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[W]alk of Life

Balthar Craygen n’était pas un homme comme les autres. Bien sûr, sa carrure ou son physique ne tranchaient pas avec le reste de l’humanité. Il se vantait souvent d’être étrangement normal et de se fondre dans la masse avec une facilité déconcertante. En fait, il n’avait aucun signe distinctif capable de le faire sortir du lot : son apparence ne reflétait qu’une tranquille normalité dans laquelle il avait l’habitude de se lover. Même durant les grandes réunions ou il était convié, personne ne le remarquait, parce que personne ne savait ce qu’il était, qui il était, et ce qu’il faisait là. Il était énigmatique, le regard sombre. Il s’était cassé le nez lors d’une rencontre ayant mal tournée, et en avait gardé des séquelles. Ses joues étaient émaciées, une calvitie précoce commençait à ronger le sommet de son front. Il ne s’en souciait pas, s’accommodant aisément de son âge, pourtant pas si vieux, et de ce que la nature lui offrait. Il était grand, mais pas trop. Musclé, mais pas trop. Présent, mais pas trop. En fait, si l’on devait résumer Balthar Craygen, on le définirait par ces trois petits mots : mais pas trop. Il était tout, jamais en excès. Il était tout le monde, mais pas en profusion. Et c’était pourquoi la révolution fut ravie de l’accueillir dans ses rangs et de le voir rejoindre la cause.
Il faisait un agent de terrain excellent, en plus d’un infiltré hors pair. Nombre de fois, il avait pu se joindre à des équipages du gouvernement et tirer des informations importantes, sans jamais qu’on ne le repère, ni qu’on sache d’où venait la fuite. Il était tellement tout le monde et à la fois personne qu’on ne le remarquait qu’à peine. Il n’attirait ni hostilité, ni sympathie, encore moins de fascination. Il n’avait eu aucun maitre, aucun apprenti. En réalité, Balthar Craygen était anormalement solitaire, mais ça lui convenait très bien ainsi. Il se confortait dans quelques amitiés temporaires, en aventures sans lendemain, et même ses supérieurs n’arrivèrent pas à lui faire lâcher ses plus noirs secrets pour l’attacher fidèlement à leurs causes. L’on se demanda même, pendant longtemps, si Balthar avait effectivement eu une vie, ou des ennuis, ou des secrets. L’on en vint à la conclusion que, peut-être, il était seulement normal. Sans trop, sans pas assez. Sans manque. Bref, qu’un type. Lambda. Comme ça.

On pourrait continuer à parler pendant des heures de la normalité de ce grand Craygen, on pourrait aussi voir un peu plus loin que ce vague croquis de sa personnalité. Il s’avéra très vite, surtout chez lui, que même sa normalité était d’une complexité hors norme, et que malgré ses capacités à n’être personne, Balthar devint quelqu’un. Peut-être pas quelqu’un au sens où tout le monde l’entend, mais quelqu’un avec une personnalité. Ses quelques coéquipiers, peu nombreux, et pas forcément très bien placés pour pouvoir parler de lui, le décriraient comme fuyant. Voilà, fuyant. Fuir, ça, il savait le faire. Il se dérobait aisément aux questions qu’on lui posait, ce qui, dans un sens était avantageux. Et dans un autre problématique. Ces fuites en avant ne permettaient pas de pouvoir sérieusement se faire une idée du personnage : dans ces départs, l’on ne savait jamais vraiment ce qu’il quittait. Ni où il allait. Ni, en finalité, ce qu’était son but. Qu’est-ce qu’il recherchait en faisant partie de la Révolution, sinon, en étant un de ses membres les plus méritants ?
Pas de réponses. Pas la moindre esquisse d’idée sur la question. Balthar Craygen faisait les choses, rien de plus, rien de moins. Mais il les faisait bien, et c’était tout à son avantage. Aussi, il était important de signaler que Balthar était un archer prodigieux, capable d’atteindre sa cible sans la regarder et surtout, sans la manquer. On le surnommait le « faucon », dans le milieu. Un pseudonyme qui lui collait à la peau, et qui permis, en partie, de ne jamais remonter jusqu’à lui lorsqu’il perpétrait ses meurtres. Ce qui faisait du Faucon un assassin.

