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Des larmes dont sont faits les pleurs.




Écoutez Colonel,  il y a probablement mille autres officiers mieux qualifiés que lui pour accomplir cette tâche à mes côtés. Déjà que je me dois de répondre de vos ordres, m'imposer un tel fardeau est une véritable plaie, Colonel Isaac …  

Il répond de telle sorte, ce vieux sénile obèse, qu'Edwin a peine à comprendre la réponse. Il s'exprime comme un barbare, ce colonel vicieux, véritable poids pour la Justice n'usant que d'argot pour donner ses ordres.

J'aimerais vous demander si vous lisez parfois les journaux, Colonel. Il se trouve que l'actualité elle-même prouve que lui et moi sommes loin d'avoir des états de service probants lorsque nous faisons équipe.

Ce sont toujours les mêmes arguments que ces pauvres laxistes de la Régulière trouve. Il faut un officier régulier pour calmer les tempéraments de l'Élite, mais aussi pour permettre à la Régulière d'avoir un pied dans l'opération, même lorsqu'il s'agit de pénibles enquêtes à-même la ville des sables. Le colonel Bermudes Isaac continue de jargonner sans restriction en libérant un tsunami de postillons, Morneplume préférant l'ignorer royalement, sachant déjà bel et bien qu'il sera loin d'avoir le dernier mot dans cette histoire. Il devra s'y résoudre, à nouveau, il devra travailler avec un des pires éléments de la Marine, et il ne pourra rien y faire. Si la première fois, sur Manshon, il avait lui-même insister pour s'armer de l'argument de poids que ce lieutenant représentait, il ne lui est désormais qu'une pénible épine dans le pied dont il se débarrasserait volontiers. Leur dernière discussion s'est très mal terminée, le revoir ne ferait que lui nuire plus que quoi que ce soit d'autre. Quelle idée de la part du Commandant d'Élite Méphis Toffel que de l'envoyer sur West Blue, après tout. Natif de l'océan du Nord, Edwin s'est vivement opposé à la décision, mais devant se faire oublier des médias suite au procès de Tark Kamina, il n'a pu rester sur l'océan du Nord et s'est donc rendu régler quelques cas ici, à Hinu Town, une ville aussi vivante que gangrénée, mais ô combien encombrante pour Morneplume. Les cas qu'on lui réserve ? De simples enquêtes à régler concernant des dissidents du coin, le temps qu'il puisse revenir sur North Blue. Rien qui ne puisse être considéré comme un véritable apport à la Justice, si ce n'est d'aider de faibles et stupides paysans à trouver les sésames de leurs problèmes. Décidément, son séjour ne s'annonce pas des plus réjouissants. Oh non.

Je comprends, Colonel. Je vais me plier à votre ordre et vais tâcher de faire équipe avec le Lieutenant Craig Kamina.

Le voilà, le véritable problème de toute cette affaire.


***


Bureau du QG. Béton, fenêtres à carreaux, soleil de plomb. Atmosphère lourde, cuisante et sèche. Assis sur une chaise en bois derrière un bureau, une cigarette fichée entre les lèvres, le front en sueur, le haut-de-forme bien vissé sur la tête, il prend des notes. À sa droite, il est là, Kamina. Il ne lui a toujours pas adressé un mot, mais rempli son premier document d'enquête alors que, de l'autre côté du massif bureau de bois est assis une grande énergumène élancée. Des lunettes, des cheveux sombres, l'air bien banal, un citoyen comme tant d'autres. Mais un citoyen avec un problème que lui, brave Sergent de l'Élite, il se doit de résoudre. Il jette un court regard froid et meurtrier à Kamina, juste pour s'assurer que celui-ci est à l'écoute, puis braque ses iris d'acier vers leur premier cas. Diele Timberwhite.

Et donc, vous faites état d'un kidnapping ?
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J'ai les cheveux en bataille d'avoir utilisé une caisse en planches comme oreiller et des cernes sous les yeux à la manière d'un hibou insomniaque. Les yeux rougis par une nuit blanche et des tics nerveux à cause du café qu'on m'a refilé à l'entrée. Pour me faire patienter qu'ils disaient. Bordel, j'aurais mieux fait de dormir ! Deux heures que je poireaute avant qu'enfin on me fasse croire que j'ai été écouté. Parce qu'il a fallu que je remplisse un putain de formulaire ! J'ai déjà du mal à trouver mes yeux, j'ai du mal à y voir clair malgré mes lunettes, je manque d'humidité dans le regard que j'ai sec comme de l'amadou depuis deux jours. Et ils me font remplir des putain de papelards ! Mais bon, j'suis une bonne poire, c'ma faute, j'avais qu'à pas venir les faire chier aussi, alors je prends sur moi et je me sers du stylo qu'on me tend. Ils font que se venger de moi pour les avoir dérangé dans leurs pauses rtt ou quoi ou qu'est-ce. Mais putain, après avoir fait tout ça, ils pourraient au moins avoir la décence d'esprit de faire croire qu'ils en ont quelque chose à foutre de moi, merde !

Parce que me parquer dans un bureau rempli de deux trous du gland, qu'ont pas la gueule de l'emploi ni du type auquel tu voudrais faire confiance, ça n'a pas le don de me rendre avenant. Ils font la tronche, ces cons, comme si j'avais craché dans leur soupe et que leur mère leur avait malgré tout demandé de me serrer la main en acceptant mes excuses. Putain, dites-le si je vous fais chier ! Ça fait trois heures maintenant que je glande comme un con à me dorer la pilule à la lumière de ces néons blancs qui m'éclatent les rétines et à observer un bureau d'accueil aussi vide qu'une pucelle dans sa tour. Tout ça pour me taper la tronche d'un vieux routard qui a l'expérience – mais probablement un tact inversement proportionnel – ainsi qu'un putain de casseur de burnes d'homme poisson.

Le pompon. Sérieusement, c'est le pompon !

Pourquoi bordel, on me balance dans cette salle fermée à la fenêtre haute et inaccessible, laissant à peine filtrer quelques rayons de toute façon trop verticaux pour nous atteindre, en compagnie d'un vétéran de 14-18 et d'une poche à branchies en guise d'interlocuteur ? Putain, et depuis quand y'a des requins dans la marine ? Ça me fait chier, ça me fait chier, ça me fait chier. 'Tain. Obligé de m'adresser à la gueule de con, du coup. Non, y'a pas moyen que je parle à un gars qu'a plus de cent dents.
Mais bordel, si j'avais pas une fille en cause, j'aurais claqué la porte et foutu le camp aussi loin que possible de ces deux cons en uniformes. Surtout si le mec derrière son bureau, avec la tronche patibulaire, me pose des questions auxquelles j'ai déjà répondu au moins trois fois depuis que j'ai foutu mes putains de guibolles dans cet antre de la mouette, y'a quatre heures. 'Tain, j'ai du foutre les pieds dans leurs chiures, à l'entrée, c'est la seule explication.

Mes tics nerveux deviennent soudainement un mouvement violent et mon pied éclate d'un geste brusque la barre en bois horizontale qui relie les pieds de ma chaise entre eux. Ça claque, sec, ça résonne, sourd, et ça s'éteint, lent. Si ça venait pas de moi, j'aurais pu sursauter. J'ai la gueule des grands jours, la mâchoire crispée et les yeux fous. Navré les gars, j'suis pas tous les jours comme ça, mais j'ai pas dormi de la nuit, et vous avez rien fait pour m'aider. Avec un peu de chance, dans une demi-journée vous m'aurez oublié.

Oui bordel ! C'est la troisième fois que je vous le dit !

Avec de la mauvaise foi mordante en prime. J'sais bien que c'est pas à lui que je l'ai dit, mais j'ai la sensation qu'ils ont oublié de se faire passer les missives. C'pourtant pas bien dur à faire, y'a que deux pièces qui sépare cette salle de la réception et même les pigeons sont capable d'envoyer un courrier plus vite que ça.

Et encore, ils ont de la chance, j'sais rester soft parce qu'ils ont une part de mon respect encore intact à cause qu'ils seraient bien capable de retrouver ma fille et son salaud de révolutionnaire utopiste. J'aurais pu lui balancer la chaise offerte gracieusement dans sa gueule de barbu. Et puis j'suis encore assis. Profite bien avant que je ne me lève. Derrière ton bureau, t'as l'air aussi imposant qu'un poisson hors de l'eau. Ouais, le requin, t'as pas vraiment la carrure pour vivre ici. Et puis franchement, mère nature t'a foutu des branchies et des nageoires, ça aurait été cool que tu la remercies en restant sous la surface de l'eau.

Il va rester là, lui ?

Que je fais en désignant d'un coup de tête et avec humeur monsieur j'ai des palmes et je le vis bien.
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Moites, gluantes, visqueuses, mes palmes enrobées de sueur, aussi marécageuses que si j'avais graillé un d'ces fruits fous qui refilent des pouvoirs à la con, la chaleur qui cuit à point une cervelle dans son four d'os, Hinu Town est une catin lunatique, tantôt affectueuse, amicale, tendre et chaleureuse, tantôt féroce, sadique, vicieuse et volcanique. Une grosse nympho aux sentiments particulièrement confus envers son poiscaille autant adoré qu'haï. Aujourd'hui, elle me hait. Viscéralement.

