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L'enquête.

Les premiers rayons du soleil chassent le ciel d'encre, percent à travers les rideaux café au lait trop clair de ma piaule minable. On devine déjà le temps maussade qui va squatter l'endroit toute la journée, y'a un manteau de nuages épais comme pas permis. Le clocher tardera pas à tinter six fois. J'émergeais déjà quand il a rempli son office, un peu plus tôt. C'est l'heure. Je soupire un coup, me redresse contre la tête de lit et jette un oeil vers la silhouette endormie à côté de moi. Une cliente paumée qui voulait pas passer la nuit seule. Je fume. C'est rare mais y'a des matins comme ça ... Y'a une choppe aux trois-quarts vide à côté de moi, sur la table de chevet miteuse, à côté de la lampe miteuse de cette chambre miteuse. Une gorgée achève le fond d'alcool, le verre est reconverti en cendar. On va pas plus dégueulasser les draps qu'ils ne le sont déjà.

Y'a mon falzar qui glande, couché par terre à côté de moi. Il a dormi là, on dirait. J'vois une première gaudasse, à moitié embusquée sous une jambe du jean. L'autre fait le guet au niveau de la porte, entrebaillée. On sait jamais. Ma chemise ... elle est où, celle-là ? Hm, je l'ai pas enlevée de la nuit en fait. Trois boutons remis correctement, je repousse la couverture de l'autre côté du lit et finit de me sapper. Perdu une chaussette, on dirait. On s'en fout.


Tu ... tu t'en vas ?

Elle est réveillée. Sa voix prend même pas une intonation déçue, comme ça arrive parfois. Elle est trop lassée de la vie pour ça. Trente-cinq piges peut-être, seule, ballotée par la vie. Elle a épousé les emmerdes. Elle va pas faire un flan d'un minet trop sale sur lui pour demander un deuxième rencard et de dix ans au moins son cadet qui file sans dire au revoir. J'ai la sale migraine du manque de sommeil trop longtemps répété ces dernières semaines qui me prend, j'ai pas envie de lui causer. Mais bon. On fait rarement ce qu'on veut, dans la vie.

Faut qu'j'aille bouffer. Bosser.
Manger ...

Elle a dit ça l'air d'apprécier la proposition. C'en était pas une. J'lui réponds que bouffer, c'est bien, et que c'est pour ça qu'il faut que j'aille bosser. J'ai plus un rond ou presque. Mon ex-paye de marine me fait salement la nique des jours comme ça. Fait chier. Elle dit qu'elle serait contente si je lui ramenais un café. Elle m'emmerde mais c'est pas de son fait. J'lui dis que je vais voir pour ça, qu'elle peut descendre quand elle veut. Et je sors.

L'escalier craque sous mes pas, je me gifle deux ou trois fois pour relancer la machine qui se plaint de la fatigue physique et nerveuse qui l'étreint. Quand on se sait dans une situation précaire, on est pas d'entrain en se levant. On rumine. On se ronge un peu le sang, on agresse sans le vouloir. On vit pas, on survit. Pitoyablement. Rez-de-chaussée. Y'a un serveur qui dort debout, au bar. Je cogne. Contre le bois. Il se réveille dans un sursaut, demande d'une voix endormie ce qui se passe.

Y'a une femme qui descendra. Tu lui offres ce qu'elle veut boire.

J'lui file dix Berrys à lui, au lieu des vingt règlementaires de l'endroit. Mais ils vont dans la poche du jeunot qui l'est pas franchement plus que moi, alors l'affaire marche pour tout le monde. Voilà. J'peux pas faire mieux. Jme barre.

Y'a un espèce de brouillard qui nappe les rues, la bruine froide qui rend les pavés glissants même s'ils sont couverts de merde. L'air frais prend aux bronches quand jl'aspire. C'est bien, ça finit de me tirer du coltard. Autour, personne. Même pas un poivrot trop cuit. Pas plus mal. Pognes bien au fond des poches, je remonte les ruelles pas fréquentables. J'sais pas trop où aller, mais on trouve rarement ce qu'on cherche dans ces quartiers. Et on tombe souvent sur ce qu'on veut pas croiser. Mes grolles claquent la pierre à chaque pas, un nuage de buée m'enveloppe à intervalle régulier. J'mire un clebs famélique, au poil rongé ici et là, qui cherche dans un tas d'ordure le repas qu'il a pas eu depuis trois jours peut-être. Je m'approche, voir si dans le monticule dont il atteint pas le sommet, y'a un truc pour lui. Il grogne, montre un croc. Démerde toi.

Vingt minutes de marche. On approche des sept heures. Quelques pèlerins foutent le nez dehors. Ceux-là ont un job, sinon, pourquoi se lever si tôt. C'est assez con. Jme gèle plus, les muscles se sont réchauffés tout seuls. Sans trop m'en rendre compte, jme suis dirigé vers le seul coin familier : l'office de la marine. Vieille habitude. Jamais eu que ce foyer, depuis mes treize piges. Alors, c'est pas une radiation en carton qui va chasser les automatismes. Je mire l'uniforme au guichet, et le mec dedans. Cinquantenaire en fin de carrière, l'air bonhomme du gars qui attend juste sa paye sans prendre de risque. Un faible. Ça le gonfle déjà beaucoup de devoir se coltiner les horaires de nuit. Il attend juste qu'on vienne le relever pour rentrer se faire plaindre par sa rombière dans son douillet chez lui. Elle est belle, la Marine. On fiche à la porte les mecs réglos et on engraisse les incapables. Un jour, les gens accepteront plus ça. Un jour. Mais pas aujourd'hui.

Je l'envisage, sans détour, le regard dur de celui qui est habitué à diriger.

La nuit a été calme, collègue ?
Collègue ? Z'êtes pas du coin, vous.
West Blue.
Et vous venez foutre quoi si loin de chez vous, si j'peux me permettre, soldat ... ?
Future mutation. Et c'est Lieutenant. Lieutenant Elvis Trinita.

Là, il perd presque son équilibre sur sa petite chaise. Mon nom a résonné jusque dans ce coin. Officiellement, je suis un héros de la marine. Mon éviction s'est fait dans la plus sournoise discrétion. Comme quoi, ça sert.

Alors, rien à signaler ?
Euh ... non non ... enfin, presque rien ... euh ...
Précisez.
Une cave a pris feu, cette nuit. Sortie Sud. Vers les villas.
Et ? Vous êtes allé voir ?
Aller voir ? C'est que ... il s'agit de la demeure de Sir Tènement et il n'est pas bon de se mêler de ses affaires ...
C'est le rôle de la marine, de s'occuper des troubles, non ?
On lui prête des relations avec la pègre, mon Lieutenant ...
Je vois. ... Soldat ?
Mon Lieutenant ?
Vous avez bien agi. Je vais aller enquêter sur place. Taisez cette information à vos collègues. Tout doit se dérouler dans la plus parfaite discrétion. Ne mentionnez même pas ma visite ici. C'est un ordre.
Bien, mon Lieutenant !
Votre dévouement sera dignement récompensé.

