Persé avala rapidement ce qui restait de sa dernière tartine, enfila son manteau, puis quitta son studio en quatrième vitesse. Un studio en plein cœur de MariJoa qui lui coutait une blinde, mais bon, pas trop le choix.
Il était en retard, et Haark n’était pas particulièrement conciliant, surtout en ce moment. Allez savoir pourquoi, mais depuis quelques jour, il était devenu incroyablement exigeant avec lui. Et exigeant selon les normes de cet homme-là, ça signifiait beaucoup.
Ne souhaitant pas spécialement subir une autre engueulade, il s’avança donc d’un pressé dans les rues de la ville, dominé par des tours interminables et perdu dans une foule dense et multicolore. Enfin, surtout noir, la foule. Dans tous les sens du terme. Trop de gens. Trop peu d’espace. Trop de bruit. Il en avait la migraine. Il ne serait jamais venu habiter ici si il avait eu le choix. Il s’étira tout en pressant le pas, pressé d’arriver. Malgré son malaise, il sembla se fondre instantanément dans la foule. Ses mouvements pressés copiés sur ceux des gens qui l’entourait, sans même qu’il s’en rende compte. Son manteau de cuir noir se fondant dans la foule des vestes et son regard absent semblait se refléter à l’infini dans les yeux de ceux qui l’entouraient.
Il arriva enfin devant un bâtiment à l’air particulièrement banal et entra sans hésiter. Le hall, tout aussi banal, ne contenait qu’un petit guichet derrière lequel se tenait un gardien à l’air déjà endormis. Celui-ci leva les yeux à son passage avant de les rebaisser dès qu’il l’eut reconnu et Persé continua son chemin sans plus se soucier de lui. Il tourna au milieu de quelques couloir qui n’était ni vraiment grand ni vraiment beaux. En revanche, ils étaient ce que l’on pourrait nommer sinueux. La peinture s’écaillait par endroit et une vague odeur de renfermé se dégageait de la moquette passée. Bienvenu au CP5.
Persé entra dans son bureau en s’étirant et vérifia rapidement s’il n’avait rien de nouveau. Si, en fait, de nombreuses choses, mais rien d’urgent. Il s’en occuperait à son retour. Il attrapa ses affaires et se changea tout en planifiant mentalement sa journée, puis repartit se perdre dans les couloirs. Quelques minutes plus tard, il atteignit le cœur de l’endroit, et contrairement à ce que l’on pourrait penser, il ne s’agissait pas de la cantine.
Le dojo était incroyablement spacieux et lumineux, surtout si l’on comparait avec le reste du bâtiment. Ses murs étaient recouverts de carrelage d’un blanc étincelant, son sol par des tapis fin et raides, mais qui valaient toujours mieux que la pierre qui se trouvaient en dessous. Il occupait près d’un tiers du bâtiment, pourtant loin d’être petit. Une petite dizaine de personnes occupaient déjà la salle, mais Haark était encore absent. Persé s’étira puis commença à s’échauffer, commençant par quelques courses rapides et courtes, puis une marche tranquille tout en actionnant chacun de ses muscles, chaque articulation, avant de s’étirer à nouveau puis de repartir, effectuant d’amples enchainements, curieux mélange de danse et de techniques de combats.
Autour de lui, les autres apprentis s’échauffait, chacun à leur manière, mais tous s’échauffaient. Ceux qui manquaient de rigueur étaient déjà partis depuis longtemps. Plus de la moitié d’entre eux étaient bâtis comme des armoires à glaces, imposants et puissant. Mais, à une exception près, trop lents. Pour les trois qui restaient, l’un n’avait strictement rien de remarquable physiquement, un autre, bien le seul, possédait un peu de brioche. Quant au dernier, tout comme Persé, il possédait une silhouette allongée, des muscles souples et ressemblait, une fois en mouvement, à une sorte de fouet métallique. Celui-là se nommait Eros et surpassait Persé aux arts du combat. Mais c’était bien le seul.