Mornepute qui n'peut s'retenir que d'lacérer mes rétines dès qu'il les croise, si froid qu'il pourrait inverser l'climat. Il revient d'entre les ténèbres fallacieuses de ma mémoire, celui qu'a poussé Tark dans les enfers. J'lui avais ouvert le crâne, ait plongé sans peur les palmes dedans pour en extirper cette pourriture qui lui stagnait dans l'âme et lui tartiner la figure avec, à l'époque, et ça avait bien marché, j'avais gagné. J'l'avais ressenti comme ça. Une victoire amère qui m'avait volé mon frère et ma dignité. Et lui aussi, il le sait. Qu'avec l'aide des circonstances, j'ai chié copieusement sur ses convictions étriquées. Il m'inspire plus aucune terreur, c'est l'un des démons qu'j'ai exorcisé à jamais. Il le sent, p'tet, et ça l'rend dingue, sûrement. Alors quelques mois plus tard, forcément, la tension a muté en haine. Mais il reste le collègue...

L'autre, le binoclard explosif, qui évite de s'accrocher à mon regard plus d'une fraction d'secondes lorsque j'me prends à l'mater, raide de rage sur sa chaise, il a paumé quelqu'un, j'le comprends, il a trébuché sur les montagnes de paperasse imposés par la laborieuse administration, j'le comprends, il a les verres sales et la gorge aride à force de hurler et d'cracher sa salive, j'le comprends. Ma présence est une minuscule étincelle au milieu d'une boîte bondée de gaz. Sa mauvaise humeur, j'lui pardonne bien plus volontiers que la folie assassine de Plume. Concentré sur mon stylo impatient de noircir sa feuille, j'me cantonne à mon rôle de scribe. J'irai pas lui faire une scène en...

Il va rester là, lui ?

Incendie, bouffées de flammes. Juste mes nerfs qui couinent, mais aucun câble qui pète. Tout est sous contrôle.

Je note votre déposition...

Et j'la note d'un air qui s'impose serein, tandis que l'intérieur canalise un départ de feu. Il a perdu quelqu'un, ça l'rend acide, c'normal. Hein ? P'tete qu'habituellement, quand ses proches évitent de s'faire enlever, il sait se faire plus aimable. On forcera jamais quelqu'un qui souffre à être aimable, non ? Y a pas qu'des connards sur cette planète, c'est faux. Eh, ils sont géants, les deux, là. J'm'en fais la remarque. Ils tapent dans les deux mètres... Plume, il chatouille le plafond d'son crâne dégarni. Et l'raciste à quatre yeux, il pourrait facilement dévisser une ampoule sans escabeau. Leur taille est inversement proportionnelle à leur sympathie. Y a une logique.

Un ange passe. Puis un autre, puis deux. Puis tout le putain de paradis qui défile. Puis Mornepute redresse la barre, comme il sait si bien l'faire. P'tete l'une des seules choses qu'il sait bien faire, finalement, avec la cuisine de suspects.

Nous sommes là pour vous aider, monsieur... Timberwhite. Baissons d'un ton et allons à l'essentiel. Il s'agit de...
Il s'agit de ma fille !
Pensez vous connaître le ravisseur ?

Les mirettes de Timberwhite sont couvertes de lourds nuages et jettent des éclairs. Ça donne l'impression qu'la première étape de l'enquête va être de canaliser ses ardeurs. La seconde va être d'éviter que Mornepute me saute à la gorge au moindre faux pas. La troisième va être d'enquêter. Ouais.

J'sais juste que c'est un putain d'illuminé qui lui a lavé le cerveau !
Un gourou ?
Un révolutionnaire !
Je vois.

Révo', gourou, du pareil au même, qu'il doit s'dire. La révolution est une gangrène contagieuse. La révolution corrompt les jeunes filles, viole des veuves et déclare la guerre aux pandas. Ça va lui donner de la bonne matière à me chier dans les bottes dès qu'il en aura l'occasion. Mais j'encaisse, j'encaisse. Les mauvaises ondes, j'les avale sans déglutir, cul sec. L'habitude. L'espace d'une seconde, j'm'offre un regard furtif sur la fenêtre avec vue sur la cour. Où l'on y mire quelques minets s'entraîner, les recrues déversant leurs premiers torrents de sueur. J'étais l'un d'eux, y a quelques années, même climat, même lieu. Mais ma nostalgie trouve pas l'temps d'éclore correctement.

Il note pas, là !
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Ils se faufilent dans les ruelles, fuyant les souks, les bazars et les grandes places. Leurs ombres absurdes se mêlent à la noirceur des petits boyaux de la ville, alors que le soleil de fin d'après-midi peine à éclairer ces recoins à l'ombre des hauts minarets. Le pouls d'Hinu Town est toujours vigoureux, même lorsque la température arrive enfin à se rafraîchir. Chapeau haut-de-forme bien vissé sur le crâne, cigarette en bouche, Edwin Morneplume s'arrête un instant, suivit de près par un Kamina essoufflé.

Vous voyez bien, Kamina, les révolutionnaires sont une vermine nuisible peu importe où ils se trouvent. Même ici, sur West Blue, ils arrivent à causer le malheur des autres, n'est-ce pas fascinant ?

L'échalas s'immisce lui aussi dans la ruelle, l'air toujours aussi braqué. Aussi grand que Morneplume, il fait toujours montre de ce regard de chien enragé. Edwin ne saurait encore dire si le drôle de personnage saurait être un poids pour lui et Kamina, mais il se résigne néanmoins à lui permettre de les accompagner. Qui sait ? Il leur offrira peut-être des informations cruciales au moment venu, chose à laquelle il ne s'est pas spécialement donné lors de la prise en note de la déposition. D'une allumette, Morneplume fait griller sa cigarette, avant de tendre son paquet ouvert à Timberwhite.

C'est donc bien par ici que vous vivez, Monsieur Timberwhite ?
Ouais. Je l'ai trop vu traîner dans le coin c'connard!
Hm.

Ton toujours aussi acéré, agressif, si bien que lorsqu'ils arrivent face à la demeure du grognon, Edwin ne s'est toujours pas décidé à proférer un mot de plus. À un point tel qu'il préfère aller à la hauteur de Kamina qui s'est arrêté sous la façade du bâtiment bien typique d'Hinu Town. De sous sa veste, Morneplume sort un revolver qu'il tend à Craig.

Je sais que vous n'en avez pas pris un sur vous, Kamina.
Je n'en-
Prenez-le, c'est un ordre, Kamina.
J'imagine que c'est sûr que Tark et tous ses méchants et sanguinaires copains révos veulent nous embusquer sur le pas d'la porte…
C'est exactement ce à quoi je pensais, pour tout vous avouer.

Duel de sarcasme qui se solde par une maigre victoire du côté de Morneplume, alors que la palme de Craig se referme sur la crosse du fusil. Leurs yeux se toisent, s'entrechoquent et s'haïssent avant que Timberwhite ne s'immisce au centre de cette querelle invisible.

Vous allez vous mater comme deux gamins pendant longtemps ?

Hm. Il se reprend, Edwin. Laisse de côté l'homme-poisson pour se concentrer sur la Justice qu'il doit accomplir. Il désigne la porte d'entrée, somme Timberwhite de l'ouvrir.

Vous allez fouiller la chambre de la gamine, Kamina, je m'occupe du reste des environs. Ah, et puisque votre frère croupit désormais au bagne, j'imagine qu'il n'y a plus d'enjeu faisant de vous un parfait fléau à l'accomplissement de la Justice.

Tenez-vous le pour dit.

En chasse.
 
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C'est pas tant le fait qu'ils m'horripilent ou qu'ils me hérissent le poil sur les jambes qui me fait chier. Pas plus que le fait qu'ils s'engueulent et que visiblement ils ne savent ni ne veulent travailler ensemble. En même temps vu leurs tronches, moi non plus j'aimerais pas travailler avec chacun, même individuellement. L'autre type que je ne dépasse en hauteur que parce que je ne me suis pas peigné ce matin – ce qui en fait un truc assez exceptionnel pour être noté – et la racaille rascasse aux nez raccommodé et aux vers lyriques à ses heures sombres – ou sombres à ses heures lyriques – sont pas fichus de se voir en peinture. S'ils le pouvaient, ils auraient bossé par escargophones interposés, et ça m'aurait bien fait chier. Mais au final je sais pas si j'y gagne au change si tous les dix pas ils perdent dix secondes à s'affronter du regard. Putain si c'est moi qui doit jouer l'arbitre, je peux jurer qu'ils vont bouffer un gong à leur en révulser les orbites ; même les paupières closes !

Mais c'est pas ça qui me fait chier. Pas même le fait que j'ai besoin d'eux, en fait. Même si je dois avouer que ça devance le duo gagnant sur l'échelle de Murphy. Parce que c'est un truc avéré, j'ai besoin d'eux. Ils ont des relations que j'ai pas et des droits que je ne voudrai jamais avoir. Et s'il y a bien des gars qui peuvent retrouver un salaud révolutionnaire sur ces quatre mers, ça doit bien être la marine. Je suis juste déçu de me retrouver avec ces deux là. C'est probablement les fonds de tiroirs de la régulière ou les punis de l'élite que je me tape. Va savoir. J'ai besoin de leurs bras, de leurs expériences et de leurs réseaux si je veux retrouver ma fille. J'en crache par terre, sur le perron, juste avant de m'effacer pour les laisser entrer.

