Parfois, alors que vous êtes juste peinard en train de siroter une bouteille de scotch comme du petit lait, vous avez la chance de tomber sur une âme compatissante. Celle-ci peut, dans un élan de générosité, trinquer avec vous en vous faisant miroiter ses magnifiques atouts, du genre bonnet D avec trois chiffres avant. Mais là où ça se corse, c'est quand la demoiselle tente de profiter de votre gentillesse pour vous faire les poches. Personnellement, ma condition de gentleman m'empêche de lever la main sur une femme... enfin, sauf lorsqu'elle le demande et dans un cadre bien particulier. Mais quand vous surprenez la miss qui met sa main dans votre imperméable et que ce n'est pas pour vous saluer en vous serrant le troisième bras, vous hésitez généralement entre lui tordre le poignet et lui demander ce qui se passe. D'expérience, je sais que la seconde option conduit généralement à une fuite précipitée ou un verre dans la figure avant celle-ci. Quant à la première, ma foi... en général, il arrive que la voleuse se fasse passer pour la victime.
Sérieusement, qu'est-ce qui est plus énervant en ce bas monde que les fausses-victimes. Vous savez, le genre de personne qui chiale dès qu'elle n'a pas ce qu'elle veut, ou qui vous fait passer pour le méchant alors que c'est elle qui vient de vous démouler un cake dans la colle. C'est sans conteste ce type d'individu qui me fait le plus sortir de mes gonds. Trois ou quatre baffes histoire de les faire tourner sur elles-mêmes avant que, secouées par le choc, elles ne s'aplatissent comme une limande sur le sol, encore en train de se demander ce qui vient de leur arriver. Qui n'a jamais rêvé de faire ça à quelqu'un dans ce genre ? Personnellement, c'est toujours l'envie la plus tentante que j'ai quand je suis face à ce genre de situation. Et c'est pourquoi, vous vous en doutez... j'ai chopé bien fort le poignet de la miss en la dévisageant d'un air pas très enclin à la diplomatie.
Comme on peut s'en douter, la suite est facilement prévisible. Et vas-y que je crie, vas-y que je dis qu'il me fait mal alors qu'il me touche à peine, vas-y que je l'accuse d'être un violeur de la pire espèce qui n'attendait que de te faire boire pour te sauter dessus. Règle numéro dix-sept du code : Un mec en imperméable n'a pas besoin de faire boire une jeune femme pour abuser d'elle. Un mec en imperméable est la classe incarnée et ne force jamais les demoiselles à quoi que ce soit... sauf peut-être en leur racontant des bobards, mais là c'est de l'implicite. Mais bref, toujours était-il que j'avais une espèce de furie dont je tenais le poignet et qui gigotait comme une anguille en hurlant comme une truie qu'on égorge. Naturellement, la première réaction de tout mâle est de prendre le vieux pour un pervers et la fille pour une pauvre petite chatte innocente avec des yeux tout luisants.
Bien entendu, en moins de trente secondes, j'ai droit à une horde de malabars qui s'avancent vers moi avec un air menaçant. Je tente de prendre la chose du bon côté en affichant un visage détendu et essayant de m'expliquer, toujours en tenant ma voleuse par le poignet. Néanmoins, le fait que l'un des protagonistes qui se dirige vers moi n'en vienne à me traiter de pervers juste parce que j'ai un imperméable, et non parce que j'aurai juste un imperméable, me pousse à revoir ma position. Ne jamais, au grand jamais, traiter de pervers quelqu'un de classieux en imper. Il est vrai que l'on a pas le droit de frapper une femme directement. Mais la balancer d'un coup à la tronche du guignol qui vous sort une telle énormité, en revanche, c'est différent. Bon, évidemment, ce simple fait déclenche la bagarre générale. D'un seul coup, j'ai six mariolles qui se ruent vers moi avec leurs poings et couteaux brandis en avant. J'ai cependant une réaction excessivement normale : un coup de latte dans la table pour l'envoyer au pif des deux gus en première ligne.
