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La solitude du Rossignol



Dans les grandes salles de l'iceberg de Toreshky, une minuscule silhouette trottine sans bruit. Marchant à petits pas pressés en longeant les murs dans des couloirs déserts et glacés. De loin en loin la silhouette s’arrête, presque immobile, tournant la tête de droit à gauche, attentive au silence qui l'entoure et qui nappe le grand vaisseau pris dans la glace depuis que le seigneur d'ivoire l'a abandonné à son plus grand ennemi. La silhouette écoute les craquements de la glace qui recouvre le grand vaisseau comme un linceul, le souffle du vent sifflant dans les pièces désertes, puis apparemment rassuré, elle reprend sa lente progression, quelques pas, une pause, quelques pas...

A chaque arrêt la silhouette se souvient de l'ancien temps. Des temps heureux du seigneur d'ivoire et de sa grande famille de joyeux et terribles pirates. A chaque pièce qu'il traverse il revoit les hommes qui y vivaient, il les revoit rire, chanter, manger ou se battre. Et de loin en loin elle marque une brève pause devant l'une ou l'autre des macabres statues qui décorent les lieux, devant l'un des innombrables cadavres qui sont tout ce qui reste de la grande famille de Toreshki. La silhouette s'en approche, suivant un rituel visiblement familier, tapote la glace à petit coups prudents comme pour éviter d'en abimer la surface, la lustrant de ses mains minuscules ou y collant son visage elle donne l'impression d'écouter, cherchant peut être une trace de vie dans ses trophées macabres, ou essayant de discerner un visage connu dans la congère façonnée par les sculpteurs.

Seule peut être à bord, la silhouette se souvient de ceux qui vivait ici avant, de ses gens qui faisaient de cet endroit un foyer ou il faisait bon vivre, son foyer. Et dont il ne reste plus que des cadavres gelés qu'il essaye vainement de ramener à la vie, des cadavres dont il est le seul à entretenir le souvenir et à chérir la mémoire, dernier vestige de l'époque bénie qui l'a vu naitre et qui disparait chaque jour un peu plus.  

Soudain la petite silhouette s'interrompt, en alerte, abandonnant sa statue pour se ruer vers une anfractuosité dans un mur ou elle semble littéralement disparaitre en un instant, comme fondue dans la matière gelée, juste à temps pour éviter d’être aperçue par les deux sculpteurs qui arrivent dans la salle.

-Je l'ai vu je t'ai dit !
-Tu as vu quoi ?
-Le... Le truc ! Tout petit, et qui rode autour de nous tout le temps, je le sens je t'ai dit, et la on l'a vu !
-Toi tu l'as vu, moi je pense que tu délires. Y'a rien d'autre que nous ici, et certainement pas une petite bête qu'on aurait pas vu depuis plus d'un an qu'on est la.
-Je suis pas le seul à l'avoir vu tu sais ? Y'en a d'autres !
-Après un coup de trop non ?
-Y'en a qui disent que c'est un fantôme !
-Un fantôme ? Non mais t'es sérieux. Tu te souviens pour qui on bosse ? Les fantômes ici c'est nous. On est la terreur des mers, les monstres de glace au service du Malvoulant.
-C'est pas que j'en ai peur, c'est que j'aimerais bien le choper pour lui faire passer l'envie de roder. Ce coin est a nous ! J'aime pas du tout l'idée qu'un truc s'y balade sans qu'on sache ce que c'est.
-T'as qu'a lui tendre un piège ?
-Ah... Alors maintenant il existe hein ? J'ai essayé mais il tombe pas dedans, j'ai pas l'impression que ce truc mange, et il laisse aucune trace...
-Pas de traces, pas de nourritures, et c'est pas un fantôme. Tu sais que la seule solution qui reste c'est que tu sois juste complétement taré ?
-Ouais mais ça je l'étais déjà avant et je le voyais pas !
-C'est pas faux...
-Non en fait, je me demande si ça serait pas... Tu sais ? Ces trucs qui habitent les vieux bateaux...
-Un Klabautermann ? C'est pas mieux qu'un fantôme.
-Je sais pas. J'ai déjà croisé un mec qui m'a dit qu'il en avait vu un. Et l'iceberg est un sacré vieux bateau tu vois.
-Pff, la moitié des gens qui nous croisent seraient prêts à jurer sur la tête de leurs parents qu'ils ont vu des morts vivants, alors niveau crédibilité... Les marins bourrés voient n'importe quoi.
-Hum...
-Allez, arrête de te prendre la tête, tiens, regarde plutôt cette scéne. Classe non ? Je l'ai appelé Treize restent Red ahah; tu vois le jeu de mots hein ? C'est Red, pas raides, rapport qu'ils sont tous congelés mais que lui ben c'est le capitaine Red ! Trop marrant non ?
-Ouais c'est hilarant, ahah...
-Putain t'es chiant aujourd'hui. Allez je me casse !
-C'est bon, t’énerve pas, je te suis...

Les deux silhouettes emmitouflés d'épais manteaux de fourrure tournent les talons pour revenir sur leurs pas, et pendant qu'ils s'éloignent le silence retombe sur le tombeau. Un silence qui s'éternise une longue minutes, puis une autre.

Jusqu'a ce que la petite silhouette en ciré surgisse à nouveau de son trou pour se remettre à trottiner vers le groupe de statue que les mains du sculpteur ont installés le long d'une vaste table de banquet, treize pirates congelés dans une parodie de repas et de partage, fixant de leurs yeux caves une table vide, figés dans dans des postures grotesques et singeant le vivant et les scènes joyeuses qui devaient se dérouler la du vivant du seigneur d'ivoire.