En passant, peu de gens avait la chance de connaitre son nom. Et dans ceux qui le connaissaient, encore moins pouvait en témoigner avant de finir dans la tombe. Balthar était expéditif, rapide, précis. Sans bavures. Jamais. Et surtout, sans attaches. C’était ce qui le rendait particulièrement efficace. Par contre, on pouvait lui reconnaitre un libre arbitre : Il ne faisait que ce qu’il voulait, et quand ça l’arrangeait. Robotique, peut-être, pas sans jugeotes. Mais même avec ça, ses desseins ne s’affichaient pas clairement aux yeux de ses complices. En toute fin, il ne restait qu’une interrogation :

qui était Balthar Craygen ?

Tout le monde. Personne. Quelqu’un.

Peut être.

Alors, lorsque le Faucon posa son pied sur la terre de cette petite île de South Blue, sortant de sa barque pour s’enfoncer dans le sable chaud, il n’était qu’un inconnu de passage. Il s’aventura dans la forêt qui lui faisait face, marcha un bon quart d’heure avant de tomber sur un petit village. Il n’adressa que quelques mots à un fermier sur le chemin, qui lui indiqua une ville plus grande ou il pourrait trouver ce qu’il désirait. On ne se retourna pas derrière lui, on ne se demanda pas qui il était. Quand il arriva, après une bonne demi-heure de marche jusqu’au centre de l’île, surplombant l’horizon sur une colline un peu surélevée, il se pointa sans s’arrêter autre part, sans admirer la vue, sans se détourner de son chemin, et se planta devant un vieil homme barbu qui sermonnait une jeune fille.

Il estima les deux un temps, mais s’arrêta plus sur la jeune fille. Une adolescente, avec de très longs cheveux d’un roux flamboyant. Une frimousse agressive mais adorable, une taille fine et qui semblait fragile. Rachitique, songea-t-il. Mais surtout, ce qui l’intéressa, c’était cet arc à sa main, et ces flèches qu’elle portait dans son dos.

Comme toute réaction, il ne fronça qu’un sourcil et retira le mégot qu’il avait entre les lèvres.


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Sam 15 Déc 2012 - 17:36, édité 1 fois
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L’adolescente partie en fulminant peu après son arrivée. Mais elle s’arrêta devant lui pour le regarder à son tour. Il fit mine de ne pas réagir, mais n’apprécia pas de se faire considérer par une jeune fille d’à peine plus de dix ans. Cela le mis mal à l’aise, parce qu’il avait attiré son attention sans qu’il ne fasse rien de particulier. Elle fronça les sourcils, et sans le quitter les yeux, ses pas la menèrent à l’extérieur du hangar ou tous se trouvait. Balthar poussa un soupir, reprenant peu à peu sa respiration. On ne le sondait pas, c’était qui le faisait, d’ordinaire… Alors… L’être par une enfant, c’était tout bonnement désarçonnant. Le Faucon ne savait jamais comment considérer les enfants : à priori, pas vraiment comme des êtres humains. Ils étaient, pour la grande majorité, bêtes, irritables, indisciplinés, pénibles et capricieux. Et c’était pour cette raison qu’il n’appréciait pas tant les relations humaines. Pour lui, tous les hommes étaient de grands enfants. Et donc, de grands casse-pieds. Un peu, de temps en temps, cela lui suffisait largement.