Évidemment, ça fout un peu la bazar, les six choppes de scotch que j'avais commandé se répandant par terre, l'un des autres assaillants glissant maladroitement dessus pendant que ses trois collègues hurlent comme des bœufs en se dirigeant sur moi. Autre réaction simple, je jette ma clope sur le sol, laissant l'alcool s'enflammer. Celui à terre commence à sentir le steak un peu trop cuit alors qu'il déambule comme un perdu en agitant ses bras partout pour sortir de la taverne. Quant aux deux autres qui étaient sur la flaque à ce moment, leurs pompes prennent feu et ils se mettent alors à paniquer comme si on leur indiquait qu'ils avaient oublié de payer leurs impôts avant la date limite. Tout ça pour deux trois flammèches sur les godasses, si c'est pas malheureux. D'un simple geste du pied, je traîne ma chaise avant de la lever et la saisir avec ma main, pour l'éclater sur la tête du premier. Il me reste forcément quelques morceaux de bois dans les mains, le reste ayant pour le moins explosé sur le crâne du pauvre bougre. Je me sert donc des deux bouts de bois pour claquer la tête du deuxième, et enfin me concentrer sur le dernier qui reste.
Enfin, me concentrer... pas vraiment. Le pauvre ignare se retrouve seul, avec son couteau, en voyant ses cinq copains étalés comme des loques dans que je n'ai sorti ma deuxième main de ma poche. Je vous laisse imaginer que la direction qu'il a pris suite à cette constatation était celle opposée à la mienne. Secouant lentement la tête de droite à gauche en soupirant, je me dirige tranquillement vers la sortie quand l'espèce de morveuse aguicheuse se relève pour me menacer en ramassant un bout de bois de la chaise explosée, genre l'amazone face à un mec civilisé alors qu'elle n'en a jamais vu. Okay ma poule, je veux bien être gentil et je pensais t'avoir fait une fleur en t'envoyant juste voler dans le pif de ton camarade, mais là, tu commences sérieusement à m'échauffer les oreilles. Malgré le fait que je lève les yeux au ciel pour lui montrer qu'elle commence à être lourde la guenon, elle se jette sur moi avec un cri de rage très peu féminin. Désolé Xena, t'es pas encore assez douée pour faire mumuse avec moi. Si tu ne comprends pas la manière douce, tant pis pour toi. Je m'avance vers elle alors qu'elle brandit son arme improvisée, faisant alors un tour sur moi-même en plaçant ma paume de main de manière à intercepter son accessoire et dévier sa course sur le côté. Un dixième de seconde plus tard, le mouvement rotatif la fait basculer et je me retrouve nez-à-nez avec quelle, son bout de bois complètement à ma gauche.
Et maintenant, tu vas gentiment foutre le camp de mon champ de vision parce que tu me pompe l'air chérie. Un coup de genou bien placé dans le flanc gauche de la dame la fait décoller pour aller s'encastrer dans le mur. Ce n'est pas dans mes habitudes d'agir ainsi, mais dès l'instant où une dame brandit une arme vers moi, elle aura beau être la plus belle femme du monde, elle risque d'écoper d'un sérieux coup de latte, et pas comme j'aurai voulu lui donner au départ. Poussant une exclamation pour le moins dépitée, je me passe la main dans les cheveux, juste parce que je le vaux bien, avant de saisir mon imper sur les bords et de le tirer d'un coup sec pour bien le remettre. Les gosses j'vous jure, faut tout leur apprendre.
Là où ça se corse, c'est quand je sors du bar pour voir quoi ? Que le mec que j'ai cramé était un officier de la Marine en permission et qu'il a rameuté ses copains après s'être jeté dans l'abreuvoir des canassons. Que le type me fixe en ayant la face à moitié noircie et en serrant les dents est une chose. Que ses vingt collègues armés me mettent en joue, là, c'est une autre histoire. Qu'est-ce que je suis supposé faire dans ce genre de cas ? Me faire les vingt troufions ? Ouais, c'est sûr, j'aurai peut-être pu en latter une bonne partie avant de me barrer en en laissant la moitié en plan comme des nouilles. Mais d'un autre côté, je risquais quoi ? Le mec n'était même pas en service et il m'avait carrément cherché des crosses. Si on en venait à me juger, je prendrais allez... deux semaines au trou ? C'est loin d'être la mort.
