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petit exerice très matinal

Le bateau, une caravelle de taille moyenne, se balançait doucement en contrebas au grès des vagues. La lune couverte révélait la petite crique dans laquelle il avait jeté l’ancre, ainsi que le pavillon noir au bout de son mat, rabattu par l’absence de vent. Persé n’avait aucune idée de qui l’habitait, de quels étaient ses buts ou ses rêves. En revanche, il connaissait le plan du bateau, son emplacement, ou se situait le prisonnier. Là encore, il n’avait aucune idée de qui ou de pourquoi. Au fond, cela n’avait pas d’importance.

Il sortit une lunette et étudia le pont ainsi que les haubanages. Trois sentinelles, peu vigilantes, laissant de nombreux angles morts. Il les étudia pendant encore quelques minutes afin de définir la meilleure approche. Dans l’idéal, il faudrait rejoindre la poupe du navire, laissé sans surveillance valable. Mais, de un, la côte n’offrait aucune cachette, de deux, elle était pratiquement de l’autre côté de la crique, et l’approche serait trop longue. Non, il allait grimper par le coté tribord de la proue, qui offrait de nombreuse prises, et l’accès à la rive de ce côté ne poserait aucun problème.

Il étudia le plan du vaisseau, confrontant aux rondes des sentinelles. Il allait  grimper le long de la proue, puis se décaler jusque vers les deux tiers du navire en restant en dessous de la rambarde, avant d’aller se cacher sous la coursive et d’attendre la relève. Il expliqua son plan à voix basse pour l’agent venu le surveiller, puis, à voix tout aussi basse déclara :
Vitesse 35%, force 55%, résistance 10%
C’était, selon lui, ce  dont il aurait besoin pour la phase d’approche.

N’ayant reçu aucune contre-indication (ni rien du tout d’ailleurs), il se mit à descendre au mieux des arbustes. Il adopta une démarche glissée, tout en restant en arrière, afin d’être le plus discret possible. En fait, à cette distance, il aurait pu trainer les pieds dans les feuilles voir faire des claquettes avec le même résultat, mais de un, il avait pris l’habitude de se déplacer comme une ombre en toutes circonstances,  de deux, avec un agent venu tester ses capacités derrière, il aurait tout aussi bien pu démissionner. En revanche, il fit particulièrement aux branches, qui, elles pouvaient parfaitement s’entendre du bateau si elles venaient à casser. Il se fraya donc un chemin entre les frondaisons, se guidant à la faible lumière de lune. Malgré tous ses efforts, comparé à l’agent qui le suivait et dont il ne connaissait pas même le nom, il avait l’impression de faire un boucan monstre.

Parvenu en lisière de la plage, il s’arrêta à nouveau pour observer les sentinelles. Aucun changement. Il n’y avait pas moyen d’avoir d’abris durant la traversée de la plage. Hors de question de courir pour le faire malgré tout. Si il y a une chose pour laquelle le corps humain excelle, c’est de remarquer le mouvement. Si les hommes avaient été sur le qui-vive, la tache aurait été compliquée. Là, il se contenta d’attendre que l’homme à tribord se retourne pour reprendre sa marche, toujours du même pas. Il savait l’eau glacée, il savait ne pas pouvoir y aller progressivement, mais cela ne rendit pas l’eau plus chaude pour autant lorsqu’il y entra.

Il se mit à avancer d’une brasse régulière, veillant à ne faire aucune éclaboussure et se calant sur le rythme des vagues. Les reflets mouvants de la lune donnaient quelque chose d’irréel à la scène. Tandis qu’il avançait, le vent se leva, dépliant le Joly Roger et faisant onduler les voiles. Sur le navire, les sentinelles paraissaient endormies, et rien ne bougeait, lui donnant des allures d’apparition.
Persé atteignit enfin la coque, sans que quiconque ne l’ai repéré. Il attendit que le gite amène le bateau au plus près, puis saisi à pleines mains la chaine de l’ancre, et commença à se hisser. Ses pieds mouillés ne l’aidaient pas vraiment, mais la chaine lui suffisait pour se hisser. Parvenu au sommet, il saisit le dessous du rebord, ses pieds dans les rainures des fentes et entreprit de se décaler. Il s’arrêta cependant au bout de quelques pas à peine. Au bruit, un des hommes faisait du zèle et entreprenait une ronde. Il resta longtemps ainsi, sans oser bouger. Le bruit s’arrêta un moment et Persé s’apprêtait à repartir quand l’homme refit un tour. Il se mit alors à maudire la terre entière : ce pirate qui n’avançait pas assez vite, la lune qui le faisait trop, l’eau qui le frigorifiait, et enfin lui-même, qui n’avait pas prévue assez de résistance. La force ne posait pas de problème, mais il tenait tout sur les bras, et ceux-ci commençait à le tirer fortement. Le tout dans un silence total, évidemment.

Finalement, le bruit s’arrêta et Persé reprit son avancé.  Un pas après l’autre, tranquillement, en suivant la rambarde. Arrivé au bout, il leva lentement la tête, sans à-coups, pour voir les hommes, qui faisait à peu près tout est n’importe quoi, sauf surveiller. Il entreprit alors de se relever et de disparaitre sous l’escalier proche, sans précipitation mais avec fluidité. La silhouette sombre de son examinateur le rejoignit peu après, toujours sans un son. Il entreprit alors d’attendre. Ce qui ne fut, heureusement pas trop long. Il n’agit cependant pas juste après la relève, car les hommes étaient encore plutôt réveillés.

