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Les voix du Seigneur sont impénétrables

Convaincre Kadren (et accessoirement Zieger) de me laisser partir en ambassade auprès des Anges du GUANO avait été étrangement facile. D'un autre côté, ça tombait sous le sens. Par contre, les convaincre de me laisser partir seule avait été plus ardu. Ils n'en démordaient pas. Et je n'étais pas spécialement contre eux sur ce point. C'était de la folie furieuse que de s'engager dans cette jungle inconnue pour rencontre une sorte de mégalomane à moitié hystérique et revanchard.  
- « Mais je pense vraiment que votre venue, Colonels, sera contre-productive. Phil a assez insisté là-dessus. Ce « Dieu » est assez bizarre et méfiant, et il n'ira pas faire confiance à des hommes représentant l'armée d'un autre pays. »
- « Ça, c'est si vous croyez que Phil ne vous ment pas. »
- « Oh, il doit bien avoir un ou deux coups-fourrés dans sa manche, mais sur ce coup, je l'ai trouvé convaincant. Et il est clair qu'il en voit en moi une menace moindre. Je crois qu'il n'a pas encore bien compris ce que le Cipher Pol était. » Dans une situation comme celle de Vearth, une agent politique comme moi était potentiellement capable de faire bien plus dégâts qu'une paire de gros bras. Semer le doute, embobiner les conseillers, créer des troubles : voilà ma spécialité. Si Zieger eut un reniflement circonspect, Kadren se comporta mieux mais ne put cacher à mon œil de faucon une légère expression de quelque chose que je ne saurais définir, même maintenant, mais qui immédiatement me mit en pétard. Hé quoi ? Ils me croyaient donc incapable de me défendre, de prendre de soin de moi ? De réussir ? Quoi que cela fut, cela balaya la moindre réticence. Oh, comme je voulais aller sur Vearth parler à Dieu !

Souhait que je me pris à regretter dès que je vis la petite embarcation qui allait me faire traverser le bout de Mer Blanche.  
- « Et ça, ça va me mener à votre Dieu saine et sauve ? » Je fis part de mes craintes à un Phil qui se dissimulait dans l'ombre de cette fin d'après-midi. Il ne voulait pas être vu plus que nécessaire dans les parages, dans ce qui était connu et tu par tous ceux qui étaient au courant, un approvisionnement du GUANO par les partisans anges d'Héailleutou.... partisans qui ne devraient pas exister selon l'accord passé avec les Sélénites.
- « Oui, » me souffla-t-il si doucement, que je pensai un instant que je l'entendis à travers le haki. « … je m'en porte garant. Rien de fâcheux vous arrivera si vous savez vous y prendre avec Dieu. Je vous ai prévenue, ça ne sera pas facile, mais si vous vous y prenez bien... Maintenant, il faut y aller. »

Le temps. La chose qui était en rupture de stock depuis très longtemps. J'avais tenu un bref debriefing avec Zieger et Kadren pendant que je préparais mes affaires pour cette entrevue divine. Si je devais partir, c'était avant que Gisèle (et Valérianne) n'eussent vent de mon entretien avec Phil, car cela ne manquerait de compliquer le dialogue. Bien qu'elles ignoreraient les informations que Phil nous aurait divulguées, elles sauraient sans l'ombre d'un doute que nous en savions plus qu'il n'en faudrait pour le simple bien-être de Héailleutou – le bien tel qu'elles, elles le concevaient. Ou, si je devais en croire le troisième Messie, le bien-être du patrimoine de Miss Castel-Berium. Mises devant le fait accompli, Gisèle et Valérianne presseraient le tempo pour une signature de traité, déclaration d'amitié ou autre, chose que Kadren ne pourrait refuser.
Mes collègues Marines n'avaient pas trop eu l'opportunité d'entrer dans les détails de leur propre conversation avec le chef des Bérets Blancs et Gisèle. J'en savais assez pour être rassurée : les hommes du GM ignoraient encore tous de la véritable nature des Sélénites. Après ça... Si j'avais un sens de l'humour, je pourrais dire que tout était désormais entre les mains de notre Seigneur, mais vu que j'allais rencontrer Dieu, quelque chose me disait, et ce n'était pas Paranoïa pour une fois, qu'il ne fallait pas tenter le destin.

La traversée fut un moment d'angoisse terrible. Pourtant il ne se passa rien. C'était peut-être ce qui me mit le plus les nerfs en pelote. Après tout, tout ce que je savais, se résumait à « rencontrer un type qui se fait appeler Dieu et qui règne sur la partie la plus extrémiste d'un peuple à la base bienveillant ». La contradiction extrinsèque même de cette définition prouvait bien que je mettais les pieds dans une situation hors norme. Cela fait plus de cinquante ans que le GUANO se battait contre les Shandias, sans qu'aucun résultat ne fut flagrant. Pire, ce groupe n'avait rien fait contre les envahisseurs qui avaient détruit leur civilisation car, si j'avais bien tout suivi, le Giant Jack avait une signification particulière. Du coup, oui, frapper un monstre ou deux, ou chavirer, ça m'aurait empêché de gamberger tout ça, et de réaliser qu'une fois de plus, j'allais affronter seule une situation sans la moindre préparation.

Cette idée motiva ma décision de sortir mon den-den blanc dès qu'il m'en fut possible. Le bateau m'avait amenée tout d'abord à la sortie de la Highest Way, avant de remonter autant que ce put une rivière. Je fus débarquée au dernier moment possible, en me disant d'attendre avec les provisions. J'étais donc seule, jusqu'à ce que les anges du GUANO vinssent récupérer les colis. Je ferai ainsi le reste du voyage avec eux. Hors de question, m'avait-on dit, que je m'engageasse dans la jungle toute seule. Une recommandation, voire une interdiction, que je partageais pleinement.