Il est tout fier, le couard. Mais j'peux pas me plaindre. Grâce à lui, j'ai peut-être trouvé à me faire embaucher ailleurs. Le procédé laisse à désirer, mais quand on a faim, il faut savoir cibler ses priorités. Je ressors de l'Office sur un dernier regard convaincu adressé au "Seconde classe Walace " qui prie déjà secrètement pour une promotion inespérée.

Je marche. Réfléchis vaguement. Va falloir y aller avec les tripes, et beaucoup de gueule. J'ai des deux. Les premières m'ont toujours servies, l'autre m'a joué de sales tours. Au pire, si ça rate, il sera toujours temps de chercher un taf' minable, payé au lance-pierre, comme tous les monsieur tout le monde sans envergure. Mais pourquoi s'en contenter ? J'aspire à mieux. À beaucoup mieux. Avec un peu de chance, on va me payer pour faire ce que j'aime. Hors horaires de service, même pas imposé.

On m'indique la villa que je recherche en me jetant un regard où danse la curiosité, derrière la crainte qu'inspire le nom. La ville s'éveille. Pourtant, y fait pas lumineux. Non, c'est sombre, dépressif. Y'a pas un sourire sur les visages, pas une lueur de chaleur dans le décor. Que le gris du bitume et celui du ciel qui se font face et se rejoignent à l'horizon. J'arrive devant le haut portail de l'entrée de la demeure. Y'a une effervescence soigneusement camouflée, sur place. Presque parfaitement, mais on trompe pas l'instinct de l'enquêteur. Et il y a ce très léger voile de fumée, qui s'élève depuis l'arrière et danse ici dans une odeur tout à fait particulière. J'attends. Checke la géographie des lieux sans trop en avoir l'air. Un malabar finit par remarquer le manège et se ramène. Il sort les dents; comme le chien de tout à l'heure. Mais j'me méfiais plus du canidé que de lui. Je demande à parler à son patron. Une première fois gentiment. La seconde en tordant un peu l'un des barreaux de la grille qui nous sépare. J'ai son attention. Je rentre.

On me conduit dans un petit bureau annexe. C'est pas celui du patron, à coup sûr. Mais c'est un premier pas. On me désigne un siège en bois, et m'intime d'attendre là sans faire d'histoire. Ça me va. Un individu bien sapé comme il faut se pointe. Je l'évalue au rang d'homme de confiance. Si je le convaincs lui, c'est dans la poche. Il a le visage cordial, les gestes polis mais le ton cassant.

Faites vite, je vous prie, je suis occupé.
Ouais, l'incendie hein ...
Pardon ?
Voilà le plan, monsieur : je me propose de vous aider à régler votre petite affaire d'incendie.
Il est déjà éteint, en quoi pourriez-vous nous être utile ?
J'pourrais peut-être retrouver ce qu'on vous a dérobé...

Il se crispe. Lève une main déjà, pour demander à son molosse resté en retrait d'intervenir. Bingo, j'ai vu juste.

Relax. Vous m'avez dit de faire vite, non ? Si j'suis ici, c'est pas pour vous chercher des crosses, j'suis pas assez con pour ça. Non, j'suis là parce que je peux vous aider. Et que vous, vous avez des tas de billets verts dans vos caisses pour embaucher des gens compétents comme moi. Sauf que les autres gens, ils sont pas là. Moi, oui. Et j'pars pas sans être embauché.
Ho ... et si je vous réponds non ?
J'vais tout répéter à la marine, bien sûr.

Il se recrispe. L'autre s'agite dans mon dos, attend un signal. Grand sourire. Arrogant, un peu. Confiant, surtout. Je mens pas sur mes capacités. Seulement, je peux pas déballer mon CV au gusse, ça ferait mauvais genre. Il me toise, silencieux. Puis éclate de rire.

Vous en avez, du cran, jeune homme. C'est appréciable. Entendu. Vous êtes embauché. Monsieur ... ?
Elvis.

Poignée de main franche, sourire entendu. Et soudain, l'étreinte se referme, il me plaque contre son épaule. Merde. Une voix sombre.

J'espère que vous savez ce que vous faites... Elvis.

J'espère aussi ... Et il me relâche. Il m'aurait presque foutu la trouille, ce con. Il extrait d'un tiroir de son bureau une enveloppe, qu'il me balance, indifférent, en disant que ça devrait couvrir les frais d'enquête. Y'a facile cent barres, au poids. Il a jeté ça tellement négligemment que ça m'en file la gerbe. Juste après, il dispense ses ordres à son homme de main.

Conduis le au sous-sol. Ne le lâche pas d'une semelle. Je veux un rapport détaillé toutes les heures.

Et le pti déj au lit, aussi ? Je me tais. Je suis mon guide jusqu'à la scène de crime. Ça y est, j'y suis.

Tu reprends du service Lieutenant.
    Ça a commencé comme ça. Par un poing tambourinant sur une porte, couvrant le son de batterie, de guitare et de basse sortant de ma sono pourrie. Y'avait ce grésillement qui rendait chaque son atroce, qui donnait un goût de merde au plus beaux solo. Mais je m'en cognais, j'étais jeune.

    Oui, ça a commencé par ça. Une foutue migraine qui me rongeait le cerveau ; une bouteille de bière qui finissait par terre, percutée par mon bras trop engourdi. Je me suis levé sans trop comprendre. Ça sentait la gnôle, la pisse et la clope. Une odeur que j'aimais bien. Celle qui sentait le chez soi.

    C'était un chouette jour. Où le soleil était moche, le son de la sono encore plus pourri que d'habitude et l'odeur plus insupportable. Je me suis levé avec ce sourire en plein milieu du visage tandis que les coups continuaient à rythmer le son. Le soleil était levé depuis bien longtemps. Ça pouvait pas être la flicaille. L'était trop tard pour eux. L'était trop tôt pour un taff. J'ai sorti mon flingue de l'armoire, ai ouvert la porte de la main droite en gardant la gauche de bien cachée derrière.

    Un guss m'a zieuté. L'avait un gros paquet en main et la clope au bec.

    C'est vous, monsieur Bairy ?
    Wesh gros, c'est moi. Qu'est c'que tu veux ?
    J'ai un colis pour vous.
    Qu'est c'que tu m'dis ? C'est quoi ?
    Navré monsieur, moi je suis le livreur. Je prends un colis dans un chariot, je l'emmène à l'adresse indiquée et je prends mes billets.
    Et ?
    Et c'est tout, monsieur. Bonne journée.
    Et ! Wesh gros ! Attends !
    Oui ?
    Dis qu't'aurais bien une clope pour un chouette guss dans l'besoin ?

    Le gars partait déjà mais je m'en cognais. J'avais gagné ma nicotine de la journée et un drôle de colis avec. J'ai fermé la porte, fermé le verrou et ai miré ce drôle de chose qui trônait sur la table. Au milieu des mégots, des restes de bouffe et des bouteilles de bières qui traînaient. Ça faisait du bruit à l’intérieur. Ouai, un drôle de bruit alors je me suis grouillé de déchirer le carton pour tomber sur cet encore plus drôle de truc. C'était une sorte de bestiolle endormie. Pis d'un coup elle s'est reveillé, l'a changée de forme en un instant pour se dorer d'une barbiche et de plein de petites rides.