J'ai pourtant également une sainte horreur de leur laisser poser leurs groles sur la moquette vieillissante et sur le parquet mité. C'pas du grand luxe, et voir leurs uniformes détonner avec notre intérieur sobre et pauvre, ça me fait serrer la mâchoire. Ils ont des salaires dont je ne me permettrais pas de rêver. Et pourtant, c'est pas mirobolant. Juste plus que moi. Et moi j'ai une femme et des... et une gosse. Ah, et un Cormoran. Et c'est vraiment pas ce que je voulais donner à voir à ma cadette. Deux types qui débarquent dans la maison parentale avec autant de dents qu'une garnison entière et qui exhibent à ses yeux de fillettes l'impuissance de son père. Rien que ça, ça me fout en rogne. Contre moi, bien sûr. Putain, ils ont vraiment intérêt à bien se tenir ici. C'est chez moi, c'est moi qui dicte les règles. Moi et ma femme. 'Chier. Ma femme.


Elle est là, dans le canapé rapiécé douze fois. Y'a le Cormoran tout juste apprivoisé, lové à ses pieds, servant d'oreiller à la gamine. Et elle est vissée là. Les fixant de son regard flamboyant. Il est si expressif que ses yeux semblent croquer en peintures ses émotions et qu'ils les affichent au su de tous. Elle a les jambes croisées, les mains posées sur ses genoux et le visage fermé. Sur son bras, ma petite a dessiné d'une main hésitante des gribouillis qui ressemblent à des bribes de bonheur qu'on a du mal à retrouver depuis un mois ou deux ou trois ou quatre. Je sais plus. Ma femme garde le silence. Elle a les épaules nues et sa peau laisse s'échapper son charme envoutant à tous les vents. Sa respiration est calme mais ses dents serrées disent autre chose. Elle n'est pas heureuse, comme moi, de les voir ici, mais comme moi, elle sait qu'ils sont indispensables. Son vêtement élimé donne peine à voir, mais elle garde une telle stature et une telle force et une telle présence et un tel charisme qu'on le remarque à peine. Je le remarque à peine. Son regard évite clairement le mien. Je ne peux pas lui reprocher. Elle salue les marins d'un signe de tête bref et distant. Ils le lui rendent avec courtoisie et avec les atours dont un mec de leur profession doit savoir faire preuve dans de telles situations.

Hum.

Je les fais bouger d'un grognement et les entraîne jusqu'au fond, dans la chambre de ma fille fugueuse. Ou enrôlée. Ou kidnappée. Je sais plus trop. Elle n'est pas très bien rangée. Hé. On est pas du genre à tout bien ranger pour faire de sa chambre une relique de sa mémoire. Elle n'est pas en bordel non plus. Sa sœur vient y jouer, je crois, mais elle sait ranger après son passage. Je vous laisse y pénétrer mais je reste dans le couloir. Ou le truc mal isolé qui nous sert de couloir. Heureusement qu'il fait chaud été comme hiver à Hinu, on aurait eu des problèmes de chauffage sinon.

Je sais pas ce que vous cherchez ou espérez trouver. Mais le type s’appelait William.

Non, en vérité, et pour tout dire, ce qui me fait chier, c'est le désespoir de cause qui m'a fait faire appel à eux, après deux ou trois ou quatre mois à tourner en rond et à dormir dehors et à espérer un miracle. Ce qui me met hors de moi, c'est que j'ai pas pu la protéger des grands discours d'un petit con, puis que je n'ai pas été capable de la retrouver ou de la ramener, pour qu'ensuite je sois obligé de faire intervenir des tiers dans une affaire qui ne concerne que nous. Et parce que ma femme a horreur des marins. Parce que les gens comme elle qui bossent la nuit n'aiment pas les forces de l'ordre. Mais je grossis le trait pour que tout le monde comprenne. Même pour moi, parfois, c'est dur de la suivre, ma femme.

Eh ! Toi, tu gardes tes palmes dans tes poches.


Dernière édition par Diele Timberwhite le Mar 3 Mar 2015 - 2:53, édité 1 fois
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Le bonheur est petit et discret. Si bien qu'on ne se rend compte de sa présence que lorsqu'il claque la porte pour s'en aller, et qu'il est déjà trop tard pour le rattraper. J'reconnais pas ici ce courant d'air frais qui stagne après son départ, glaçant les nuques et les âmes. Ici, le bonheur est parti, mais est-il seulement déjà venu ?

Le binoclard s'improvise casque bleu, plus intéressé par sa fille happée par les idéaux d'un autre que par les luttes intestines d'une marine schizophrène. Ouais, ça s'défend. Concentration. Autant qu'possible sous cette chaleur cuisante qui fume sur place la moindre de mes pensées. Intercalé, comme un mauvais roman à l'eau de rose coincé entre deux gros presses-papiers baraqués, j'me sens à la fois p'tit et très accessoire, tandis qu'eux combinent leurs tempéraments sortis d'une benne à connerie, m'toisant depuis leurs nuages orageux. Alors servilement, j'loge mes palmes moites au fond d'mes poches. J'ai pas d'cause à défendre, pas même celle d'un orgueil criard attaché aux bonnes manières. Puis j'ai bien un fond d'compassion pour l'excité. C'est la révo', en première, qui m'a chipé mon frère, mais j'ai jamais trouvé l'envie de l'ensevelir de mollards en représailles.

Dur de marcher droit quand le monde va de traviole.

Eh. Un flingue ? J'espère que c'est pas avec ça qu'il compte questionner les civils.

Une chambre de gamine... vide. Silence. Temple du regret. Ça me fige une pointe dans l'coeur qui se déloge aussitôt. En repensant à la zombie qui nous fixait de deux yeux d'outre-tombe, comité d'accueil dans l'coup, j'me figure bien la détresse de la famille. J'ai pas la force d'me battre contre les préjugés et les pauvres diables comme Mornepute, ces temps-ci, leurs crasses me passent au-dessus d'la crinière. A moins qu'elle soit là, la force.

Bref. Classique. J'me dis qu'la fillette devait pas trop blairer papa, vu l'manque de vie qui jaillit de cette piaule... piaule d'ado, quand même. Piaule d'ado sans éclat, terne comme l'âme qu'elle devait abriter. P'tete que la fille a voulu laisser les couleurs du monde du dehors lui déteindre dessus.

Y avait aussi une espèce d'oie dans l'salon, aux mirettes creusées d'un vide interstellaire. M'étonnerait qu'elle remplace correctement la couvée de maman dans le coeur de papa.

Euh...
Quoi ?
Par hasard, vous savez où elle planquait son journal intime ?
Elle en a pas.
Elles en toutes un...

Vu qu'un classeur de papelards fera toujours meilleur confesseur qu'un papa. Plume me mire comme un mirador au-dessus d'un bagne. Mépris intéressé, mais mépris quand même. Ses regards insistants corrodent ma carapace, à leur rythme. Autant dire qu'il est bien loin d'me creuser jusqu'au coeur. Visiblement, des paluches calleuses et arides comme le serait une Hinu bardée de trois soleils semblent plus avenantes qu'une paire de palmes timides et gluantes. Timberwhite refile son autorisation à Plume, qui s'agite alors sur les tiroirs de la table de nuit sur lesquels j'posais ma suspicion, leur faisant alors cracher un petit bouquin rose scellé par une chaînette dorée. Et un très éthéré "Ma vie" se pavanant sur la couverture.

Mais...

Et d'une poigne bien virile, il arrache la piteuse chaîne et force les secrets de la gamine. Son jardin privé, Mornepute le foule d'une botte presque médisante. Il ventile un instant les pages du petit bouquin, avant d'me le tendre.

Eh !
Vous éplucherez le dernier mois avant l'enlèvement, Kamina.
Quoi, il sait lire, en plus ? Mieux que vous ?
Pendant ce temps, je vais aller interroger votre femme, monsieur Timberwhite.
Vous croyez que c'est le moment, merde ?!
Nous avons trop peu de temps pour nous le demander, votre fille est peut-être déjà loin à l'heure qu'il est. Faites moi confiance, je la sortirai de son mutisme.
T'abîmes pas les pages ! Pas la moindre écornure ou putain d'trace de doigt !

Il file les rails du soldat de plomb, son parfum de lin gorgé de nicotine, le poursuit dans le couloir.

J'vérifierai !

Et cette fois-ci, libère pour de bon mon champ d'vision.
Me carre en face d'une bien glauque solitude.
Là-bas burinent les pas sur le parquet, ça piétine. Probablement Timberwhite qui sent sa baraque envahie, qui sait plus quel front tenir. Il a préféré laisser l'écailleux seul dans la chambre de la môme, plutôt que paumer la surveillance du golem géant qui vient secouer sa femme. Sage décision. Ah, vraiment. J'me tiens sur les startings blocks, prêt à décoller au moindre cri. Arracher les vers d'un nez, Mornepute sait faire. Quitte à embarquer tous les conduits nasaux et la trachée par la même occasion.

Bon...
Le journal. J'feuillette. Les pages tournent, les mots les plus pressants m'sautent au museau.

Cher journal, rencontre au clair de lune.
Romantique. Amour ? Coup de foudre ? Non, autre chose. Moins banal. Moins fade.
Cher journal, William a un bel esprit.
Il pense bien, mieux que papa, mieux que maman.
Il m'a parlé de la révolution. De cette grande famille qu'est la révolution.
Cher journal, j'en sais plus.
Lui aussi, il a une famille. Sa soeur, vilaine, qu'il ne blaire pas, et c'est réciproque.
Confession pour confession, je lui ai parlé de papa. Ça nous fait encore un point commun.
Cher journal, j'en peux plus.
J'étouffe ici. Le souffle de William est devenu mon dernier air pur.
Il existe des causes qui doivent être défendues; plus qu'une petite vie minable dans un patelin cuisant !
Cher journal, papa, maman, ils voient pas.
Ils voient rien.
Cher journal, dernière chance !
Je te laisse traîner avec un marque-page ici, sur mon bureau. Si papa ou maman ne te remarquent pas aujourd'hui,
et ne lisent pas cette page,
demain je m'en vais.

