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Suicide assisté - Conclusion

"Je suppose que vous êtes surprise."

"Surprise de quoi ? Je suis Athéna. Vous pouvez le confirmer avec votre contact."


"Mon contact, c'est ça ? Et qui serait donc ce... fameux contact ?"


Les deux révolutionnaires se positionnèrent de part et d'autre de Judith, enfermée dans une salle sans fenêtres, enchaînée au mur par mesure de sécurité. Elle resta silencieuse. Un des révolutionnaires, pensant l'interrogation commencée, fit mine de frapper la marine, mais fut interrompue par Maëllys, La Dame Blanche de Boréa, qui lui fit un signe discret de la main.

Judith resta impassible. Elle n'en était pas à son premier rodéo, et était absolument entraînée pour ces cas de figure. Le calme était le maître mot de cette situation, et gagner du temps l'objectif ultime. Les informations du document de Strauss ne devaient, sous aucun prétexte, être dévoilées à la Révolution. Surtout que-

"Savez-vous pourquoi saurais-je que vous n'êtes pas Athéna ?"
fit Maëllys, s'asseyant sur une chaise que l'agent de tout à l'heure avait apporté.

Judith bluffa en ironisant. "C'est vrai que je ne me rappelle pas avoir vu votre visage." Maëllys prise de cours par la bravade, ne put s'empêcher de sourire. "L'ironie d'une telle réflexion vous échappe, ma chère. Arthur ?"

Le sus-nommé s'avança et apporta à la jeune femme un porte-cigarette, armé du bâton de cancer éponyme. "Parce que vous voyez," fit-elle en tirant sur l'appareil, "il semblerait que votre visage me soit plutôt familier."

Zola resta silencieuse. Enfin comprenait-elle la raison du quiproquo.
"Madame, peu importe ce que vous pensez, vous vous trompez. Je suis Athéna, et mon infiltration dans la Marine était connu de la Révolution. Vous devriez savoir que-"

Pour la première fois, Maëllys abandonna son ton douceureux pour un beaucoup plus ferme. "Plus un mot, madame Zola." Elle partagea un regard avec celui qui semblait être son assistant, un homme solide qui était non sans ressembler au subordonné de la lieutenante, Franklin.

"C'est donc vrai," fit-elle en secouant la tête, comme déçue.
"Avec tout le respect que je vous dois madame..." commença Arthur avant de penser que la première partie de sa phrase allait entrer en contradiction avec la seconde, la traînant...
"Oui ?"
"Cela est absolument terrifiant. Regardez-la..." Il s'approcha de son visage.
"Cela suffit, Arthur."

Il balbutia des excuses et reprit sa place.

Maëllys ne le montrait pas, mais partageait cette impression. Elle pouvait le voir dans les yeux de Judith. Comme un petit quelque chose de vitreux. Elle se perdit dans ses réflexion et leurs implicationspendant un moment, avant de réprimer un frisson la faisant revenir à la réalité.
"Venons aux faits, madame la lieutenante. Restez silencieuse, si vous le voulez, mais laissez moi vous raconter ma version des faits. Sous couvert de l'assassinat d'un de vos supérieurs, vous vous êtes fait la cible de toute la Marine. Or donc, s'avérait-il, par une sérendipité incroyable, que l'assassinat de ce sieur Strauss avait été commandité par Umbra. Un meurtre revendiqué en avance par nul autre que l'assassin du nom d'Athéna, dont la réputation, semblerait-il, précède cet île, pour des raisons que nous ne parcourrons pas pour l'instant. Au début, par panique, par instinct, vous n'agissiez que par instinct renforçant par là l'authenticité de votre jeu d'actrice, mais plus tard, reprenant vos sens, vous vous décidez de lire le document en question, réalisant que cette affaire entière n'était qu'un moyen pour vous d'entrer et infiltrer la révolution. Je suppose que Strauss est en réalité l'agent du Cipher Pol responsable de l'arrivée de l'amiral Nelson chez nous ?"

C'était au tour de Judith de dissimuler sa consternation. Mais Maëllys y voyait bien clair. Jamais dans l'histoire de l'espionnage n'y avait-il eu un tel échec d'emblée de jeu, surtout pour un complot aussi élaboré. Et surtout-

"La chose est fâcheuse, devez vous penser" , fit  la Dame blanche  en interrompant le flot de pensée de Zola, "comment aurait-elle pu deviner la partie ou j'ai improvisé ? La raison est simple : vous avez fait l'erreur de contacter votre équipage, et de leur demander d'enquêter. Je soupçonne d'ailleurs le contre-amiral d'en savoir plus que ce qu'il ne prétend."

"Chose fâcheuse également, mais pour nous cette fois-ci, car vos marins firent mine de tomber dans une embuscade visant à les faire taire... Pour soutirer une confession à mes collègues, et à ensuite les arrêter. Un réel coup de maître. La révolution de Lavallière n'est plus", fit Maëllys d'un ton pensif, un peu comme si la chose n'était pas aussi problématique pour elle qu'elle ne le semblait. "C'est très embêtant, mais nous réglerons cela plus tard. Et c'est pour ça que je ne vais pas vous tuer."

Maëllys marqua une pause, avec l'intention claire d'attendre la réponse de Judith, qui continuait de la fixer d'un air calme, presque menaçant. Un seul mot mua ses lèvres, mais il suffit amplement. "Pourquoi ?"

"Parce que si ce n'était pas le cas, vous n'auriez pas pu revenir chez la Marine et prétendre que votre mission était accomplie. La faction de Lavallière était problématique. Elle cherchait à attiser le feu tout en se désolidarisant de la Révolution. Vous pouvez rentrer en prétendant être parmis l'un des élements ayant permis d'identifier les révolutionnaires, et ce grâce à votre équipage. Vous rentrerez en prétendant que votre couverture avait été révélée, et que vous avez été identifiée comme étant non pas Athéna mais une agente de la Marine, et, si vous tenez à la vie, vous omettrez mon nom de votre rapport. Nous nous en tirons à bon compte, vous survivez votre mission, et personne ne saura qu'elle n'avait pas été accomplie pour commencer."


Terminée, la cigarette tomba du porte-cigarette et les cendres sur Maëllys. Fortement agacée par la chose, elle donna précipitamment l'ustensile à Arthur et se débarassa des cendres. "Vous avez étudié les documents de Morneplume. Continuez à résister, et des milliers- des millions, mourront. Vous pouvez rentrer chez vous, et continuer vos missions d'infiltrations loin de moi et de Boréa."

Elle quitta la pièce sombre avant de se retourner une dernière fois :

"Oh, et tant que vous y êtes, vous pourriez également chercher une affectation côté de Manshon. J'ai entendu que les Lupertazzis avaient leurs yeux un peu partout; cela vous permettrait d'en savoir plus sur Athéna. Et qui sait, peut-être sur vous également."
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