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Messieurs, je réquisitionne ce bâtiment



[Précédemment : Forger l'avenir]

-



- Eurêka !

Deux mois…

- Merde, où qu’il a foutu les balles ?

Deux mois depuis le massacre de la caserne de Lavallière.

- P’pa ?

Alrahyr a trouvé refuge dans sa famille immédiatement après, se cachant dans la forge.

- Eh, papa !!

De longues discussions avec son père, Karl Kaltershaft, ainsi qu’une longue série de cauchemars et d’insomnies l’ont poussé à se retrancher au plus profond de lui-même, se rendant compte de sa culpabilité dans la mort de centaines de soldats, ne faisant que leur devoir.

- Bordel, il est où…

Il y a deux mois, le jeune homme est arrivé dans sa demeure familiale accompagné de son équipe de choc, les Boréalins, regroupés à l’époque pour détruire la caserne. La plupart sont retournés à Luvneel continuer leurs activités de révolutionnaires. La plupart, mais pas Adam Lame. « Trap » est toujours là, profitant de ce repos bien agréable. Un endroit calme, où l’aide qu’il fournit à son coéquipier à la forge lui assure une petite paye de la part des Kaltershaft.

- Adam, t’aurais pas vu mon père ?

Rapidement, Alrahyr s’est rendu compte de l’état déplorable de Boréa. Depuis le Teiko il y a bientôt un an, l’île n’a cessé de subir divers mouvements, avec à chaque fois des épisodes de destruction de grande ampleur. Durant toute cette période, lui et Edwin Morneplume semblaient concourir pour la place de celui qui ferait le plus de dégâts au camp adverse. Et alors que l’officier débusquait les révolutionnaires, le jeune Kaltershaft faisait s’effondrer les bases fortes de la Marine.

- T’as besoin de quoi ?

Il y a deux mois, l’île semblait dénuée d’ordre et d’organisation. Les réseaux révolutionnaires étaient extrêmement faibles et la Marine n’avait plus de soldat en état de défendre la population. Le Colonel était mort, ses officiers également. Et leurs bataillons.

- Les balles, je sais pas où il les a foutues…

Et ce n’étaient pas les soldats personnels du roi de Boréa qui pourraient remplir cette tâche. Inutiles, depuis le début. L’intérim, ils ne l’ont assuré que quelques jours, jours pendant lesquels le chaos avait peu à peu tenté de contrôler Boréa. Puis le Gouvernement a envoyé des troupes fraîches pour reprendre pied sur cette immense parcelle enneigée. Une affectation désormais perçue comme une sorte de « Légion Etrangère » par la Marine. D’une part à cause des événements récurrents, qui font que la durée de vie moyenne d’un soldat à Boréa est la plus basse de toutes les Blues, mais également à cause du rude climat.

- Ah ça y est ? Tu vas pouvoir faire les tests ? … Tiens elles sont là-bas, regarde.

Une fois l’ordre partiellement rétabli, la population s’est lancée corps et âme dans la reconstruction de tout leur patrimoine. Chaque artisan offrait ses services. Lavallière étant à moitié en ruine, il fallait bien ça. Au moins.

- Ah merci. Ouaip, on va voir ce que cette bête a dans le ventre !

Et, chose au final peu surprenante, mais pas moins étonnante au début, Alrahyr a activement participé à cet effort. En tant que forgeron, ses talents ont permis à la famille Kaltershaft d’être le fournisseur principal en pièces métalliques nécessaires pour la reconstruction. Bien entendu, personne ne savait que Karl hébergeait son fils. Mais personne n’avait besoin de savoir.

- Al’ ! Adam !

Désormais, la reconstruction est quasiment terminée. La demande en pièces forgées se fait rare, ce qui laisse du temps au jeune homme pour faire ses propres expérimentations, éprouvant chaque jour un peu plus ses compétences d’artisan.

- Ah p’pa ! Tu tombes bien, je viens de terminer, on va pouvoir passer aux essais.

