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Frite, fuite et cætera




Gnieuha Nnnnnn MARIGNAN !

D'un coup, sans crier gare, un corps émergea d'une pile de carton posé au coin d'une ruelle. Réveil difficile au milieu de nulle-part, l'âme en peine auto-proclamée Las Gambas venait de se dégager de son abri de fortune en gueulant n'importe quoi de bon matin. Le bras plaqué devant les yeux face à la lumière matinale s'engouffrant dans les rues de la ville, Kusa reprenait lentement du service après s'être réveillé enseveli par des déchets, presque dans son milieu naturel pourrait-on dire. Sans repère, le cul sur les pavés, savoir comment il en était arrivé là relevait de l'impossible. A vrai dire, à cette heure-là, toute tâche semblait ardue pour lui, son esprit, déjà pas très coopératif d'ordinaire, n'était pas encore assez chaud pour commencer à faire tourner les méninges. Tout ce qu'il pourrait gagner à activer sa réflexion ne serait qu'un claquage à un muscle si peu exploité. Machinalement, il écarta sa couverture de fortune et se releva, non sans mal, de sa couche improvisée afin de reprendre son voyage à travers les rues de Las Camp.

L'esprit vide, tout comme ses yeux, seul son corps semblait savoir quoi faire, le faisant déambuler au fil de pas hasardeux sur les pavés de la ville. Rien de plus que ce qu'il avait pu faire depuis qu'il avait posé les pieds sur l'île. Le chemin était dégagé, pas grand monde ne semblait être dehors à ce moment-là de la journée. Trop tôt ou alors trop effrayé par tout le ramdam des événements récents sur l'île, la population de ce merdier ne semblait pas être vraiment courageuse, ou alors elle attendait un retour au calme qui ne semblait jamais arriver. Kusa se retrouvait dans une artère un peu plus viable, le bout de ruelle d'où il venait devait principalement à jeter les ordures de son genre. Planté en plein milieu, le regard porté au loin sans raison, Kusaki ne savait pas quoi faire de sa peau, l'engrenage mental ne prenait pas pour lui permettre de planifier, comme à son habitude, quoi que ce soit. Au bout d'un moment à rester figé comme un idiot dans sa rue, une brise fit reprendre du service à son esprit. Il était temps de se bouger et donner un peu d'action à sa vie.

Alors que la brume mentale se dissipait peu à peu, Las Gambas pouvait se recentrer sur ce qu'il allait pouvoir faire de son précieux temps. Les méninges au boulot, la première chose qui lui vint à l'esprit était « comment j'ai pu arriver ici ». Cette question était problématique. Ce dont il se souvenait en dernier, c'était qu'il traînait encore dans la base des hommes-poissons, à boire partout où il pouvait. Après tout, il avait réussi à sympathiser avec ces gars-là par un heureux concours de circonstances et en retour, il avait eu le droit de vivre sa vie chez eux, sans se soucier de ce qui pouvait bien se passer ailleurs. A vrai dire, il n'était là que parce qu'il avait réussi à se retrouver dans le gang de Roy Dalton, et voilà bien longtemps qu'il ne l'avait pas vu plus que ça. Ceci expliquerait cela. Sans lui, il n'avait probablement plus son passe-droit, d'où la raison pour laquelle les poiscailles aient été si gentils et lui ai donné autant à boire hier et ainsi profiter enfin d'un de ses nombreux coma éthyliques pour se débarrasser de son corps dans la première ruelle venue. Pourtant, hormis être un parasite, un profiteur et avoir vidé plus d'une fois les stocks d'alcool, Kusaki avait été plutôt courtois. Incompréhensible.

Peu importe, il se retrouvait de nouveau seul, abandonné, dans une ville dont il n'avait rien à faire et qui n'avait pas l'air de vouloir de lui. Mais, même si le milieu était hostile, une idée lui trottait dans la tête. Après tout, ici, il avait trouvé des compagnons, dans des conditions déplorables, certes, mais ces joyeux lurons restaient des camarades. Ils semblaient plus savoir ce qu'ils faisaient que Kusa dans toute sa vie. Et quel formidable passeport pour quitter cet endroit, en plus Roy avait promis qu'il se débrouillerait pour avoir une cave fournie sur le bateau de son équipage tout neuf. Bref, tant de raisons qui faisaient peser la balance pour la suite de son aventure.



Bon bah, en route.


Une jambe après l'autre, Kusa commençait son périple pour trouver une quelconque trace de ses copains de fortune. Première étape, retrouver le camp des hommes-poissons. Pas une mince affaire, il n'avait même pas fait attention à comment il y était arrivé. Plein de courage, il s'élança dans sa quête pour retrouver la poissonnerie.
  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ
  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ



Bordeeeeeel


Furetant un peu partout, Kusaki n'arrivait pas à trouver une quelconque entrée pour rejoindre les types à moitié poisson. Sous une caisse, sous un papier, sous une table. Non, rien. Il lui était impossible de retrouver le trou de souris par où passer pour retourner dans les cavernes maritimes. Oui, évidemment, il aurait été trop simple d'aller directement chercher là où il y avait de l'eau, Kusa ne voyait pas ça comme ça. Le monde est totalement différent à travers ses yeux et la logique n'est en aucun cas de mise, ou tout du moins, l'on peut établir l'état inverse du bon sens. Peu importe. La tâche était finalement plus ardue que prévu, il faudrait plus que cinq minutes d'attention de sa part afin de remettre la main sur cette foutue caverne.


Jackpot !


Après un effort surhumain de concentration de sa part, Kusa avait tenu bon et gardait le cap sur son objectif et il en était récompensé. A ses pieds, un trou d'eau. Cela ne pouvait être que l'accès au camp des hommes-poissons. Il n'y avait aucune raison pour que ce soit autre chose. Après avoir remercié sa bonne étoile, fait quelques étirements avant le grand plongeon et s'être mouillé la nuque pour éviter tous les risques, il était prêt à se lancer et retrouver la compagnie de la poiscaille. Les mains jointes, les bras tendus, il se laissa tomber dans l'eau, plein d'espoir et de rêve, avec le plaisir du devoir accompli et du travail bien fait.


Blblblbl FAIT CHblblblbl


La tête la première, Las Gambas avait fait un plongeon facilement notable avec un 10 sur 10, en plein dans le sol. Ce qu'il avait vu n'était en fait qu'une flaque. Mais une belle flaque avec une belle profondeur causée par un trou dans cette portion de la rue. La tête à moitié dans l'eau de ce dernier étouffait le flot de jurons qu'il déblatérait à la seconde. Les rares passants ne comprenaient pas bien ce que faisait ce type qui semblait jouer à l'autruche, et s'en amusait bien. Alors qu'il relevait la tête de son espoir de retrouver ses camarades, il faisait face à l'hilarité de l'audience. Encore grincheux de cet échec cuisant, c'est sans retenue qu'il se préparait à insulter copieusement le public de ce spectacle de rue.


JE VAIS VOUS FAIRE LA PEAU MOI, CASSEZ VOUS DE LA AVANT QUE JE VOUS FASSE SUBIR... Kof kof... Eurk... Qu'est ce que...


Les habitants ne se faisaient pas prier, non pas parce que ces pseudo menaces leur avaient fait peur, mais plutôt voir un malade crier, le visage couvert d'eau et de bouillasse dégoulinante était suffisant pour penser que cette personne avait tous les syndromes de la folie furieuse et qu'il valait mieux s'en éloigner avant qu'il ne fasse n'importe quoi. Pendant ce court instant, Kusa crachait ce qu'il venait d'avaler sans consentement aucun. Un goût atroce et la possibilité d'avoir le choléra, voilà tout ce que lui avait apporté ce trou d'eau qui était supposée, dans son esprit, un accès direct au repaire des hommes-poissons. Le jackpot, parfaitement. Partagé entre un sentiment de haine, de honte et d'intense colère, il se tira de cet endroit de malheur, sans vraiment prêter attention à la direction qu'il prenait. Droit devant toute, plus le temps de déconner. Et c'est donc, intelligemment, qu'il s'essuya le visage sans regarder où il mettait les pieds. Jusqu'à ce qu'il se retrouve au pied du mur.
C'était une impasse, tant littéralement que figurativement parlant. Devant ce mur, il étalait sa déception de ne toujours pas avoir retrouvé son chemin, à presque douter de ses souvenirs et à se dire que tout cela n'était peut-être qu'une simple hallucination causée par une trop grosse absorption de boisson alcoolisée. Traînant toute la misère du monde, Kusaki n'était plus que l'ombre de lui-même et se laissait déambuler dans les piteuses rues de Las Camp. Et qu'en fait, il avait fait n'importe quoi... pour rien. Et qu'au passage il avait probablement choppé une maladie potentiellement mortelle, un détail en soit.

Plus rien. Plus aucun but, pas un sous pour aller boire. Tout ceci n'avait plus aucun sens. En fait, depuis qu'il avait posé le pied sur l'île, rien n'avait de sens. Un mauvais rêve plus qu'un cauchemar en fait. Tout ce qui lui restait à faire était de trouver un moyen de foutre le camp de cette île. Plus la peine de perdre du temps et courir après des amis imaginaires. Et c'est en continuant ainsi son chemin qu'il fit la plus improbable des rencontres, un clou dans un mur. Sans faire attention, Kusa était rentré dans un mur au détour d'une rue et sa tête avait heurté le seul morceau de métal rouillé dépassant. Une bien piètre journée, dans des termes plus civilisé que ce qui, à ce moment, était en train de fuser dans sa tête.
De rage , il enfonça son poing en plein sur le distributeur gratuit de tétanos, en utilisant bien toute sa haine et toute sa force. C'est bien sûr après avoir hurlé comme un damné et sautillant qu'il se rendit compte de sa bêtise. Mais, à deux doigts de refaire la même chose pour se venger de ce clou, Kusa fut interpellé par ce qu'il y avait à côté, accroché à ce mur. Des affiches, et pas n'importe quelles affiches, celles du genre avec des photos et des gros chiffres en dessous. Oui, des avis de recherches. Et quelle ne fut pas la surprise d'y retrouver un visage familier, un certain Roy D. Aston.
Après tout, ce n'était pas tant les hommes-poissons qu'il recherchait, mais plutôt ce gars là, qui lui avait fait de grandes promesses et qui, en deux temps trois mouvement avait disparu. Non content de voir qu'il n'avait finalement pas rêvé, Kusaki arracha le wanted, ce serait toujours une meilleure base pour rechercher une personne disparue d'avoir sa photo. Fier de lui, il reprit la route, à la recherche d'une concentration de population afin d'interroger chaque passants au cas où ils auraient vu le type sur la photo ces derniers temps.


