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[B]orn To Be Wild


« Toi, tu peux. Lui, non. »

Euh ? Ok. Le gaillard devant moi me regardait avec des yeux noirs, le genre de gars à qui on disait « Oui, tu as raison » lorsqu’il nous affirmait haut et fort que « 2 + 2 font 5 », même avec une armure vivante derrière soi. Je lui fis un sourire, acquiesçant timidement. Je n’avais vraiment pas envie de m’attirer des ennuis maintenant, pas dans ce coin. Depuis les évènements de Kage Berg, je me faisais petite. J’évitai d’attirer l’attention, de me faire des ennemis. Je disais oui à toutes les questions qu’on me posait, au cas où. J’étais prudente, sûrement trop prudente.
Et malgré tout, toujours aussi naïve.
Car j’avais, plusieurs fois, dit oui à des choses sans sens. Et la seule raison qui m’avait sauvé la vie, c’était que niveau « fuite », Bee et moi-même avions gagné un beau niveau d’expérience. C’était toujours ça de pris, n’est-ce pas.
Ainsi donc, je fis un sourire au videur, me tournant vers Bee pour lui demander de rester en retrait et de m’attendre ici, que je n’en aurais normalement pas pour très longtemps. Je n’hésitai pas non plus à ajouter que si je n’étais pas sortie dans une heure, il devrait remuer ciel et terre pour me retrouver, quitte même à exploser la tronche à ce videur pour rentrer dans ce bar. Il hocha la tête et fit les cents pas devant l’entrée, sous les yeux agacé du vigile.

L’homme ouvrit la porte et m’invita à entrer d’un mouvement de tête. Je passai le porche et pénétrai à l’intérieur. Immédiatement, je fus assaillie par une fumée dense qui pénétra dans mes poumons et me coupa la respiration. Elle me brula par la même occasion la gorge et les narines. Aie.
Enfonçant la tête dans mon écharpe, j’avançai en tâtonnant, les yeux piquaient par la vapeur opaque. Il y avait des escaliers en colimaçon qui menait vers la salle. L’endroit était donc en sous-sol, pour isolé le bruit. J’empruntai les marches, descendant avec une prudence non dissimulée. Est-ce que ça valait le coup de s’aventurer là-dedans ? Je n’en savais vraiment rien. Parait-il que oui. Je n’en étais plus si sûre.
J’arrivai en bas, n’y voyant rien à plus de deux mètres devant moi. Peu de lumières, si ce n’est vers les scènes et les bars qui étaient, disons, intimistes et au bar. Des fauteuils en velours, confortables mais usés par le temps, des serveuses en petites tenues qui faisaient le tour des clients, des vigils qui regardaient attentivement que les dits clients n’aillent pas trop loin et un show sur scène. Je m’avançai vers le bar, attrapant un siège pour m’y asseoir. La Barmaid vint vers moi : une jolie blondinette déguisée en écolière qui me fit un sourire angélique. Elle posa sa main sur mon épaule et m’attira à elle pour susurrer à mon oreille :

« Alors jolie rouquine, je te sers un verre ? »

Etait-il bon de consommer ? Non, pas prudent. On ne savait jamais c’qu’on pourrait mettre dans mon verre. La blonde posa un baiser dans mon cou. Je m’éloignai en vitesse, rendant son sourire à l’employée et fis non de la tête. Elle se pencha vers moi pour me montrer un peu plus son décolleté plongeant, me jetant un regard papillonnant et teinté d’un désir palpable :

« Tu es peut-être là pour autre chose ?
- Maintenant que vous abordez le sujet ! »

Paf, sauter sur l’occasion !

« Est-ce que Savanah est là ? »

La blonde perdit son sourire, se pencha vers mon oreille et me répondit avec une petite voix :

« Tu es intéressée par les vieilles peaux, alors, c’est si dommage... Elle ne va pas tarder à rentrer en scène. Dans un bon quart d’heure logiquement. »

Elle posa sa main sur la mienne et me fit un clin d’œil appuyé, reprenant sa tentative de séduction. Je retirai mes doigts d’où ils étaient, me penchai vers son oreille et lui dis :

« Je ne marche pas à ça, désolée ! »

Elle haussa les épaules et partit vers l’un de ses clients, me laissant seule au bar. Sa compagnie n’était pas désagréable, mais si on commençait à jouer sur ce terrain, on n’était pas sorti. Et personnellement, je n’étais pas du genre à vouloir sérieusement m’amuser avec une écolière. Pas mon genre.

