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Statu quo

Quelque part en mer, sur la route de tous les périls. Voilà plus de deux semaines que le sablonneux voguait à bord d’un cuirassé de la marine et le plus étrange dans tout ça, c’est qu’il n’avait ironiquement rien d’un prisonnier. Penché sur le bastingage, il regardait les flots se fendre sur le passage de l’imposant bâtiment de guerre qui filait droit sur une île sur laquelle il n’aurait jamais pensé mettre un pied : Marineford. L’affaire qui le menait ici n’était autre que l’issue de la Corsair Race, suite à quoi une invitation des plus particulières lui avait été adressée. Alors en escale sur Hungeria, remontant la piste d’un énième pirate à ajouter à son tableau de chasse, il avait été approché par un officier de la marine qui avait officialisé ce qui pouvait être lu dans les journaux depuis quelques jours. Laissant son équipage derrière lui, sous la supervision de Ren et Djaymily, c’est ainsi qu’il avait embarqué seul vers un tournant de sa carrière de forban. Et ce n’est qu’au terme d’une bonne semaine de navigation, d’un passage par les légendaires portes de la justice, qu’il commença enfin à apercevoir les immenses tours de la base G-1 de la marine. En d’autres circonstances, apercevoir cet ensemble d’infrastructures aurait probablement signifié une mort certaine pour le jeune pirate.

Accueillit par plusieurs autres cuirassés, le navire du s’identifièrent et fut escorté dans la baie jusqu’à de longs quais. Même s’il n’avait à priori rien à craindre dans le cas présent, Azerios avait la sensation d’être précipité dans la gueule du loup. Navire appareillé, il fut rapidement escorté par l’officier et une douzaine de soldats jusqu’à la terre ferme. La réputation de Marineford n’était pas usurpée, un nombre colossal de navire de guerre qui mouillaient ici et là, une quantité gargantuesque de canons et autres installations de défense, une chiée de soldats prêts à défendre leur base coûte que coûte. Un endroit qui semblait absolument imprenable de prime abord et très certainement le genre d’endroit d’où un pirate ne revenait pas. Au bout du quai, le sablonneux fut accueillit par un autre gradé qui ne lui était pas étranger puisqu’il reconnu l’officier Vassili Joukov. Les deux hommes avaient en quelque sorte collaboré sur Inari quelques temps plus tôt qui paraissaient représenter une éternité.


Je vous remercie Commandant Earlgrey, je prends la suite.


Le commandant qui avait escorté le capitaine des Sandstorm Pirates jusqu’ici salua respectivement ce qui sembla être son supérieur avant de tourner les talons et de s’éloigner avec ses hommes. Vassili Joukov l’air impassible garda le silence et fit signe à Azerios d’avancer. Tous deux se dirigèrent vers l’imposant ensemble de bâtiment de la marine. Un certain malaise s’installa dans le silence gêné qui fut conservé jusqu’à ce que les portes soient franchies. C’est le pirate qui décida de briser le mutisme ambiant.


On dirait que vous avez parcouru du chemin depuis Inari officier Joukov. dit il en souriant.

C’est Sous-Amiral Joukov désormais. En effet, de l’eau a coulé sous les ponts depuis notre dernière rencontre.

Et toute ascension à un prix à ce que je vois… ajouta le pirate en remarquant l’absence de l’un des bras du gradé.

Pas toutes visiblement. répondit Vassili amer.


De toute évidence, le gradé n’appréciait pas forcément de voir un pirate déambuler sans crainte ici. Désarmé et devant une écrasante infériorité numérique, il aurait été aisée de rayer le nom du capitaine des Sandstorm Pirates de la liste des menaces potentielles. Mais ce dernier semblait déjà bénéficier d’une parfaite immunité. Une relation avec le Gouvernement Mondial qui semblait commencer sur fond de donnant donnant. Après les différents primés capturés ou irrémédiablement neutralisés, le simple fait d’accepter de suivre le commandant Earlgrey parfaitement seul et désarmé indiquait la bonne volonté du sablonneux. S’il souhait rejoindre le corps des Sept Grands Corsaire aujourd’hui, il avait ses raisons et comptait bien s’en donner les moyens. Les deux hommes avalèrent les marches d’un long escalier jusqu’à arriver devant deux portes gardés par un petit groupe de soldats au garde à vous. Vassili se tourna vers le pirate qu’il escortait.