  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ
  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ



Cette fois-ci, c'était la bonne. Fini les idioties, c'était d'un pas assuré que Kusa avançait à travers les méandres de Las Camp. Il regardait où il mettait les pieds et tâchait d'éviter de rentrer à nouveau dans les murs, même si le dernier en date avait été de bon conseil. L'avis de recherche de Roy en main, il n'avait plus qu'à trouver des gens susceptibles de l'aider pour continuer à avancer dans cette quête. Pas une mince affaire me direz-vous, mais Kusaki Las Gambas était plein de bonne volonté et remonté à bloc, rien ne semblait pouvoir l'arrêter, hormis sa tendance à s'attirer dans les situations les plus improbables possible. Peu importe. Même si il ne savait pas se situer au sein de la ville, il n'abandonnait pas pour autant. Après quelques demandes infructueuses auprès des passants, Kusa se retrouva à côté d'un lieu de vie. Le bruit en émanant faisait supposer que l'endroit devait être fort convivial et bien remplis. Et c'est ainsi que la suite des enquêtes de la Gambas se poursuivit dans une taverne située au coin de la rue.

Il y avait en effet une forte concentration d'individus au sein de cet établissement. Difficile de s'entendre penser au milieu de tout ce ramdam, cependant, l'endroit semblait être loin des standards de ce genre d'établissement dans la ville, propre et plutôt bien tenu. Il ne faisait aucun doute que l'endroit était rempli de gens civilisés et qu'il glanerait probablement quelques informations en restant en ce lieu. Tranquillement, Kusaki se rapprochait du comptoir. Il n'y avait pas beaucoup de places disponibles, le comptoir semblait la meilleure opportunité pour faire un avant-poste et prendre des provisions avant de lancer les recherches. Une fois accoudé à son port d'attache, il scrutait la populace présente. Il y avait de tout visiblement, du plus miséreux aux types les plus aisés, quoi que ceux là ne semblaient pas forcément avoir eu cette situation honnêtement, au vu des armes sur eux ou posé sur leur table. Bref, il y avait des individualités diverses et variés dans cette taverne, de tout pour contenter une ville cosmopolite comme Las Camp. Tout le monde discutait tranquillement, un groupe qui semblait faire quelque chose ressemblant vaguement à de la musique, essayait tant bien que mal de se faire entendre depuis le fond de la salle. Peut-être était-ce volontaire qu'ils soient placés à cet endroit, afin de protéger les oreilles des consommateurs.

Mais, pas le temps pour les questions existentielles, Kusa fut brusquement sorti de ses pensées. Un homme venait de l'empoigner par l'épaule afin de le retourner. L'homme en question n'avait pas l'air d'un rigolo, sur son visage on voyait clairement que ce n'était pas le genre, ou du moins pas intentionnellement. Un nez retroussé, un strabisme prononcé, sans parler de ses oreilles décollées et son mono-sourcil très prononcé. Alors que Las Gambas luttait pour éviter de rire de son prochain, l'homme s'adressa à notre protagoniste.


Mon copain il dit que tu as une sale gueule ! C'est vrai que t'as une sale gueule !



Et là c'était le drame. C'était de trop, Kusaki ne pouvait plus rien retenir. Crachant à moitié sur le visage de son interlocuteur en relâchant la pression, il ne pouvait s'empêcher de rire, au point de presque en manquer d'air. Encore une fois, il n'avait pas réussi à se tenir correctement en public. Cela était d'autant plus dramatique alors qu'il s'était trouvé une nouvelle et récente conduite afin de retrouver son compagnon disparu. Mais on ne contrôle toujours pas tout et le destin est parfois cruel, d'autant plus avec Kusaki. Ce n'est pas faute d'essayer de faire bien les choses. Mais c'est ainsi, la vie est une chienne et il restera son réverbère. Alors que, peinant à reprendre son souffle après sa longue séance de travail des abdominaux, Kusa se relevait pour reprendre son sérieux, l'homme se relança de plus belle.


Joue pas au plus malin, on est condamné à mort sur une vingtaine d'îles.



Non. Toujours pas. C'était bien essayé pourtant, mais Kusaki ne pouvait se tenir. Chaque seconde qui passait était une nouvelle réponse encore plus hilarante que la précédente qui lui venait instinctivement à l'esprit. Il n'avait même pas le temps de bafouiller le début de sa phrase qu'il se tordait déjà. Tout cela était au-dessus de ses forces. Son rire nerveux commençait à interpeller la clientèle, qui se demandait bien ce qui pouvait se passer au comptoir pour que ce type rigole autant depuis tout à l'heure. Alors qu'il sentait les regards braqués sur lui, Las Gambas reprenait peu à peu le contrôle de lui-même, afin d'éviter de perdre complètement ses chances d'arriver à ses fins en se faisant autant remarquer. Aussi pour éviter les ennuis, chose rare pour lui qui en général fonce en plein dedans, puisque ce type semblait ne rechercher que ça. Un établissement remplis de gens civilisé, s'était dit Kusa à son entrée. Tout ce que l'on pouvait dire, c'est qu'il n'était pas observateur pour deux sous. A peine remis de ses émotions que son interlocuteur en rajoutait une couche.


Joue pas au héros !


Cet enfant ne vous veut aucun mal. Laissez-moi vous offrir un verre !



Et là, prenant les acteurs de cette scène par surprise, un vieillard, encapuchonné fit irruption. Techniquement, il était assis à côté de Kusa, mais ce dernier n'y avait pas prêté attention. La dernière fois qu'il avait conversé avec un homme d'un certain âge, celui-ci lui avait donné de la tisane au pissat. Bref. Donc cet homme dans la force de l'âge, venait d'essayer de s'interposer, ou plutôt de calmer jeu. Kusaki n'arrivait plus à rire, parce qu'il ne comprenait pas trop ce qui se passait. Il était resté bloqué sur le fait qu'on le considère comme un enfant, ce qui pourrait montrer que le vieil homme est sénile et qu'il ne sait pas ce qu'il fait, et qu'ensuite, on propose un verre aux emmerdeurs mais pas à lui. L'hospitalité à Las Camp était déplorable, pour sûr. Mais à peine avait-il eu le temps d'ouvrir la bouche et d'essayer de comprendre tout ce qui se passait autour de lui tant la situation était en train de dégénérer, maintenant qu'il était apaisé de sa crise désopilante, qu'il fut complètement écarté de cette conversation. Physiquement. D'un balayage de bras, l'homme au visage porcin avait envoyé valdinguer Kusa afin de faire face à ce vieillard qui se mêlait de ce qui ne le regardait pas.

Alors que la tension montait entre ces deux personnes, Kusa, lui, se relevait de son bazardage express sans dire un mot. Il se doutait que son karma lui renverrait bien quelque chose en pleine poire après s'être autant moqué de quelqu'un d'autre. Et puis, il n'était pas là pour la bagarre, d'ailleurs il était un peu las de toujours devoir prendre et mettre, parfois, des gnons. Là, ce n'était plus son tour, pas la peine de foncer la tête la première pour récupérer son dû, un autre le fera à sa place. Pas besoin de trouver de remplaçant, le choix s'était imposé naturellement. Et alors qu'un combat entre quatre yeux était en train de se dérouler, Porcinet dégaina on ne sait quoi. En un tour de main, le vieux attrapa sa canne et tapa sur les doigts du brigand. Un air fier semblait ce dégageait de ce vieil homme, un je ne sais quoi plein de satisfaction, un genre de « ah, je l'ai bien corrigé ce mécréant ». Malheureusement, ce coup de bâton n'a fait qu'attiser les flammes et quelques secondes plus tard, le vieux était au sol en train de se faire tabasser par le voyou qui venait de se faire corriger.

Sans demander son reste, et avant qu'on le mêle à toute cette affaire, Kusa s'éloignait tranquillement de la scène, à l'inverse de la salle qui venait se masser autour de toute cette affaire. Certain pour observer, d'autre pour intervenir et empêcher un massacre et quelques-uns pour prendre les paris sur la façon dont le vieux allait mourir. Cinq contre un pour combustion spontanée, dommage, Kusaki n'avait rien en poche pour miser là-dessus. Profitant du mouvement de masse et de l'inattention totale de la clientèle, il s'empressa de récupérer les godets des clients une fois que ceux-là, trop absorbé par le passage à tabac en cours, perdent leur vigilance. Il aurait été dommage de repartir d'ici complètement les mains vides. Il s'empressa d'avaler le contenu et fila à l'anglaise de cette taverne. Ni vu, ni connu. Mieux valait-il ne pas faire de vieux os dans cet endroit. Retour à la case départ, la rue. Sans le moindre indice encore en plus, c'était bien la peine de s'arrêter ici. Sans demander son reste, le pirate à la Gambas reprit son chemin, en quête d'un lieu bien plus propice pour ses recherches.



