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Souvenirs cuisants

Garnison de la Marine,
Aire d'entrainement,
6h00


-Alors p’tite, t’crois qu’c’est à coup d’multiplications et d’formules mathémalgébriques qu’tu va m’battres ?

Le Sergent Instructeur Fattynuts se mit à sautiller sur place, donnant des petits coups de poings dans le vide, tout autour de lui. Son jeu de jambes tenant autant du ballet que du pugilat faisait de lui la terreur des recrues soumises à l'obligation des cours de combat au corps à corps.
Les premiers jours de l’instruction il portait encore ses poings américains en cuivre…mais suite aux menaces de suicide de la plupart des bleus l’administration prit peur et le somma de combattre à mains nues. Il le fit, mais en profita pour chausser une magnifique paire de chaussures à bouts ferrés, sur deux épaisseurs. Ainsi le roi du gnon devint la terreur des tibias pour les jeunes femmes, et le fléau des burnes pour ces messieurs. Au final, ce fut pire. Après ce triste évènement les recrues se mirent dans une certaine mesure à accepter leur sort avec fatalité.

Au fond, c’était pour leur bien, comme il le leur répétait si souvent. Chaque jour que Dieu faisait, qu’il vente ou qu’il pleuve, ils se rendaient en short et débardeur sur l’aire d’entrainement. Puis c’était parti pour quatre heures de combat au corps à corps.
Les faibles avaient démissionné. Les gros avaient maigris. Les maigres avaient fondus. Ceux qui croyaient savoir se battre étaient quant à eux retomber en enfance devant la danse des castagnes du Sergent. Ce dernier aimait cogner sans distinction de sexe ou d’âge. Pas avare pour un sou de BIM et de BAM dans la tronche. Pour Gibbons et Domino il se faisait un plaisir de les prendre tous les deux en même temps, et surtout d’en prendre un pour taper sur l’autre. Au sens propre. Sérieusement.

- T’sembles pas pressée qu’ta joue fasse l’rencontre d’mon poing, Taka-qui-chie…T’crois p’tet qu’j’ai me retenir parce que t’pisses assise ?


Ce matin Sophie-Laure devait passer en toute première. C’était la pire place et tout le monde le savait dans les rangs…le Sergent se faisait un plaisir de rétamer proprement le premier pour que les autres n’ai plus qu’à faire dans leur culottes en attendant leur tour. Vicieux. Vicieux mais efficace. Si un jour vous croisez quelqu’un qui vous dit qu’il n’a pas tremblé pendant les cours du Sergent Instructeur Jérôme Laurence Fattynuts, vous pourrez le regarder droit dans les yeux et le traiter de fieffé menteur.
Et pourtant…et pourtant Sophie-Laure n’avait pas peur. Par contre le sentiment était tout aussi désagréable pour elle… : ce genre de petit entrainement et de concours d’insultes la barbé à un point de non-retour. C’était aussi supportable pour elle que de lécher goulument un cactus. Les regards braqués, les rires qui fusent…plus aucune paix intérieure.

- Ben qoua, Quat’z’yeux…Tu veux jouer les dures ? Faire celles qu’les insultes touchent pas ? T’veux qu’on d’mande à l’intendance d’aller prévenir ta grosse vieille môman ?

Les combats peuvent prendre fin sous deux conditions. L’une plus courante, et l’autre qui n’était encore jamais arrivée…soit la recrue soit le Sergent devait tomber KO. Alors, tout en sachant pertinemment qu’elle n’avait aucune chance de ne serait-ce que toucher le Sergent…elle décida d’agiter sous son nez un beau tissu rouge. Écarlate.


- Et la votre de mère, Sergent, c’est vrai ce que tout le monde dit sur elle et le poisso…


Douleur. Des phalanges sur une mâchoire. Douleur encore, un crâne qui cogne par terre. Quelques heures plus tard, au réveil, Sophie-Laure verra d’un tout autre œil les vertus d’efforts et de patience…