Et Adam, quant à lui, semble s’être découvert une passion pour cet art, et n’hésite pas à assister son nouvel ami dans ses travaux.

- Nan les gars, faudra faire ça plus tard, on passe à table là !
- Sérieux, ça peut pas attendre dix minutes ?
- Nan, allez, bougez-vous tous les deux, j’ai pas envie d’avoir ta mère sur le dos…

Sentiment ô combien désagréable de continuer à se faire traiter comme un enfant par ses parents, alors qu’on a pu vivre autant de choses… Mais bon, les Kaltershaft sont comme ça, et ça ne changera jamais.

Et puis, après tout… Qu’est-ce qu’on est bien chez soi, pas vrai ?



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- Al’, t’as entendu parler du nouvel arrivant à Lavallière ?

Pas moyen de manger sa viande tranquillement sans entendre parler de la Marine. Car c’est bien de cela dont il s’agit, Alrahyr en est persuadé. Mais cette fois ça n’est pas son père qui entame ce type de discussion, mais sa mère. Lui est trop occupé à dévorer son plat. Il faut dire qu’elle cuisine bien, la môman.

- Qui donc ?
- Un Commandant, avec sa division et son croiseur. D’après les guetteurs qui sont toujours sur place, il aurait été dépêché sur place pour s’occuper de ta traque.

Le jeune homme manque de s’étouffer avec son vin.

- Hey ? Sérieux ? Mais bordeeeel !
- Eh, tu t’attendais à quoi avec tout ce que t’as foutu comme souk ?
- Oh papa s’il te plaît tu vas pas t’y mettre, on en a déjà parlé… Raaa mais y font chier…
- Il serait temps de prendre la route, Alra…
- Mais tu sais bien qu’on en a déjà discuté de ça aussi, je vais pas partir de Boréa, c’est chez moi !
- Tu devrais écouter ta mère, fils… Je crois qu’elle a une idée derrière la tête.

Et ça se voit dans ses yeux. Simplement, Alrahyr ne veut pas le voir, parce qu’il est Boréalin, qu’il aime son île et qu’il ne tient vraiment pas à la quitter. Et sa famille ! Et cette forge, aussi grande que magnifique, disposant de tout ce dont il a besoin ! Mais quand elle a une idée, elle trouve toujours un moyen de l’exprimer. Alors autant l’y inviter…

- Bon… dis toujours…
- Avec tes derniers « exploits »…

Et elle accentue bien ce mot, pour en souligner le mauvais sens.

- M’man !
- Teuh teuh ! Écoute-moi, laisse-moi parler. Avec tes derniers exploits, donc, ça ne m’étonnerais pas que tu sois l’un des criminels les plus recherchés des mers bleues…
- Criminel ! Oh comment t’y vas !
- Et tu croyais quoi ? Tu tues des centaines et des centaines de soldats et détruit tout sur ton passage, on appelle ça comment à ton avis ?
- Mais les criminels, ce sont les pirates !
- Et tu crois que tu es quoi pour le moment ? Un révolutionnaire ? Tout ça parce que tu es passé par Luvneel ? Que tu arbores cette main noire ? C’est ridicule ! Tu es ce que tu fais, point. Et pour le moment, tout ce que tu as fait, c’est te venger, tuer, détruire. Elle est belle, la révolution !

Sa mère s’est levée de table, les deux bras tendus, mains posée. L’une en plein milieu d’une assiette de viande, l’autre empoignant fermement une serviette. Karl, le père d’Alrahyr, lance un regard désespéré vers la viande partant en bouillie sous la poigne de sa femme, qui n’a que faire du désordre qu’elle met.

De son côté, Adam Lame ne bronche pas. Il écoute, impassible.

