourrait supplier, il pourrait gémir ou appeler à l'aide, mais effectivement, il est déjà trop tard. Trop tard pour ramener ce gamin perdu dans les ténèbres vers la vraie lumière. Il se cramponne avec panique à la poigne de Morneplume, rigoureusement cerclée autour de son cou et de sa bouche à la manière d'un bâillon qu'on passe à un otage. Toutefois, il n'y pas d'otage ici, il n'y a que Morneplume, une dizaine de cadavres fusillés, et ce pauvre gamin qui ne pourra jamais apprendre à vivre. Car pour lui, il est trop tard. Le monde lui a laissé sa chance, la Justice l'a mis à l'épreuve, mais il n'a fait que la trahir, rejoignant les idéaux des dévots du Mal que sont les révolutionnaires. Il est trop tard pour réorienter son parcours, il est trop tard pour lui laisser une chance. Il continue de frapper la main de Morneplume avec la force d'un moribond, incapable de desserrer la Poigne de Fer qui lui coupe le souffle et lui broie la mâchoire.

Pardonnez-moi, mais "Va te faire foutre connard" n'était pas la réponse à mon interrogation, pourtant très précise.

CLAC.

Les yeux révulsés, le cou brisé, le révolutionnaire tombe mollement contre le sol rocheux de l'alcôve, là où lui et ses camarades ont embusqué Morneplume. Ses petites bouclettes blondes se tâchent dans la poussière et la fange qui couvre le fond du tunnel, il n'a même pas de poils au visage, peut-être dix-sept, voire dix-huit ans. Déjà trop tard pour être à nouveau guidé par la Justice. Sans un regard, Edwin retire ses gants blancs tâchés de carmin, puis les jette négligemment sur le sol, il devra s'en procurer d'autres. Dommage. Se séparant du sergent indigène et de son escouade, il s'est engagé seul dans ce boyau où l'attendaient ces pauvres gamins qui n'ont pas fait long feu face à lui. Il les a fusillé, broyé et écrasé, sans prévenir, sans même une once de vergogne. Tout ce que ces félons méritaient, après tout. Il a osé poser une question, une seule et simple question. Où se trouve votre leader ? Demande clichée et horriblement prévisible, mais à la réponse ô combien utile lorsqu'on comprend que le courage de ces faibles idéalistes ne tient qu'à la tête d'un leader charismatique bien enfoui dans les sous-sols. Si Edwin pouvait le trouver lui, leur meneur, le Roi des Ordures, la mission se verrait gravement écourtée et rondement menée.

La Justice n'est pas un plat dont on se délecte. En contrepartie, il se mange chaud.

Il s'enfonce plus dans les profondes et sombres artères, laissant derrière lui la scène de massacre qu'il a perpétrée. Seuls brillent dans la pénombre ses froids iris qui guettent sons et mouvements, mis en alerte par le simple clapotis des gouttes d'eau suintant du plafond. Loin, bien loin de là où il vient, il perçoit encore les échos des tirs et des explosions. Sa vision s'adapte et il distingue les reliefs et les contours du boyau… qui se sépare une nouvelle fois en trois chemins distincts. Morneplume soupire, préférant habituellement jouer le rôle du minotaure plutôt que celui de Thésée, puis se tire une cigarette. Il craque une allumette, puis crache une bouffée avant de se remettre en route. Peu importe désormais, il se perdra très certainement dans ces dédales. Ainsi, il ira tout droit, toujours pour s'enfoncer plus profondément dans les souterrains et peut-être débusqué ceux ayant de véritable raisons de se terrer aussi loin.

Hm ?

Soudain. Mouvement derrière lui, respiration. Réflexe.

Son six-coups fuse de sous son trench-coat alors qu'il fait volte-face et braque son arme vers l'endroit où il a perçu le son, la cigarette fichée au coin de ses lèvres.

Montrez-vous, homme de l'ombre.

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Une voix fait sortir le marine de sa rêverie, le laissant dans un endroit glauque, nauséeux. Un homme au visage figé, une cigarette aux lèvre et une arme à la main, se matérialise littéralement. Le ciel a laissé place aux égouts et les nuages ont été remplacés par les détritus. Spleen, toujours à l’ombre, est pris par la peur, un sentiment bien connu d’oubli. Une zone morte dans la mémoire, comme si les derniers souvenirs se supprimaient d’eux même. En clair, un trou noir. Cette absence n’est pas la première mais elles devaient avoir cessé pour de bon. Plus de trois mois sans accident majeur… étrange. Rien a changé pourtant… à moins que la non-présence de Fleur y soit pour quelque chose ? Impossible de vérifier maintenant en tout cas.

Yeux dans les yeux, le marine expulse une large vague blanche dans les airs tandis que l’amnésique serre les poings pour reprendre contrôle de son coeur et sortir de sa pseudo-cachette. Avec son costume bleu et blanc, il a vraiment l’air d’un con, d’autant plus qu’il ne porte que ça. Une explosion au loin se fait entendre, le faisant tressaillir par réflexe. Merde… c’est vraiment la guerre. Les derniers souvenirs dont il se rappelle son quasiment ceux du discours. Quelques hauts gradés motivant les troupes, les lignes qui se forment et d’un seul coup, il se retrouve ici. Perdu au milieu de déchets en compagnie d’un mec qui n’a pas l’air commode. Malgré la puanteur, une odeur de poudre et de sang se faufile jusqu’à mes narines. Lui ? Certainement. Toujours Yeux dans les yeux.