Et puis, la musique changea. La lumière baissa aussi. Avant de revenir, plus violente et agressive qu’avant. Tellement que ça me piqua les yeux. Je les fermai, attendant que cela se calme. Puis, une silhouette féminine se dessina, à contre-jour. L’intensité de la lumière baissa pour laisser voir cette femme, belle comme une déesse, des cheveux noirs tombant sur ses épaules dénudés, avec une robe aux motifs de Tigre faire un clin d’œil à la foule.
Des applaudissements. Un attroupement autour de la scène. Des billets qui se tendaient aux creux des mains de ces fans hystériques.

J’avais trouvé Savanah.
Horny Savanah.
La sauvage qu’on l’appelait ici. D’où le costume de scène.
Stripteaseuse. Ingénieure à ses heures.

C’était une véritable tigresse, et même si je n’étais pas du genre à apprécier ce genre de spectacle, je reconnaissais volontiers qu’il y avait en elle une fougue insolente et captivante. Elle saisissait les foules d’un simple regard, d’un simple geste, d’un simple déshabillé…
Oh mon dieu.
Je ne voulais pas perdre mon innocence, ni avoir à faire à la nudité d’une autre personne. Vous savez, la pudeur, tout ça... Me raclant la gorge, je plaçai mes mains sur mes yeux en attendant que les cris bestiaux de ses admirateurs cessent. Et ça mit plus de vingt minutes. J’enlevai mes mains lorsqu’elle attrapa ses affaires et qu’elle fit demi-tour sur ses talons hauts. Ni une ni deux, je bondis de mon tabouret et fonçai vers la porte qui donnait sur les coulisses. Mais à la volée, un vigil m’attrapa par la taille et me pria de me calmer. Je m’agitai dans tous les sens :

« Non mais laissez-moi passer ! il faut que je lui parle !
- Bah voyons ! On ne laisse pas approcher les clients ici, c’est clair ?
- Non mais je ne suis pas une cliente ! C’est dégueulasse !
- Toi, t’es dégueulasse gamine !
- Mais qu’est-ce que vous allez vous imaginer ??!
- La ferme ! »

Il m’amena dans une salle adjacente et vide, coupé du reste de la pièce. L’endroit était étroit et plutôt sordide. Il se planta devant la porte et attendit que l’incident remonte jusqu’aux oreilles de ses patrons. Je bougeai de long en large, comme un tigre en cage, essayant de convaincre le vigil que je n’avais rien fait de condamnable :

« Je dois voir Savanah, j’ai une demande importante à lui faire !
- …
- Sérieusement, elle doit pouvoir m’aider !
- …
- Non mais, vous m’écoutez au moins ?
- ….
- Hé ? Héhé ?
- Qu’est-ce qui se passe ici ? »

Un homme trapus passa la porte et pria son garde de sortir d’ici. Je reculai, retournant vers le mur du fond. L’homme n’avait pas l’air spécialement agréable. Sa voix avait un accent slovaque, ses cheveux grisonnants étaient brushingués, il avait des bagues à chacun de ses doigts. Il me tendit la main et m’ordonna du regard de s’en saisir. Je m’exécutai mais relâchai celui-ci quelques secondes plus tard, de peur qu’il ne me brise une phalange ou deux.

« On m’a appelé, parait que tu fais du bruit, petite.
- Euh… Excusez-moi, ce n’était pas mon but.
- Alors, qu’est-ce que tu veux ?
- Je… Je… euh… Non rien.
- Tu ne veux rien ? »

Son regard était pesant. J’avais des yeux ronds, une goutte de sueur perla dans mon cou. C’était horrible comme ambiance. L’homme était impressionnant, mais il ne semblait pas me vouloir du mal :

« Écoute Gamine, les vrais voyou, je les connais, on sait les reconnaitre maintenant ceux qui veulent du mal à nos filles. Et tu n’en as pas la carrure, ni l’allure. Et en plus, tu es une fille. Je sais que tu ne veux pas de problème. Bill m’a dit que tu voulais voir Savanah. Faut pas être impressionné par le costume, compris ? »

Euh ?