Il posa son arc sur le plan de travail du vieil homme après lui avoir indiqué ce qu’il désirait. Il chassa de son esprit cette gamine intrépide et reporta son attention sur la raison de sa venue. Il indiqua à son interlocuteur qu’il désirait que l’on s’occupe de son arc, qu’on le répare. L’arme était usée, vieille. Son vis-à-vis lui suggéra d’en changer, mais Balthar refusa poliment. « Objet d’une valeur symbolique » dit-il simplement. Harry se présenta et lui fit un sourire, lui demandant ensuite combien de temps comptait-il rester sur cette île. Balthar haussa simplement les épaules avant de sortir une autre cigarette. Il avait tout le temps qu’il fallait, et à priori, à part si ça prenait un long mois, il pourrait attendre sans problème. L’ingénieur s’empara de l’arc avec précaution et demanda à Balthar de repasser dans trois-quatre jours pour le récupérer dans un état presque neuf. Les promesses du vieux le firent sourire, il le salua d’un mouvement de tête et tourna simplement les talons.

Tirant sur sa cigarette, il la saisit ensuite entre deux doigts avant de regarder les rues pavées de la petite ville. Il ne lui restait qu’à trouver un endroit où loger. N’ayant pas un sous en poche, et n’ayant pas non plus envie de s’attirer des ennuis auprès d’un aubergiste mécontent, il se dit que le ciel serait son toit pour la nuit, et qu’il trouverait bien de quoi se nourrir sans avoir à débourser un berry. Il s’engagea dans une rue en enfonçant ses mains dans ses poches et refit le chemin en direction de sa barque. Il prit aussi la peine d’étudier un peu les lieux. L’endroit semblait animé, mais pas trop. Il y avait des gens, mais pas trop. On semblait s’apprécier, mais pas trop. En finalité, il ironisa justement dans sa pensée que ce petit patelin lui ressemblait, mais pas trop. Alors, sourire aux lèvres, il tourna dans une ruelle en fermant les yeux, savourant ce début de journée qui s’annonçait plutôt agréable…
Quand tout à coup, une impression étrange lui saisit les tripes. Lorsqu’une petite douleur lui prit en plein milieu du front et qu’il se sentit partir en arrière, accroché à la taille, il comprit que l’étrange impression ne venait pas de sa paranoïa naturelle, mais qu’il était bel et bien enserré au niveau des hanches par… Baissant les yeux, il ne vit qu’une tignasse rougeoyante. Il tomba sur le dos, rencontrant violemment le sol, mais se stoppa net et ne fit plus un mouvement. Etalé de tout son long, les bras étendus, une tige lui frappa le nez soudainement. Pas assez fort pour lui faire mal mais suffisamment pour le surprendre. A tâtons, ses doigts s’aventurèrent sur son front, ou il trouva, un peu au-dessus de son œil gauche, une ventouse collée à son crâne lisse. Il soupira, et la retira. Un « couic » sonore résonna dans la ruelle déserte. Il baissa ensuite la tête et se releva légèrement à l’aide de ses avants bras. Et à peine avait-il fait cela que l’adolescente de tout à l’heure lui lançait un regard de défi, et pointa violemment son doigt dans sa direction, à quelques millimètres de son nez, ce qui le fit loucher :

« APPREND MOI A TIRER A L’ARC ! »

Il s’étonna de la fougue de la gamine, mais poussa ensuite un long soupir. Il la méprisa un temps avant de se dire qu’il y en avait qui ne manquait pas d’audace. Et de toute évidence, si les enfants étaient en règles générales bêtes à s’en rouler par terre, celle-ci était différemment pire. Il l’attrapa par les bras, se releva et la remis à son tour sur ses jambes. La lâchant la seconde d’après, il épousseta ses vêtements, remis ses mains dans ses poches et tourna le plus simplement du monde les talons, sans même daigner affirmer, refuser, ou lui adresser le moindre regard. Il n’avait jamais été bon pédagogue. Du moins, il le supposa. Et puis, « merde » songea-t-il.