Oui mais voilà, le Marine en question est le fils du magistrat de la ville, et ça, j'étais incapable de le deviner. C'est pas comme s'il avait son pédigrée marqué sur son front non plus. Du coup j'ai fait une bien jolie boulette en levant les mains pour me rendre. Le fait de souligner une vague ressemblance entre mon juge et le guignol du côté partie civile a cependant bien amusé la galerie, genre je m'en rendais compte avec un grand "Haaaaaa oui, effectivement". Et bien sûr, les deux semaines sur lesquelles je tablais se sont rapidement transformées en deux ans à la prison de North Blue, au Quartier Général de la Marine dans ce coin paumé. Joie, joie, bonheur et beurre de cacahouète. Voilà donc comment je me suis retrouvé dans l'une des plus grandes prisons de ce monde sans même avoir quoi que ce soit à y redire.
Comment se sont déroulées les choses ? Très bien... en moins de trois jours après mon arrivée, c'est déjà le gros bordel. J'ignore qui a fait quoi, mais ça s'active dans tous les sens, on entend des coups de feu et j'en passe. Finalement, un bruit bien familier résonne au loin, celui des boulets de canon qui chutent indubitablement vers le sol. Vous savez, comme un gros sifflet bien aigüe juste avant qu'un boom ne retentisse. Bah là, en l'occurrence, le boom se produit sur les murs des cellules. Pratique pour ceux qui ont la chance d'être ainsi libérés. Mais pas mauvais bougre, les bagnards viennent aussi libérer leurs collègues encore derrière les barreaux. Ils ne se seraient pas rendu compte qu'à eux seuls ils n'avaient aucune chance par hasard ? Sortant tranquillement, je me dirige dans la direction opposé aux confrères hors-la-loi qui me demandent ce que je fous. Pendant qu'un grand barbu avec des airs de prophète se la joue un peu, de mon côté, je vais récupérer la vraie source de ma puissance, de ce qui fait de moi un homme : mes vêtements bordel !
Par chance, la réserve n'est pas trop loin... enfin, si on fait abstraction du peloton de Marines qui se dirige par ici. Je déambule en tenue de bagnard dans les couloirs, mains dans les poches, comme si de rien. Qu'est-ce que je ne donnerai pas pour une putain de clope et un bon verre de scotch. Mais voilà, j'trouve enfin un foutu plan d'évacuation en cas d'incendie. Amen, Alléluia et beurre de cacahouète ! Je m'y retrouve un peu mieux, même si c'est assez difficile à comprendre avec toutes leurs flèches à la con qui se croisent. Mais alors que je regarde peinard, j'ai pas le temps de bitter quoi que ce soit qu'un coup de feu retentit et mon beau plan dans son cadre vole en éclat. Je regarde en direction de là où vient le coup de feu pour découvrir un peloton armé et prêt à faire feu. Inutile d'indiquer la grossièreté sortie de ma bouche à cet instant, juste avant que je ne file dans le couloir de droite, évitant une razzia de plomb. Bon, autant continuer dans cette direction, vu que je n'ai pas vraiment d'autres alternatives.
Ainsi commença un véritable show à la Benny Hill où il ne manquait plus que cette foutue musique qui rend cinglé et le passage en avance rapide pendant qu'on se court après comme des abrutis. Après une dizaine de minutes à déambuler, je finis quand même par trouver la réserve. Entendant les bruits de pas de mes poursuivants résonner dans les couloirs, je ne prends pas la peine de réfléchir et m'enferme dans celle-ci. Là, plongé dans le noir, j'appuie sur l'interrupteur et ô miracle : les objets ayant appartenu à tous les détenus sont entreposés ici. Moins de dix secondes plus tard, je le vois alors, là, plié soigneusement, toujours impeccable : mon imperméable, au-dessus de mes autres vêtements. Papa est rentré à la maison les enfants, et ce soir, la bonniche va prendre sévère ! Du moins, c'est ce que je me dis en enfilant mon apparat avec élégance. Allez, c'est pas tout ça, mais y'a des Marines qui attendent de prendre des bons coups de pied au train !