Elle se glisse sous la table, attrape une congère pour se hisser jusqu'au tablier avant de se dresser dessus, comme si elle passait en revue un a un les visages de glace. Jusqu’à trouver celui qu'il cherche, au centre de la céne, grimper sur ses genoux et attraper ses outils, marteau dans une main et clou de charpentier dans l'autre, la silhouette tend l'oreille une derniére fois et commence son ouvrage.

Et pendant que les sculpteurs dorment, sans se douter que dans le vieux navire du seigneur d'ivoire, un esprit malin et nostalgique essaye tant bien que mal de leur nuire, patiemment, un coup de marteau après l'autre, le Klabauterman enfonce lentement son dernier clou dans la glace.
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Tac Tac Tac

Dans les profondeurs du palais de glace, l'écho de bruits lointains résonnent faiblement dans les couloirs gelés.

Tac Tac Tac

Le bruit d'un marteau de charpentier format enfant manié par une main décidée qui a enfin trouvé un moyen de se venger de ceux qui ont détruit son monde et son équipage.

Tac Tac Tac

Chaque coup sur la statue fait voler de nouveaux éclats de glace qui vont se disperser au pied du sculpteur pendant que son travail progresse et que la congère qu'il démolit lentement se creuse peu à peu

Tac

Jusqu’à ce que sous le burin du petit charpentier un nouveau coup ne traverse pas la glace mais une étoffe de tissu.

Une étoffe de tissu rouge.


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Dans les contes le moment ou l’héroïne s’éveille après un sommeil parfois centenaire est toujours un moment agréable, elle est fraiche comme une rose et aussi joyeuse et pimpante au réveil que si elle venait juste de se coucher pour faire semblant et de cligner des yeux avant de se relever.

Ce qui amène une dure et cruelle constatation.

Fais chier. J’suis pas une princesse.


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Si tu souffres, c’est que t’es vivant.

En proie à la mère de toutes les douleurs je lutte pour garder cette bride de pensée cohérente qui parcourt ma tête, et bordel, c’est dur. J’ai l’impression d’avoir été écorché vif, ou brulé, c’est comme si tout ma peau était piquetée d’aguilles chauffés qu’on m’enfoncerait un peu plus à chacun de mes mouvements, comme si on m’avait jeté une fois de plus dans le bain d’acide de Kindachi et que j’étais en train de me dissoudre à petit feu.

Kindachi ?

Le nom me traverse l’esprit et disparait avant de m’évoquer quelque chose de tangible à quoi me raccrocher et la douleur revient.

Tiens, j’entends un truc maintenant, une sorte geignement étouffé, arythmique, croisement entre les pleurnichements douloureux du type dont ont vient de passer les couilles à l’étau et le sifflement de panier percé de celui dont une lame vient d’ouvrir la gorge et qui tente désespérément de comprendre ou est passé son air… Je connais ça, j’en ai tranché des gorges.

C’est moi qui fait ce bruit la ?

C’est pas bon.

J’ai l’impression que la douleur reflue, ou que je m’y habitue, je ne me souviens pas être tombé mais je sens bien que tout est dur et froid sous ma main alors je dois forcément être par terre. Par terre par terre par terre par terre, je suis tombé par terre, c’est la faute a, c’est la faute à ?

Mona ?

Encore un nom qui disparait avant que je ne puisse m’en saisir pour en faire quelque chose. Non, il faut que je me concentre sur autre chose, sur le sol, sur cette sensation froide et dure, si confortable par rapport à la douleur, je sens le sol. Je le sens contre mon torse, mes jambes, mon visage.

J’ai un corps, j’entends, je gémis de douleur… Tout ne va pas si mal non ?

Allez Red, concentre toi.

Red ?

Celui la je l’ai, c’est mon nom, c’est moi. Et cette fois ça m’évoque des choses, des souvenirs, beaucoup. Trop ?

La douleur reflue. Ou plutôt non, elle change, je me sens comme anesthésié, gourd, malhabile, les sensations s’estompent, qu’est ce qui m’arrive, je perds connaissance ? Ou alors il fait diablement froid.

Il faut que j’arrive à bouger. Que je me concentre. Que je me souvienne.

Que je me souvienne de la douleur.

La douleur.

La douleur et la leçon.

La douleur n’est rien en elle-même. Ce n’est qu’un message…Le message est qu’il se passe quelque chose dans ton corps. La douleur n’est qu’une information, c’est le message qui est important pas l’information. Tu dois recevoir le message et faire abstraction de l’information.

Je me concentre sur ma main, c’est comme si je n’étais plus que ce bout de membre perdu au bout de mon bras, je me concentre sur les sensations qui en émanent, le froid, le dur sous mes doigts. Et dans le silence de ma tête je lui parle pour l’aider à se rappeler lui aussi comment il faisait avant.

Bouge.

Allez bouge.

BOUGE !

J’ai touché quelque chose ! Ma main s’est déplacé insensiblement sur le sol froid et a frappé quelque chose, provoquant un bref éclat de douleur bienvenue, et je l’ai attrapé ! Ahah ! J’ai encore des doigts ! Je tiens quelque chose de froid, de lisse, et qui change sous ma main… Du liquide ?

De la glace !

J’ai trouvé de la glace !