« C'est ta gueule qui est criminelle ». Voilà ce que j'aurais dû répondre bordel. Qu'est ce que je suis naze.... parfois...
  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ
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Le marché. Lieu de vie incontournable, que ce soit dans la petite bourgade du coin ou dans la plus grosse ville du canton, place forte de l'économie, de l'échange de paroles et de produits du terroir ou de marchandises venues d'ailleurs. Quel heureux hasard que ces festivités soient seulement à deux rues la taverne précédemment visitée. Alors qu'il essayait de s'éloigner au plus vite de l'endroit de sa dernière halte, Kusaki remarqua quelques passants, des sacs garnis de produit en tout genre. Certains discutaient de commerçant et de bonnes affaires. Se fondre dans la masse afin de disparaître au cas où on le rechercherait, c'était la meilleure de ses idées aujourd'hui. Il se lança dans le sens inverse des passants, jusqu'à atterrir devant une grosse poissonnière. Ou plutôt un étal de pêcheur. Inutile de juger la vendeuse, qui semblait user un peu trop de matières grasses pour préparer les invendus pour ses repas.

Qu'est ce que je peux faire pour toi mon chou ?

Euh, bonjour... En fait je suis arrivé ici par has... Euh, vous n'auriez pas des gambas ? Genre vous savez, les grosses crevettes là.

Ah non, malheureusement on pêche pas de ça ici. Et sur cette étal, tu trouveras que c'qu'on trouve dans la baie. Faudrait trouver le type qui bosse pour les industries de Poiscaille. Je l'ai pas vu aujourd'hui, alors pas sûr que tu puisses en trouver. C'est assez rare de pêcher ce genre de choses dans les alentours. Je pense que c'est à cause des hommes-poissons ou quelques choses du genre. Ou alors un complot de la guilde. Je sais pas trop. En tout cas tu trouveras pas de gambas ici, pas sur mon étal et probablement pas sur ce marché.

Ah. Merde. Tant pis alors. Et Poiscaille ? C'est quoi ce truc là ?

Tu sors d'où toi ? C'est eux qui dominent le marché de la pêche ici, à West Blue. Bon. Si tu veux rien m'acheter, tu peux laisser passer les véritables clients qui vont me faire gagner ma journée. Allez oust.

Grmblr... Oui madame.


Encore un coup dans l'eau. Il n'avait même pas eu le temps de parler de Roy, ou plutôt, avait trop tergiversé sur des sujets non-essentiel au lieu de s'impliquer totalement dans sa quête première. La prochaine fois, il lui faudrait être clair et concis, ne pas perdre un instant en blabla inutile et éviter de se faire détourner de son but par des futilités. En tout cas, il y avait l'embarras du choix en matière d'étal où obtenir des renseignements, en espérant que ces marchands ne fassent pas dans le commerce d'informations. De toute manière, si les commerçants n'étaient pas conciliant, il resterait toujours les habitants ou tout du moins ceux pas trop pressé au milieu de cette marée humaine. Avant de repartir à l'aventure, il jeta un coup d'œil à l'étal de la poissonnière. Il y avait quelque chose de bizarre. Une tête à moitié plongé dans la glace lui était familière, comme si c'était un ancien compagnon de beuverie. Il chassa rapidement cette idée saugrenue, comment aurait-il pu boire avec des poissons fraîchement pêché... Peu importe. Se concentrer sur l'objectif, il n'y avait plus que ça à son esprit. Glaner des informations, le seul impératif qui vaille des informations. Après tout, Roy était son seul ticket pour quitter ce coin et être plutôt tranquille pour un moment.

Les premiers n'étaient pas forcément très enclin à discutailler avec quelqu'un qui n'avait pas la moindre volonté d'acheter quelque chose et, tant bien même il l'aurait voulu, sans un sous en poche, il était bien impossible de négocier des informations. Ce n'était pas vraiment le gros lot, obtenir quelque chose sur ce marché ne serait pas aussi facile que ce qu'il imaginait. Enfin, il avait quand même réussi à obtenir une pomme, disparaissant dans la foule alors que le maraîcher était en train de lui demander de payer. Cela n'avait finalement pas que de mauvais côtés d'évoluer au milieu d'une marée humaine. C'était un juste retour des choses, ce gars-là n'avait pas voulu parler, Kusa lui volait une pomme au terme de la non-conversation. L'échange équivalent. Ou quelque chose du genre. Mangeant tranquillement l'objet du délit, il cherchait, parmi les exposants, un visage amical. Le problème, c'est qu'ils avaient tous l'air sympathique, plus vendeur. Difficile de séparer les faux sourires des vrais au milieu du festival de l'hypocrisie. Et, tant bien même un d'entre eux serait moins fourbe afin de faire gonfler les ventes, ce n'est pas gagné que son étal ne soit pas assaillis de toutes parts ou bien qu'il ne veuille répondre à quelques questions.

Finalement, plutôt que de jouer au physionomiste et trouver celui qui aura le meilleur profil pour coopérer, Kusa se dirigea vers l'étal la plus proche. Des torchons, des draps, des serviettes et autres linges de maison, voilà ce qui était présenté sur sa table. Quelques ménagères étaient postées devant en train de se raconter les derniers commérages tout en s'extasiant devant la finesse du tissu, les broderies et son incomparable douceur, en bref, de bons produits. D'ailleurs, toutes ces femmes vantant les mérites de ces textiles en vente, lui donnait bien envie d'investir. Mais non, il était là pour retrouver un disparu avant tout, et puis, à quoi bon avoir du linge quand on a même pas de maison ? Pas le temps pour s'adonner aux joies du shopping, Kusa s'installa derrière ces femmes, attendant patiemment son tour tout en écoutant les conversations.



Vous êtes au courant de ce qui s'est passé à la taverne à côté ?

Oh oui, c'est invraisemblable. Nous ne sommes plus en sécurité nulle part maintenant, des voyous, il y en a partout. Mais que fait la Marine. Mon mari et moi pensons à partir d'ici dès qu'il aura mis assez d'argent de côté.

Quand même, ce n'est pas banal de mourir par combustion spontanée. Pauvre homme.

Merde

Plaît-il ?

Non non, rien, continuez mesdames.


Par inadvertance, Las Gambas avait interrompu la conversation des mégères suite à ces dernières nouvelles. Encore un échec. Il aurait pu gagner un joli paquet d'argent si il s'était laissé emporté par son démon du jeu. Malheureusement, à trop vouloir se concentrer, il n'avait fait que rater une chose essentielle : le pognon. D'un autre côté, c'est assez bizarre qu'il soit mort ainsi, alors qu'il était en train de se faire tabasser par des types. Hochant la tête comme un idiot, Kusaki se disait qu'il avait peut-être bien une sorte de pouvoir, comme un cahier de la mort, mais sans le cahier. De toute manière, il ne savait pas vraiment écrire, alors c'était mieux ainsi. Le temps de passer pour un idiot en se donnant un air pensif, sans raison, dans la file d'attente, le vendeur apparu magiquement pour s'occuper de la clientèle. Enfin celui-ci sortait tout simplement de sa carriole, stationnée à l'arrière, tout en remontant son pantalon. Un homme bien bâti, avec une grosse barbe, bien abondante. Pas le genre de type que l'on a envie d'énerver. Mais, s'il vendait du linge, c'est qu'au fond, ça devait être un gros nounours. Rien à craindre de cet homme, il pourrait avoir des informations, c'est sûr. Alors que le barbu faisait son numéro de charme pour gonfler ses ventes, Kusa remarqua une femme, sortant de la carriole, une serviette en main. Une voleuse sûrement. Ou alors une cliente privilégiée, qui avait accès à l'arrière boutique, ou l'arrière étal plutôt. Oui, cela ne pouvait être que cette solution, elle portait un anneau à son annulaire. Quel genre de voleuse était mariée, ou du moins, laissait paraître la moindre information sur sa personne. Ah, quel métier formidable que cela doit-être, le contact humain, le grand air. Las Gambas en serait presque à penser à une reconversion. Enfin fallait-il déjà avoir un véritable emploi avant de penser une reconversion.
Le temps de penser à son avenir, c'était au tour de Kusaki d'être servi. Le vendeur semblait légèrement surpris d'en voir un autre venir voir ses marchandises, mais dans le fond, il devait probablement être moins intéressé dans le fait de servir de quelqu'un du même sexe.



Monsieur bonjour. Vous désirez ?

Je voudrais Roy.

Oui, je n'en ai plus monsieur, regardez au fond de l'étal, il doit y avoir du bleu nuit. Ou du bleu marine, mais uniquement pour les serviettes.

Hein ?! Tu dois pas comprendre, je veux pas faire de la peinture, t'aurais pas plutôt des informations, dis moi tout.

Vous tutoyez tout le monde ? On a des catalogues si vous cherchez quelque chose de précis. Je peux aller vous en chercher un. Vous le voulez ?

Non. Et si je te demande ça plus clairement. Je cherche le type, là, sur la photo de cette affiche, Roy D. Aston.

Alors, pour les impressions sur tissu, tout dépend de la dimension voulue et sur quelle matière. Et après la validation de la commande, il faut compter entre deux et six mois, non livrable, à aller chercher directement. Et c'est indisponible en bleu roi.  Payable tout de suite, la maison ne fait pas crédit. Alors, vous le prenez ?

Ouais, non. Vous avez des imprimés Gambas sur vos torchons ?


Trop. C'était trop pour le vendeur. Il commençait à venir de l'autre côté de sa table de marchandise, excédé par ce client qui ne semblait rien vouloir, hormis lui faire perdre son temps et ses clientes. Dans un élan de courage, Kusaki se carapata en s'engageant au milieu de la populace pour disparaître plus facilement du champ de vision de ce commerçant peu agréable avec ses clients. Planqué dans un coin, il attendait tranquillement que son assaillant retourne vaquer à ses occupations et ses torchons. Il avait un plan de vengeance bien établi. C'était bien la seule chose qu'il était capable de faire correctement aujourd'hui. A peine le vendeur de linge s'était remis derrière son étal, Kusa surgit de la petite foule et s'empressa de jeter le trognon de la pomme qu'il avait terminé et toujours pas abandonné en cours de route. Ce reste de pomme, plus par chance que par dextérité, tomba en plein sur les torchons. Le temps que le commerçant comprenne ce qu'il venait de se passer, Las Gambas s'était déjà refait aspirer par les autres passants du marché, ni vu ni connu. Il était une ombre, un ninja des temps moderne, pourfendeur des injustices. Enfin seulement les injustices à son encontre, les autres pouvaient toujours aller se brosser, faut pas déconner. Après un moment à s'écarter de la scène du crime, un éclair de génie vint le frapper.