Quant aux autres… l’enveloppé se nommait Éric. Un combattant à la hauteur de ce que son physique laissait présager, mais il possédait une capacité d’analyse et de réflexion incomparable. La montagne mouvante se nommait Jean. Ses coups étaient d’un force incomparable et il surprenait régulièrement ses adversaires par sa vitesse d’attaques, d’autant qu’en général, jusqu’au moment de passer à l’action, il se déplaçait avec une extrême lenteur. Une seule attaque de plein fouet de sa part et Persé était à terre. Mais encore faudrait-il qu’il le touche.
Les autres avaient des styles et des types très variés, mais avec un point commun. Si ils décidaient tout à coup de sortir dans la rue et de dézinguer tout le monde, même ici, en plein cœur de Marie Joa (surtout ici, en fait, vue la densité de la foule), les victimes se conteraient par dizaines avant qu’ils ne se fassent abattre. Mais ils ne le feraient pas. Premièrement par ce qu’ils n’avaient pas de raison de le faire, deuxièmement par ce qu’aucun d’entre eux ne serait assez stupide pour agir au grand jour. Parmi ceux qui restaient, on trouvait Leo, Andrew et Julia, respectivement maitre en infiltration, sabotage et filature. Tous n’avaient pas un domaine de préférence, mais tous étaient excellents. Enfin, si on exceptait Alexandre. Mais il y avait tout à parier qu’Alexandre ne serait plus là à la fin de la semaine. Il ne connaissait réellement que leurs compétences. Tous étaient des solitaires endurcis, capable de passer des semaines sans lâcher un mot. Ils étaient partenaire, pas camarades.
Haark finit par arriver, à peu près dix minutes après l’heure du rendez-vous. L’homme n’était pas particulièrement grand, ni particulièrement musclé (selon les critères du CP du moins), mais il était d’une redoutable efficacité. Il les regarda s’échauffer encore un peu, puis les appela.
Bon, nouvelle leçon aujourd’hui. Lancer de couteau. Persé et Julia vous allez me chercher les mannequins, Éric, tu me ramène la mallette qui est dans mon bureau
En quelques instants, le matériel fut en place, d’autant plus que tout le monde était impatient de commencer. Ils savaient qu’ils allaient en baver, que le maitre d’arme aller leur crier dessus par ce qu’ils n’y arrivaient pas assez vite, mais ils s’en foutaient. Ils étaient là pour apprendre.
Cinq mannequins étaient répartis à intervalle régulier à travers la pièce. Pour Haark, pendant que le premier agissait, le deuxième devait l’observer pour ne pas refaire les mêmes erreurs. Et si il y avait une chose dont Persé était certains ici, c’est bien de la qualité de l’enseignement du maitre d’arme. Il n’avait commencé à apprendre les arts du combat en arrivant au CP, mais depuis qu’il y était, ses progrès étaient phénoménaux.
Haark ouvrit la mallette qui contenait, à la surprise générale, des dizaines de poignards de toutes les tailles et de toutes les formes. Il se saisit de l’un d’entre eux, fit un ou deux jongles pour tester son équilibre puis se tourna vers ses élèves :
Bon, premier point, vous tenez le couteau par la pointe, entre le pouce et l’index. Oui, comme d’habitude, il y a des monstres capables d’en lancer 10 avec une précision parfaite en un quart de seconde, mais on rediscutera quand vous toucherez la cible. Bon, je reprends. Vous prenez par la pointe, le manche basculé vers le bas avec un angle à peu près égal à 19°. Vous tendez le bas vers l’arrière et vous balancez. Alexandre, tu commences.
Alexandre se saisit donc d’un couteau, suivit les instructions et le jeta. Non, non, pas le lança. On n’appelle pas ça lancer quand le couteau passe à plus d’un d’une cible de la taille d’un homme et que cette cible est à moins de dix mètre.
Éric, quelles sont ses erreurs ?
Avant les essais par duo venait à chaque fois un premier tour où chacun tentait, dans l’ordre des compétences estimés par le prof, de réaliser l’action demandé. Chacun à son tour, devait tenter de comprendre pourquoi le précédent avait échoué ou manqué d’efficacité (il ne faut pas déconner, personne n’avait réussi à ne pas toucher le mannequin quand ils avaient travaillés les coups directs)
Ses appuis n’étaient pas ferme, sa main tremblait, son couteau était trop baissé.