« Compris ?
- Oui, oui !
- Alors suis-moi petite. »

Il m’ouvrit la porte et m’intima de prendre le pas vers l’extérieur. Docile, je le fis. Puis, il m’invita à le suivre dans les coulisses et m’amena jusqu’à un accès. Il prit la poignée et dévoila une loge dans laquelle se trouvait la jolie brune de tout à l’heure.

« Savanah, y’a quelqu’un pour toi.
- Mh ? »

Elle leva ses yeux verts, les plongea dans les miens, fronça un sourcil et lâcha d’une voix tendre :

« Tiens, tiens. Regardez qui voilà. »


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Mar 6 Mar 2012 - 19:24, édité 1 fois
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Le patron tourna les talons, nous laissant seules. La femme se leva et me tira la main. Elle m’attrapa par la taille ensuite et se tint contre moi avec douceur. Sa voix tendre se porta à mes oreilles, son regard doux en disait long. Elle avait l’air si… Maternante.

« Depuis le temps, j’étais impatiente de te voir, Lilou. »

Elle me connaissait. Ok. Comment est-ce qu’elle me connaissait ? Impatiente ? Et comment est-ce qu’elle savait que je viendrais ? Oh mon dieu, c’était un piège ! Appuyant mes mains contre son buste, tentant de me défaire de sa prise, elle resserra son étreinte autour de ma taille en me soufflant dans le cou. Son aplomb me paralysa. Elle fit glisser la bretelle de mon débardeur et posa un baiser sur mon épaule fraichement dénudée.

« Ne t’en fais pas, il n’est pas là. Il ne viendra pas d’ailleurs. »

On savait très bien de qui on parlait. Yumen. Ma respiration était saccadée. Cette femme avait une présence, un quelque chose vraiment saisissant. Elle s’éloigna de moi, garda ma main dans la sienne et m’amena jusqu’aux fauteuils. Elle m’y installa, se mit en face de moi et me regarda avec un grand sourire. Je ne savais plus ou me mettre, ni ou mettre mes yeux. Que faire ? Que dire ? Et pourquoi est-ce que j’étais là ? Au secours ? Elle rit, puis dit :

« Tu as l’air anxieuse, Lilou. Calme-toi voyons. Nous avons des choses à nous dire, toutes les deux. »

En effet, beaucoup. A qui de commencer ? A moi !

« Comment saviez-vous que j’allai venir ?
- Yumen m’a appelé.
- Vous… vous voulez dire qu’il sait que je suis là ? Alors comment être sûr qu’il ne viendra pas ?!
- Haha, tu n’as pas de soucis à te faire sur ça, Lilou. Je te l’ai dit, il ne viendra pas. Parce qu’il ne peut pas. Et non, il ne sait pas que tu es là, maintenant. Il suspectait juste que tu viendrais me voir à un moment ou à un autre.
- Comment me connaissez-vous ?
- Tu poses beaucoup de questions, pour une gamine. C’est un peu à mon tour, non ? »

Erf. Pas envie.

« Nan, j’ai pas confiance, fis-je avec une moue boudeuse. »

Elle éclata de rire, mais ne s’en vexa pas pour autant.

« Je te connais de Yumen. Il n’avait pas de photos, mais il m’a tellement parlé de toi, de comment tu étais, que j’étais à peu près certaine de te reconnaitre si je te voyais un jour. Les rouquines comme toi, ça ne court pas les rues. Surtout les rouquines qui veulent me voir.
- Comment le connaissez-vous ?
- Yumen ? C’est… mon petit ami. »

Je fronçai un sourcil et la fixai. Sérieusement ? Bon dieu, mais c’est dégoutant !

« Fais pas cette tête, voyons. Yumen n’est pas l’homme le plus fréquentable du monde, mais il peut être charmant.
- Mouais. Je l’ai connu tout sauf charmant.
- C’est son côté gros rustre violent qui m’a séduite. »

En voilà une qui avait de gros problèmes avec ses amants. Je me pinçai les lèvres. Le monde ne tournait vraiment pas ronds.