    Bullu Bullu Monsieur Bairy ?

    Wahou... C'est trop génial … Ouai m'sieur, c'est moi.
    J'ai un travail pour vous.
    Wesh m'sieur... Mais... Z'êtes qui ? Z'êtes pas une mouette ?
    Non Monsieur Bairy. Je suis votre nouvel employeur. Notre prochain rendez vous est demain, à 9h au Bar Bar.

    Et là, la chose a arrêté de faire du bruit.

    Je crois bien que le lendemain, j'ai du mettre un réveil pour me lever à temps. J'avais pas tout pigé. En fait je comprenais rien de ce qui arrivait. Mais je m'en curais. J'avais juste capté qu'employeur ça voulait dire fric et fric, ça voulait dire « bière, gonzesse, pétards ». J'étais jeune, j'étais con. Quand je suis arrivé au bar, il n'y avait pas un chat. Juste le vieillard au comptoir qui récurait ses verres et deux autres gus qu'attendaient devant une chose comme celle que j'avais eu. Le premier des gars avait le mégot aux lèvres, le chapeau sur le crane et le regard tout fermé de ceux qu'en ont trop vu. L'autre, c'était pas pareil. C'était autre chose. Un gros monstre comme on en croise pas souvent. Comme on voudrait pas en croiser. Et pourtant, malgré sa sale gueule, l'avait cette prestance qui me faisait presque avoir confiance. Mais je me demandais bien, quand même, ce que je foutais là. J'ai zieuté à droite et à gauche pour tenter de voir une mouette cachée et j'ai rien vu, alors j'ai osé m'approcher.

    Je crois qu'on est resté un long moment là. A se zieuter en chien de faïence. Je crois bien qu'aucun de nous trois ne savait pourquoi l'était là et ce qu'était ce foutu job. Y'avait juste le bruit du chiffon de l’ancêtre qui se rechignait à frotter le verre. Le bruit des cendres du cigare du monstre qui tombaient dans le cendare. Juste le bruit des trois cœurs qui battaient plus lentement que l'son d'un Bob Tarley. Pis à 9heure 15 précise, quand la petite horloge au dessus de la trogne du vieux s'est mise sur son quart, y'a la bestiole qui s'est réveillée.

    Bullu Bullu Bonjour Messieurs.
    Wesh bonjour m'sieur l'employeur.
    Hmm...
    J'ai un travail pour vous messieurs.
    Ouech, pour ça qu'vous êtes l'employeur.
    Hmm...
    Si vous voulez de ce travail, monsieur Bairy, je vous demanderais de vous taire.
    Quoi que ? Euh... Oui m'sieur. Tout d'suite.
    Merci. Dorénavant, ce seront vos amis qui parleront. Le Gentlefish Ishii Mösh et le pistolero Dandoo. Si je vous ai convoqué ici aujourd'hui, c'est parce que vous êtes les meilleurs que je connaisse dans vos domaines. Et pour ce que je vais vous dire, j'ai besoin des meilleurs. Du plus habile de ses doigts pour déjouer et ouvrir les coffres, du plus silencieux des meurtriers et du plus doué des ...euh... Faiseurs de diversion.


    Ce qui a suivi, c'est de longs mots que je comprenais pas. Tout un tas de palabres. Ça parlait de bouteilles de gnôle qui fallait pas boire, de sakés qu'il fallait pas ouvrir, de méchants qui devaient pas comprendre. Moi, je parlais pas, je tentais juste de mirer où ils voulaient en venir. De traduire les mots qu'étaient de trop compliqués pour mon cerveau. Pis un moment,ça a parlé de caché.

    Hmm... Nous pouvons mettre ça sur le dos d'une famille rivale ?
    Wesh, le feu
    Vous pourriez vous déguiser en marines ?
    Wesh, le feu j'vous dis.
    Et si on se faisait passer pour des pirates ?
    Le feu ! De Jah ! Le Feu !
    Hmm ?
    Wesh gros, le feu, c'est con, ça part vite et ça laisse rien.
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    Le malabar zieute par dessus son épaule tout le long du trajet, voir si je me laisse pas distraire par je sais quoi. Vrai, la baraque est du genre cossue, mais j'ai rien d'un cleptomane. Bondir sur tout ce qui brille, pas mon crédo. Ça serait même plutôt l'inverse. Alors, juste un petit sifflement admiratif, tout léger, et on marche. Défilé de corridors, escalier en colimaçon, les doigts trainent sur le mur de crépi ici ou là. On troque la lumière du jour pour le halo blafard des lanternes fixées à même les murs. Et on arrive au terme d'une descente de trente et quelques marches bien polies voire un peu pète-gueule pour certaines sur le lieu du larcin.

    Y'a une paire de gars qui s'échine à chasser l'odeur de fumée qui pourrit les murs, une autre qui déplace des caisses de bois méticuleusement fermées. Avec un peu trop de précaution pour que ça renferme juste de la babiole. On arrive, un mot glissé par mon guide à l'oreille de l'un, téléphone arabe et on me lance un bref salut de la tête. Un rictus méprisant à la commissure des lèvres de l'un, un regard circonspect chez l'autre. Bonne ambiance.

    Premier contact avec les lieux. Peut-être quinze mètres de large, et le double de long. C'est grand, à l'image du reste de la bâtisse, en surface. Mais ici, pas de clinquant. C'est presque austère. Sol de béton, dur, poussiéreux, sauf là où il a été trempé dans l'entreprise visant à noyer l'incendie. Une marge de trois mètres de large, côté escalier pour circuler partout, le reste investi pour le rangement. Optimisation de l'espace. Mur de terre tassée pour constituer les travées. La première, on y entreposait des caisses sur de solides étagères, avant de les bouger; un mètre de long, genre cagette à légumes du riche avec autre chose que de la soupe dedans. La seconde, des fûts. Vieux chêne, noble, douelles impeccables mais on devine l'âge avancé du tonneau. La troisième, qui porte sur la façade nord de la baraque, je devine pas ce qu'on y trouvait. Ça n'y est plus. La place a été pillée. Pas saccagée, à la mal-propre, plus soigneusement vidée. Pas de pertes apparentes de marchandise, pas de débris.


    Y'avait quoi ici ?

    Grimace. Silence lourd qui incite à pas jouer les fouille-merde. J'peux pas accepter ça comme réponse. Je lui dis. Si on veut bosser efficacement, va falloir y mettre du sien. Sinon, il se démerdera avec son patron pour expliquer que le gars embauché bien cher s'est barré au bout de cinq minutes. J'suis convaincant, il répond.

    Des bouteilles. À l'unité. Rangée dans des coffrets personnalisés. Des modèles quasi uniques, pour certaines.
    Les plus précieuses de toute la cave ?
    Oui. Le reste constitue des cuvées remarquables, mais en aucun cas comparable.
    Hm. Combien de bouteilles manquantes ?
    Cinquante.
    Leur taille ?
    'ff ... grandes comme ça à peu près ... pourquoi ?
    Les gars qui sont venus savaient ce qu'ils venaient chercher. Ils ont forcément pris grand soin de ne rien casser. Beaucoup d'argent.
    Et ... ?
    Alors, ils avaient une charrette, ou un véhicule du genre. Ils ont repéré un angle mort dans vos tours de ronde, un recoin où ils puissent rester camouflés le temps de procéder.
    Impossible, les gars s...
    C'est ça, ou il y a un mouchard.