Je commençai par prendre connaissance du message de Rafaelo. Il était donc lui aussi sur Vearth en ce moment même, à la recherche de la Lune Noire. S'il n'avait rien trouvé sur Héailleutou, c'était bel et bien que les Anges avaient rompu tout contact avec ceux et celles de l'Alliance. Apparemment, les jeunes rebelles, motivés par une crise identitaire ou un réel engagement politique, préféraient rejoindre le GUANO à l'Alliance. Franchement, ce genre d'attitude m'énervait. Finalement, ils n'étaient pas si blancs que ça, les Anges. Ils avaient peut-être des ailes, mais ils n'étaient pas de majestueux aigles ou de charmants pinsons ; c'était de l'autruche dont ils se rapprochaient le plus. A se demander si ce n'était vraiment pas un miracle qui les avait maintenu en vie depuis tout ce temps. Incroyable que ni les Shandias ni les Sélénites ne s'en étaient réellement pris à eux auparavant. Certes, ils ne représentaient pas une menace immédiate, mais dans toute guerre, toute victoire était à prendre, et ce qui était fait, n'était plus à faire.  Bien entendu, Paranoïa était là pour me souffler que cet état de grâce cachait quelque chose... peut-être un pacte secret, un quelconque complot entre je ne savais pas encore qui ?
Rafaelo était à son tour hors ligne. Nous en étions donc à communiquer par messages interposés.
- « Fais gaffe, Rafaelo. J'ai l'impression que tout le monde cache quelque chose, et surtout, tire la couverture à soi. Je sais que personne n'est jamais vraiment innocent de tout crime, mais il y a quelque louche ici, et ce à commencer par ce supposé accident de l'émissaire. C'est clair qu'il y a quelque chose de pourri au royaume de  anemark. »

Et après, cette communication... Pulululu. Pulululu. Pulululu. La connexion fut longue à s'établir, et qu'elle le fut, c'était un son haché, de très mauvaise qualité. Certes, on était littéralement plus sur la terre, mais tout de même ! Les joies de la technologie...
- « Raven, je vous entends très mal. Je vais faire donc vite, et rapide. La fameuse mission top secrète ? Elle m'a envoyée à Skypiea. » Baldwin, chef de section local d'Alabasta, avait été présent lorsque j'avais reçu ma convocation officielle. Il savait que j'étais partie pour une opération du Gouvernement, et il ne faisait aucun doute qu'il en avait informé Raven.  « La majeure partie de la population des anges ont quitté l'île de Vearth, ex Jaya, suite à une guerre civile entre Anges et Shandias. Le conflit continue encore et un troisième groupe, les Sélénites, s'est incrusté. Du coup, l’île des Anges a demandé de l'aide au GM pour régler cette histoire. C'est déjà assez difficile comme ça, avec le GM qui est plus que ravi de pouvoir mettre le nez dans ces coins qui échappent à son pouvoir. Mais en plus, un dragon céleste, un certain Maselfush, a eu vent de l'existence de cette guerre civile, et il est en route pour mettre tout ce petit monde à sa botte. Réserve personnelle d'esclaves. Et pas des moindres, je viens d'apprendre que les Sélénites ne sont pas des Anges ou des Humains, mais des habitants de la Lune. Je ne rigole pas. Ils avaient deux vaisseaux, capables de traverser l'espace !!! Actuellement, l'un a sombré il y a douze ans... ça veut dire que la carcasse est passée à travers la Mer Blanche et a dû s'enfoncer quelque part au large de Jaya. Il est crucial que jamais le GM ne mette la main sur cette technologie, ou même vienne en apprendre son existence ! Dernier point, il faut sauver l'émissaire ange que le GM a fait disparaître, pour ne pas prendre Maselfush à contre-poil. Amaury de Danemark, ange, blessé, arrivé en fin d'année.
Je vais tenter de résoudre au mieux la situation ici, mais déjà, si vous pouviez mobiliser nos forces pour retarder Maselfush, le bloquer sur Grand Line. Et tout renfort sera le bienvenue, sauf si la situation devient explosive. Je vous rappelle dès que j'ai d'autres nouvelles. »

J'avais tout sorti d'un trait, en espérant qu'elle m'avait entendu. Si elle avait des conseils, je ne pus les entendre. La communication avait été coupée. De toutes les façons, du bruit se faisait entendre. C'était soit le GUANO, soit un monstre de la jungle... Il s’avéra que c'était le GUANO. Avec le recul, je me dis qu'un monstre, ça aurait été mieux.


Dernière édition par Shaïness Raven-Cooper le Lun 9 Fév 2015 - 18:39, édité 1 fois
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Je ne sais pas pour vous, mais quand on vous parle de Dieu, j'imagine toujours un grand mec d'âge mûr, qui fut baraqué un jour mais que le temps a poli et incrusté de sagesse tout partout. Généralement gris de poil et avec une barbe. Je ne dis pas qu'Alaincourt de Bergerac ne faisait pas un bon Dieu. C'était juste que vraiment, je ne m'attendais pas à un type comme lui, affalé dans ce qui ressemblait à un trône, une jambe par-dessus un des accoudoirs, la joue reposant sur un poing fermé accoudé, en train de contempler les nervures d'une feuille morte comme si toute la vérité du monde s'y cachait. Par contre, niveau aura, il envoyait du lourd. Ses vêtements, sa coiffure, son style...
Il suffisait de voir le regard en coin qu'il fit glisser sur moi. C'était l'attitude d'un homme qui se savait puissant, capable de beaucoup et qui ne craignait plus grand chose. Vous allez me dire, ça valait mieux, puisqu'il était le meneur d'un peuple en guerre depuis... ben techniquement, avant sa naissance. Ou du moins, ce fut ma première expression. Je ne savais pas que la déité, ça conservait. Dieu ne faisait pas sa presque soixantaine d'années. Tout au plus lui en aurais-je donné quarante. A son charisme s'ajoutait aussi cette virilité presque animalistique, Je sais, ce mot n'existe pas, mais bon, Dieu en chair et en os en train de regarder une feuille d'arbre, non plus. Je voyais à la fois le vieux loup chef de meute, prêt à bondir à la gorge du jeunot trop folâtrant, et le placide lion qui ne faisait usage de sa force que si vraiment nécessaire. Il avait du chien, et toute cette ménagerie se résumait en un seul mot : « Dieu ».

J'avais toujours apprécié les beaux mecs, et je n'avais jamais été insensible aux charmes d'un mauvais garçon. Ce n'était pas parce que j'étais une fifille à papa, peste sans grande compassion pour les pathétiques, que j'étais insensible. Bien au contraire. J'avais juste le cœur bien placé, et le peu d'indulgence et bonté que j'avais, je le dévouais aux grandes causes. Cela faisait longtemps que j'avais abandonné tout espoir d'être heureuse, d'avoir une vie à moi. J'étais à la Révolution comme l'écume est à la mer, le nuage au ciel et le vernis à la manucure : petit détail pas forcément important, mais qui donnait toute sa saveur. Corps et âme, j'avais sacrifié mon bien-être pour les autres. Si ça, ce n'était pas l'altruisme. Et de la débilité. Je n'ai jamais dit que même à vingt-six ans, je n'étais pas stupidement naïve.
Dire que j'étais tombée sous le charme de Dieu, donc, n'était pas un mensonge. Ce n'était pas une vérité non plus. Paranoïa était bien trop présente pour que je succombasse au premier regard. Dire que je devais la vie sauve à mes plus sombres passions !
Nous nous regardions, jaugeant, jugeant, chacun dressant une stratégie mentale, avec les nombreuses options et les « si » qui se juxtaposaient. Nous savions l'un l'autre ce que l'autre faisait, et ça ne nous gênait pas. Nous étions les deux combattants qui tournaient dans l'arène... Sauf que techniquement, je n'étais pas là pour combattre, et il le savait aussi.

