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Libération.

Libération. Assassin__s_Creed_2__Mask_by_Jael_Kolken

La fumée te revient dans la gueule, chatouille tes sens et enveloppe la masse difforme de ton visage. Il est là, il te souffle dessus, tirant sur la fraise incandescente de son immonde cigarette. Il est assis sur tu-ne-sais-trop-quoi, mais il te regarde. Tu peux sentir ses petits yeux mesquins se river sur toi alors qu'il assiste à ton réveil difficile. C'est un sourire immaculé qui se dessine sur son faciès funeste. Des dents blanches, des dents de menteur. T'as envie de les casser, hein ? Pourtant, tu sens autre chose. Un parfum particulier peut-être. Tu sens que tes bras s'étirent encore et encore. Sans fin. Et lui, il est là à te regarder. À te sourire. Pourtant. Pourtant il est différent des autres. Cette fumée, elle est différente. Ce n'est pas celle que l'on te souffle au visage pour te rappeler ta captivité. Ce n'est pas celle, suave et poisseuse, qui s'échappe des gueules d'éclopés qui se pavanent devant la tienne. Alors tu remontes les yeux, tu vois son habit. Flou, mais de plus en plus distinct. La pénombre trône en maîtresse incontestée de ton royaume de souffrance. C'est l'odeur du sang qui frappe tes sens, bien avant les détails de son attirail. Du sang, ici ? Tu vois le liquide qui trempe ses bottes, qui s'épanche autour de lui, auréolant ce triste sire d'une aura sinistre. Une évidence, il n'est pas ici pour te torture. Mais par dessus tout ça, une fragrance trône. C'est mêlé à la fumée, tu le sens et le sais. C'est puissant, implacable. Tu l'as déjà senti, avant, tu te souviens ? Est-ce en vertu d'une ancienne querelle qu'il est là ? Est-il venu achever la raillerie de Igor, en mettant fin à tes jours ?

Probablement, il empeste la chair putréfiée. Tu le perçois ça aussi. Et puis tu tires sur tes chaînes, ça aide toujours. C'est lui qui ricane ? C'est lui qui se fout ouvertement de ta gueule. Il te toise et laisse tomber sa clope dans le sang. Un crépitement s'ensuit, alors que la seule lumière qui éclairait son visage disparaît, le rendant à la pénombre. Pourtant il reste là à te scruter. Pourquoi il est là ? Pourquoi il agit pas ? Sa seule réponse réside en la flamme qu'il tire de son briquet en acajou. Il fait apparaître une autre cigarette, l'allume. Cette fois, tu le vois. Sous la capuche, sous les vêtements noirs et argents. Ses armes luisent autant que ses pupilles. Moins que son sourire satisfait. Il attends que tu te réveilles, c'est ça. Il assiste à ton retour parmi les hommes et il rit. Il rit de te voir muselé, toi le dantesque. Pourquoi ne t'a-t-il pas tué ? Une ancienne histoire, peut-être te fait-elle sourire, peut-être l'homme qui est mort à tes pieds ce soir là te ramène à la réalité. Tu sais qui il est. Pourtant, ce soir il te montre son visage. Alors tu te souviens, de cette odeur. De l'odeur de sa fumée. De lui. Mais tu n'est pas le seul à te souvenir.


"Judas."

Ce n'est qu'un mot, mais il le profère avec une telle conviction que tu t'en souviens. De ton nom. L'assassin se lève, s'avance vers toi. Même en étant debout, il te surpasses difficilement. Pourtant, il tend la main. Le premier cliquetis libère ton bras d'une gaine de fer qui n'avait que trop tiré dessus. Puis il fait de même avec l'autre côté. Tu tombes. Tu passes à travers lui, à genoux. Sa cigarette lui borde la bouche, point incandescent aux abords de ta conscience. Il est là, l'assassin qui vient de te libérer.

"Dis moi, que fais-tu ici, Judas ?"

Ce n'est pas une question, c'est un ordre. Il sait les proférer avec un ton mielleux qui ne laisse aucune équivoque. Tu sais que c'est un tueur méthodique, implacable. Un homme avec qui tu as déjà travaillé, te souviens-tu ? Assurément. Lui aussi. Mais lui n'oublie pas, n'oublie rien. Ton visage, il l'a en mémoire depuis cette nuit. Comme tous ceux qui ont pu sombrer sous sa main. Peut-être ferais-tu mieux de lui répondre, il est ton sauveur après tout. Peut-être oserais-tu lui demander ce qu'un être de son acabit fait ici, dans les profondeurs de la plus glauque des caves de Goa ...

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JOUR1

Immobilité. L'absence totale de mouvement m'était inconnue il y'a quelques heures, c'est pas trop mon style de rester fat sur mon derche. Tu m'connais, faut que sa bouge, j'distribue plutôt les dragées que les bonbecs. Quatre mètre sur trois, des barreaux qui m'sont presque familiers avec le temps, l'bateau tangue même pas. Immobilité, absence totale de mouvement à vous rendre fou n'importe qui. Surtout dans une cage. J'tape ma tête contre le bois, mais elle est lourde, cette foutue tête. Trop lourde et trop dans la brume. Celle ou tu t'en sors pas parce que tu peux pas lui frapper dessus. J'ai horreur de ces trucs là : Les trucs ou tu peux pas frapper d'ssus. C'est contre nature ; On devrait tous pouvoir en coller une à son prochain sans s'retrouver sur l'cul comme un con !  

Jamais eu une gueule de bois de ce calibre, faut dire que normalement j'ai la tête dure. GrandeLine c'est vraiment un autre monde, là bas ils savent faire la fête. Surtout ma fête, ta fête, notre fête. J'ai les yeux qui pétillent encore, gonflés et tout rougeaud des piquouses. J'ai des chaînes aux poignets et aux chevilles, et sa s'enfonce gentiment dans le sol. Manière de me montrer qu'il en a dans le ciboulot, le Joe ; Manière de me montrer qu'il est prêt à chuter avec moi. Si je tire trop, le bateau coulera. Et avec des chaines c'est plutôt difficile de nager t'sais ? Ouch, réfléchir c'est trop dur. Plus dur encore que le bois, que les chaines et qu'la situation.

On dirait qu'jsuis un animal, pas que sa m'plait mais j'vais opter pour une méthode ancestrale : L'hibernation …


JOUR 2

J'en conclus qu'on est dans un endroit pas net, Calm bet. Tout ce plat et cette monotonie, tout ses repas qui ne s'ébranlent même pas. Tout est flou, j'émerge plus que pour un brin de repas du fond des casserolle. Comme si l'mec avait raclé son chaudron avec de l'eau de vaisselle, pour m'donner un relent d'nourriture et d'pourriture. J'ai mal à la poitrine, un trou déformant ma cage thoraciques, des blessures sur tout l'corps. Ma respiration est un sifflet qui passe à peine mes lèvres tuméfiées. Triste état, triste sire. Le lion doit lècher ses blessures, et tout comme lui je vais attendre le propice pour faire trembler l'edifice.
On ne brise pas un colosse si facilement, et l'histoire retiendra que j'en étais un. Oh oui, ils le reconnaisseront tous. Qu'importe ton air grincheux, suffisant ou bien amère, qu'importe la fumée et le fiel que tu m'crache à la geule. C'est pas important. Tu peux briser ma cruche, m'enlever ma liberté et tout mon confort. Jamais tu ne m'domptera.
Cette histoire est pas net, et j'vais pas faire le linge sale en famille, sa va être moche et certains s'en voudront toute leur vie cette incurie. J'suis Thomas Jefferson, retenez bien ça, ce nom vous poursuivra un jour. Pour l'instant j'suis un traitre, un émissaire de l'ombre ; Judas. Je denonce et j'abuse de violence pour arriver à mes faims. A nos faims même. J'suis fou, mais j'suis facette. Multiple et incalculable. Un jour tu connaîtras le revers de la médaille.


