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Aucune bête aussi féroce - Première Partie [Quête : Grimmjack]


  Olivia, toute jeune femme d’à peine vingt cinq ans, sans profession et sans un sous en poche, triturait entre ses mains sales son chapeau de paille. C’était la seule femme dont les cheveux étaient coupés sur la nuque et malgré ses vêtements dépareillés il se dégageait d’elle une aura d’élégance et de classe. Pourtant, elle ne semblait pas le savoir et sa naïveté ne faisait que renforcer l’effet qu’elle provoquait chez les autres passagers. Elle secouait son chapeau afin d’en faire tomber la neige. Les quelques flocons qui s’y étaient attachés tombèrent doucement. Skrik les regardait avec appétit comme quelque chose qui se mange. Depuis qu’il était devenu un agent du Cipher Pole, Skrik était devenu d’une habilité surprenante dans l’art d’imaginer des nourritures. En sommes, son imagination obsédée par la faim lors de ses longs voyages dans des lieux isolés  ne faisait qu’amplifier la satisfaction de manger un bifteck. Il y avait maintenant huit semaines depuis qu’il n’avait pas mangé de viande rouge, saignante. Il se nourrissait exclusivement de poisson frits dans de la graisse bouillante et de pommes de terre ou de fruits de mers, selon ce que la cuisine proposait à bord de ce navire.

  Heureusement pour les chefs à bords, la juridiction du Cipher Pole ne s’étendait pas jusqu’à la critique gastronomique, c’était un point sur lequel Skrik était tout à fait sûr. Autrement, il les aurait fait tous enfermer pour atteinte à… à quoi déjà ? La bonne nutrition ? Lui-même ne pouvait se prévaloir d’un régime alimentaire particulièrement sain en temps normal. Et puis, au fond, Skrik aimait bien ce poisson dégoulinant d’huile qu’on mangeait dans son papier d’emballage. Même la sensation de brûlure quand on le tenait dans ses mains avait quelque chose de réconfortant quand les soirées devenaient particulièrement froides. Quoi qu’il en soit, l’agent Skrik avait en effet d’autre chats à fouetter. D’ailleurs, il aurait sans doute trouvé l’expression particulièrement à propos car sa cible du jour, un dénommé Félix, avait quelque chose de félin dans son attitude et son visage – rond et seulement rehaussé par un petit nez rose – lui donnait l’apparence d’un jeune chat.  

  Et si Félix possédait, à l’image des chats, neuf vies, Skrik entendait bien le vérifier très soigneusement.  Deux jours auparavant, il était enfin parvenu à lui mettre la main dessus alors que la jeune crapule, à la faveur de la nuit, s’était  glissée hors de sa cachette pour chercher de quoi manger. L’occasion qu’un Skrik à l’affût attendait pour mettre hors d’état de nuire ce voleur professionnel qui entendait vendre des secrets gouvernementaux à des organisations révolutionnaires. Autant dire que Skrik ne prit pas de gants. Depuis, Félix était menotté dans une  cabine à peine plus grande qu’un placard à balais et Skrik avait régulièrement besoin de prendre l’air, malgré le froid mordant, pour se soulager des piaillements incessants de son prisonnier.

  Ce soir-là, puisque le froid avait contraint même les plus téméraires à préférer le confort relatif de leurs cabines, il n’y avait presque personne dehors. A l’exception de quelques accros à la nicotine qui bravaient les éléments pour subvenir à leur besoin et d’autres qui, terrassés par le mal de mer, cherchaient dans l’air marin un remède à leurs nausées. Dans ces rares moments d’intimité, comme on peut l’imaginer lorsqu’une centaine d’individus partagent un espace prévu pour la moitié moins, Skrik autorisait au Chat une petite sortie. Bien sûr, après une tentative d’évasion couronnée par une sévère correction il s’était montré plus raisonnable. Mais pas moins bavard, au grand désespoir de Skrik qui pensait naïvement que ses grognements monosyllabique seraient d’une éloquence suffisante pour abréger la logorrhée verbale de son invité.

- … et c’est à ce moment que Claro est tombé du pont ! C’était pas ma faute !

  Perdu dans la contemplation des constellations – belle allitération – Skrik n’écoutait même plus le Chat. Le ciel pouvait se révéler aussi bavard que le Chat, mais il n’apportait pas toujours les réponses qu’on attendait. Skrik en savait quelque chose et le mystère de ses origines ne rencontrait qu’un échos silencieux – bel oxymore – dans la nuit noire. Ignorant d’où il venait, Skrik savait néanmoins où il se rendait et c’était suffisant. Il allait remettre le volubile colis aux autorités – vaguement – compétentes et reprendrait la route pour une nouvelle chasse à l’homme, où que cette dernière puisse le mener.

  S’il y avait eu une horloge à bord, elle aurait à cet instant sonnée minuit. Mais il n’y en avait pas. Skrik n’avait donc pas la moindre idée de l’heure qu’il était alors, mais il savait qu’il était fatigué. Plus exactement, il l’avait compris en baillant une demi douzaine de fois en l’espace d’une minute. Vraisemblablement, le Chat n’était pas affecté par la fatigue et le flot intarissable de mots qui s’échappait de sa mouche aurait pu s’étirer sur des heures entières, entre des histoires de trahison qui n’en était pas, de vol qui n’en était pas et de menace qui, franchement, n’en était pas.

- … qui travaillerait pour Cooper, LE Jan Cooper ! Alors que tout le monde le croyait-

  Brutalement interrompu par une claque derrière le crâne, le Chat n’alla pas au bout de sa phrase. Par ce simple geste, il savait à présent que le mystérieux type qui l’avait attrapé était à bout de patience. Le second avertissement, il le savait par expérience, était sensiblement plus douloureux alors silence radio.

- On va s’coucher.

  En d’autres circonstances, Félix aurait sauté sur l’occasion pour balancer une petite plaisanterie grivoise, mais il y avait quelque chose de profondément castrateur dans le ton qu’il avait employé pour cette simple sentence. Un peu comme un maître s’adressant à son chien… D’un pas traînant, les poignets toujours attachés dans le dos par une paire de menotte, il suivit Skrik jusqu’à leur petite chambre. L’agent avait retiré le matelas – aussi épais qu’une tranche de pain un jour sans – et l’avait installé face à la porte et il y dormirait, empêchant quiconque de sortir de la pièce sans le réveiller. Lui devait se contenter du sommier en bois, humide comme s’il sortait des fonds marins. Avant de sombrer dans un sommeil sans rêve il repensa, comme beaucoup d’autres ce soir, à la belle Olivia. A ses beaux cheveux. A son chapeau de paille…


Dernière édition par Tagata Tai le Mer 1 Mar 2023 - 11:18, édité 1 fois

    Pêche et rodéo en haute mer

    Poursuivant ses aventures, seul et sans navire, Grimmjack se retrouve sur le chalutier d'un vieux marin : Gareth Brook. Celui ci accepta de le déposer à la prochaine île seulement s'il l'aidait dans ses tâches. Seul bémol, Grimmjack n'avait jamais vraiment pêché de sa vie.


    La mer était assez agitée aujourd'hui. Cela me rendait presque malade. Ce n'était pas la première fois que j'embarquais en pleine mer mais quand le vent soufflait si fort et que les vagues se fracassaient contre la coque du navire qui nous transportait cela me faisait toujours un peu drôle.

    Gareth Brook était le capitaine de ce petit chalutier. Il en était aussi le propriétaire et moi ... Son unique équipage. Par intérim en plus. Dites vous bien qu'il n'avait pas choisi le couteau le plus aiguisé du tiroir ! Mais cet échange de service était donnant-donnant. Je l'aidais dans ses tâches journalières, apprenais en même temps un peu plus sur la pêche et la navigation et lui me transportait gratuitement. Enfin gratuitement ... Je travaillais tout de même pour son compte par tranche de 4 heures et ça nuits et jours. Je pense même que le salaire que je pouvais réclamer était supérieur au cout du transport ... C'était un vieux sympathique en moins. Je ne lui faisais pas peur, pour une fois, et il me trouvait même plutôt drôle à m'appeler "gamin" à longueur de journée. Ca, c'était seulement quand il ne criait pas sur moi car je faisais énormément de bêtises.