« Il te cherche, tu le sais ? dit-elle avec un sourire mystérieux. »

Ses yeux verts étaient perçants, ils me sondaient et cela me gêna énormément. Elle devait être consciente de mon malaise, elle devait aussi certainement en jouer. Je ne savais plus ou donner de la tête, comment éviter ses questions, son regard, sa façon d’être. Elle me donnait l’impression d’être prise au piège. Je me raclai la gorge, cherchant mes mots pour lui répondre. Je bégayai, chose qui ne m’arrivait jamais. Puis, je me ressaisie :

« Oui, je le sais. Et je ne tiens pas à le revoir. »

C’était froid, mais vrai. Elle ferma les yeux en souriant, collant son dos au dossier de sa chaise. Ses longues jambes se croisèrent. Elle était séduisante, réellement. Et je comprenais pourquoi est-ce que Yumen était tombé sous son charme.

« Mais il est vieux ! »

Ma réaction la fit sourire. Ils devaient avoir tous les deux plus de dix ans d’écarts, si ce n’est plus. Elle n’avait pas l’air de s’en soucier, vivant sa relation comme elle l’entendait. Elle ne me répondit pas, se contenta de me fixer à nouveau et de reprendre :

« Qu’est-ce qui t’amène jusqu’à moi, si tu ne veux pas le voir ?
- Vous.
- Moi ?
- Vous êtes ingénieure, non ?
- Haha, oui. Et ?
- Je veux apprendre avec vous ! »

Elle éclata de rire encore une fois.

« Je n’ai pas le temps pour ça, désolée ma jolie.
- Mais ! Pourquoi ? Me dites pas que vous aimez votre travail ! »

Ses yeux devinrent durs.

« Ce n’est pas comme si j’avais le choix.
- Oh, parce que vous vouliez me faire croire qu’avec votre talent, vous ne pouvez pas faire autrement que de vous montrer nue, sur scène. Logique. Vous êtes quand même celle qui a fait, selon les dire de Yumen, un chalumeau avec une tige de métal et un chewing-gum ! »

Elle soupira, montrant soudainement son agacement pour ce que je disais. Elle pinça les lèvres, fronça le nez comme le faisait Yumen lorsqu’il était énervé, et me dit d’une voix sèche :

« Il est peut-être temps que tu partes. Je t’ai dit, je ne peux pas t’aider. Notre conversation a été particulièrement agréable mais elle s’arrête là. Tu peux prendre la porte juste derrière, fit-elle en désignant du pouce le fond de la pièce. Bye Lilou. »

Je me levai et me plantai devant elle, les bras croisés sur ma poitrine.

« Ni comptez pas. Je vais rester ici, jusqu’à ce que vous acceptiez. »

Elle se leva à son tour, le visage dur, une lueur dans les yeux furieuses qui me fit frissonner, mais pas reculer. Elle plaça les bras sur ses hanches et me souffla froidement :

« Il ne m’avait pas dit que tu étais têtue et à moitié garce. Je désenchante, tire-toi de là avant que je ne m’énerve. »

Hin. J’avais beau être têtu, je n’étais pas sûre de pouvoir tenir tête à une tigresse comme elle. Faisant un petit sourire, m’accrochant toujours fermement à mes convictions et à mon envie d’apprendre en compagnie d’une femme comme elle, elle comprit rapidement que je n’allai pas tourner les talons aussi facilement.

« Tu veux apprendre ? Tu vas apprendre ! Règle numéro un pour être un très bon ingénieur, comme un très bon combattant, c’est savoir improviser. Avec n’importe quoi. »

Elle attrapa sa poudre et me l’envoya à la figure. Je fermai les yeux pour éviter d’être aveuglé, mais alors, elle s’empara de son boa en plume et le passa autour de mon cou, me fit un croche-pied et me tint fermement le visage au sol. Souplement, elle avait posé son genou dans mon dos, les deux mains à chaque extrémité de son boa qui m’empêchait de respirer. Je m’étouffai, ayant amorti ma chute au dernier moment pour éviter de me briser quelque chose.
Pas très sympa, la vieille.

« Tu ne voudrais pas que je ne me fâche plus ? »

Elle lâcha la pression sur mon cou. Je toussai, m’étouffai à moitié. Bon dieu, c’était une véritable furie !