« Tu pourras aller laver ton linge sale en famille ».... 'tain. Pourquoi j'arrive jamais à avoir une bonne phrase d'accroche directement après avoir fait quelque chose. Bordel.


Chou blanc. Il n'y a pas à dire. Cette quête semblait vraiment hors de portée. Mais il ne fallait pas commencer à se désespérer. Il y avait encore plein de gens à interroger, il fallait seulement rester focus sur son intention première. Mais, la prochaine rencontre devrait être utile, il fallait prendre son temps et observer un bonhomme sympathique, ou tout du moins, qui en avait l'air. Toute la bonne volonté du monde ne donne pas toujours des résultats. Les haltes auprès des différents maraîchers se suivaient et se ressemblaient, les mêmes réponses tournaient en boucle. « vous voulez quelque chose ? Non ? Dégagez alors. » « Des informations, on n'fait pas d'ça ici » « Pas le temps pour les clodos, tirez-vous ». Bref, encore un endroit agréable à accorder à Las Camp. Ce n'était pas qu'il ne voulait pas continuer, mais la situation était décourageante. Il était impossible pour Kusa de savoir le temps qu'il venait de passer à se frayer un chemin entre chaque étal à essayer de repartir avec un petit quelque chose, un indice, une piste. Mais rien. Il fallait peut-être se résigner et se dire que ses nouveaux amis n'étaient pas vraiment des amis et qu'ils avaient foutu le camp en le laissant derrière, l'abandonnant dans cette île. Finalement, tous les gens de cette île se valaient, il n'y en avait pas un pour racheter l'autre. C'était réellement le pire moment de sa vie. Enfin de ce qu'il se souvenait. C'est à dire, le pire moment depuis qu'il avait posé le pied, ou plus précisément, s'était réveillé sur littoral de Las Camp. Alors qu'il ne faisait que ressasser ses idées noires, sans s'en apercevoir, Kusaki était en périphérie du marché.

Et c'est là, dans un coin perdu du marché, abandonné de tous, que le miracle était assis dans une chaise. Un petit vieux, qui visiblement aimait bien manger. Il s'était installé à côté de ses marchandises et était visiblement plongé dans la lecture du journal. Il avait l'air tout gentil, avec ses petites lunettes en cul de bouteille et sa petite moustache carré sous son nez. Il fallait la jouer serrer. Pas de bêtises, c'était sûrement sa dernière chance de ne finalement pas mettre fin à ses jours et d'avoir une once d'espoir de rejoindre son gang. Tranquillement, il s'approcha de l'homme, qui ne semblait pas réagir, trop absorbé par les nouvelles du monde et d'ailleurs.


Alors, les nouvelles sont bonnes ?

Oh vous savez, c'est toujours pareil. Il se passe toujours quelque chose ici ou là-bas. En ce moment, il paraît qu'il y a du mouvement chez les hommes-poissons, mais ce ne sont que des ragots, on ne sait jamais ce qui est vrai ou ce qui est faux. C'est comme mes rhumatismes, un jour ça va, l'autre non. Qu'est ce qu'on y peut. Alors, qu'est ce que je peux faire pour vous ? Pas grand monde veut s'acheter un bon pull en cette période.

Un pull ?

Oui oui ! Je fais dans la laine ! A une époque je travaillais le cuir, mais j'ai revendu mon fond de commerce pour faire quelque chose de plus sain. J'ai mon petit troupeau de mouton et je fais quelques vêtements pour mettre du beurre dans les épinards !

Mettre du beur...... Non, euh, je voulais dire. Je cherche le type sur cette affiche. J'ai cherché sur le marché, pas le moyen de mettre la main dessus.

Le marché des esclaves ?

Ah, pas bête, j'y avais pas pensé, c'est vrai que ça prends plus de sens.... Ouais non, c'est pas un esclave en fait.

Je suis pas physionomiste pour deux sous mais..... Quand je travaillais encore le cuir, je voyageais beaucoup. Ah je faisais de beau pantalons en cuir, plus vingt en charisme.

Hein ?!

Pardon, déformation professionnelle. Je disais. Quand je voyageais pour mon cuir, j'étais un peu partout dans West Blue. J'en ai vu du monde. Mon trajet principal c'était Kage Berg – L'île aux esclaves. A Kage, je me fournissais de peaux, c'est le meilleur coin pour tout ce qui est élevage. D'ailleurs, j'ai acheté mes moutons là bas. Et donc, une fois que j'avais mon cuir, pour le travailler, j'envoyais le tout sur l'île aux esclaves, où je faisais sous traiter la transformation en pantalon, sac et ainsi de suite. Cela me coûtait bien moins cher que d'avoir des employés, le travail plus ou moins de bonnes qualités et les profits étaient très bon. Que qui que ce soit bénisse la main d'œuvre pas chère.

K . A . G . E  B . E . R . G et l'île à quoi ?

Ne prenez pas de notes, ce ne sont que de vieilles histoires. A moins que vous vouliez faire un livre sur mon ascension fulgurante dans le commerce sur West Blue. Et là j'en aurais des choses à vous raconter !

Non en fait je prends le nom des îles, au cas-où, pour visiter. Mais... Ouais, ça doit être bien cool de connaître votre histoire. C'est quoi la recette pour faire du business gagnant ?

Ah-ah. J'ai jamais donné mes coins à champignon !

Hein ?

Alors oui, ce type-là, je l'ai déjà vu, à Hinu Town.....

Ah, super ! Je pensais pas qu'ils étaient déjà parti, c'est sûrement qu'ils ne sont pas encore habitués à m'avoir avec eux ! Bah, merci, vous êtes un chic type ! J'aurais bien voulu savoir un peu plus sur comment gérer un commerce, mais j'ai pas le temps ! Vous inquiétez pas pour moi, je trouverais le chemin ! Allez, salut !

Attendez, j'ai pas fin......


Trop tard pour ce pauvre homme. Kusa avait vite rebroussé chemin, il savait où il devait aller désormais. La journée n'était peut-être pas aussi nulle que ça. Aussi vite qu'il était arrivé à cet étal il en avait disparu. Le petit vieux retourna sur sa chaise, un peu dépité.


Je l'ai vu il y a au moins sept ans... Et en plus il ne m'a même pas pris de pull. Encore une journée gâchée.

  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ
  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ


La tête haute, plein de confiance, Kusaki marchait droit vers un avenir radieux. Cap sur Hinu Town désormais, le vieux marchand avait donné la voie à suivre. Au final, avec son étal mystérieux et désert ainsi son âge avancé, il avait tous les traits d'un maître mystique, ou alors c'était simplement un personnage lambda présent afin de faire avancer Las Gambas dans le droit chemin, lui qui est plutôt habitué à la marche à reculons. Dans la vie comme dans son esprit. Alors qu'il venait de revenir sur ses pas, il se stoppa net au milieu de la populace, au centre du marché, causant au passage un embouteillage dans la foule.


C'est où Hinu Town au fait ?


Oui, tout partait trop bien, le seul problème était que dans sa vie de Las Gambas, Kusa ne connaissait que cette île, bien qu'il n'avait foutrement aucune idée d'où elle était située et si un village nommé Hinu s'y trouvait. Cruel dilemme. Une chose était sûre, il ne voulait pas encore revivre l'acte de question réponse sans réponse encore une fois. Il se débrouillerait bien par un autre moyen pour trouver son chemin. Après tout, ne dit-on pas que tous les chemins mènent à Roy ? Ou quelque chose du genre. Prenant une grande inspiration cherchant le sens de vent avec son doigt, Kusa se sentait en veine et se disait que le hasard des probabilités lui donnerait la route à suivre. Après plusieurs tours sur lui même, sans raison, et une perte d'équilibre, il se relança dans sa folle aventure d'un pas assuré, même si dans le fond, il ne savait même pas la direction qu'il était en train de prendre. Enfin si, selon lui c'était la bonne, mais mieux vaut-il ne pas prendre pour argent comptant ce qu'il pense être juste.
Peu importe la logique, Las Gambas suivait son chemin au milieu du marché, prêt à en découdre. Prochain arrêt, le patelin d'Hinu. Et c'est après une marche incroyable d'au moins cinq minutes que Kusa commençait à se lasser. Ses jambes l'avaient bien assez porté pour le moment, il était temps de faire une pause dans cette aventure effréné. A l'une des bordures de ce lieu de vie hebdomadaire se trouvait une petite baraque, pas encore ouverte visiblement. Le coin ne payait pas vraiment de mine, l'amas de planche qui composait la petite bâtisse semblait avoir vécu une vie de trop et une brise pourrait être suffisante à faire écrouler le tout. Un coup de peinture supposément récente et une pancarte au nom peu visible faisaient office de cache misère et donner un peu plus confiance aux passants. Quelques tables et chaises étaient installées face à la devanture de ce boui-boui, une terrasse improvisée en somme. Rien de bien mirobolant, mais assez pour profiter des odeurs du marché tout en mangeant une quelconque nourriture de cette baraque de restauration rapide.
Sans hésiter, Kusa s'installa à une des tables, pas vraiment dans l'optique de se sustenter, plutôt de faire une petite sieste improvisée avant de foutre le camp de Las Camp. Posant l'avis de recherche de Roy et sa tête sur la table, il se laissa glisser peu à peu vers le pays des rêves, où il serait bien évidemment beaucoup plus simple de trouver Hinu Town et de retrouver l'inspiration pour reprendre sa quête du non-sens. Après quelques instants de repos à oublier à quel point il était las de courir dans tous les sens aujourd'hui, Las Gambas fut sorti de son rare moment de paix et de sérénité de son esprit. Un homme venait de lui tapoter l'épaule et lui susurrer quelques mots.


