[1629] Le Festival de Kiyori

Tandis que le soleil se couche lentement sur Medelin, à l'autre bout du monde, les prêtres du Pont et de la Place de la Déesse préparent une toile blanche géante qui permettra de projeter les images en direct de ce qu'il se passe sur Tetsu Island.

Car ça y est : le moment est enfin venu pour le Festival de fermer ses portes. Demain, les gens partiront, les stands se démonteront et chacun reprendra le court de sa vie comme si tout ceci n'était qu'un simple rêve. Mais l'était-ce vraiment ? Non, bien évidemment. Car la déesse aura béni chacun de ces fervents croyants et tous repartiront avec la foi, qu'elle ne soit qu'une étincelle ou une flamme ardente.

Que ce soit devant les écrans géants ou le temple de la cité des lumières, les touristes venus de chaque mer se rassemblent, s'attroupent et attendent avec impatience ce dernier événement.


Aujourd'hui, Kiyori n'a plus d'enfant que le souvenir de son incommensurable puissance. Car même une déesse doit grandir, et telle une jeune pousse devenant une magnifique fleur, il serait insensé d'ignorer la femme qu'elle est finalement devenue.


La nuit tombe enfin sur Medelin et les escagoprojecteurs s'allument et renvoient en direct les images de la cité du Nouveau Monde dans l'Archipel aux éveillés et Kanokuni. Une foule s'est amassée le long de ce grand escalier qui mène au grand temple de la ville, mais aussi tout le long de la route qui y mène, depuis les grands murs extérieurs de Medelin.

Et c'est là qu'elle attend : Kiyori, la Déesse-Enfant, l'Impératrice des Mers, la femme la plus puissante de ce monde. Elle est là, dans sa tenue de mafieuse qu'elle arbore depuis quelques années maintenant. Droite et fière, elle devance une dizaine de prêtres tenant une gigantesque bannière représentant l'image de la Déesse-Enfant originale, celle qu'elle était lorsqu'elle a conquit le monde et que son culte se répandit sur les mers.


Une mélodie s'élève soudainement du groupe de prêtres derrière elle tandis que certaines dames qui les accompagnent entonnent un chant mélodieux.

Et lentement, à la lumière des lanternes, la Déesse avance, suivit de sa procession. Respectueux, les gens autours se taisent et observent, osant à peine chuchoter sur son passage.

Et finalement, le cheminement de la Déesse est arrêté par une installation maintenue par des prêtres au milieu de la procession. Les prêtres s'inclinent puis tendent leur bras et gracieusement, Kiyori y pose son manteau de cuir avant de récupérer une tenue de soie dans leurs mains. Elle entre alors dans une petite tente drapée de rouge et en ressort une minute plus tard totalement changée. Une tunique de soie rouge fermée par une ceinture à la taille vient de remplacer un t-shirt blanc et un gilet de cachemire bordeaux tandis que le jean fait place à un pantalon gris souple tissé à Kyoshima.

Ses anciens vêtements sont alors rassemblés en une pile soigneusement pliée tandis qu'une torche est apportée à la déesse et que, d'un geste, elle lance celle-ci sur ses anciennes affaires, brûlant ainsi l'ancienne tout ce qui la représentait.

Puis, sans un mot, Kiyori Tashahari se retourne et reprend sa route jusqu'à un nouvel attroupement de prêtres l'attendant patiemment. Et de la même manière qu'elle a brûlé ses vêtements, cette fois, c'est ses chaussures qu'elle doit incendier : passant des bottines en cuir à des chaussures traditionnelles de Shikoka.

Son ascension reprend alors, jusqu'à d'autres prêtres l'attendant au bas du grand escalier du temple. Là, une armure rouge lui est installée sur les épaules tandis qu'un chapeau de paille cerclé de voile est installé sur sa tête, cachant alors son visage au monde entier alors qu'elle commence la montée des marches.

Enfin arrivée au sommet, des servantes s'inclinent à ses pieds et l'accueillent derrière un grand rideau de soie blanc. Ainsi disparue de la vue de tous, le monde retient son souffle tandis que la déesse prépare la fin de sa métamorphose.

C'est finalement deux minutes qui semblent durer une éternité que le rideau tombe au sol et dévoile ainsi la nouvelle Déesse Kiyori Tashahari.