Il n’avait pas de temps à perdre avec la première gosse venue.
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Balthar s’installa près d’une vieille ferme, une grande bâtisse, particulièrement ancienne fournie en végétation. Les plantes grimpantes avaient eu raison de sa façade, s’infiltrant dans les pierres, montantes, revenantes. Autour, des champs à perte de vue, adjacent à la forêt de tantôt qu’il avait traversé. En fait, le Faucon avait repéré l’endroit, se disant qu’il serait tranquille ici, au plus proche de la nature qui reprenait progressivement ses droits. De sa position, il entendait tout ce qui se tramait par là-bas. Les poules qui cancanaient, les hommes qui papotaient, les grillons qui chantaient en même temps que les autres bestioles, plus petites, et plus sauvages. La journée était bien avancée, et il tuait le temps en envoyant son couteau dans le tronc d’un arbre déjà bien entamé. Il se situait près d’un des murs de l’immense ferme, à l’ombre d’un soleil de plomb en cette après-midi de presqu’été. Il avait, entre ses lèvres, à la place d’un mégot de cigarette, un blé qu’il suçotait par la tige.
Un bruit attira son attention, mais il n’en fit pas cas. Il sentait le bois et l’herbe craquer sous son pied lorsqu’il s’avançait, se perdant en allés et retours entre sa cible et sa position. Toujours juste, sa lame s’enfonçait exactement où il visait. Fluide, il semblait qu’il la contrôlait par la pensée, comme si elle n’obéissait qu’à son bon vouloir. Il ne faisait que s’exercer, ne souhaitant pas perdre cette habilité spéciale qui le faisait sortir de son ennuyante normalité. Mordillant le blé qu’il avait dans la bouche, il revint sur ses pas et s’éloigna d’une enjambée de plus. Il ferma les yeux et lança son arme qui, à nouveau, s’enfonça comme dans du beurre dans l’épais tronc qu’il visait. Il rouvrit les yeux, fit craquer sa nuque un peu raide et retourna chercher le poignard. Encore une fois, il recommença…

Jusqu’à ce qu’un bruit le sorte de sa rêverie passagère. Il se tourna en entendant une poule cacqueter si fort qu’elle lui sembla hystérique. Les cris de la poule s’accompagnait des grands bruits de pas et des petits hurlements, d’une petite voix de jeune fille, qui semblait courser quelque chose. Balthar prit l’initiative d’aller voir se qui se tramait, toujours aussi méfiant. Il longea le mur, le poignard dans sa main droite, et tourna pour tomber sur le poulailler qui côtoyer la maison. L’abri était spacieux, mais à l’intérieur de celui-ci, les poules virevoltaient dans tous les sens, comme poursuivies pas un renard. Balthar y pénétra, manqua de se prendre une poule en plein dans la figure. Il assena un coup de poing au passage à la bestiole, virant les autres à l’aide de son pied. S’approchant calmement de la petite baraque leurs servant de dortoir, il entendit à l’intérieur un « Aie » sonore, suivi d’un bruit métallique. Il baissa la tête, entra, et admira le paysage qui se peignait sous ses yeux.
Devant lui, une poule boitait avec une flèche plantait dans l’une de ses fesses dodues. Elle se trouvait sur le derrière d’un corps au sol. Corps recouvert de terre et de paille, qui, s’étendant jusqu’à ses pieds, arborait sur le sommet de son crâne un seau retourné. Ce qui semblait être une jeune fille releva la bassine qui l’avait aspergé d’eau. Ses cheveux roux dégoulinaient. Elle lui lança un regard gêné, s’excusant platement de l’avoir dérangé dans son exercice. Il pinça les lèvres et soupira. Se baissant, il l’attrapa par les épaules et la releva à nouveau. Il retira ensuite ce qu’elle avait sur ses têtes et tira sur deux trois épis qui s’étaient glissés dans ses cheveux.

Il ne savait pas quoi lui dire. Il admirait cette obstination, cette envie de progresser. Après tout, le Faucon était lui aussi de ce genre-là. Par contre, il avait du mal à comprendre ce qu’elle avait à désirer tant son enseignement, à lui. L’avait-elle vu faire avec les couteaux ? Il présuma que oui, mais ne pipa mot. Après tout, il n’avait rien à dire. Ce n’était pas à lui de parler. Ou peut-être que si, mais si c’était à son tour, il ne savait pas quoi lui souffler. Il préféra tourner les talons, mordillant toujours son blé en restant étrangement impassible. Il remarqua que les joues de l’adolescente s’empourpraient. Il se surprit à sourire. Alors, il se retourna et sorti de l’abri :