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Je commence à mieux cerner pourquoi j’ai froid. Et aussi pourquoi la sensation de brulure semble diminuer. J’ai pas été passé à l’économe mais plutôt au congélateur, et maintenant que je dégèle je suis en train de mourir de froid…

Ce qui m’étonne c’est que je sois tout seul…

Cela dit. Suis-je vraiment tout seul ?

Relâchant le bout de glace j’explore à tâtons mon environnement immédiat, retrouvant mon corps avec un certain soulagement avant de remonter lentement jusqu'à mon visage avec une question lancinante en tête. Pourquoi je n’y vois rien ?

Du bout de mes doigts je tapote un visage insensible, appréhendant une plaie béante ou une cicatrice moche, mais non, plutôt une couche de glace qui me couvre encore le haut du visage et que j’entreprends de briser à petits coups maladroits et prudent, jusqu'à sentir à nouveau la peau sous ma main, et des paupières intactes et simplement fermées.

Je peux enfin ouvrir les yeux…

Et rien. Ou plutôt pas grand-chose, à la place d’un grand flot noir je distingue maintenant une vague luminescence bleutée, reflet peut être d’un éclairage lointain sur la glace qui m’entoure, mais je reste incapable de distinguer quoi que ce soit. Même ma main que je sais en train de s’agiter mollement juste sous mon nez n’est qu’un vague mouvement flou sur lequel je n’arrive pas à faire le poing.

Rah ! Comment je suis arrivé là ?!

Tout mes muscles tendus par l’effort je tente de prendre appui sur le sol pour me redresser et essayer de m’asseoir, essayant vainement pendant quelques minutes avant de basculer sur le dos et de comprendre soudain ce qui cloche, il me manque un bras ! Quelqu’un ou quelque chose m’a tiré ma prothèse pendant que j’étais congelé, c’est vraiment dégueulasse ! Y’a plus de respect bordel !

Enfin, c’est toujours mieux que perdre celui qu’il me reste.

Haletant sur le dos je commence à discerner des choses, des nuances de flou disons. Ce qui me ramène à la question qui me tournait dans la tête avant que je ne m’échine à bouger. Si ma condition a changé c’est que quelqu’un a du toucher au statut quo qui me tenait congelé. Et si quelqu’un y a touché, que ce soit pour m’aider ou pour me finir, qu’est ce qu’il fout ?

Congelé depuis quand d’ailleurs ?

Non non, pas maintenant ! Je chasse cette pensée de ma tête avant qu’elle ne génère un paquet d’autres questions toutes plus angoissantes et lancinantes les unes que les autres. Pour l’instant il faut penser survie !

Allez Red , survie !

Faisant le vide dans ma tête je me concentre sur mes sensations, les miennes d’abord, tout ces messages que m’envoi mon corps qui se remet lentement à fonctionner, puis sur ce que je reçois de l’extérieur, ce que je touche, ce que je sens, ce que je vois. Et après le point sur mon moi profond, je m’ouvre a nouveau au reste. Déployant mon mantra autour de moi, à la recherche de celui qui ne peut manquer d’être dans le coin..

La !

Pendant une seconde j’attrape une présence fugace, un esprit qui me laisse une impression curieuse, une étrange nostalgie, l’espoir d’un renouveau, une sombre envie de vengeance, et puis plus rien, comme s’il s’était tenu a mes cotés et avait soudain disparu. Et alors que je tends un peu tard la main dans sa direction, c’est pour heurter un objet qui n’est pas de la glace mais que je ramène a moi dés que mes doigts comprennent de quoi il s’agit.

Une outre !

Le goulot heurte ma bouche le temps que je réussisse à saisir le bouchon a pleine dents pour l’arracher et faire couler le contenu à petites gorgée dans ma bouche. Du rhum !

C’est comme boire de la lave en fusion. Je tousse, je crache, mais je continue a lamper a grandes goulées l’alcool qui se répand dans mon corps comme un torrent brulant et bienfaisant, réveillant mon corps gelé comme si je venais de me jeter dans un bain brulant.

Wouah, je ne sais pas à qui appartenait cette outre, mais il y a de quoi réveiller son mort. L’outre est déjà vide mais je peux presque entendre son commandement, lève-toi et marche !
Et comme je ne peux pas vraiment rester là à cuver, j’entreprends laborieusement de basculer sur le flanc avant de tenter de me remettre debout par toute une flopée de positions intermédiaires. Heureusement que mes mouvements m’envoient rapidement heurter un truc dur qui s’avère être un solide pied de table, et qui dans les minutes qui suivent se trouve devenir le plus précieux de mes alliés et un appui sur le temps que je me hisse jusqu'à elle.

J’ai les jambes qui flageolent tellement que je me fais l’effet d’un vieillard impotent, accroché à sa table comme à un vulgaire déambulateur, et un mal de crane suite à l’effort que j’ai l’impression que le train des mers en personne est en train de cogner dans mon crane pour essayer d’en sortir, mais au moins je tiens debout, et j’y vois de plus en plus clair. Je crois même que la lueur que j’aperçois par moment quand je tourne la tête pourrait bien être une sortie et la lumière du soleil, et pour le coup, je suis sur que me dorer la pilule me ferait du bien. Le corps engourdi par l’alcool je baigne maintenant dans un monde un peu flou, mais j’ai vachement moins mal quand je bouge, c’est toujours ça de pris. Par contre j’ai carrément les crocs. Je ne sais toujours pas depuis combien de temps je suis la mais je n’ai plus que la peau sur les os, et avec la barbe que je me trimballe je dois ressembler à un naufragé après quelques mois de famine sur une ile déserte. Et bien qu’on m’ai laissé une table façon banquet, personne n’a pensé à y laisser aussi de la bouffe…

Bon… La tempête dans mon crane s’apaise pendant que je retrouve mon souffle, je lâche ma table pour faire quelques pas hésitants sans tomber. Ok, ça revient, ça revient doucement, mais ça revient..