    Je crois qu'en 3 jours de pêche j'ai fais perdre une centaine de mètres de cordes, effiloché celles du mât, trompé sur bon nombre de poissons lors des tris après un repêchage, perdu le sceau et la serpillère en pleine mer quand je nettoyais le pont ... Et j'en passe ! Pourtant je lui avais dis que nettoyer le bon en pleine tempête n'était peut être pas la meilleure idée ! Avec tout ça, finalement, je pense qu'il perdait plus au change que moi ...

    Aujourd'hui n'était pas un jour particulier. Le vent soufflait de plus en plus et la mer s'agitait. D'après les dire du vieux marin, une tempête s'approchait à grand pas. J'essayais tant bien de mal d'écouter ses consignes en évitant un maximum de provoquer des catastrophes. Tant bien que mal ...

    Le filet que j'avais jeté quelques minutes plus tôt commença à tirer fortement sur le navire. Celui-ci en subit même une secousse.

    - Patron ! J'ai l'impression qu'on à attrapé un gros morceau la !
    - Mais bordel de barbe bleu gamin ! Je t'ai bien dis de ranger les filets quand une tempête se prépare ! On va sombrer avec tes idées farfelues !


    Je partis récupérer le filet quand une nouvelle secousse - bien plus forte que la précédente - me fit trébucher et tomber sur les planches du pont. Je me retourna et vis que le vieux patron Brook s'agrippait du mieux qu'il pouvait à une rambarde de son navire.
    Alors que j'essayais de tirer les filets de toute mes forces je sentis une moue énorme. Je le devina tout de suite : le poisson s'était rapproché.
    Bientôt il sortit la tête de l'eau pour comprendre ce qui lui arrivait.

    Aucune bête aussi féroce - Première Partie [Quête : Grimmjack] One_piece_poisson-300x169

    - Gyaaaah ! C'est un poisson-combattant d'élite ! Ils ne vivent que sur Grand Line et Calm Belt normalement ! Il a du se perdre avec le vent et les courants !

    Ce poisson-taureau était sans doute perdu mais une chose était sure : il était furax ! Le filet de pêche s'était emmêlé dans l'une de ses cornes et devait l'empêcher de nager. C'était surement la cause des deux secousses que nous avions ressentis. Par contre, lui semblait avoir comprit la source de ses maux : c'était notre bateau !

    Et une comme créature intelligente (ou peut-être juste particulièrement violente), la bête se décida à stopper la source de ses problèmes. Pour un poisson-combattant doté de cornes similaires à un taureau la solution est assez simple : foncer dans le tas.
    La première charge fut assez lourde : ses cornes s'enfoncèrent dans la coque du chalutier sans pour autant causer de grands dégâts. Le poisson le comprit et prit un peu plus d'élan avant sa nouvelle tentative.

    - Patron, la faux ! Il faut couper les filets de pêches !
    - J'en aurai bientôt plus avec toutes tes conneries gamin !


    Grommelant, le vieux marin partit tout de même chercher ma faux. Après tout, c'était la meilleure solution. Quand il revint c'était trop tard. Le poisson-taureau fit une nouvelle charge beaucoup plus violente que la précédente. La coque craqua sous l'attaque de l'animal et le navire se mit à pencher à presque 90°. On était pas loin de sombrer. Le plus dure dans l'histoire, c'était que le vieux marin lâcha la faux sous le choc. Ainsi nos chances de s'en sortir s'éloignaient un peu plus ...

    - Raaaah !!! Il ne me reste plus que ça à faire ! Mummy Constrictor Snake !

    Profitant du fait que le poisson soit à ma portée je tenta le tout pour le tout ! Tu voulais jouer avec moi, Grimmjack le célèbre chasseur de prime ? Pas de soucis coco !
    Mes bandages formèrent des serpents qui s'agrippèrent autour de l'animal. J'essaya tant bien que mal d'entraver et de contenir la force de la bête. Ce n'était pas chose aisée. Je m'agrippais de toutes mes forces à la rambarde du bateau pour que l'animal ne m'emporte pas avec lui. Comme soutien, je décida de réitérer ma technique, mais cette fois-ci je visais les parties solides du navire. Ainsi je me retrouvais dans une lutte d'usure avec un monstre marin. Je compris très vite que c'était une super mauvaise idée quand il se mit à tirer de toutes ses forces pour arracher les liens, moi au milieu...

    - La bas ! Un navire ! Tiens bon gamin ! Je vais faire des signaux de détresse !
    - Maaaamaaaaan ... ! Je ne vais pas tenir longtemps !!!


    Je sentis mon corps s'écarteler. Je criais de douleur. Déjà, je n'étais pas un célèbre chasseur de prime du tout. En plus, je ne faisais absolument pas le poids contre cette maudite bestiole ! Ce qui devait arriver arriva : Mes bandages attachés au navire lâchèrent et je fis emporter par la force du monstre marin...

    Je fus secoué dans tous les sens. A vrai dire, à ce moment précis, je ne savais pas trop ce qui m'arrivais. J'essayais seulement de survivre. Un coup j'étais dans l'eau à tournoyer dans tous les sens, l'autre dans l'air à voltiger partout, toujours attaché au poisson. Je repris mon calme et tenta de me rapprocher de lui. Après tout j'étais toujours lié à l'animal, pourquoi ne pas en tirer profit ?

    Par je ne sais quel miracle (ou malheur) je me retrouva alors sur son dos, cornes dans les mains. Le poisson-taureau sautait encore et encore pour me faire tomber... J'étais vraiment en train de faire du rodéo en pleine mer ?! Sur un poisson-combattant d'élite de Grand Line ?! Pourquoi ça tombait toujours sur moi !

    - Gluuugluuugluu ... A l'a... Gluuugluu ... A L'AIIIIIIIDEEEE !!!

    Pitié, monsieur le gentil navire au loin, venez nous aider... Je ne veux pas mourir de cette manière !

    Technique utilisée:

    • https://www.onepiece-requiem.net/t25582-scarecrow-grimmjack
    • https://www.onepiece-requiem.net/t25574-grimmjack-le-chasseur-solitaire
    Une agitation inhabituelle à bord d’un simple navire marchand tira Félix de son sommeil. Il y avait des cris et des gens qui courraient, mais le voleur s’en fichait pas mal après une pareille nuit. Tout son corps était endoloris et ce n’était pas seulement la faute du sommier sur lequel il avait dormi puisque son mystérieux colocataire lui avait flanqué une rouste telle qu’il n’en avait pas reçu depuis longtemps. Quinze ans jour pour jour, réalisa-t-il, depuis qu’il avait fichu le camp du domicile paternel et que ce dernier n’avait pas levé la main sur lui. Depuis ce jour, il avait vécu de larcins, de plus en plus importants avec les années, toujours plus ambitieux. Il réalisa, tristement, que sa carrière venait sans doute d’être abrégée plus tôt que prévu par cet homme et qu’il ne réaliserait sans doute jamais son rêve d’ouvrir un restaurant. La vie d’un tenancier n’était peut-être pas aussi excitante que celle d’un voleur, mais elle était forcément plus agréable que derrière les barreaux d’une prison. Félix s’attarda une seconde devant le miroir cassé qui pendait au-dessus de l’évier et après une toilette de chat, il poussa la fragile porte en bois qui menait à l’extérieur. Félix n’avait pas reconnu son propre reflet.

    Bercé par le roulis du navire et par le bruit des vagues, Skrik avait formidablement bien dormi. Bien sûr il l’ignorait, mais c’était dans son ADN que s’expliquait cette attraction pour la vie en mer et son héritage oublié franchissait parfois la barrière de sa psyché pour se ressentir dans chaque fibre de son corps. L’idée même de s’enraciner quelque part le rendait malade. Pour beaucoup cela semblait bizarre, voire inquiétant, mais Skrik se fichait bien de leur avis. Ce matin-là, alors que les premiers rayons coloraient d’or la ligne de l’horizon, Skrik s’était donc levé d’une excellente humeur et dans le calme qui précédait le réveil des passagers il s’était adonné à ses différents exercices matinaux. Quelques heures de pompes et de séries de pompes plus tard, c’était sur dos trempé de sueur et par les embruns que Félix tomba en sortant de la chambre. Un spectacle qui aurait suffi à faire taire toute velléité de fuite s’il l’avait vu plus tôt…

    - Bonjour, lança-t-il à l’adresse de son geôlier. Vous savez ce qu’il se pas- ?