- « Et donc, que me veut une humaine ? » finit-il par me demander sans quitter sa place ou même se redresser. Il arrêta cependant de contempler sa feuille, pour venir me percer d'un des regards les plus aigus que je n'ai jamais vu. Quelque part, il me faisait penser à certains instructeurs de l’Église, qui savaient que vous alliez dire une connerie en étant persuadés d'avoir la vérité unique, et qui vous laissaient faire au nom de leur grande connaissance et sérénité d'esprit. Le genre de regard qui vous fait redevenir une gamine apprenant son abécédaire, rougissante et balbutiante. Le genre de regard qui vous pique dans votre égo et vous donne envie de lui clouer le bec par votre magnificence intellectuelle, en pure perte.
- « Euh, bonjour. » Voilà, comme je disais. « Je suis Shaïness Raven-Cooper, chef d'équipe au Cinquième Bureau du Cipher Pol, du Gouvernement Mondial. »
- « Êtes-vous ? » me fit-il avec une voix tranquille, un rien interrogatif de celui qui savait mieux.
- « …. pardon ? » J'avais vraiment l'impression d'être la cancre de la classe en train d'être questionnée au tableau.
- « Tout ça. Shaïness, Raven, Cooper, Agent, CP, Gouvernement. L'êtes-vous ? »
- « Je ne vois pas ce que je pourrais être d'autre. »
Il n'eut besoin d'aucun mot, pas même un petit « hum, hum » connaisseur pour me faire comprendre qu'il savait mieux. Il ne savait pas forcément exactement quoi, mais clairement, indubitablement il savait que je portais des masques sur des masques, et que sans mentir, je n'étais pas encore l'authentique moi.

- « Ainsi donc, le Gouvernement de l'autre monde vient à moi. » lança-t-il après un petit silence embarrassé de ma part, et totalement plaisant de son côté. Là, je repris un peu du poil de la bête. Ce genre de phrase sibylline, qui se voulait une perche pour relancer une conversation, n'était que le prélude à une série de pièges. Je le savais parfaitement, parce que c'était mon mode de questionnement. Un non initié aurait sauté sur l'occasion pour déballer un petit discours bien travaillé, enthousiaste, tout content d'avoir trouvé un interlocuteur disposé en face de lui. Le truc à savoir, c'était de ne pas penser qu'il était bien disposé à notre égard, mais justement, bien mal.
Je me souvins alors des petites piques de Phil, comme quoi j'allais plaire à Dieu. Sur le coup, je n'avais pas forcément compris – et j'avoue que je n'avais pas spécialement cherché à comprendre. Maintenant que j'étais devant le Saint Père, je saisissais mieux pourquoi le Messie avait dit que je plairais à Alincourt de Bergerac.
Parce que je n'étais pas du tout ce que j'étais censée être. Or, dans le monde bien rangé des Anges, un esprit contradictoire comme le mien, ça ne devait pas courir les bananiers. Et il était évident que Dieu était pareil en tous points. Il aimait le chaos des idées, il était... sombre et tortueux, voir même ténébreux et torturé. C'était peut-être pour ça qu'il avait été désigné pour être disciple de l'Ancien Dieu, et qu'il était lui-même devenu Dieu. Les Anges se débarrassaient des anti-conformistes de cette façon, tout en reconnaissant leur valeur, puisqu'ils les laissaient les mener. Je devais donc être mystérieuse, le pousser à s'intéresser à moi. Après tout, si la clé pour obtenir son consentement au plan qui se dessinait dans ma tête passait par ma soumission à son envie de me psychanalyser, je n'y avais aucune objection. Depuis quand je me souciais de l'avis des autres, surtout quand l'autre, c'était Dieu ?

- « Vous pouvez voir ça comme ça, si c'est ce qui vous fait plaisir. Sachez simplement que je n'avais aucune obligation à venir vous voir. C'est MOI, et personne d'autre, qui aie pris cette décision. C'est MOI, et personne d'autre, qui se tient devant vous. »
Je fis deux pas en sa direction, désirant remettre à niveau notre relation, sans avoir l'impression d'être une courtisane quémandant une audience. Quelque part, c'était ce que je faisais, mais ça n'avait rien à voir avec une demande personnelle. Ce que je faisais, je le faisais pour lui, pour les Anges. Je ne lui devais rien, et lui ? Lui me devait tout.
Cependant, alors que je m'approchai, une silhouette se dressa entre Dieu et moi, et si seule son ombre se mit au travers de mon chemin, cela fut suffisant pour m'arrêter. Comment avais-je pu ne pas voir cette armoire à glace goacienne ? Depuis quand était-il là ? Je ne savais pas ce qui était pire : ne pas l'avoir remarqué dès le début s'il avait toujours été là, ou d'avoir raté son entrée près du trôné.

- « Voici Andy, mon bras droit. » Dieu me présenta l'ange le plus massif qu'il m'avait été donné de voir. « Vous disiez, jeune Shaïness ? » Je clignais des yeux, ne sachant que faire sur le moment.
- « Je prendrais bien du thé. Ou son équivalent chez vous. » Ah, à ce jeu, j'étais assez douée.
- « Mais bien entendu. Où sont donc nos manières. Lullaby? » Et dans l'ombre de l'ombre de Dieu, il y avait une délicieuse petite blonde, à la crinière parfaitement lissée – mais comment faisait-elle avec l'humidité ambiante ? En quelques mouvements précis, je me retrouvai assise sur une chaise à côté de Dieu, un verre de jus de citrouille à la main et une sorte de flan à l'ananas à ma disposition.