JOUR 5

On me tire de ma cage miniature. J'deviens un prisonnier parmi tant d'autre. J'perçois pas grand chose d'mon brouillard, mais les formes et les couleurs changent. L'marron succède au gris puis au bleu, retour à la grisaille. L'odeur me reveille plus vite qu'un huissier ou un commissaire qui frappe à ta porte. Elle m'agresse les narines, et pique même ma langue. J'ai l'impression que la vie se réveille enfin, et vient m'acceuillir à grand coups d'embruns pollué. Ou pollueur, on sait pas trop, ici bas tout schlingue tellement qu'on dirait que la crasse provient d'la crasse. Faut dire que la pourriture y est plus gratiné qu'ailleurs encore ; A perte d'vue, c'est que de la canaille et d'la racaille. Là du rebus, j'sens son odeur d'poissard affamé et éffrayé. Là du voleur, j'sens sa convoitise et son regard scrutateur jusqu'à ma moelle. Pour ce qui est d'voir tout ça d'mes yeux. Revoir ce paysage stigmatisé, c'est au dessus d'mes forces. La lumière m'fouette la rétine comme Louise ses victimes. J'ferme mes yeux d'hamster, et suit docilement le groupe en dehors du bateau comme un mouton à la messe. Bizarrement, j'sens l'air s'figer sur mon passage. L'Immobilité, je la connais maintenant, et ce sentiment que la vie elle même s'arrêtait pour m'absorber me fit plus peur que la mort.
Comme un piège vicieux qui s'referme sur toi, et dont tu vois les crocs qu'à la fin. T'façon, d'puis le début cette histoire pue, et c'pas qu'une histoire de narine. Avec ce qu'on m'a mit dans le pif, c'est plus dur d'reféchir que d'suivre le mouvement. La vache, les cocktails a Joe sont bougrement efficaces, je m'demande encore comment j'fais pour tenir debout. Heureusement un fourgon est pas loin, et j'retrouve le plancher des vaches ; S'agirait pas d'alerter qui que soit d'ma présence ici. Joe est reparti avec le bateau, et même si aucun des guss ici présent ne pourraient m'resister, j'suis incapable de faire le moindre mouvement.

La bête est bien muselée. Elle se taire, et attends. J'garde mes forces pour plus tard, j'sens venir les emmerdes.

    Jour 2 - nuit.

    Tu ne peux pas comprendre les mots de cet homme. La drogue, la captivité. La torture. Pourquoi ? Pourquoi tant de douleur, quelle en est l'utilité ? Le brouillard qui entoure ton esprit est pareil à celui qu'il invoque pour te redresser. Tu vois sa main qui s'agite et la fumée qui obéit. Pourquoi, comment ? Oui, tu te souviens un peu plus. Les balles passaient à travers lui comme s'il n'était qu'un fantôme. C'était plus que ça. Il t'entoure, te soulève. Tu te sens faible. C'est un constat. Et il le partage. Il te porte à sa hauteur. Tes pieds sont faibles, mais tu es libre. LIBRE. Hé hé. Lui aussi ça le fait sourire. Pourtant, t'as un sentiment poisseux, écoeurant qui te colle à la poitrine. L'air est nauséabond, ça sent comme des ordures. L'oxygène est poisseux, ça respire le sang. Malgré la pénombre, tu peux les voir. Tes tortionnaires, les esclavagistes. Morts, tous. Lui ? Evidemment. C'est un assassin.

    "Les enfoirés ... ils ont au moins pas l'air de t'avoir coupé la langue."

    Il te laisse quelques secondes pour tenir sur tes pieds, il semble chercher quelque chose. Tu sais pas quoi, mais ... il t'a aidé, ça peut pas être contre toi. Tu le voyais plus petit dans tes souvenirs, moins étouffant. Ou alors c'est que t'as jamais eu le temps de l'observer assez longtemps. Pourtant, aujourd'hui, il  te laisse voir son visage. Il s'en moque, c'est comme si le masque était tombé depuis longtemps. Un assassin qui se lasse de l'ombre, un assassin qui ricane du propre sillon sanglant qu'il laisse derrière lui. À l'évidence, ce n'est pas un altruiste que tu as là. Ce n'est un ami que par coïncidence. Le hasard existe-t-il, le destin n'est-il pas derrière tout ça ?

    "Je te connais Judas, je te connais. Je t'ai étudié aussi, un temps. Partenaire, hein. Tu es fascinant l'ami ... tu es homme d'honneur, de parole ... tout ça ... hé hé hé."

    Il ricane ? Il se fout de ta gueule. Non. C'est pas toi, c'est lui. Il est étrange.

    "Je ne pensais pas trouver un tel prisonnier. Certes, il y avait de quoi te garder."

    Il te montre sa dague, maculée de sang. Tu peux le voir, malgré le flou qui écrase ta vision. Il l'essuie et envoie le torchon crasseux sur la dépouille d'un de tes tortionnaires.

    "J'aime monologuer, mais pas à ce point. Prends-ça."

    Il avance vers toi, te fait avaler quelque chose. T'as pas le choix, tu sens sa main de fer se refermer sur ta mâchoire. Oui, il est plus petit que toi. Tu t'en souviens maintenant que tu le vois. Mais ... la taille ne fait pas tout. Il te le prouve, alors que tes pensées semblent s'éclaircir. Tu sens ton coeur battre, l'adrénaline repoussant le flux sanguin. Les toxines passent et s'en vont, la drogue s'efface. Qu'est-ce qu'il t'a donné ? Tu en sens le goût âcre. Une drogue, autre ? Les assassins usent de dopants pour s'assurer de ne jamais perdre la main. Il te confie un de ses secrets avec tant de facilité. C'est parce qu'il te fait confiance ? Non. Parce qu'il pense maîtriser le monde qui l'entoure. La fumée est son monde. La fumée va partout, on ne peut l'arrêter : seulement la juguler.

    "Alors, Judas. Te souviens-tu pourquoi tu es enfermé ici, dans les profondeurs du Royaume de Goa ? Au milieu des souterrains des esclavagistes ?"

    Il te relâche, tu peux ... marcher ? Au moins te soutenir. Un autre truc te revient en plein dans la gueule. Cette douleur qui lacère tes membres. Pas de cicatrices, juste des souvenirs de ce qu'on t'a fait. Un autre truc pour lequel l'adrénaline aide : la fureur qui cogne ta poitrine. Elle l'amplifie, te donne des forces et une rage insoupçonnée. Un petit sourire se dessine sur le visage de l'assassin. Rafaelo Di Auditore. Oui, tu vois son nom. Tu vois la mise à prix. Tu connais ses crimes. Un assassin, mais pas que. Un Révolutionnaire. Un gars qui, selon ses dires, a pris le temps de t'étudier et de te connaître. Après tout, quel assassin prêterait la main à un braquage sans connaître le moindre détail concernant ses alliés ? Son regard amusé suffit à lui seul. Tu sais qu'il a un plan pour toi, tu sais qu'il ne fait rien au hasard. Mais pourquoi Goa, pourquoi maintenant ? Lui seul le savait.
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    C'monde, il est trop grand pour moi. Trop grand pour nous, trop grand pour toi. Oui, toi, t'es le centre du monde, l'unique responsable de cette incurie. Toi, t'es l'élement déclencheur de tout ce merdier, le point d'mire ou apparaît la chiasse. Le monde. Tu nous rend fou -quoi qu'en regardant ses enflures, j'me demande s'ils étaient d'ja pas atteint- ou t'arrange pas les choses au moins. Tu nous pousse à bout, et tu ris de nos tentatives et de nos rêves d'évasion. On est tous pris au piège, sans jamais le savoir ; Y'a une grosse roue qui tourne au d'ssus d'nous, elle attend que le propice pour te retomber sur le coin du museau.
    Il faut s'endurcir. Il faut faire gonfler l'égo jusqu'en éclater. Ou qu'on t'éclate, c'juste un détail. A partir de là, tu commence à voir le monde sous un nouveau jour ; Tout ça, ça fait partit de l'inéluctable. Une partie de notre misère, de notre fardeau à nous les hommes. Le Shopping et le travail en complète la triptyque principale.
    On a perdu notre foi, les dieux nous ont abandonnés, et depuis l'age d'or on a pas fait meilleure période - faut dire que farniente et orgie ça c'est de la progra, tu peux pas lutter. Bref, le grand cornu passe, et sa y'est on a plus l'droit qu'à nos yeux pour pleurer. Le lot de consolation ? Notre libre arbitre, ce truc prise de tête, parfois don et parfois malédiction. Il est vicieux et très instable, on sait jamais quand ni comment l'utiliser, et pourtant.
    Et pourtant, c'est ce qui fait de nous des hommes.
    Touche pas à la seule récompense que m'fait la vie pour toutes les galères qui pleuvent. Chuis pas un homme, chuis une bête ; Quand j'defend mon territoire j'fais pas dans la dentelle. J'mords et j'feule, je griffe et j'déchiquète. Un vrai sauvage, c'est vrais … Et c'est ce qui fait de moi un homme.