Cherchant dans sa poche, il attrape son unique paquet mou de “Malbaré”. Donnant une pichenette dans le fond, la clope saute comme par magie hors de son contenant pour venir se coincer entre les lèvres du marine. Quelques secondes plus tard une allumette craque, projetant sur les murs du tunnel les ombres dansantes des deux hommes. Yeux dans les yeux, il tire une latte franche et honnête avant de la recracher tout en disant:


-Çà a commencé depuis combien de temps ?
-...?
-Et heuu, on est où ?
- Ça a commencé depuis moins d’une petite demi-heure, si vous voulez tout savoir, Sergent. Nous sommes dans les souterrains du Grey Terminal, dans un boyau que j’ai préalablement nettoyé.
-Vous êtes qui ?
- … Je suis le Lieutenant d’Élite Edwin Morneplume. Et je dois vous avouer que j’apprécierais vous retourner la question.
-Zachary Spleen, mais appelez moi Spleen, ou Zach ou Zachary en faite. Et donc, vous faites quoi par ici ?
- Hm. Eh bien… Je traque les révolutionnaires.
-Et bien... allons-y.
- Ah. Je vois. Allons-y, Zachary Spleen.

Le tunnel est vraiment sombre, mais le corps humain bien fait: il s’habitue à beaucoup de choses. La tristesse, la douleur, l’obscurité. Seul l’esprit fléchit, mais pour le moment tout va bien. Pour combien de temps ? Même Zach ne le sait pas. Une absence est si vite arrivée. Edwin en avant, le marine suit son supérieur sur la pointe des pieds, mais pas trop. Faut dire que le sol est glissant, sans compter tous les détritus qui le parsème. Faudrait quand même éviter de se ridiculiser en tombant comme une merde dedans.

Le tunnel semble ne plus finir et ne jamais avoir commencé. Seul nos cendres rougeoyantes éclairent, du mieux qu’elles peuvent, ce puits sans fond. Même les tambours de guerre ne parviennent plus jusqu’à nos oreilles. D’un mouvement Edwin fait signer de jeter le mégot, ordre aussitôt suivi par Spleen. Loin, bien loin, un petit cercle blanc se détache de l’obscurité. Une sortie ? Une salle ? La liberté ou la mort ? Le seul moyen de connaître la réponse et d’y aller. Ni une, ni deux, les deux mouettes s’y dirigent avec assurance. Assurance, certes, mais pas sans discrétion.
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C'est qu'il me cause de sacrés soucis le Morneplume. Enfin je le retrouve. À peine le temps de tailler la bavette à la jolie lieutenante brune à côté de moi que le haut-de-forme s'était échappé. Pouf. Et bien entendu, pas moyen de savoir rapidement par où il était passé. Alors quand je le vois avancer dans les dédales du Grey T aux côtés d'un autre Marine, prévenu par quelques soldats attentifs, j'accélère le pas et j'me l'file de pas trop loin. Un coup de briquet et la fumée m'apaise les poumons. J'sens déjà le contrecoup du petit sprint.

Le lieutenant a l'air plutôt calme, mais la présence d'un corps inanimé quelque mètres derrière lui me fait dire qu'il a déjà fait du vilain. J'essaie d'capter quelques bribes de la conversation, rien de bien méchant. L'autre gusse à l'air simplement paumé et Morneplume me fait toujours autant froid dans l'dos. Mais j'ai beau dire, beau penser que ses méthodes me plaisent pas du tout, c'est quand même un sacré élément. J'sais pas qui est l'autre à ses côtés, mais dès que le vieux Marine lui ordonne d'éteindre sa tige, il s'exécute. J'fais de même, pas encore envie qu'il remarque ma présence. Mais déjà j'vois la raison de l'extinction du mégot. Et j'me sens prêt à modérer les pulsions de Monsieur Purge.

Mon rythme cardiaque est pas redescendu, j'suis au radar, j'me sens bouillant. De plus en plus au fur et à mesure qu'on se rapproche du halo de lumière blanche devant nous. C'est sans doute un piège, je le sais bien. Les deux autres gusses devant moi aussi certainement. Mais bon, pas le choix, faut bien trouver le moyen de passer le temps en attendant que tous les serviteurs sanguinaires du gouvernement que j'aurais pas pu modérer aient terminé de massacrer cette fourmilière révolutionnaire.

Bref, j'retrousse mes manches, j'analyse la situation du mieux que j'peux et je m'élance aux côtés des deux Mouettes avant qu'ils n'atteignent la lumière blanche. Mieux vaut qu'ils me repèrent comme leur allié avant d'être embarqué dans une quelconque mêlée. Sinon, un coup de surin trop rapide a vite fait de mettre un nouveau venu six pieds sous terre.

« Alexandre Kosma, sergent d'élite, que j'leur susurre rapidement. »

À peine un acquiescement de la part du lieutenant. L'autre tente de me dévisager un instant mais la pénombre est telle qu'il n'a probablement pas pu bien voir ma bobine. J'fronce les sourcils. Le Morneplume ne nous a pas donné de plan d'attaque. Il ne veut pas de survivants. Son but, obtenir les informations qu'il cherche, mais il ne donnera pas deux chances à chacun des clampins d'en face de les lui donner. M'fait rigoler le bonhomme.

On avance doucement, sans faire de bruit. J'essaie de diminuer au maximum mon rythme cardiaque, mais voilà ; pas facile. J'ai beau avoir l'expérience de ce genre d'expéditions, j'ai toujours autant mal au cœur pour ceux qui vont clamser. Kosma, ceux qui vont mourir te saluent. On arrive à la limite de la partie non éclairée. Et j'les vois, petit groupe de cinq révolutionnaires, les mains à proximité de leurs armes, aux aguets. Ils attendent. Ils savent. Éclairés par la simple lueur fébrile de quelques bougies et d'une lampe à pétrole aux parois noires de suies. Ils sentent la peur. Au moindre bruit suspect, ils tireront, désordonnés. Ceux-là n'ont pas l'habitude des attaques frontales, ils n'ont pas l'entraînement nécessaire pour garder leur calme.

« Morneplume ! »

Mon appel préventif n'a pas la force d'arrêter le lieutenant, qui déjà a parcouru la moitié du chemin qui le séparait du petit groupe. Pas le choix, je lui emboîte le pas. L'autre sergent me devance de quelques pas. Pam. Un homme à terre, et un fin panache de fumée s'échappe de l'arme du vieux Marine. Quelques tirs désordonnés dans notre direction, puis un fatras pas possible pour recharger. Des bleus. Tout se passe très vite. Un coup de crosse sur la tempe et ils ne sont plus que trois à tenter de défendre leur peau. Pas très efficace comme avant garde. Spam, le canon du lieutenant retentit de nouveau.