Cher journal,
Mes rêves deviennent réalités

Et mes angoisses deviennent réalités.
La compassion s'empare de moi comme un refrain qui ne me quittera plus la tronche pendant un moment.
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Il revient dans ce salon qui lui donne plus l'impression d'une épave, Morneplume. Un tableau de désolation. Un silence. Qui. Longtemps. Dure. Ses yeux froids passent de la gamine qui, vide, ne le remarque pas jusqu'au cormoran qui se grignote bêtement une patte. La femme, elle, ne le quitte pas des yeux, avec un œil renfrogné qui lui rappelle avec agacement celui de Serena Porteflamme. Il tire un carnet de sa poche, un stylo de l'intérieur de son veston, ses mains sèches couchent quelques lignes d'encre. Introductif. Diele juste derrière lui, il s'avance lentement, Morneplume, faisant grincer les planches à chaque pas. Dans le lourd silence de la demeure brisée, seuls les cris lointains d'un homme bourru engueulant une dame sont audibles, échos de quartier.

Elle parle, d'un ton féminin, oscillant entre l'impatience et l'impassibilité.

Oui ?
Hm. Eh bien. Votre nom.
Timberwhite.
Hm. Votre prénom ?
Qu'est-ce que ça peut bien faire ?  Vous êtes là pour poser des questions débiles ?
Pour procéder avant tout, Madame. Et il s'avère qu'afin de mener une enquête de la façon la plus complète qui soit, j'ai besoin de faire usage de certaines banalités. Vous me pardonnerez, mais il se trouve que dans l'optique de procéder efficacement, j'ai aussi besoin d'un fameux concept qu'on appelle coopération. Et cela vient tout d'abord de vous.
…Appelez-moi Justine ou Blandine si ça vous chante, pour ce que ça changera.
Je noterai Justine, alors. Madame. Âge ?
30 ans et quelques centimes.
Profession ?

Quelques secondes s'écoulent. Un moment où Edwin ne sait déceler si Justine Timberwhite se restreint de répondre par orgueil, ou pour une autre raison qui lui échappe.

Prostituée.

Le silence se réinstalle pour de bon. En bon conquérant, il colonise à nouveau la pièce. Elle. Elle baisse les yeux, en colère. Lui. Lui coule un long regard de pierre vers Diele qui, renfrogné, détourne la tête. Son stylo cesse sa course sur le papier. Hésitation.

Un souci ?... faites chier… termine-t-elle en regardant ailleurs.
Il se racle la gorge. Note d'une écriture furtive.
Et elle ? La petite soeur ?
En effet.
Nom ? Âge ?
Elle a huit ans. Et mettez Alcaline. je veux pas de son nom dans vos registres. ton mordant, acerbe.
…Serait-il possible, Madame Timberwhite, d'obtenir votre version des faits, concernant la disparition de votre fille ?
Elle côtoyait un révolutionnaire du quartier. Un certain William, assez jeune, pas 20 ans, elle l'a trop fréquenté, il l'a trop embobinée, et il a fini par l'embarquer. Où, on ne sait pas. Mais du jour au lendemain, elle était partie avec un enfoiré qui lui a lavé le cerveau.
Vous mentionnez qu'il était du quartier. Seriez-vous à-même de connaître l'emplacement de sa résidence ?
Il était pas de l'île. Il était sur Hinu dans diverses auberges pour dormir, le temps d'embrigader des nouveaux révos, à tous les coups.

Il écrit rapidement quelques mots supplémentaires, Edwin, puis pose ses affaires un instant pensif. Cigarette. Allumette. Fumée.

Sérieusement monsieur, vous pensez réellement que vous pouvez faire quelque chose contre ça ? demande-t-elle toujours avec un ton des plus acides.

Ignorant la question, la cigarette fichée au coin des lèvres, Edwin reprend son carnet et le stylo. Ses iris polaires trouvent les pupilles sombres de Justine Timberwhite. Il entrouvre la bouche, cherche ses mots.

Madame, serait-il possible qu'il ait... l'espace d'une soirée, peut-être d'une semaine, élu domicile dans une... Une maison de votre connaissance ?
Une maison ? Mais vous êtes con ? Il y a un minaret, derrière la place du marché. Ma fille parlait parfois de cette tour en mentionnant William. Y'a au moins ça…
Je note, Madame. Cela dit, vous répondez pas à la question. Je parle d'un bordel, Madame. Un bordel.
Oh. Ces gamins pleins d'idéaux ? J'ai des doutes. En tout cas, s'il était venu par chez nous, je l'aurais foutu dehors sans chercher son portefeuille. Peut-être l'une des deux autres maisons de passes du quartier du port, qui sait.

Il griffonne encore, une étincelle, sobre, brille un instant dans ses yeux.

Qu'est-ce que ce minaret pourrait avoir de spécial, selon vous ?
Un lieu de rendez-vous ou de réunion avec d'autres, une planque pour des trucs pas légaux...
Je vous remercie pour votre coopération Madame. Ce fut un plaisir.
Ne mentez pas, vous êtes aussi heureux d'être ici que nous de vous avoir ici.
Ma vocation m'oblige à une certaine courtoisie, sauf votre respect, Madame Timberwhite.

Edwin se relève. Sec. Il s'approche de Diele, rangeant son carnet et son stylo. Il souffle une bouffée de nicotine, puis esquisse un signe de tête vers l'oiseau marin.

Et le cormoran ? Un animal de compagnie ?
Un truc qui s'en approche.
Parfait. Je crois savoir où nous irons prochainement. Ne reste plus qu'à savoir ce que Kamina a découvert.

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-Diele ? Je peux te parler une minute ?
T'es plus muette ?

Je n'ai droit pour seule réponse qu'à un regard assassin. Elle rehausse notre fille sur sa hanche et d'un geste impérieux de la main, elle m'invite à la suivre dans un coin de la pièce où une cheminée en pierres ébréchées nous masque trop peu à mon goût des deux inspecteurs de la marine d'élite. Enfin, c'est ce qu'ils affirment. Le grand type hèle l'homme-branchies comme on disparaît à leur vue. Je sais pas s'ils vont baver dans notre dos, s'il compte médire sur ma femme à son copain à l'épiderme écailleux, mais il lui braille un truc comme je t'attends dehors ou on en a fini avec cette bande hurluberlus. J'ai que les mouvements des lèvres, pas les mots. J'improvise.

-J'aime pas du tout ces mecs.
Moi non plus.
-Mais ?
Mais j'ai rien d'autre à proposer.
-...
Et je suis prêt à m'abaisser à ça pour retrouver ma fille.
-Tu sais que ça changera rien.

-Tu sais très bien ce que je pense d'eux !

L'air a de plus en plus de mal à passer entre ses dents serrées. Notre fille aux yeux comme des sous-tasses ne pipe mot. Elle est triste de ces situations où la moitié de nos discussions sont des engueulades et puis sa sœur lui manque. Elle souffre en silence quand nous souffrons en cris et en coups retenus.

Je croyais que c'était moi le défaitiste.
Monsieur Timberwhite ! Kamina et moi en avons fini avec votre maison, nous allons maintenant vous laisser. Madame.
Je vous suis.

Je coule un très long regard à ma femme tandis que le grand dadais aux traits durs et son bouledogue marin soupirent de concert. Ils avaient espéré être débarrassés de moi, tout comme moi d'eux. Mais contrairement à eux, je suis prêt à toutes les concessions pour retrouver ma fille. Alors que pour eux, ce n'est qu'un boulot de plus ; un boulot de trop. À choisir, je le lis dans leurs yeux, ils auraient préféré récurer les chiottes des Dragons Célestes.
Mais je n'ai pas lâché ma femme du regard. Et très vite comme à chaque fois sous la couche fine de colère qui recouvre ses yeux et qui s'écaille facilement se trouve la détresse et la résignation. Une phrase sans ponctuation pour dire simplement que ma femme a troqué son espoir contre une colère factice. À l'encontre du monde entier.

Je vais la retrouver, je t'en fais la promesse. Même si je dois parcourir les 6 mers pour ça.

Elle ne me souhaite pas bonne chance. Et c'est sur cette phrase balancée sans conviction, presque comme un mensonge, que prennent fin mes scènes de ménage. Elle tourne les talons. Ma fille me regarde comme si je prenais le train pour la quitter pour toujours. Le Cormoran pousse un cri suraigüe qui vrille les tympans de tout le monde. Elle ferme la porte sur les talons du volatile bleu. Et me revoici seul avec les deux marins bloqués sur cette affaire avec moi. Ou moi bloqué avec eux.

Je suis prêt.
Non vous ne l'êtes pas.
Pardon ?

Sur le coup, je peux pas m'empêcher d'être surpris. Je me tourne vers lui, menaçant. Parce que quand je suis surpris, certains l'ont appris, je cogne.
Mornepute sort sans ajouter un mot et Kamina baisse les yeux pour le suivre. Je grogne un coup, pour essayer d'évacuer un stress et une colère dont je ne peux me départir malgré tout, et avale la distance jusqu'au perron en deux foulées titanesques. Je claque la porte derrière moi et rattrape trois marches de bois plus bas les deux marins patibulaires avec lesquels on aurait pu dire que j'ai fait mes classes. J'hésite à crier, mais je me retiens. Leur pas est rapide et je sens à leur démarche qu'ils auraient préféré que je ne les suive pas. Mais je l'ai dit, je les laisserai pas s'occuper de tout seuls. Je suis aussi indispensable qu'insupportable.