« Alors, tire-toi !
- Kof.. A-Attendez… Kof kof. »

Elle fronça le nez encore, montra les dents et lâcha :

« Quoi encore ? »

Elle se leva, me permettant de me mettre sur le dos et de reprendre mon souffle. Mes poumons se gonflaient progressivement, mais c’était toujours très douloureux. Je me redressai contre son meuble, essuyai d’un revers de bras la poudre qu’elle m’avait mise sur le nez et repris :

« Dehors, il y a Bee.
- Et qui est-ce Bee ?
- Un robot. Un robot qui vit. Il fait quatre mètres de haut, plus d’une tonne, un acier. Et il aurait besoin d’une pro comme vous pour être vraiment terrifiant, comme Yumen voulait le faire. »

Elle fronça à nouveau un sourcil, soudainement piqué d’intérêt.

« Vous allez m’expliquer ce qui vous retiens ici, alors ? »


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Mar 6 Mar 2012 - 19:10, édité 1 fois
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« Tu dois me trouver complètement dingue.
- Boarf. Pas vraiment. Il en faut plus pour m’impressionner, j'ai connu pire. »

Inutile de parler de Jamie. Nous nous étions réinstallées sur nos chaises, l’une en face de l’autre, reprenant la discussion abandonnée tantôt. Savanah parlait d’elle-même, sans se forcer. Elle était parfois réticente, mais une question ou deux suffisaient à la faire lâcher prise.

« Ces gars, le patron, me tiennent ici depuis plus d’un an. Je t’avoue que je n’ai jamais vraiment cherché à m’échapper. Ils m’entretiennent, ils s’occupent de moi. En échange, je ne dois pas partir. Sous peine de… Mort.
- Pourquoi te tuer ? Ça n’a aucun intérêt !
- Si, pour les affaires. Le club rapporte gros, et ils nous mettent souvent dans des petites histoires pas propres pour nous obliger à être fidèles et dociles. Ils nous ont toutes contraintes à commettre quelque chose pour nous porter préjudice et nous empêcher de vouloir partir.
- C’est… Du chantage et de la séquestration ?
- La vie de château, presque. »

Je pinçai les lèvres, ne comprenant pas son humour. Etait-ce si plaisant d’être enfermé ici ?

« Ta pudeur me touche, fit-elle en interrompant mes pensées. Tu es plutôt naïve. Devant un monde de brute et très naïve. Mais on pourrait peut être tenté des négociations.
- Négociations ? Genre, demandé gentiment ?
- Gentiment avec des armes.
- Des armes ?
- Bien sûr ! Avec des animaux comme eux, autant se comporter comme des animaux. Répondre par la violence à la violence. Mieux vaut avoir un pistolet à l’appui. Bee est bien équipé ?
- … Absolument pas. »

Elle cligna des yeux, fronça ensuite un sourcil et soupira.

« C’est pour ça que tu viens me voir ? M’étonne pas. Laisse-moi la journée de demain pour l’équiper. Tu as de l’argent ?
- Mh. Non plus.
- Alors on ira emprunter.
- A qui ? »

Elle sourit mais n’ajouta rien puis nous nous séparâmes pour la nuit. Elle me somma de laisser le Robot avec elle et de revenir le lendemain. Elle me donna les clefs de sa maison pour que j’y aille. Je mis près d’une heure à la trouver et à arriver. Et puis, en y entrant, je pris une douche, me changeai et me couchai pour m’endormir presque immédiatement.

« Réveille-toi ! »

Une claque. Vraiment. Elle me mit une claque. Me chevauchant, elle m’avait une collé une tatane qu’avait de quoi me décoller la peau sur le crâne. Mes yeux s’ouvrirent. Je me tins la joue puis la frottai en essayant de faire passer la douleur. Elle avait un sourire carnassier, aussi une arme en main de laquelle elle ôta le cran de sécurité.

« T’as bien dormi, Louloutte. File te préparer, on a une descente à faire. »

Elle sauta du lit et reparti vers le hall. Je me levai péniblement, tenant toujours ma joue qui me faisait souffrir. C’était un réveil des plus désagréables au monde. Je ne mis pas plus de vingt minutes à me préparer, enfilant mes affaires, relevant mes cheveux. J’allai ensuite dans le salon ou se trouver Savanah. Elle avait posé sur la table un pistolet ainsi qu’un couteau pour moi. Elle me les tendit et me fit un clin d’œil. Je ne savais pas dans quoi est-ce que je m’engageai, mais apparemment, ça allait être une sacrée descente.