Ni une ni deux, j'entends qu'on court juste devant la porte, pas la peine de réfléchir. Un grand coup de taloche dans celle-ci et elle sort de ses gonds, envolant au passage les quatre arsouilles qui passaient devant. Bon, par contre, voir les seize autres un peu éberlués en me voyant sortir ainsi vêtu, avec un air bien confiant sur le visage, pas stressé du tout, c'était un peu jouissif. Mais ça ne le fut pas très longtemps, car une seconde plus tard, tout le monde levait à nouveau son fusil vers moi. Et merde, j'ai beau avoir retrouvé ma classe, je ne suis pas immortel bordel ! Arrêtez de tirer deux secondes et battez-vous en homme bande de gougnafiers ! A nouveau je cours en évitant les balles qui ricochent un peu partout, pour finalement arriver à une intersection où une porte retient toute mon attention. Les cuisines ? Bonne idée ! Se faire un casse-dalle alors que je suis à la diète depuis un moment reste un bon plan. Je m'engouffre donc dans l'entrée et bloque celle-ci en coinçant le manche de la hache destinée à être utilisée en cas d'incendie, entre les deux poignées de la porte.
Bon, bien sûr, j'ai maintenant seize guignols qui tentent de me défoncer tout ça assez bruyamment. Mais pour passer outre une hache en acier, ça va leur prendre quelques minutes. Je me pose alors en face de la porte, sortant mon paquet de clope de ma poche pour finalement m'en griller une. En levant un sourcil perplexe, je cherche quand même s'il n'y a pas de quoi passer le bon temps, genre une petite bouteille de scotch. Mais finalement, après mes recherches, je ne tombe que sur du vin. Ma foi, je saurais m'en contenter, mais je suis tout de même un poil déçu. Qui plus est, difficile d'apprécier la boisson quand on a des sans-gênes qui jouent du tambour avec la porte. Il était temps de leur apprendre la vie quand même. Toujours aussi décontracté, je commence à allument l'ensemble des gazinières. Les quatre immenses machines servant à la restauration de toute la prison se mettent alors à siffler légèrement, laissant l'air vibrer sous l'effet du gaz libéré en abondante quantité. Je jette un rapide coup d'oeil derrière moi et vois que la porte ne va pas tarder à céder. Tant mieux.
Toujours aussi décontracté, je me dirige vers l'autre sortie, tout en posant au passage ma cigarette sur le bord de la table. Je ferme la porte de la deuxième entrée derrière moi et m'écarte du passage qui donne sur celle-ci, restant juste adossé au mur, à côté de l'entrée. Comme je n'ai plus de clope, je m'en sors une deuxième, histoire de déstresser. J'entends alors un gros crac, caractéristique d'une porte défoncée par une horde de sauvages. Bien entendu, l'appel d'air créé facilite l'embrasement lié à la présence d'une forte quantité de gaz et de la clope encore allumée. Ni une ni deux, tout le bousin se met alors à foutre le camp, une détonation importante faisant sauter la porte à côté de moi en laissant s'évader un faisceau incandescent qui part en ligne droite. Alors que les flammes se dispersent, je retire ma cigarette de ma bouche et souffle tranquillement la fumée. Je peux enfin apprécier le silence d'une clope fumée en toute tranquillité... enfin, si on oublie les corps calcinés des seize Marines cuits à point qui crépitent un peu.