Attrapant le pied de la table je le relève et le brise d’un coup sec pour me garder sous la main une canne improvisée et un début d’arme, et un pas après l’autre, je me met en marche vers la lumière en tapotant devant moi comme un aveugle.


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Je finis rapidement par trouver un mur et me met à le suivre, traversant ce qui doit être une salle ou un couloir, puis une autre, jusqu'à déboucher enfin dans la lumière, en entrant dans une salle qui ne doit pas être enfouie sous terre comme les autres, mais qui dispose de fenêtres donnant sur l’extérieur, et qui sont autant de puit lumineux qui me permettent de mesurer a quel point je suis encore loin d’y voir quoi que ce soit.

Mais qu’a cela ne tienne, le simple fait de me retrouver accoudé au soleil me fait un bien fou, et le bruit extérieur me permet de noter une nouvelle info, je ne sais toujours pas ce que je fais la et ou c’est, mais en bas de cette fenêtre, il y a la mer !

Je n’ai pas le temps de peser ce que m’apporte cette découverte qu’une présence surgit soudain quelque part en périphérie de la zone que je tente de surveille. Deux types dont l’aura m’est instantanément familière tant ils ressemblent à ceux que j’ai côtoyés tous les jours ces dernières années, violence, cruauté, mort, appât du gain et opportunisme…

Des pirates !

Des pirates qui arrivent tout droit dans ma direction.

Difficile de tendre une embuscade correcte quand on a qu’une vague idée du décor, heureusement que le mantra m’assure au moins de voir ma cible. Retrouvant les contours de la pièce je me glisse le long du mur jusqu'à tomber sur un couloir qui doit être celui par ou vont déboucher les pirates. Et comme dans un mauvais escargofilm, caché derrière un coin de mur, j’attends.

Et quand l’aura du premier pirate surgit juste devant moi, je lui colle a hauteur de visage un grand coup de pied de table dans la gueule. Choc sourd, bruit satisfaisant d’écrasement et d’os qui se brisent, le type s’effondre et continuant a brandir mon arme improvisée façon massue, je l’abats d’un grand coup vertical dans la gueule du suivant, qui visiblement aussi surpris que le premier n’a que le temps de lever pour se protéger avant que je lui défonce le crâne.

La batte c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas…

Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, en plissant les yeux comme une taupe en plein soleil, j’arrive maintenant a discerner de mieux en mieux des trucs, assez en tout cas pour me pencher sur les corps, trouver un couteau sur des ceintures, et m’assurer que ces deux la ne m’emmerderont plus en leur ouvrant la gorge d’une oreille à l’autre.

De toute façon, si c’était des amis, ils seraient venus me chercher !

Délaissant la lame et continuant à me vautrer dans le sang je procède a une fouille en règle des deux lascars dans une recherche frénétique d’un truc a bouffer pour contenter un estomac qui crie famine et des étourdissements qui se font de plus en plus malaisant après cette débauche d’effort et de violence, j’engloutis avec un plaisir complétement déplacé un reste de biscuit et une lanière de bœuf salé abandonné dans une bourse, avant de devoir me rendre à l’évidence, ces types n’ont pas de vivres sur eux et je reste sur ma faim grandissante et l’estomac tordu de crampe douloureuse…

Il faut que je bouffe un truc tout de suite !

Cela dit, maintenant j’ai un couteau…

Et après tout…

L’homme est un loup pour l’homme non ?


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On se sent quand même mieux le ventre plein. Bon, j’ai eu peu de mal a manger au début, mais en commençant par du format liquide avant de passer à plus consistant j’ai finalement réussi à tout garder. Et je me sens enfin plutôt bien…

D’autant qu’avant de passer par la fenêtre les deux pirates m’ont aimablement laissés leur fringue, et que je me retrouve donc nanti d’un épais manteau de fourrure qui me laisse enfin savourer une chaleur douce et constante, c’est fou comme de petits conforts peuvent s’avérer précieux quand on sort d’un hivernage dans les glaces…

Et pendant que je remonte peu à peu dans ma pyramide des besoins, ma vue elle aussi continue à s’améliorer. Je ne suis plus aveugle et le flou a maintenant diminué et s’éloigne progressivement pour me permettre de distinguer plutôt bien tout ce qui se trouve sous mon nez. Une excellente nouvelle, j’ai eu ma dose d’histoire héroïque sur des sabreurs manchots, mais manchot et aveugle, ça commence à faire beaucoup d’handicap pour ce genre de métier à risque.