Bien, à toi
Eric se saisit donc du couteau, se mit en position, fit attention à positionner ses pieds au mieux, et rata presque autant la cible qu’Alexandre.
Jean ?
sa main a eu un spasme au moment de lancer.
tire
Il n’a pas assez armé son bras
Bien.
Il s’est décentré en tirant
Va-y.
Il a relâché le couteau trop tard.
A toi.
Il avait une mauvaise prise sur le couteau
D’accord. Tire.
Andrew s’exécuta. Comme pour tous les autres, son couteau ne parvient pas à trouver à toucher la cible. Les résultats s’étaient peu à peu améliorés, au fur et à mesure des remarques et du niveau des acteurs. Haark classait toujours les apprentis dans l’ordre des résultats attendus, et on entrait maintenant dans le trio de tête. Tout le monde redoubla d’attention, désireux de savoir quand ils parviendraient à planter la dague.
Jean ?
Imprecsisions. Pas de grosses erreurs, juste des maladresses.
Montre-moi
Jean choisit un couteau, se mit en position d’un mouvement fluide, puis lança le couteau avec force, qui vient s’écraser de tout son long sur la tête du mannequin.
Persé ?
Il n’a pas vérifié l’équilibre de la lame
Sans attendre, Persé s’empara d’un couteau, le fit tournoyer dans les airs, le rattrapa par la pointe et tira. Le couteau traversa la pièce et vint toucher l’emplacement du cœur. Mais trop faiblement. Le couteau retomba en tintant sur le sol.
Tu n’as pas assez armé ton bras. Il me semble que la remarque a déjà été faite ?
Oui…
Bien. Cent pompes, maintenant. Eros, c’est à toi
Persé s’exécuta sans un mot tandis Que le couteau d’Eros traversait la salle pour se ficher en plein cœur de la cible. Haark attendit quelques minutes que Persé ai fini avant de les envoyer par groupe de deux sur les différents mannequins. Persé, comme il s’y attendait, se trouvait avec Eros. Il se doutait que l’objectif du maitre d’arme devait être de forcer la compétition entre eux afin d’obtenir des résultats plus rapide. Il faut dire que ça marchait plutôt bien.
Malgré leurs résultats précédents, ni l’un ni l’autre ne parvient à toucher à la cible au deuxième essaie. Ni au troisième. Persé planta au quatrième essaie, Eros lui lança un regard furieux quand lui-même rata, qui lui rendit un petit sourire moqueur, avant de rater à nouveau tandis qu’Eros touchait la cible en pleine gorge.
Leur précision augmenta lentement jusqu’à ce qu’il touche un lancé sur deux. Avant de stagner car ils se mettaient à tirer de plus en plus vite. Cependant, à force de vouloir accélérer, ils finirent par ne pas toucher la cible pendant dix lancés consécutifs, et ils se mirent d’accord pour retourner à la précision, au soulagement visible du professeur.
Les couteaux continuèrent à voler des heures durant, dans une compétition toujours aussi féroce entre Eros et Persé. En fait, ils ne portaient pas la moindre attention aux autres apprentis, omnibulés qu’ils étaient par le fait de surpasser l’autre. Malgré tous les efforts du jeune homme, son rival le battit d’une longueur à peine. Quand le professeur donna le signal de la fin du cour, leurs bras étaient en plomb, leurs doigts tétanisés et leur souffle court. Ils avaient lancé près d’un couteau toute les trois secondes pendant les dix dernières minutes, et leur mannequin ressemblait à un foutu porc-épique.
Haark les libera, tout en leur rappelant qu’ils n’auraient pas cour de l’après-midi. Ce temps leur était laissé afin qu’il puisse continuer à vivre le temps de la formation. Lui n’avait rien d’autre que les cours. Ils reprirent leurs affaires sans un mot, avant de rentrer chez eux. Ils n’avaient rien à se dire de toute façon. Persé s’apprêtait à franchir la porte quand Haark le retient
Persé ? Attend. Je voudrais te parler.
Oui, monsieur ?