    Ils m'ont privés de tout ça. Joe, ses relations et ses longs bras, ses seringues et sa geule d'ombre. Il a jeté le filet du cauchemars sur mon ciel bleu, et maintenant tout est gris. J'pourrais même pas reconnaître l'ami d'mon ennemis.  On m’amène sur cette foutue carriole comme un condamné sur son gibet. L'inconnu m'fait plus peur, et pourtat j'sens l'odeur de la mort au bout du chemin. J'aurais peut être du laisser passer, et pas m'attaquer à trop fort pour moi. Il m'avait prévenu … mais le retour est assez acide ; Igor, tu fais sonner le glas d'la cloche d'or, et pour moi c'est comme si tu m'sifflait … La même indignation, le même dédains et cette violence, oh oui, cette sacrée violence dans laquelle j'aime me perdre. Tout ça est enfouis au fond d'ma poitrine, sous les cendres. Les cendres faut y faire gaffe, un peu d'vent et sa tourne, un incendie est né.
    Faut faire gaffe aux cendres, et tu m'as calciné, Igor. J'espère que les feux et les foudres se déversent dans ta propre barque.

    J'ai pris une sacrée claque, va falloir tâcher d's'en relever. Tâche ardu s'il n'est pas … Dans ma tête c'est le chaos, et c'est le champ de bataille dans mon corps. Pas de chance, pas de place pour la rémission, je suis comme coincé à un épisode désagréable d'ma vie. Je revois ses scènes en boucle, celle ou j'perds, et ou j'me relève pas. Celle ou j'me fais humilié, à coups d'sucre pour camé et d'produit des souterrains.
    Et cette façon de balayer tout mes espoirs de victoire, même après être devenu un berserker ne ressentant ni la douleur, ni la fatigue. Il a juste eu a dérouler son art sur moi, fatiguant tellement mon corps que mon esprit alla vite s'y refugier, pour pas rester trop près du soleil. Quand t'es trop haut, tu risque de t'brûler.
    Je sens presque encore la peur, le sang et les morts. Sa pleut autours de moi, l'odeur est trop forte. Tout ses corps autours de moi, c'est comme un cimetière dédié à nos histoire, à la faucheuse et moi. Ma peau est constellée d'sang, du miens et surtout du leurs. Il est d'ja sec par endroit, le soleil tapant fort. J'tombe sur Joe, on se dispute le bout d'gras, et tout devient rouge. J'entre dans le noir, et je déchaîne ma colère. Il est doué, et même sans aucune capacités ou tours de passe passe, capable de prouesses. C'est presque beau tant c'est bien fait, mais j'ai pas le temps pour la contemplation. Il est là.

    Tout près de moi, trop près...

    Et partout, le goût acre de la fumée.


    ***

    C'est la que tu me retrouves, moi jadis si puissant, à tes pieds. J'ai les pieds d'argile du colosse fatigué de recevoir, et la gueule du mec qui a suffisamment reçu. J'te fais pas un dessin, tu vois très bien ou je veux en venir ; J'suis lessivé, comme un boxeur qui a essuyé les coups, faute de répondant. Taquin, j'te laisse deviner la gueule du mec en face, pas envie de trop la perdre, justement. C'est toi qui m'a réveillé, les muscles encore crispés de la veille, j'ai la geule enkilo-mètre. Des cernes qui dépassent les bornes, sans compter mon œil qui tourne ; Et surtout trop de blessures au compteur.
    Alors tu vois, espérer tirer quelque chose d'mon épave est débile, j'te croyais plus intelligent. J'ai envie de ravaler ton sourire moqueur, mais toi, tu l'garde obstinément sous ta capuche. T'es énervant, Auditore, tu sais même pas à quelle point s't'incurie t'perdras un jour. J'crois d'abords à une hallucination. Toute cette fumée, toute cette force. Trop rapide, trop vivace et agile, tu enveloppe d'ombre et de gris, comme tout ici bas. Je vois le monde en technicolor, et toi t'es le dindon d'la farce. Les floues et les pas-floues s'mélangent, et donnent un tableau intriguant et drôlement incongrue.
    Ton masque de mort est bouffon, presque hautain tant tu t'amuse à les tourner en bourrique, eux et leurs plans. Ta vision m'rassure quand même, tu m'tires de là. Tu vas m'aider, et m'sortir de ce guépier. J'peux avoir confiance en tes compétences, c'est ta cervelle qu'à une drôle de maladie. Tu aimes la mort, et elle te le rend bien ; Tu fais partie de cette catégorie d'homme qui justifient leurs actes sous des causes. Seulement tu mesures mal les conséquences. Tu ne fais plus trop distinction entre le bien et le mal, les pensant notions accessoires : Elles sont vitales en vérité.

    C'est bien les seules qui comptent. Elles nous relient tous et nous sauve des ténèbres. Mais je vois que t'as changé. T'es venu m'sauver, et sous ton masque narquois, tes actions sont bienfaisantes. Sont elles dénuées d’intérêt ? Sûrement pas.
    Le prix d'une vie, c'est pas rien, pas vrais Auditore ?

    - Tu connais la chanson, des sales types, ils sont toujours collant à force de perdre un bout d'leur p'tites affaires.

    J'le regarde, attrapant un costume à ma taille parmi la panoplie qui traîne dans le coin. S'agirait d'être discret, et propre ; Ma parole, si j'ai pas trois quatre infections dans les panards, c'est que j'suis surpuissant !

    - C'est plutôt ou on est et ce que t'es venu y faire qui retient touts les souffles ! Toi t'aime bien retourner les écosystème, c'est ton coté scientifique j'présume ?

    Tu m'vois avec un vieux sourire qui déforment les balafres, f'sant comme un petit paté sur c'qui reste du hachis d'mon visage. Mon corps est pourtant débordant de ressources, et la drogue qui m'a foutu dans le collier est efficace : Sa te réveillerait un cheval, ma parole, j'me sentirais presque comme à vingt ans ! La machine est repartie, essayez donc de déjoué ses rouages. J'vous attends de pied ferme.


      Il te répond d'un petit éclat de rire dédaigneux. Un sourire amusé se peint sur ses traits alors qu'il ne te répond pas. Pas plus que tu n'as voulu répondre à sa question, cela dit. Il tourne les talons pendant que tu te remets en état et commence à visiter l'endroit, faisant les poches des cadavres et récupérant ses dagues et munitions. Il ferme leurs yeux, les range dans un coin. Non pas qu'il soit superstitieux ou quoi que ce soit d'autre, mais ils restaient des hommes. Il croit en la force de l'âme, du moins à ce qu'il en montrait. Une fois sa besogne achevée, il revient vers toi. Son sourire a disparu, comme si cette interlude n'était que la partie amusante de l'histoire. Peut-être qu'il a vraiment un plan pour toi après tout, vu comment il t'observe.

      "Je fais un peu de place dans la fourmilière, je mets le feu à la souricière. Vois les choses comme tu veux, il se prépare de drôles de choses par ici."

      Ce faisant, il remet sa capuche, éteint sa cigarette et attend que tu fasses le premier pas pour le suivre.

      "Après, mon côté scientifique se place plus haut dans la chaîne alimentaire, tu d'vrais le savoir. Quoi qu'il en soit, on va te remonter à la surface, histoire que tu prennes pas ta place dans le menu."