D'un air nonchalant, je m'avance dans le réfectoire, débouchonnant ma bouteille de vin pour m'en siroter une lampée. Mais à ce moment-là, voilà-t-y pas qu'apparaît un charmant noble chevalier. Il est là, entre moi et la sortie, prévoyant visiblement de m'empêcher de passer. Si c'est pas mignon la jeunesse. Pour peu j'en viendrais à lâcher un "Kawai" à son attention. Mais l'heure n'est tout de même pas aux réjouissances. Je n'ai pas pour intention de me laisser traîner dans une cellule aussi facilement que la dernière fois. Si tu veux me bloquer le passage mon gars, on est face à un gros problème, et si je dois repeindre les murs avec ton jus de cervelle pour retrouver ma liberté, va surtout pas croire que je m'en priverai... enfin, peut-être quand même, parce que ça tâche et j'aime bien rester propre tout de même.
Sérieusement, qu'est-ce qui est plus énervant en ce bas monde que les fausses-victimes. Vous savez, le genre de personne qui chiale dès qu'elle n'a pas ce qu'elle veut, ou qui vous fait passer pour le méchant alors que c'est elle qui vient de vous démouler un cake dans la colle. C'est sans conteste ce type d'individu qui me fait le plus sortir de mes gonds. Trois ou quatre baffes histoire de les faire tourner sur elles-mêmes avant que, secouées par le choc, elles ne s'aplatissent comme une limande sur le sol, encore en train de se demander ce qui vient de leur arriver. Qui n'a jamais rêvé de faire ça à quelqu'un dans ce genre ? Personnellement, c'est toujours l'envie la plus tentante que j'ai quand je suis face à ce genre de situation. Et c'est pourquoi, vous vous en doutez... j'ai chopé bien fort le poignet de la miss en la dévisageant d'un air pas très enclin à la diplomatie.
Comme on peut s'en douter, la suite est facilement prévisible. Et vas-y que je crie, vas-y que je dis qu'il me fait mal alors qu'il me touche à peine, vas-y que je l'accuse d'être un violeur de la pire espèce qui n'attendait que de te faire boire pour te sauter dessus. Règle numéro dix-sept du code : Un mec en imperméable n'a pas besoin de faire boire une jeune femme pour abuser d'elle. Un mec en imperméable est la classe incarnée et ne force jamais les demoiselles à quoi que ce soit... sauf peut-être en leur racontant des bobards, mais là c'est de l'implicite. Mais bref, toujours était-il que j'avais une espèce de furie dont je tenais le poignet et qui gigotait comme une anguille en hurlant comme une truie qu'on égorge. Naturellement, la première réaction de tout mâle est de prendre le vieux pour un pervers et la fille pour une pauvre petite chatte innocente avec des yeux tout luisants.
Bien entendu, en moins de trente secondes, j'ai droit à une horde de malabars qui s'avancent vers moi avec un air menaçant. Je tente de prendre la chose du bon côté en affichant un visage détendu et essayant de m'expliquer, toujours en tenant ma voleuse par le poignet. Néanmoins, le fait que l'un des protagonistes qui se dirige vers moi n'en vienne à me traiter de pervers juste parce que j'ai un imperméable, et non parce que j'aurai juste un imperméable, me pousse à revoir ma position. Ne jamais, au grand jamais, traiter de pervers quelqu'un de classieux en imper. Il est vrai que l'on a pas le droit de frapper une femme directement. Mais la balancer d'un coup à la tronche du guignol qui vous sort une telle énormité, en revanche, c'est différent. Bon, évidemment, ce simple fait déclenche la bagarre générale. D'un seul coup, j'ai six mariolles qui se ruent vers moi avec leurs poings et couteaux brandis en avant. J'ai cependant une réaction excessivement normale : un coup de latte dans la table pour l'envoyer au pif des deux gus en première ligne.