Le maitre d’arme attendit que tout le monde soit sorti de la salle. Il regarda la sortit pendant encore quelques secondes puis dit très calmement :
Vous dégagez. Maintenant. Ça ne vous concerne pas. Et pour avoir voulu m’espionner de façon aussi maladroite, vous me ferez un grand tour.
Persé cilla. Un grand tour signifiait 200 répétitions de chaque exercice. Il y en avait pour au moins trois heures, et une fois fini, on ne rêvait plus que d’aller se coucher. Ce que Haark voulait lui dire était visiblement important. Ou il était de mauvaise humeur, au choix.
Bien. On va pouvoir parler tranquillement maintenant.
Une lumière presque sauvage brillait dans les yeux sombres du maitre d’arme, inquiétant fortement Persé.
Persé, la phase finale de votre formation va débuter dans deux semaines. Une semaine de repos, une semaine d’examens. A l’issu des examens, seuls trois d’entre vous seront pris. Je veux que tu sois dans ses trois-là.
Pourquoi moi ? Eros me bat dans presque toutes les disciplines physiques, et vous êtes perpétuellement en train de me dire que mes capacités sont insuffisantes.
Insuffisantes par rapport à ce qu’elles pourraient être Persé. Tu bon, mais tu pourrais atteindre l’excellence. Et tu l’atteindras. Je te jure que si tu n’y parviens pas, je te fais jeter du CP sans aucune passerelle nulle part. Tu as une semaine. Tu m’entends, une semaine pour pouvoir faire ravaler sa suffisance à Eros. Et pour ce qui est de te comparer à lui… Oui, il est bon physiquement. Oui, il va passer les examens. Mais il cassera dès le début de la prochaine partie de la formation. Son mental ne vaut rien. Il ferait un excellent marine, mais il est incapable d’agir en tant qu’agent. C’est la loi qu’il veut protéger, pas le gouvernement. Et au niveau mental, tu as quelque chose grâce auquel tu le surpasse largement : l’absence de tout sentiment humain.
Le sourire de Haark était terrifiant, animal. C’était celui d’un prédateur. D’un grand fauve prêts à tuer. Persé le lui rendit, incertains.
Il était en retard, et Haark n’était pas particulièrement conciliant, surtout en ce moment. Allez savoir pourquoi, mais depuis quelques jour, il était devenu incroyablement exigeant avec lui. Et exigeant selon les normes de cet homme-là, ça signifiait beaucoup.
Ne souhaitant pas spécialement subir une autre engueulade, il s’avança donc d’un pressé dans les rues de la ville, dominé par des tours interminables et perdu dans une foule dense et multicolore. Enfin, surtout noir, la foule. Dans tous les sens du terme. Trop de gens. Trop peu d’espace. Trop de bruit. Il en avait la migraine. Il ne serait jamais venu habiter ici si il avait eu le choix. Il s’étira tout en pressant le pas, pressé d’arriver. Malgré son malaise, il sembla se fondre instantanément dans la foule. Ses mouvements pressés copiés sur ceux des gens qui l’entourait, sans même qu’il s’en rende compte. Son manteau de cuir noir se fondant dans la foule des vestes et son regard absent semblait se refléter à l’infini dans les yeux de ceux qui l’entouraient.
Il arriva enfin devant un bâtiment à l’air particulièrement banal et entra sans hésiter. Le hall, tout aussi banal, ne contenait qu’un petit guichet derrière lequel se tenait un gardien à l’air déjà endormis. Celui-ci leva les yeux à son passage avant de les rebaisser dès qu’il l’eut reconnu et Persé continua son chemin sans plus se soucier de lui. Il tourna au milieu de quelques couloir qui n’était ni vraiment grand ni vraiment beaux. En revanche, ils étaient ce que l’on pourrait nommer sinueux. La peinture s’écaillait par endroit et une vague odeur de renfermé se dégageait de la moquette passée. Bienvenu au CP5.