      Déjà des voix se font entendre à l'autre bout de la caverne dans laquelle ces gusses t'ont enfermé. D'abord, elles sont calmes. Puis ça hurle et ça piaille. Comme quoi, les massacres ça ne passe pas inaperçu. L'assassin soupire. Non pas qu'il soit las de tout ça, hein, juste que, le connaissant, c'est plus une sale besogne. Un truc qu'il a pas envie de confier à un autre. Et en même temps, ça l'apaise et lui fait les nerfs. Tu connais ce regard. C'est celui de ceux qui ont le complexe de Dieu, ceux qui se sont tellement souillé les mains qu'ils ne font plus la différence entre leur propre jugement et celui d'une cause. Les yeux d'un tueur, peu importe la cause. Après, y'en a qui font un métier par amour de la chose. Pour être assassin, si on aime pas tuer c'est un peu déplacé. Il t'fait signe de lui emboîter le pas, puis il te regarde. Il regarde l'épée qu'il a attrapé pour toi puis ricane encore. Encore faudrait-il que t'aies l'air d'autre chose que de Judas.

      "Nous sommes dans les souterrains des esclavagistes du royaume de Goa. Passages secrets et voies d'accès pour le trafic d'humains. Pour l'heure, on va opérer leur expliquer que leurs activités dépassent le cadre de l'emploi de ce secteur. Ah. En passant, aucun survivant. J'aimerais juste un silence radio pour leurs employeurs ... tu vois, t'es impliqué dans une Révolution mon grand. Alors va falloir s'en démerder. Evidemment, les esclaves, on les envoie vers la sortie."

      Puis il s'en va. Apparemment, le style mains nues ça lui va aussi puisqu'il balance l'arme dans un coin. Les premiers types arrivent en chargeant. L'assassin connait son oeuvre, et répète sa chorégraphie mortuaire. Ça craque, ça couine et ça meurt. Efficace, minimaliste. On pourrait même dire expéditif. Mais c'est faux : chaque pourriture d'esclavagiste a le temps de comprendre pourquoi il meurt en voyant le visage figé de leur meurtrier. Dans le fond de la salle, tu vois d'autre silhouettes encapuchonnées qui avancent et neutralisent sans sourciller les gardes et mercenaires à la solde des esclavagiste. Tout ça a l'air vachement millimétré tout de même, comme s'ils suivaient une route précise et s'enfonçaient sous les profondeurs de la ville. T'étonnerait pas qu'ils préparent une voie pour se faire un chemin un peu plus facile. Ils avancent rapidement, sans faiblir. À vrai dire, t'es peut-être l'un des rares à voir les assassins agir comme une force de frappe armée. Pas comme des gars de l'ombre ou de simples meurtriers. Non, là c'est une unité formée pour le combat et la guerre. Tch. Alors il se prépare vraiment une Révolution là-haut ? Ce ne sont pas que des paroles en l'air proféré par l'autre assassin et sa cause versatile. Les cages s'ouvrent, les gens pleurent et les remercie en fuyant vers la sortie, guidés par les corps laissés par les révolutionnaires.

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      -Je ne comprends pas, il n'y est pas censé avoir des gardes la dedans ? Ou je ne sais pas, au moins des portes qu'on pourrait fermer ?
      -Ben euh... Apparemment non.
      -Curieux, vraiment curieux. J'ai peur que mon rapport à sa majesté soit des plus mauvais...

      Debout dans une salle du complexe souterrain, Jonas kopakayachi, Premier Contrôleur Royal de Goa, regardait d'un air profondément perplexe la scène qui se déroulait sur son écran pendant qu'autour de lui les gardes transpiraient à grosses gouttes en contemplant leur ridicule dispositif de sécurité se faire rapidement éliminer par les types en cagoule...

      -Et cette scène la, ça se passe ou ?
      -C'est en dessous du palais Vendetta...
      -Mais, ces tunnels permettent d'accéder à l'intérieur des murs de la ville ? C'est plutôt curieux de s'étre donné tout ce mal pour les construire et ensuite de faire des trous dedans.
      -Ben...
      -Mais passons, je ne vous voudrais pas que des considérations historiques vous détournent de votre travail... Messieurs, soyons efficace et pratique. Qu'avez vous de prévu pour ce genre de problèmes ?

      Sous le regard sévère du Premier Contrôleur Royal les gardes se contorsionnent comme des lardons sur un grill, ils savent trop bien les histoires qui courent sur les punitions qu'infligent celui que les gens appellent la main gauche du roi, le roturier le plus intelligent et le plus puissant du royaume.

      -Alors ? Est ce que quelqu'un a une idée ?
      -Et bien euh, on pourrait envoyer des gens ?
      -Oui oui, des gardes par exemple, plein de gardes.
      -Euh sinon, y'a les pièges ?
      -Ah, voila un suggestion intéressante, avancez soldat n'aillez pas peur. Alors, vous avez parlé de pièges ? Je me disais bien qu'on ne pouvait pas avoir construit un souterrain si pratique en oubliant les classiques les plus élémentaires... Je vous écoute soldat, qu'est ce que nous avons ?
      -Euh, on a celui la mais... ça va tuer tous les mondes. Même nos hommes.
      -C'est un problème évidemment, mais si ça tue nos hommes ça tuera aussi les leurs... Commandant ? Combien de gens la dedans ?
      -Et bien, je dirais cent cinquante personnes. Et un peu plus de deux milles esclaves évidemment.
      -C'est tout ? Mais alors il n'y a pas de raisons d'hésiter. Action messieurs action...

      Et deux minutes plus tard, vaporisé par des tuyaux directement dans chaque cellule, un gaz épais vient noyer le complexe souterrain dans un épais et mortel nuage qui entreprend avec efficacité de liquider tout ce qui est muni de poumons, esclaves, assassins, gardes...

      -Bon. Je repasserai demain pour étudier les procédures de nettoyage. En attendant, vous n'avez qu'a doubler la prime de tous les gardes la dessous. Et préparez les médailles pour les familles. C'est important les médailles.

      Et après un dernier regard au écran qui ne transmettent plus rien, Jonas prend la porte. Quelques secondes, le temps de laisser aux gardes le temps de souffler pour mieux revenir en douce.

      -Un détail encore. Commandant ? J'en suis désolé mais vous avez trouvé la mort dans ce malheureux incident, toutes mes condoléances et félicitation pour votre médaille. Je vous laisse gérer les détails comme vous voulez, mais soyez rapide. Soldat ? Votre sens de l'initiative est excellent. Vous êtes le nouveau Commandant de secteur.


        "Raf ... el ..."

        Bordel, c'est quoi ça ? L'assassin fait signe de stopper en levant le poing. Une fumée verte s'échappa d'une galerie, vomissant trois assassins mourants. Le premier s'écrasa aux pieds de leur mentor, profitant de quelques secondes d'agonie. Merde. Merde, c'était pas prévu. La dernière fois, ça s'était pas passé comme ça ! En même temps ... ils avaient mis à feu et à sang une villa de Town center et s'étaient enfuis sans demander leur reste. Les souterrains avaient du être purgés depuis, malgré le grand nombre d'esclavagistes ... Certains avaient du aller donner l'alerte. Foutue Royaume corrompu. D'un geste, l'assassin fit signe à ses hommes, ce qui restaient, de se replier par la rivière souterraine, débouchant loin dans Grey Terminal, leur point d'accès. Lui ne pouvait pas laisser la preuve que son organisation était impliquée là-dedans.


        "Judas, suis mes hommes. Prends une de leur tenue : je t'expliquerais après ! Vite !"
        hurla Rafael, commençant à s'emparer de ses bombes fumigènes.

