Kikai No Shima.
Il y a des mois qu'on en a plus parlé. D'ailleurs, pour Rachel, c'est même la première fois. Et quelle première fois.
Les Sea Wolves avaient débarqué la veille. Tout le monde avait débarqué dès le moment où ils avaient mouillé, non loin du navire de Saint Just, fraichement arrivée elle aussi. Rachel, elle, avait passé la première journée à garder le navire, non par devoir mais par manque d'envie d'aller perdre ses berrys dans des tripots et des jeux d'argents. Et lorsque le premier soir Lin revint plus énervée que jamais d'avoir perdu tout son solde, ça confina Rachel dans son envie de rester loin de toutes ces agitations. Cette île qui ne dort jamais.
Puis vint rapidement la seconde nuit, celle avant que Toji et Red n'aillent piller le casino de Titanic Thompson. Et si Kikai no Shima était réputée pour avoir des nuits très courtes, à bord du Fenrir à quai, Rachel s'était laissée gagner par cette insomnie récurrente. Elle laissait son regard glisser sur les trop nombreuses lueurs de la ville éveillée et tentait d'isoler chaque son qu'elle pouvait entendre. Par là-bas, le cri d'un gagnant. Ici la plainte d'un perdant. Dans ce coin, par là-bas, visiblement une maison de passe. Cet établissement là, il semblerait que c'était l'un de ceux qui n'avait pas payé sa dette. Ça s'entendait aux supplications. Ça se voyait à la fumée qui commençait à s'élever. À l'incendie qui était en train de prendre. Voilà donc la vie dans le coin. Quoi de plus normal me direz-vous. Mais pour Rachel, elle avait beau savoir qu'elle débarquait dans un monde qu'elle ne connaissait que de renom, ce n'était pas pour autant qu'elle s'y était faite. Et après cinq minutes à attendre, à espérer que quelqu'un intervienne, que la marine locale se déplace, elle prit la décision de ne pas rester inactive dans cette ville dont elle ne connaissait malheureusement rien à part une chose.
La 149è division est un fruit pourri.
Elle tourna les talons et s'engouffra dans ses quartiers qu'elle partageait avec Lin et récupéra sa faux en quatrième vitesse en réveillant la tigresse et remonta sur le pont plus vite qu'un boulet de canon. Et à peine moins destructeur. Depuis le pont, elle prit quelques petites secondes pour placer une punaise mentale sur le plan de la ville qui s'offrait à elle puis s'élança sans demander son reste. Pourquoi en aurait-elle besoin ? Elle serait de retour dans moins de deux heures. Trois maximum.
Et puis, ce n'était pas comme s'ils étaient bloqués sur cette île pour les quatre prochains jours.
Elle courut deux bonnes minutes, faux sur l'épaule et bousculant les quelques passants déjà trop ivres, d'alcool à cause de la boisson ou de colère à cause d'une cuisante défaite, et atteignit le lieu de l'incendie moins de dix minutes après le départ des flammes ; très probablement criminel. Elle pouvait ainsi observer les méthodes de Squallo. Les méthodes des Chimamire. Oh non, elles ne lui plaisaient pas. Surtout que presque personne ne faisait rien. Et le « presque » comprenait le couple de jeune à qui appartenait feu l'établissement de douches publiques, ceux qui pleuraient toutes les larmes de leurs corps comme dans l'espoir qu'elles pourraient éteindre les flammes. C'est eux que Rachel s'en alla trouver. Elle ne pouvait rien faire d'autre pour la maison. Rien d'autre pour eux.
-Qui a fait ça ?
-Quoi ? King Bradley bien sûr. Qui d'autre. Pourquoi ?
-Vous n'avez pas bien l'air étonnés...
-C'était dans la close... en petites lignes.
-Alors si vous êtes d'accord... fit-elle une ironie soudain violente. Où est-il allé ?
-Chez un autre, par là bas. Mais...
-Merci. Et bon courage.