« Voici donc le GUANO, le Groupement Unifié des Anges Natifs et Originaux. Vous connaissez Andy et Lullaby. » conclut-il comme si la trinité qu'ils formaient ainsi suffisait. Il n'avait pas bougé d'un iota, toujours sa feuille à la main, avachi sur son trône.
- « Et vous. »
- « Qui peut vraiment dire qu'il connaît Dieu ? »
- « En effet. Ceci dit, moi, ce n'est pas Dieu que je suis venue voir. C'est Alincourt de Bergerac. » Andy se tendit un peu, et Dieu eut un sourire amusé. D'une chiquenaude, il se débarrassa de sa feuille et daigna m'accorder toute son attention.
- « Qui vous dit qu'il y a une différence ? »
- « Ben, vous êtes né Alincourt, et pas Dieu. Vous êtes devenu Dieu. Dieu, c'est un supplément. Mais ce n'est pas la somme du tout. »
- « Dieu, c'est un supplément... » répéta-t-il d'une voix songeuse avec une moue molle. Soudain, il se frappa la cuisse d'un accès d'hilarité qui manqua de me faire verser du jus de citrouille sur mon treillis. « Lullaby, inscris ça au journal de bord. »
- « Oui, Dieu. » se contenta de dire l'intéressée en griffonnant quelques mots sur sa tablette.
- « Chère Shaïness, apprends donc que je suis Dieu. Et simplement Dieu. »
- « Simplement Dieu ? Peut-on être simplement Dieu ? » Je ne m'attendais pas à discuter philosophie avec un Ange, fut-il divin. Et puis bon, j'avais autre chose à faire. Empêcher un Dragon Céleste de mettre à feu et à sang, et aux fers, le coin, par exemple.
- « C'est mon cas. »
- « Bien. Dans ce cas, je reviens sur mes mots. Je veux parler à celui qui fut un Ange parmi les autres, avant de devenir... quelqu'un d'autre. Quoi qu'on dise, on n'efface pas le passé. Vous êtes Simplement Dieu aujourd'hui, et vous fûtes autrement avant. Cet avant a peut-être cesser d'être, mais il existe toujours. »
- « Tu t'engages sur un terrain glissant, là. » Il se redressa d'un mouvement félin, et si j'avais encore le moindre doute, c'en fut fini avec : Dieu était avant tout un guerrier. Peut-être pas aussi destructeur qu'Andy, mais il ne ferait pas bon se trouver de l'autre côté de son poing ou de sa lame. Je ne lui voyais aucune arme visible, mais ce n'était pas ça qui me rassurait. Bien au contraire. Dans un tel climat de violence quasi-quotidienne, les armes étaient aussi vitales que l'air. Aussi savais-je qu'il avait au moins un haki, ou un fruit du démon, ce qui expliquait son apparente défiance martiale.
- « … oui, mais c'est votre faute. » répliquai-je au tact au tact. « Et ne venez pas me dire que Dieu est innocent de ce qui se passe sous son nez. » Il eut un sourire et se pencha un peu vers moi.
- « Tu ne seras jamais mon égale ici. Tu as essayé de te mesurer à moi, et maintenant, tu sais que tu vas perdre. »
- « Est-ce pour autant pour cela que je dois être honnête et vous dire toute la vérité ? » Si j'admettais ma défaite sur cette passe d'armes où Dieu avait démontré une expertise supérieure à la mienne dans la maîtrise de la langue de bois, je n'allais pas le laisser m'acculer dos au mur.
- « … Shaïness.... combien de Dieu as-tu rencontré jusqu'à ce jour ? »
- « Aucun. »
- « J'en conclus donc que même dans votre Gouvernement, il n'y a pas de cours de protocole sur comment s'adresser à un Dieu. »
- « En effet, mais des cours sur comment parler à un dirigeant, surtout quand celui-ci a un égo bien blindé, ça, je sais. »
C'était un coup risqué, à se faire empaler par un Andy glapissant au blasphème, mais voilà, s'il voulait que je fusse honnête, j'allais l'être, et publiquement annoncer, devant l'assemblée de ses suivants, que je ne croyais pas en sa divinité. Je lui reconnaissais le statut de chef, de meneur, et lui accordais pour le moment le bénéfice du doute sur sa capacité à être un bon chef, mais il n'était rien d'autre que ça.

- « Je vois. Tu ne me vois pas différemment que... tiens, les trois Messies d'Héailleutou. »
- «Exactement. Vous êtes un dirigeant, c'est tout. »
- « Ainsi donc, tu m'accordes le fait d'être un... chef à part. Le GUANO n'est pas une part intégrante des Anges. »
- « Si c'était ça le nœud du problème, vous auriez pu nous épargner tout ça. Oui, je reconnais l'indépendance du GUANO par rapport à Héailleutou. Je peux vous appeler votre Seigneurie, si vous voulez. Ou tout autre titre. »
- « Mon titre, c'est Dieu. »
- « Ce n'est pas un titre. Dieu, c'est autrement plus important. Ça touche aux convictions de la personne, à ce qu'elle croit ou ne croit pas. Ou veut croire ou ne veut pas croire. »
- « Et toi, tu ne crois pas en Dieu ? »
- « Non. Sauf si vous êtes prêt à rabaisser « Dieu » à un titre, l'équivalent de « président », « chef du conseil » ou « empereur », ou « grand enturbanné ». »

J'en avais marre de ce petit jeu. A se demander pourquoi j'avais été amenée ici. Les Anges qui m'avaient trouvée avec les provisions n'avaient pas été spécialement confondus de ma présence sur Vearth, et au bout d'un moment, j'avais compris que j'étais attendue. Au pays du Mantra, quoi de surprenant ? Si c'était pour me servir cette soupe insipide de boniments sans queue ni tête, pourquoi Dieu m'avait-il faite appeler jusqu'à lui, au lieu de me renvoyer vers Héailleutou ? A tout moment, il avait pu mettre fin à cette mascarade, et il me semblait qu'il avait plus important à faire de son temps, que de papoter ainsi. Il cherchait peut-être quelque chose en moi, attendait un geste ou un mot, pour me faire confiance. L'idée que j'étais en train de passer à côté de la plaque me terrifiait. Je n'avais pas la moindre marge d'erreur, ici.