        Et toi, Assassino ? L'assassin envoya ses bombes éclater devant lui. Le nuage de fumée s'étendit et pris la forme d'un mur épais. Il y plongea ses mains et le mur se transforma en une sorte de main qui s'enfonça dans le tunnel, faisant l'effet d'un bouchon repoussant la fumée.  La densité élevée de la fumée empêchait tout mélange et rapidement, il dégagea la galerie, dévoilant un paysage d'horreur. Esclavagistes, assassins. Gardes. Morts, les poumons brûlés par l'acide. Des esclaves encore dans leurs cellules. Une rage sourde s'éleva de lui, alors que les cris de douleur résonnaient tout autour de lui. Plus d'une dizaine de ses hommes étaient morts, ce qui signifiait une grosse perte dans ses effectifs. Les assassins de Goa n'étaient pas légion. Et pire encore, les esclaves mourraient : il devait faire quelque chose pour eux ! Et rapidement. Il dissipa la tenue de son ordre d'un geste et rompit le contact avec le mur qu'il avait créé. Le poison commença à rapidement reprendre l'avantage. Rafael ferma les yeux, tenta d'étendre son mantra à ce qui l'entourait. Aucune voix ne résidait là. Et merde ! Tous morts ? Il devait stopper la progression de ce gaz, sauver ce qui pouvait encore l'être d'esclaves.

        Inspirant une dernière goulée d'air avant que le poison ne le submerge, il se mit à exhaler une étrange aura de fumée qui l'entoura petit à petit. Puis, dans une détonation sourde, il prit son envol. Un trait grisâtre de fumée s'engouffra dans le tunnel, se faufilant à travers le poison à une vitesse ahurissante. Il ne pouvait que rebondir contre les parois et se laisser guider par les contacts répétés en se déplaçant de cette manière. Le peu qu'il pouvait sentir, c'était la disparition de plus en plus rapide des voix grâce à son mantra.  Gagnant les hauteurs d'une caverne, l'assassin atterrit avec fracas sur le sol, générant un cercle de fumée qui chassa le poison. Les corps et les cages volèrent autour de lui, sous la violence de l'impact. C'était encore aux abords de Grey Terminal, un des passages qu'il connaissait, menant à Town Center. Ils avaient piégé la zone et n'avaient pas hésité à sacrifier tout le monde ! Un chaos monstrueux se dessinait autour de lui et le gaz reprenait peu à peu ses droits. Innocents, esclavagistes. Rafael serra ses poings.


        "Et merde !"
        hurla-t-il, en frappant le sol.

        L'objectif était en partie atteint, certes ... mais à quel prix. Ils devaient seulement prendre le contrôle d'une portion des souterrains, seulement une bordel. Une voie sécurisée pour envahir Town Center.  Mais là, trop de monde était mort. Des pertes majeures parmi les civils et les gardes. Et les assassins. C'était trop tard, il ne pouvait plus rien pour eux. Pour personne. Les voies d'accès du gaz étaient trop nombreuses ... mais au moins il savait maintenant qu'il y avait un moyen d'activer cela. Mieux valait le savoir maintenant que lorsqu'ils s'infiltreraient dans la ville. Il lui faudrait trouver cet accès et le condamner lorsque la Révolution commencerait, ou ce serait l'hécatombe. Beaucoup d'hommes étaient morts pour savoir cela, il leur ferait honneur. D'un geste, il utilisa sa fumée pour séparer la masse du gaz et commença à marcher en direction  de sa provenance. Pas difficile à suivre comme piste. Au bout de quelques minutes, le poison cessa de se diffuser, alors que l'assassin avançait sous sa forme fumigène. Il déboucha ensuite dans une galerie un peu plus aménagée. Les égouts. Là, c'était une majorité de gardes qui repeignait le sol. Il débusqua enfin une voie d'accès du gaz. Une canalisation, voie rêvée pour lui.

        Dégageant la fumée d'un geste, il s'avança vers le bouche. Un sourire malsain se dessina sur ses traits, alors qu'il appliquait la main sur l'ouverture du tuyau. Il ferma les yeux et laissa la fumée remonter le long du complexe piège. Dieu que ce pouvoir était utile. Laissant la fumée explorer le système, il étudia le piège en essayant de ne pas se faire repérer. De temps à autre, il repoussait le poison en augmentant la densité de sa fumée. Jouant sur celle-ci, il favorisait un appel d'air qui ramenait de quoi respirer. Un nouveau sourire s'étira sur ses traits, pas compliquer à saboter lorsqu'on savait comment s'y prendre. Il leur laisserait la surprise. Quoi qu'ils puissent mettre en place, il serait difficile de l'entraver lui. Mordre dans ce fruit avait été la meilleure idée de sa vie ...  Une fois sa curiosité satisfaite, il retira son membre fumigène et entreprit de revenir sur ses pas. Il plaça sa main devant sa bouche histoire de ne pas respirer les dernières effluves et regagna le souterrain où ses hommes étaient morts. Il fallait évacuer leurs corps, que les gardes se posent des questions avant qu'ils n'élucident ce mystère. Profitant de la protection que lui conférait son pouvoir, Rafael ramena les cadavres vers le fleuve souterrain et entreprit de le remonter à l'aide, encore une fois, de sa fumée.  

        Il posa pied à terre, rejoignant les rescapés de son ordre, ainsi que Judas. Toussant, il du se tenir à une pierre pour conserver l'équilibre. La dépense d'énergie avait été trop soudaine, et trop soutenue pour lui. Il se passa une main dans les cheveux et secoua la tête en réponse aux interrogations de ses alliés. Ils emportèrent les corps de leurs camarades, dépités par la tournure de la situation.


        "Des pièges ... voilà comment ils font pour garder leurs souterrains sans mal. Les enflures. C'était trop beau pour être vrai. J'ai ... visité le piège. Je sais comment l'entraver pour la prochaine fois."
        fit-il à l'adresse du plus gradé du groupe.

        Celui-ci acquiesça, puis s'en retourna guider les esclaves libérés vers Grey Terminal.  Ils étaient conscients des risques, après tout. D'autant plus que cette défaite nourrissait leur rancoeur et leur donnerait des forces pour la bataille à venir. Les hommes se dispersèrent rapidement, sur un geste de Rafael. L'assassin alla s'asseoir à côté de Judas.


        "J'commence à croire que ce n'est pas la chance qui m'a fait tomber sur toi avant qu'on nous repère. Au moins tu vois contre quel type de connard on se bat."
        grogna-t-il, plongeant ses mains dans le ruisseau pour se rafraîchir le visage.

        "On a pu sauver une petite partie de esclaves,  et l'ensemble des souterrains est vide à présent. Cela nous simplifie au moins une partie du plan. Je pense que tu as tout de même une idée de ce que sera ma prochaine question ..."
        ricana-t-il, plus de dépit qu'autre chose.

        Malgré les apparences, toutes ces morts l'affectaient. Il ne demandait qu'à laisser libre court à sa colère, mais il était épuisé par les derniers efforts. D'autant plus qu'il y en aurait beaucoup plus d'ici les prochains jours, des efforts et des morts. Un sacrifice nécessaire, toute révolution passait par le sang.


        "Tout comme je connais ta réponse. En homme d'honneur ..."
        poursuivit-il, se rinçant à nouveau le visage.
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        Une révolution alors ? J'ai l'oreille qui siffle, excuse moi, tes paroles glissent comme l'eau sur la plume. Vrai que d'habitude j'suis plutôt dans le plomb, c'est ma marque de fabrique. Vrais aussi que j'suis pas léger, et que ton arme pèse trop lourd dans tes bras endoloris. Je rigole. Il est marrant, ce gamin, il a de la suite dans les idées. M'est avis que t'es trop sérieux, Auditore, sa crache avec l'air niais que t'as toujours sur le visage ! A force de te faire du soucis, tu vas finir tout vieux et tout ridé. Si tu survis jusque là, assassin. Tu connais le dicton, l'argent appelle l'argent ? ; C'est pareil ici, la mort appelée de touts tes veux te faire le cul un jour. C'est une maîtresse trop habile et trop versatile, trop dangereuse aussi ; Si tu couvre pas tes arrière, c'est elle qui apparaîtra un jour dans la glace de ta salle de bain.
        A t'susurrer des mots doux à l'oreille. Moi sa m'fout des frissons, et comme des crissements dans l'fond du tympan. A d'autre sa leur fait l'effet d'une chaudasse remplie jusqu'à plus soif, et d'autre encore présente ça comme le murmure d'un destin, d'un dieu ou d'une idéologie. Chacun ses petites manies moi j'dis. Chacun son petit tralala, et y'a que les hypocrites pour être en règle avec leur folie.