    D’un mouvement de la tête, Skrik répondit par la négative. Sa bonne humeur n’avait manifestement pas contaminé son amabilité légendaire. Skrik trouva que le Chat avait l’air épuisé, physiquement et mentalement. Privé de sa liberté, il aurait lui aussi le morale dans les chaussettes, songea-t-il. Rangeant sa compassion au placard avec ses envies de steaks et de bière fraîche, Skrik attrapa la crapule dépressive par l’épaule. Sa main lui fit l’effet d’une enclume.

    - On va j’ter un œil.

    Sans qu’ils eurent besoin d’en parler, la nécessité pour l’agent d’infliger au voleur le port des menotte était devenue inutile. La leçon était comprise et de toute façon où aurait-il pu se cacher sur un navire au milieu de la mer ? Les deux hommes se dirigèrent d’un pas leste vers la source des cris et la raison qui les causaient. A la proue, une dizaine de civils s’agitait comme des mouches au-dessus d’une bouse de vache. Armé d’une autorité visible et perceptible à cent mètres, Skrik pouvait les disperser et observer l’étonnant spectacle dont ils étaient tous spectateurs.

    - Ben merde alors ! Vous y croyez vous ?!

    Il n’en cru pas ses yeux. L’agent ôta ses lunettes de soleil, comme si les verres aux reflets orange – cognac avait insisté le vendeur – avaient pu tordre la réalité à ce point. Surprise : ce n’était pas le cas et sa mâchoire s’allongea alors qu’augmentait sa surprise. En soit, le naufrage d’un navire n’avait rien d’inhabituel. C’était dans l’ordre des choses, aussi sûr que tout ce qui monte fini par redescendre, tout ce qui est sur l’eau fini par couler. Du coup, y assister en direct n’était qu’une question de statistique et Skrik s’estimait chanceux d’être de ce côté de la barrière. En revanche, ce qui parvint à figer Skrik de stupeur était un événement autrement plus rare et… bizarre. Un type était littéralement sur le dos d’un gigantesque poisson-combattant et d’ici, on aurait pu jurer qu’il s’adonnait à un véritable rodéo. Skrik pouvait bien essayer de comprendre l’enchaînement des événements qui expliquerait cette situation pour le moins étonnante, rien ne lui venait.

    - J’ai… jamais vu ça. Mais ça me rappel une histoire avec un nain et un ours qui.. Oui, c’est pas le moment…

    Plus loin dans la cabine du capitaine, ce dernier prit la décision de respecter le code de la mer et de venir au secours de ses frères d’armes en périls. Comme Skrik il se félicitait d’être au sec, mais était conscient qu’il pourrait bien un jour se retrouver à sa place. Alors que le navire se rapprochait peu à peu du chalutier, les curieux amateurs de spectacle morbide purent constater que l’énorme créature était attachée au bateau et qu’il l’entraînait par le fond en cherchant à se débarrasser de l’insolent jugé sur son dos. D’un index impératif, Skrik expliqua au Chat de bien vouloir rester ici sans bouger s’il ne voulait pas se prendre une raclée mémoire. Oui, d’un seul doigt. Le message fut bien réceptionné et Félix ne broncha pas d’un poil lorsque Skrik plongea à la mer. Les vêtements de ce dernier dans les mains, il se demandait bien sur quel genre d’énergumène il était tombé.

    Son harpon à la main, Skrik filait comme une fusée en nageant vers l’infortuné type qui hurlait sur le poisson. Depuis le navire, l’agent avait observé une corde qui reliait le navire en perdition à la créature abyssale. Laissant parler pour lui son entraînement d’agent du Cipher Pole, Skrik avait rapidement atteint le chalutier sur lequel il grimpa habilement. Grâce à la lame de son arme fétiche, Skrik découpa rapidement les étranges liens. Même s’il était arrivé plus tôt, il comprit que le petit bateau était perdu et qu’il ne restait pas longtemps avant qu’il ne sombre tout à fait. Le capitaine, quand ils tombèrent l’un sur l’autre, semblait plus furieux qu’effrayé. Son gagne-pain prenait l’eau, c’était compréhensible, mais Skrik n’avait pas le temps d’écouter ses jérémiades.

    - On va sauter, ok ? C’pas une question. Si tu m’lâche, t’es mort. Si t’paniques, on est mort tous les deux.

    Le capitaine n’eut pas le temps de répliquer, l’étranger l’avait brusquement jeté à la baille. C’était franchement pas des manières. En plus, le voilà qu’il se mettait à réduire son précieux bateau en pièces. En effet, Skrik d’un coup de talon bien placé, avait arraché une planche de bois qu’il jeta en sa direction avant de sauter lui-même sans la moindre hésitation. Quant à l’autre homme en prise avec le monstre marin, l’aspect comique mis de côté pour un temps, Skrik ne voyait qu’une solution pour l’aider et d’un jet d’une précision presque diabolique, il confia sa précieuse arme à l’inconnu. S’il était suffisamment courageux, voire téméraire, pour affronter cette bête à mains nues, le secours d’une arme ne serait probablement pas de refus. Et si cela ne suffisait pas, alors Skrik devrait faire une croix sur le seul objet qui le rattachait encore à ses origines. Ignorant cette amère possibilité, le jeune homme attrapa par le col le capitaine désemparé et nagea de toutes ses forces pour rejoindre l’autre navire. Qui deviendrait bientôt une cible si le poisson-combattant se décidait à récidiver…

      Duel d'usure

      1 heure avant tout allait bien, maintenant tout va mal. Avec les bêtises de Grimmjack, un poisson-taureau s'en ai prit au pauvre navire qui le transportait ... Pour finir par faire un rodéo mortel sur son dos ...



      Le flou. Ces quelques secondes me paraissaient des heures entières. J'étais la, accroché à l'animal de toute mes forces, à subir son hystérie. Un coup j'avais la tête en l'air, parfois même à l'envers car il tentait des loopings pour m'éjecter, un coup j'avais la tête sous l'eau. J'avais même prit un thon dans la face qui m'avait particulièrement sonné !
      Je vivais les pires instants de ma vie. Et moi, je restais accroché. De toute façon si je lâchais j'étais cuit. J'allais finir par être un repas bien délicieux pour cette bête maritime...

      On était rentré dans un duel d'usure. Le premier à s'épuiser allait être le perdant ... Et j'étais pas loin de cette situation ! Heureusement, plus mes forces me lâchaient, plus la férocité du poisson-combattant diminuait elle aussi. Qui allait donc gagner cette féroce bataille ?!

      Puis, comme un dessin miraculeux, une arme fonça sur moi. Instinctivement je la saisis. C'était un ... Harpon ? Le temps d'un demi-seconde mon regard se détourna de mon adversaire pour se poser sur celui qui était devenu mon allié. Je vis un homme qui nageais avec le vieux pêcheur dans les bras, en direction du navire que j'avais vu au loin. Miracle ! Les cieux m'avaient écoutés ! J'étais sauvé ! Alléluia !

      Ou peut être un malheur. Car je compris bien après ce fichu poiscaille que ce sauveur avait aussi couper le lien qui le retenait au chalutier. Désormais, plus rien n'empêchait le taureau des mers de s'enfoncer brusquement dans les profondeurs ! Et je vous la donne dans le mille ... C'est ce qu'il fit ...

      Il plongea dans les ténèbres de l'ocean à une vitesse ahurissante. Il comptait bien m'emporter avec moi. Et me tuer par la même occasion. Il ne me restait plus qu'une option valable : lâcher prise.

      Voila que j'étais à une vingtaine de mètres sous l'eau, épuisé et désorienté. La silhouette du combattant disparut dans l'abîme. J'eu l'espoir qu'il allait me laisser tranquillement remonter à la surface. Bien sur, cet espoir ne dura qu'un temps. Une fraction de seconde à vrai dire, quand je le vis réapparaitre me chargeant dessus pour m'embrocher définitivement.