- « Tu es particulièrement têtue, Shaïness. » Le commentaire de Dieu flotta dans l'air, alors qu'il appuyait de nouveau sa tête sur son poing accoudé sur le trône. Cependant, il s'inclinait ainsi vers moi, et me regardait encore plus intensément qu'avant.
- « On me l'a souvent dit. Ça fait partie de mon charme. » Je me retins de ne pas lancer un commentaire plus acide, laissant le choix à 'Dieu' de relancer la conversation. Bien mal me prit, car il continua à m'asticoter, et à chaque fois que je tentais de revenir sur le sujet de ma présence, il évitait, contournait... avec brio, certes, mais provoquant une irritation grandissante en moi. Si j'avais été dans mon état naturel, j'aurais sûrement remarqué le regard plein de compréhension de Lullaby. En tant que secrétaire, elle avait subi plus qu'à son tour, les extravagances de Dieu. La différence avec moi, était qu'elle avait choisi d'être à ses côtés. Pas moi. Ceci dit, la question primordiale ici était « mais quelle est ma vraie nature ? ». Je sais, ce n'est pas forcément celle que vous vous poseriez aussi. Mais voilà, il s'avéra que c'était la question clé.

- « Bon ! » finis-je par dire d'un ton dur, le fusillant du regard. Dieu s'en fichait, comme de sa première chaussette – et vu le climat local, pas sûr que le concept de chaussette voulusse dire quelque chose. « Je ne sais pas ce que vous voulez, ou ne voulez pas. Moi, je dois vous parler de quelque chose d'important et je n'ai pas vraiment la possibilité de perdre du temps. Voulez-vous, oui ou non, m'écouter ? »
- « Je t'écoute, depuis le début, mais tu ne dis rien. Qui me dit que cela va changer ? »
- « Ah, donc, vous voulez aller aux faits ? Comme ça, sans préparation ? Bien. Comme vous voulez. Vous allez tous crever. Non, en fait, vous allez tous souhaiter d'être crevés, parce que ce qui vous attend sera pire, mais largement pire, que la mort. »
Et toc.
- « Encore une fois, ce n'est pas ce que tu veux dire. »
- « Mais puisque vous savez si bien ce que je veux dire, pourquoi être là ? Pourquoi vous n'agissez pas ? » Sans compter que je ne pouvais concevoir qu'il sût TOUT – même si l'aide d'un espion infiltré sur Héailleutou pouvait l'avoir mis sur la voie, sans parler de son contact avec Phil – je n'arrivais pas à accepter qu'en dépit de savoir quelle catastrophe imminente lui pendait au nez, Dieu pût être là, assis tranquillement.
- « Mais j'agis. Je ne fais que ça. Je te vois, Shaïness. Fille du Gouvernement, tu es la représentante de ce qui se passe chez toi. Si j'arrive à te comprendre toi, ce qui te motive, ce qui fait de toi la personne très, très dérangée que je vois, alors je pourrais faire face à votre invasion. Oui, je suis au courant pour l'arrivée de ton navire --- »
- « Bof, ce n'est pas exploit, de voir un gros bateau là où il n'en passe jamais. »
- « --- et les raisons de la venue du Gouvernement sur Héailleutou. Je sais aussi pourquoi tu es venue ici. C'est Phil qui t'envoie. »
- « Oui. Il m'a dit de venir vous parler, pour tenter de vous convaincre de quitter Vearth pour revenir sur Héailleutou. »
- « Venir sur Héailleutou. » Devant mon air interloqué, sans prendre ombrage de mon interruption précédente, il m'expliqua. « Nous, le GUANO, n'avons techniquement jamais mis les pieds sur cette île qu'ils appellent Héailleutou. A l'exception des quelques anges qui nous rejoignent année après année, il s'agirait pour nous d'une arrivée, pas d'un retour. »
- « Et alors ? Ça fait une différence primordiale au fait que vous allez souffrir ? »
- « Mais tout à fait. A partir du moment où tu comprend que Héailleutou n'est pas notre maison, tu comprends que quelque part, le sort de cette île nous indiffère un peu. Nous sommes tristes pour eux s'ils venaient à se faire détruire par un monstre ou une menace autre. Qu'ils soient assez stupides pour se sentir menacés alors qu'ils vivent lâchement en paix... Qu'ils soient encore plus stupides pour aller chercher de l'aide auprès d'une institution qui est connue pour sa corruption ou au moindre, sa main mise sur les territoires... Et tu t'étonnerais que je n'ai que mépris pour eux ? »
- « Forcément, vu comme ça... » Je ne pouvais dire qu'il avait tort. « Mais moi, je ne suis pas Héailleutou. Je suis étrangère à vos querelles. »
- « Ah oui ? C'est pourtant de l’ingérence qualifiée, ta présence ici. Personne de Vearth n'a demandé à te voir. Tu es venue de ton plein grès. »
- « Je suis en mission diplomatique, et j---. »
- « .Nous sommes en guerre depuis trop longtemps pour que la diplomatie soit encore un épouvantail qui nous fait peur. »
- « Si vous vouliez me tuer, vous l'auriez déjà fait. Donc, vous attendez quelque chose de moi, et je ne sais pas ce que c'est, et plus le temps passe, plus je me dis que je ne vais pas aimer ce que vous voudriez que je dise ou fasse. »
- « Ah, enfin une réponse honnête. Et l’honnêteté appelle l’honnêteté. Je vais te dire ce que je veux de toi : que tu me parles comme on parle à Dieu. Ce n'est peut-être pas plus qu'un titre pour toi, mais ici, JE SUIS DIEU ! Et si tu n'es pas capable de comprendre ce que cela veut dire, et d'agir en conséquence, que tu y crois ou pas, alors je sais que le Gouvernement est un ennemi, au même titre que les Sélénites et les Shandias. »
- « Vous qui aimez l'honnêteté savez très bien que ça serait pure hypocrisie de ma part que de faire comme si je vous... quoi d'ailleurs ? Suis-je censée vous adorer ? Tomber à genoux et arrêter de penser, de croire en vos paroles comme si je n'avais pas une opinion à moi ? Si je faisais ça, quel respect auriez-vous pour moi ? Pour ce que je représente ? »
- « Tu as raison. Bien naturellement, je n'aurais aucun respect. Mais la question, c'est ce que tu représentes. »
- « Encore cette question ? » Je roulais des yeux.
- « Je sais quand on me ment. Je sais quand on me cache des choses. Tu vois, parler à Dieu, c'est facile. C'est comme être à nu. C'est ne pas craindre de dire ou de penser, parce que c'est ce que je veux. Qu'on pense et agisse selon ce qui semble être bien. C'est croire que je suis capable de prendre la meilleure des décisions sur la base des vérités qu'on m'a apportées. Dieu aime ses sujets, et ses sujets aiment Dieu. C'est un cycle de confiance. Or, je ne peux pas avoir confiance en toi. »