    Phrase qui fait grincer des dents. Fini les amabilités, mettre les pieds dans le plat, ça fait parfois craquer les plus friables. Lui, il étouffe un juron et c'est tout. Autour, ça s'est arrêté de manœuvrer un temps, mais pas plus, l'œil noir les incite vite à reprendre leur manège. Un signe de main pour chasser l'air, signifier, j'ai lancé ça comme ça.

    Un pas vers la zone calcinée. Les murs de torchis gardent les stigmates du feu. Idée à la con, de pas avoir claqué un peu de pognon dans le renforcement du sous-sol avant le drame. Même ceux qui s'appuient sur leur titre pour se penser intouchables ne sont pas à l'abri. Extrémité nord du mur, ce qui ressemble à une poterne a disparu, ne reste qu'un tas de cendres. Mon pied balaye le dessus, pour laisser apparaître la pièce maîtresse de la serrure. J'attrape le métal encore chaud, l'époussète souffle dessus. Un petit nuage grisâtre s'élève.

    Vous faites quoi ?
    Elle est intacte.
    Hein ?
    La porte n'a pas été forcée.
    On leur a ouvert de l'intérieur ?
    Ou l'un des voleurs s'est faufilé à l'intérieur, a déjoué les gardes pour ouvrir aux autres.
    Non, impossible.
    Hin.
    Vraiment. Le rez-de-chaussée est surprotégé.
    Oh ? En quel honneur ?

    Silence lourd, deuxième mouvement. J'insiste pas, ce coup-ci, ce serait pas judicieux.

    Ou alors ...
    Ou alors ?
    Un des intrus est crocheteur. Ça leur sera utile pour ouvrir les coffrets des bouteilles sans risquer d'endommager le contenant ou le contenu, aussi. ... Tenez, vous pouvez faire quelque chose pour moi ?
    Dites toujours.
    Je veux le nom des meilleurs receleurs du coin. Les maestro du marché noir. Ceux qui brassent de gros sous. Si vos gars bossaient pas pour un employeur en particulier, il chercheront à refourguer leur came. Et à vous croire, y'en a pour un sacré paquet.
    Ça a du sens.

    Petite surprise, le ton de sa voix a perdu de son scepticisme. Ouais, je connais mon métier. Un sourire en coin, j'pousse pas le vice jusqu'à demander un café. Un des hommes de mains s'éclipse, suit les directives que lui a transmises son supérieur. Bien. On va former un bon duo, lui et moi je sens.

    On sort. De l'extérieur, la cave constitue un renfoncement dans la paroi. Couvert des deux côtés à un regard éloigné par les façades, plus avancées, de face par une haute haie. Terrasse à balustrade côté droit qui surplombe. Rien côté gauche.

    Le voilà, l'angle mort. Le coin. Dans la nuit noire, même un gars posté juste au dessus qui se pencherait à s'en rompre le cou ne verrait personne.

    Quelques pas dans la rosée, à ausculter le sol. Et ... des marques. Des traces de pas, plus très nettes, mais tout de même. Deux types différents, des humains. Et ... une marque. La marque.

    Dites... Z'en connaissez beaucoup, des gens qui chaussent du quatre-vingt, dans la région ?

    Sourire satisfait. On tient une piste.


    Spoiler:


    Dernière édition par Trinita le Sam 15 Juin 2013 - 0:09, édité 1 fois
      On a passé des jours, là, comme des cons. On était à l’orée du bois à rien faire d'autre que zieuter le château. Enfin... château... Y'avait des colonnes à faire pâlir le plus riche, l'herbe coupée à ras par des gars qui ne semblaient avoir que ça à faire de leurs journées. Tellement qu'ils y allaient au ciseau et qu'il leur manquait plus que la règle pour passer pour de vrais cons. Y'avait des rideaux tout en dentelle à chaque foutu fenêtre que je mirais. Pis y'avait cette odeur qu’empreignait le tout jusqu'à bouffer mes fringues, mon corps. Y'avait cette odeur de propre, de liquide qui sent bon, de fleurs et d'herbe fraîche. Alors que moi, c'était que sèche que je l'aimais, l'herbe.

      Le gros monstre et le cow-boy, eux, on avait presque l'impression qu'ils s'en curaient, de trop occupés à se planquer des vigiles, trop occupés à gratter leurs bouts de papiers comme pour noter des trucs que je comprenais pas. Que je voulais pas comprendre. Alors moi, plutôt que de les suivre dans leurs scribouillages, je passais le temps à bédave. Y'avait ce cône qui me quittait plus, qui restait toujours bloqué au coin des lèvres et qu'aidait à faire passer le temps qui voulait pas couler.

      Wesh Ishii, t'en as pas mare de ton cigare ? Viens bédave un coup.
      Hmm... Chut...

      C'était toujours la même phrase que je sortais. Toujours la même réponse que j'avais. Comme un refrain qu'avait pas de fin et qu'on se devait de répéter pour pas l'oublier. Y'avait parfois le gros rond jaune qui venait nous cramer le crane. Parfois la pluie qui battait tout jusqu'à percer les feuilles. Parfois même le vent qui se levait manquant de déraciner les arbres. Plus souvent, c'était l'herbe qui me retournait jusqu'à me faire voir des choses qu'étaient nul part ailleurs que dans mon crane.

      Puis un jour, le Monstre a dit « Hmm... C'est aujourd'hui, pour le gamin ». J'ai pas compris. J'ai cru un temps qu'ils parlaient de moi mais je voyais bien que j'avais rien à faire. Je voyais bien qu'ils miraient ailleurs. C'était le cireur de pompe qui sortait. L'était pas plus haut que trois pommes et dans ses toutes petites mains dansait une drôle de boite. Y devait y avoir tout la tiraille. La brosse, la cire, les lacets tous propres et p't'être même un peu de fil à recoudre. Il passait le chemin tout bien taillé comme tous les jours pour rentrer se tailler un chez soi s'il en avait un. Ses frusques étaient plus crades que les miennes, ses traits, plus jeunes, beaucoup plus jeunes. Devait pas avoir dépassé la demi douzaine d'années qu'il trimait déjà et ça se voyait que c'était pas par choix. Même moi à cette époque, j'ai senti un grain de tristesse pour ce môme. Et j'étais con, à l'époque. On l'a suivi du regard dévaler avec peine le chemin qui menait à la fin du château. On pouvait pas le prendre trop près, trop vite parce que y'avait trop de gardes trop attentifs. Alors on attendu, en se cachant d'arbre en arbre jusqu'à arriver à la fin du parc, jusqu'à arriver dans la basse vile là où y'avait plus rien pour nous empêcher d'agir. Alors le Monstre a coupé la route du mome d'un bond en avant,manquant de couper au passage le souffle du petit qui s'attendait pas à tant d'horreur.