« Euh, Savanah… je ne sais pas me battre.
- Tu sais te servir d’une arme, non ?
- Oui.
- Alors tu tires sur les gros gars en costard. Ils doivent aujourd’hui récupérer de la fourrure dans un hangar près port. Tu devineras un transfert pas très légal, mais qui leurs rapporte très gros. Je me fiche un peu d’arrêter leurs business. Mais si on leurs fait assez peur, ils me lâcheront la grappe. »

J’hochai la tête. Elle tourna les talons et sorti de la maison. Bee se tenait à l’extérieur. Elle menait la marche, je me tenais à côté du robot qui me montrait tous les équipements dont il était pourvu à présent. Sur sa main gauche, cinq pistolets étaient reliés à ses doigts, des six coups. Sur son bras droit, elle avait fixé un canon de bateau. Pas très pratique, puisqu’il fallait qu’il le recharge à chaque fois et qu’il y avait un temps de battement de cinq secondes avant que le coup ne parte. Mais ça irait pour cette fois. Il en était plutôt fier et avait trouvé la soirée avec Savanah plutôt agréable. D’ailleurs, la donzelle n’avait pas du tout l’air fatigué par sa nuit blanche, c’est qu’elle avait de l’endurance.

En un quart d’heure, nous arrivâmes tous devant le hangar qui faisait face au port. Les portes étaient fermées, mais des voix nous parvenaient de l’intérieur. Savanah prit la parole :

« On va y rentrer. Mais nous, on va aller se planquer. On va passer par au-dessus et nous débarrasser des gardes qui sont sur la structure haute du hangar pour garder un œil sur le transfert. Bee devra rentrer dans cinq minutes exactement. Il sera canarder, mais il ne craindra rien. Une fois qu’ils auront vidé leurs munitions, parce qu’on part du présupposé qu’ils sont de gros crétins, on les finira. Nous avons six balles chacune, autant ne pas les gâcher. »

Elle m’indiqua du doigt les escaliers de gauche et pris ceux du côté droit. D’un pas vif, j’avais cinq minutes devant moi pour me débarrasser des gardes, comme convenu. Je ne savais pas si je pourrais être efficace. Montant les marches quatre à quatre, je poussais la lourde porte en acier de l’étage et jetai un coup d’œil rapide pour voir combien est-ce qu’ils étaient.
Deux, chacun à deux mètres de la porte. Ils regardaient par-dessus la barrière pour surveiller la transaction qui s’effectuait. La discussion nous parvenait d’où nous étions, et ça parlait des affaires. Le chef négociait les prix, ferme et intransigeant, alors qu’il n’était pas en position de force. Ce gars savait y faire pour ce qui était des affaires.

Il ne restait que deux minutes avant que Bee ne rentre pour faire son show. Et je me disais que profiter de ce moment serait plus judicieux pour m’occuper des gardes.

Une minute.

Trente secondes.

Quinze secondes.

Dix.

Cinq, quatre, trois, deux…


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Mar 6 Mar 2012 - 18:44, édité 1 fois
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BAM.

Le bruit du métal qui se tord, une vive explosion, la poussière qui se soulève.
La descente avait commencée. Je poussai la porte et l’envoyai cogner contre le garde qui s’en était rapproché. L’autre fut surpris de voir son collègue disparaitre derrière le métal, encore plus de voir une minette d’à peine 18 ans lui tirer une balle directement dans le bide sans avoir la possibilité de se défendre.
En bas, ça canardait, comme prévu. Je passai sur l’étage, attrapant le garde assommé pour le passer par-dessus bord. Les autres s’attroupèrent autour du chef et tiraient en direction de Bee, qui leurs renvoyait les balles avec la même ferveur. L’arme pointée en direction des vigils qui entouraient le grand patron, je réussis à en toucher un au niveau du cou... Il s'effondra. Et c'est à ce moment que je me dis que je m'arrangerais avec ma conscience plus tard. L’un d’entre eux me visa et manqua de m’avoir. Je me baissai, me cachant derrière la structure métallique pour éviter d'être transformée en passoire.
Quelques échanges encore, quelques coups tirés, et puis un silence pesant. Bee fonça vers ses adversaires et s’en débarrassa de trois, je me relevai et tirai dans le dos de l’un d’entre eux qui visait Savanah. A la fin, il ne resta que le chef et quelques blessés qui n’étaient pas en état de le protéger. Savanah descendit de son étage, j’en fis de même, attrapant une grande barre qui allait vers le pallier du dessous. L’arme tendue, nous avancions toutes les deux vers le gars qui avait les mains levées.