L’Amirale Makuen est retenue ailleurs, vous rencontrerez donc un suppléant. Une fois ces portes franchies, pas question de faire marche arrière. Inutile de préciser qu’il vous faudra faire attention à vos propos.


Azerios hocha la tête, deux hommes firent coulisser la porte pour dévoiler un grand et lumineux bureau. À l’intérieur, assis sur le côté plusieurs gaillards sans uniforme ni appartenance manifeste. En face d’eux, plusieurs gradés qui murmuraient des choses, et si l’homme qui semblait présider cette assemblée était lui aussi parfaitement inconnu, le sablonneux n’eut alors aucun mal à reconnaître l’homme qui siégeait à ses côtés. Un frisson parcouru son corps quand il réalisa qu’il se trouvait ni plus ni moins en présence de l’amiral Shiro Fuuryuko. Principalement réputé pour son grand cœur, l’homme aurait selon certaines rumeurs, montré de la clémence envers plusieurs pirates par le passé. Mais le capitaine des Sandstorm Pirates ne s’y tromperait pas, celui qui se faisait surnommé « Le Sage » n’en demeurait pas moins l’un des meilleurs éléments de la marine. Bras croisés, il garda le silence, fixant le pirate sans sourciller, comme pour lui faire comprendre qu’il avait tout intérêt à se tenir à carreau et c’est l’homme qui présidait qui rompit le silence.


Bien nous allons pouvoir commencer. Veuillez vous avancer.


Le sablonneux fit quelques pas en direction du bureau, suivi de près par un Vassili muet comme une tombe. Certains des gradés ne purent s’empêcher de le dévisager avec une animosité certaine. Il est certain qu’accueillir un homme pour sa consécration qui d’ordinaire devrait finir au bout d’une corde selon vous, n’a rien de réjouissant. L’amiral Furyuuko resta impassible, jaugeant le capitaine des Sandstorm Pirates. Ce dernier pouvait le sentir, le fossé qui le séparait du « Sage », ce n’était pas de la peur mais plutôt de la résignation, face à un tel monstre de puissance, il n’y avait actuellement rien à tenter. Il se contenta de rester silencieux, prenant garde à mesurer les propos qu’il pourrait tenir, sans quoi il pourrait très certainement y laisser sa tête avant même d’avoir pu s’en rendre compte.


Je représente en ce jour l’Amirale Makuen, passons sans attendre à l’affaire qui nous préoccupe. Si vous êtes ici aujourd’hui, c’est parce que vous avez montré votre utilité et votre efficacité dans la traque des ennemis du Gouvernement Mondial. Vous êtes donc résolument prêt à accepter de servir pleinement ses intérêts. annonça le maître de cérémonie d’un ton pompeux en marquant un léger temps d’arrêt.

C’est exact.

Vous avez certainement en votre possession la proposition d’intégration à l’ordre des Schichibukai ?

La voici. répondit le sablonneux en sortant son sésame avant de le poser sur le bureau.


Se saisissant de la précieuse lettre, visée par le fameux conseil des cinq étoiles, l’homme y apposa alors sa propre signature avant de tendre la plume au pirate qui s’en saisit.


En ce jour, devant cette assemblée, en jurant allégeance au Gouvernement Mondial, devant cette assemblée, vous renoncez à tout acte agressif à l’encontre de ses différentes institutions. Vous assurez également votre soutien inconditionnel en cas de nécessité et dans la traque et la capture de leurs ennemis.

Je m’y engage. assura Azerios avec détermination.


Griffant l’encart prévu à cet effet d’un rapide mouvement de plume, le jeune pirate signa la lettre sans aucune hésitation. Il en était convaincu, accéder à cette place au sein des sept puissants corsaires lui ouvrirait bien des portes. Mais avant tout, ce titre lui permettrait de profiter d’une certaine immunité vis à vis de la marine mais aussi d’une impunité toute relative pour le peu qu’il en savait. Avoir les coudées franches sur la route menant à ses objectifs serait un avantage non négligeable, d’autant qu’il pouvait désormais entrevoir la possibilité de récolter une partie des primes de tout rival qu’il éliminerait. Allier l’utile à l’agréable en somme. Lettre de marque officielle signée, le président de l’assemblée la récupéra, avant de la plier pour la sceller à l’aide d’un cachet symbolisant le blason du Gouvernement Mondial. Un goût amer resta un court instant sur la langue d’Azerios, une impression de trahir quelque chose, comme s’il venait de sceller un pacte avec le diable. Mais malgré tout, il le savait au fond de lui, malgré l’étiquette de chien du gouvernement qu’il était en train de se créer, il n’en demeurerait pas moins libre…


La séance est levée à present. Je vous laisse en de bonnes mains afin d’être reconduits hors de Marineford.