Excusez-moi mais je ne suis pas encore ouvert...


Surpris par cette offensive sournoise, Kusa tomba de sa chaise à la renverse. Le retour au monde réel était dur, tout autant que les pavés qui avaient amortis ses lombaires. L'attaque pernicieuse de ce type à grand coup de tapotage avait eu raison du pirate de bas-étages, lui qui, il n'y a pas si longtemps, affrontait l'ancien chef du gang des Hommes-Poissons du coin. Quoi qu'il en soit, se remettant de ses émotions fortes, il observa son assaillant, vu d'en bas. Un homme un peu banal, du genre qu'on ne remarque même pas d'ordinaire, si ce n'est son parfum, une forte odeur de friture ambiante qui semblait faire un voile autour de sa personne. Il n'avait rien d'imposant, une carrure ordinaire, il semblait propre sur lui, hormis son tablier qui faisait tâche dans son apparence, avec toutes celles-ci qui apparaissaient sur son linge autrefois blanc. Un cuisinier à l'évidence. Il semblait tout gêné face à la cabriole de Las Gambas, causée entre autre par son approche furtive.


Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous faire peur, mais comme vous étiez assis à ma terrasse, je devais vous préciser que je n'avais pas encore ouvert. Mon fournisseur ne m'a pas encore livré, ce qui est assez gênant. Oh, désolé, je manque à tous mes devoirs, attendez, je vais vous aider à vous relever.


Il empoigna d'une main ferme sa malheureuse victime afin de le remettre à la verticale puis replaça la chaise dans sa position originelle. Ses yeux se posèrent sur la table, où se trouvait le wanted de Roy. Après un instant à passer en revue cette affiche puis Las Gambas, il reprit en main la conversation avant même que le pirate réussisse à en placer une.


Pendant un instant j'ai cru que vous étiez un vulgaire vagabond, au vu de votre accoutrement. Il y en a souvent qui viennent ici afin de manger à l’œil, mais ce n'est pas bon pour les affaires. Mais en fait, je fais erreur sur toute la ligne. Vous êtes un chasseur de prime n'est ce pas ?


Kusa ne suivait pas toute la logique de la chose. Pour lui sa tenue était tout ce qu'il y avait de plus normale. En plus elle était presque neuve, un costume trois pièces gracieusement offert par Roy. Entre temps, il avait fait quelques ajustements à ces vêtements, déchirant le pantalon pour en faire un short et coupant les manches de la veste afin d'avoir plus d'aisance dans ses mouvements. Certes, cela ne valait pas son ancienne tenue mais, selon son dress code, il avait quand même la classe. Il faut avouer qu'après les précédentes péripéties, ses habits n'étaient pas vraiment dans leur état d'origine. Tâches, boue, tout cela commençait à avoir un certain caractère, mais de là à avoir l'air d'un clochard, c'était un peu présomptueux de la part d'un type à qui ça ne ferait peut-être pas de mal d'avoir un contrôle sanitaire dans sa cuisine au vu de l'état de son tablier. Quoi qu'il en soit, l'autre chose qui le chiffonnait, c'était cette histoire de chasseur. C'était donc à ça que servent les chiffres en bas de l'affiche ? Une prime ? En fait, c'était tout à fait logique, mais pas sur le moment pour Las Gambas et de toute manière, cette information était parfaitement inutile pour lui, ce n'était pas la prime qu'il cherchait, c'était le bonhomme derrière ces chiffres. Le temps de réfléchir et argumenter sur sa condition de misérable miséreux et sur le but de sa vie, un silence pesant c'était imposé entre les deux personnes. Silence que le cuistot brisa, reprenant le court de sa discussion jusqu'alors à sens unique.


Ah, ça doit être formidable les aventures que vous vivez, à la recherche des criminels de ce monde. Vous devez visiter des lieux incroyables et rencontrer des gens hauts en couleur. J'aimerais aussi parcourir les mers et pouvoir développer mes talents pour la cuisine à travers mes voyages. Malheureusement, mon art culinaire n'est pas au goût de tous et j'ai déjà eu des problèmes.... Une histoire de chat passé à la friteuse.... Rien d'important, les gens sont ignares parfois et se refusent aux nouvelles découvertes gustatives. Voyez-vous, j'étais le premier à créer le concept de la friture pour tout et pour tous, allant de la tarte aux pommes frite jusqu'au steak frit. Enfin. Me voilà freiné dans le processus de la recette ultime frite, alors je me contente d'apporter un peu de bonheur frit avec de simples recettes passé à la friteuse.


Dans toute cette histoire, Kusa était resté bloqué sur le fait qu'il avait passé un chat à la friteuse. Bon, en premier lieu il se demandait si l'enfant l'avait mangé au final, mais surtout, quel genre d'esprit tordu pouvait bien faire ça. En fin de compte, l'art de la friture avait l'air intéressant et s'il avait plus de temps, il aurait bien voulu s'y initier. Enfin, du temps, il en avait à revendre, ce qu'il voulait éviter, c'était de devoir écouter ce type qui monopolisait la conversation sans lui laisser le temps d'en placer une. Kusaki trouvait cela plutôt dérangeant, ce genre de personne qui monopolise la parole, même si dans le fond, c'est souvent lui qui occupe ce rôle. Probablement plus un problème d'ego plutôt qu'une aversion de ce type de caractère, dans cette situation. Alors que les jérémiades du cuistot venait de se finir, le pirate de pacotille Las Gambas était prêt à reprendre en main la parole, mais c'était sans compter sur l'autre personnage de cette scène. Il n'avait pas eu le temps de sortir un son de sa bouche grande ouverte que le fou de la friture reprit de plus belle.


Enfin de quoi parlions-nous. Ah, oui, l'aventure. C'est vrai que ça fait rêver, mais je ne suis pas courageux pour deux sous et il y a tellement de dangers sur ces mers, je ne sais pas comment j'arriverais à m'en sortir ! Déjà que j'ai du mal à m'éloigner de mes friteuses ! Je ne sais pas comment vous faîtes. Mais toute cette adrénaline, l'intensité des combats et de la chasse aux pirates, oh, tout ceci doit être passionnant, je pourrais presque vous envier ! Mais non, je me dois de refuser ceci, j'ai une vie, je ne peux tout laisser derrière moi pour suivre cette voie, le monde à besoin d'un peu de friture pour enjoliver les vies monotones. Je me dois de décliner cette invitation.


Perplexe. Voilà l'état d'esprit de Kusaki à ce moment précis. Cette conversation prenait une tournure un peu malsaine. Quelle proposition ? Qu'est ce que ce type avait dans la tête, si ce n'est qu'une imagination débordante et un flot continu de paroles avec une logique qui dépassait de loin celle du commun des mortels, et c'est bien quelqu'un qui n'en a aucune qui faisait cette observation. Ou alors, peut-être que tout ceci n'était qu'une rêve, en réalité, il était toujours endormi sur cette table et tout ceci n'était que pure invention de son esprit torturé. Probable, mais en se concentrant bien sûr l'instant, il n'arrivait pas à faire apparaître une bière bien fraîche dans ses mains. Raté, ceci était bel et bien le monde réel et ce cuistot a vraisemblablement dû faire frire sa cervelle dans sa folie.


Mais j'en oublierais presque mes bonnes manières. Je me présente, Fritz, Bergeur Fritz. Certains m'appellent amicalement Fritz la frite ou l'empereur de la friture... Euh... pas tant que ça m'appellent comme ça, mais ça me ferait plaisir que quelqu'un le fasse... Et vous ? Vous n'avez pas encore dit un mot depuis notre rencontre... Oh, pardonnez-moi d'avance si vous êtes muet, je ne voudrais pas vous offenser.


Enfin ! Enfin Kusa avait le droit de parler. C'était un miracle et une libération. Il avait trop souffert de ne pouvoir en placer en une. Réduit au silence depuis trop longtemps, son esprit n'eut pas le temps de se remettre en marche que ses paroles s'emballèrent.


J'm'en fiche.

Je vous demande pardon ?


Petite erreur de synchronisation entre sa pensée et ses paroles. Ce n'était peut-être pas la meilleure des façons pour s'introduire que de commencer par ce genre de phrase. Il fallait désormais sauver les meubles avant de s'attirer encore des problèmes. La journée avait bien été assez chargée comme cela sans pour autant devoir en ajouter une couche supplémentaire. Pas la peine de se précipiter dans l'instant, seulement trouver une échappatoire afin de retomber sur ses pattes et pour cela, il fallait se servir de sa tête. Une tâche ardue à n'en point douter, mais il était fort possible que garder un rapport correct avec ce cuistot cinglé serait bénéfique pour la suite de l'aventure. Kusaki se démenait intérieurement afin de trouver une solution pour rattraper sa propre bêtise et pour une fois, cela s'illumina dans sa caboche.


Je disais, Jean Fish.


Ce n'était pas très glorieux comme façon de se reprendre, mais de la part de Las Gambas, en un si court laps de temps de réflexion, il ne fallait pas s'attendre à mieux. La question qu'il se posait à cet instant, c'était si ceci suffirait à faire oublier ses premiers mots dans la conversation. Son interlocuteur n'enchaîna pas à la suite, il semblait réfléchir, voir s'il n'était pas en train de se faire rouler dans la farine. Mais encore trop pris dans la passion de son discours précédent, il se laissa docilement berner sans trop se poser de question. Kusa avait réussi, la chance était de son côté. L'inconvénient, c'est qu'il se trouvait avec une nouvelle identité alors qu'il n'était déjà pas vraiment sûr que celle qu'il avait endossé depuis ses premières foulées sur cette île était la bonne. Mais au moins, elles étaient thématiques. Après quelques instants à imprimer ce nom, le cuistot pouvait de nouveau agiter sa langue dans sa bouche et sortir des sons de celle-ci afin de dire des mots pour former des phrases.