      Hmmm... N'ai pas peur.

      L'a sorti une image.

      Hmm... Tu vois cette image ? Ce joli vélo tout rouge, avec ses magnifiques roues ? Tu auras le même, si tu nous fais un autre, de joli dessin. Hmm... De la cave. Ne tente pas de nous retrouver. Nous le ferons.


      ------

      A vrai dire j'y croyais pas trop à ce petit mot. Je pensais pas ça possible que le gosse accepte. Mais le Monstre, lui, l'était confiant. Les jours suivant, on n'a fait que dormir pour se réveiller quand le soleil se couchait, et on mirait de nos petits yeux ce qui se passait quand la nuit englobait tout. A vrai, dire, pas grand chose. Mais le Monstre et le cow-boy eux, voyaient des choses que j'aurais jamais vu. Le balcon qui permettait de passer sans se faire voir, l'humidité du matin qui trempait la pelouse jusqu'à marquer le sol de nos pas. Les changements de patrouilles qui se faisaient à des heures fixes, les rondes qui duraient un temps précis.

      A vrai dire, c'est au fil de ces nuits où m'avaient piqué mon herbe que j'ai commencé à piger tout ça. Comment ils contrôlaient tout jusqu'au moindre foutu détail. C'étaient des pros, voulaient rien laisser traîner et plus le temps passait, plus je me sentais con, inutile. Moins je comprenais ce que je foutais là.
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      Comme convenu, l'heure du premier bilan arrive. Trop vite, juste quand on commençait à échafauder un raisonnement valide, à émettre des suppositions pas trop bancales. Mais y'a pas le choix, sur la gueule de mon fidèle superviseur, je peux lire le mot inflexible marqué en gros. Je tente pas de l'amadouer, de le convaincre que c'est une perte de temps. Faut se plier aux règles, et au moins je m'en plains, au plus de points je gagne. On remonte au bureau à bonne cadence, la sensation d'avoir reconstitué un angle de départ du puzzle incite à en faire plus. C'est pas encore le feu de la victoire que l'on sent en nous, mais y'a un début d'idée qui brûle et ça sent bon. L'employé toque, entre dans la foulée sans attendre d'y être invité. C'est comme ça que ça marche. Le supérieur hiérarchique est toujours là, enfoncé dans son siège de bureau. Devant lui, de la paperasse par piles entières constitue un rempart dont émerge simplement sa tête et son cou. Voix détachée, moulinet de la main droite vide de conviction, ses yeux dansent sur un rapport dont le contenu nous reste inconnu. C'est à peine s'il se souvient de moi. Pas de problème, je vais lui rafraîchir la mémoire.

      Je viens au rapport. Vous cherchez trois individus. Deux humains, un humanoïde. Probablement homme-poisson.
      Hm, merveilleux... et c'est tout ?
      Il va me falloir interroger vos hommes de main.
      Hors de question.

      Un soupir agacé traverse la rangée de feuilles, vient se heurter à ses sourcils froncés. Petit silence. Mécontentement palpable de part et d'autre.

      Je ne peux rien faire si vous me tenez en bride constamment. Je dois savoir si l'un des employés est dans le coup. Ça expliquerait beaucoup de choses.
      Comme ?
      Ces gars savaient ce qu'ils faisaient. Ils ont été renseignés. Structure des lieux, contenu. J'apprends comment ils ont mis la main sur ses informations, je les retrouve. Sinon, aucune chance.

      Moue éphémère. Il évalue l'idée, l'homme. Il va hocher la tête. Je suis le meilleur dans ce que je fais, je suis sa meilleure chance d'y voir plus clair.

      Entendu. Faites-moi savoir tout élément nouveau.
      Comptez sur moi.

      On ressort.

      Je veux une liste des employés. Tous, sans exception, du jardinier au vigile, en passant par les femmes de chambre. Vous avez les noms et adresses que je vous ai demandés ?
      J'en ai trois. Karston, Franks, Caruso. Les meilleurs revendeurs de toute la région.
      Le plus connu ?
      Caruso.
      Le plus dur en affaires ?
      Sûrement Karston.
      Bien. Allez voir du côté de Caruso.
      Et Franks ?
      Je m'en occupe.
      Pourquoi lui ?
      Nos gars ont tout évalué sans rien laisser au hasard. Pour leur transaction, ils tâcheront de rester discret. Et s'ils ont risqué le pire pour pêcher autant, ils chercheront à ne pas se faire trop arnaquer par le revendeur.

      Hochement de tête. Répartition des rôles conclue et personne pour me coller aux basques. On me laisse manœuvrer à ma guise.

      Prévoyez un endroit calme où je puisse mener un interrogatoire du personnel dès mon retour.

      Je sors avec l'adresse de Franks en poche. Pas tout à fait dix heures. Parfait horaire pour une petite visite de courtoisie chez un receleur. Celui-là occupe un ancien bâtiment militaire désaffecté, en périphérie de la ville, reconverti en plaque tournante du marché noir. Ça me prend une heure de me rendre sur place. Pas du temps gaspillé pour autant, on en apprend beaucoup à discuter avec les hors-la-loi. Un tour de ronde pour inspecter les lieux, repérer les différentes issues, en déduire l'endroit probable où il planque son matos, où il se planque lui. Et entrer.

      Il fait sombre. La lumière du jour perce au compte-goutte à travers les planches clouées devant les larges lucarnes dans le béton. Le nouveau repreneur n'aime pas trop la lumière, ni les regards indiscrets. Quelques pas au rez-de-chaussée, à aviser le décor, les potentielles armes. Rien d'impressionnant. Mobilier minimaliste. Celui-là sait cacher sa richesse au tout-venant. Un malin. Il ferait bien la paire avec mes voleurs.

      Crr.

      Un bruit. Au premier. Des déplacements, légers, mais distincts. Se cacher sous l'escalier de bois, tandis que les pas feutrés glissent le long des marches, méfiants. Et attendre le bon moment pour neutraliser l'individu. Un bras vif qui l'attrape au collet, le flanque par terre et lui plaque une main sur la bouche pour l'empêcher de crier. L'autre main tord son poignet et lui fait lâcher le pied de biche dont il était armé. Fin de la lutte.


      C'est toi Franks ?
      Hmm. Hmm.
      Bien. Je te relâche. Tu cries, tu cherches à t'enfuir, cette discussion deviendra beaucoup moins agréable.

      La pression s'estompe, il peut se relever. C'est un gars pas bien grand, pas bien costaud, qui nage dans des fringues cinq tailles trop larges pour lui. Un cou maigrichon, des cheveux en bataille et deux prunelles dynamiques. Il flippe pas, il a l'habitude. Il époussète juste ses fringues, me dévisage.

      T'es qui toi, un marine ?
      J'ai l'air d'un marine ?
      ...
      Un lot de marchandise précieuse a été volée cette nuit. On pourrait vouloir la revendre. Un mastodonte qui joue les voleurs. T'as entendu parler de ça ?
      Non, mec, non. Je suis clean. J'ai rien à voir là-dedans.
      Si quelqu'un se pointe avec l'intention de revendre pour plusieurs millions en bon alcool, tu me préviens. Illico.
      Et je ferais ça parce que ... ?