« Suis-moi. »

Il sentit, dans son dos, l’excitation monter. Il savait aussi qu’il allait amèrement regretter d’avoir dit ça. Puis, il s’interrogea : Pourquoi cédait-il ? N’était-il pas un grand Révolutionnaire, réputé pour son efficacité ? Pas de compromis, se disait-il. Mais en tournant la tête pour regarder la jeune fille qui bataillait avec sa longue tignasse emmêlé, il se dit alors qu’une gosse de la campagne, comme elle, avec l’air si fragile, ne pouvait décemment pas lui causer trop de soucis. Et il préféra l’avoir sous sa coupe plutôt que de la voir encore faire des bêtises… Il soupira, avec elle sur ses talons.

Il choppa la poule au passage et lui tordit le cou. Puis, il retira la flèche qu'elle avait de planter dans les fesses, la tenant fermement dans sa main.
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Il prépara un feu, avec son aide, et dépluma la poule. Il lui ordonna en même temps de lui montrer ce qu’elle savait faire avec son arc, et ses flèches, pour voir ce qu’il avait à lui apprendre. Elle se montra timide, alors il la pressa d’un mouvement de main, lui désignant sa place et sa cible. La rouquine hésita un temps, mais enfin, le regardant d’un œil distrait en train de s’occuper de la poule, elle leva son arc, plaça sa flèche et tira.
Le projectile se planta dans le bois, mais de travers. Plus haut qu’en son centre. Plus à gauche, aussi. Alors, Balthar poussa un long soupir. Il posa le corps de son repas et s’approcha de la jeune fille. Il lui ordonna de reprendre sa position. Lui faisant face, avec le regard pressant, elle s’exécuta à nouveau. Docile, mais pas trop, il fit le tour et la regarda attentivement. Puis, il envoya un tape sur son derrière pour qu’elle rentre son bassin, il frappa son poignée pour qu’il soit droit, ensuite son genou pour le faire tenir droit. Chaque coup laissa échapper un « aie ». Puis, elle se tut et le regarda attentivement. Il la fixa, refit un tour, et lui demanda de tirer. Elle tendit sa corde et visa avec sa flèche. Fermant un œil pour mieux se concentrer, elle relâcha la tension pour envoyer son projectile. L’objet rencontra le bois et se planta non loin du centre. Balthar lui demanda de recommencer, jusqu’à ce qu’il ait fini de faire cuir la poule qu’il avait tué, tantôt.

Le diner se passa dans un silence de mort. Balthar Craygen n’était pas du genre loquace. Il ne regardait même pas sa partenaire du soir, se contentant de dévorer sa petite prise. Une poule fermière, ce n’était pas la même chose qu’un vrai repas d’aventurier. Il avait pour habitude de chasser. Il était fin limier, un très bon traqueur. La plupart des bestioles qu’il attrapait lors de ses excursions n’avaient, de toute évidence, aucune chance face à lui. Il n’y prenait pas plus de plaisir que ça, mais il reconnaissait volontiers que la nourriture que l’on attrape soi-même était différemment meilleure de celle que l’on nous sert dans les auberges. Plus crue. Moins préparée. Sans assaisonnement. Il fut agréablement surpris de voir que l’adolescente ne faisait pas de manière pour manger aussi. Néanmoins, il constata que ses deux premiers doigts étaient rougis par l’exercice. Il se leva, s’approcha d’elle, s’essuyant les mains sur son pantalon terni et sortit de sa pochette arrière deux bandelettes qu’il tendit à la jeune fille. Elle le remercia timidement, alors qu’il retournait vers ses affaires pour en sortir une couverture. Il revint, s’allongea, et sans dire un mot, s’endormit simplement.