Et bien, monsieur Fish, je suis ravi de vous rencontrer. Vous m'êtes sympathique, laissez-moi donc vous offrir le repas, vous m'en direz des nouvelles.... A vrai dire.... Je ne peux vous l'offrir de suite malheureusement. Comme je l'ai dit précédemment, mon fournisseur ne m'a toujours rien livré. Je crains qu'aujourd'hui, il ne vienne pas. Voilà qui est problématique... Je vais devoir faire ça à l'ancienne et faire les courses par moi-même. Mais la chance est avec moi, le marché est littéralement à deux pas ! Mon seul soucis, c'est que j'ai mis en marche mes friteuses, je ne peux pas les laisser comme cela et je ne peux pas non plus les éteindre à cet instant... Oh, mais j'y pense, vous, qui incarnez la justice et la droiture, vous pourriez juste surveiller ma baraque le temps de mon absence ? C'est un simple service que je vous demande, au nom de notre toute nouvelle amitié !

Moui...

Oh, mille fois merci, je me doutais que je pouvais compter sur vous, j'irais même jusqu'à dire que vous êtes une bénédiction ! Très bien alors, je vous confie la boutique le temps d'aller acheter de quoi cuisiner. Me voilà rassuré de savoir qu'elle est entre de bonnes mains !


Oui, entre de bonnes mains. Fritz la friture était loin de se doutait à qui il donnait sa confiance. Une erreur, un acte inconscient. Ou alors un appel à l'aide d'une personne seule qui voyait en cette rencontre l'espoir d'une amitié forte et profonde. Kusa avait sorti un petit oui par principe, pas pour célébrer cette nouvelle amitié dont il se fichait royalement. D'ailleurs, il se demandait d'où sortait ce principe. Dans le fond, il avait acquiescé cette requête principalement pour la possibilité de manger à l'oeil. C'était d'ailleurs la seule raison, mais ceci était plus une réponse du ventre que du coeur. Cependant, le repas ne serait pas servi dans l'instant, l'intérêt de la chose était donc moindre. A quoi bon perdre du temps ici, à devoir travailler, ou plutôt rendre service à un type qui semblait légèrement dérangé. La balance du pour et du contre s'équilibrait il était difficile pour Kusaki de faire un choix. Cette situation était complexe, une vraie partie d'échec au sein de son esprit. Fallait-il être comme on l'attendait, ou bien rester fidèle à lui même.


Hors de question que je reste ici plus longtemps, j'me tire.


Le combat entre le bien et le mal n'avait pas duré, après tout, ce n'était pas une surprise que Kusaki réagisse de la sorte face à une tâche que l'on lui avait confié. Le côté monopolisateur de parole de cuistot lui avait fait passer l'envie d'aider son prochain et lui avait rendu sa motivation à reprendre au plus vite sa quête principale. Si il devait s'arrêter tous les coins de rues afin d'aider la veuve et l'orphelin, il n'en aurait jamais fini, d'autant plus sur île comme Las Camp. Pas le temps de flâner en terrasse, on ne sait jamais, si l'envie prenait le cuisinier de revenir sous peu et d'être à nouveau coincé sur place. Empoignant l'avis de recherche au passage, Kusa s'éloigna de cet endroit rapidement, scrutant les alentours afin de ne pas se faire repérer dans sa fuite de responsabilité.


Bon, reprenons du début, c'est où Hinu Town ?

C'est pas ici, t'es trop nul, Inu Town c'est à North Blue.


Un gosse avait fait irruption dans les pattes de Las Gambas. Encore un personnage sournois qui venait s'implanter dans le récit. L'enfant arrivait à peine à la ceinture de Kusa, avait la morve au nez et avait un pistolet à eau à la main, lequel était pointé sur notre pirate. Il avait un air satisfait d'avoir répondu à une question qui ne lui était pas destiné et était à deux doigts de jubiler d'être plus fort qu'un adulte. Au final, il avait dû voir ça à l'école récemment et donc avait encore l'information stockée dans son jeune esprit, entre le comment mettre son pantalon correctement sans avoir la tête coincée dedans et l'art d'éviter de manger sa fourchette en même temps que les aliments plantés au bout. Encore interrompu dans son action, Kusaki était blasé, d'autant plus qu'il ne savait pas comment réagir face à un nain de jardin. Fallait-il lui dire merci ? Fallait-il se mettre à genoux pour converser avec et l'utiliser afin d'obtenir des informations ? L'enfant restait planté là en tout cas, il semblait attendre quelque chose, probablement une récompense quelconque ou une image pour avoir répondu à la question. Cela en valait-il le coup ? En tout cas Kusa semblait vouloir lui donner quelque chose, il leva sa main.... et empoigna la tête du gamin pour le projeter contre les pavés.


T'es qui toi, pour m'interrompre comme ça. C'est mon aventure, pas besoin d'un morveux qui connaît que dalle. Vous avez tous décidé de me casser les nouilles hein. On peut jamais être tranquille.


Enjambant le gosse qui était en train de gémir au sol, il attrapa son pistolet à eau et le leva au ciel.


Souvenir d'une bataille remportée haut la main.... Ou quelque chose du genre. Ça suffira pour compenser ton intervention, le mioche. Allez chiale, tu pisseras moins au lit ce soir.


Sans pitié pour son ennemi qui avait très certainement moins de la moitié de son âge, Kusa s'éloigna, son butin de guerre en poche, loin des pleurs d'un enfant qui n'avait rien demandé à personne et qui pour seul crime avait interrompu la mauvaise personne au mauvais moment.
  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ
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Qu'il était bon pour Kusaki Las Gambas d'enfin repartir de ce foutu marché doublement victorieux. D'une part, il avait obtenu une glorieuse victoire face à un redoutable ennemi et d'autre part, il avait toutes les cartes en main pour retrouver son futur ex capitaine qui l'avait malencontreusement oublié sur cette île. Toutes les cartes, c'était seulement une façon de parler, niveau géographie et orientation, le brutaliseur de mioche se fiait au hasard complet et n'avait rien pour lui indiquer sa position actuelle ainsi que sa destination. En plus de ça, on lui avait parlé d'Ouest et de Nord bleu. Il n'avait pas la moindre idée de ce à quoi cela référait. Peu importe, des informations superficielles pour Kusa, il était temps de filer d'ici par la mer avant d'avoir des problèmes, il aviserait plus tard pour trouver sa route. Alors que ses jambes le portaient vers un avenir un peu plus glorieux et de nouvelles aventures, Kusaki se sentait plus léger, jusqu'à ne plus sentir le sol sous pieds.

Quelle était cette sorcellerie ? Avait-il obtenu une nouvelle compétence par le plus grand des hasards, celle de léviter ? Cette idée plaisait au pirate, fini de sa fatiguer à marcher et d'avoir des ampoules en fin de journée. Cependant, cette réjouissante nouvelle ne donna qu'à moitié satisfaction à Kusa. Alors que les secondes au-dessus du sol défilaient, sa respiration semblait être troublée. Avait-il, en étant quelques centimètres en amont des pavés de Las Camp, commencé à rejoindre une nouvelle atmosphère, moins respirable que celle où il évoluait auparavant, mais toujours avec la même odeur ? Le temps d'une réflexion scientifique beaucoup trop complexe pour son esprit étriqué, son nouveau pouvoir le fit pivoter à 180°. A ce moment là, tout prit son sens face à un homme, si l'on pouvait bien appeler ce dernier comme cela tant son imposante carrure ferait pâlir une colline. Ce beau bébé devait bien peser son quintal et devait difficilement passer sous certaines portes, que ce soit par sa largeur ou sa hauteur. A un bras, il tenait Las Gambas par le col, ceci expliquant le pourquoi du comment d'une respiration difficile, sa chemise venant se bloquer sur son cou, compressant sa trachée. Étranglé par ses propres vêtements, il n'aurait jamais parié là-dessus pour son grand final. Mais une mort tragique fait de gens comme lui des héros. Alors, pour finir en beauté, il se lança dans son dernier grand discours au monde. C'était son moment de gloire et la seule chose qu'il savait partiellement faire.

Mais, à cause de cette pernicieuse strangulation de son habit, aucune parole ne parvint à sortir, si ce n'est quelques sons rauques. Face à cette situation, la montagne le relâcha en l'envoyant brusquement au sol. Reprenant son souffle, l'idée de se reconvertir en tapis traversa rapidement l'esprit de Kusa au vu des nombreuses fois qu'il avait passé étalé sur les pavés de la ville. Entre deux discussions avec sa conscience sur les tenants et les aboutissants de la profession de carpette vivante, une ombre se projeta sur lui, le rayonnement chaleureux du soleil n'avait plus sa place sur cette partie de terrain où avait élu domicile le corps projeté de Las Gambas. Face à ce rafraîchissement soudain des pavés et de l'atmosphère, Kusaki souleva ses yeux à défaut de pouvoir se relever. Il aurait espéré que ce ne soit qu'un simple cumulus qui passait par là à cet instant précis, mais qualifier ce colosse, qui avançait d'un pas lourd vers lui, de "petit nuage" aurait probablement été une insulte menant à de lourdes conséquences par la suite. Qu'avait-il fait pour mériter tant de barbarie, aucune de ses actions en ce jour ne pouvait mériter cette agression gratuite. Il ne voyait qu'une seule solution à tout cela. Profitant de son souffle retrouvé et que son opposant soit encore à une distance raisonnable, il n'avait qu'une seule technique qui pouvait l'aider : la parlote.