        - Ouai tu vas encore tuer les trois quarts des marines, des commerçant corrompus et de ceux qui font rien d'mal qu'un pet de travers … J'connais tes méthodes oui, mais vu ou on est … dis-je d'une voix qui gronde de souvenirs. On va pas leur faire de cadeau.

        Mes yeux s'allument, et même le costume ridicule du garde me donne une image barbare. J'vois dans l'fond de ta pupille que t'approuve, et j'y vois même une lueur de jubilation. Crois pas que j'mords à un hameçon sans mesure le fond, et les plans sont fait pour être changés, tu le sais bien. Un bon plan, c'est celui qui peut alterner tout l'temps, sans souffrir de faille. Pas vrais, Auditore ? J' le garde dans la périphérie de mon regard, comme sous un projecteur, et on avance dans les tunnels glauque du Grey Terminal.
        Au fur et à mesure que l'assassin me fait son discours, je distingue des odeurs cachées, qui sentent trop bon pour un endroit pareille. Ici c'est la crasse humaine, c'est le fumier de ce monde qui domine et qui plane sur nos têtes. Un véritable cortège nous rejoint, tous habillés de blanc et d'ocre, au couleur du Révolutionnaire. Il me tend une épée que je dédaigne. Les armes sont pour les faibles, c'est exactement pour eux que l'homme les a créer. Je vais vous dire un secret, que vous connaissez déjà tous mais dont vous ne vous rendez pas compte ; L'homme est faible. Il n'a pas d'armes ni d'armures naturelles efficaces, il est sensible à la température, et aux vices. Mais l'homme est malin, il a donc toujours inventés des appareils pour compenser.
        Il y'a un truc que vous avez tous oubliés, mais frapper fait mal …  Oh oui, c'est une douleur cuisante que d'écraser ses paluches sur des crânes. Au début, elle nous rappelle que c'est mal que d'en arriver au mains. Conditionnement sociale. Puis lentement la sensation s'en va, ne reste plus que le plaisir et la puissance. C'est pour ça que l'on a créer l'épée … Foutue technologie.

        J'repousse l'arme tandis que les moines de minuit font leurs office. Rafaelo tient lieu de dieu réincarné, faisant de la messe une hécatombe. Je sonnerais presque de l'orgue pour que le tableau soit complet et signé. Je reste en retrait pour ma part, me méfiant comme de la peste des esclavagistes. Les mecs qui font du commerce sur le dos des autres, c'est vicieux. Faut s'en méfier comme de la peste, et les écraser comme les cafard ; Ses bestioles là, on sait jamais ce qu'elle va nous faire mais ça s'annonce toujours bien sale.
        Les galeries sont peu éclairés, seulement ponctuées de globes blancs lumineux à mi-tête. J'suis souvent obligé de me pencher, des poutres et des excavations en pierre ponctuant le plafond. Suffisamment haut pour accueillir des animaux exotiques, notre boyau est plutôt réduit, comme si c'était un parallèle plutôt inconnue au bataillon. L'assassin à ses sources. Seulement parfois l'eau est empoisonné.

        Si on m'a conduit là pour me faire poireauté, j'aurais dû me douter que ça allait pas être jouasse d'en filer. Igor à vraiment de sacrée connaissance, j'en rigolerais presque tellement ma conduit est dérisoire. J'aide un révolutionnaire dans sa guerre idéologique contre l’oppresseur, et pas n'importe lequel, il est 'Royal'. Tout en me mettant à dos la moitié du globe, en la personne du gouvernement mondiale. Violer des accords internationaux n'est pas dans tes habitudes, Judas, mais aujourd'hui tu vas faire une exception.

        On se retrouve dans un noir total, puis des fumées vertes et des hommes déboulent à droite. Cela semble évoquer quelconque habitude dangereuse à mon comparse. Il m'ordonne de partir, sa troupe avec, séance ténante. Se séparer du chef est toujours synonyme d'emmerdes, surtout dans la révolution. J'me suis toujours dis que fallait mieux coller le plus fort au basque jusqu'à la mort. Opinion strictement personnelle. Pourtant, m'battre contre des moulins à vent n'ayant jamais été dans mes cordes, j'laisse Auditore à ses trafics fumeux. Suivant la masse, et possédant déjà un habit passe partout, je n'ai qu'à trouver un capuchon assez grand dans ce qui traîne sur les morts. Je devrais quelques dettes à des cadavres, cette aventure commence mal. Les hommes de l'assassin sont disciplinés et bien entraînés, on fuit rapidement à l'opposé des vicieux nuages toxiques. Les couloirs s’enchaînent et se succèdent, et le gaz tombe comme une douche sur nos têtes. Un imprévu plus qu'imprévu, et nous mettant dans une sacrée panade.
        Nous sprintons à présent vers la maigre lumière au bout de notre couloir. Elle arrivait comme filtrée à travers la roche, et la sueur et l'effort nous la faisait danser comme une luciole. J'avais bien fait d'économiser mes forces, car plus on avançait, et plus la fumée prenait du terrain sur nous. Je vous dis sa posément mais j'ai la turbine à cent à l'heure ; J'attrape un assassin, ce qu'il y'a de bien avec eux, c'est qu'il sont livrés en kit. De quoi grignoter du terrain sur notre implacable adversaire qu'est le poison, je fiche un morceau de mon habit en lambeau. J'tâte des potions au hasard, aspergeant goulûment mon chiffon. Alors que la fumée croyait nous avoir, je défonce la parois de gauche, provoquant un brusque appel d'air qui nous la dévie un instant. Au même moment, je lance le chiffon dans l'air, provoquant une réaction qui propulse directement notre adversaire impalpable dans le fond du boyau.

        On fonce une dernière fois, et c'est presque fatigué que j'arrive à l'ouverture. La rayure est plus nette, ce sont des barreaux qui nous font face. Les hommes sont presque découragés tandis que le démon des égouts remontent vers nous. Il paraît aller encore plus vite, comme pour venir se venger. Je bande mes muscles en serrant les dents ; Des balafres s'ouvrent une nouvelle fois. Le soleil est rouge dans l'horizon, faisant comme un grosse étoile dans le ciel bleu foncé. Il est encore clair, mais la puanteur des lieux lui donne cette teinte nauséabonde. J'attrape un barreau graisseux à pleine mains, mes muscles rougeoyant presque sous l'effort, mon souffle se faisant court, mes tendons  craquant.
        Heureusement que la négligence est de rigueur dans cette établissement dépravée, sinon, les gars, moi et les assassins, on aurait jamais pu sortir. Nos derniers liens avec cet enfer cède, et nous respirons l'air pur pour la première fois depuis longtemps. Tu vois quand j'te disais que parfois j'suis la plume.

        ***


        "J'commence à croire que ce n'est pas la chance qui m'a fait tomber sur toi avant qu'on nous repère. Au moins tu vois contre quel type de connard on se bat. On a pu sauver une petite partie de esclaves,  et l'ensemble des souterrains est vide à présent. Cela nous simplifie au moins une partie du plan. Je pense que tu as tout de même une idée de ce que sera ma prochaine question …"


        - Je te connais toi, mon p'tit bonhomme. Je sais comment tu vas faire, tu vas tout mettre à feu et à sang, et l'affaire est dans le sac ? J'te previens, Goa est un sacré sac de nœud... j't'apprend surement rien, mais c'est que le début de tes emmerdes …

        J'me lave les mains, pleines de glaises pour ma part. J'ai la patte blanche, comparé à certains assis parmi nous. Je lui retourne son sourire.

        - J'suis à ton service, Auditore. Pour une vie que j'te dois, t'en auras trois d'la mienne.

        J'lui tends ma lourde paluche.

        - Et ton problème n'a jamais été ni l'gouvernement, ni les fonctionnaires, ni les connards de leurs espèces... mais plutôt l'homme en règle générale. Faut s'y faire, on a quelques soucis de droiture s'tu vois ce que je veux dire !