Après un instant, d’hésitation, il décida qu’il changerait ses réglages après avoir libéré le pont. Il ne connaissait rien de l’homme qu’il devait exfiltrer et ne pouvait donc certainement pas prévoir comment il réagirait. Il allait donc être obligé d’utiliser un somnifère afin d’être sûr qu’il ne se réveille pas et devrait donc le porter à travers le bateau jusqu’à une chaloupe. Or, comme la vie le lui avait aimablement rappelé quelques minutes plus tôt, il aurait besoin de résistance pour cela. Pas pour se débarrasser d’une poignée de sentinelles incompétentes et inconsciente.

Lorsque la fatigue commença à se faire sentir chez ses dernières, il entreprit de sortir de l’ombre. A la moindre erreur, l’alerte serait donnée et la mission serait un échec. Un échec qu’il ne pouvait pas se permettre. Sa première cible, offerte, lui tournait le dos, appuyé sur la rambarde, à quelques mètres à peine. Une main sur la bouche, l’autre sur le larynx, il maintient la pression quelques instants jusqu’à ce que l’homme soit inconscient. Il avait maintenant à peu près cinq minutes pour s’occuper des autres avant qu’il ne se réveille. Le deuxième somnolait sur la poupe, sans doute à vérifier qu’aucun ennemi ne venait du ciel. Il lui couvrit là aussi la bouche avant de prendre sa tête de l’autre main et de frapper à la tempe. Trois minutes. Le dernier ne posa pas plus de difficultés et Persé leur fit alors prendre un puissant somnifère qui devrait les maintenir dans le coma jusqu’à l’aube. Le même qu’il allait donner au gus, d’ailleurs.

Restait à rentrer dans le navire et à trouver le bonhomme. Or, si la lune lui avait permis d’avancer jusque-là, elle ne serait pas capable de traverser le pont. Et une torche aurait été une connerie, beaucoup trop visible. Il y avait réfléchis à l’avance et avait amené une lanterne sourde dans un sac, à l’abri de l’eau. Si était bien étanche du moins. Oui, tout était bon.

Un autre problème, en temps normal, aurait été de localiser la cible, mais son emplacement lui avait été fourni avec le reste. Il s’engouffra silencieusement dans les entrailles du navire, la lanterne éclairant le chemin sur quelques mètres à peine. Les planches craquaient doucement sous ses pieds, sans qu’il puisse les en empêcher. Il espérait malgré tout que cela puisse être confondu avec le bruit normal du navire. Une coursive, une autre. Il hésita à une intersection, mais préféra rallonger son chemin plutôt que de passer devant un des dortoirs.
Plus que quelques mètres… voilà la porte. Fermé, évidemment, mais elle ne résista pas plus de quelques secondes à son passe-partout. Pratique, ces engins. La porte s’ouvrit donc lentement, révélant une poudrière. Parfaitement vide. Inutile de chercher, il n’y avait aucune cachette possible, tout était visible depuis l’entrée. Qu’est-ce que c’était que ce bordel !? Non, du calme, il avait juste dû changer d’emplacement.
Persé sortit les plans du vaisseau et les étudias à la lumière de la lanterne. Non, rien de particulièrement probant pour faire une cellule. Il allait devoir visiter les pièces une à une.

12 pièces passées au peigne fin plus tard, Persé commençait à sacrément paniquer. Il n’y avait pas trace d’un quelconque prisonnier et la nuit avançait. Il s’efforçait malgré tout de garer son calme et de ne pas faire d’erreurs. Il avait fait le tour des pièces de vie et de rangement. Restait les cabines. Bon, il allait commencer par celles de droite. Non, ils étaient sur l’extérieur. Trop facile de s’échapper. Ceux de gauche, plutôt.
Déjà debout ?
Persé envoya immédiatement son coude en arrière, percutant le torse du pirate, puis se retourna et frappa à la gorge dans le même mouvement. Sa tête émis un son creux en cognant le sol. Il se figea. Il avait frappé fort. Très fort. L’homme l’avait surpris et il avait agis par reflexe. Il vérifia que personne d’autre ne se trouvait dans le coin puis vérifia s’il vivait encore.
L’homme s’en tirait plutôt bien. Enfin… il allait passer un sale quart d’heure quand il reprendrait conscience, mais il s’en sortirait. Tant mieux. Finir sa carrière dans le CP à cause d’un crétin qu’il l’avait pris par surprise, ça l’aurait sacrément embêté. Qu’est-ce qu’il fichait debout, d’ailleurs ? Insomniaque ? Il alla regarder par le hublot le plus proche et retient un juron. La lune était en train de se coucher. Dans sa panique, il n’avait pas vu le temps passer et il était temps de se barrer. Tant pis pour l’homme.
Mais il ne pouvait pas juste partir comme ça. S’il y avait effectivement un prisonnier, ce dont il commençait à douter, laisser quatre hommes dans le coma et ne toucher à rien serait suspect et renforcerait la garde, risquant de compromettre une mission futur. Non, il allait se faire passer pour un voleur. Il avait visité la cale, et vu les marchandises entreposées là. Il allait prendre ce qui lui offrirait le meilleur ratio valeur/poids, et partirait en leur empruntant une barque.

En repartant sur l’eau, Persé réfléchissait à la mission. C’était quoi ce bordel ? Avait-il été mal renseigné ? Les pirates l’avaient-ils doublé ? À moins que ce ne soit un test ? Il soupira. Impossible de savoir. Dans tous les cas, il espérait que sa réaction avait été suffisamment bonne pour le garder dans la course. Malgré la frayeur qu’il avait eue, il s’était senti incroyablement vivant. Il espérait bien pouvoir continuer encore longtemps. Ce ne fut que bien longtemps après qu’il ai disparu, emportant avec lui la silencieuse et muette silhouette de l’examinateur, que les premiers cris retentirent.