- Tu veux faire avancer la révolution ? Avec ce que tu es capable de faire maintenant, faut pas rester ici Alra. Le Gouvernement va remuer ciel et terre pour te mettre la main dessus et t’enfermer à jamais, tu peux me croire. Tu veux faire avancer la révolution ?
- Mais évidemment ! Pourquoi j’aurais rejoint la cause, sinon ?
- Parfois je me demande bien pourquoi tu l’as rejoint…
- Bon, c’était quoi ton idée, au départ, avant que tu partes n’importe comment ?
- Ne me parle pas sur ce ton ! Je suis ta mère !
- Maman, s’il te plaît… On va tous se détendre, dis-moi ce à quoi tu pensais…
-
- Alors ?
- Grand Line.
- Euh… Derrière le truc pointu là ?
- Oui, Grand Line, la route de tous les périls, derrière Reverse Mountain, ce truc pointu dont tu parles !
- Et pourquoi tu me parles de Grand Line ?
- Oh Alra s’il te plaît fais pas l’imbécile, t’es intelligent, tu comprends non ?
- T’es pas en train de me dire d’aller sur Grand Line là, je rêve ?
- Bein si.
- Maman, tu sais ce que c’est Grand Line ?
- Un peu que je sais, tu crois que j’ai passé toute ma vie à Boréa ?

Le jeune homme réalise tout d’un coup. Non, évidemment que non. Ces histoires que ses parents connaissent, ces récits incroyables qu’il aimait tellement qu’ils lui racontent étant enfant… Tout cela ne peut pas venir des mers bleues.

- Vous… êtes déjà allés sur Grand Line ?
- C’est pas le débat. En attendant, mon conseil, c’est de t’y rendre au plus vite.
- Mais pour faire quoi ?
- Tu sais que la navigation y est difficile, que rien ne marche comme ici, pas vrai ?
- Papa m’en a parlé, oui…
- La Marine ne pourra pas te retrouver aussi facilement qu’ici. Et là-bas, tu auras d’innombrables occasions de faire avancer tes idées révolutionnaires, autrement qu’en saccageant tout.
- Je vois l’idée mais… Vu ma connaissance de la mer là-bas, si la Marine ne me trouve pas, c’est pas que je suis caché mais plutôt que je me suis perdu et que j’ai coulé…
- Arrête tes sottises… Je crois que ton ami ici présent a quelques compétences qu’il n’ose pas dévoiler…

A peine surpris, Adam Lame esquisse un sourire vers la femme, acquiesçant.

- Et…
- Je te coupe tout de suite, bien sûr que vous ne serez pas que deux, il y a tout un tas de révolutionnaires sur Boréa qui n’attendent que de partir de cet enfer. Et la plupart d’idolâtrent plus qu’à moitié. Je ne sais pas s’ils sont fous ou inconscients, mais…
- Maman !
- Je te charrie hihi ! Bon… Tu en penses quoi ?
- Bein… Le navigateur, l’équipage… Et le navire ? Ah… Je parie que tu penses au croiseur du Commandant ?
- Alra, j’ai vraiment cru que tu n’avais pas compris… Tu m’as fait peur…
- J’suis au ralenti en ce moment…
- Je le vois bien, t’as besoin de prendre le large.
- Bon, et je fais comment ?
- Le navire, tu te débrouille, je suis peut-être ta mère, mais faut pas exagérer. Et l’équipage, je me charge de ça. On se retrouve demain matin à la sortie Est de Bocande, là où tu sais. Ce sera à l’abri des espions de la Marine, fais-moi confiance. Allez préparer vos affaires, laissez le travail de forge en plan. Vous allez avoir une très longue route.

Le jeune homme se lève de table et se dirige vers l’extérieur de la salle à manger.

- Alra, t’oublie pas quelque chose ? La table, elle va pas se débarrasser toute seule !

Finalement, quitter Boréa va peut-être lui faire beaucoup plus de bien que prévu…


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- Tu sais Alra, en deux mois, j’ai chaque jour été de plus en plus surpris de voir ta façon d’être en présence de tes parents…

Adam n’a pas tort. Ce sont des relations qui n’ont jamais évolué, le jeune Kaltershaft est toujours l’enfant d’une dizaine d’années que ses parents réprimandent à longueur de journée, comportement totalement différent dans d’autres circonstances. Et cela, il ne se l’explique pas. Une envie de se faire chouchouter ? Qu’on s’occupe de lui ? De ne pas avoir à gérer tout par lui-même ? Certainement.