Qu'est-ce que vous voulez dire à la fin ?
Que vous êtes aveuglés par la colère. Vous et votre femme, j'entends.
Je vois pas ce que ça peut foutre.
Vous n'avez qu'une idée en tête : William a kidnappé votre fille – alors que tout ça ressemble plus à une fugue.
Presque à un suicide d'après son journal.
Toi ta gueule.
Tant que vous n'aurez pas compris que vous êtes, vous et votre femme, responsables – même partiellement – ramener votre fille ne changera rien.
Je me souviens pas avoir demandé de l'aide à un psychologue. Je suis vraiment à deux doigts d'organiser un rendez-vous entre mes phalanges et son arcade.
J'ai dit ce que j'avais à dire. Maintenant en route !

*****

Je traine les pieds et mes casseroles derrières leurs rangers dont les traces dans la terre rouge et jaune des sols d'Hinu me rappellent le conte du petit poucet. Je le remarque à nouveau, mais Kamina fait vraiment pâle figure à côté de la carrure de Mornebrûle. Heureusement que nous faisons tous les deux nos deux mètres cinquante, parce que j'aurais pas apprécié d'avoir des oreilles de squales culminer au-dessus de moi. Sans rire, ils sont le chaînon manquant entre le dernier poisson et le premier mammifère. D'ailleurs, est-ce qu'ils pondent des œufs ?

Les maisons en terre sèche s'enchaînent sur notre trajet. Le soleil brûle nos bras nus et nos crânes fondent. Moi j'ai l'habitude, mais à mon humble avis, ce soleil de plomb n'est pas au goût de tous. Y'a des ombrelles sur le chemin, en vente aux touristes ; à la criée, soumis à marchandages, mais à la vente. Il ne tient qu'à eux de s'en dégotter un. À gauche, des maisons carrées aussi sèches que l'air que nous respirons. À droite, des maisons carrées aussi denses que je suis pas sûr de pouvoir les fissurer d'un coup de poing. Mais est-ce que lui pourrait ?

Nous passons devant une place de marché bondée, des habitants du quartier, des habitués. C'est le forum du coin, le centre névralgique de la ville, actif même de nuit et même par sale temps genre tempête de sable – et c'est du vécu. Elle grouille, elle crie, elle gargouille. Ses sucs, agités, nous bringuebalent dans tous les sens. Nous sommes pris dans un tourbillon de vêtements amples aux couleurs à gerber : du bleu du jaune du rouge de l'ocre. J'évite en général de m'aventurer dans ces endroits qui pourraient me digérer et où chaque âme semble m'agresser rien qu'en m'évitant du regard. Aujourd'hui, pourtant, j'suis plus transparent que d'ordinaire. Je veux dire, Morneplume attire autant l'attention que moi, et si au final plus de gens se retournent, je suis moins l'attraction du moment que ne l'est le grand dadais. Et je parle même pas de l'homme poisson dont les palmures attirent les convoitises, les regards curieux et les avares. Si j'étais eux, j'éviterais de passer devant les poissonniers : leur camelote est pas toujours bien fraiche et on sait pas trop comment ils réagiraient face à un poisson qui viendrait se jeter de lui-même dans leurs filets. Mais nous tourbillonnons, nous valsons, tout ça pour traverser cette marée humaine, Moïse en son pays, pour atteindre sain et sauf l'autre côté. Et le premier qui fait remarquer qu'on aurait pu faire le tour, je lui met mon poing dans la tronche. Devant nous, au-dessus d'un pâté de maison (au sens propre), se dresse la tour décrite par ma femme. Elle est tout aussi anguleuse que les reste des habitations de la ville, mais contrairement au reste, elle est décorée d'arcades, de pierres de couleurs, de mosaïques, de tuiles, de draps, de gargouilles, de faïences, de bois, de béton, d'argile, et d'à peu près tout ce que le monde comporte de matériaux de constructions. Un patchwork de rebuts, beaucoup moches ou inutiles. L'histoire de cette tour est simple : un propriétaire qui a changé d'architecte sept fois en quatre ans. Et voilà le résultat : une tâche dans le paysage terne du coin. Et même comme ça, je suis pas sûr que ce soit une mauvaise chose au vu des proportions que prennent le mot terne dans le coin.

À deux blocs plus loin, par là, se trouve la première des deux maison de passe dont vous a parlé ma femme.

Il y a un parvis devant le minaret, ouvert à sa très large porte en bois, massive, qui ressemble à s'y méprendre à celui d'une église. Même les reliefs et gravures gothiques autour de l'entrée sont trompeurs. Pourtant, chaque matin, un imam chante des louanges du haut de cette tour de princesse. Mais faut avouer que j'y suis jamais allé un dimanche matin : peut-être y font-ils une messe également ? Dans du dix mètres sur dix, ça doit être galère tout de même. Surtout quand on sait la place que prend l'escalier qui colimaçonne jusqu'en haut.

Mais à cette heure-ci, les femmes bon marché doivent dormir alors qu'il n'y a pas grand monde dans la tour. Quand le soleil se couchera, on aura tout le loisir d'aller leur parler, aux putes.
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Lorsque le soleil se couchera, votre fille aura peut-être déjà quitté l'île, si ce n'est pas déjà fait. Commençons par ce mirador.

Ça grogne pas mal au lieu de causer, dans l'escouade, personne n'a l'air ravi de ne pas avoir le droit de prestement larguer son prochain pour faire carrière solo dans la pèche à la fugueuse, et la collaboration semble aussi stable qu'un funambule cul-de-jatte. Mais l'union fait la force, disent les solitaires et les consanguins, alors on encaisse, on sert les dents et on espère que l'adage ne sera pas aussi creux que le blabla de Thimberwhite. J'essaye de bâillonner cette pitié hurlante qui me serre les entrailles, en pensant à la fillette qu'on poursuit, qu'on va arracher à ses rêves et à son amant, et qu'on va sangler pour de bon dans une existence transparente sous la possession de deux darons arides. J'pourrais me foutre des claques et me souvenir que juger et compatir, c'est la mort de ma mission, mais j'ai trop retrouvé mes vieux sentiments, couchés dans ce journal, pour pouvoir contourner la mélancolie aujourd'hui. Oh ouais, la vie en noir qui ressemble à une longue agonie, la routine comme une musique inlassablement agaçante, les parents translucides dans un décor de verre, la fugue finale, j'ai connu, j'ai fait, je regrette plus, c'est mon histoire. Alors m'acharner à casser la même trajectoire que suit une humaine, ça revient à m'arracher le coeur et à le balancer aux chiens. J'essaye de passer outre, mais bon. C'est laisser la merde s'accumuler jusqu'à m'y noyer. Oublier une cocotte-minute sur le feu.

Le minaret aurait pu être designé par un gamin découvrant sa nouvelle pochette de vingt couleurs. Aucun sens, mais une verrue plutôt jolie comparé à la monotonie du reste de la peau d'Hinu. On s'y engouffre, enveloppés d'la joie ambiante, le binoclard râlant sous sa barbe de trois jours, et Mornepute plus glacial que jamais -climatiseur performant- dispensant un peu de mépris à destination des crasseux errants dans le hall riquiqui. On reste quelques secondes là à laisser les anges passer, et à essuyer des regards piqués des autochtones. Y a du fumet pas bien légal qui rôde et nous nargue, probablement un frère ou un cousin de l'opium, sans compter la pestilence inhérente aux dépotoirs de la misère; ça shlingue le renfermé, le junkie lépreux et la vérole fraîche, le tout dopé à l'air brûlant du désert. Les murs sont repeints au moisi ou au dégueulis, ou parfois aux couleurs de tags dégoulinants pas bien beaux ni très adroits. L'extérieur était presque attrayant; l'intérieur n'est que, j'suppose, l'anus surchauffé de cette crevante ville.

Si ce trou a été un lieu de culte, il ne l'est plus depuis longtemps.

Des punks débraillés se démarquent de la masse de pauvres types défigurés par la vie. Affalés sur un tapis crevé le long d'un mur gribouillé de jolis tags figurant une caserne en flammes au-dessus desquelles voltigent des mouettes zombies, un p'tit morceau d'art contemporain tout en subtilité, leurs regards nous tombent aussitôt dessus comme des bombes.

Et après un pas pour bien s'imprégner du louche de l'endroit, le soldat de plomb dicte au binoclard de fer :

Vous feriez mieux de nous attendre dehors, monsieur Timberwhite.
'vous gênez pas pour hurler que j'vous emmerde !
Comprenez que le risque n'est pas nul dans ce trou à rats; et que contrairement à vous, nous sommes armés et assermentés.
C'est votre poisson votre arme, c'est ça ? Il est assermenté à bouffer du plancton ? Conneries !
Selon c'que le révo de votre petite connaissait de vous, c'est pas dit qu'ils vous accueillent le sourire aux lèvres, là-dedans.
Mais !
On vient leur poser des questions, pas leur chercher des crosses...