      Gyaaaah ! Vous pensez que j'allais me laisser abattre ?! Impossible ! C'est donc ça que tu voulais poisson-taureau ?! Mettre fin à ce duel ?! Pas de soucis espèce de grosse daurade à cornes !

      Au moment du choc final, j'enfonça le harpon dans un de ses yeux ! Il me propulsa sur plusieurs mètres avant que je lâche prise ! Il n'avait sans doute pas anticiper ça le loustique.! Grimmjack à toujours plus d'un tour dans son sac ! (Merci quand même à ce gentil monsieur qui m'avait sauvé la vie en me prêtant son arme.)

      Il tourna plusieurs fois autour de moi, laissant une trace de sang dans le bleu obscur de la mer avant de quitté définitivement ces eaux. J'avais gagné ! J'étais trop heureux ! Tellement que j'en fis un cri de victoire ! Un peu idiot quand même quand on se situe si profond sous l'eau ... Que j'en perdis une bonne partie de mon oxygène ...

      J'avais l'impression d'avoir gagner contre la mort avant qu'un nouveau challenge s'offrait à moi : remonter le plus vite possible pour ne pas finir noyé ! Seul problème : J'étais complètement déboussolé et je ne savais ni reconnaitre le haut du bas !
      Je commença à paniquer, c'était mauvais, très mauvais ! j'allais vraiment finir par devenir un hors-d'oeuvre pour poisson géant si je périssais de cette manière !
      Pris d'un instinct de survie, je retrouva mon calme. En manque d"oxygène, sans bouger le petit orteil, mon corps commença a sombrer, me guidant lentement vers les tréfonds des océans. Je leva alors ma tête vers l'inverse de cette force mystique et je la vis ! La lumière ! Elle semblait si loin, si inaccessible mais c'était bel et bien la seule porte de sortie que j'avais pour quitter l'étreinte de la mort !
      J'accrocha le précieux harpon sous mon ceinturon et me mit à nager. Nager. Encore nager. J'essayais de faire les mouvements les plus amples et calmes possible. Je devais consommer le moins d'oxygène possible. Cette distance qui me séparait de l'air utile à ma survie ... Elle me semblait être une montagne à gravir.

      Lentement, je m'approchais de la lumière. Les eaux sombres devenaient un brin plus claires à mes yeux. Mon esprit, lui, commençait à chavirer. Je n'étais qu'à ça de la surface ! Finis les gestes amples, je donnais tout ! Mes poumons me brulaient ! Je voyais en trouble ! Mon esprit se perdait ! La seule chose qui restait gravé dans ma tête, c'était cette lumière ! Les faisceaux étaient tout proche, je n'étais plus loin ! Allez, encore un mètre ou deux !

      Je tendis la main pour saisir cette objectif impossible dans un dernier élan d'effort ... Avant de perdre connaissance, lâchant la dernière bulle d'air qui me restait, vaincu par les flots ...




      Dernière édition par Grimmjack le Lun 6 Mar 2023 - 15:17, édité 1 fois
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      Les combats de l’homme face à la nature fascinent depuis l’aube des temps et inspirent les poètes, les peintres et les dramaturges autant qu’ils terrifient des générations successives d’enfants à qui ces défis mythologiques sont racontées. Dans ces affrontements perdus d’avance, c’est l’ingéniosité, la force et la ténacité de l’homme qui seront testés et transcendés jusqu’à l’inéluctable défaite rendue fabuleuse. Les Bajaus, la mystérieuse tribu de Tagata Tai avant qu’il n’oublie jusqu’à son nom pour devenir l’impitoyable Skrik, racontent l’histoire d’un héros qui aurait attrapé la foudre à mains nues pour repousser des torrents de lave. Nommé Toa Maoae, ce personnage légendaire serait même parvenu à contrôler les touts-puissants Rois des Mers pour sauver son peuple. Évidemment, il n’y a pas un enfant qui ne ce soit pas déjà imaginé dans la peau de cet incroyable demi-dieu alors qu’il luttait contre un poisson particulièrement féroce. Et même une fois adulte, il n’y a rien qui leur provoquera autant d’émotions qu’un gladiateur défiant à un lion dans une arène, un trappeur face à un ours au cœur de la forêt ou un un pêcheur affrontant une baleine au milieu de l’océan.

        Alors qu’il tournait le dos au spectacle incroyable qui se jouait à cet instant, Skrik en comprenait néanmoins les grandes lignes grâces aux acclamations d’un public ivre de joie et de sang. Quand un lourd silence s’abattit sur la foule en délire, l’agent du Cipher Pole et le capitaine sans navire n’eurent pas besoin de se retourner ni de parler pour comprendre que quelque chose n’allait pas. Cette fois encore, l’homme s’inclinerait face à la puissance de Dame Nature avant que cette frustration ne le galvanise pour un futur affrontement. Les deux hommes étaient à bout de force quand il arrivèrent au navire, après avoir nagé dans les courants glaciales. Le capitaine, à deux doigt de l’hypothermie, pesait lourd dans les bras de Skrik. L’équipage avait déployés une échelle de cordes qu’ils grimpèrent avec difficultés avant de s’effondrer sur le pont, épuisés et tétanisés par le froid. Au moins, un homme avait été sauvé de l’océan cruel.

        Puis, comme le tonnerre fracassant le ciel, des cris retentirent à nouveau. Le bois du navire vibrait avec les passagers qui trépignaient, hurlaient, encourageaient celui qui avait osé défier l’animal en libérant celui qui était enfermé en lui. Skrik et le capitaine trouvèrent dans cette folie furieuse la force de se relever pour assister au spectacle. Le vieil homme était bien sûr plus agité que les autres et malgré la fatigue, il frappait d’un point rageur le bastingage en vociférant plus fort que tout le monde. Félix, qui s’était approché, aida les deux hommes à se réchauffer grâce à des couvertures usées qu’il avait chapardé en profitant de la distraction. Skrik se sentait prêt à tolérer cet écart de conduite quand la chaleur du tissu l’enveloppa, mais le capitaine qui bondissait et gesticulait dans tous les sens ne remarqua même pas l’attention.

        Sévèrement blessé, colorant l’océan d’un rouge vermeil, le monstre marin semblait enfin vaincu et des cris de joies s’élevèrent dans le ciel. Pourtant, le héros du jour tardait à remonter à la surface et si personne ne le verbalisait, le pauvre reposait peut-être pour toujours dans les abîmes. Un silence plus bruyant que les cris s’empara du navire. Certains perdirent espoir tandis que d’autres tapaient du pieds ou des mains en priant pour un miracle qui tardait à se manifester. Lorsqu’une forme remonta à la surface, on se frotta les yeux dans l’assistance, pour être sûr qu’aucun mirage ne jouait ici un mauvais tour. Quand la forme bougea, le murmure se gonfla comme un ballon pour devenir une rumeur, puis une acclamation. Deux hommes d’équipages, des solides gaillards qui n’avaient pas perdu une miette du spectacle ni l’espoir de voir le héros remporter son duel, se jetèrent à l’eau. Sous les applaudissements, les hourras, les embrassades, ils ramenèrent l’inconnu idolâtré jusqu’au navire. Porté  en triomphe quelques minutes, il fut ensuite déplacé dans une chambre pour être ausculté par un médecin à bord.

      - Ben mon vieux, il plaisante pas çui-là, hein ?
      - Ouais.. ouais, c’est sûr, répondit Skrik en hochant la tête de bas en haut dans un mouvement purement mécanique.
      - J’ai jamais rien vu d’pareil !

        Skrik devait admettre que lui non plus et il était curieux de rencontrer l’auteur de cet exploit qui avait relégué son sauvetage au second plan, si bien qu’il semblait avoir été oublié de tous. L’agent, sans laisser place au débat grâce à son attitude et ses muscles, écarta la foule qui se pressait devant la porte de l’inconnu pour goûter un peu à sa gloire. Avec le Chat et le capitaine rescapé sur les talons, il poussa la porte et entra dans la chambre. Le médecin au chevet du héros n’objecta pas, c’était bon signe. En revanche, il était couvert de la tête aux pieds de bandages. La vache, songea Skrik, le pauvre était dans un drôle d’état.