« Stop. »

Le gradé ne se retourne même pas, il arrache une arme des mains du révolutionnaire tremblotant, tandis que l'autre maîtrise le dernier. C'est de la folie. Les gars ont même pas eu le temps de pisser dans leur froc. Le regard haineux d'Edwin Morneplume se retourne lentement vers ma pomme, l'arme toujours plantée sur le merdeux qu'il s'apprête à faire causer.

« Quelque chose ne va pas sergent ? »

Son dernier mot a quelque chose de réducteur dans sa bouche. Il est l'autorité. Il ne supportera pas que je lui fasse la leçon. Chouette. Je sentais que ça serait une partie de plaisir. Bon, qui ne tente rien n'a rien.

« Je vais m'occuper d'interroger ce gamin, j'fais en désignant sa victime.
-Faites, ça ne changera rien au résultat.
-Vous devriez vérifier si personne ne vient, le manque d'entraînement de ces hommes ne me dit rien qui vaille.
-Moi non plus, j'entrave celui-là et je vous suis lieutenant.
-Tuez le, Spleen. Mort il ne nous causera plus de...
-Non.
-Vous dites sergent ?
-Ne le tuez pas, ce jour-ci sera suffisamment sanglant pour qu'on...
-J'ai dit tuez-le ou je le fais moi-même. »

Eh bien, on peut dire qu'il ne faillit pas à sa réputation. Je regarde le Spleen en question. Il ne le tuera pas. Pas le genre à tuer par plaisir, ça se voit tout de suite. Me reste plus qu'une solution. Un p'tit sourire confiant à l'adresse de l'autre sergent et j'franchis les quelques pas d'usage pour me retrouver nez-à-nez avec Morneplume.

« Loin de moi l'idée de désobéir aux ordres, mais non, vous ne le tuerez pas.
-Ah ? Que me vaut cette audace, sergent ?
-J'ai sur moi un papier me chargeant de garder un œil sur vous lieutenant.
-Fort bien, gardez un œil. »

Le mouvement de son bras est rapide, et j'ai à peine le temps de dévier son membre qu'il a tiré. L'homme s'effondre en hurlant. L'abdomen déchiré. Bon, connerie de ma part, il ne se laisse pas impressionner. Plus qu'à achever le malheureux. J'lui enserre la gorge et crac, plus de cervicales.

« Vous savez sergent, j'arrive toujours à mes fins. Et si jamais ce petit groupe n'était pas un leurre destiné à nous tendre un piège, il y a fort à parier que le cri de ce bonhomme aura rameuté du monde. Je vous félicite.
-Parce que les coups de feu non ?
-Mieux vaut ne pas entrer en conflit, intervint Spleen. Il vaut mieux se préparer à une attaque.
-Je les trouve plutôt lents à réagir s'ils voulaient vraiment nous attaquer. Mais soit. Sergent Kosma, vous avez cinq minutes, pour le faire parler. Si, d'ici ce laps de temps il ne nous a pas indiqué où était situé son chef, c'est à moi qu'il aura affaire.
-Pas de soucis. »

Effectivement, faire parler les gens, c'est mon domaine. C'est même un des exercices avec lesquels j'me sens le plus à l'aise. Alors j'me grille une petite clope, et j'demande au gamin trempé et tremblotant si ça l'intéresse de s'détendre les poumons. Pas de refus qu'il dit. La menace d'un interrogatoire avec Morneplume le rendra d'autant plus facile à faire parler. J'prends mon temps. Y m'demande ce que c'est c'goût bizarre.

« Eucalyptus mon gars. C'est bon contre la tension.
-Mmh... Le mec, là, au chapeau, c'est exactement pour combattre ce genre de gars que j'me suis engagé.
-C'est souvent pour ce genre de gars que les gens bien s'engagent, que ce soit côté de la Mouette ou chez vous. Moi j'me suis engagé pour éviter que ce genre de types ne fassent trop parler d'eux. Le massacre des pauv' gars c'est pas mon genre.
-Mh. Que faites vous ici alors ?
-J'surveille le chapeau. Et aussi parce qu'on me l'a demandé. Ça vient d'en haut. Les ordres tu sais...
-Je sais. »

J'savais que toucher un point sensible serait bon. Autant titiller un peu la corde, elle finira bien par rompre. Alors j'lui demande pourquoi lui et ses quatre autres compères étaient plantés là, au casse-pipe, alors que c'est à peine si une dizaine de poils leur chatouillait le menton. Des gamins. Des gamins avec un grand cœur, exploités par des cerveaux sans doute un peu trop radicaux. J'appuie sur le point sensible du bonhomme. Il est pas con, il sait bien qu'il a été « sacrifié » pour des instances plus hautes. Ses potes nous sont toujours pas tombés sur le râble, c'est bien qu'ils n'étaient là que pour nous faire perdre du temps. Une vraie embuscade avait sans doute lieu plus loin, avec des gars entraînés. Ici, on nous retenait le temps de s'organiser.

« Alors mon gars, j'ai qu'une question pour toi : où est le gars qui dirige les opérations ? Si on le choppe vite, il y aura sans doute moins de victimes. J'peux te sauver ta gueule, mais celle de tous tes petits partenaires dans ce dédale de galeries, j'en doute. À moins qu'on coupe la tête révolutionnaire.
-J'sais pas. Sûrement plus loin par là. Le couloir est long et y a plein des nôtres qui pullulent sur le chemin. Moins on en sait, mieux ils se portent, alors on sait rien, sauf les noms de nos partenaires et celui de not' supérieur direct.
-Et vot' supérieur direct ?
-Là. »

J'savais bien que le Morneplume avait agi trop vite. Va falloir se démerder. J'assomme le gamin puis j'sors une petite seringue de ma poche. Faut pas que j'en uses trop, si jamais j'en ai besoin... Mais j'lui injecte quand même mon médoc. Sur une personne normale, ça ralentit considérablement les battements du cœur. Sauf si des couillons veulent vérifier qu'il est bien mort avec une balle dans la tête, celui-là risque pas de mourir.