      Trois pas. Je le rattrape par le col, le plaque contre un mur.

      Parce que ça ferait mauvais genre que tes clients apprennent qu'un trou du cul comme toi collabore avec la marine.
      Quoi ? Mais c'est du délire, je suis régl...
      On verra ce qu'en pensera la Rue après que j'ai glissé ton nom aux mouettes. Tu connais le sort qu'on réserve aux balances, pas vrai ?
      Tch.
      Alors, montre que t'es aussi malin que tu le penses. Tu fais ce que je te demande, je m'arrange pour que t'y trouves ton comptes. Sinon, je te détruis.
      Bon, bon ... Repasse demain, j'aurai une info pour toi.

      On progresse. Plus qu'à rentrer à la villa. Espérer que les employés seront aussi coopératifs. Une pièce du puzzle après l'autre.
        Je n'étais pas du genre à foncer, plutôt à prendre mon temps. Ça faisait une pelleté de jours qu'on observait les lieux à tenter de tout cerner. Tous ces détails qui font qu'un plan fonctionne. Mais le petit, lui, il comprenait pas. Il voyait pas ce qu'il faisait là et à vrai dire, avant que le patron n'appelle, moi non plus. Puis il y a eu ce jour. L'escargot a recommencé à faire du bruit alors qu'on revenait d'une nuit à tout épier. On avait les corps lourd, on ne voulait plus que dormir, mais c'était le patron, c'était l'escargot qu'aucun de nous se voyait de jeter. L'animal s'est refait le visage en un instant, a lâché une seule phrase et s'est tu.

        « Le gamin vient à 10 h, Inu Town, le Bar bar, demain, les deux autres restent surveiller les lieux, un le jour et un autre le soir. »

        J'aimais pas ça parce que je me demandais bien ce qu'il allait faire du petit mais surtout que j'allais devoir bosser seul. Et tout le monde sait que deux yeux suffisent pas à surveiller les arrières. Que ça suffit pas non plus à noter les détails qui sautent forcément. Une bonne garde se faisait à deux et tout le monde le savait... Sauf ce foutu boss. Le Monstre et moi on s'est regardé d'un œil circonspect et à sa gueule, l'était plutôt d'accord. Mais on n'a pas eu le choix.

        Le lendemain le môme sautait dans le premier bateau et je partais déjà tenter de comprendre les dernières choses qui manquaient.

        Y'avait le calepin tout rempli de gribouillis où chaque heure de ronde se faisait noter sur un bout de feuille. La première de huit heure qui faisait le tour de la battisse, qui mettait 42 secondes de moyennes, qui s’arrêtait toujours à 9h12 parler quelques minutes avec la femme de ménage. Les deux hommes regardaient sa paire de sein presque trop ouverte par le décolleté, échangeaient quelques mots et repartaient ensuite comme si de rien. Le facteur passait vers 11 heure avec la patrouille qui le fouillait à chaque fois. Elle se faisait remplacée sur les coups de 12 heures. A ce moment, chaque mardi, le paysan venait déposer tous ses fruits pour la semaine. Son chariot se faisait inspecter par un homme avant même que le paysan ne mette pied à terre. Lui fallait dix minutes à tout déposer sur le sol, cinq à négocier le prix avec une grosse marmule et trois pour décamper de là. Le chariot vide et les poches pleines. Le Mercredi, c'était le boucher, qui venait aussi le vendredi et le lundi, et qu'avait le droit à la même fouille que le campagnard.

        On a passé deux jours comme ça, en continuant à ne rien faire d'autre que griffonner des infos, parfois de nouvelles, souvent des déjà connues. Et quand on échangeait nos rôles, on passait à chaque fois plus d'une demi heure à se farcir toutes les infos, à se rappeler tous les détails. C'était long, mais le passage obligé pour ne rien oublier. Alros on faisait.

        Deux jours ont coulé comme ça. On n'a pas eu de nouvelles du petit jusqu'à le voir arriver. J'étais de repos, l'Ishii de garde. Il a toqué à la porte et m'a affublé d'un horrible sourire de gamin quand je lui ai ouvert. « Tu d'vineras jamais ! » qu'il disait, « s'tu savais comme t'pourras plus t'passer de moi ». Si y'avait pas eu le patron qu'avait voulu de lui, je lui aurait fermé la porte au nez, quitte à lui défoncer le crâne. Mais non, et puis... Après m'avoir poussé pour aller chercher le cachalot, après nous avoir forcé à bouger jusqu'au port, après tout ça... Faut dire qu'on n'a pas été déçu. L'avait passé deux jours sur Logue Town, loin des yeux de la ville à construire un chariot parfait. Oui, parfait.

        « J'suis le plus grand créateur d'chariote de Logue Town! J'gagne toutes les courses de Kart d'la ville ! »

        Les feuilles souples frottant contre le sol pour enlever les traces de pas. Les essieux solides pour supporter le poids des bouteilles, les doubles pédales pour les traîner le plus facilement possible. L'huile ni trop liquide pour ne pas laisser de trace ni trop invisible pour ne pas avoir de problème.

        « Hmm... On est prêts. »



        ----------

        Y'avait eu des broutilles. Des détails qu'avaient loupé pour laisser ce goût du pas parfait en bouche du cacahlot. Mais moi, j'avais beau tenter de comprendre, j'y arrivais pas. On se trouvait avec plusieurs dizaines de millions de berrys dans chaque poche. Tant de bouteilles valant plus d'une vie qu'on savait plus quoi en faire. Et pourtant, plutôt que de les revendre, plutôt que de foncer se nourrir de billets verts, y'avait le calme qui suivait la tempête. On restait là, au fond de notre cloitre. On avait loué un garage pour y planquer les bouteilles le temps que ça se calme. Les ports allaient être surveillé, alors valait mieux que ça reste quelques mois à l'Ombre. C'était loué au nom d'un gars qu'en devenait une à un pote d'un pote qui savait même pas pourquoi m'avait rendu ce service.

        Nous restait plus qu'à nous, de trouver une solution pour sortir. Et elle s'appelait Franks. Le gars qui connaissait tout le monde sans que personne le connaisse et pouvait trouver toute chose n'importe où. Enfin... C'est ce qu'on nous avait dit, mais faut se méfier des choses trop belles... J'allais le voir le lendemain.
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        À peine de retour, j'ai demandé où j'allais mener mes interrogatoires. Mon superviseur m'a conduit à une pièce de l'aile sud, porte déjà entrouverte. Je suis entré. Une chambre de boniche reconvertie pour l'occasion en modeste bureau.

        Tu peux t'installer ici. Je vais faire venir les employés.

        On laisse tomber le vouvoiement, apparemment.

        Ok. Un par un. Et ne leur dis pas de quoi il est question.