C'est dingue parce que comme un gros soleil noir, son aversion bien salée pour ma pomme éclipserait presque la plate méfiance que Mornepute entretient pour moi. Et pourtant, dieu sait à quel point il doit cramer d'envie de me tondre comme le mouton noir que je suis, Plume; quoique dieu doit avoir mieux à foutre que de zyeuter dans notre intimité niaise. Il nous placarde deux grosses bulles brunes sur nos tronches, Timberwhite, injectées d'un ressenti qu'arrive pas à dégouliner. Ça ressemblerait presque à des pleurs, bien que j'le verrais davantage chialer du magma plutôt que des larmes sucrées.

Toi, je te préférais encore quand tu fermais ta gueule.

Puis il fait crisser ses godasses sur la pierre, et fait demi-tour en ruminant. Plume s'acharne à le suivre des yeux jusqu'à être certain qu'il changera pas de dispositions au dernier moment, sur l'pallier, et moi aussi. Mais non, il disparaît sur l'parvis ensoleillé, et j'me retrouve seul avec le bouledogue, à peu près muselé, mais toujours aussi inquiétant.

Bien, j'espère qu'il ne fera pas de bêtises. Et vous non plus, Kamina, je n'ai pas oublié comment avait tourné, par votre faute, notre dernière investigation dans ce genre de lieu.
Rien qui vous froisse ? Qu'on s'apprête à saboter l'avenir d'une fillette, quelque chose du genre ?
La confier aux mains de ses parents, ou à celles d'un révolutionnaire. L'option juste m'est évidente. Mais si vous en doutez, Kamina, vous feriez peut-être mieux de rendre vos galons. L'affaire Tark Kamina a déjà bien sali votre dossier, il vous en faudrait bien peu pour basculer à jamais de l'autre côté. Prudence.

Sa condescendance a mutée, elle s'imbibe d'une autorité grappillée aux années d'expérience -de patinage- derrière lui, même si je ne pense pas qu'il se fasse d'illusions. Un vétéran qui, alors qu'il a une vertigineuse cinquantaine de piges dans le rétroviseur, ne s'est hissé qu'à un grade équivalent au mien, ça confère pas grande valeur à ses bavardages. Au contraire, même, ça me confirme que j'suis pas le premier à trouver que son clapet a un impressionnant débit de conneries arriérées, d'idées croupies datées d'un ou deux siècles.

Mais si je basculais de "l'autre côté", comme vous dites, c'est pas votre côté qui deviendrait "l'autre côté" ?
Ne perdez pas votre temps à essayer de jouer au plus fin.

Il repasse en mode automatique; déballe sa grosse voix mécanique et la laisse grimper jusqu'au colimaçon, jusqu'au sommet.

Mesdames, messieurs, bonjour. Nous recherchons des informations sur un certain William qui aurait régulièrement fréquenté ces lieux.

Et ça débraye autour de nous, le nom les fait un à un tressauter.

Comprenez qu'il a emporté la fille d'un citoyen du gouvernement mondial sans son consentement, et qu'en tant que tel, il en devient hors-la-loi. Essayer de le couvrir relèverait de l'acte d'obstruction à la justice. Je vous demande votre coopération franche et complète.

Le silence s'abat comme une grêle dans la place. Mais très vite, il est chassé par l'un des braves punks de l'assistance fait tonner sa voix gutturale.

Qu'il vienne réparer ses conneries lui-même, le "citoyen".

Leurs mirettes se braquent sur nous et deviennent constellation de mépris. J'me surprends à espérer qu'ils nous chassent de leurs grandes rangers dans nos arrière-trains, que l'enquête patine, et qu'on retrouve jamais la donzelle. Mais. C'est sans compter le tact de Plume, qu'a tendance à régler bien des différends.
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Malheureusement, le citoyen a préféré faire confiance aux autorités pour régler son problème. Triste malentendu, vous en conviendrez.
Aaaah ! Aaah ! Arrête ! Arrête ! Steplait mec ! Steplait !

C'est le son des rats lorsqu'ils ont la queue piégée dans la trappe, qu'il entend. Ou bien est-ce le son des trouillards rampant aux pieds de la Justice ? La deuxième option semble plus que vraisemblable, puisque c'est sur la mine ensanglantée et terrifiée d'un punk aux cheveux verts hérissés que se posent les deux poignards visuels de Morneplume. Sa poigne se referme de plus belle sur le collet de cuir du junkie avant que le Sergent d'Élite ne passe l'homme au complet par-dessus la rambarde du minaret.

AAAAAH ! ARRÊTE ! ME TUES PAS ! ME TUES PAS ! REMONTE-MOI ! REMONTE-MOI ! J'TE DIRAI TOUT ! J'TE DIRAI TOUUUUT !

Il se tortille en pleurant sa mère, ce ver dont seule la Poigne de Morneplume sépare d'une chute de plus de cinquante mètres. Edwin pourrait le lâcher, ici, maintenant. Laisser la gravité terminer ce minutieux travail d'élimination qu'il a enclenché. Le punk pourrait embrasser le sol, s'écraser, exploser et se vider contre les pierres sales et poussiéreuses d'Hinu Town. Ne resterait de lui que ses odieux piercings et des mèches fluorescentes tâchées de sang. Voilà ce qui l'attend, ce pauvre adolescent stupide qui bat des pieds en se faisant dessus. Voilà ce qu'il convient de faire à ceux qui refusent de témoigner face à la Justice.

Morneplume le remonte, le lance contre le plancher du sommet du minaret. Il s'échoue au sol, roule puis rampe loin d'Edwin, braillant et hurlant au secours. Sur le reste du plancher de l'étage du minaret, autour d'un Kamina venant tout juste de surgir en haletant, gisent une dizaine d'autres junkies. Certains se sont fait jeter sur les murs. D'autres ont eu le visage enfoncé par les jointures du Sergent. Tous, cela dit, regrettent les paroles trop vite lancées de leur congénère qui, désormais, étouffe des sanglots horrifiés et demande incessamment pitié à l'immuable Morneplume.

J'ai cru comprendre que vous parleriez ?
Oui ! Oui ! Oui ! ME TOUCHEZ PAS ! JE VAIS PARLER ! JE VAIS PARLER ! ME TOUCHER PAS !

Il se remet à hurler et à se débattre alors que s'approche la main gantée de blanc d'Edwin. Pauvre bête traquée, acculée au mur du désespoir. Petite hermine trop bête pour ne pas réfléchir à deux fois avant de s'attaquer à l'ours qu'est la Justice.

Sachez que si vous osez me raconter des sornettes, je vous trouverai et n'hésiterai pas à vous arracher chacun de vos anneaux les uns après les autres. ton égal, froide et insensible menace.
Vous cognez des innocents ? Quel cinglé a bien pu ouvrir votre cellule ?
Hm. Alors ?
Will' c'est un pote ! Un mec bien cool avec qui on fumait des trucs des fois ! Il amenait une fille… oui ! Une fille ! C'est elle que vous voulez, c'est ça ? Elle venait ici ! Y s'fréquentaient ou je sais pas quoi ! Elle venait le voir ici et ils s'parlaient longtemps sur la rambarde ! Ils regardaient la ville et ils restaient tard ! Assez tard pour que nous on s'tire… Mais Will' devait rester tard juste pour elle… d'habitude la nuit il avait un boulot.
Un boulot ?
Il revendait des trucs sur le port. Aux maisons, aux touaregs, aux trous d'cul du quartier. J'sais pas quoi, il en parlait pas trop. 'tout cas, c'est lui qui nous refilait de la came, souvent ! J'sais rien de plus ! RIEN DE PLUS ! ME TOUCHEZ PAS ! LAISSEZ-MOI FILER !

Il tremble comme une feuille alors que la main d'Edwin s'approche, puis se retire. Le Sergent se relève de gestes mécaniques, puis s'allume une cigarette en regardant loin par-delà la rambarde, loin par-delà les toits de la cité. Quelque part, il y a sa proie. Quelque part, s'il n'a pas déjà pris la route du désert avec elle. Un lien de plus s'est créé autour du nuage diffus qu'est la relation de William et de la fille de Timberwhite.

Un petit escargot est tiré du veston de Morneplume. Il crache un nuage de nicotine, puis compose un numéro.

Ici Morneplume. Envoyez des hommes au minaret du centre-sud d'Hinu Town. Vous arrêtez tout le monde, vous les fouillez puis après vous perquisitionnez tout ce que vous trouvez d'illicite. Terminé.

Il a travaillé un moment dans la brigade des stupéfiants de l'Élite, Edwin. Il sait que la plus simple des luttes, mais aussi l'une des plus effectives, pour lutter contre le trafic de stupéfiants, c'est de couper couper les consommateurs avant de remonter le filon. Un classique... Du temps où lui et Hadzi formaient un duo. Avant le scandale. Les scandales… ces réactions trop vives d'une société immature incapable de comprendre les véritables desseins d'une Justice pure.

Kamina. Rejoignons Timberwhite. La prochaine étape; les maisons de passe.


Dernière édition par Edwin Morneplume le Lun 14 Mar 2016 - 19:14, édité 1 fois
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J'ai les doigts engourdis par la clope qu'ils tiennent fébrilement depuis qu'ils ont disparus dans le minaret. J'entends rien de plus, depuis, que des cris diffus et étouffés par des pierres et des briques plus épaisses que celles d'un tombeau égyptien. Et une chose est sûre, c'est pas les voix du poiscaille et de la montagne qui geignent comme des porcelets à l'agonie. Ça ressemble aux croassements apeurés d'une meute de corbeaux dispersée par des souliers en taille cinquante-six. Les grolles de Mornechose. Quelques chocs sourds pulsent, parfois, me faisant penser que la manière douce n'a pas l'air d'être sa méthode. Gageons que gueule de requin trottine derrière lui pour tenter de refréner ses ardeurs à grands renforts de moulinets de bras inutiles. Ça me frustre de n'avoir que le son et pas l'image. Ça me saoule d'être là et eux dedans. Et mon stress grandit malgré l'indus' qui se consume entre mes doigts tremblants.