En tout cas je me sent presque d’attaque et pendant que je repars dans les couloirs de la forteresse, je commence à faire le point sur ce que je sais. Déjà je sais maintenant où je suis, je me souviens maintenant de la dérouillée que m’a mis le Malvoulant, et sachant d’où je viens, il est facile d’extrapoler l’endroit où j’ai atterri. Il n’y a finalement pas tant de forteresse marine et d’iceberg glacé aux mains du plus dangereux des fils de pute du nouveau monde. J’ai donc été congelé pour l’exemple ou pour servir de trophée sur le tombeau du seigneur d’ivoire en personne, maintenant aux mains de son dernier ennemi…

Impossible de savoir combien de temps j’ai perdu dans la glace, je présume qu’un des pirates aurait pu me le dire, mais c’est maintenant un peu tard pour leur demander. Heureusement, il en y en plein d’autres à bord a qui je pourrais poser toutes les questions que je voudrais quand j’aurais fini de récupérer mes yeux…

Maintenant que je ne suis plus tiraillé par le froid et la faim, et que mes muscles reprennent du poil de la bête après leur long sommeil, j’ai pu me concentrer un peu mieux sur mes atouts maitres. Etendant mon Haki aussi loin que je pouvais, j’ai une image assez précise de l’occupation du navire grâce aux étincelles de vies que je perçois aux alentours. D’après ma position par rapport aux autres j’ai l’impression que j’évolue dans ce qui doit tenir lieu de soutes a ce gigantesque navire, et que l’équipage du Malvoulant qui l’occupe est plutôt réparti sur les niveaux supérieurs. Certainement installés dans les quartiers les plus classes, réservés aux capitaines de la flotte d’ivoire d’autrefois pendant que le reste du navire n'est plus qu'une immense mise en scéne de cadavres congelés en mémoire de la derniére rivalité du seigneur d'ivoire...

L'ambiance est salement morose, mais c'est finalement plutôt un bon point pour moi qui peut évoluer tranquillement dans les sous-sols. Je suis à peu prés sur de pouvoir démolir n’importe quel pirate me passant à portée de la main, mais je n’en sais pas assez sur les chefs de Teach qui pourraient roder dans le coin.

Au moins j’ai bien fumé le géant…

Cela dit, il ne serait pas passé dans ces couloirs.

C’est en cherchant l’équipage de Teach que j’ai retrouvé la présence que j’avais senti à mon réveil. Celle qui m’a certainement laissé son outre de rhum salvatrice et qui du coup, pourrait bien être lié à mon étrange réveil. Mais encore une fois, difficile de se focaliser dessus, c’est comme essayer de retenir de l’eau à la main, on croit qu’on la tient bien, et fuitt, elle vous file quand même entre les doigts…

Décidant d’abord de l’ignorer je suis parti un peu au hasard vers les hauteurs, jusqu'à ce qu’elle réapparaisse si prés que j’ai bien cru pouvoir la voir en tournant la tête, mais rien, elle réapparaissait déjà hors de ma portée…

C’est quand elle m’a fait le coup pour la troisième fois que j’ai commencé à me dire qu’elle y avait peut-être un message derrière ses provocations timides…

Un message ? Ou une trace à suivre ?

Et depuis je m’enfonce peu à peu dans les profondeurs du navire à la poursuite de ma chimère. J’espère qu’il n’y a pas d’illusion possible avec le haki comme avec la vision, sinon je risque d’avoir bientôt l’air salement paumé…

Mais non, je vois mal comment je pourrais imaginer ce genre de truc… Il y a quelque chose qui file devant moi en s’arrêtant régulièrement pour m’attendre, je le sens qui s’impatiente, qui s’inquiète, et même si je suis incapable de mettre la main sur ce que c’est, il n’y a aucun doute, c’est la !
Et quand il disparait soudain sans laisser de traces et me laisse dans le noir, je me met immédiatement a chercher la raison qui l’a poussé à m’amener la. C’est quand même pas juste pour se foutre de ma gueule comme un sale petit scout poussant un aveugle sur la route hein ?
Alors je cherche, et soudain, je sens que je touche au but.

Dans la salle ou nous venons d'arriver l'ambiance n'est plus au macabre burlesque et aux statues d'exposition du pandémonium de glace, non, ici on est plutôt dans le solennel et le recueillement. L'unique cercueil de glace qu'on a trainé la a tout d'un autel votif, et une main anonyme a visiblement passé un certain temps a orner le coin d'un paquet de petites offrandes. Je dois m'approcher pour évaluer la nature des offrandes. Une statuette de bois, une paire de dés, quelques berrys, des pièces de tissus, un poignard brisé, rien qui n'ait de valeur autre que sentimentale entre le cadavre et celui qui s'en occupe.

Me redressant je me penche sur le cercueil, et c'est au moment ou je tends la main pour en vitrifier la glace que je le vois. La, dans l'ombre du bloc, presque à mes pieds. Une petite silhouette en ciré et dont le visage est indiscernable, une silhouette que n'importe quel marin peut reconnaitre et nommer.

Un Klabauterman.

L’âme du plus grand navire du monde est en train de me tendre quelque chose qu'elle lâche dans ma main offerte. Un clou. Un clou dont la pointe a été usée a force d'assauts répétés sur une surface trop dure.

Et tout comme je devine qui se trouve dans la tombe de glace que le Malvoulant n'a pas réussi à violer, je devine ce que le Klabauterman attend de moi maintenant.

Que je paye ma dette.

Ou plutôt, que je la fasse payer à d'autres...



Dernière édition par Red le Mer 18 Nov 2020 - 2:35, édité 3 fois
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J'ai accepté le pacte du Klabautermann, ma vie contre sa vengeance. Et en échange le petit gnome m'a entrainé plus profond encore dans les entrailles du navire. Jusqu’à ce que mon haki me fasse prendre conscience que loin de l'équipage du Malvoulant, d'autres êtres vivants se terraient dans les profondeurs.

Des alliés ?