      - ‘va s’en sortir doc’ ?
      - Euh oui, oui… Il a juste besoin de repos. Les… les bandages étaient déjà là en fait, il a refusé que j’y touche avant de s’endormir. C’est… euh… c’est assez incroyable n’est-ce pas ? ajouta le médecin.
      - ‘croyab’. Doc ? J’tez un œil à lui aussi.

        Sans le ménagement qu’on réserve parfois aux blessés ou aux malades, Skrik poussa le capitaine grelottant devant lui. Il semblait content que l’autre gars soit en vie, mais il était surtout épuisé, diagnostiqua l’expert. C’était bien la peine de faire des études, songea Skrik, pour dire des conneries pareilles. Avec soulagement, l’agent retrouva la deuxième raison de sa présence ici. Ou peut-être la première, l’ordre de priorité de Skrik était toujours difficile à définir. Son harpon était posé contre le pieds du lit, couvert de sang, mais intact.

      - Reste ici, s’ils ont besoin de quequ’ chose tu..
      - Ok chef, coupa Félix. Dos au mur, il jouait silencieusement avec un paquet de cartes oublié ici.

        Skrik tira une chaise à lui et poussa la porte qui menait à l’air libre où l’attendait une foule encore bien compacte, curieuse de connaître les dernières évolutions. Ils comprirent rapidement qu’il n’y avait rien à attendre de cet homme quand il commença à laver consciencieusement son arme sans leur accorder la moindre attention. Une fois propre, Skrik considéra le harpon avec respect. Elle venait d’ajouter une nouvelle créature à son tableau de chasse et le jeune homme entreprit de le célébrer. Il tira un canif d’une poche et grava avec application une figure simplifiée représentant le poisson-taureau en attendant que l’inconnu se réveille.

        Le sauveur

        Grimmjack avait affronté le poisson-taureau et avait survécut. Grimmjack avait affronter l'océan et sans une aide extérieur il y serait passer ...



        Je me retrouvais seul dans le noir. Malgré la faible luminosité autour de moi je pouvais y distinguer cette silhouette. Elle était sombre, ne formant ni un visage ni une entité connue. Elle me semblait familière. Je l'avais déjà vu au Baratie quand je m'étais fais empoisonner. Elle me suivait depuis ma tendre enfance, m'enlaçant tendrement. Elle était aussi la cause de mon rejet de la société : c'était la Mort. Alors qu'elle s'approchait de moi, elle fit demi-tour, sans un mot, sans une explication.

        J'ouvris les yeux dans un crachat douloureux. Je venais de déglutir toute l'eau salée qui s'était logée dans mes poumons. Ils me brulaient, mon corps entier était endolori, mais j'étais soulagé. Soulagé d'être en vie.
        Je ne me comprenais pas vraiment ce qu'il se passait. Je semblais être dans un lit, pas vraiment confortable d'ailleurs, et quelqu'un me parlait. Mon esprit et ma vision étaient encores troubles mais je reconnu vaguement la silhouette d'un docteur. Il tentait d'enlever les bandages. Ma capacité à les contrôler lui en empêchait et Dieu merci, je souffrais déjà assez le martyr comme ça.

        - N'y touchez pas docteur.

        C'était peut être un peu froid comme première interaction. Je venais de subir un horrible sort du destin, ce gentil inconnu allait sans doute me pardonner... Je n'eu pas le temps de le faire moi même car un sommeil profond m'envahis. Ce genre de sommeil réparateur que mon corps me réclamait à haute-voix. Je ferma les yeux et partis dans mes songes, ne me préoccupant pas plus de ma situation.

        ...

        Je me réveilla plusieurs heures plus tard. J'avais l'impression d'avoir dormi un siècle entier. Ma tête était lourde. Je pris quelques minutes à comprendre et à me rappeler de tout ce qui m'était arrivé. Il y avait le vieux marin qui dormait à côté de moi. Lui aussi devait être épuisé de notre journée. Après tout se confronter à une bête de Grand Line n'est jamais facile, surtout pour un vieil homme comme lui.... Minceeee ! Le navire ! Je m'en rendis compte à ce moment précis : j'avais fais couler son chalutier ! Raaaaah, il devait me détester ! Autant le laisser dormir un peu alors ... Je n'étais pas prêt pour recevoir ses foudres à son retour ...

        Il y avait aussi un autre homme présent dans la cabine. Il semblait nous surveiller. Difficilement, je sortis du lit et l'interrogea. Il était claire que ce n'étais pas lui qui nous avait sauvé la mise et surtout qui m'avait sauvé la vie.

        - Excusez moi monsieur, savez vous ou ...
        - Dehors sur le pont, ça serait bien son genre.


        Il continua à jouer avec les cartes dans sa main. Il devait surement savoir de qui je comptais parler. Je le remercia d'un hochement de tête et ouvris la porte.
        Il faisait déjà nuit. Je ne savais vraiment pas combien de temps j'avais dormi mais c'était pour sûr plus d'une dizaine d'heures. Le ciel était magnifique. Les nuages avaient laissés place aux rayons de lune qui éclairaient le navire comme en plein jour. Les étoiles scintillaient de milles feux, dans leur folle danse orbitale.

        C'était alors que je le vis. Il était seul sur le pont, je n'avais aucune chance de me tromper. C'était un brun bien bâti aux cheveux longs le regard fuyant vers l'horizon. Il n'y avait plus de doutes possibles, c'était bien lui que j'avais vu dans la mer tout à l'heure. C'était bien lui qui m'avait sauvé la vie. Je m'approcha timidement.

        - Euh ... Excusez-moi ... Je dois vous remercier de m'avoir sauvé la vie ... Monsieur ... ?

        Mon interrogation visait à connaitre son nom. Après tout, c'était la moindre des choses non ?

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          Une fois n’est pas coutume, la journée se passa sans naufrage épique, sans arrestation musclée et presque sans drame, à l’exception notable d’une fille qui s’était évanouie en apprenant que « le Matador des Mers » était sérieusement blessé et pire encore toujours inconscient. La rumeur, aussi prompte que d’ordinaire à former de nouvelle légende, n’avait pas tardé à trouver ce nouvel épithète pour colporter les hauts faits du héros du jour. Il ne se passait pas une minute sans que son exploit ne soit répété et il semblait même s’amplifier et se déformer au fur et à mesure, tant est si bien qu’à midi le Matador avait chevauché un monstre marin de cent pieds de long et qu’à l’heure du dîner l’on répétait à qui voulait l’entendre que c’était pas moins de cinq bêtes infernales qu’il avait tenu en échec pour protéger une veuve et un orphelin. Le sort de ces derniers était en revanche jeté aux oubliettes, probablement histoire de ne pas compromettre l’authenticité de l’histoire. Même Skrik, qui était au premier rang pour corroborer ou démentir ce qu’on lui répéta toute la journée commençait à douter de ce qu’il avait vu, ou non.        

          De son côté, le Chat profitait de la notoriété de l’inconnu – étrange n’est-ce pas ? - grâce à fameuse théorie du ruissellement. Après tout, il était l’homme qui avait vu l’homme qui. Grâce au laxisme d’un Skrik de très bonne humeur grâce au climat doux et à une journée de repos bien méritée, il pouvait circuler et jouir de ses ultimes moments de liberté. En outre, il s’était trouvé une galante compagnie qui, au moins pour quelques brefs instants, lui ferait oublier l’avenir sordide qui lui était promis. Les femmes se pressaient autour de lui, espérant voler au voleur quelque fragment de la gloire qu’il aurait gagné par une sorte de contagion, mais il n’avait d’yeux que pour Olivia. La jeune femme au chapeau de paille paraissait insensible à ses charmes, immunisée par quelques mystérieuses amulettes et survolait le monde réel comme un oiseau hors de portée de ses griffes. Peut-être y avait-il une leçon à tirer de cela, philosopha le Chat, mais elle lui échappait elle aussi. Après un repas festif, mais qui ne parvint plus à le débarrasser de sa mélancolie, il retourna au chevet de l’héroïque momie. Ce dernier dormait à points fermés, sa poitrine se soulevait doucement au rythme de sa respiration et le Chat s’aperçut qu’il l’enviait. C’était la première fois d’une vie passée à voler autrui qu’il sentit le réel désir, le besoin presque douloureux, de prendre ce qui n’était pas à lui. Cette nuit il ne parviendrait pas à trouver le sommeil, il en était persuadé.