Elle s'en fut sans demander son reste, la lueur orangée jouant sur sa veste d'officier épinglée à ses épaules, les flammes se reflétant dans sa faux trop grande. Elle ignora les crépitements des flammes et l'odeur suffocante. Notre faucheuse traça sa route tout droit. Et finalement, elle tourna à un angle de rue que lui avait indiqué le jeune éperdu. Face au Lieutenant d'élite, un petit restaurant visiblement assez rempli, avec sur le pas de la porte un homme grand, les cheveux tirés en arrière, les poings dans les poches et le regard perçant. Manteau sur l'épaule, il toisait deux hommes de presque trois mètres chacun et qui visiblement, n'avaient pas envie de le voir traîner autour du magasin qu'ils gardaient. Une des rares enseignes du coin à refuser la suprématie des Chimimare ? En tout cas, les deux gorilles semblaient assez confiants. Mais le regard de l'homme restait imperturbable. Il y eut un échange de semonces de la part des deux gardes à quoi l'homme répondit d'un crachat de mépris. Les deux autres semblèrent assez satisfaits de cette réaction. Ils armèrent leurs poings et l'homme abaissa son poids.
Mais c'était pour cette raison que Rachel l'avait suivi. Elle n'était pas dans son monde, mais il n'y avait aucune raison à ses yeux pour que des hommes instaurent une justice qui n'était pas celle de la marine. Qui n'était pas une justice juste. C'est haletante d'avoir pressé le pas qu'elle les interrompit.
-Bradley !
L'homme se retourna, interloqué. Les deux molosses eurent un instant de doute en entendant un tel nom. Preuve qu'ils ne feraient pas long feu dans ce monde. Mais alors que les trois protagonistes avisaient une Rachel au regard dur et la faux gigantesque, du haut de son mètre soixante, ils eurent tous un rictus. Son uniforme ne signifiait vraiment rien ici. À peine une raison gratuite de cracher sur les gens. Non, elle n'était pas encore assez connue.
-Qui le demande ?
-Moi.
-C'est très utile, merci. Tu lui veux quoi ?
-Lui signaler que le bon sens interdit de cramer des maisons comme ça.
-Hh...Que tu n'aimes pas nos manières ne me fait ni chaud ni froid.
-Non, je ne les aime pas. Tant que je serai sur cette île, je ne permettrai pas que l'on mette sur la paille des familles pour votre petit business aussi lucratif soit-il.
-Tu te prends pour qui là ? Hh... Tu n'es pas d'ici alors apprends à rester à ta place, comme tous les autres. Ils disaient la même chose que toi au départ. Puis ils se sont fait à nos manières. Hh... C'est comme ça.
-Je ne reste pas assez longtemps pour changer quoique ce soit, mais j'insiste, je ne permettrai pas que ça se passe sous mes yeux.
-Ferme les donc, greluche, tu me fais perdre mon temps.
-Et toi le mien.
-Hh...
Écoute, tu as beau être bien trop impertinente à mon goût, je ne suis pas payé pour te casser ta gueule d'amour. Hh... Et puis je m'en voudrais. Mais si tu ne retournes pas bien vite d'où tu viens et me laisses pas faire mon boulot en paix, je peux t'assurer que je vais me faire un plaisir de prendre une pause juste pour m'improviser ton chirurgien esthétique.
-Écoute pyromane à la manque, je suis pas méchante, alors je vais le dire une dernière fois avant de le devenir. Tu fais ce que tu veux sur cette île, mais pas tant que je serai là et surtout pas si « ce que tu veux » impliques de briser des vies.
-Hh... Vous m'excuserez les gars, j'ai une poupée dont le ressort est cassé. Je la répare et je reviens pour vous.
-Si tu pouvais ne pas revenir, Squallo...
-...Squallo ?
-Oui. Un souci avec ça aussi ?
-Mais, tu n'es pas Bradley ?
Et tous trois de la regarder comme si elle était une extra-terrestre.