En tout cas l'esprit me laisse à un mur seulement d'un espace grouillant de vie. Et n'ayant aucune raison de ne pas lui faire confiance, j'entreprends de chercher à tâtons la porte qui doit être dissimulée quelque part, et l'ayant trouvé je me mets à tambouriner a coups de poings contre la paroi, jusqu’à ce qu'on m'entende et qu'on m'ouvre.

[...]


-Red ça ne me dit rien !
-A moi non plus.
-Faudrait demander au dernier arrivé, il est ou Ned ?
-Corvée de creusement de chiottes.
-Allez le chercher !
-Dites c’est quoi ces trucs la ?
-Du Yéti.
-J’adore, vous en avez encore ?
-La bas.
-Et les vieilles gazettes ?
-On en a utilisé pas mal pour faire du feu…
-Vous avez brûlé les journaux ?!
-C’était ça ou les meubles…
-Et puis on cherchait surtout des infos sur Elise…
-Capitaine ? Vous me cherchiez ?
-Ah Ned. Parfait ! T’es arrivé en quel année toi déjà ?
-1626, y’a un peu plus de deux ans.
-Bon, un type nommé Red ça te dit quelque chose ?
-Ouais pas mal. C’était un type de la marine qui a changé de camp. Un officier. Il est devenu pirate et il a monté une île flottante géante pour les frères de la cote. J’y suis passé avant de partir sur le nouveau monde, chouette coin.
-Et il était balaise comment ?
-Plutôt balaise je crois. Il s’est battu contre deux amiraux, il a mis a sac Navarone. Il a même volé un groove a shabondy pour l’ajouter a son île.
-Tu saurais le reconnaître ?
-Je crois qu’il avait un chapeau, rouge le chapeau.
-Ah…
-Pourquoi ?
-J’ai pas retrouvé mon chapeau en me réveillant, a tous les coups on me l’a piqué.
-Vous êtes le capitaine Red ?!
-Ouais.
-C’est ce qu’il dit, mais nous on le connaît pas et on est pas sûr. Tu le reconnais ?
-Ben, la c’est difficile c’est sûr. Il ressemble pas vraiment à l’affiche…
-De quoi tu te souviens sur ce capitaine Red ?
-Il s’habillait en rouge !
-Ok, ça ça colle, mais c’est un peu mince…

Une fois tambouriné longuement à la porte j’ai fini par avoir droit à une réponse, une porte ouverte, un canon pointé dans la gueule, et une invitation a rentrer me mettre au chaud. Après une rapide discussion il s’est avéré que je venais de trouver la planque d’anciens pirates du seigneur d’ivoire, rescapés des différents jeux de guerre organisés par le Malvoulant, et attendant visiblement avec une impatience vachement usée par les années, que la sorcière de glace, dernière des grands noms de la flotte, finisse par venir dans le coin pour les sauver. A vue de nez une bande de types plutôt sympa, un peu méfiant évidemment, mais le cœur sur la main. A peine constaté que j’avais plutôt une gueule de prisonnier que de maton, et les voila qui m’ouvrent leur garde-manger et leur pharmacie de fortune… Non, vraiment des pirates sympas.

-Hé mais ?! Vous avez tout bouffé ?!
-Ah, y’avait que ça ? J’ai encore un poil les crocs…
-On a des rations de survie de la marine, mais personne arrive à les manger.
-C’est une question d’habitude, envoie les rations.
-Vous voyez ?! Un ancien marine ! ça colle aussi !

Bon, évidemment, le souci c’est que la plupart sont la depuis si longtemps qu’ils n’ont jamais entendu parler de moi, et que mon look et ma forme sont a des lieux de faire de moi un atout convaincant. Alors quand je leur ai fait part de mon intention de manger sur le pouce avant d’aller casser des gueules, forcément ils ont pas été emballés par l’idée. Et ça fait maintenant deux heures qu’ils discutent pour savoir si je suis un type de confiance, et surtout si je suis assez coriace pour qu’ils me suivent en grillant leur couverture.

-Dites vous y voyez rien non ?
-Pas grand-chose. Ça doit être à cause de la glace..
-C’est bien ça, tenez, on a un truc pour ce genre de problème, mettez vous ça sur les yeux.
-Putain ça daube ! C’est quoi ?
-Une recette de Drum, c’est fait à partir de graisse de baleine, parfait pour scruter la glace pendant des heures sans se griller la rétine.

Et je dirais que pour l’instant les avis divergent. Les vieux sont la depuis si longtemps qu’ils ne voient pas d’inconvénient a attendre un sauveur connu, la sorcière de glace pour ne nommer qu’elle. Les autres commencent a en avoir marre de bouffer froid et de sucer de la glace, et comme certains me connaissent de nom, ils semblent prêt à tenter le coup malgré le fait que ma présence ici indique manifestement que fort ou pas, quelque part sur mon parcours je suis tombé sur un os…

-Bon. Alors vous en êtes ou ?
-On est pas encore fixé.
-Mais de toute façon il faut qu’on se décide vite, avec ce qu’il bouffe on pourra pas le garder ici !
-S’il pas assez fort on va juste se faire buter !
-Écoutez les gars, vous avez l’air d’êtres de braves types, vous m’avez filé a bouffer, j’y vois, et très franchement si vous voulez pas venir je comprendrais et je vois pas de soucis a y aller tout seul. Moi tout ce que je dis c’est que ce serait dommage que je parte en vous laissant la alors que vous m’avez filé un coup de main.
-Ouais mais si tu sors et que les types dehors te butent direct hein ?
-Bon, on va faire simple. Vous valez combien en dorikis ?
-En quoi ?!
-Ah ouais je vois. Bon, je vous montre. Qui est le plus fort ici ? Toi ? Toi ? Allez toi. Vas y, frappe dans ma main.
-Je frappe dans votre main ?
-Ouais ouais vas y tape . T’inquiète pas, j’ai le Haki. Tape.