Évidemment, ça fout un peu la bazar, les six choppes de scotch que j'avais commandé se répandant par terre, l'un des autres assaillants glissant maladroitement dessus pendant que ses trois collègues hurlent comme des bœufs en se dirigeant sur moi. Autre réaction simple, je jette ma clope sur le sol, laissant l'alcool s'enflammer. Celui à terre commence à sentir le steak un peu trop cuit alors qu'il déambule comme un perdu en agitant ses bras partout pour sortir de la taverne. Quant aux deux autres qui étaient sur la flaque à ce moment, leurs pompes prennent feu et ils se mettent alors à paniquer comme si on leur indiquait qu'ils avaient oublié de payer leurs impôts avant la date limite. Tout ça pour deux trois flammèches sur les godasses, si c'est pas malheureux. D'un simple geste du pied, je traîne ma chaise avant de la lever et la saisir avec ma main, pour l'éclater sur la tête du premier. Il me reste forcément quelques morceaux de bois dans les mains, le reste ayant pour le moins explosé sur le crâne du pauvre bougre. Je me sert donc des deux bouts de bois pour claquer la tête du deuxième, et enfin me concentrer sur le dernier qui reste.
Enfin, me concentrer... pas vraiment. Le pauvre ignare se retrouve seul, avec son couteau, en voyant ses cinq copains étalés comme des loques dans que je n'ai sorti ma deuxième main de ma poche. Je vous laisse imaginer que la direction qu'il a pris suite à cette constatation était celle opposée à la mienne. Secouant lentement la tête de droite à gauche en soupirant, je me dirige tranquillement vers la sortie quand l'espèce de morveuse aguicheuse se relève pour me menacer en ramassant un bout de bois de la chaise explosée, genre l'amazone face à un mec civilisé alors qu'elle n'en a jamais vu. Okay ma poule, je veux bien être gentil et je pensais t'avoir fait une fleur en t'envoyant juste voler dans le pif de ton camarade, mais là, tu commences sérieusement à m'échauffer les oreilles. Malgré le fait que je lève les yeux au ciel pour lui montrer qu'elle commence à être lourde la guenon, elle se jette sur moi avec un cri de rage très peu féminin. Désolé Xena, t'es pas encore assez douée pour faire mumuse avec moi. Si tu ne comprends pas la manière douce, tant pis pour toi. Je m'avance vers elle alors qu'elle brandit son arme improvisée, faisant alors un tour sur moi-même en plaçant ma paume de main de manière à intercepter son accessoire et dévier sa course sur le côté. Un dixième de seconde plus tard, le mouvement rotatif la fait basculer et je me retrouve nez-à-nez avec quelle, son bout de bois complètement à ma gauche.
Et maintenant, tu vas gentiment foutre le camp de mon champ de vision parce que tu me pompe l'air chérie. Un coup de genou bien placé dans le flanc gauche de la dame la fait décoller pour aller s'encastrer dans le mur. Ce n'est pas dans mes habitudes d'agir ainsi, mais dès l'instant où une dame brandit une arme vers moi, elle aura beau être la plus belle femme du monde, elle risque d'écoper d'un sérieux coup de latte, et pas comme j'aurai voulu lui donner au départ. Poussant une exclamation pour le moins dépitée, je me passe la main dans les cheveux, juste parce que je le vaux bien, avant de saisir mon imper sur les bords et de le tirer d'un coup sec pour bien le remettre. Les gosses j'vous jure, faut tout leur apprendre.
Là où ça se corse, c'est quand je sors du bar pour voir quoi ? Que le mec que j'ai cramé était un officier de la Marine en permission et qu'il a rameuté ses copains après s'être jeté dans l'abreuvoir des canassons. Que le type me fixe en ayant la face à moitié noircie et en serrant les dents est une chose. Que ses vingt collègues armés me mettent en joue, là, c'est une autre histoire. Qu'est-ce que je suis supposé faire dans ce genre de cas ? Me faire les vingt troufions ? Ouais, c'est sûr, j'aurai peut-être pu en latter une bonne partie avant de me barrer en en laissant la moitié en plan comme des nouilles. Mais d'un autre côté, je risquais quoi ? Le mec n'était même pas en service et il m'avait carrément cherché des crosses. Si on en venait à me juger, je prendrais allez... deux semaines au trou ? C'est loin d'être la mort.