Il y a des mois qu'on en a plus parlé. D'ailleurs, pour Rachel, c'est même la première fois. Et quelle première fois.
Les Sea Wolves avaient débarqué la veille. Tout le monde avait débarqué dès le moment où ils avaient mouillé, non loin du navire de Saint Just, fraichement arrivée elle aussi. Rachel, elle, avait passé la première journée à garder le navire, non par devoir mais par manque d'envie d'aller perdre ses berrys dans des tripots et des jeux d'argents. Et lorsque le premier soir Lin revint plus énervée que jamais d'avoir perdu tout son solde, ça confina Rachel dans son envie de rester loin de toutes ces agitations. Cette île qui ne dort jamais.
Puis vint rapidement la seconde nuit, celle avant que Toji et Red n'aillent piller le casino de Titanic Thompson. Et si Kikai no Shima était réputée pour avoir des nuits très courtes, à bord du Fenrir à quai, Rachel s'était laissée gagner par cette insomnie récurrente. Elle laissait son regard glisser sur les trop nombreuses lueurs de la ville éveillée et tentait d'isoler chaque son qu'elle pouvait entendre. Par là-bas, le cri d'un gagnant. Ici la plainte d'un perdant. Dans ce coin, par là-bas, visiblement une maison de passe. Cet établissement là, il semblerait que c'était l'un de ceux qui n'avait pas payé sa dette. Ça s'entendait aux supplications. Ça se voyait à la fumée qui commençait à s'élever. À l'incendie qui était en train de prendre. Voilà donc la vie dans le coin. Quoi de plus normal me direz-vous. Mais pour Rachel, elle avait beau savoir qu'elle débarquait dans un monde qu'elle ne connaissait que de renom, ce n'était pas pour autant qu'elle s'y était faite. Et après cinq minutes à attendre, à espérer que quelqu'un intervienne, que la marine locale se déplace, elle prit la décision de ne pas rester inactive dans cette ville dont elle ne connaissait malheureusement rien à part une chose.
La 149è division est un fruit pourri.
Elle tourna les talons et s'engouffra dans ses quartiers qu'elle partageait avec Lin et récupéra sa faux en quatrième vitesse en réveillant la tigresse et remonta sur le pont plus vite qu'un boulet de canon. Et à peine moins destructeur. Depuis le pont, elle prit quelques petites secondes pour placer une punaise mentale sur le plan de la ville qui s'offrait à elle puis s'élança sans demander son reste. Pourquoi en aurait-elle besoin ? Elle serait de retour dans moins de deux heures. Trois maximum.
Et puis, ce n'était pas comme s'ils étaient bloqués sur cette île pour les quatre prochains jours.
Elle courut deux bonnes minutes, faux sur l'épaule et bousculant les quelques passants déjà trop ivres, d'alcool à cause de la boisson ou de colère à cause d'une cuisante défaite, et atteignit le lieu de l'incendie moins de dix minutes après le départ des flammes ; très probablement criminel. Elle pouvait ainsi observer les méthodes de Squallo. Les méthodes des Chimamire. Oh non, elles ne lui plaisaient pas. Surtout que presque personne ne faisait rien. Et le « presque » comprenait le couple de jeune à qui appartenait feu l'établissement de douches publiques, ceux qui pleuraient toutes les larmes de leurs corps comme dans l'espoir qu'elles pourraient éteindre les flammes. C'est eux que Rachel s'en alla trouver. Elle ne pouvait rien faire d'autre pour la maison. Rien d'autre pour eux.
-Qui a fait ça ?
-Quoi ? King Bradley bien sûr. Qui d'autre. Pourquoi ?
-Vous n'avez pas bien l'air étonnés...
-C'était dans la close... en petites lignes.
-Alors si vous êtes d'accord... fit-elle une ironie soudain violente. Où est-il allé ?
-Chez un autre, par là bas. Mais...
-Merci. Et bon courage.