Quoi qu’il en soit, Alrahyr le sait, il peut compter sur ses parents pour l’aider. Leur couverture n’a jamais été en danger, ils ont toujours été, officiellement, d’honnêtes artisans de Boréa. Au moins, quelque chose que la révolution a réussi à maintenir intact sur l’île… Fait étonnant, mais pas moins véridique.

- Ma mère n’a pas tort, on fait bien de s’en aller…

Il aura fallu une nuit presque complète pour que les deux amis préparent toutes leurs affaires. Et, après de nombreuses hésitations, Alrahyr a abandonné là son sugegasa, le troquant contre une capuche rabattue sur son visage. Il est temps de changer. Le jeune homme porte maintenant l’habit typique Boréalin, fait de cuirs résistants et de fourrures agréables, aux larges bottes et au manteau ample, protégeant aussi bien des vents glacés d’hiver que du soleil chaud d’été.

L’art de se vêtir de l’île, une vraie merveille culturelle.

Changer, mais pas complètement : Alrahyr est toujours équipé d’un bouclier en acier Kaltershaft, cependant moins voyant car n’arborant plus la main noire, symbole n’ayant pas encore le sens escompté pour le révolutionnaire en devenir. Un bouclier tout ce qu’il y a de plus classique, donc, se fondant aisément dans la masse du personnage lorsque porté sur le dos. Après tout, Alrahyr Kaltershaft est loin d’être la seule personne au monde à porter ce type d’armes.

La période des doubles boucliers est elle aussi révolue, car ces deux mois auront également servi à l’entraînement à la rapière, arme légère et maniable, permettant au bras porteur du bouclier de continuer à exceller dans cette expertise atypique.

Bref.

Les voilà donc à l’Est de Bocande, à l’orée d’un bois blanchis par la neige matinale qui règne presque toute l’année sur l’île. Un petit groupe sort de l’enceinte de la ville et avance droit dans leur direction. Des hommes armés, mais pas des soldats. Et, avec eux, la mère d’Alrahyr.

- Vous en avez mis du temps, tout le monde est là ?

Le jeune homme salue un à un les révolutionnaires, qui affichent tous une expression de contentement. Une vingtaine, tout au plus, et tous ont l’air motivés et déterminés. Une bonne chose.

- Alra, la Marine est entrée dans Bocande à l’aube, ils fouillent tout, j’ai eu du mal à arriver jusqu’ici. Le Commandant est à leur tête, ils sont venus directement à la maison…
- Comment vous avez fait ? Tout va bien ?

Sa mère a une expression terrifiée.

- J’ai pu partir avant, mais ils ont pris ton père. Je pense qu’ils ont découvert notre couverture…

Mais Adam l’interrompt.

- C’est la Justice Absolue, ça, Madame. Ils ont enfin envoyé quelqu’un qui la mette en application. Jusqu’ici vous avez été protégés par l’aide que vous apportiez à Lavallière. Mais maintenant que c’est terminé, ils vont s’en prendre à vous, se servir de vous pour attraper votre fils.

Le jeune homme, horrifié, jette un regard vers Bocande et fait mine de s’y précipiter.

- Arrête ! Alra, arrête ça !
- Ils ont pris papa !
- Il ira bien, tu le connais !
- Ils ont papa !
- Alra, écoute-moi…

Elle prend le visage de son fils dans ses mains.

- Tu dois avancer, comme on en a parlé hier. Ces hommes sont là pour ça, pour toi, et toi tu dois continuer, pour eux. Ne les abandonne pas, ils ne t’abandonneront pas.

Figé. Tout simplement. Le regard perdu vers la ville, Alrahyr hésite des longues secondes, sous le regard lourd du groupe. Puis il se décide enfin.

- Très bien. Allons-y.

Il plonge son regard dans celui de sa mère.

- Tous ensembles. Ils ne t’auront pas toi aussi.




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Boréa. Lieu très animé ces derniers temps.