Persé entra dans son bureau en s’étirant et vérifia rapidement s’il n’avait rien de nouveau. Si, en fait, de nombreuses choses, mais rien d’urgent. Il s’en occuperait à son retour. Il attrapa ses affaires et se changea tout en planifiant mentalement sa journée, puis repartit se perdre dans les couloirs. Quelques minutes plus tard, il atteignit le cœur de l’endroit, et contrairement à ce que l’on pourrait penser, il ne s’agissait pas de la cantine.
Le dojo était incroyablement spacieux et lumineux, surtout si l’on comparait avec le reste du bâtiment. Ses murs étaient recouverts de carrelage d’un blanc étincelant, son sol par des tapis fin et raides, mais qui valaient toujours mieux que la pierre qui se trouvaient en dessous. Il occupait près d’un tiers du bâtiment, pourtant loin d’être petit. Une petite dizaine de personnes occupaient déjà la salle, mais Haark était encore absent. Persé s’étira puis commença à s’échauffer, commençant par quelques courses rapides et courtes, puis une marche tranquille tout en actionnant chacun de ses muscles, chaque articulation, avant de s’étirer à nouveau puis de repartir, effectuant d’amples enchainements, curieux mélange de danse et de techniques de combats.
Autour de lui, les autres apprentis s’échauffait, chacun à leur manière, mais tous s’échauffaient. Ceux qui manquaient de rigueur étaient déjà partis depuis longtemps. Plus de la moitié d’entre eux étaient bâtis comme des armoires à glaces, imposants et puissant. Mais, à une exception près, trop lents. Pour les trois qui restaient, l’un n’avait strictement rien de remarquable physiquement, un autre, bien le seul, possédait un peu de brioche. Quant au dernier, tout comme Persé, il possédait une silhouette allongée, des muscles souples et ressemblait, une fois en mouvement, à une sorte de fouet métallique. Celui-là se nommait Eros et surpassait Persé aux arts du combat. Mais c’était bien le seul.
Quant aux autres… l’enveloppé se nommait Éric. Un combattant à la hauteur de ce que son physique laissait présager, mais il possédait une capacité d’analyse et de réflexion incomparable. La montagne mouvante se nommait Jean. Ses coups étaient d’un force incomparable et il surprenait régulièrement ses adversaires par sa vitesse d’attaques, d’autant qu’en général, jusqu’au moment de passer à l’action, il se déplaçait avec une extrême lenteur. Une seule attaque de plein fouet de sa part et Persé était à terre. Mais encore faudrait-il qu’il le touche.
Les autres avaient des styles et des types très variés, mais avec un point commun. Si ils décidaient tout à coup de sortir dans la rue et de dézinguer tout le monde, même ici, en plein cœur de Marie Joa (surtout ici, en fait, vue la densité de la foule), les victimes se conteraient par dizaines avant qu’ils ne se fassent abattre. Mais ils ne le feraient pas. Premièrement par ce qu’ils n’avaient pas de raison de le faire, deuxièmement par ce qu’aucun d’entre eux ne serait assez stupide pour agir au grand jour. Parmi ceux qui restaient, on trouvait Leo, Andrew et Julia, respectivement maitre en infiltration, sabotage et filature. Tous n’avaient pas un domaine de préférence, mais tous étaient excellents. Enfin, si on exceptait Alexandre. Mais il y avait tout à parier qu’Alexandre ne serait plus là à la fin de la semaine. Il ne connaissait réellement que leurs compétences. Tous étaient des solitaires endurcis, capable de passer des semaines sans lâcher un mot. Ils étaient partenaire, pas camarades.
Haark finit par arriver, à peu près dix minutes après l’heure du rendez-vous. L’homme n’était pas particulièrement grand, ni particulièrement musclé (selon les critères du CP du moins), mais il était d’une redoutable efficacité. Il les regarda s’échauffer encore un peu, puis les appela.
Bon, nouvelle leçon aujourd’hui. Lancer de couteau. Persé et Julia vous allez me chercher les mannequins, Éric, tu me ramène la mallette qui est dans mon bureau
En quelques instants, le matériel fut en place, d’autant plus que tout le monde était impatient de commencer. Ils savaient qu’ils allaient en baver, que le maitre d’arme aller leur crier dessus par ce qu’ils n’y arrivaient pas assez vite, mais ils s’en foutaient. Ils étaient là pour apprendre.