Ne me mangez-pas... Honnêtement, j'ai très mauvais goût pour avoir déjà essayé et puis.... Je n'ai que la peau sur les os, je ne ferais même pas un bon amuse bouche... A la rigueur en pot-au-feu, mais c'est long à faire un pot-au-feu et je pense, en toute franchise, qu'il faudrait changer l'eau de la cuisson deux fois. Vu où j'ai traîné, je ne voudrais pas que vous choppiez une maladie.


A deux doigts de dire que cette recette n'était peut-être pas la bonne parce qu'il ne devait pas manger régulièrement ou simplement aimer les légumes, Kusa se stoppa lorsque le titan fit de même dans sa marche. Sa plaidoirie bancale en attaquant sur le physique avait fait effet. Pour le pirate, il ne faisait aucun doute que si ce type l'avait attrapé de la sorte, c'était parce qu'il voulait se sustenter avec de la chair fraîche. Manque de bol, il avait vu clair dans son jeu et avait désormais un coup d'avance.


De quoi tu me parles, espèce de lâche ! Tu as frappé ET volé un enfant ! C'est impardonnable.... Encore plus vu c'est mon petit frère... Tu vas le regretter et payer cet affront à la famille Brawzer !


Non, la clairvoyance n'était pas le fort de Kusaki, encore une fois trahi par sa perception des choses. Derrière la masse dodue et nonchalante émergea un enfant, une belle bosse bien apparente sur son visage. Il tirait la langue tout en essuyant les larmes dégoulinantes de ses yeux. Difficile de le remarquer auparavant avec une partie de son champ de vision bloquée par son imposant adversaire surprise. Mais pas le temps de réagir à cela, un coup de pied s'enfonça dans sa cage thoracique et l'envoya valdinguer un peu plus loin. Les bras entourant son ventre pour faire face à la douleur de cette attaque, Kusa ne comprenait pas pourquoi tant de violences et de grossièretés. Il n'était qu'une malheureuse victime avec une mémoire extrêmement sélective dans cette histoire.


Tu m'étonnes qu'il s'en prend à des enfants, regarde-le, recroquevillé sur lui, on dirait une larve ! Ah ! Ça va te faire passer le goût de t'en prendre à plus faible, foi de Beag ! Allez, relève toi, on va voir si tu as plus dans le ventre que ce que j'ai senti sous mon pied ! Ah !


Une petite foule s'était formée autour de ce remue ménage. Certains par curiosité et d'autres pour huer allègrement le pauvre pirate victime d'une erreur judiciable suite aux déclarations de son opposant. Visiblement, bousculer un gosse était assez mal vu par ici, une bonne leçon de vie à retenir. Mais Kusaki n'allait pas se laisser molester de la sorte sans réagir, le temps de remettre ses tripes au bon endroit et d'oublier ce coup dans son ventre plus violent qu'une tourista, il se remit sur pied pour prouver sa force et sa valeur. D'après lui, ce gars devait miser avant tout sur la première impression mais n'était pas si fort que ça. Une cabriole et il serait de retour chez lui pour le dîner. Si ce n'est qu'il n'a pas de maison ni de quoi se payer quoi que ce soit pour faire un repas. Mais l'idée était là. Il laissa glisser sa main à sa ceinture et... fut pris assez rapidement de panique. Son unique arme, son sabre en bois miteux, n'était pas à sa place habituelle. Oubliant complètement la raison de sa volonté d'empoigner son bokken, il jeta un oeil autour de lui afin de le retrouver. Il était possible que l'arme soit tombée lors des premiers coup subit. Non, rien autour. La confiance en son plan d'attaque venait d'en prendre un coup.


POUCE !


Mettre une pause en plein combat, la seule solution qu'il avait pu imaginer en si peu de temps. Son unique atout s'était fait la malle, le pourcentage de réussite dans ce combat n'était déjà pas bien élevé, mais là... Mais pendant ce temps d'affolement, il en avait oublié que ses propres règles de duel ne s'appliquait pas à son adversaire et ce dernier lui faisait déjà face, le bras en l'air. Son poing s'écrasa en plein dans le visage de Kusa. Clairement pas une frappe molle comme il avait pu supposer. Encore une fois, il se retrouva repoussé, mais avec un net progrès, cette fois-là, il ne léchait pas le sol mais avait seulement un genou à terre. Du sang venait à sortir de son nez, ruisselant sur le bas de son visage et venant petit à petit colorer les pavés de la ville. Passant rapidement sa langue sur sa dentition, Las Gambas constata qu'il avait tout de même le plaisir de conserver un sourire correct, du moins pour le moment. Si en à peine trois coups il était déjà dans cet état, la suite des choses n'allait pas être une mince affaire et il n'en ressortirait pas indemne. Fallait-il déjà pouvoir survivre. Une idée traversa son esprit, pouvait-il stopper ce combat grâce aux forces de l'ordre. Leur intervention mettrait fin à son humiliation publique. Mais, il avait éclaté une bouteille sur l'un des officiers il n'y avait pas si longtemps. Si, grâce à sa légendaire chance, il tombait sur lui, la finalité serait la même, ou pire. La seule solution était d'utiliser ses poings et espérer que l'autre se fatigue avant qu'il n'abrège sa vie. Essuyant quelque peu ce flot rougeâtre, il se releva de nouveau mais cette fois-ci, pas de distraction, il était focus sur ce qui se passait. Pas la peine de se tirer encore une fois une balle dans le pied. Il ne fallait pas laisser le temps à l'autre de relancer l'assaut, cette fois-ci, l'offensive serait à son avantage. Plein de détermination, il s'élança pour asséner un coup. Avec sa course folle d'au moins trois mètres et plaçant toute sa force, il envoya un coup de poing sur son adversaire sans chercher à viser un endroit précis. Autant dire que son corps frêle n'avait pas grand-chose à apporter en terme de puissance brute, mais au moins il aurait essayé. Cette frappe pleine de conviction, qui fendait l'air de Las Camp, vint s'abattre en plein sur son adversaire. Magnifique action, le tas de graisse n'avait même pas réussi à éviter cette attaque.

Et puis, le retour à la réalité, son avant bras s'était simplement enfoncé dans le ventre de ce foutu type, qui n'avait même pas daigné réagir et se contentait de rire en plus de ça. Le bras de Kusa fut violemment renvoyé en arrière, le forçant à faire quelques pas afin de garder son équilibre. L'ondulation du choc était visible et se propageait sur le corps fourni en matière grasse. Une défense imparable pour sûr. Qui aurait pu imaginer une armure naturelle comme celle-là. Trouver une ouverture ou une quelconque faiblesse serait compliqué au même titre que l'atteindre. Mais pas le temps d'y penser, le pirate se retrouvait empoigné par le col pour subir plusieurs impacts au visage. Son adversaire ne faiblissait pas et les coups pleuvaient sans perdre de leur superbe. Le visage de Kusaki était largement peint en rouge, au même titre que le poing du distributeur de marrons. Se lassant de cette situation sans aucune réponse, ce dernier se débarrassa du corps inerte qu'il tenait en l'envoyant valser plus loin. La foule s'écarta pour laisser tomber le punching-ball humain. Certains, face à la violence de la scène, avaient déjà détourné le regard et le pas, d'autres, pour faire cesser cette mise à mort publique, étaient à la recherche de soldats de la Marine. Sans succès. La rumeur courait qu'ils étaient déjà mobilisés ailleurs, suite à un soulèvement du gang des hommes poissons associés à un mystérieux équipage pirate. Mais dans le tas, personne n'avait le courage ni volonté d'intervenir. Violence était courante au sein de la ville et la population avait appris à détourner le regard et vivre avec les fréquentes rixes. Ne voyant pas sa victime se relever, le grand-frère très protecteur haussa les épaules et tourna le dos, prêt à repartir comme s'il ne s'était rien passé. Il n'y avait aucun mérite d'aller plus loin, la leçon était finie et celui qui avait fait l'affront de s'en prendre à son sang n'était qu'un moins que rien à peine capable de se battre face à quelqu'un de sa taille. Façon de parler.

Pendant ce temps le corps du vaincu, gisant au sol, tremblotait. Son visage n'avait pas été épargné et le nombre d'endroits où s'écoulait du sang suffisait à faire comprendre que son cours particulier sur le fait de ne pas agresser gratuitement un enfant était bien rentré. Bosses, bleus, arcades ouvertes, coquard, yeux gonflés, lui même ne se reconnaîtrait pas dans un miroir. En tout point, il avait morflé, ses spasmes corporels en attestaient. Kusaki avait du mal à rester lucide et même simplement rester conscient. Ses paupières, déjà bien fermées, avaient du mal à lui laisser entrevoir ce qu'il se passait autour de lui. La vision trouble et l'esprit complètement embrumé, il n'avait plus aucun repère, à peine savait-il ce qu'il venait de se passer. Il n'avait pas sommeil, mais il n'arrivait pas à se maintenir éveillé sans vraiment avoir d'explication. Sa tête, qui jusqu'alors faisait face au ciel, commençait peu à peu à basculer sur le côté. Il ne contrôlait plus rien, ses membres ne répondaient plus, peu à peu il s'enfonçait dans les ténèbres. Le néant. Le rideau sonnant la fin du spectacle.

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Le calme. Tout était silencieux autour de lui. Un état de béatitude régnait, libéré d'un poids qu'il ne saurait exprimer. Kusaki était heureux au milieu de cette sérénité ambiante. Et puis une image apparut. Revenant sans cesse à la charge troublant sa paix intérieure, tel la lumière d'un phare venant troubler la noirceur de l'océan durant la nuit. Tout était flou, il ne parvenait pas à comprendre ce que c'était, cette forme lui était familière mais il n'avait aucune idée de ce que cela représentait. A quoi bon raccrocher à un détail à peine reconnaissable alors que la zénitude éternelle était à portée de bras. Peu à peu il se laissait glisser vers la sensation agréable qu'il ressentait, faisant abstraction de cette inexplicable apparition par intermittence. Et il se souvint.