« Morneplume.
-Kosma ?
-Par là. »
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Définitivement, il n'aurait pas pu tomber sur pire. Le Sergent d'Élite Kosma, un genre de semi-psychologue de guerre spécialement engagé pour le surveiller expressément. Les officiers de East Blue ont entendu parler de lui, ils savent que la demi-mesure n'est pas le pain quotidien de la Justice de Morneplume, ils ne veulent pas de lui comme meneur, ils le tiennent à l'écart. Voilà pourquoi il le file comme un espion, ce Kosma, pour s'assurer que sa Justice ne soit pas totale. Il est une entrave, un laxiste et un faible qui s'impose à lui comme le messie des dévots du Mal. Il les protège, les garde en vie. Idée stupide. Si eux ne terminent pas leurs jours dans les tréfonds de ces tunnels, qui sait combien de nouveaux révolutionnaires pulluleront à la surface dans un mois, voire deux ? Il le sait, Morneplume : trop.

Spleen, lui, est l'exemple parfait d'une tête brûlée de la Régulière ; un élément changeant, trop facilement influençable et influencé par Kosma, perdu dans une guerre dont les enjeux le dépassent. Il n'est qu'un sous-officier sans jugement, trop faible d'esprit pour se résoudre à n'abattre qu'un simple révolutionnaire. Kosma le perturbe, empêche Morneplume de faire rallier la véritable Justice à ce pauvre Zachary dont l'esprit semble loin d'être en bonne santé. Il ne peut se fier à aucun d'eux, surtout pas à ce Sergent d'Élite teigneux qui pense tirer son autorité d'un ridicule bout de papier. Il n'y a plus d'autorité que celle de la Justice, dans les boyaux du Grey Terminal.

La prochaine fois, Edwin les tuera tous. Et Kosma ne pourra rien y faire.

Ils progressent dans la pénombre, s'acharnant à suivre un seul boyau sans jamais s'en défaire. Les coups de canon ne sont plus audibles depuis longtemps lorsque, au tournant d'un tunnel, une silhouette les fuis en s'enfonçant dans les ténèbres. Il braque son arme, Morneplume, le bras droit comme un javelot. Il tire, mais Kosma s'agrippe à son bras et dévie le tir. Le plomb ricoche et se fiche dans un mur de déchets, l'écho du coup de feu s'engouffre dans les profondeurs du Grey Terminal, alors que le silence reprend ses droits sur leur position. Avant même que l'écho ne se soit éteint, les pupilles d'Edwin se braquent sur Kosma. Elles crachent la mort et un blizzard polaire, une étreinte arctique qui foudroie le Sergent d'Élite alors que la poigne de Morneplume le saisit par le collet pour le soulever de terre et l'encastrer dans la paroi de détritus du tunnel.

Kosma ...
Vous aviez pas à le tuer ! C'était qu'un fuyard. Un déserteur. Probablement un gamin de plus qu'a pas demandé à faire partie d'un massacre comme celui-là...
N'osez plus jamais dévier un de mes tirs, Alexandre Kosma. Qui sait si ce "simple fuyard" n'est pas allé chercher des renforts auprès de ses supérieurs.
Eh bien si c'est le cas aussi bien le suivre plutôt que de l'abattre, ça nous mènera à ses chefs !
Je n'accepterai plus jamais un tel écart de conduite de votre part, Kosma, auquel cas je vous considèrerai comme un traître et vous abattrai en fonction des lois sur les Mesures de Guerre, est-ce bien clair ?


Son ton comme le feu qui dévore le bois, crépitant et ardent. Un fouet qui claque dans le silence des tunnels. Une menace plus qu'un avertissement. Un serment plus qu'une simple idée.

Spleen, à l'avenir, vous me ferai le plaisir de surveiller les faits et gestes du Sergent d'Élite Kosma, ai-je votre plein accord là-dessus ?

Spleen ?


Edwin se retourne vers le principal intéressé… pour réaliser que celui-ci est pris en otage, une lame sous la gorge, par un homme encapuchonné.

Les assassins de l'Umbra.

Il ne l'a jamais vu approcher, ne l'a jamais entendu, et c'est le même scénario pour les six autres ombres qui se détachent soudainement de l'obscurité. Définitivement, il n'y a rien de potentiellement pire, comme l'aurait dit Alric Rinwald lui-même.



Dernière édition par Edwin Morneplume le Jeu 22 Jan 2015 - 19:20, édité 1 fois
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Une lame, sous la gorge de Spleen, apparaît du néant tandis qu'une silhouette encapuchonnée fait son apparition. Deux puis quatre et, au final, six personnages mystérieux, tels des lapins sortant tout droit d'un chapeau sans fond. Sauf que là, le chapeau sent l'excrément et est gluant. Leurs gestes sont vifs et pourtant inaudibles, de vrai pro'. La respiration de l'homme n'est qu'à peine perceptible au marine malgré sa proximité. L'aura du groupe est forte, oppressante avec une facette sournoise. Autrement dit, rien de bon.
Ses deux compagnons ? Toujours en train de se crêper le chignon, ils n'ont pas encore remarqué leur présence. L'ancien détective va pour ouvrir la bouche, mais l'arme s'appuie, comme par réflexe, un peu plus sur sa peau. Lui laissant, dans la bouche, qu'un avertissement étranglé et un zeste de salive.
Heureusement, si on peut dire ça comme ça, Edwin et Kosma se retournent vers moi, apercevant enfin la nouvelle menace. Bien plus dangereuse que le jeune fuyard, bien plus mortel, bien plus nombreuse.
Des picotements commencent d'ailleurs à le prendre sous la gorge, il sent un doux filet couler le long de sa glotte, et il n'aime pas cette situation. Mais alors pas du tout. Autour de lui, des révolutionnaires aguerris prêts à se donner corps et âme pour protéger leurs camarades et repère. De l'autre, un marine totalitaire sans la moindre nuance.
À tous les coups, ça va mal se terminer. Spleen a le nez pour ces choses-là, une sorte d'habitude si vous préférez. Et, à vrai dire, il ne s'est jamais senti aussi mal à l'aise qu'aujourd'hui. A part, peut être, lorsqu'il s'est réveillé nu dans une ruelle de Jaya, mais ça, c'est une autre histoire.