Cinq mannequins étaient répartis à intervalle régulier à travers la pièce. Pour Haark, pendant que le premier agissait, le deuxième devait l’observer pour ne pas refaire les mêmes erreurs. Et si il y avait une chose dont Persé était certains ici, c’est bien de la qualité de l’enseignement du maitre d’arme. Il n’avait commencé à apprendre les arts du combat en arrivant au CP, mais depuis qu’il y était, ses progrès étaient phénoménaux.
Haark ouvrit la mallette qui contenait, à la surprise générale, des dizaines de poignards de toutes les tailles et de toutes les formes. Il se saisit de l’un d’entre eux, fit un ou deux jongles pour tester son équilibre puis se tourna vers ses élèves :
Bon, premier point, vous tenez le couteau par la pointe, entre le pouce et l’index. Oui, comme d’habitude, il y a des monstres capables d’en lancer 10 avec une précision parfaite en un quart de seconde, mais on rediscutera quand vous toucherez la cible. Bon, je reprends. Vous prenez par la pointe, le manche basculé vers le bas avec un angle à peu près égal à 19°. Vous tendez le bas vers l’arrière et vous balancez. Alexandre, tu commences.
Alexandre se saisit donc d’un couteau, suivit les instructions et le jeta. Non, non, pas le lança. On n’appelle pas ça lancer quand le couteau passe à plus d’un d’une cible de la taille d’un homme et que cette cible est à moins de dix mètre.
Éric, quelles sont ses erreurs ?
Avant les essais par duo venait à chaque fois un premier tour où chacun tentait, dans l’ordre des compétences estimés par le prof, de réaliser l’action demandé. Chacun à son tour, devait tenter de comprendre pourquoi le précédent avait échoué ou manqué d’efficacité (il ne faut pas déconner, personne n’avait réussi à ne pas toucher le mannequin quand ils avaient travaillés les coups directs)
Ses appuis n’étaient pas ferme, sa main tremblait, son couteau était trop baissé.
Bien, à toi
Eric se saisit donc du couteau, se mit en position, fit attention à positionner ses pieds au mieux, et rata presque autant la cible qu’Alexandre.
Jean ?
sa main a eu un spasme au moment de lancer.
tire
Il n’a pas assez armé son bras
Bien.
Il s’est décentré en tirant
Va-y.
Il a relâché le couteau trop tard.
A toi.
Il avait une mauvaise prise sur le couteau
D’accord. Tire.
Andrew s’exécuta. Comme pour tous les autres, son couteau ne parvient pas à trouver à toucher la cible. Les résultats s’étaient peu à peu améliorés, au fur et à mesure des remarques et du niveau des acteurs. Haark classait toujours les apprentis dans l’ordre des résultats attendus, et on entrait maintenant dans le trio de tête. Tout le monde redoubla d’attention, désireux de savoir quand ils parviendraient à planter la dague.
Jean ?
Imprecsisions. Pas de grosses erreurs, juste des maladresses.
Montre-moi
Jean choisit un couteau, se mit en position d’un mouvement fluide, puis lança le couteau avec force, qui vient s’écraser de tout son long sur la tête du mannequin.
Persé ?
Il n’a pas vérifié l’équilibre de la lame
Sans attendre, Persé s’empara d’un couteau, le fit tournoyer dans les airs, le rattrapa par la pointe et tira. Le couteau traversa la pièce et vint toucher l’emplacement du cœur. Mais trop faiblement. Le couteau retomba en tintant sur le sol.
Tu n’as pas assez armé ton bras. Il me semble que la remarque a déjà été faite ?
Oui…
Bien. Cent pompes, maintenant. Eros, c’est à toi
Persé s’exécuta sans un mot tandis Que le couteau d’Eros traversait la salle pour se ficher en plein cœur de la cible. Haark attendit quelques minutes que Persé ai fini avant de les envoyer par groupe de deux sur les différents mannequins. Persé, comme il s’y attendait, se trouvait avec Eros. Il se doutait que l’objectif du maitre d’arme devait être de forcer la compétition entre eux afin d’obtenir des résultats plus rapide. Il faut dire que ça marchait plutôt bien.