        - Excusez moi monsieur, savez vous ou …

           La nuit était tombée depuis un moment quand l’inconnu se réveilla. Félix, qui jouait aux cartes, sauta presque de surprise quand cette voix venue d’outre-tombe brisa le silence. Curieux personnage, quand même… Et s’il cherchait Skrik, ce dernier ne pouvait être qu’à un endroit.

        - Dehors sur le pont, ça serait bien son genre.

        Le voleur tenta de retourner à son jeu, mais le cœur n’y était pas et la concentration nécessaire à l’exécution d’un simple tour de passe-passe se refusait à lui comme le reflet de la lune sur l’océan. Quand la forme se referma, il jeta rageusement le paquet par terre avant de suivre l’inconnu, espérant que l’air frais apaiserait ses tourments.

          Comme attendu, les deux hommes trouvèrent Skrik sur le pont. Seul non seulement physiquement, mais aussi à un stade qu’on ne pouvait attendre que lors d’une profonde méditation. Il semblait loin, très très loin, à vagabonder parmi les étoiles.

        - Euh ... Excusez-moi ... Je dois vous remercier de m'avoir sauvé la vie ... Monsieur ... ?

          Skrik revint doucement à la réalité. Il n’avait même pas vu le temps passer et c’est d’abord la faim plombant son estomac qu’il remarqua. Avec un mélange de surprise et de soulagement, il trouva debout sur ces deux pieds le farouche guerrier. Un grand sourire se dessina sur son visage, dévoilant une personnalité plus sympathique que Félix l’en croyait capable.

        - La vache ! T‘t’es pas raté mon vieux ! Ah, Skrik, tu peux m’app’ler Skrik. L’chaton derrière toi c’est.. euh…Bref. Y a une promo’ sur les bandages ou quoi ?

          Retrouvant son accent incompréhensible, Skrik retrouva son statut de gros bourrin aux yeux de Félix. L’agent attrapa les deux épaules de l’inconnu et le secoua vigoureusement, comme s’il vérifiait qu’il était entier.

        - Bon, j’ai la dalle alors on va grailler et tu pourras m’raconter ! C’était fou, complètement con, mais putain d’génial c’que tu as fait ! ’fin, sauf la partie où l’bateau d’ton pote a coulé.

          De ses deux mains, Skrik poussa l’inconnu et Félix sans ménagement droit vers le réfectoire où le personnel de bords profitait de leurs quarts pour se détendre et manger un morceau. Par une magie que Félix ne comprenait pas totalement, les types le laissait aller et venir sans discuter et quand ils s’assirent tous les trois à une table, il n’eut pas besoin de dire quoi que ce soit pour qu’un jeune mousse leur apporte de quoi manger. Même s’il s’agissait sans doute des restes du dîner, il y avait largement assez pour eux et le Chat attaqua aussitôt le repas, se surprenant lui-même tant il se croyait incapable d’avaler quoi que ce soit. Skrik, qui avait pourtant visiblement eu l’intention de l’interroger et de bavarder, n’ouvrait la bouche que pour avaler des gros morceaux de patates qu’il arrosait copieusement d’un vin que le Chat jugea à peine bon pour allumer un incendie. Le Chat incapable de retenir la curiosité qui avait pourtant tendance à le tuer, posa la question qui fâchait.

        - Alors, racontez-nous ! Qu’est-ce qui s’est passé ce matin ?!



         

          Skrik et le chaton

          Après son heure de gloire, Grimmjack, à son réveil, décide de remercier son sauveur et part à sa rencontre. La nuit était belle et calme. Tout l'opposé de la journée mouvementée qu'il venait de passer.


          Je ne pu pas m'en empêcher. Je lâcha un petit rire aux mots de mon sauveur. Son accent était vraiment atypique pardi ! Ce n'était pas un rire moqueur, loin de la, plutôt sincère. Il semblait être un type entier et cela me rassura quelque peu.
          Il s'appelait Skrik, c'était un drôle de nom. Un drôle de nom pour un drôle de personnage. Mais je n'avais jamais été dans le jugement. Je ne pouvais pas. Pas après avoir passé toutes ses années rejeté par mes semblables cause de ma maladie et de mon physique.

          - Ah ça ... Euh ... C'est une longue his..

          Je n'eu même pas le temps de finir ma phrase que Skrik me secoua par les épaules. J'avoue, je ne l'avais pas vu venir. Bizarrement, ça faisait son effet. J'étais un peu timide dans ce genre de situation. Et pas sur qu'il ne s'en était rendu compte, mais son comportement avait le don de briser la glace.

          Il nous invita a aller manger, ce chaton et moi, tout en nous poussant vers le réfectoire du navire. Il parla alors du chalutier du vieux marin qui avait sombrer dans les flots ... Raaaaah ! Je commençais à peine à l'oublier ! Comment allais-je payer ma dette à ce vieux monsieur ?! Et comment payer celle de Skrik, mon sauveur ?! C'était bien beau de faire du rodéo sur des monstres marins mais la je m'étais mis dans une sacrée mouise ! J'allais devoir fuir ? Changer d'identité ?! Raaaah mais non ! Impossible ! Et puis, c'est pas comme si avec mon physique bizarre on allait pas me retrouver ... Désespéré, je les suivirent sans dire un mot.

          On s'installa à une table et un mousse vint nous servir. Il me dit discrètement "Vous avez été génial monsieur" avant de partir rejoindre son équipe. Génial, j'en étais pas vraiment sur. Puis c'était pas en étant "génial" que j'allais rembourser le bateau échoué ...
          Le repas avait l'air plutôt copieux, mais je n'avais pas le moral dans mes chaussures, pas assez en tout cas pour me goinfrer comme un cochon. Je me contentais de touiller la nourriture dans l'assiette avec ma fourchette en faisant des ronds, encore et encore ...

          - Alors, racontez-nous ! Qu’est-ce qui s’est passé ce matin ?

          Raaaaah ! Ils ne font que de ressasser le malheur et le désespoir grandissant en moi ! J'en laissa tomber ma fourchette ! Après tout tout, il était normal de demander, ceux qu'ils avaient vus, ce que j'avais subis, n'avait rien d'anodin...

          - Ben ...

          Je laissa une petite pause. Ma déprime se faisait sentir.

          - Tout a commencé à cause de ce filet de pêche ... Je n'en savais rien moi !

          Je planta ma fourchette dans une patate. Il fallait bien que je mange après tout, reprendre des forces ne me ferait pas plus de mal ...

          - Apparemment, il ne faut pas lancer les filets quand la mer est agitée. C'est ce vieux monsieur qui me la dit ... Mais je le répète, je n'en savais rien moi ! J'ai jamais été pêcheur après tout ! J'ai accepté de l'aider dans son travail pour qu'il me transporte à sa prochaine destination !

          Je pris une bouchée de nourriture. C'était pas mauvais. Mais j'avais encore le moral dans les chaussettes, je du donc forcer un peu pour l'avaler, avant de reprendre mon histoire.

          - Puis voila, fallait qu'un Poisson-Taureau-De-Combat de Grand Line je sais pas quoi - perdu en plus - s'accroche à notre filet ... Puis la, c'était la mouise.

          Je repris une bouchée dans la pomme de terre. Elle était vraiment pas mal en fait ! Parler m'ouvrait l'appétit. Avais-je besoin de vider mon sac  ? De me plaindre et de pleurer à chaudes larmes ?! Certainement.

          - Comme vous avez pu le constater, une bestiole de cette taille contre un pauvre petit chalutier, le combat est vite vu ...

          Je commençais à me goinfrer comme mes congénères autour de la table. Mon appétit s'ouvrait enfin à moi ! Alléluia ! C'était peut être ma seule chance de la journée après tout.