Elle s'en fut sans demander son reste, la lueur orangée jouant sur sa veste d'officier épinglée à ses épaules, les flammes se reflétant dans sa faux trop grande. Elle ignora les crépitements des flammes et l'odeur suffocante. Notre faucheuse traça sa route tout droit. Et finalement, elle tourna à un angle de rue que lui avait indiqué le jeune éperdu. Face au Lieutenant d'élite, un petit restaurant visiblement assez rempli, avec sur le pas de la porte un homme grand, les cheveux tirés en arrière, les poings dans les poches et le regard perçant. Manteau sur l'épaule, il toisait deux hommes de presque trois mètres chacun et qui visiblement, n'avaient pas envie de le voir traîner autour du magasin qu'ils gardaient. Une des rares enseignes du coin à refuser la suprématie des Chimimare ? En tout cas, les deux gorilles semblaient assez confiants. Mais le regard de l'homme restait imperturbable. Il y eut un échange de semonces de la part des deux gardes à quoi l'homme répondit d'un crachat de mépris. Les deux autres semblèrent assez satisfaits de cette réaction. Ils armèrent leurs poings et l'homme abaissa son poids.
Mais c'était pour cette raison que Rachel l'avait suivi. Elle n'était pas dans son monde, mais il n'y avait aucune raison à ses yeux pour que des hommes instaurent une justice qui n'était pas celle de la marine. Qui n'était pas une justice juste. C'est haletante d'avoir pressé le pas qu'elle les interrompit.
-Bradley !
L'homme se retourna, interloqué. Les deux molosses eurent un instant de doute en entendant un tel nom. Preuve qu'ils ne feraient pas long feu dans ce monde. Mais alors que les trois protagonistes avisaient une Rachel au regard dur et la faux gigantesque, du haut de son mètre soixante, ils eurent tous un rictus. Son uniforme ne signifiait vraiment rien ici. À peine une raison gratuite de cracher sur les gens. Non, elle n'était pas encore assez connue.
-Qui le demande ?
-Moi.
-C'est très utile, merci. Tu lui veux quoi ?
-Lui signaler que le bon sens interdit de cramer des maisons comme ça.
-Hh...Que tu n'aimes pas nos manières ne me fait ni chaud ni froid.
-Non, je ne les aime pas. Tant que je serai sur cette île, je ne permettrai pas que l'on mette sur la paille des familles pour votre petit business aussi lucratif soit-il.
-Tu te prends pour qui là ? Hh... Tu n'es pas d'ici alors apprends à rester à ta place, comme tous les autres. Ils disaient la même chose que toi au départ. Puis ils se sont fait à nos manières. Hh... C'est comme ça.
-Je ne reste pas assez longtemps pour changer quoique ce soit, mais j'insiste, je ne permettrai pas que ça se passe sous mes yeux.
-Ferme les donc, greluche, tu me fais perdre mon temps.
-Et toi le mien.
-Hh...
Écoute, tu as beau être bien trop impertinente à mon goût, je ne suis pas payé pour te casser ta gueule d'amour. Hh... Et puis je m'en voudrais. Mais si tu ne retournes pas bien vite d'où tu viens et me laisses pas faire mon boulot en paix, je peux t'assurer que je vais me faire un plaisir de prendre une pause juste pour m'improviser ton chirurgien esthétique.
-Écoute pyromane à la manque, je suis pas méchante, alors je vais le dire une dernière fois avant de le devenir. Tu fais ce que tu veux sur cette île, mais pas tant que je serai là et surtout pas si « ce que tu veux » impliques de briser des vies.
-Hh... Vous m'excuserez les gars, j'ai une poupée dont le ressort est cassé. Je la répare et je reviens pour vous.
-Si tu pouvais ne pas revenir, Squallo...
-...Squallo ?
-Oui. Un souci avec ça aussi ?
-Mais, tu n'es pas Bradley ?
Et tous trois de la regarder comme si elle était une extra-terrestre.