Ce qu’Alrahyr et sa mère ne savent pas, c’est que Karl Kaltershaft n’a pas été arrêté en tant qu’otage pour attirer son fils dans la gueule du loup… Et s’ils ignorent cela, c’est bien entendu parce que l’appartenance de Karl au Gouvernement Mondial leur est inconnue.

N’oublions pas une chose : Karl Kaltershaft, alias Agent Coldway, membre du CP6, avait une mission d’envergure. Infiltrer la révolution et communiquer l’ensemble des informations récoltées au Gouvernement. Chose qu’il a réalisé avec brio, jusqu’à… jusqu’à son fils. Quels que furent les événements, il n’est jamais parvenu à se faire à l’idée qu’il puisse donner les informations nécessaires à l’arrestation – voire la mort – d’Alrahyr. Il reste son père…

Et ça, même s’ils ont mis du temps à l’admettre, ses supérieurs l’ont compris. Leur plus fidèle et efficace agent infiltré de la ville de Bocande, hôte de la révolution, carrefour relationnel des manigances clandestines, n’était pas aussi infaillible que cela. Karl a une âme familiale, et ça, ils n’aiment pas.

Ainsi l’agent Coldway se croyait assuré, à sa position très favorable. Et, préférant ne surtout pas divulguer son infiltration à qui que ce soit, même à un Commandant de la Marine, il semble qu’il se soit laissé prendre tel qu’il imaginait qu’on s’y attende. Et, de son côté, l’officier ne semble pas avoir clairement explicité la raison de l’arrestation du forgeron. C’est donc dans ce jeu de « non-dits » que se sont lancés les deux camps, chacun ignorant des parties de l’histoire générale.

Sauf que ce jeu conduit Karl directement en prison, à un endroit plus profondément enfoui que ce à quoi il va s’attendre… Sans son fils pour voler à son secours…

Boréa. Lieu très animé ces derniers temps.

La petite troupe, constituée d’une vingtaine de révolutionnaire, d’Adam Lame, de Yunna Kaltershaft et de son fils, arrive rapidement aux abords de Lavallière, par la côte, via la plage. A cet endroit, de faibles fortifications habituellement gardées par la Marine rendent l’accès à la zone militarisée difficile. Mais les sous effectifs actuels rendent une telle protection difficile…

Quoi qu’il en soit, ça n’est pas par-là que le groupe compte passer. Par souci de sécurité, le croiseur du Commandant mouille dans la baie, et n’est pas amarré au port. Les troupes sont descendues en chaloupe, et une unité de veilleurs est restée à bord, comme en témoignent les lumières matinales visibles sur le bâtiment de guerre.

- Trap, t’as une idée qui nous éviterait de les prendre de front ?

Ce surnom colle parfaitement à la peau d’Adam. Un tacticien stratège doté d’une inventivité fascinante en matière de solutions à tous les problèmes. Et surtout quand il s’agit de piéger ses adversaires.

- J’ai bien une esquisse de plan en tête, mais ça va pas te plaire…

* * *

Pleine nuit.

Toute la journée, prenant garde à ne pas être vus, le groupe a attendu dans la crique la plus proche. S’embarquer clandestinement sur un croiseur de la Marine, ça n’est pas une chose faisable à la lueur du jour. Adam a exposé son plan, et non, ça n’a pas plu au jeune Kaltershaft. Mais n’ayant rien d’autre à proposer, il n’a pu qu’accepter.

C’est ainsi qu’au beau milieu de la nuit, profitant d’un ciel chargé des nuages Boréalins masquant totalement la lune, l’opération débute. Alrahyr est placé par ses compagnons dans une embarcation de fortune, lestée pour flotter juste sous le niveau de l’eau en comptant le lourds poids du jeune homme. On lui fixe une paille dans la bouche, s’assurant que la perte de conscience due à l’immersion ne lui fasse pas lâcher ce cordon qui le relie à la vie.