Quoi qu'il en soit, le voilà finalement, sans vraiment savoir comment ni pourquoi, dans une situation des plus tendues. Les deux camps s'observent dans le blanc des yeux un moment. Encore quelques secondes et la détonation mortelle aura lieu.
Alors, au lieu d'attendre qu'elle arrive, Spleen tente quelque chose de simple, prévoyant et sans vraiment de chance. Il le sait, ils le savent, on peut lire en lui comme un livre ouvert, mais il tente quand même. Attrapant, la main armée de son adversaire, il l'écarte au maximum de sa gorge avant de mordre dedans. Réflexe animal qui pousse l'homme à se déplacer légèrement et donc lui laisser une porte de sortie.
Étroite certes, mais réelle. Spleen s'y engouffre, ils le voient, une lame s'envole, mais est déviée par l'un des deux marines. Jour de chance ? Tirer une carte : perdu, votre vie ne tient toujours qu'à un fil.

D'un rapide coup d'œil, il admire le paysage et plus particulièrement les objets au sol. Un jerrican n'est pas loin. Il s'y précipite, l'attrape, roulade préventive et, avec une vitesse maximale, allume une allumette un large sourire sur le visage. Au-dessus, du goulot, la petite flamme vacille au grès du faible courant d'air du tunnel. Bon... Quand il faut, il faut !


-Courez ! Crie Spleen, tandis que l'allumette disparaît dans l'ouverture et qu'il jette le bidon. Le but ? Une simple diversion. Essence ou non, rien ne sert de foncer dans le tas, aucune chance possible face à ces mecs.
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Trompés de chemin. Putain. L’autre chef s’était planté. Bon, moi aussi, j’aurais fait pareil. N’empêche. On courait pour remonter. La situation puait le sapin, comme celui que les morts au fond du boyau n’auraient pas pour leurs cercueils. J’porte la main à mon paquet de clopes puis à mes lèvres. Réflexe. L’écharpe me cache toujours la moitié du visage.
On rencontre personne jusqu’à avoir fait tout le chemin en sens inverse, jusqu’au point où les tunnels se séparent. On sait lequel prendre, celui juste à notre droite. Il commence tout étroitement, ce qui nous avait induit en erreur. Mais il s’élargit vite jusqu’à pouvoir laisser circuler trois hommes de front.

Les coups de feu continuent de retentir. C’a l’air de barder sec, tout ça. Encore que vaut mieux ça qu’un calme d’outre-tombe qui serait indicateur de défaite pour l’un des deux camps. Au moins, en l’état, on peut toujours faire pencher la balance.
Puis les bruits de pétarade s’arrêtent. On ralentit le pas, prudents. On sait pas ce qui nous attend un peu plus loin. Le tunnel est tortueux, redevient plus étroit. Y’a un peu de lumière qui vient de la zone des combats. Mais c’est dur de se repérer sous terre. La façon qu’ont les sons de se réverbérer ou au contraire de s’étouffer m’permet pas d’en tirer quoi que ce soit. J’suis pas une taupe ni une chauve-souris, et j’ai pas l’habitude d’aller fouiller la merde aussi profondément.

On arrive précautionneusement dans une pièce qui doit faire une dizaine de mètres carré grand max. Trois marines sont allongés par terre, deux morts par balle, le dernier par un coup de lame à la jugulaire. Son sang s’écoule encore lentement, imbibant la terre, mais ses yeux vides ne voient déjà plus rien.
J’regarde plus loin juste le temps de voir une cape grise disparaître dans un tournant. J’pars au pas de course pour la suivre. Les révolutionnaires sont morts par balles, aussi. Pas besoin d’être un génie pour se rendre compte que Cape Grise est passé avec un truc tranchant là où les marines avaient triomphé plus ou moins de leur embuscade.

Le chef de notre petit groupe a réagi comme moi, résultat, on se retrouve à galoper de concert. J’le laisse me doubler de bon cœur. Pas forcément envie de rester en première ligne, à bouffer les pièges et les tirs. J’laisse ça aux mouettes, c’est leur boulot. Et ce Cape Grise, c’est un gars vachement suspect qui trotte aussi vite que nous, se maintenant sempiternellement hors de portée.

J’remonte la file de Marines d’une légère accélération pour me foutre à la hauteur du gradé :
« T’as vu comment il nous sème pas ?
- Oui, j’ai essayé d’accélérer ou de ralentir. Il reste toujours au bord de notre champ de vision.
- Ca pue le traquenard.
- Oui.
- On y va comme ça ? »
Il hoche la tête en économisant son souffle. J’vais pour me remettre à la queue du peloton quand une question me vient.
« T’t’appelles ?
- Jäak Hadži, sergent d’élite. Toi ?
- Angus. Cipher Pol 5, agent de première catégorie. »
Les vieilles habitudes ont la vie dure.
« Enchanté, Angus. Les gars, préparez-vous, trop longtemps que l’appât gigote sur l’hameçon, ça devrait plus trop tarder. »

Les prises se raffermissent sur les armes. Les regards s’aiguisent, les pas se précisent. Ouais, on est une lame prête à couper jusqu’à l’os, une balle prête à transpercer sec ce qui se foutra devant nous. Dans notre poursuite, on a doublé sans y prêter plus d’attention que ça un paquet de tunnels secondaires. Ca m’étonnerait qu’à moitié qu’ils soient pleins de révolutionnaires armés et hargneux jusqu’aux dents. Une vraie souricière, ces boyaux de merde, putain. J’ai essayé de faire une carte mentale, j’ai vite abandonné. Même au calme, sans la guerre, j’en aurais probablement pas été capable.