          L'assassin eut un éclat de rire dédaigneux. Ouais Judas, c'est ça : un sac de noeud. Mais les noeuds sont faits de vipères et de vermines vermineuses par ici. Tu doutes encore de ce qu'on va y faire ? T'en as pas assez vu dans les souterrains ? Pour sûr qu'il fait pas ça par bonté de coeur, sinon la simple vue du sang le révulserait. Non, c'était un assassin. Et toi, le colosse, t'es un poil trop naif, tu sais. Les assassins restants se regardèrent, cherchant dans le regard de leur leader si l'opération avait été un succès ou non. Rafael acquiesça, mais la colère générée par la réaction de la milice de cette foutue ville l'avait pris de court. Bordel, sacrifier autant de vie en un claquement de doigt. Même lui n'en était pas capable. Il s'assit là, prétextant que Grey Terminal les protégerait le temps qu'il faudrait. Quoi d'autre ? Il était là pour mener sa révolution éclair et il ne pouvait se permettre de laisser le temps à ce royaume de comprendre ce qu'il lui arrivait. Qui prendrait crédit à la parole d'un arriviste tel que lui ? Oh, mais il avait des plans. Et des plans en grand nombre. Alternatives, échecs. Tout cela faisait partie de son schéma, il savait déjà où tout ça pourrait les mener. Tellement de possibilités, si peu de temps.

          "Purifier ... Tu crois sincèrement que ça marche comme ça ? Regarde ce qu'ils ont fait au Grey Terminal, combien de fois le feu et le sang est passé ici ... Et putain, la même dans les souterrains." cracha l'assassin, rageant tant contre son propre ego mis à mal que contre les actions des autorités.

          Il sortit une cigarette de sa poche intérieure, en envoya une à Judas. Il se l'alluma négligemment, avant de jeter son briquer à son interlocuteur. Il aspira plusieurs bouffées avant de se rendre compte que la nuit les avait succédé. Le crépuscule avançait pour ne plus laisser que les deux hommes au bord de la rivière. Des hommes qui se gaussaient des dangers du Terminal à la nuit tombée. Il n'y en avait pas beaucoup de cet acabit qui pouvaient lorgner les bandits sans avoir peur du retour. Cependant, l'assassin remit sa capuche sur son crâne. Il n'avait pas envie qu'on lui fasse de fausse publicité, sans compter que la suite de son plan ne souffrirait pas de pareilles erreurs.

          Judas. Parlons-en de Judas. Il le connaissait, pas aussi bien qu'il l'aurait aimé mais cela suffirait. Il était sûr de sa loyauté dans cette affaire. Oh, pas envers lui non. Envers sa prétendue morale, sa vie qu'il lui devait. Chanceux d'être tombé dessus ? Assurément. Mais lorsqu'il avait suivi la piste du 'Atlas de Goa', il ne s'attendait pas à être déçu. Et il ne l'avait pas été. Quand les gars avaient commencé à chialer sous sa poigne en lui disant qu'ils ne faisaient que suivre les ordres, ça l'avait interloqué. Alors il avait laissé les assassins derrière lui. Son erreur, certainement. Puis il avait remonté le filon. Et tout massacré. Sans exception. Pas de témoin, pas de langue trop agile. Si un crétin avait lâché le pot au rose à la première taloche, il pensait les autres capables de pire. Ainsi, il était tombé sur Judas, enchaîné. Et il avait su que la chance lui faisait un clin d'oeil.


          "Il y aura du feu, il y aura du sang, ouais. Toute révolution passe par le sang : celui qui te dira le contraire, il n'en aura jamais vécu. Mais au final, c'est le prix de la libération, hein ?" lui fit-il, maculé du sang de ses victimes qu'il était.

          "La question n'est pas de savoir combien de vies tu me dois, Judas. Mais de savoir si tu seras capable d'affronter une Révolution et de la mener à bout pour le bien du peuple." continua-t-il en insistant bien sur ces derniers mots.

          Sérieusement, Rafael ? Encore ces anciennes lubies. Oui, ma grande. Le choix qu'il faisait pour que les autres n'aient pas à le faire. C'était pas un acte de bonté de coeur, c'était un acte de justice. La justice était franche, intransigeante. Calculatrice, sanguinaire. Du moins lui l'était. Son âme était noire, son coeur était carmin. Utiliser le mal pour faire le bien, une belle stratégie non ? Sauf qu'il n'y avait rien de bon dans ses actes, seules les conséquences étaient fortuites. Il était un guerrier du peuple, et cela ne changerait jamais. Mais qu'on n'ait jamais l'audace de lui faire croire qu'il agissait en homme de bien.


          "Disons que ton arrivée fortuite m'a donné une petite idée. Un piège, encore une fois. Un truc qui permettra d'éviter que trop de sang ne coule. Et l'histoire de tes trois vies ... ça risque d'arriver bien plus vite que tu ne le crois." poursuivit Rafael, fermant les yeux.

          Une gerbe de fumée s'échappa de lui, gagnant rapidement les alentours. Il resta ainsi concentré pendant cinq minutes, s'assurant que la brume artificielle couvre une étendue assez large. La moindre personne s'aventurant dans le périmètre ne pourrait pas aller plus loin que la limite du brouillard sans être confondue. Limite qui allait bien au-delà de son mantra, qui lui assurait déjà une solide sécurité. Une fois cela fait, il soupira, reprenant son souffle face à cet ultime effort.


          "Bref. On peut parler tranquillement. J'ai besoin que tu revêtes l'habit d'assassin et que tu arbores cette carte." fit-il en lui tendant l'As qu'il avait hérité du Seigneur Ombre.

          "La rumeur selon laquelle Rafaelo Di Auditore est en réalité un As de la Révolution n'a pas encore franchi les lèvres des décisionnaires. Imagine donc : moi, travaillant pour un As de la Révolution sur Goa. Dis moi, à quel point cela ferait peur à nos adversaires ?" ricana l'assassin, choisissant avec précision ses mots.

          Au cas où, comme toujours.

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          -Bien, je suis content de voir qu'au moins vous avez réussi a repousser cet imprévu. Vous irez loin Commandant.

          Une nuit s'était passé depuis l'inspection surprise de la veille, et Jonas Kopakayachi, Premier Contrôleur Royal de Goa était de retour dans la zone de surveillance. Après tout, c'est pour ça qu'il était lui et nul autre le premier contrôleur royal, parce qu'il accordait une grande importance aux détails, et n'en oubliait jamais un seul.

          -Mais quelque chose m'échappe, vous n'avez pas encore commencé à nettoyer les tunnels ? Je n'ai vu que le corps du précédent commandant en venant... Alors qu'il me semble qu'il devrait y en avoir toute une pile attendant d’être sorti de la. Et j'aurais apprécié pouvoir observer un de ses assaillants de plus prés.
          -Et bien euh. C'est a cause du gaz monsieur.
          -Le gaz ? Poursuivez commandant, faites comme si je n'étais au courant de rien.
          -Bien monsieur. Le gaz que nous avons lancé hier n'est pas parti des tunnels, c'est un gaz très dense et, il ne s'évacue pas comme l'air que nous respirons habituellement la dedans. Et comme il est mortellement dangereux, nous ne pouvons pas descendre récupérer les corps.
          -Oui oui je comprends mais. Il n'y a rien de prévu pour pallier a ce défaut ?
          -Si bien sur. Nous avons retrouvé la procédure de nettoyage et c'est en fait assez simple. Le souterrain est situé sous le niveau de la mer et munie de vannes qui le relie à la mer. Il suffit de le noyer puis de la vider. Et le gaz et les cadavres s'évacueront avec l'eau.
          -Ah oui... C'est très bien vu. Le concepteur de ce complexe remonte un peu dans mon estime, c'est une bonne chose. Je présume que vous avez procédé au remplissage ? Combien de temps avant qu'on puisse accéder aux tunnels sans branchies ?
          -Une bonne semaine monsieur. Les pompes ne sont pas vraiment prévues pour ça.
          -Bon, et bien votre direction reste exemplaire. Je repasserai surement dans une semaine. Continuez comme ça Commandant.
            Un fin crachin envahissait le coin de verdures où on avait posé bagage. C'était pas aussi classieux qu'une zone portuaire, mais un petit cours d'eau passait là, et des arbres marécageux faisaient une sorte de petite alcôve autours de nous. C'étaient p'tête bien des pins, mais à l'odeur et à la texture, rien n'avait son pareil ici pour moi.