Puis le reste de la troupe s’équipage également de ces pailles, confectionnées avec les matériaux trouvés toute la journée çà-et-là parmi les innombrables débris qui jonchent la côte.

Le littoral Boréalin, une vraie poubelle suite à tous ces événements…

Bon, certes ces pailles de fortune ne sont pas étanches… Certes on peut avaler un peu – beaucoup – d’eau de mer en respirant avec… Mais quand il faut y aller…

Alors Alrahyr est plongé sous l’eau et perd rapidement conscience, respirant par l’automatisme naturel de son corps au frêle tube confectionné pour lui. Eh oui, quand on a des pouvoirs comme les siens, quand on mène l’assaut pour prendre un bateau en passant par la mer, on est tout bonnement ridicule. Le groupe complet s’immerge, et les petites pailles dépassent de quelques centimètres de la surface de l’eau. Heureusement que la nuit noire les dissimule plus que nécessaire.

Et ils nagent, lentement mais sûrement, vers le croiseur, prenant garde à ne pas faire de vagues, poussant doucement l’embarcation du jeune homme flottant entre deux eaux.

Quel assisté…

Aucun bruit ne parvient aux guetteurs du bâtiment de guerre qui, bien que sur leurs gardes, ne s’attendent pas à une attaque. Les révolutionnaires contournent le navire, se plaçant du côté du large, misant sur le fait que les veilleurs n’ont d’yeux que pour la berge, seule source potentielle de problèmes. Un à un, ils sortent la tête de l’eau, crachant sans bruit le sel ingurgité durant la traversée.

Puis c’est au tour d’Alrahyr d’être extrait de son état second. Doucement, on enlève les lestes de son embarcation, qui émerge tranquillement, produisant moins de bruit que le doux clapotis des vagues contre la coque du bateau.

Après quelques secondes à l’air libre, il ouvre les yeux soudainement et fait mine d’inspirer bruyamment, comme quelqu’un qui sort d’un évanouissement doublé d’une longue période sans air. Mais, dans un geste spontané, Yunna Kaltershaft et Adam l’en empêchent, plaquant leurs mains sur sa bouche. Le jeune homme devient rapidement bleu, suffoquant à moitié, tentant de se débattre, jusqu’à ce qu’il reprenne conscience de la situation et, d’un hochement de tête, indique à ses proches qu’il ne fera pas de bruit.

Et enfin, il peut respirer tranquillement. Pendant de longues minutes, le groupe reste ainsi, à flotter contre la coque, regard vers le haut sans rien voir du pont mais espérant qu’aucun bruit n’ai été émis par leur présence.

Puis ils passent à l’action, Alrahyr légèrement en retrait, préférant reprendre son souffle plutôt que de risquer de faire du bruit.

Se répartissant tout le long du bâtiment, ils escaladent avec une lenteur extrême les parois, se servant des nombreuses prises présentes : sabords, planches extérieures, cordages… Ils parviennent juste sous le pont et observent. Comme ils s’en doutaient, et à leur grand contentement, les veilleurs sont pour la plupart accoudés du côté de la rive et discutent nonchalamment. D’autres déambulent tranquillement, appréciant le calme de la nuit, mais aucun ne semble tourné vers le large.

Alors les révolutionnaires franchissent la rambarde, toujours avec la même patience. Armés de couteaux en tous genres, ils poignardent le plus silencieusement possible les quelques gardes présents sur le pont, rapidement nettoyé de toute difficulté. Puis, s’infiltrant dans le château arrière, ils encerclent la salle principale, de laquelle un bruit de conversations se fait entendre. La majeure partie des soldats éveillés est très certainement regroupée là.

Alrahyr, dégoulinant encore d’eau de mer et toujours haletant, entre d’un air nonchalant dans la pièce, la tête penchée en avant, dans l’ombre d’une pièce très sombre.

- Messieurs, veuillez garder votre calme.

Il relève la tête, exposant son visage marqué par la détermination, éclairé par les flammes vacillantes des lampes de nuit. D’un regard, il observe les yeux des soldats qui se dirigent immédiatement vers leurs armes, posées dans tous les coins de la pièce. Puis toutes les autres portes s’ouvrent de concert, toujours lentement, sans un bruit, laissant entrer les révolutionnaires, encerclant les veilleurs.