Debout, tendant la paume vers le type que j'ai désigné, je me concentre sur mon haki, et ma main se couvre de noir pendant que la rigidité du Tekkai vient rendre mon avant bras plus solide qu'un bloc d'acier.

Bam... Même pas mal, j'ai pas trop perdu la main la dessus au moins... En tous cas je vois bien que mon nouveau copain a tapé fort, et que visiblement les autres connaissent assez sa force pour trouver impressionnant que je l’arrête d'une main sans sourciller.

-Cinq mille, bon, c'est pas si mal.
-Cinq mille quoi ?
-C'est un truc de la marine, mais il faut surtout pas en parler à Minos, en gros plus t'es fort plus  ton score est haut. La tu vois, t'as cinq mille dorikis, c'est pas mal, mais c'est pas suffisant., donc t'as perdu !
-Ah ouais ? Et toi t'as combien ?
-Moi ? Au moins douze mille.
-N'importe quoi !
-Mais y'a que toi qui sait compter non ?
-Ouais, pratique hein ?
-Et pourquoi on te croirait ?
-Et ben, je peux te frapper et tu me dis ce que t'en pense...

Duel de regard entre moi et le gros dur proclamé qui réfléchit sûrement lui aussi à la force qu'il a mis dans son coup sans succès...

-Ok pour cinq mille.
-Quelqu'un d'autre veux faire mieux ?




Dernière édition par Red le Jeu 19 Nov 2020 - 11:26, édité 4 fois
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Krock le morse est un capitaine pirate un peu frustré. Essentiellement parce qu’il estime à juste titre que d’un point de vue espoirs et piraterie, la vie n’a pas été très juste avec lui. D’abord il a mangé un fruit qui est quand même difficile à vendre. Évidemment les morses sont des animaux magnifiques et puissants, mais comme manger un fruit interdit de nager, posséder le zoan d’un animal marin est loin d’être pratique au quotidien. Sans même parler du fait qu’hurler des ordres clairs à son équipage quand on a la bouche déformée par deux énormes défenses est un exercice tout à fait ridicule.

Mais bon, quand on est un pirate, on serre les dents et on s’adapte. Mais si ce n’était que ça ! Originaire d’une ile on ne peut plus polaire, Krock a toujours pris soin de se distinguer de la masse des pirates en jouant sur le côté glacial, un vaisseau spectral et blanc, des canons glaçants, des cadavres gelés artistiquement disposés sur le pont et dans les mats, et un nom tout trouvé, les Frosts pirates ! Un marketing soigneusement dosé qui a été sauvagement foulé aux pieds quand il s’est avéré que le type qui venait de s’asseoir sur le trône d’empereur pirate vacant s’appelait Frost ! Un type dont l’équipage s’appelle les Sunset ! N’importe quoi… Bref, après une énième attaque et une énième explication sur le thème, « On est les Frosts pirates ! Non, aucun lien avec l’empereur… » il n’était plus question de s’appeler Frost Pirates, et Krock était obligé de se rabattre sur plus classique mais nettement moins vendeur et optait un peu forcé pour un simple « Les pirates du morse ». Un nom que quelques pillages plus tard et un journaliste peu consciencieux écorchait dans le titre de sa gazette et transformait en pirate du monstre… Et moins d’un mois plus tard voila que Teach en personne surgissait en travers de la route de Krock, persuadé que des types appelés les pirates du monstre ne pouvait que bosser pour lui…

Et comme on dit sur Jaya, quand ça fait le bruit du poulet, que ça ressemble à du poulet, que ça a un gout de poulet, mais que Teach te dit que c’est du poisson, alors cherche pas, c’est du poisson…

Et en moins de temps qu’il en faut pour dire « Nous c’est pas monstre, c’est morse » voilà Krock au service du Malvoulant, et statues de glace oblige, catalogué décorateur en chef et responsable de l’iceberg au moment de la prise de la dernière forteresse du défunt Toreshky.

Pas un mauvais poste évidemment, un poste important même. Mais c’est sur que quand Krock pense à ses rêves de capitaine pirate, il se voit plutôt en train de découper au sabre des indigènes exotiques avant d’aller consoler leurs veuves tout en les délestant de leurs trésors, et pas vraiment en train de surveiller des statues sur un iceberg géant…

Mais ce matin, Krock a un sale pressentiment. Il y a quelque chose qui ne va pas, quelque chose de plus que cette casquette de plomb offerte par la longue soirée de la veille. C'est difficile de mettre exactement le doigt sur cette sensation désagréable... C'est comme, comme une impression de menace latente, comme ce que doit ressentir un poisson dans un aquarium en essayant de discerner l'épuisette que le vendeur vient de décrocher du mur. C'est presque comme si le Malvoulant en personne était en train de se pencher par dessus son épaule en se préparant à lui souffler dans le cou le froid de la mort.

-Capitaine !