Puis, sans prévenir, le déluge. Un déluge de terre, s’entend. Une mur explose à notre droite, projetant des mottes, du sable. Le souffle de la grenade nous projette au sol, mais on s’relève vite, pour la plupart. On est même quasiment en formation, que j’note l’air de rien. Ca arrive par devant, les révolutionnaires. Par derrière aussi, mais ça surprend pas grand monde.
Côté marines, ça se jette au sol derrière les débris de l’explosion pour avoir une couverture, aussi maigre soit-elle. La première volée de balle loupe pas les révolutionnaires. Ils doivent être une bonne trentaine, et à leurs faciès déterminés et calmes, ce sont pas les bleusailles qu’on a affrontées jusque-là. Ceux-là sont prêts à se battre pour leur conception de la liberté, pour pouvoir continuer à vivre dans ce trou à rats malpropre.

Planqué derrière une motte de terre, j’essaie de viser des trucs avec mon flingue. J’suis pas si nul que ça, juste pas un cador. Puis j’passe une partie du temps en Tekkai, des fois que. J’jette un coup d’œil du côté de Jäak, voir s’il prépare une charge héroïque.

Et Cape Grise dans tout ça ? J’doute pas qu’il va nous tomber dessus comme la vérole sur le bas-clergé dès qu’on y pensera plus. J’l’attends, moi, putain.

Mais d’abord, survivre à ça. Quelle sale histoire.

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Putain. La putain de chance de cocu. J'suis persuadé que ma d'moiselle est dans les bras d'un autre en ce moment même. Sinon, comment expliquer le fait que j'sois toujours en vie ? L'intervention de puissances occultes, j'y crois pas trop, personne voudrait sauver Morneplume. Ou alors ce Spleen est plus que ce qu'il laisse paraître ? Mmh... Quoi qu'il en soit, ce serait pas mal qu'on s'trouve une planque rapidos. Six assassins de l'Umbra sur le dos, ça laisse rarement une grosse marge de manœuvre. D'autant que si on continue de courir comme ça, d'une je vais avoir un problème, de deux, on va se faire tomber dessus par un groupe de révos. Et ce serait ballot.

« Spleen, rappelez moi de toujours vous prendre avec moi quand j'me fourre dans des emmerdes comme ça, que j'lui dis entre deux bouffées d'air.
-J'ai profité d'un moment d'inattention.
-Ou alors, ils nous ont consciemment libérés. Je ne sais pas ce qu'ils ont derrière la tête, mais ça ne m'empêchera pas de les annihiler un à un.
-Juste une question, Morneplume, vous aimez les animaux ?
-Pourquoi cette question sergent. Vous commencez à me courir. Si la situation n'était pas aussi critique.
-Kosma, Morneplume, Stop, ici. »

Spleen désignait un petit renfoncement dans le mur où ils pourraient souffler un peu sans se faire repérer depuis le couloir. Sans perdre de temps, les trois hommes se collèrent à la paroi. Edwin sortir son arme. Il ne pourrait pas abattre six assassins entraînés tout seul. Il fallait trouver un moyen de se débarrasser de ces gêneurs qui pouvaient les rattraper d'un instant à l'autre.

« Vous n'avez pas répondu à ma question, plaisanta Kosma.
-Ce n'est pas le moment sergent. Trouvez plutôt un moyen de vous rendre utile. Bravo Spleen, sans vous on aurait pu courir pendant longtemps.
-Merci, mais ça ne nous offrira qu'un court instant de répit. S'ils nous retrouvent, nous sommes cuits.
-Ils nous veulent vivants, sinon nous serions déjà morts.
-Oui, c'est ce que je me suis dit aussi. Je ne sais pas bien pourquoi ils s'offriraient le luxe de laisser une chance de survie à Morneplume, mais ils n'ont même pas abîmé son chapeau.
-Vous vous croyez fin Kosma ?
-Arrêtez de vous disputer s'il-vous-plaît, vous réglerez vos conflits plus tard. »

Il a pas l'air de s'poiler autant qu'moi le débris. Tant pis. Autant rester un peu sérieux jusqu'à ce qu'on sorte de ce merdier. La solution la meilleure serait de tomber sur un autre groupe Marine, mais j'envisage assez peu ce genre de coïncidences dans un tel merdier. Du coup, faudrait tomber sur quelque chose d'un peu moins difficile à obtenir. L'éboulement d'un plafond ? Nope, pas envie de finir sous des décombres que j'me suis moi-même fait tomber sur l'coin d'la caboche. Plus qu'une solution à mon sens, appeler des renforts. J'aime bien agir en solo, mais là, j'vois pas trop comment...

« Lieutenant d'élite Morneplume, je demande des renforts. Avons été surpris par des assassins. Faites attention. Envoyez nous un petit groupe de combattants. Pas trop réfractaires à l'idée de massacrer de la vermine.
-Vous êtes incorrigible...
-Vous êtes faible...
-Vous êtes chiants à montrer les crocs. On n'est pas franchement en position pour les querelles intestines. Faisons plutôt un petit inventaire des ressources. »

Je l'aime bien ce petit gars, pragmatique. Spleen, Zachary Spleen. Pas le genre à trop apprécier l'impérialisme barbare des Marines du type Morneplume. Nous sommes trois fervents défenseurs de la justice. Seulement celle de Morneplume est cruelle, la mienne est sans doute trop agréable. J'crois que la justice la plus juste serait celle de Spleen. À vue de nez. J'le connais pas encore assez bien. Est-il de la trempe d'un Jäak Hadzi ? Pendant que j'réfléchis sur tout ça, j'vide mes poches. Un cure dents, mon matériel à piquouze, une arme à feu, mais qui a pas dû servir des masses, pas sur qu'elle soit chargée. Les deux autres sont mieux armés que moi, balles de rechanges, armes nettoyées. Ils les ont prises pour l'occasion, pas moi. J'savais même pas qu'on pouvait s'en procurer. J'en n'aurais pas pris de toute façon.