- Messieurs, je réquisitionne ce bâtiment.

Les soldats, désemparés, n’opposent aucune résistance. Le groupe d’Alrahyr parcourt tout le navire, réveillant par surprise tous les gardes endormis dans leurs quartiers. En veillant à ce que personne ne crie ou ne déclenche quelque alarme que ce soit, les assaillants ligotent et bâillonnent chaque soldat, fouillant impeccablement tous les recoins possibles. Et enfin, ils les enferment dans les geôles du navire, largement pourvu en cellules.

De retour sur le pont, Alrahyr donne ses ordres à son équipage naissant. Il est temps de mettre les voiles et de s’éclipser avant d’être remarqué.

Mais alors que les voilures sont hissées, un clairon d’alerte se fait entendre dans le port militaire.

- Merde, ils gardaient un œil sur le croiseur !

D’innombrables torchent s’allument sur le rivage et on peut voir du monde s’affairer en hâte près des navires légers de la Marine.

- Pleines voiles ! Je veux dix personnes aux canons, les autres à la manœuvre !

Cette fuite ne se fera malheureusement pas dans le calme escompté.

- Vous, vous et vous !

Alrahyr désigne trois groupes, réunissant dix révolutionnaires.

- Au pont inférieur, immédiatement ! Chargez cinq canons sur tribord et pointez les deux frégates de la Marine !

En toute hâte, ils s’affairent.

- Et vous, levez-moi cette ancre ! Je veux qu’on prenne le vent ! Gardez le cap pour maintenir l’angle de tir des canons sur tribord !

Une voix s’élève du pont inférieur.

- Parés à faire feu !
- FEU !

L’ordre du jeune Kaltershaft ne se fait pas attendre, et cinq boulets se répartissent sur les deux cibles, s’enfonçant au niveau de la ligne de flottaison. Des cibles immobiles, quoi de plus simple à toucher ?

- Visez l’arrière et les gouvernails !

Rechargement.

- Augmentez encore la voilure, montrez-moi ce que ce croiseur a dans le ventre !

Le bâtiment de guerre gagne de la vitesse, se décalant petit à petit du port, non sans conserver une ligne de vue encore quelques instants pour les canonniers. Et à nouveau, une voix s’élève d’en-dessous.

- Parés à faire feu !
- FEU !

Cette fois, un boulet s’encastre dans le port, un autre dans un gouvernail, le troisième dans le château arrière d’une frégate, et les deux autres dans les coques.

- Beau travail ! Déportez-moi ce navire hors de ligne de vue, on prend le large !

BOUM

Le bruit sourd d’un canon provenant du port se fait entendre. Un tir isolé, pas une batterie. Puis le sifflement de son boulet, fendant l’air. Réagissant aussi vite que possible, Alrahyr tourne son regard dans la direction du bruit, puis vers Yunna, à quelques mètres de lui. Le projectile heurte la rambarde du croiseur et entame le pont, projetant des débris partout sur son passage.

Horrifié, le jeune Kaltershaft pose ses yeux sur sa mère.

Indemne.

Puis il se penche en avant, observant son propre ventre. Un morceau de bois, issu de l’impact, est planté au niveau de sa taille, sur le flanc droit. La douleur parvient enfin à son cerveau, il s’effondre dans un râle sourd.

Posant une main au sol et l’autre sur son côté, il relève la tête, s’assurant que le port n’ait plus de ligne de vue sur eux.

- Prenez… le large… Arrhh…
- Quelle direction ?

Pas de réponse, Alrahyr ne sait plus où donner de la tête. Il se redresse tant bien que mal, extrayant au passage le débris, laissant une plaie saignant abondamment. Il agite la tête de droite à gauche, montrant son inaptitude du moment à trouver une solution.

Mais Adam, fidèle à sa réputation, a une nouvelle idée.

- Luvneel.



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