Oui mais voilà, le Marine en question est le fils du magistrat de la ville, et ça, j'étais incapable de le deviner. C'est pas comme s'il avait son pédigrée marqué sur son front non plus. Du coup j'ai fait une bien jolie boulette en levant les mains pour me rendre. Le fait de souligner une vague ressemblance entre mon juge et le guignol du côté partie civile a cependant bien amusé la galerie, genre je m'en rendais compte avec un grand "Haaaaaa oui, effectivement". Et bien sûr, les deux semaines sur lesquelles je tablais se sont rapidement transformées en deux ans à la prison de North Blue, au Quartier Général de la Marine dans ce coin paumé. Joie, joie, bonheur et beurre de cacahouète. Voilà donc comment je me suis retrouvé dans l'une des plus grandes prisons de ce monde sans même avoir quoi que ce soit à y redire.
Comment se sont déroulées les choses ? Très bien... en moins de trois jours après mon arrivée, c'est déjà le gros bordel. J'ignore qui a fait quoi, mais ça s'active dans tous les sens, on entend des coups de feu et j'en passe. Finalement, un bruit bien familier résonne au loin, celui des boulets de canon qui chutent indubitablement vers le sol. Vous savez, comme un gros sifflet bien aigüe juste avant qu'un boom ne retentisse. Bah là, en l'occurrence, le boom se produit sur les murs des cellules. Pratique pour ceux qui ont la chance d'être ainsi libérés. Mais pas mauvais bougre, les bagnards viennent aussi libérer leurs collègues encore derrière les barreaux. Ils ne se seraient pas rendu compte qu'à eux seuls ils n'avaient aucune chance par hasard ? Sortant tranquillement, je me dirige dans la direction opposé aux confrères hors-la-loi qui me demandent ce que je fous. Pendant qu'un grand barbu avec des airs de prophète se la joue un peu, de mon côté, je vais récupérer la vraie source de ma puissance, de ce qui fait de moi un homme : mes vêtements bordel !
Par chance, la réserve n'est pas trop loin... enfin, si on fait abstraction du peloton de Marines qui se dirige par ici. Je déambule en tenue de bagnard dans les couloirs, mains dans les poches, comme si de rien. Qu'est-ce que je ne donnerai pas pour une putain de clope et un bon verre de scotch. Mais voilà, j'trouve enfin un foutu plan d'évacuation en cas d'incendie. Amen, Alléluia et beurre de cacahouète ! Je m'y retrouve un peu mieux, même si c'est assez difficile à comprendre avec toutes leurs flèches à la con qui se croisent. Mais alors que je regarde peinard, j'ai pas le temps de bitter quoi que ce soit qu'un coup de feu retentit et mon beau plan dans son cadre vole en éclat. Je regarde en direction de là où vient le coup de feu pour découvrir un peloton armé et prêt à faire feu. Inutile d'indiquer la grossièreté sortie de ma bouche à cet instant, juste avant que je ne file dans le couloir de droite, évitant une razzia de plomb. Bon, autant continuer dans cette direction, vu que je n'ai pas vraiment d'autres alternatives.
Ainsi commença un véritable show à la Benny Hill où il ne manquait plus que cette foutue musique qui rend cinglé et le passage en avance rapide pendant qu'on se court après comme des abrutis. Après une dizaine de minutes à déambuler, je finis quand même par trouver la réserve. Entendant les bruits de pas de mes poursuivants résonner dans les couloirs, je ne prends pas la peine de réfléchir et m'enferme dans celle-ci. Là, plongé dans le noir, j'appuie sur l'interrupteur et ô miracle : les objets ayant appartenu à tous les détenus sont entreposés ici. Moins de dix secondes plus tard, je le vois alors, là, plié soigneusement, toujours impeccable : mon imperméable, au-dessus de mes autres vêtements. Papa est rentré à la maison les enfants, et ce soir, la bonniche va prendre sévère ! Du moins, c'est ce que je me dis en enfilant mon apparat avec élégance. Allez, c'est pas tout ça, mais y'a des Marines qui attendent de prendre des bons coups de pied au train !