            Destabilité, je laisse Auditore prendre la parole, et peut-être un peu de trop d'ailleurs. Le voilà qui s'emballe dans son idéal. Tellement à sa recherche qu'il est aveugle à tout ce qu'il foule du pied... C'est le problème avec les fanatiques, toujours à se mettre dans le faux pour prêche ce soit disant vrais. Ce qu'il y'a de bien quand tu n'adhère à aucune, c'est que t'es libre de faire ce qu'il faut pour résoudre une situation.

            Si j'ai pas ma pareille pour régler une embrouille, c'est que j'me met aucune limite. Je ne réfléchis pas, je punis. La batarde engeance du mal ne nous auras jamais, nous lui défoncerons l'occiput avant qu'elle puisse ouvrir sa grande gueule ! On fait pas dans la dentelle, ni dans le tricot, nous ce qu'on veut c'est faire voir au sang de touts ses sales fils de pute démoniaque de quel bois on s'chauffe. Pas de compromis, pas d'échappatoire ni de demi mesure ; Touts les tortionnaires doivent souffrir. Comprendre que le faible possède maintenant une arme, un moyen de défense inébranlable et imbattable. Pire que le buster call, car elle vit, elle meurt et elle tue en son nom.
            La justice, la vraie. Celle qui s'abat sur ceux qui ne la connaissent, qui ne la craignent pas. Tout ceux qui représente un danger pour ce monde ne doivent plus opérer. C'est pas une question de couleur, ni d'humeur, encore moins d'histoire … C'est juste. Le retour des choses, une  monnaie difficile à avaler pour les radins de cette espece. Ici comme ailleurs, il est pas question d'autre chose pour moi. La dette que j'ai contracté est personnel, elle me mènera vers mon sésame.
            Je regarde Rafaelo en demi-faïence, un sourire discret sur la face. T'façon je souris tout le temps... Qui s'en méfierait.

            - C'est ça la question, Auditore : Qu'est-ce que toi tu compte faire ? C'est ma question en tout cas.

            J'attrape l'aigre bâton de tabac qu'il me file, l'adjoint d'un geste précis à mes lèvre et fait du feu avec mon amadou. Je tire les bouffés du condamné avec un délice bien dissimulé. Mon façies est bizarre. Tout tordus et contusionné. J'suis passé dans une machine à laver, et j'en suis sortis encore plus sale. Ca m'fait une drole d'impression somme toute, mais j'me dis que celui qui s'est jamais fais sonner tambour n'a jamais vécu d'aventure.
            J'me gratte le crâne, et des plaques de sang séché tombent par terre. Au fur et à mesure que je m'essuie la peau, les plaies s'affinent. C'était surtout une épaisse couche de croûte quasi suppurante. J'devrais survivre. En dessous, une peau rose comme un bébé me démange et m'donne une gueule de galeux. Pire …

            - T'doute de moi ? Le sang et l'feux, la révolution tout ça … C'est que d'la guerre et pire encore ! C'est tout ce que c'est, et j'en sais un sacré bout en champ de bataille. Tu peux au moins avoir confiance en ça, mh ?

            J'le regarde. Oh oui tu peux le croire, ou tu le verras. Même que si tu me pousse trop tu pourrais bien y goûter. Je sais que t'es bien plus puissant que moi, mais j'ai jamais ciré les pompes de qui ce soit, Auditore. J'lui fais un signe amical en fumant ma clope. Un grand sourire qui donnerait envie d'men coller une tellement qu'il est niais. Pourtant derrière tu sens toujours la présence de ma colère. J'ai mal, et la douleur me donne envie de frapper.

            - Tu fais d'ja peur, mais alors si j'dois prendre ton personnage, j'avoue que le mélange doit valoir le coup d'oeil dans le genre bête monstrueuse héhé !

            J'ironise, mais la question qu'on se pose tous c'est ; Mais comment tu vas faire passer un grand barbu de deux mètres cinquante pour un assassin ? Il me tends un bout de carton banale, aux armes de l'As de piques. Je l'astique et le regarde sous toutes ses coutures ... As de la révolution, déçisionnaire ?Tout cela m'échappe au plus haut point. Mon regard doit bien refleter ma désillusion ... Quoi, c'est tout ce que sa fait d'être un As des As chez les gris ?  



              Qu'est-ce qu'il comptait faire ? Voyons, la réponse était évidente. L'assassin marqua un temps d'arrêt. Evident pour lui, quant à trouver les mots pour l'expliquer à Judas. Hm. Pour lui, pour le peuple ? Vraisemblablement, c'était les deux à la fois. L'assassin se racla la gorge, puis se recoiffa les cheveux en arrière. Une bonne question à vrai dire. Il ne savait pas par quoi commencer, il avait un plan qui évoluait sans cesse, comme venait de le montrer ce gaz. Il hausse les épaules et reprend une bouffée de nicotine. Une des rares choses à même de l'apaiser. D'éteindre, ou de cacher, ce feu consumant qui lui brûlait les entrailles. Vengeance, haine. Colère. Choses qui donnaient du coeur à sa bataille. Des forces et un but. Oh ça, il avait la haine. La haine contre ceux qui profitaient des autres. Et si on pouvait le targuer de tous les noms, il n'était pas un homme qui profitait des autres. Manipulateur, certes, mais pas un parasite. C'était cette caste qu'il allait éliminer de Goa. Et ici, les parasites se paraient d'or et de bonnes manières.

              "Ce que je veux faire ? Purger Goa des parasites qui drainent la vie du peuple. Je ... Hé hé. Oui, JE veux faire tomber la royauté et ses sbires. Laisser le peuple libre de penser avec ça, surveiller sa reconstruction et poser les bases saines d'un régime égalitaire. La liberté pour tous. Voilà ce que je veux." répondit-il, soufflant sa fumée.

              Douter de Judas ? Bien sûr qu'il doutait. Pas de sa parole, pas de son honneur de guerrier. Non, il n'était pas assez ... contre nature pour ça. On pourrait prendre ça pour de la bêtise, mais c'était tout le contraire. Une forme de sagesse, primitive certes. Mais sagesse tout de même. Une force de conviction et de caractère. C'était ça qu'il aimait chez cet homme. Il transpirait la force et la détermination. Il n'en demandait pas moins pour une telle bataille.


              "La guerre. C'est exactement ça. Sauf qu'à la guerre, il y a des soldats qui massacrent le peuple. Ici, c'est l'inverse qui serait bienvenu. Mais il faut plus que des soldats pour gagner une guerre. Il faut des gens comme toi, des gens qui font leur passage à la force de leurs mains. Il faut des gens comme moi, des gens qui font leur passage à l'insu des autres." poursuivit l'assassin avec un sourire énigmatique.

              Il faut une face visible et une face invisible. Il faut un marionnettiste et un pantin. Un pantin qui attire l'attention et écrase l'adversaire alors que le danger le plus grand est derrière lui. L'assassin qui rôde et le leurre qui fait le pitre au milieu du champ de bataille. Quoi qu'il en soit, Judas était encore blessé et maculé de sang. Il avait vécu les pires tourments, à n'en pas douter, au fond de ces souterrains. Il récupérait à une vitesse hallucinante, comme si sa chair n'avait demandé qu'à goûter à l'air frais pour revivre. Un monstre taillé dans un roc imprenable. Hé hé. Exactement ce qu'il lui fallait, une bête pareille à lui. Un monstre de volonté invincible. Hé hé. Un bois solide, plus que l'acier même.


              "On verra ça en temps voulu, tu devrais prendre quelques heures à toi pour l'instant. Je vais envoyer mes hommes à toi. Ce soir, je te parlerais plus de ton rôle et comment te fondre dans mon ordre. Suis les, je te retrouverais à ce moment là." lâcha-t-il avant de ramener la fumée à lui d'un geste.

              Puis la fumée commença à former un amas qui masqua l'assassin. Elle se dissipa lentement pour ne plus révéler qu'un espace vide. À très vite, Judas.


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