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Les folles après-midi

Même en y ayant grandi, on se fait jamais complètement à cet endroit. En tout cas, pour moi. C’est vaste, c’est grandiloquent, et ça pue le trop-plein de richesse qu’on exhibe parce qu’on a quelque chose à compenser. Ou qu’on se sent vide. Moi, je comble le vide en lisant. C’est plus simple, et ça donne pas envie de vomir.

Une histoire d’intrigues politiques. Avec des gars hauts-en-couleur, qui parlent en phrases alambiquées et qui passent leur temps à tout faire pour se donner un air mystérieux et supérieur. Tu vois le genre ? Ben aujourd’hui, c’est un peu moi. Je suis assis sur une terrasse, dans un café bien comme il faut de la ville. Pas loin des bureaux. Par habitude, sûrement, parce qu’aujourd’hui, je suis libre. Clope au bec, chapeau bien vissé sur le crâne, je lis sans rien dire, pendant qu’autour de moi ça discute et ça rigole avec une légèreté qu’on trouve qu’ici, parce qu’ici on est loin des problèmes du monde. Je touille mon café nonchalamment, même si ça sert à rien. Je recrache la fumée de ma cigarette par les narines, dans un soupire volontairement prononcé. Il me fait chier, ce bouquin. Je suis bon public, mais là, ces discussions à la con me fatiguent.

Je me fais chier tout court, en fait.

J’ai passé ces dernières années à trimer pour les bureaux, pour pas me retrouver relégué au rang de sbire, puis pour pas qu’on me prenne trop pour un parvenu quand j’ai intégré le quatrième pôle. Je sais pas si j’ai réussi, puis je sais même pas si j’en suis pas un, de parvenu. En tout cas, j’ai fais de mon mieux, et faire de mon mieux ça veut dire que j’avais pas vraiment de temps libre, avant. J’ai plus l’habitude.

Je récupère le journal que le client qui avait son cul sur ma chaise avant moi a laissé traîné, puis je parcours rapidement les nouvelles mondiales. Je tombe sur un article qui me fait rire. Je l’ai même pas lu, mais rien que voir qui l’a signé me fait rire nerveusement. Mon vieux est toujours de service, et je ricane en imaginant le pourcentage de connerie par rapport à la vérité, dans cette colonne. Je prends enfin une gorgée de mon café. Je mise sur un bon soixante pourcent. Le reste me déprime. Je lis les pubs. Un encadré parle du bureau de paris. Je suis à deux doigts de m’y essayer.

Je tire une dernière fois sur ma clope, puis je l’écrase dans le cendrier. Je regarde le ciel, le soleil me perce la rétine. Puis je baisse la tête, pour mater un peu les allées et venues. Je vois un joli spécimen. Elle rigole, son rire me donne envie de gerber, ça me coupe toute envie. Par contre, je remarque quelque chose derrière-elle. Enfin, quelqu’un. Le genre qu’on peut pas vraiment louper, tu vois ? Il a une sacrée dégaine. Et puis il me dit quelque chose, ce gars. Je suis sûr que je l’ai déjà vu passer dans le journal. Ou que je l’ai déjà croisé dans les bureaux, je sais plus. Merde, mémoire à la con. C’est chiant, c’est de loin le truc le plus intéressant qui se passe aujourd’hui. C’est dire.

Il vient vers le café où je suis posé depuis trop longtemps. Je relève le chapeau, puis je lui fais un petit signe de tête. Genre « salut collègue ». Il doit pas me reconnaître, j’ai une gueule trop lambda pour ça. Mais bon.
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- Hé bien, hé bien… Pile le petit oiseau que je voulais voir.

Myosotis toisait Thomas avec son regard malicieux, le même regard qu’un chat qui a repéré un nouveau jouet. L’intéressé releva les yeux vers le diplomate, visiblement surpris que ce dernier ne s’arrête pour effectivement discuter avec lui. Après tout, personne ne s’intéressait jamais aux hommes de l’ombre. On savait qu’ils existaient, on savait qu’ils trimaient d’arrache-pied, mais on s’en fichait du moment que le travail était fait. Il n’y avait aucun honneur à en récolter, aucune gloire à poursuivre, car personne ne se souciait jamais des vulgaires pions qu’on échangeait à volonté. Etait-ce le destin qui avait souhaité qu’un ambassadeur venimeux se penche sur un agent en début de carrière ? Non, évidemment. Le bel androgyne s’était renseigné, un coup de fil à ses anciens collègues du Cipher Pol faisait largement l’affaire. Il savait pertinemment pour qui travaillait Thomas, et il avait longuement attendu le moment pour pouvoir faire sa connaissance.

- Vous vouliez me voir ?

- Vous m’avez bien entendu.

- A quel sujet ?

- Hm, pas ici enfin. Vous devriez savoir que les murs ont des oreilles.

Myosotis minaudait avec une voix on ne pouvait plus mielleuse ainsi qu’un sourire sucré. En se levant pour le suivre, Thomas eut sans aucun doute l’occasion de prendre une intense bouffée de jasmin en plein visage. La fragrance de Myosotis embaumait l’air autour de lui, si bien qu’on pouvait aisément savoir lorsqu’il allait entrer dans une pièce… Il intima à Thomas de le suivre d’un simple geste de la main avant de remonter le grand couloir de dalles marbrées. Les rayons du soleil passaient au travers d’immenses vitres pour éclairer des dizaines de tableaux exposées au mur, tantôt des natures mortes, tantôt des portraits de dignitaires ou de héros. Myosotis les connaissait par cœur, Thomas en fixait certains du coin des yeux.

Ils arrivèrent dans un salon privé avec une méridienne simple ainsi qu’un canapé disposés autour d’une table basse de verre sur laquelle trônait un service à thé. Il semblait y avoir un réseau encore plus virulent que le Cipher Pol au sein des palais de Mariejoie, une armée de domestiques et de serviteurs qui apparaissaient et disparaissaient sans discontinuer. Ils avaient pour mission première de ne jamais laisser une seule pièce sans thé chaud et gâteaux sucrés. Ici, ils avaient laissé du thé à la fleur d’oranger ainsi qu’un assortiment de biscuits au citron et des sablés à la confiture. Myosotis prit place en premier, invitant ensuite Thomas à s'asseoir en face de lui alors que ce dernier restait debout.

- Bien, reprenons. Comme je le disais je voulais m’entretenir avec vous.

- Que me voulez-vous ?

- Mais enfin, ce n’est pas évident ? Comme tous les petits oiseaux, j’ai besoin de votre chant.

- J’ai peur de ne pas comprendre…

Myosotis attrapa la théière en argent avant de verser le breuvage fumant dans deux tasses de porcelaine, sans même demander à son interlocuteur s’il voulait du thé. Il versa délicatement une cuillère de sucre dans la mixture avant de prendre la tasse et la soucoupe entre ses doigts. Le jeune homme reporta son regard perçant vers Thomas tout en conservant son sourire lunaire.

- Hm, soupira-t-il, et moi qui pensais que vous comprendriez la métaphore. Je vais être plus clair : vous êtes au C.P 4. J’apprécierais énormément que vous me teniez au courant de toutes les choses intéressantes qui se passent.

- Au Cipher Pol ?

- Mais non enfin, mon mignon, dans la Marine.

À en juger par l’air qu’affichait Thomas, l’agent mal rasé ne semblait pas s’attendre à une telle proposition. Myosotis avait fait mouche avec l’effet de surprise, quant à la suite… Il avait hâte de le voir.
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