Et alors que le cri d'alerte valide soudain les craintes de Krock, l'homme qui court vers lui se fige soudain en pleine course comme s'il venait de se faire frapper par une balle et s'effondre de tout son long, bave aux lèvres et yeux exorbités, et le temps de cligner des yeux, une masse de plomb s'abat sur le crane du pirate. C'est comme se réveiller avec la mère de toutes les gueules de bois, comme se faire écraser la tête dans un presse hydraulique ou tenter de défoncer à coup de boule une porte de bunker.

Des sensations qu'un vieux pirate comme Krock sait parfaitement identifier. Quelqu'un à bord vient d'utiliser le haki royal !



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Je remonte des niveaux inférieurs et le Haki fait le vide autour de moi, Je suis comme la pierre qui tombe brusquement dans une mare d'eau croupie et qui remue jusqu'à la vase, et à chacune des vagues concentriques du pouvoir qui émane de moi les hommes s'effondrent, inconscients ou se tenant la tête agités de convulsions et ravagé par une volonté bien plus dure et décidée que la leur, autour de moi les statues de glace se craquellent, se fissurent, les scénettes macabres montés par les sculpteurs s'affaissent, comme si les cadavres des pirates eux même, congelés à l'intérieur, reprenaient vie pour se libérer à leur tour de l'emprise de Teach.

Et suivant le mouvement comme une bande de charognards pistant le prédateur pour grappiller les restes de son repas, les survivants de la flotte d'ivoire marchent sur mes traces et se jettent lames aux poings sur les pirates au sol. Personne n'a hissé le drapeau noir au préalable de l'affrontement, mais Teach n'a jamais fait preuve de beaucoup de pitié avec ses adversaires et ses anciens ennemis n'en montrent pas davantage maintenant qu'ils ont enfin une occasion de se venger. Le sang coule sur la glace, on égorge des types inconscient ou en train de se débattre en couinant de peur comme on matraque des bébés phoques abandonnés sur la banquise ou qu'on équarrit des dauphins coincés sur une plage, et pendant que je monte vers les hauteurs, les salles et couloirs derriére moi virent à l'abattoir le plus sordide et à la salle d’équarrissage, on repeint les murs de rouges, on glisse sur les sols couverts de sang, et une odeurs d'entrailles et de mort vient napper la scéne de carnage.

Devant moi une porte monumentale est resté brisée depuis la derniére bataille qui a ravagé ce bâtiment. Une entrée probablement démolie par Teach en personne et ou je n'ai qu'a me glisser pour trouver la salle du trône de Barbe blanche, ou m'attends sans surprise celui que le Malvoulant a laissé pour garder son trophée. Je n'y vois toujours pas assez bien pour reconnaitre un des lieutenants que j'ai déjà affrontés, mais la silhouette qui avance a ma rencontre est trop titubante pour être un des proches de l'empereur. Ceux que j'ai rencontrés à Thriller Bark avait une volonté trempée dans l'acier par leur maitre, et chacun de ceux la aurait tenu tête a mon haki sans desserrer les dents.

Peut être bien que la défaite qui m'a amené la n'a pas été si complète que ça...

Et puis de chaque coté du capitaine qui s'avance vers moi, deux masses blanchâtres et vaguement humanoïdes se détachent des murs de la salle pour suivre le pirate d'un pas pesant. Fourrures blanche et sale, yeux jaunes, odeur de fauve et de charogne... Je me souviens que Teach avait dressé des yétis au combat. Je sais maintenant ce qu'ils sont devenus.

-Red !

La voix m'est inconnue mais pas la douleur sourde et l'effort qui tendent les paroles du capitaine en face de moi. Je me souviens des migraines laissés par le haki de Toji Arashibourei dans cette vie maintenant si lointaine ou je portais les couleurs de la marine, cette sensation d'avoir le cerveau en train de vous couler par les oreilles. J'ai l'impression d'être un vieil infirme, mais je n'échangerais pas mes douleurs pour la sienne.

-Red ! J'vais... J'vais te crever !

Pas a pas le capitaine et ses sbires monstrueux traversent péniblement l'immense salle dans ma direction, prenant probablement mon silence et mon immobilité pour un aveu de faiblesse. Et quelque part ils n'ont pas tort. Dans mon état, d'ancienne terreur comme Ymiron ou cette salope de sabreuse du démon me mettrait en charpie en un rien de temps. Mais ce type en face de moi n'est pas de la trempe de ces monstres la. Et si mon corps est encore faible, mon esprit lui est intact, et ma volonté toujours aussi forte. Et après tout, je n'ai besoin de rien d'autre.

Mon regard se perd dans le vague au delà de mon ennemi le plus proche et ma volonté va heurter celle des deux yétis à ses cotés. Pendant un court instant d'éternité, la sauvagerie, la haine et la douleur des deux monstres se confrontent a mes propres douleurs, mes propres haines, ma propre sauvagerie. Et devant leur intensité les monstres plient le genou, reconnaissant un nouveau maitre comme ils ont autrefois accepté de se coucher devant le Malvoulant.

Et alors que Krock se prépare à se jeter sur moi, une patte brutale et aussi grosse que lui le cueille dans son élan et l'écrase sur le sol comme on le ferait d'une grosse mouche, avant que le second des yétis ne le saisisse et ne le soulève en le tenant par les jambes, pour lui croquer la tête d'un coup de dents négligent.

Reprenant ma pénible progression, je finis de traverser la pièce pour aller m'effondrer dans le trône de Toreshky.

J'ai l'impression que l'histoire se répète encore une fois, c'est comme si je passais ma vie à m'asseoir dans le fauteuil des autres.

En tout cas, le navire est a nous.


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