« Bon, le temps que les renforts n'arrivent, on va très certainement devoir affronter du monde. Il n'y avait pas beaucoup de choix possibles à nos adversaires. À peine deux couloirs où tourner. Ça leur aura pris quelques minutes à vérifier que nous n'étions pas planqués quelque part. Nous devons nous organiser pour le combat. Nous irons frontalement d'abord, et si l'on parvient à nous déborder, dos-à-dos, de façon à couvrir les arrières des autres. Des questions ? Spleen ? Kosma ?
-Non, répondit le sergent de la régulière. J'espère juste que les multiples chemins qu'ils ont pu prendre les ont amenés à se séparer. Pas envie de me retrouver submergé par des gars qui n'ont appris qu'une chose, tuer.
-J'ai bien un p'tit truc qui me titille la cervelle. Si d'autres gars se ramènent ?
-Nous les tuerons. »

C'était bref, et ça donnait une fois de plus une vision tout à fait sympathique de la mentalité de Morneplume. J'aimerais bien savoir comment il se comporte autour d'une bonne tasse de thé. Pas le moment, bon, ok, d'autant que j'sens un micro courant d'air qui n'était pas là quelques secondes plus tôt. Ils sont là, ils arrivent en tout cas. J'suis persuadé que les deux autres ont senti aussi. Le temps s'est comme figé, dans une poignée de secondes qui semblent durer une éternité, on attaquera. Quelques pas vifs dans la couloir, puis Clac, une pression sur la gâchette et l'assaut aura commencé. Mon regard vrille vers les deux autres Marines à mes côtés. Et c'est la symbiose. Comme un seul homme, on s'dégage de notre coin de mur qui nous abrite. Ça réfléchit à cent à l'heure.

Ni une, ni deux, Morneplume tire, ça atteint le premier assassin au flanc. Il s'attendait pas trop à ce qu'on soit là j'pense. Ils peuvent plus compter sur la discrétion, c'est un face à face. Sur les six de tout à l'heure, seulement trois ont emprunté ce tunnel là. Les autres ne devraient pas tarder à arriver, rameutés par les coups de feux. Les balles jaillissent de nos armes, j'ai pas encore tiré. Spleen abat l'un des trois assassins qui se jette sur lui. Je m'élance vers le dernier encore debout, le plaque au sol. Et j'sens une lame se poser sur ma gorge. BAM. Le nouveau venu est déjà hors service et s'effondre à mes côtés. J'vois le canon du lieutenant qui fume. Il n'a pas hésité, il a tiré dans ma direction, une balle perdue ne lui aurait fait ni chaud, ni froid.

« Mène nous à tes... Que j'lance au gars que j'tiens immobilisé entre mes paluches. »

Trop tard, la capsule de cyanure a déjà été croquée. J'aurais du le savoir. Pas la peine de faire la fine bouche avec ce genre de types, si nous ne les tuons pas, ils s'en chargent eux-mêmes. Autant ne pas prendre de risques inutiles. Plus que deux. Quelques balles suffiront. Encore faudrait il ne pas se laisser surprendre. J'vérifie quand même mon arme. Je m'en sers pas souvent, alors faut bien faire gaffe à ce que le mécanisme fonctionne.

« Avançons, ils seront retenus par les cadavres un moment, mieux vaut tenter d'atteindre les chefs révolutionnaires avant que les renforts que vous avez appelés n'arrivent. On n'aurait aucune chance.
-Soit. »
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Angus, hein... Couvre moi !

Je recrachais la terre sèche en jetant mon pistolet à silex, et sûrement quelques poussières de sang. Encerclés par des idéaux brûlants, piégés par des regards glaciales. Et si l'expérience m'avait bien appris une chose, c'est qu'il n'y aura jamais pire que des hommes qui n'avaient plus rien à perdre. Eux, ça se voyait non seulement à l'environnement mais aussi dans leurs yeux, ils avaient vu l'obscurité toute leur vie. Et moi bon vivant, je préférais enlacer la mort que de vivre dans le noir.

Je plongeais une main dans mon holster, sortant mon flingue et des cigares. On m'attaquait.

Toujours en retrait, il y avait ceux équipés d'armes à feu et ceux qui venaient se battre, à main nue ou avec des surins, même combat, j'étais seul au milieu. Le premier des fagots se plantair devant moi la boule au ventre, il savait. Sans attendre et d'un seul coude à la jugulaire, il reculait en s'étouffant, j'en profitais pour armer mon rifle de Portgas estampés SW et tirer à bout portant.

Fire shots !

En rechargeant, je remarquais qu'Angus s'en sortait bien, mieux que le gratin de ma section d'élite. Je souriais en remarquant la poignée de révolutionnaires qui manquaient de son côté, et Il me punissait immédiatement pour le moment d'égarement. On me frappait à la mâchoire, une fois, à l'estomac, deux fois, à l'arrière du crâne, une fois. Le dernier coup m'avait fait un choc, je restais là à regarder le vide tandis que dans la main d'un de mes adversaires apparaissait comme une lumière blanche.

Hadži !

Un éclat dans les yeux, je reprenais mes esprits et évitais de justesse ce qui aurait pu m'être fatal, de justesse, parce que le type avait eu le temps de m'arracher la chair d'une partie du bras droit. Je le sentais, trop, et ça signifiait, plus de coup de poing.

Il va faire tout blanc !

Smoke escape : White !

De la fumée venait surplomber les géants intestins déjà bien étroits. En un rien de temps, tout était brouillé. Heureusement, j'avais repéré juste avant où se terrait Angus pour aller prendre un temps de repos au passage.

Dès que la fumée tombe, on tire sur tout le monde. Tout ce qu'est pas blanc et bleu y passe. J'sens qu'on va avoir des emmerdes bien plus grosses que celles-là. Tu l'as vu, hein ?
J'crois bien, ouais. Un type de l'Umbra.
C'est ça, et c'est pour ça qu'on doit en finir avec le menu fretin vite fait. Si l'Umbra est là, crois-moi bien qu'on les a appelés. Et à ce moment là, c'est l'ensemble des renforts et de la garnison de Goa qui est en danger. Va falloir qu'on sorte de ce trou, et qu'on aille prévenir Keegan. Cipher Pol, hein. Tu t'sens d'le faire ?

