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Compensation démesurée

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海 軍

∆ Feat. Ambrosias ∆


Assise le dos contre un banc en bois, Ambrosias regardait la mer s'étendre à perte de vue devant elle. Le port était en pleine effervescence, comme c'était toujours plus ou moins le cas depuis qu'Orange était devenue une terre stérile. L’impossibilité de faire pousser quoi que ce soit avait convaincu plus que ce n'était déjà le cas les habitants à se tourner vers la pêche. Cela faisait la joie des mouettes et chats errants de la région mais la jeune femme n'approuvait pas la chose. Il était évident que les gens devaient manger, mais elle n'aimait pas que cela se fasse au dépend de la vie de centaines d'animaux. Son cigare aux lèvres, elle attendait paisiblement. Depuis un peu plus d'une semaine, la jeune femme, qui était passée en grade, avait vu son patrouilleur lui être retiré. Le Placide s'en était allé, et ses hommes avec lui. Bien sûr, la commandante savait que cela était dans son intérêt. De retour de South Blue après une mission éreintante, elle avait appris que le Lord Althias de Mistoltin avait décidé de lui faire un cadeau immense. Le noble lui avait purement et simplement offert un vaisseau de ligne.


Cette nouvelle avait bien sûr été un choc. Les jeunes officiers comme elle n'avaient pas le droit, du moins en temps normal, de prétendre au commandement de navires de la taille des cuirassés. Ce privilège revenait aux lieutenants-colonels en de rares cas mais aussi et surtout aux commodores. De ce qu'elle savait, son futur navire n'était pas à la pointe de ce qui se faisait et son armement était résolument classique en comparaison des redoutables tourelles de la Marine. Cela n'enlevait bien sûr rien de l'honneur immense qui lui était fait. Ambrosias avait du mal à comprendre le geste d'Althias. Ce bâtiment coûtait vraisemblablement une véritable fortune et même s'il avait confié lui être redevable, elle ne s'était pas imaginé une seconde une surprise pareille.


Après une heure à patienter, elle commença à distinguer au loin les voiles blanches d'un navire. L'impressionnant Béluga ne tarda pas à faire son apparition. Bouche bée, la commandante observa le bâtiment effectua sa manœuvre d'amarrage. En bon vaisseau de ligne qui se respectait, il était tout simplement immense et armé jusqu'aux dents, si l'on pouvait dire ainsi. Suite à un rapide comptage, la jeune femme estimait qu'il devait y avoir au moins une cinquantaine de canons par bordée. Même en l'absence de tourelles rotatives, c'était tout bonnement effarant. La puissance de feu du Béluga, bien qu'elle soit très classique, était tout bonnement stupéfiante. Comme une enfant le jour de Noël, la militaire s'approcha lentement du quai où le bâtiment était en train d'accoster. Un grand nombre de lamaneurs avaient été réquisitionnés pour l'arrivée au port du vaisseau. De nombreux bouts volaient et ne tardèrent pas à être accrochés sur les différentes bittes environnantes. Quand l'imposante coupée du navire fut déployée à terre, une femme d'une grande beauté et aux cheveux blancs posa le pied-à-terre. Elle salua rapidement Ambrosias et se mit au garde-à-vous avant que cette dernière ne lui rende la politesse.



« Lieutenant Ligéia, à vos ordres Commandante.


- Repos. Enchantée.


- Moi de même, ravie de faire votre connaissance. »



Ambrosias tendit sa main et la sirène s'en empara. Avant que le Béluga n'arrive à Orange, l'officière avait eu l'occasion de consulter les dossiers de ses futurs subordonnés. Si elle n'avait pas su ce qu'était en réalité la femme aux cheveux blancs, elle ne l'aurait clairement pas deviné.


« L'équipage est prêt, si vous voulez bien me suivre. »


Hochant simplement la tête, la vétérinaire emboîta le pas au lieutenant. Pour la première fois, elle monta à bord de son bâtiment. Une véritable foule attendait la nouvelle capitaine. À peine mit-elle le pied sur le pont qu'ils se mirent au garde-à-vous tels un seul homme. Les centaines de jeunes recrues attendaient avec disciple, ce qui impressionna la grande brûlée. Ambrosias se mit elle aussi au garde-à-vous, suivi par le lieutenant Ligéia.


« Le Béluga et ses hommes sont dorénavant sous votre commandement. »


Terminant sa phrase en saluant, la sirène se vit rendre rapidement l'honneur par sa nouvelle capitaine. Se tournant vers ses hommes, la commandante les détailla longuement en silence. Leur uniforme d'un blanc immaculé ne manqua pas de lui rappeler la laine originaire de Tanuki. À bien y penser et en regardant bien, il devait effectivement s'agir de cela. Cette tenue n'était pas celle traditionnelle des hommes du rang de la Flotte mais l'on y retrouvait malgré tout les signes reconnaissables de la Marine, notamment sa mouette légendaire.