Encore et toujours cette histoire de confiance.
- « Je suis membre d'une organisation politique. La confiance, je sais que c'est un rêve, quelque chose qui n'existe pas. Pourtant, le monde tourne toujours. C'est peut-être ça, d'ailleurs, le grand mystère de la vie : continuer à vivre en communauté alors qu'on ne sait pas ce que l'autre est ou n'est pas. »
- « Mais il faut savoir ce que l'on est. Qui es-tu, Shaïness ? »
- « … qui je suis... c'est une question piège. En ce moment, je suis très frustrée, par exemple. »
- « Je sais. Je suis frustrant. Une de mes grandes qualités. » Il eut un sourire doux, et pourtant, il était torve, ce sourire. Quand il se pencha pour poser deux doigts sur ma joue, je frissonnai. Du coup, je tentai de repousser sa main, mais il était étonnamment fort. Impossible de déloger sa poigne. « Qu'est-ce que Phil t'a dit ? » Sa voix... comment dire ? Elle était comme hypnotique. Nous étions encore une fois les yeux dans les yeux, séparés peut-être de dix centimètres. Le reste du monde s'effaça, et il n'y avait que Dieu et les yeux de Dieu, et la voix de Dieu. Et je ne me sentis plus la force de... pas mentir, mais faire des demi-vérités. J'étais fatiguée, et finalement, si c'était comme ça qu'il voulait procéder ? En temps ordinaires, je n'aurais pas avoué la défaite aussi facilement. Mais de la même manière que Rafaelo avait utilisé son haki pour me faire revenir à moi-même, Dieu utilisait le sien pour calmer le mien. Quand j'avais dit qu'il était animalistique, je voulais dire ça. Cette sensation qu'il domptait toute la férocité, le feu, la passion en moi, parce qu'il était bien plus féroce, fougueux et passionné que moi.
- « Il a dit... » répondis-je en un souffle, comme étrangère à moi-même « … il a dit que jamais je n'arriverais à vous faire conclure une alliance avec les Shandias, alors que j'avais plus de chance de vous faire aller à Héailleutou. »
- « Pourquoi veut-il que je vienne le voir ? »
- « Pas vous. Le GUANO. Tout entier. Pour vous sauver de Maselfush et aussi pour potentiellement protéger Héailleutou. »
- « Et tu penses que c'est une bonne idée ? »
- « Ce n'est pas la plus mauvaise. »
- « Mais tu préférais que je fasse alliance avec les Shandias. »
- « Oui. »
- « Pourquoi ? »
- « Parce que ça serait mieux pour tout le monde. Parce que je ne veux pas que les Anges et les Shandias deviennent des esclaves ou après, tombent sous la coupe du Gouvernement. »
- « Aa-ha ! Tu vois, ce n'est pas si difficile que ça ! »

Il me relâcha alors qu'il reculait dans son siège, plongé en pleine réflexion. Moi, par contre, j'étais tout sauf en mode réflexion.
- « Que... qu'est-ce que vous m'avez fait !!! » hurlai-je en me mettant debout sur mes pieds sur vite que ma chaise partit en arrière. Aidée par mes réflexes rokushiki, je fus sur Dieu, l'empoignant par le devant de sa chemise avant même qu'Andy eût compris que le bruit, c'était ma chaise sur le sol. Jamais, je ne dis bien jamais, je n'aurais dit aussi facilement ce genre de choses. Déjà que j'avais mis quelques posts à me les avouer, à prendre conscience de ce que je voulais...
Dieu leva une main pour calmer Andy mais ne fit aucun mouvement pour se libérer. Bien au contraire, il semblait s'amuser de cette empoignade.
- « Shaïness, je n'ai fait que te permettre de dire la vérité. N'est-ce pas.... libérateur, ce sentiment de pouvoir tout dire, sans être jugée, en bien comme en mal ? » il me caressa à nouveau la joue.
- « JE VOUS INTERDIS DE ME TOUCHER !! »

Et là, il se leva, me souleva comme si je ne pesais rien, et me projeta au sol. Je me reçus en un roulé-boulé, déjà prête à en découdre, mais les anges du GUANO m'encerclaient, armes dégainées, et ce n'était pas un combat que je pouvais gagner.
- « TU N'AS RIEN A DIRE DANS LE ROYAUME DE DIEU ! » tonna-t-il, avec colère et autorité. « QUAND TU ES CHEZ DIEU, TU AGIS COMME UN ENFANT DE DIEU ! ET CHEZ MOI, ON NE DIT QUE LA VERITE ! MEME SI ELLE FAIT MAL. JE SUIS LA POUR LIBERER LE PEUPLE DES MENSONGES ET LE GUIDER VERS LA LUMIERE ! »
- « AH OUAIS ? TU PARLES ! JUSQU'A PRESENT, TU L'AS GUIDE DANS LA GUERRE, ESPECE DE MEGALO MANIPULATEUR ! ET PAR ORGUEIL, TU VAS FAIRE MOURIR TOUT TON PEUPLE ! »
- « ET EN QUOI CELA TE CONCERNE, CE QUE JE FAIS DE MON PEUPLE ? »
- « ET POURQUOI JE NE ME SENTIRAIS PAS CONCERNÉE PAS DE TON PEUPLE, HEIN ? CE SONT DES ETRES VIVANTS, DES ETRES LIBRES, QUI ONT LE DROIT DE LE RESTER, LIBRE COMME EN VIE ! ET SI TU NE COMPRENDS PAS ÇA, C'EST QUE TU ES... UN MONSTRE !!! COMME TOUS LES AUTRES !!! »