Malgré leurs résultats précédents, ni l’un ni l’autre ne parvient à toucher à la cible au deuxième essaie. Ni au troisième. Persé planta au quatrième essaie, Eros lui lança un regard furieux quand lui-même rata, qui lui rendit un petit sourire moqueur, avant de rater à nouveau tandis qu’Eros touchait la cible en pleine gorge.
Leur précision augmenta lentement jusqu’à ce qu’il touche un lancé sur deux. Avant de stagner car ils se mettaient à tirer de plus en plus vite. Cependant, à force de vouloir accélérer, ils finirent par ne pas toucher la cible pendant dix lancés consécutifs, et ils se mirent d’accord pour retourner à la précision, au soulagement visible du professeur.
Les couteaux continuèrent à voler des heures durant, dans une compétition toujours aussi féroce entre Eros et Persé. En fait, ils ne portaient pas la moindre attention aux autres apprentis, omnibulés qu’ils étaient par le fait de surpasser l’autre. Malgré tous les efforts du jeune homme, son rival le battit d’une longueur à peine. Quand le professeur donna le signal de la fin du cour, leurs bras étaient en plomb, leurs doigts tétanisés et leur souffle court. Ils avaient lancé près d’un couteau toute les trois secondes pendant les dix dernières minutes, et leur mannequin ressemblait à un foutu porc-épique.
Haark les libera, tout en leur rappelant qu’ils n’auraient pas cour de l’après-midi. Ce temps leur était laissé afin qu’il puisse continuer à vivre le temps de la formation. Lui n’avait rien d’autre que les cours. Ils reprirent leurs affaires sans un mot, avant de rentrer chez eux. Ils n’avaient rien à se dire de toute façon. Persé s’apprêtait à franchir la porte quand Haark le retient
Persé ? Attend. Je voudrais te parler.
Oui, monsieur ?
Le maitre d’arme attendit que tout le monde soit sorti de la salle. Il regarda la sortit pendant encore quelques secondes puis dit très calmement :
Vous dégagez. Maintenant. Ça ne vous concerne pas. Et pour avoir voulu m’espionner de façon aussi maladroite, vous me ferez un grand tour.
Persé cilla. Un grand tour signifiait 200 répétitions de chaque exercice. Il y en avait pour au moins trois heures, et une fois fini, on ne rêvait plus que d’aller se coucher. Ce que Haark voulait lui dire était visiblement important. Ou il était de mauvaise humeur, au choix.
Bien. On va pouvoir parler tranquillement maintenant.
Une lumière presque sauvage brillait dans les yeux sombres du maitre d’arme, inquiétant fortement Persé.
Persé, la phase finale de votre formation va débuter dans deux semaines. Une semaine de repos, une semaine d’examens. A l’issu des examens, seuls trois d’entre vous seront pris. Je veux que tu sois dans ses trois-là.
Pourquoi moi ? Eros me bat dans presque toutes les disciplines physiques, et vous êtes perpétuellement en train de me dire que mes capacités sont insuffisantes.
Insuffisantes par rapport à ce qu’elles pourraient être Persé. Tu bon, mais tu pourrais atteindre l’excellence. Et tu l’atteindras. Je te jure que si tu n’y parviens pas, je te fais jeter du CP sans aucune passerelle nulle part. Tu as une semaine. Tu m’entends, une semaine pour pouvoir faire ravaler sa suffisance à Eros. Et pour ce qui est de te comparer à lui… Oui, il est bon physiquement. Oui, il va passer les examens. Mais il cassera dès le début de la prochaine partie de la formation. Son mental ne vaut rien. Il ferait un excellent marine, mais il est incapable d’agir en tant qu’agent. C’est la loi qu’il veut protéger, pas le gouvernement. Et au niveau mental, tu as quelque chose grâce auquel tu le surpasse largement : l’absence de tout sentiment humain.
Le sourire de Haark était terrifiant, animal. C’était celui d’un prédateur. D’un grand fauve prêts à tuer. Persé le lui rendit, incertains.
Dernière édition par Persé le Sam 23 Avr 2016 - 10:19, édité 3 fois