Lorsqu’il se réveilla le lendemain, aux aurores et avec une mine fatiguée, il s’étira longuement et sonda autour de lui. Il entendait le chant des oiseaux, ce qui le mit de bonne humeur. Le feu de la veille s’était éteint dans la nuit, mais il n’avait pas eu froid. Il leva les yeux de l’autre côté du foyer, il remarqua la chevelure rousse posé à même le sol, la jeune fille recroquevillée sur elle-même en train de sommeiller toujours. Il soupira un temps, plia sa couverture et retourna vers ses affaires. Il entreprit de prendre sa trousse de toilette et s’occupa de se nettoyer avec ce qu’il avait à disposition. Pas du grand luxe, mais en tant qu’aventurier, il ne s’attendait pas à mieux. Puis, à peine avait-il fini de remettre son T-shirt et sa protection qu’elle émergea difficilement. Lorsqu’elle se releva, il observa ses cheveux en bataille retomber sur ses épaules, ses petits yeux épuisés, son teint pâle. Elle lui rappela un vague souvenir d’enfance, d’une jeune fille avec qui il avait grandi, et qu’il avait fait le choix de quitter pour s’engager auprès des révolutionnaires. Il essuya ces songes d’un revers de main et lui somma de se remettre vite d’aplomb, car ils avaient à faire, aujourd’hui.

Il lui proposa une partie de chasse.
Entre eux.

« Une traque, pour être plus précis », qu’il lui souffla. Car, pour lui, s’entrainer était une chose. Etre en situation, une autre. Et que l’adrénaline aidait sans doute mieux à assimiler les choses que la patience et l’entrainement. Plus brutalement, certes, mais aussi, et surtout, définitivement. Elle hocha simplement la tête, attrapa son attirail et partie en direction de la forêt, sans demander son reste.

Il fut satisfait de voir qu’une jeune fille, aussi jeune, avait déjà connaissance de ce qu’était une traque. Qu’un entrainement réel. Il en fut surpris, mais préféra ne pas y songer. Après tout, cela lui faisait gagner du temps, et peut-être même prendrait-il plaisir à faire cet exercice. Il tendit l’oreille pour écouter la faune environnante. Il entendit qu’à sa droite, la ville commençait doucement à s’éveiller. Et qu’à sa gauche, il y avait tout ce qui l’intéressait. Alors, il s’y concentra.

Et puis, regardant le bois, remarquant cette tignasse rousse disparaitre derrière un tronc, il se mit en chasse.

Le jeu pouvait commencer.


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Dim 9 Déc 2012 - 15:21, édité 2 fois
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Il admira sa souplesse et sa rapidité de déplacement, mais regretta de ne pas la voir frapper plus fort. Les quelques échanges qu’ils avaient eu étaient prometteurs. Il aimait beaucoup ce qui se construisait entre eux. Ce n’était pas grand-chose, certes, mais ça l’amusait. Et Dieu seul sait que cela faisait des années que Balthar ne s’était pas amusé. Il la voyait monter aux arbres avec une simplicité déconcertante, se mettant en hauteur pour pouvoir l’avoir. Il la voyait redescendre agilement, récupérer ses flèches pour remonter immédiatement. Elle avait compris qu’en hauteur, elle était plus à même de l’avoir, et à l’inverse, que lui ne pourrait rien contre elle. Il était satisfait de la voir aussi habile avec la distance, malgré son jeune âge. Parce qu’elle était jeune, songea-t-il. Vraiment très jeune. Il n’avait jamais pensé être capable de telle chose à onze ans. Lui avait appris toutes ces choses en observant, mais à sa majorité, après son départ de son île natal. De voir la rouquine se démener autant pour savoir se défendre… Il était fasciné. Il se doutait que se démener pour de telle chose, c’était s’imaginer être en danger. Alors, il trouva cela curieux. Mais ne se voyait pas lui poser la question. Aussi, ce n’était pas si important. Pour l’instant, il s’amusait. Et tant qu’il continuait à s’amuser, alors il ne dirait rien.
Combien de temps pourrait-il faire durer ? Deux heures ? Trois ? Toute la journée ? Voire toute la nuit ? De toute évidence, jouer avec cette adolescente était mieux que de devoir rejoindre le front qui l’attendait à Saint Urea. Alors, il profitait. Si elle devait être le dernier souvenir avant ce salopard de Tahar Tahgel… Alors, il voulait le savourer.