        Il repart sans broncher, ça lui pose pas de problème particulier. J'attends. C'est pas lumineux, ici. C'est pas grand, c'est pas beau. Un lit, une table, une chaise. Une petite porte qui donne sur le jardin, et c'est tout. Je sais pas si les normes de décence sont respectées; et je m'en cogne pas mal. L'endroit me convient parfaitement tel qu'il est. Froid, austère, presque glauque. Tout le petit personnel de maison saura à quoi s'en tenir. On est pas là pour décerner le titre de domestique du mois. Je poireaute encore deux ou trois minutes, à tâter du doigt la couche de poussière qui recouvre le parquet, à m'assurer de la solidité des fenêtres. Rien de bien intéressant à relever. Mon ventre balance une série de gargouillis pas discrets. J'ai faim. Soit, ça réveille la fibre du chasseur. Si j'veux bouffer, je dois tirer l'affaire au clair. Va falloir sortir les crocs. On toque à la porte. Je me retourne. Y'a mon gars et un autre, dans la cinquantaine, avec une tignasse et des guenilles à la Robinson Crusoë, en à peu près aussi pouilleux.

        Voici Lionel, notre jardinier.

        Un petit signe de tête; Lionel reste muet, un peu interdit devant le côté solennel un peu malsain qui flotte dans l'atmosphère.

        Je vais vous laisser discuter au calme et m'assurer que ça reste sage dans la "salle d'attente".

        Il a asséné ça avec ce côté implacable des hommes de main endurcis. Je fronce les sourcils et balance :

        Ça me semble parfait.

        Le décor est planté. On est partis pour une longue séance de chasse aux indices. Geste de main souple, ton un peu trop affable pour ne rien cacher :

        Alors Lionel, si vous vous asseyiez ? Nous avons à parler, vous et moi.
        Ah ... ah oui ?
        Bien sûr. Je suis prêt à parier qu'en vérité, vous savez même de ce dont il s'agit.
        Du ... du potager ? qu'il demande après avoir pris le temps d'y réfléchir trois secondes.
        Tu cherches à me fâcher, Lionel ?
        Non, non ...
        Je te parle de l'incendie.
        Oh, ça ...
        Oui, ça. Figure toi que je sais de source sûre qu'il y a une taupe ici. Et on fait quoi, aux taupes, hein, Lionel ?
        Moi, je me sers de purin de sureau que je place dans les galeries. Ça les incite à décamper du terrain et ça évite d'avoir à tuer des animaux.
        Du purin de s... Lionel. Je te parle pas des taupes, je te parle de LA taupe. Celle qui a ouvert aux pillards. Lesquels ont déclenché le feu pour couvrir leurs traces. Tu me suis ?
        Euh ... p...pas trop, non.
        Allons, Lionel... Une charrette, des traces de pas, un gros monstre qui vient poser ses sales pattes ici ?
        Oh ...
        Quoi oh ? Quelque chose ?
        Ça explique pourquoi mes plans sont saccagés. Ils ont marché sur mes salades.
        Mais on s'en f ... Hum. Bon à part ça, rien ? Vraiment rien ?
        Non, rien.
        ...
        Remarquez, j'y pense ...
        Oui ? Tu penses ? C'est vrai ? Tu penses savoir qui les a aidés ? Tu as entendu quelque chose ?
        ... il faudrait penser à vous procurer les outils de jardinage qui ont été perdu dans l'accident. Sinon, je pourrais jamais m'occuper du terrain convenablement. J'avais notamment une paire de bêches adorables comme tout qui ont cramé ...
        Mais étripez-le bordel !!! Bon, bon, j'ai saisi. Tu peux y aller Lionel ... ff'

        Ok, celui-là est beaucoup trop con pour être notre homme. J'espère qu'ils sont pas tous comme lui, sinon, bonjour la journée de merde.

        Suivant.
        ...
        Votre nom et votre rôle ici ?
        Madame Bonnechère ! Cuisinière !
        Aouch ... Ok, miss Bonnec...
        MADAME !!
        Ok, ok ... désolé euh ... y'a des acouphènes ici ... Madame Bonnechère, quelque chose à me signaler à propos de ces derniers jours ? Quelque chose d'inhabituel peut-être ?
        J'ai un peu grossi.
        Hm, je vois.

        [...]

        Vous êtes ?
        Aymil Luit, le concierge.
        Bien, Emile... À propos de la nuit dernière ...
        Bon, j'avoue tout, vous avez gagné ...
        Hein ? Pour vrai ?
        Oui, mais j'ai des circonstances atténuantes.
        Du genre ?

        Pour commencer, elle m'a juré qu'elle était majeure, j'en savais rien moi, faut m'croire !
        Mah ouais ...

        [...]

        Bien... vous êtes le ...
        Le Barman. Lloyd, enchanté.
        Je lis sur votre CV que vous étiez serveur à Tombstone, peut-être pourriez vous m'en dire plus ?
        Écoutez, d'une je ne m'en souviens pas, deux, j'y suis pas resté longtemps, et enfin cinq, y'a pas de cinq.
        Autre chose ?
        Je refuse de retourner à Dead Mood.

        [...]

        Ils étaient à peu près tous du niveau de Lionel, les domestiques. Le boss a dû le faire exprès. S'entourer de crétins finis pour pas avoir à craindre de se faire doubler par quelqu'un de sa maison. J'ai passé six heures à écouter baver les pires idiots de tout ce continent. Et maintenant, je suis coincé avec l'intendante, la doyenne. Une bavarde. Et une ... bonne vivante, on va dire.

        ... et c'est comme ça que le second mari de ma grand-tante par alliance du côté de mon demi-frère, Germain, un vrai Adonis maintenant que j'y repense, s'est retrouvé embauché auprès du grand amiral Pludbus Cèldéborde dans le temps.
        ZZzz... meuah ... teuh teuh teuh gesge' zest ? Oh, oui ... mouais, passionnant. Pour en revenir à l'enq...
        D'ailleurs, j'y pense, peu après – oh, j'étais jeune, j'avais à peine soufflé mes cinquante bougies - j'ai eu la chance de côtoyer le second commis de la cuisine du Baratie, Dieu qu'il était beau celui-là ...
        Hm, dites.
        Oui ?
        Y'en a encore beaucoup après vous, à interroger ?
        Non, beau gosse, il n'y a plus que moi. T'es libre pour un verre après ?
        Vous voulez dire que ...

        * toc toc toc *

        Qui est-ce ?
        Oh, c'est sans doute le petit Tommy.
        Tommy ?
        Un brave petit... qu'est ce qu'il est beau pour son âge... il se rend utile pour gagner un peu d'argent. Cirer des chaussures, sortir des poubelles.
        Et il vient ici souvent ?
        Oui, de temps en temps ...

        J'ouvre la porte. Un petit gosse tout banal avec une photo en main. La photo d'un beau vélo tout rouge. Bah, autant lui poser une ou deux questions à lui aussi. Au point on j'en suis ...

        Bonjour Tommy. Entre, entre je t'en prie ...
          Je n'ai jamais eu trop d'instinct. Les coups tordus, les messes basses, les coups dans le dos, les gars qui voulaient me la faire à l'envers, je n'ai jamais rien vu de tout ça. J'ai toujours foncé dans le tas pour me retrouver au final... Dans la bouse. Comme toujours. Je me suis tant et tant de fois retrouvé dans cette bouse infecte que si j'en avais gardé les traces je ne pourrais plus respirer tellement je m'y noierais.