Ni une ni deux, j'entends qu'on court juste devant la porte, pas la peine de réfléchir. Un grand coup de taloche dans celle-ci et elle sort de ses gonds, envolant au passage les quatre arsouilles qui passaient devant. Bon, par contre, voir les seize autres un peu éberlués en me voyant sortir ainsi vêtu, avec un air bien confiant sur le visage, pas stressé du tout, c'était un peu jouissif. Mais ça ne le fut pas très longtemps, car une seconde plus tard, tout le monde levait à nouveau son fusil vers moi. Et merde, j'ai beau avoir retrouvé ma classe, je ne suis pas immortel bordel ! Arrêtez de tirer deux secondes et battez-vous en homme bande de gougnafiers ! A nouveau je cours en évitant les balles qui ricochent un peu partout, pour finalement arriver à une intersection où une porte retient toute mon attention. Les cuisines ? Bonne idée ! Se faire un casse-dalle alors que je suis à la diète depuis un moment reste un bon plan. Je m'engouffre donc dans l'entrée et bloque celle-ci en coinçant le manche de la hache destinée à être utilisée en cas d'incendie, entre les deux poignées de la porte.
Bon, bien sûr, j'ai maintenant seize guignols qui tentent de me défoncer tout ça assez bruyamment. Mais pour passer outre une hache en acier, ça va leur prendre quelques minutes. Je me pose alors en face de la porte, sortant mon paquet de clope de ma poche pour finalement m'en griller une. En levant un sourcil perplexe, je cherche quand même s'il n'y a pas de quoi passer le bon temps, genre une petite bouteille de scotch. Mais finalement, après mes recherches, je ne tombe que sur du vin. Ma foi, je saurais m'en contenter, mais je suis tout de même un poil déçu. Qui plus est, difficile d'apprécier la boisson quand on a des sans-gênes qui jouent du tambour avec la porte. Il était temps de leur apprendre la vie quand même. Toujours aussi décontracté, je commence à allument l'ensemble des gazinières. Les quatre immenses machines servant à la restauration de toute la prison se mettent alors à siffler légèrement, laissant l'air vibrer sous l'effet du gaz libéré en abondante quantité. Je jette un rapide coup d'oeil derrière moi et vois que la porte ne va pas tarder à céder. Tant mieux.
Toujours aussi décontracté, je me dirige vers l'autre sortie, tout en posant au passage ma cigarette sur le bord de la table. Je ferme la porte de la deuxième entrée derrière moi et m'écarte du passage qui donne sur celle-ci, restant juste adossé au mur, à côté de l'entrée. Comme je n'ai plus de clope, je m'en sors une deuxième, histoire de déstresser. J'entends alors un gros crac, caractéristique d'une porte défoncée par une horde de sauvages. Bien entendu, l'appel d'air créé facilite l'embrasement lié à la présence d'une forte quantité de gaz et de la clope encore allumée. Ni une ni deux, tout le bousin se met alors à foutre le camp, une détonation importante faisant sauter la porte à côté de moi en laissant s'évader un faisceau incandescent qui part en ligne droite. Alors que les flammes se dispersent, je retire ma cigarette de ma bouche et souffle tranquillement la fumée. Je peux enfin apprécier le silence d'une clope fumée en toute tranquillité... enfin, si on oublie les corps calcinés des seize Marines cuits à point qui crépitent un peu.
D'un air nonchalant, je m'avance dans le réfectoire, débouchonnant ma bouteille de vin pour m'en siroter une lampée. Mais à ce moment-là, voilà-t-y pas qu'apparaît un charmant noble chevalier. Il est là, entre moi et la sortie, prévoyant visiblement de m'empêcher de passer. Si c'est pas mignon la jeunesse. Pour peu j'en viendrais à lâcher un "Kawai" à son attention. Mais l'heure n'est tout de même pas aux réjouissances. Je n'ai pas pour intention de me laisser traîner dans une cellule aussi facilement que la dernière fois. Si tu veux me bloquer le passage mon gars, on est face à un gros problème, et si je dois repeindre les murs avec ton jus de cervelle pour retrouver ma liberté, va surtout pas croire que je m'en priverai... enfin, peut-être quand même, parce que ça tâche et j'aime bien rester propre tout de même.