Il plongea dans un buisson, évitant de justesse une flèche qui aurait pu lui faire très mal. Aurait pu. Mais Balthar était de loin le plus rapide. Son expérience était sa force. Mais avec elle, et parce qu’elle était à peine sortie de l’enfance, il se ménageait. Il n’y allait pas à fond. Il faisait particulièrement attention de ne pas la brusquer. Faute à son physique chétif, peut-être. Ou alors, à son âge. Ou à sa fougue. Ou à un vague souvenir.

Un craquement le sortit de ses songes. La gosse était descendue de son perchoir, certainement pour récupérer des flèches et les remettre dans son sac. Il sortit à son tour de sa cachette et se rua vers elle. La rouquine sursauta, elle attrapa son arc et tendit la corde pour tirer en sa direction. Il voyait sa poitrine se gonflait et suivre le mouvement de son arme. Il la voyait se fondre en son arc, pour mieux la maitriser. Il la voyait comprendre ce qu’il voulait lui apprendre. Balthar était satisfait. Il évita pourtant son attaque, parce qu’il était plus fort et plus agile. Il roula à terre, se remit sur ses jambes et y alla de front. Désarmée, elle ne savait pas comment réagir. Mais pas pour autant totalement dépourvu, elle envoya un coup horizontal pour tenter de le faucher avec le bout de son arc. Il se baissa à nouveau, et lui fit un croche-pied. La gosse sauta pour l’éviter, mais tituba en se rattrapant. Elle se prit les pieds dans une branche, chuta en arrière, finit les jambes en l’air dans un buisson.
Alors qu’il allait pour la relever, elle se remit d’elle-même sur ses jambes et se rua vers l’arbre le plus proche. Attrapant une flèche au passage, elle s’agrippa d’un bond à la première branche et escalada jusqu’à prendre assez d’hauteur. Il la regarda faire, avec un petit air satisfait sur le visage. Elle se mit debout près d’un tronc, attrapa son arme, plaça sa flèche et tira en sa direction. Il glissa sur le côté pour l’éviter, et vit l’aiguille se plantait dans l’arbre juste derrière lui. D’un saut de loup, il se rua dans un buisson, et retourna se mettre à l’abri.


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Sam 15 Déc 2012 - 17:37, édité 1 fois
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« Tu l’as fait toi-même ? »

Elle hocha la tête, répondant par l’affirmative.

« Mh. »

Balthar Craygen estima l’arme avec un intérêt particulier. Il en testa la souplesse, l’équilibre, l’étendue. Il l’essaya pour la prendre en main. Il devait admettre que pour une gamine de onze ans, elle en avait dans les tripes. Il leva les yeux vers elle, lui fit un sourire. Premier depuis qu’ils s’étaient rencontrés. Et il songea qu’une fille comme elle, dans leurs rangs, serait un atout indéniable. Il se ravisa ensuite, car il n’y avait pas de place pour des gosses dans les rangs de la révolution. Et qu’il avait vu ce que ça faisait de les prendre au berceau. Il eut une pensée pour un gamin croisé au détour d’une réunion, qui, derrière ses masques, n’était plus que l’ombre de lui-même.
La fougue de la rouquine lui donna un nouveau souffle, laissant un petit quelque chose qu’il n’aurait su nommer.

« Je repars demain. Toi, tu devrais rentrer chez toi. »

A nouveau, elle hocha la tête.

« Nous nous reverrons ? »

Il fit une moue :

« Je ne pense pas. »

Elle baissa les yeux, ramassa ses affaires et se releva. Il la regarda s’en aller sans même lui dire au revoir, s’enfoncer dans la nuit noire et disparaitre totalement. A côté de son feu, il s’allongea, se lovant dans sa couverture. Il croisa ses bras derrière sa tête et s’endormit.

Demain, Balthar aurait fort à faire.

La mer à prendre, une île à retrouver. Une cause à sauver. Toutes ces choses dont les rouquines de onze ans ne doutent pas.
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