Nous étions trop occupés à nous crier dessus pour remarquer l'air stupéfait des anges. Nous étions à bout de souffle, l'un comme l'autre, et de nouveau presque nez contre nez, sans savoir qui avait avancé vers qui. En fait, c'était moi, et moi seule, qui étais à bout. Sinon, j'aurais compris que ce n'était pas normal, que Dieu ne le fût pas. A bout. Et que les anges n'étaient pas stupéfaits. Ils veillaient juste sur la situation, qu'ils maîtrisaient parfaitement.
- « … tu as donc des sentiments ? » Dieu murmura avec un petit air étonné qui m'acheva. L'envie de le gifler s'empara de moi ; avant que mon bras eusse bougé, il avait agi et serrait mon poignet d'une étreinte de fer. Je luttai pour me débarrasser de lui, mais d'une manière pathétique, mue par un désespoir étrange, en ayant oublié toutes mes leçons de combat, mes techniques de rokushiki... Plus je me débattais, plus je sentais les choses échapper à mon contrôle, et je fus bientôt haletante, sans me rendre compte que je pleurais. Ces fameuses larmes, de peur, de frustration, de haine et d'amitié, tout ce que j'avais refoulé pour me concentrer sur la mission et en général, me permettre d'avancer, dans la vie, en tant que CP et révo.
- « Pourquoi... pourquoi... me traites-tu comme ça ? A penser... que je n'ai pas de sentiment ? »
- « Oh, ça fait mal, hein ? » Au bout du compte, je finis dans ses bras en train de sangloter comme une gamine. « Mais ce qui fait le plus mal, c'est tous ces sentiments. Qu'on a empêché d'avoir. Ou qu'on t'a fait avoir. Tu ne voulais rien d'autre que vivre tranquillement, hein ? » Je gémis, la tête enfoncée dans son torse. « Et eux, ils ont été méchants avec toi. Je sais. Je le vois. Ils t'ont forcée à faire des choses que tu n'aurais jamais voulu faire. Et tu souffres. »
- «O-oui . » articulai-je entre deux reniflements.
- « Je peux t'aider, Shaïness. De la même manière que tu veux nous aider. C'est très gentil, de ta part, de vouloir nous aider. Si tu veux, je peux t'aider. »
- « Vraiment ? »
- « Bien entendu. Je suis un gentil Dieu. Je prends soin de mes enfants. Et tu as prouvé que tu étais digne d'être une des nôtres. »
Je hochais la tête, complètement vidée. Sans force, sans pensée, je me contentais de me laisser bercer par sa voix, par la chaleur de ses mains. Et soudain, il n'y eut plus rien.


Dernière édition par Shaïness Raven-Cooper le Lun 9 Fév 2015 - 18:39, édité 1 fois
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Je ne sais pas si je m'étais évanouie. Principalement parce que je ne rappelle pas d'avoir éprouver cette sensation de réveil. Ce fut plus comme si le monde venait d'arriver, tout autour de moi, exactement comme une pièce s'impose à vous quand vous allumez une lumière. L'instant d'avant, il n'y avait rien, que le noir, et pof, d'un coup, il y avait un monde dans lequel on vivait, fait de chaises, de tables, de murs et des gens, et c'était évident que nous savions ce que c'était, même si, avant la lumière, nous ignorions tout des chaises, des murs et des gens.
Je sentais le vent dans mes cheveux et l'odeur de remugle humide de la jungle. Le soleil tapait sur ma peau, et séchait l'eau de mes larmes, jusqu'à ce qu'il ne restât que le sel que ma langue vint chercher. Je savais tout cela, et cela était bien. J'étais dans ce monde, et ce monde était. Je sentais et ressentais, mais mes sensations restaient limitées au domaine du physique, sans se transformer en émotion. Je n'éprouvais ni joie, ni peine, ni soulagement, et en fait, je m'étonnais de trouver des larmes sur mes joues. Pourquoi pleurais-je ?

La chose était que je savais ce qu'étaient des larmes. Mais je ne comprenais pas pourquoi j'en avais eu. Et là, je compris. Le truc, voyez-vous, ce n'est pas parce que vous n'aviez plus quelque chose, que vous oubliez ce quelque chose. On dit toujours qu'on ne mesure l'important d'une chose que lorsqu'on la perd. Je vous le dis : c'est vrai.
Se réveiller sans sentiment, ce n'est pas oublier les sentiments. Je me rappelais ce qu'était la colère, et le rire, et la peur. Je savais que si je me coupais le doigt, il y aurait du sang, et de la douleur. Mais je savais aussi que maintenant, je ne ressentirai que la gêne occasionnée par cette blessure et la douleur qui irait avec, mais rien d'autre. J'avais un corps, mais plus de cœur.
C'était... perturbant. Pour le moins. Pendant un moment, je restai là, bêtement, à regarder la perle de sang à mon doigt, avant de céder à l'instinct de suçoter mon index. Le goût métallique envahit mon palais, mais il n'y avait aucun dégoût. Juste l'analyse clinique que oui, le sang, ça avait le goût du métal.
Petit à petit, la réalisation de ce qui m'arrivait germa et fleurit. Fatalement, je savais que j'aurais dû paniquer. Ce n'était rien. Mais la panique ne venait pas. Ma respiration ne s’accéléra pas, mes pupilles ne se rétractèrent pas, mes pensées ne se figèrent pas. Pourtant, une partie de moi était forcément en train de hurler en tapant à s'en éclater les phalanges dans la cage de verre insonorisée dans laquelle elle avait été enfermée.
Malgré moi, je gémis, et je me tournai, perdue, vers Dieu. La logique, puisqu'il ne me restait plus ça, voulait qu'il fut la cause de tout cela. Mais puisque je n'étais pas en colère, pas plus que perdue, en fait, je ne pouvais pas exprimer quoi que ce fut.
- « Ça ne va pas. » lui dis-je. - « Je.... » je fronçais les sourcils, ne sachant pas exprimer quelque chose que je ne ressentais plus.
- « Ah, l'absence de sentiments... ça fait aussi mal que les mauvais sentiments. Tu te sens vide, n'est-ce pas ? Sans pouvoir même le dire ? Ah, c'est terrible. » J’acquiesçais. « Dans ce cas, je vais remplir ce vide que tu sens au fond de toi. Je vais le remplir avec le plus beau de sentiment que je connaisse. L'amour. Tu sais ce que c'est que l'amour, Shaïness ? » Mon premier réflexe fut de dire oui, mais alors que je montais le menton pour agiter la tête de haut en bas, j'eus une moue. Non, là, maintenant, l'amour, je ne savais pas ce que c'était.

Dieu me regarda encore une fois, les yeux emplis de quelque chose qui devait être une émotion, mais je ne savais pas laquelle, et quelque part, je m'en fichais. Le contact de ses lèvres sur mon front provoqua un petit frisson, purement physique. Cependant, une chaleur douce m'envahit. Quelque chose d'autre faisait battre mon cœur. C'était mieux ainsi. J'éprouvais de nouveau, et c'était grâce à Dieu. Il était chouette, ce type. Et franchement, il n'était pas dégueu à regarder. Je l'aimais bien. Il avait vraiment tenu parole, c'était mieux maintenant. J'étais en paix, sans rien d'autre dans mon âme que la certitude que dans le monde, il y avait au moins une personne qui tenait vraiment à moi. Dieu. Dieu qui m'avait acceptée, avec mon obstination, mon mauvais caractère, mes peurs, et qui m'avait rendue meilleure.