Les mots de ce lieutenant résonnent encore. Dire que je suis responsable, comme ça, de bute en blanc, comme il m'aurait canardé à l'artillerie lourde... Non il m'apprend rien, sûr qu'il m'apprend rien ! Pourquoi on s'engueulerait avec ma femme sinon, hein ?

Non c'est juste que ça me fout un peu plus les nerfs de voir ce qui crève les yeux.

Et que même lui s'en soit rendu compte.

Pourtant, il fait son job, le bougre. Et je crois que pour ça, je commence à l'estimer un peu. Juste un peu. Deux ou trois points au-dessus du zéro absolu. Amour du travail bien fait ou volonté indéfectible de ramener tout un chacun dans le droit chemin – elle et moi ? Hin, ça me ferait marrer. Mais cela dit, le voir balancer depuis les créneaux du minaret une tarlouze aux cheveux d'un vert casse-pied comme s'il avait au bout de la main un encensoir géant, ça me rassérène. Rassérène ? J'emploie des mots pas communs, merde.

Le visage déconfit par la crise de panique disparaît derrière les murs de la tour de Babel et je m'apaise sensiblement. Les bruits s'estompent, les cœurs s'allègent. Et c'est émergeant d'entre les ténèbres qui se tassent derrière la large ouverture du minaret comme le gosier d'un géant que les deux flics reviennent vers moi d'un pas régulier. Deux pas de Kamina pour un seul de Morneplume. Plus loin dans Hinu, des marins de la garnison se mettent en branle pour récupérer les gamins esseulés en haut de cette tour. Je le sais, mais je veux pas savoir ce qui les attend, que ce soit un foyer pour la réinsertion des jeunes ou la taule pour trafic. Les deux gueules d'amour s'arrêtent à mon niveau, lèvres scellées sur toute parole inutile. Je suis partagé entre l'envie de leur demander comment ça s'est passé et le souhait de les féliciter avec cynisme sur leur professionnalisme, mais j'ai dans l'idée que le grand n'en aurait cure et que la poiscailles soupirerait pour m'approuver. Et ce serait peine perdue. Je me mêle donc à leurs silences partagés et attends que l'autre ou l'un termine sa rêverie pour enfin me remarquer. Et heureusement, c'est pas le requin qui l'ouvre ; il doit savoir ce que je pense de son avis.

La piste de William se précise à chaque pas. Il est clair dorénavant qu'il n'avait pas uniquement pour vocation de vous subtiliser votre fille. (Il marque un temps d'arrêt). La nuit approche. Dirigeons nous vers le port où, je l'espère, nous pourrons démêler son éventuelle implication dans des trafics plus illicites.
Un trafiquant de drogue ? M'exclamè-je en imaginant ma fille tremper dans ces conneries.
Les jeunes parlaient de « came ». Nous allons voir ce qu'ils entendaient pas là.
Bordel de merde...
Nous nous apprêtons à visiter les maisons de passe du port, monsieur Timberwhite. Vous y avez vos entrées, à tout hasard ?
Grand Dieux jamais ! Vous me prenez pour quoi ?
Vous risquez d'être mis à la porte, peut-être ?
Qu'est-ce que t'insinues connard ?
Je ne fais que m'enquérir de votre situation. Votre femme est du métier et je préfère ne pas nous embourber dans une situation inattendue.
Non. Y'a rien à en dire.
Parfait. Allons donc.

Son inertie passe subitement de nulle à trop élevée pour être suivi. Et encore, j'ai des jambes quasiment aussi grandes que les siennes. Mais l'homme-branchies doit courir pour le rattraper. Surtout qu'il fait rien pour nous laisser revenir à sa hauteur. Il sait où il va et il sait qu'on le suit. Ça a tendance à m'agacer et je serre les dents sur un grognement contenu. J'ai beau avoir changé d'avis sur lui, il n'en reste pas moins un arrogant de l'élite.

Le chemin que nous empruntons est étrangement dégagé. Le peuple du désert nous voit arriver de loin et s'écarte devant les deux grandes perches que nous sommes. Si avec ça ils voient l'insigne du Lieutenant d'élite et son poisson pilote à crocs, sûr qu'on est pas dérangés par les vendeurs de tapis. Surtout parce qu'on touche à la fin d’après-midi et qu'ils commencent à ranger leurs étales avant que le vent du soir ne se lève et ne désordonne leurs stands. Nous passons au milieu de la place du marché. C'est le plus court et puisque les gens nous ignorent, aucun gamin des rues ne cherche à nous subtiliser des berrys et aucun vendeur de viande n'essaie de nous refourguer sa barbak de chameau faisandée supplément mouches. Ils se contentent de nous regarder d'un mauvais œil, tête brandie vers nous, agitant leur éventail avec nonchalance pour décourager les insectes.

Plus loin, un kiosque nous vante les mérites et faits d'armes de la famille royale. Nous passons également devant un restaurateur, puis un autre, et un troisième, et toute une garnison de restaurants divers et variés aux produits exclusivement d'importation. Enfin seulement, et sans que nous n'ayons échangé un mot de plus, les murs de grès et de sable sont troqués contre des matériaux plus nobles et éclatants comme la pierre blanche et le marbre, signe que nous arrivons dans le quartier du port, le plus riche et le mieux entretenu. Il s'agit tout de même de la façade, de ce que Hinu a à montrer au reste du monde. Ah c'est sûr que Hinu aurait pas cette renommée si les gens voyaient la gueule de son marché en y pensant ou ses dunes de sables hostiles. C'est la même chose pour la famille royale : ils mettent en avant leurs filles et jeunes enfants plutôt que les vieux croulants qui dirigent vraiment. Ça fait plus vendeur une gueule d'ange que tous les mecs veulent se taper que le cul ridé d'un roi défraichi et plus tout à fait certain de savoir comment chier droit.

D'un geste inopiné du bras, j'indique avec un borborygme affligeant la direction d'une ruelle étroite et incurvée qui disparaît derrière des bâtiments à l'air solides et neufs. C'est pas vraiment indiqué, mais tout le monde sait où trouver les bordels. La rue – affectueusement surnommée « Courte » – que nous arpentons alors voit les entrées détournées pour les deux maisons closes fleurir au détour d'une arcade ou d'une alcôve, s'enfonçant parfois sous le niveau de la ruelle, parfois s'octroyant le luxe d'une volée de marches extérieures. Toutes les chambres n'ont pas de sorties personnalisées, mais quasiment toutes les entrées devant lesquelles nous passons sans un regard pour elle, à l'instar des vingt mendiants croisés sur le chemin, mènent à des chambres. Et non, je ne connais aucun des lits de ces deux établissements : je n'y allais pas avant ma femme et elle travaille dans le troisième, plus profondément enfoncé dans le cœur historique de la ville, alors... Si je dois donner mon avis, les deux maisons du port, ce ne sont que des étrons : juste là pour permettre aux pauvres marins de tirer leur coup et leur promettant un lit propre à l'abri du roulis. C'est pas une suite luxueuse ni le gratin des catins qu'on trouve là. Les rebuts, les orphelines, les sans le sou, les sans toits... Beaucoup de mineures, il faut le dire. D'ailleurs, je le dis au Lieutenant juste avant qu'il ne pousse la lourde porte de bois que je lui désigne comme étant la seconde entrée principale du premier bordel. Il se contente de hausser un sourcil et ouvre la porte comme d'autres l'auraient enfoncée. J'sais pas ce qu'il en pense (de ce que je viens de lui dire) mais j'ai dans l'idée que ce qu'il verra là-dedans finira de forger son jugement. Il a tout de même fait arrêter une dizaine de jeunes pour possessions illicites alors que c'était loin d'être le sujet de son enquête.

Le hall dans lequel nous entrons (voutés pour deux d'entre nous) est assez bas de plafond mais ne manque pas de luminosité. Il faut dire qu'en fin d'après-midi, les locaux bénéficient de la lumière descendante du soleil couchant, donnant à la décoration soignée (quoique trop florale à mon goût) un air chaleureux et accueillant. Tout en longueur, donnant directement sur le port en face de nous, un escalier de pierre et de bois démarre sur notre droite et sous lequel un espèce de bar fait office d'accueil. Là se tient fièrement une jeune fille d'allure altière et dont la poitrine lui donne la vingtaine. Ses longs cheveux blonds sont quasiment libres et tombent en une torsade toute contrôlée qui donne à sa silhouette l'impression d'être plus grande qu'en réalité. Ses yeux et ses pommettes sont maquillés grossièrement, mais son sourire est assez envoutant et éclatant pour nous faire oublier tout le reste. Nous comprenons pourquoi c'est elle qu'ils ont foutu là.

Pourtant, ce n'est ni à Edwin ni à moi qu'elle offre ses dents en collier. Et ce n'est pas non plus à notre attention qu'elle lance une exclamation parfaitement choisie, entre l'impatience et la sensualité.