Le sablonneux rangea soigneusement sa lettre de marque à l’intérieur de sa veste, hocha la tête en direction de l’intendant et tourna les talons sans demander son reste. Les officiers de la marine présents gardèrent le silence, suivant du regard le sixième corsaire qui quittait la pièce, d’un air méprisable. Ce dernier descendit les marches lentement, raccompagné par Vassili qui gardait le silence.

Raccompagné sur les quais, par son désormais hypothétique ex-rival, le capitaine des Sandstorm Pirates poussa un léger soupire à la vue du cuirassé qui devait le reconduire sur Hungeria, il aperçu alors le commandant Earlgrey qui hocha la tête en sa direction puis il se tourna vers le Sous-amiral Joukov. Ce dernier avait gardé son air impassible et détournait le regard, fixant l’horizon avec dédain.


Faites pas cette tête officier Joukov. Je suis certain que vous auriez préféré voir ma tête au bout d’une pique.. mais on va finalement pouvoir collaborer sans que vous ne risquiez le moindre problème avec votre hiérarchie. railla Azerios.

Je serais étonné de voir ça arriver. Si vous voulez vraiment mon opinion sur la question, vous restez et resterez toujours un pirate à mes yeux.

Tant de cérémonie.. peut être arriverais-je à changer l’opinion que vous avez de moi.

Très peu probable. Au revoir Azerios. soupira l’officier avec un sourire.


Le sablonneux s’inclina de manière ironique comme s’il se trouvait face à un monarque, puis avec le sourire, fit volte face afin de monter à bord de son « taxi ». Peut être recroiserait il la route de Vassili un jour, peut être pas. L’idée de se battre a ses côté n’était pas sans lui rappeler leur courte collaboration sur Inari. Les deux hommes avaient fait beaucoup de chemin depuis ce jour. Un tantinet songeur, la nostalgie laissa place à une excitation certaine. Le frisson de la chasse allait enfin pouvoir être consommer avec une réelle récompense en bout de course, d’autant que pour concrétiser ses différents projets, le capitaine des Sandstorm Pirates allait avoir besoin de Berrys.. de beaucoup de Berrys. Il parcourut rapidement le pont, se frayant un chemin parmi les soldats de la marine qui le fixaient d’une multitude de façon. Certains semblaient terrifiés, d’autres effarés et plusieurs gus croisés avaient dans leur regard une animosité certaine. Le sixième corsaire s’arrêta à hauteur du commandant Earlgrey, une jeune femme aux allures de première de la classe, fraîchement gradée et afficha un large sourire à son attention.


Commandant Earlgrey.. ou allons nous ?

Comprenons-nous bien. Votre statut ne vous donne pas la moindre autorité sur moi ou mes hommes. Ce bâtiment n’étant pas miens, tout ce que je puisse faire c’est vous ramener sur Hungeria.

Je vois… Et si vous me déposiez sur Karantane ? Ça vous ferait moins loin.. Gagnant - gagnant ? railla le jeune pirate.


L’officier poussa un profond soupir et sans rien ajouter s’éloigna en direction du poste de commandement. Le sablonneux se pencha donc sur le bastingage, les yeux rivés sur l’horizon en songeant à sa prochaine destination. Aucune véritable route avait été établie, il avait laissé une partie de ses hommes sous le commandement de Ren qui d’après leur dernière communication par escargophone venait d’atteindre Karantane et une autre partie était probablement non loin, sous la supervision de Djaymily, attendant les ordres. Rallier Ren et se regrouper semblait être la première étape et c’est dans cette optique que le jeune homme contacterai bientôt son équipage pour une nouvelle réunion afin de fêter dignement et officiellement sa victoire à la Corsair Race. L’occasion surtout de préparer ce qui allait suivre… En silence, ce dernier regarda Marineford s’éloigner derrière lui, bien content d’en être ressorti en un seul morceau. Il se fit la promesse de ne jamais plus remettre les pieds ici sauf si la situation venait à l’exiger réellement.

Passant les portes de la justice, il commença à songer à tout ce qui allait suivre, aux différents projets portés par ses compagnons, fier du chemin parcouru par son équipage en 1628, prêt à se jeter à corps perdu en 1629.