          - Alors en tant que brave personne, j'ai tenté de l'arrêter ! J'ai d'abord tirer sur les filets, puis j'ai essayé de les sectionner ! Histoire que le gros poisson nous lâche la grappe ! Mais je n'avais pas ma faux sur moi ! Et ce vieux monsieur la faite tomber quand la bestiole à commencer à charger notre navire ! Impossible de couper les liens, je savais plus quoi faire ! Puis d'autres charges comme ça, le bateau allait y rester !

          Maintenant, on ne m'arrêtait plus. J'étais comme une vieille machine à vapeur. Dur a démarrer, mais une fois que c'est lancé, c'est lancé ! Même le mousse et d'autres membres de l'équipe s'étaient discrètement rapprochés de notre table pour écouter la suite. C'en était devenu trépidant !

          - Du coup, je me suis dis pourquoi pas. Alors J'ai commencé à entraver la bête pour l'épuiser avec ma technique secrète, en attendant que le papi récupère ma faux et coupe les filets. Mais elle était super forte ! Une vraie tonne de muscle cette bestiole ! Alors j'ai réutilisé ma technique secrète pour m'agripper contre le mat ! Sinon j'allais finir dans l'eau avec lui ! Je pensais que ça allait suffire !

          Mon assiette était finie. Sans me rendre compte je la saisis et la tendis au jeune mousse qui était à côté de la table. D'ailleurs, tout l'équipage présent ne m'écoutait plus de manière discrète ... Ils étaient carrément tous autour de la table, certains mêmes assis à côté de nous, complètement captivés par mon aventure ! Le jeune mousse revint le plus vite possible avec une assiette à nouveau remplie pour ne pas louper une goutte de la suite.

          - Mais pensez-vous messieurs ! J'avais sous-estimé la force du machin ! Mes bandages au niveau du mat lâchèrent par la puissance du truc et je fis emporter par la bête dans les eaux ! J'étais toujours relié à lui à ce moment la ! Au début, c'était un sacré bazar !  Et j'étais trainé en haut ! Et j'étais trainé en bas ! Et ma tête tournait dans tous les sens dans la flotte ! J'y comprenais rien du tout !

          Je repris de l'air, et de la bouffe par la même occasion.

          - Alors ni une ni deux, je me suis ressaisis ! Et je commença à m'agripper à ses cornes ! Bon Dieu ! Me voila que je faisais du rodéo sur un poisson-taureau ! C'était une bataille acharnée ! L'homme contre la bête ! Chacun puisant toutes ses forces pour fatiguer l'autre !

          Je m'étais levé sans m'en rendre compte. J'étais à fond dans mon histoire et mon auditoire - qui grossissait à vue d'oeil - aussi.

          - Et que je faisais des loopings ! Et que je sautais sous sa force ! C'était vraiment difficile, j'étais à deux doigts de la rupture !

          J'omis de raconter que j'étais à la limite de pleurer en demandant de l'aide.

          - Et la messieurs-dames ! Accrochez vous bien ! Qui je vis ?! Skrik ici présent ! Sauvant le marin d'une mort fatidique ! Coupant le filet libérant ainsi la bête enragée ! Mais ce n'était pas tout ! Ce héros m'envoya son harpon pour m'aider !

          Tous étaient fascinés par mes propos, moi y compris.

          - Alors la bête plongea dans l'obscurité ténébreuse des océans ! Je n'avais qu'une seule solution, me détacher ! Je n'avais quasiment plus d'air dans mes poumons et je voyais la silhouette de la bête tourner autour de moi, comme le ferait un prédateur autour de sa proie ...

          La tension était à son comble. Un silence régna dans le réfectoire. Tout le monde attendait la suite.

          - J'essaya alors de remonter à la surface. La lumière du soleil semblait si lointaine ! La bête en profita pour me charger dessus ! Elle voulait en finir avec moi, je pouvais même lire la rage dans ses yeux globuleux ! Mais croyez vous messieurs dames que j'allais me résigner à une mort pareille ? Prenant mon courage à deux main, j'enfonça le harpon dans ses yeux au moment de l'impact ! Et BIM !

          Je mimais les gestes de la scène devant une foule en folie.

          - Une giclée de sang apparue dans les profondeurs de l'ocean ! Je lui avais montré à quel point Grimmjack se chauffe quand on l'énerve ! Je me dépêcha alors de remonter à la surface mais l'oxygène me manquait... A quelques mètres à peine je perdis conscience... La suite vous la connaissez mes braves gens !

          Et la, rideau final, un tonnerre d'applaudissements ! J'étais tellement emballé par le récit de mon aventure que je n'avais pas vu le monde s'agglutiner autour de nous. Cela avait commencé par Skrik et le chaton, puis les cuisiniers du réfectoire. Quelques membres de l'équipage, dont le capitaine, nous avaient rejoints avant qu'une dizaine de passagers, intrigués par l'effet de masse, ne viennent s'incruster à leur tour.

          - Maintenant que tout ça est fini, j'ai perdu le chalutier de ce pauvre papi et ai gâcher sa vie par la même occasion ... Raaaaaah, quel mauvais chasseur de prime je fais ! Comment vais-je rembourser ma dette ?!

          Et hop, comme un cheveux dans la soupe venant détruire un moment de plaisir, mes pensées sombres et déprimantes reprirent le dessus. Je me rassis sagement, ignorant alors les gens autour, la tête dans les bras, complètement léssivé de cette situation désastreuse...
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          Initialement, le réveil du Matador des mers était une excellente nouvelle. L’occasion, aussi, de se réjouir autour d’un bon repas et de trouver un partenaire de jeux et de boissons. Oui, c’était une excellente nouvelle qui d’ailleurs été partagée par l’ensemble des passagers et des marins qui partageaient sans exception une admiration pour le jeune homme. Tous, ou presque. Le premier et non des moindres parmi ceux qui ne le portaient pas dans leur cœur était bien sûr le capitaine sans navire qui avait perdu son fond de commerce et probablement la seule chose qui donnait du sens à sa vie. Le vieil homme était remonté comme une pendule à laquelle un astucieux artificier aurait connecté une bombe qui exploserait lorsque sonnerait minuit. Et les aiguilles, suivant leur éternelle course, ne tarderaient pas à pointer le douze fatidique. Sa détresse était sommes toutes légitime et sa rancœur n’était pas une surprise. En revanche, l’identité de la deuxième personne qui semblait la moins convaincu par les lauriers et la gloire était plus surprenante puisqu’il s’agissait du principal intéressé.

          Pourtant, à table, Skrik avait découvert en Grimmjack un homme bavard et bravache qui au fil d’un monologue, que l’agent du CP2 finit par trouver un peu trop long, s’illustrait par une verve et un panache en totale contradiction avec son apparence sombre. Au cours du repas, l’invité d’honneur prouva aussi qu’il avait une bonne fourchette et Skrik qui n’était pas le dernier à profiter d’un repas gratuit, trouva ici un rival de taille. Même les marins n’en revenaient pas et se demandaient comment il parvenait à engloutir une telle quantité de nourriture coincé entre des bandelettes de momie. Sa joie de vivre était telle qu’elle en devenait contagieuse et même Félix semblait en être infecté. La détresse qui empoisonnait son cœur semblait, l’espace d’un moment de convivialité, s’être évaporée. Tous riaient et applaudissaient, imploraient le héros de répéter encore et encore tel passage de sa spectaculaire performance. Skrik, non moins épaté, y trouvait néanmoins quelque chose à dire. A l’un des mousse, un grand échalas aux lèvres boudeuses qui ressemblait à une girafe, l’agent déclara une chose d’un ton pince-sans-rire.

          - C’couillon a quand même une chance d’cocu !