« Lilou, fouille les gardes et débarrasse-les de leurs armes. Bee, tu les ligotes. Moi, j’ai a discuté avec le patron. »

Elle pointait le chef avec un sourire carnassier, lui sommant de partir vers l’extérieur. Moi, je m’exécutai, obéissante. C’était elle la patronne, pour le coup. Un à un, je défie les gardes de leurs armes (pistolet, couteau, matraque,…). Bee les ligotait entre eux. Une fois le travail fait, nous nous décidâmes pour rejoindre Savanah qui était sorti. Elle avait l’arme tendue vers la tête de son ancien geôlier.

« Savanah, il n’est pas dans ton intérêt de partir, et je ne peux pas te laisser faire.
- T’es pas non plus en position de négocier, c’est moi qui suis armée, je te rappelle.
- Qu’est-ce que tu veux ?
- Me tirer d’ici. Je veux partir. Avec la gamine. En vie. Et avec de quoi survivre, tu piges ?
- Je n’ai rien sur moi. Je ne peux pas t’aider.
- Tu te fous de ma gueule ? »

Un rictus de mépris apparut sur le visage du patron. Il jeta un regard vers moi, pensant que Savanah allait probablement se retourner. Mais elle le gardait en ligne de mire. Je m’approchai et fouillai les poches du chef, attrapant le revolver qu’il avait à sa ceinture, l’autre à sa cheville. A moi les deux armes. En plaçant une à l’arrière de mon pantalon, je reculai, laissant Savanah continuait ses négociations.

« Merci Lilou ; tu vois patron, t’as plus qu’à me dire ‘amen’ maintenant. Alors, la valise qui contient le flouze pour la transaction, elle est où ?
- A l’intérieur. Mais j’ai toujours les dossiers contre toi.
- Je m’en balance, crétin. Y’a combien dans la valise.
- 50.000 milles berrys.
- Bien. Lilou, va chercher la valise. »

Faisant quelques pas en arrière, je revins à l’intérieur du hangar, la main sur l’arme. La valise avait été lancée plus loin. Je parcourus les quelques mètres qui m’en séparer avant de m’en saisir mais c’est alors qu’en me retournant, un des gardes (blessé) s’était libéré et me sauta dessus. Tel un reflex, j’envoyai la valise à la rencontre de sa pommette. Le choc fut violent, à un tel point qu’il tomba à terre mais se releva immédiatement pour retenter son assaut. J’avais lâché mon pistolet, sortis celui que j’avais gardé en prévision et lui tirai dans l’épaule. Une autre balle partie, se longeant dans son thorax. L’homme embrassa le sol et ne se releva pas.
Un soupir. Un autre. La respiration accélérait. Bon dieu ! C’était risqué ! Trop risqué ! Ces mecs étaient vraiment prêts à tout ! Reprenant mon souffle, pleine d’une énergie nouvelle mais éphémère, je courus jusqu’à la sortie pour arriver au niveau de Savanah.

« Ça va ? C’était quoi ces bruits ? S’enquit-elle sans me regarder.
- Rien, t’en fais pas. On devrait partir. S’il te plait. »

Elle fit un sourire et pria son patron de rentrer dans le hangar. Elle demanda à Bee de s’occuper de le ligoter.

Une fois cela fait et Bee ressorti des lieux, elle me pria de venir avec elle. Elle prit des chemins escarpés qui nous éloigner du port. Et c’est au bout de quelques minutes de marches qu’elle me présenta un bateau de pêche à voile qu’elle avait…

…« Emprunté ».
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