          Alors forcément, quand le cachalot m'a demandé d'aller voir le contact, je n'ai pas dit non. C'avait l'air simple. Lui demander trois départs discrets, faire les trois départs discrets, et... C'est tout.

          Il y a des gens qu'ont de l'instinct. D'autres qui se méfient naturellement des choses qui vont leur arriver. Ils sont comme ça, de nature à jamais pouvoir faire confiance. Y'en a d'autres encore qui sont juste trouillards. Moi, j'étais juste cons. Juste con parce que j'aurais du le sentir, le coup tordu. J'aurais du voir que la gueule du Monsieur Francks sonnait faux. J'aurais dû voir que ça sentait l'entourloupe. Mais non, j'ai été bête. J'ai serré sa grosse paluche avec au creux des lèvres une drôle de cigarette qui devait pas m'aider à réfléchir.

          J'ai vu la trogne du Franck qu'était toute aussi piteuse que la mienne, j'ai vu ses frusques qu'étaient bien de torp grands et ses muscles qu'avaient l'air aussi faibles que ceux d'un Pludbus. Alors j'ai souris.

          -T'es qui ?

          -Euh. C'est Bairy. T'es Franc' ?

          -Non.

          -Alors l'est où ?[/color]

          -De qui ?

          -Bah Franck.

          -C'est moi, Franck.

          -Hein ?

          -Je suis pas très franc, mais mon nom c'est Franck.

          -Ah. Bon, bon. J'aurais un service à te demander.

          -Je ne rends pas service.

          -Ah. On m'avait dit pourtant, que tu pouvais aider.

          -Ca dépend, en fait.

          -De quoi ?

          -De l'aide.

          -L'aide, c'est toi.

          -Mais non. De ce que tu veux.

          -Juste un truc, sortir de l'île. Avec deux amis.

          -Ah. Mais je n'ai pas de bateau.

          -C'est que, tu vois. Je veux sortir tranquillement.

          -Avec de la musique ?

          -Sans être vu.

          -De nuit ?

          -Si ça empêche la flicaille de nous voir.

          -Bon, 3 millions. 1 par tête.

          -Pas que les têtes hein, les corps, aussi.

          -Bien sûr. Mais on fera ça séparés, ça sera plus discret.

          -Ah non, pour les autres je sais pas, mais moi je la garde sur les épaules.

          -Te prends pas la tête, je vais pas te l'enlever. Je disais que je vous ferai sortir de l'île un par un.

          -Oh, d'accord. Je le savais, hein.

          -Oui, bon... Des signes distincts, chez vous ?

          -Hein ?

          -Que je sache comment vous faire sortir, faut que j'ai quelques informations... Faire sortir un géant et un nain, ça demande pas le même effort.

          -Ah, y'a moi, un monsieur la quarantaine dans les un mètres 80 et un grand pas beau de 3 mètres.

          -D'accord. Toi tu partiras demain à la première heure dans une coque de pêcheur. On te mettra au milieu des restes de poiscaille de la veille. Soit sur le port à 4h. Ton vieux prendra la mer par un bateau de commerce qui transporte pas mal de fruits avariés. Ça fait fuir les contrôleurs mais il devra prendre un bon masque pour supporter l'odeur. Quant au pas beau, il fera comme toi le lendemain. Mais pour le faire aller jusqu'au port, j'ai besoin de ton adresse.

          -Hein ?

          -Un endroit où le prendre.

          -L'est pas de ce bord.

          -Un endroit où le voir et l'emmener discrètement au port.

          -Ah, d'accord ; Je le savais, hein.

          -Bon ?

          -C'est que... Je la connais pas.

          -Pff... Tu la demandes à tes potes et me la donnes demain matin.

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          Il est quatre heure. Le soleil ne s'est pas encore levé, laissant le gamin courir dans la nuit noir avec comme seule aide, une petite torche qu'il tente, tant bien que mal, de garder en main sans se brûler. Ses pieds percutent le pavé, ses joues se rosissent de la couleur des flammes et son bec, lui, tient toujours une longue clope pour l'aider à ne pas avoir peur.

          Il s’arrête, au milieu d'une ruelle. Le son des vagues percutant le port résonnent à ses oreilles et il repart aussitôt. Un regard à droite, un à gauche et ses pas l’emmènent déjà vers la jetée. Là, un navire de pêche se laisse bercer par les vagues tandis qu'une poignée d'homme le remplit de filets, sacs, caisses, éperons et autres instrument. Dans la poignée d'homme, l'un d'eux sort du lot. Il a la barbe mal taillée, les frusques sales et sa marinière de déchirée de partout. Il a tout ça et en plus, le sourire qui ne va pas. Un de ceux qui crie « sauves toi gamin ! Sauves toi ou crèves ». Mais le gamin, lui, n'entend pas. Lui, ne voit pas. Alors il s'avance vers ce qui semble être le capitaine du bateau.

          Sauf qu'à peine a-t-il fait quelques pas qu'une main se resserre sur sa gorge pour le faire chutter en arrière sans qu'il n'ait rien pu voir. Et ce qu'il voit, après, c'est la gueule d'un Trinita bien heureux de trouver le premier homme. Alors l'enquêteur ne dit rien, rien d'autre qu'une simple question.

          -Où sont-ils ?

          -De... De quoi ?

          Et la réponse ne convient pas et le poing vole vers la gueule de gamin.

          -Où sont-ils ?

          -Mais... Mais je...

          Et un autre poing, et un autre bleu qui se forme déjà sur l'autre joue.

          -Je vais dire ! Je vais dire ! Je vais dire ! Me tuez pas, s'vous plait ! Je vais dire...

          Et tout se déballe. Tout. Les mots sortent du bec de gamin comme autant de supplices pour éviter les poings. Entrecoupés de larmes, mâchés par la peur de s'en prendre d'autre, mêlés les uns aux autres dans le plus grand des bordels. Ils sortent. Tous.

          –♪♫--
          Il est 4 heure. L'inspecteur pourrait être heureux. Il pourrait presque sourire. Il touche au but. Devant lui, la planque se dresse et seul quelques mètres le séparent des deux autres hommes. Alors lorsqu’il arrive devant la porte il ne frappe pas, non. Son pied vient se fracasser sur le bois de l'entrée pour le faire voler à l'autre bout de la pièce et son corps y entre, bouffé par la volonté d'encore cogner.

          Sauf qu'au lieu de deux hommes, il ne trouve qu'un bout de papier enroulé autour d'une bouteille. Ses mains viennent dérouler le morceaux, tremblant d’énervement. Et s'y lit :

          « Un peu tard, Messieurs. Buvez à notre santé ».
          Peut être qu'il devine alors, l'inspecteur, que le gamin n'était qu'une diversion pour que les deux hommes puissent fuir de l'autre côté de l'île avec leur chariot et prendre un bateau du patron. Peut être qu'il devine tout ça mais ça ne le soulage pas. Non. La bouteille vole à l'autre bout de la pièce s'exploser contre un mur.
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