- « Bien, où en étions-nous ? » Il retourna s'assoir dans son trône, et il me regarda, avec ce sourire doux de nouveau aux lèvres. Docilement, je répondais à son geste m'invitant à me rapprocher de lui, et je trottinai jusqu'à lui. « Tu voulais que je fasse la paix avec Shandias, n'est-ce pas ? »
Quand je disais que c'était un chouette gars. Finalement, il m'avait entendu ! Il était même prêt à m'écouter.
- « Oui. Au moins le temps d'une trêve. Contre Maselfush. Une sorte d'Alliance, de gouvernement unifié, pour vous protéger les uns les autres. Je ne veux pas que les Shandias s'allient avec lui, contre le GUANO. Et les Anges. » Hum, l'espace d'un instant, je ressentis comme une piqûre : cette sensation d'oublier quelque chose. « Alors, pour les empêcher de faire ça, il faut que tu fasses un pacte avec eux. »
- « Oh. Je vois... Hé bien, puisque tu tiens tellement à ce pacte... Le problème, c'est que je ne peux décemment pas y aller. Un changement de position de ma part aussi soudain ne serait pas crédible. »

N'éprouver qu'un seul sentiment, un amour inconsidéré envers Dieu, n'empêchait pas de réfléchir. Il m'empêchait juste de réfléchir correctement.
- « Je suis d'accord. Je n'avais pas pensé à ça... OH, JE SAIS ! Moi, moi ! Je vais y aller ! A ta place ! Je suis neutre dans cette histoire, je ne veux que le bien-être de tout le monde. Ils vont m'écouter, moi ! »
- « Ah, tu es sûre ? Je veux dire, c'est dangereux, aller chez les Shandias comme ça. »
- « Bah, je ne suis pas faible ! Je sais me battre. Et puis d'abord, je ne devrais pas avoir à me battre. On s'est battus, toi et moi ? » Re sourire. Il avait un beau sourire, Dieu. Des dents blanches, comme des perles. … Dans la Mer Blanche, il y a des huîtres ? Des perles d'eau céleste ça ressemble à quoi, en fait ?
- « En effet. Bon, puisque tu insistes autant. Lullaby, prépare un guide pour Shaïness, qu'il l’emmène à proximité des ruines de Shanda. Bonne chance, mon amie. »
- « Oui, Dieu. Merci. »

[HRP : la faiblesse de Shaïness devant Dieu/Alincourt s'explique par une technique du fruit de la passion, que je développe autrement que dans le manga/Boa. Dieu utilise les techniques suivantes :

- apaisement/exacerbation des sentiments (avec Haki) : la cible est très émotive, de plus en plus/moins en moins émotive, et finit par oublier de penser&agir rationnellement.
- cœur de pierre, cœur d’artichaut : la cible se voit, selon la volonté de Dieu et jusqu'à ce qu'il en décide autrement, dépourvue de sentiments (cœur de pierre) ou pourvue d'une empathie extrême (cœur d'artichaut - ça rejoint la 1ere technique mais de façon permanente).
- Love me tender : La cible éprouve un sentiment amoureux pour l'utilisateur, ou ce qui s'en rapproche le plus, comme avec Boa.
]
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- « On aurait dû la renvoyer d'où elle venait. »
- « Et se priver d'un tel pion ? Andy, c'était complètement idiot de ne pas profiter de cette occasion. »
- « A mon avis, c'est bien plus dangereux de l'utiliser comme ça. On ne sait pas qui elle est, ce dont elle est capable. »
- « Tu n'as pas confiance en mes pouvoirs. »
- « Je n'aime pas le fait que tu aies dû y avoir recours. Je sais très bien que tu n'es pas spécialement fan de tes pouvoirs. »
- « En effet. Pour quelqu'un comme moi qui prône la vérité, avoir des pouvoirs qui imposent des mensonges aux autres... »
Andy posa une main réconfortante sur l'épaule de son ami. Dieu était peut-être Dieu, mais c'était avant tout un ami. Il n'y avait que lui qui voyait de temps à autre le masque de Dieu se fissurer en laissant apparaître l'ange Alincourt. Celui qui s'était sacrifié, en devenant ce qu'il détestait le plus, pour protéger son peuple. Andy savait que c'était une des raisons pour laquelle il était Simplement Dieu, et plus Alincourt. Quelque part, être Alincourt n'était pas compatible avec le fruit du démon de la passion. Si Alincourt devait vivre avec ces pouvoirs, alors, il ne vivrait pas longtemps.

- « Il y a trop de zones floues. Déjà, elle est envoyée par Phil. »
- « Pff, ce crétin ? Il pensait vraiment que je tomberai dans son piège ? Je suis sûr qu'il lui aura fait croire que nous étions alliés, amis. Si Shaïness avait seulement su qu'il veut ma place par-dessus tout...Cependant... Andy, enquête sur ce Maselfush. Il se passe quelque chose de plus que l'arrivée du Gouvernement Mondial. »
- « Bon, ça, on savait que ça arriverait un jour ou l'autre. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi l'avoir envoyée chez les Shandias. Elle n'a aucune chance de réussir quoi que ce soit. »
- « Ah, qui sait ? Un peu de chance. Elle n'est pas sans ressource, cette petite. Elle aurait fait une bonne GUANO. »
- « Ah, tu vois ! Tu la considère déjà comme morte et enterrée. »
- « Mais non, mais non. Tiens, laisse le « réseau » entendre où elle est partie. Au pire des cas, ce sont des copains Marines qui viendront la chercher.. »
- « Alors quoi ? »
- « Bah, après ce que je lui ai fait, elle ne me fera pas confiance. Et je ne la blâmerai pas pour ça. »
- « … mais avec ton pouvoir, elle va revenir vers toi, automatiquement ? »
- « Oui, mais je n'ai pas besoin d'une marionnette sans âme. Je n'ai que faire d'un faux amour. Elle aurait fait une bonne GUANO, mais j'ai dû la sacrifier. C'est un choix que j'ai pris, parce que nous savons très bien qu'elle ne deviendra jamais l'une des nôtres. Elle fait partie du Gouvernement Mondial. Alors elle, oui, je peux l'utiliser. Ce n'est pas comme vous. Je n'utiliserai pas mes pouvoirs sur vous, même si cela nous coûte la victoire, car je pourrais faire en sorte que vous mourriez au combat pour mes beaux yeux. Je vous préfère en vie, même si ce n'est pas victorieux. Je n'ai pas besoin de kamikazes, mais de soldats. Les bombes, je les préfère sexuelles, et les attentats, à la pudeur. MWHAAAAAhéhé. »
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