La fumée se dissipait déjà, Angus avait les doigts collés à son flingue qui remontait que d'un centimètre pour chaque coup. Cp, forcément, bons poignets. Quant à moi, je multipliais les fire shots, les vêtements des révolutionnaires prenaient feu et occupés à se jeter par terre ou les enlever, les pauvres se faisaient tuer sans autre forme de procès.
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Haletant, la boule au ventre, couvert de sueur, il court toujours plus rapidement à travers les couloirs. Ses yeux fous roulent dans leurs orbites alors qu'il jette des coups d'œil de tout côté, cherchant les bons tunnels dans lesquels s'engager. Il vire à gauche, puis à droite, s'enfonce dans un énième boyau, son cœur palpitant à toute allure. Il doit se dépêcher, les prévenir, tous, appeler renforts et secours, sans quoi ils mourront tous, tous ses frères. Son pas se fait de plus en plus lourd, ardu. Ses bottes mouillées et chaudes claquent dans les couloirs silencieux du Grey T alors que sa cape, grise, claque derrière lui à chaque enjambée. Il a réussi à les mener dans un guet-apens, mais des hommes manquaient à l'appel, trop de frères étaient déjà tombés pour que le piège tendu à l'Élite soit efficace. Le mur s'est effondré, certes, mais les dégâts se sont avérés trop faibles chez l'ennemi. Ils ont employé plus de moyens que prévu, ces odieux Marines, un canon pour écraser une mouche. Il peut changer les choses, seulement s'il réussit à prendre la prochaine sortie à gau-

BANG !

Sa tête est percée comme un fruit trop mur, son corps jeté contre la paroi qu'il longeait. Il s'écroule glissant lentement contre le mur, une balle fichée dans la tempe, le visage inondé de son propre sang. Regard vide, bouche béate, dernier souffle. Le canon d'un six-coups fume toujours dans l'ombre lorsque l'Agent Rinwald fait irruption dans le tunnel, lui aussi haletant et couvert de sueur. Son regard passe du cadavre à l'alcôve sombre en bordure du couloir, où s'illuminent régulièrement les braises d'une cigarette.

Agent Rinwald.
Morneplume… euh, Agent Angus, en fait.
Oh, je vois.
Morneplume… je me demande, vraiment, soyez sincère, est-ce que parfois il vous arrive d'avoir juste un peu de remords ?
Pas plus qu'il n'en a eu pour les deux autres assassins de tout à l'heure. lance un Spleen qui surgit de l'ombre pour se pencher vers le cadavre de feu-Cape Grise.
Je doute, à la vue de votre présence, Agent Angus, que cet homme de l'Umbra méritait son sort.
On pourrait pas dire mieux…
…Non parce que sincèrement, si je butais n'importe quel homme qui passe et que, comble du comble, un de ces hommes est en fait le petit chaton que vous gardez dans votre chambre…
Kosma, faites moi le plaisir de vous taire pour deux infinitésimales secondes, vous m'êtes un horrible parasite…

Il s'avance dans le couloir, ne portant qu'un bref regard à l'homme baignant dans son sang, pour plutôt aller au niveau de Rinwald.

Nous avons interceptés une patrouille et quelques hommes de l'Umbra, plus tôt, tous morts.
Mouais, j'vois bien, la chasse a été bonne… Avec le Sergent d'Élite Hadzi on s'est fait embusquer, j'devais empêcher l'assassin d'aller rameuter ses copains.
Le Sergent Hadzi.
Vous le connaissez ?
Légèrement.
Ça doit pas être un ami en tout cas, ce serait un record que vous en ayez un seul !
Kosma… Reprenons la chasse, j'ai demandé des renforts et ils ne sont toujours pas là. Allons plutôt de votre côté, Angus, histoire de bien terrasser ceux qui ont osé vous tendre un guet-apens.

Quatre drôles de personnages, quatre Justices, qui s'engagent tous d'un pas déterminé dans le boyau dont Cape-Grise venait. Un instant, le regard terne de Morneplume brille, fierté ? Détermination ? Non. Juste l'œil d'un rapace qui lorgne, dans les ténèbres, sa prochaine proie.


***


Ça commence par une détonation. Retentissante. Alors que le soleil entame sa descente, le sol du Grey T se soulève une dernière fois, la terre se fend et se fissure avant d'exploser dans une phénoménale détonation. Du feu, des mottes et gerbes de terre fusent vers le ciel alors qu'un silence de mort suit l'énorme déflagration ayant crevé la terre putréfiée et malade du Grey Terminal. À l'extérieur, les hauts officiers et quelques estafettes tournent les yeux vers ce panache de poussière qui émerge du chaos des souterrains. Cette cheminée de débris d'où émergent quelques silhouettes, suivies par le gros des troupes. Un haut chapeau, des têtes ébouriffées, des regards fatigués, des têtes pleine de sang et de suie. Cigarettes, silences et chargeurs vides. Ça a commencé par une détonation. Retentissante. Ça se termine par le soleil qui, timidement, chatouille de ses rayons les hommes qui, accompagnés des survivants du Grey Terminal, s'extirpent, vainqueurs, des profondeurs du nid de révolutionnaires. Morneplume, le visage taché de suie, le regard droit, iceberg au milieu des flammes. Jäak, la barbe roussie, du sang lui coulant du front, un cimetière au fond des yeux, à l'image de Kosma, les cheveux irrécupérables, qui se hisse derrière lui. Alric Rinwald, le manteau troué de balles, mais le corps toujours intact, qui s'allume une cigarette aux côtés de Morneplume, Modokoloyoatef, le carquois vide, qui plisse les yeux, éblouis par les rayons, Spleen, la mine amère qui, à son tour, grille une tige. Une bande de fumeurs éreintés, vides d'énergie, mais qui ont accompli ce qu'on attendait d'eux.

Quelque part, au dessus de la mêlée d'officiers supérieurs qui affichent des mines satisfaites, Keegan Fenyang  se demande qui ils sont. Et on lui répond.

Les hommes de la situation.

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