          La Girafe ne savait pas trop ou se mettre et n’avait certainement pas l’intention de contredire un type comme lui et surtout pas après trois pintes, alors il préféra le repli stratégique et acquiesça en riant comme un âne. Un vrai couillon, ajouta l’agent aviné en appliquant une bonne claque sur le dos de la Girafe qui manqua de s’étouffer. Aussi discrètement qu’il le pouvait pour ne pas le vexer, il s’éloigna en pressentant que ce type était du genre à jouer avec des couteaux et que le sang n’arrêtait pas. Une tactique employée au bon moment car Skrik avait persuadé un autre marin – nettement moins prudent – dans un duel de bras de fer. Aussi confiant pouvait-il être en ses biceps forgés sur le pont, le malheureux mousse devait rapidement, et dans les larmes, que Skrik était fait dans un autre bois. De fait, quand l’ont entendit chouiner, on s’étonna de constater que ses joues étaient sèches et qu’il n’avait pas encore réalisé, l’alcool aidant, que son épaule avait été déboîtée. Les regards se croisèrent, les yeux s’écarquillèrent, les mâchoires tombèrent quand la source de la complainte se trouva être nul autre que Grimmjack.

          - Maintenant que tout ça est fini, j'ai perdu le chalutier de ce pauvre papi et ai gâcher sa vie par la même occasion ... Raaaaaah, quel mauvais chasseur de prime je fais ! Comment vais-je rembourser ma dette ?!

          Silence de plomb. C’est vrai, personne n’avait pensé à ça. Occultée par cette démonstration de rodéo, la perte du navire n’était pourtant pas sans conséquence. Pour des hommes qui vivaient en mer c’était plus facilement compréhensible que pour n’importe qui d’autre. En imaginant leur vie privée du navire qu’ils chérissaient depuis ici deux mois et là douze ans, ces hommes encore joyeux une seconde plus tôt se fermèrent comme des huîtres. Ils compatissaient bien sûr pour le jeune homme, mais leurs pensés étaient tournées vers le capitaine qui n’avait à présent plus que ses yeux pour pleurer. Deux marins, parmi les plus âgés, se dévouèrent pour apporter du réconfort et une bouteille de rhum au malheureux pêcheur. A table, Félix, Skrik et les autres marins se trituraient les neurones et les doigts pour apporter une réponse ou une maigre consolation, en vain. Le Chat, anormalement mutique, sauta comme si quelqu’un avait sa queue. Dans ses yeux bleus brillait la lueur d’une idée. Une idée folle, mais une idée quand même.

          - Hum… j’ai peut-être, je dis peut-être une solution pour toi. Mais… non, oublie, c’était idiot.

          De ce même doigt autoritaire que le Chat s’était habitué à écouter, Skrik tapota trois fois la table, l’invitant ainsi à cracher sa pilule. D’une certaine manière, il était épaté par l’avarice de cet homme en matière de mot, mais, en grimaçant, il se plia à cet ordre muet.

          - Skrik, tu sais, dans cet endroit où tu es censé me déposer ? … Euh oui, oui… Je sais que c’est une prison… Bref. Il y a des rumeurs.. enfin des rumeurs… j’ai entendu dire que… Aie, ok ok, arrête de me taper ! Bon… je sais que.. Jan Cooper est encore en vie et qu’il se cache là-bas. Mais oui, tu ne peux pas entrer dans la prison et ressortir avec Cooper comme si de rien n’était. En plus, je ne sais même pas la tête qu’il a maintenant, enfin... Tu vois, j’aurais du me taire. Désolé vieux.

          Le nom de Jan Cooper évoquait vaguement quelque chose à Skrik, mais il ne gardait pas en mémoire le nom de toutes les crapules de la région surtout si, comme l’ajouta Le Chat, c’était une crapule qui se faisait discrète depuis des années et vivait sous un autre nom. Mais le chasseur de prime était manifestement plus au fait des avis de recherches qui circulaient, même ceux qui remontaient à près d’une décennie. La probable éventualité d’un potentiel espoir suffisait à redresser ses épaules et à fouetter le sang qui circulait dans ses veines. Il mitraillait le voleur de questions qui rebondissait sur des semi-réponses ou qui traversaient des haussements d’épaules. Parmi tous ces tirs, une balle perdue frappa Skrik en pleine tête. Comment accéder à l’intérieur ?

          - C’t’histoire m’plait pas. Mais j’ai p’t’t une solution. Il regarda les marins qui s’étaient assis autour de la table et assistaient avec attention aux rebondissements de cette affaire. Barrez vous. Alors ils se barrèrent, la queue entre les jambes, mais en se souvenant de la liste des tâches qu’ils avaient négligés tout à l’heure, ils passèrent rapidement à autre chose pour éviter d’avoir à subir le courroux du chef en plus de celui de l’étranger qui n’avait pas l’air de plaisanter. ‘Suis un agent du CP. A c’propos, t’en sauras pas plus. J’dois livrer c’t’abruri demain matin, mais j’pourrais aussi falsifier quequ’ documents pour t’faire entrer.

          Le plan était dangereux. Très dangereux. N’importe quel esprit censé l’aurait balayé du revers de la main, mais Grimmjack n’avait pas tellement le choix. Aussi cynique que d’habitude, Skrik était bien conscient de la position du chasseur et que son offre était probablement la seule qui se présenteraient à lui. Si ce Cooper était aussi dangereux que le Chat le prétendait, ce joli coup de filet ferait une belle ligne sur son CV d’agent.

          - Toi. Il planta ses yeux dans ceux de Félix. T’peux nous aider à l’trouver ? A cette question qui sonnait comme une affirmation, l’intéressé se contenta d’hocher la tête. Ok. Si t’fais c’que j’te dis, j’me débrouill’rais pour alléger t’peine. N’souris pas comme ça, t’es pas tiré d’affaire. Et toi... Skrik se tourna alors vers Grimmjack. C’est ta décision.

            La solution

            Rien à faire : Grimmjack était déprimé. L'ambiance festive qu'il venait d'installer dans le réfectoire n'y changea rien.


            J'étais à deux doigts de pleurer a chaudes larmes. Deux doigts ... Peut-être qu'un seul. Ou un pouce. Mais vraiment à pas grand chose quoi ! Je marmonnais tout seul dans mes bandelettes, la tête dans les bras. J'étais clairement au bout du rouleau.

            Mon oreille se tendit quand j'entendu Le Chat avoir une idée. Je releva ma tête pleine d'espoir. S'il avait bien une chance dans ce monde pour que je puisse me rattraper, j'allais braver vents et marées pour l'accomplir !
            J'écouta alors tout attentivement la discussion des deux hommes, gobant chaque détails en les inscrivant précieusement dans mon crâne.
            Déposer le Chat ... Dans une prison ... Jan Cooper ... Entrer dans la prison ... Jan Cooper encore ... Attendez ... Ce Jan Cooper ?! Ce nom me disait quelque chose ! Il était dans la liasses de primes que le lieutenant m'avait donné sur Alba quand j'avais acheté ma licence !
            Une lueur d'espoir s'illuminait dans mon regard. Dans cette obscure situation je voyais en face de moi une porte de sortie s'entrouvrir ! Il fallait que je saisisse cette chance, je n'avais pas le choix ! J'essayais tant bien que mal d'en savoir plus !

            Skrik, de son tact légendaire, congédia gentiment les personnes aux alentours. Tous l'écoutèrent et nous nous retrouvâmes à nouveau que trois autour de la table, bien plus à l'aise pour une discussion pointilleuse. Je n'en perdais toujours pas une miette, les fixant du regard comme un chien devant une entrecôte saignante.

            Agent du CP ... Falsifier des documents ... Je ne savais pas ce qu'était le CP, ni de quels documents Skrik parlait, mais j'étais plus que motivé pour cette mission !

            - Je prend !

            Ce que je comprenais en tout cas, c'était que j'allais infiltrer une dangereuse prison pour y trouver et arrêter ce fameux Jan Cooper... Appuyer par Skrik et potentiellement le Chat, qui semblait moins sympathique depuis la connaissance de son passé criminelle. Ca allait pas être de la tarte, c'était sur ! Mais si c'était la seule chance pour qu'on rembourse le vieille homme, j'allais rembourser mes dettes et ça, ça n'avait as de prix !

            - On est bien d'accord, si on réussit la mission vous vous engagez à rembourser le chalutier ?

            Un vent de bravoure remplit mon coeur. Je me leva et serra la main à mes deux nouveaux partenaires. Le marché fut conclus. Une nouvelle aventure se profilait à mon horizon.
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