« Repos. Garde-à-vous ! »


La coutume voulait, lors d'une cérémonie, que le plus haut gradé venant de prendre le commandement mette les hommes au repos avant de les remettre au garde-à-vous. Cela pouvait sembler un peu ridicule, mais c'était avant tout symbolique, comme une façon de montrer aux hommes qu'ils passaient d'un chef à un autre.


« Je suis la Commandante Ambrosias. Tout comme ce navire ou vos uniformes, je suis originaire de Tanuki. La Marine et Lord de Mistoltin m'ont fait confiance en me faisant l'insigne honneur de commander ce bâtiment. Sachez que je ne compte décevoir ni l'un ni l'autre. Pour moi, vous travaillerez dur, terriblement dur et vous serez soumis à une discipline de fer. Je ne tolère ni les fainéants ni les revendicateurs. Sortez du droit chemin et vous serez immédiatement sanctionnés ; faites votre devoir avec honneur et efficacité et vous serez récompensés. Nous sommes le visage de la Marine et du Gouvernement Mondial et nul homme sous mes ordres ne saurait leur faire défaut. Par égard pour votre long voyage, je vous accorde la soirée et la journée suivante pour vous reposer. Profitez-en pour vous rapprocher du Lieutenant Kaplan si vous souhaitez des chambres sur base. Sachez également que dorénavant, vous êtes sous l'autorité du Colonel Shoga et vous-mêmes membre de la 473ème division d'Orange. Pour les équipes de garde, préparez le navire à l'appareillage, nous passerons plusieurs jours en mer pour exercice. »


Son discours terminé, la jeune femme se tourna vers le lieutenant Ligéia, elle attendit quelques secondes que cette dernière ne la salue et elle quitta la foule pour avancer vers les cabines de poupe, là où se trouvaient les appartements des officiers. Comme elle avait fini de parler, c'était à présent à son nouveau second de donner les derniers ordres et de les faire rompre par la suite. Bien qu'Ambrosias soit désormais à la tête d'un navire de plus de cinq cents hommes, elle n'allait pas les commander directement. Son second et le quartier-maître d’équipage étaient là pour faire respecter ses ordres. La main sur le manche de Cœur d'Acier, la commandante avançait devant ses soldats silencieux. Bien vite, elle arriva au gaillard arrière et eut droit à plus de calme et moins de regards sur elle. Refermant une magnifique porte derrière elle, elle soupira. La vétérinaire n'était pas habituée à ces choses-là, mais elle allait bien devoir s'y faire.



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海 軍

∆ Feat. Ambrosias ∆


Le Béluga était un grand navire, bien plus que tous ceux qu'avait connu Ambrosias par le passé. Il était un peu du genre de celui du Commodore Achab, un marin implacable qui lui avait sauvé la vie par le passé. La jeune femme se demandait si elle était bien légitime pour commander un tel bâtiment alors qu'elle n'en était qu'au grade où l'on commençait plutôt éventuellement à diriger des croiseurs. Elle avait rendu quelques bons services à la Marine, c'était vrai, mais de là à être récompensée de manière si démesurée ? Plus elle y réfléchissait, plus elle se rendait compte que ce n'était pas le Gouvernement Mondial mais bien Althias qui venait de lui faire un cadeau d'une immense valeur. Pourquoi la Marine aurait-elle refusé la proposition du noble de Tanuki ? Elle n'était pas perdante dans l'affaire, bien au contraire. Continuant d'avancer, la jeune femme monta quelques échappées pour se rendre à la plus grande cabine de poupe. Il était de coutume que la plus en hauteur fasse le tour du gaillard et appartienne au capitaine. Le Béluga ne semblait pas faire exception à cela. Arrivant devant l'entrée magnifique de ses appartements, la vétérinaire poussa la porte pour y entrer.


L'endroit était tout bonnement immense. Un bon nombre de personnes auraient pu vivre dans cette pièce une fois en mer et elle serait la seule à en profiter. Un bureau imposant trônait fièrement au centre de la cabine, proche des vitres de poupe. La chaise du capitaine ressemblait plus à un trône en velours qu'un simple siège. Un secrétaire de qualité était dans un coin ainsi qu'un nombre absurde de rangements en tous genres. Même le lit semblait à la fois grand et confortable. La pièce était décorée dans des tons rouges, or et blanc, à l'image du Béluga lui-même. Tout le mobilier donnait une impression de faste et de luxe, bien loin des standards habituels de la jeune femme. Certes, elle gagnait bien sa vie, mais elle était loin de pouvoir se payer elle-même de telles extravagances. Bouche-bée, elle était tellement absorbée par la découverte de son nouveau chez elle qu'elle ne remarqua pas de suite la présence dans la cabine d'un homme.