-Haha ! Yeah ! J'ai toujours voulu avoir un Homme-Poisson pour client !
Tu crois qu'elle se moque ? J'intime à Edwin après une très longue seconde de silence
-Pas du tout ! Je désespérais de devoir aller au fin fond de Grand Line pour tenter l'expérience ! Attendez-moi trente secondes, je me fais remplacer !
Nous ne sommes pas là pour ça, mademoiselle. Tente d'intervenir Morneplume. Je l'interromps d'un mouvement de la main.
Laisse. Si elle peut nous le virer d'entre les pattes.

Le regard que me lance le Lieutenant aurait dû me glacer sur place, mais le fait qu'il tient son chapeau sous l'aisselle à cause de la hauteur sous plafond et me sachant dans une position angulaire tout aussi ridicule, je ne peux le prendre au sérieux. Et devant mon manque total de réaction, il se voit obliger d'ajouter :

Malgré ses déboires passées, le Sergent Kamina est un marin assermenté. Il saura tirer avantage de cette situation.
J'entends tout ce que vous dites, vous savez ?
Alors va t'amuser avec elle pendant que le vrai marin s'occupe de cette affaire !
  • https://www.onepiece-requiem.net/t7450-un-cv-contre-du-boulot-c-p
  • https://www.onepiece-requiem.net/t7344-j-vois-pas-en-quoi-c-est-important#90601
Voilà voilààà ! Misses Katlyn et Ursula vont vous prendre en charge, messieurs !

Une brindille binoclarde travestie en secrétaire accompagnée d'une vieille peau déguisée en trentenaire. Des poupées taillées sur-mesure pour ces messieurs à la libido depuis longtemps réduite à l'état de croûte sèche. Elles vont être déçues.

A nouuus !

Elle me tire par la palme tandis que je crache un Ouais désabusé mais trop discret qui s'évanouit dans les palabres coquines de ses copines. Son parfum s'enfonce dans mes naseaux puis m'incendient les sinus. J'pensais pas que brûler l'odorat des clients constituait une bonne tactique commerciale mais bon, quelle importance, le fric n'a d'odeur que celui du sang et de la merde, ainsi que de quelques fluides corporels encore plus intimes ici.

Prendre quelques vacances dans mon rôle de cuve à frustration des deux excités me fera pas de mal, mais j'aurais apprécié troquer leur compagnie contre une moins... épaisse en chair et dont le regard gourmand ne se promenerait pas sur mon corps. On dirait qu'elle me tâte des yeux, comme on vérifie que les pamplemousse sont bien mûrs avant de les assaillir. Je hais cette métaphore.

Alors dis, tu es un dauphin, c'est ça ?
Un homme-requin.
Oooh, un requin... C'est encore plus bestial, ça...
Un HOMME-requin.

Ceci dit, et c'est quelque chose auquel j'aurais jamais cru penser un jour, j'ai de la chance d'être tombé sur une zoophile.

Elle charge à travers un rideau avec l'ardeur d'un bélier en rut, et me jette de visu sur un lit si moelleux que je m'y enfonce d'une dizaine de centimètres à l'impact, un vrai marais de soie. Elle refait vibrer ses cordes vocales en une strident mélodie.

Commençoooons ! Qu'est-ce qui te ferait plaisiiiir ?

Ah ! Faut tout d'suite que je désamorce le malentendu avant de me retrouver le cul à l'air.

Tu connaîtrais un certain William ?
Quoi ? Euh, navrée, on ne fait dans le gay ici... mais je pourrais...
Mes amis et moi le cherchons. Ça fait des semaines qu'on l'a plus vu.

Ça m'écorche la langue de qualifier les deux violeurs de sérénité qui m'accompagnent d'"amis", mais je m'vois pas sortir mes babioles de "marine assermenté" pour la convaincre de partager quelques commérages sur un fugitif. C'est bien beau de trouver une porte à ouvrir, mais il faut d'abord dénicher la clé adéquate. Je suppose qu'à ma place, Mornepute l'aurait défoncée. La porte.

Elle n'a apparemment pas calculé mon appartenance à l'ordurière race des mouettes, hypnotisée par mon museau maltraité par une dizaine de grimaces superposées. Si je veux la mitrailler de questions qui fâchent, c'est maintenant ou jamais, tant qu'elle a baissée sa garde. Et de préférence avant que ces affreuses souris cancéreuses qui lui servent de main n'aient le temps de sautiller sur mon ventre. Jamais blairé la texture de la peau des femelles humaines. On dirait souvent un immense désert vide de relief, victime de massacres perpétrés par les savons et les épilations maniaques. Puis ça encrasse ma virilité de prendre conscience que je suis encore plus imberbe qu'elle. J'imagine que lui en faire la remarque trancherait sans ménagement le lien qu'elle croit développer entre nous. Je garde ça en plan d'urgence pour une évasion, au cas où elle chercherait à m'emprisonner dans les boursouflures qui pendouillent sur son torse ou quoi. Sait-on jamais.

Ouiii, William, ça me dit quelque chose... Un petit gars pas très bavard qui passait de temps à autres causer à la patronne. Il a jamais voulu de nos services ! Je croyais qu'il était gay...

Ou bien très amoureux, beuh. Il a été fidèle à son contrat. Un point loupé pour les langues de vipère qui prêchent l'inconstance des révos'.

Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il devient ?
Je cherchais à le savoir, justement...
Oh eh bien, j'sais pas vraiment, il avait des amis un peu louches dans la révolution...

Tu m'apprends rien. J'aurais aimé que tu puisses te servir de ta langue à bon escient avec moi...

Mon p'tit copain est barman sur le port. Il l'apercevait souvent en compagnie d'une bande de dockers !

Came, dockers, port... Ça se précise. J'espère que le coup de théâtre de l'histoire ne mettra pas en scène le William comme un narcotrafiquant déguisé en révo'. Ça ferait tellement plaisir à Mornepute, que ça pourrait presque dégripper ses émotions rouillées, j'en suis presque sûr, que de voir la bannière révo utilisée pour recouvrir du business sordide.

Ah, je vois.
Quelle grise mine...

Les fruits de l'arbre que je secoue ont l'air juteux. Mais je me sens pourri de m'en gaver de cette manière. J'ai toujours été certain que les bobards étaient un féroce poison qui ronge le menteur jusqu'au sang avec de piocher dans son entourage. Alors m'en servir pour rendre une fillette désespérée à un père glacial ? Qu'on s'entende bien, Timberwhite, c'est quelque chose que je vais pas m'amuser à te hurler parce que j'me doute que c'est enseveli dans ta conscience quelque part sous un épais égoïsme, quand on te la ramènera, si on te la ramène, tu auras creusé la tombe dans laquelle elle se jettera.

Tu le sens qu'elle était proche de se jeter dans un ravin mais tu n'as aucune idée de comment la retenir, pauvre papa. On dirait que tu essayes de rapiécer ton ego minable. Tu aggraveras probablement le drame en t'obstinant à habiter les ruines de ta jolie famille. Mais bon. Est-ce que j'm'entends, moi aussi ? Mon frangin casse des cailloux sous le soleil croûteux d'un bagne à cause de moi, mon père surfe sur des océans de sang à la rencontre de ses ambitions pour oublier que ses gosses l'ont fui, et ma mère... et ma mère tranche sûrement des gorges désillusionnées. Oui ma situation familiale est aussi un pédiluve de diarrhée dans lequel je fais les cents pas malgré moi.

Sûrement la proximité du croque-mort qui me pousse à plus juger les miséreux qu'à l'habituelle. Timberwhite est un pauvre type et les pauvres types ont des réactions de pauvres types. Est-ce que ça justifie de verrouiller le sinistre avenir de sa fille, à la façon de celui de TARK, sans tenter aucune négoce, sous prétexte que mon rôle de marine devrait s'arrêter à pouilleux chien de chasse qu'on envoie renifler les pistes les plus nauséabondes ?

Allô chéri ? Ça va ?
Merde, Will était un révo'... Désolé, ça me dépasse.
J'ai tout ce qu'il faut pour te consoler, hihi. Et si on déboutonnait ta veste ensemble ?
Non non, je venais juste collecter des infos, rien de plus.
Alors tu ne veux même pas une petite...
Non.
Ou bien une très courte...
Non plus.
Hin. Tu n'as pas quelques amis poissons qui pourraient être intéressés ?
Pas vraiment, désolé.

Je m'extirpe du lit en rattachant ma ceinture qu'elle avait un peu commencé à agresser, elle se noue dans un cliquetis timide. Et moi je tente un sourire niais pour alléger cette atmosphère toxique qui est en train de m'empoisonner l'âme. Je préférerais cent fois lui filer ma tirelire entière que de coller trop près mon cuir poisseux au désert sec d'une peau humaine. Payer en nature c'est pour les catins. Sur ce point-là, au moins celui-là, je n'en suis pas une.

Je peux au moins prendre une photo de toi ?
Pour en faire quoi ?!
Un souvenir...
Vous me lâchez maintenant, ou je vous arrête pour harcèlement sexuel.

Je. Merde. Le stress est remonté ouvrir des valves auquel il n'aurait pas du toucher. Et la vérité m'a giclée de la bouche.

Comment... comment ça ? Z'êtes marine ?
Vous avez des poils en fait, mademoiselle.
Hein ?!

La révélation lève une immense confusion, le ciel rayonnant de ses mirettes subit une légère giboulée, puis vire à l'orage. Dont je n'entends pas le tonnerre car, tout aussi vif qu'un ninja qui vient de déployer sa fumigène, je me suis déjà volatilisé dans un puant nuage de malaise.
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