« Comme on se retrouve. »


Manquant de sursauter, la jeune femme se retourna vers la personne qui venait de s'adresser à elle en jetant un regard noir et en manquant de dégainer son arme. Le principal intéressé leva les mains en l'air en signe de reddition.


« Sergent-chef ? Que faites-vous ici ?


- Surprise. J'ai reçu un coup de main de votre nouveau second. Une jeune femme charmante.


- Lieutenant Ligéia, pas de familiarités.


- Toujours aussi drôle n'est-ce pas ?


- Vous n'avez pas répondu à ma question.


- Je suis votre nouveau quartier-maître.


- Pardon ? Vous n'étiez pas censé rester sur le Placide ?


- C'est ce qui était prévu à la base, mais j'ai demandé à être muté sur votre nouveau bâtiment.


- Pourquoi ?


- Pour vous, Commandante. Après les choses qu'on a vécues ces derniers temps, je me voyais mal naviguer avec quelqu'un d'autre. Et puis j'ai un cadeau.


- Un cadeau ? Ce n'était pas nécessaire.


- Oh si. Regardez ça. »



Dario se leva du fauteuil mural sur lequel il s'était installé pour avancer vers une grande armoire. Quand il l’ouvrit, Ambrosias découvrit une vingtaine de rats bien confortablement installés. Ils avaient à boire, à manger, des coussins et de quoi faire leurs besoins. Le luxe pour tout rongeur qui se respectait. Leur chef se leva sur ses pattes arrières et fit quelques coups de tête en l'air comme pour saluer la vétérinaire.


« Snick !


- Hahaha, c'est bien moi, avec toute la bande.


- Je suis vraiment ravie de te voir, mais je ne comprends pas, tu n'étais pas censé conduire les tiens à terre pour y refaire votre vie ?


- Bah, en fait on s'est dit qu'on était bien avec toi, alors pourquoi pas rester ? »



Les autres rongeurs montrèrent bien vite leur approbation. Cela aurait peut-être été idiot pour certains, mais la jeune femme était réellement émue. Tenant son rang malgré tout, elle contint ses larmes de joie et se retourna vers Dario.


« Merci, sergent-chef. Merci beaucoup.


- Je n'ai pas votre don pour communiquer avec eux, mais je sais pas, j'ai senti qu'ils voulaient revenir avec moi. C'est pas que les apprécie particulièrement, vous savez bien, mais ils me faisaient comme de la peine.


- Vous avez bien agi, je ne l'oublierai pas.


- Ouais, pensez à moi quand on vous parlera de ma promotion alors ! »



Chose assez rare pour être soulignée, plus encore en compagnie de Dario, la militaire laisse échapper un franc sourire. Il était évident qu'ils en avaient fait du chemin ensemble. Les heurts de leur rencontre semblaient déjà loin à présent. À bien y penser, le sergent-chef Paracchini était certainement ce qui se rapprochait le plus pour elle d'un ami.


« Bien, je vais vous laisser prendre possession tranquillement de vos quartiers. Si vous avez besoin de moi je resterai à bord, c'est moi le pigeon qui dirige les équipes de garde ce soir.


- Donnons nous rendez-vous pour le souper dans ce cas.


- Si vous offrez les rafraîchissements.


- C'est entendu.


- Alors à ce soir, Commandante. »



L'homme quitta la cabine en sortant une cigarette avant de refermer l'imposante porte derrière lui. Dario était décidément quelqu'un d'assez imprévisible mais elle se réjouissait de l'avoir à nouveau sous ses ordres. Le navigateur d'expérience qu'il était ne manquerait pas de lui être utile à l'avenir, particulièrement sur un bâtiment si imposant que le Béluga. Après avoir chouchouté quelques minutes les rongeurs de son armoire, la jeune femme alla se poser derrière son bureau. Son fauteuil était si confortable qu'elle aurait pu y dormir sans le moindre mal. Tout ici était bien au-dessus de ce qu'elle méritait, bien au-dessus de ce à quoi elle était habituée. C'était comme si elle vivait un rêve éveillé. Elle n'arrivait toujours pas à comprendre pourquoi le Lord de Mistoltin avait décidé de se montrer si généreux avec elle. Tout cela n'avait décidément aucun sens.



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