Hé...


Aux portes des limbes, l'image qui venait troubler sa paix était devenue plus clair. C'était même pour lui une évidence. Ce n'était pas un détail forcément important, pas un indice dans sa quête personnelle. Le moment avait duré une éternité pour lui, alors qu'en réalité un court instant s'était écoulé et la dernière image enregistrée par ses yeux avait été la clef pour lui éviter de sombrer à tout jamais. Le son de sa voix était faible, un peu étouffée par le sang qui ne s'était pas évacué par sa bouche, personne ne l'avait vraiment entendu au milieu de cette foule qui quittait peu à peu l'endroit. La respiration était difficile et la douleur intense, presque à en faire regretter d'avoir fait demi tour face à l'acte final. Mais dans l'histoire, l'esprit avait été le plus fort et il était temps pour Kusa de remonter sur les planches. Il était difficile de récupérer pleinement les fonctions motrices de son corps, mais il s'y employait ardemment tout en crachant le trop plein sanguin que les blessures ouvertes lui faisaient avaler. Un genou au sol, personne ne prêtait plus attention à lui. Ses bras flageolant avait du mal à lui donner une poussée suffisante pour se remettre sur ses jambes, mais ce n'était pas ce qu'il voulait dans l'immédiat. Tournant peu à peu la tête, il voulait être sûr de ce qu'il avait vu. Ce n'était pas un mirage, c'était bel et bien ça. Il ne voulait pas y revenir et subir à nouveau ce fléau. Elle se trouvait là, à côté. La cabane du cuisinier passionné de frites. Il n'avait pas pu parler une seule fois avec ce cinglé et ça, et bien c'était son pire cauchemar. Il était hors de question de finir sans un mot et encore moins d'être proche de ce démon de la parole inutile et incompréhensible. Kusaki était le seul à pouvoir faire cela. Serrant ses poings, il n'était pas du tout prêt pour un second round, mais en tout cas, l'esprit y était.
Rester au sol était la meilleure solution, ou tout du moins ramper et s'extirper de là sans encombre, mais son honneur en avait pris un coup et il lui était hors de question de rester sur une défaite. Il avait déjà vaincu plus coriace, comment pourrait-il à nouveau se regarder dans une glace sans avoir honte ? A vrai dire, ceci était simple, Kusa ne connaissant pas vraiment ce concept, il lui aurait été facile de se dérober à tout ceci. D'ici trois-quatre jours, il aurait déjà oublié ce fâcheux incident et par la même occasion la leçon qu'il était censé en tirer. Mais la bêtise est humaine et elle a un nom et un visage en la personne de Kusaki Las Gambas. Peinant à se maintenir debout, l'homme était chancelant, les jambes fléchies et le regard se maintenant difficilement sur un point fixe.


J'ai dit « Hé »


Peinant déjà à se maintenir debout, son souffle altéré l'empêchait d'avoir la voix assez portante afin de recapter l'attention de la foule. Mais dans le fond, chaque seconde à passer inaperçu auprès de la foule et son adversaire, qui peu à peu s'éloignait du No Man's Land, était un instant de récupération, un moment de stabilisation de son corps et d'un retour à un équilibre correct qui lui éviterait de tomber au moindre coup de vent un chouia trop fort. Les rares personnes qui avaient remarqué le lent retour de Kusa parmi les vivants ne jugèrent pas correct de lui venir en aide, après tout il avait eu ce qu'il méritait et de toute manière, la correction était terminée. Et c'est là où ils se trompaient. Sans force ni conviction, un caillou, d'une taille pitoyable, fila à travers le vent pour aller titiller la cheville du gros tas de muscle nommé Beag. A vrai dire, il était tout à fait courant que par une simple marche, l'on puisse soulever de petits bouts de pavés soumis à la friabilité causée par le temps et le temps. Rien de bien méchant donc, que l'un de ces morceaux, dans l'impact lourd de son pied, soit venu mettre un coup pour se venger. Mais ce petit caillou qui ne payait pas de mine, avait réussi à faire bien plus qu'effleurer la jambe de ce type. Dans sa chute, il avait réussi à se glisser dans la chaussure du grand-frère, donnant ainsi à ce dernier un sentiment d'inconfort. Sans vraiment comprendre la raison de ce mouvement, Beag Browser se retourna avant de retirer sa chaussure pour y extraire l'objet de son malaise pédestre. Et c'est à ce moment que tout devint clair. Ce caillou ne s'était pas logé naturellement sous son pied gauche. Face à lui, à une bonne distance, l'homme qui avait victime de sa colère se tenait debout. Il battait curieusement des bras, comme si il essayait de s'envoler ou bien de nager le papillon. En fait, en lançant se caillou, il s'était laissé emporter dans son mouvement et était à deux doigts de finir au sol. Finalement, avec le maximum d'effort que Kusaki Las Gambas pouvait produire, il ne parvint pas à se maintenir verticalement et alla planter sa tête dans le sol. Au loin de sa position de l'autruche, on entendait un rire lourd et gras. Au moins un des deux passait une bonne journée. Ce dernier était tout de même partagé dans ses sentiments derrière cette façade de rigolade. Dans le fond, Kusa lui faisait de la peine, déjà par le fait qu'il soit totalement un incapable fini et d'un autre côté qu'il soit encore capable de bouger après tout cela.

C'était un problème pour lui. Devait-il continuer sa route et retourner vaquer à ses occupations, à savoir s'arrêter à chaque étal afin de goûter les produits de chacun ou bien d'en finir une bonne fois pour toute avec celui qui avait osé toucher à son frère. Cruel dilemme. Pendant ce temps, Kusaki tentait de nouveau de tenir sur ses jambes plus de cinq secondes. Mieux valait-il ne pas ré-précipiter sa chute dans cette histoire en entreprenant encore moult actions irréalisables pour lui. Pour Beag, ceci était l'affront de trop. Pourquoi n'avait-il pas continué à sagement lécher le sol. Il ne pouvait pas en être autrement. Et puis, pourquoi ne pas profiter du divertissement hilarant qui lui était proposé. Ce genre de choses n'arrivaient malheureusement pas tous les jours dans le coin, du moins, pas avec un type tout seul et faiblard. Ainsi soit-il. Il fit demi-tour, son travail n'était pas encore fini ici, le goût de la victoire totale, il s'en léchait les babines d'avance et tout ceci n'était qu'à quelques enjambées plus loin.

Kusaki avait réussi à trouver un équilibre relatif, il se maintenait debout, sans vraiment regarder dans la direction de son adversaire, déjà vainqueur du premier round. Mais, très rapidement, un voile sombre glissa sur lui. L'ombre du gros balèze était arrivé, tout comme la personne au bout. Pendant un court instant, il hésita à relever la tête, sachant très bien la suite des événements. Il avait mince espoir qu'en n'accrochant pas le regard à l'inévitable seconde manche d'un combat à sens unique il se retrouverait blanchi de ses actions et que toute cette affaire soit classée sans suite. Malheureusement, tout ne marche pas comme dans le monde idyllique de son esprit et la réalité cogne fort. A peine avait-il enfin fait mouvoir les muscles de son coup pour relever la tête, et bien que la saison ne soit pas encore propice à cela, il mangea une vilaine châtaigne. Il n'avait même pas eu le temps de la voir venir, ni de répliquer ou faire quoi que ce soit d'utile, encore sonné par les coups d'avant, il retourna à son point de départ.


Allez, soit gentil, reste à terre. Cette violence gratuite, ça ne me déplaît pas, mais fais-toi une faveur, garde un semblant de dignité, même si je ne sais pas si tu saisis le sens de ce mot, et reste là où tu es. Tu te fais du mal pour rien. Enfin techniquement, c'est moi qui te fais du mal, mais ne jouons pas sur les mots, on est plus à ça près nous deux.


Un conseil avisé de la part de ce type qui semblait plus proche de l'animal que du philosophe. Mais le pirate à la grande gueule et à la petite intelligence n'en avait que faire. Déjà parce qu'il s'en fichait royalement de ce que pouvait lui raconter ce donneur de leçon, fait pas ci, fait pas ça, tape pas les gosses, mais surtout à cause d'un horrible bourdonnement dans ses oreilles qui venait titiller son audition depuis la pluie de coups qu'il avait subi. Un tympan percé peut-être. Peu importe, il s'attelait à se remettre sur ses deux jambes sans faire attention au reste. L'assaillant, le grand-frère Browser, encore fier d'avoir fait un tel discours, n'enchaîna pas dans son attaque punitive. D'un autre côté, il était quelque peu surpris face à la résistance de, par rapport à lui, cette brindille. Était-ce de l'inconscience, du courage ou simplement de la stupidité qui l'animait ainsi? Probablement la troisième solution, mais il ne pouvait qu'applaudir la performance même si au final, il allait juste le frapper jusqu'à ce qu'il soit sûr de ne plus avoir besoin de le faire. Pas le temps pour les sentiments, il avait bien assez à faire niveau admiration avec ses propres prouesses physiques.

Kusaki n'en avait pas fini, rester au sol devenait trop banal pour lui. C'était le moment pour lui de rendre les coups qu'il avait pris et correctement cette fois-ci. Beag le laissa tranquille le temps qu'il se redresse sur ses jambes, un geste de bonté dira t-on. Mais Las Gambas n'avait aucune raison de se tenir tranquille et il n'allait pas faire la même erreur qu'auparavant. Il connaissait un des points forts de son adversaire, même si ça n'allait pas vraiment l'aider pour la suite des événements. Afin d'empêcher le gros frère d'agir en premier lieu, Kusa lui plaça un coup dans le tibia histoire de le déconcentrer un court instant et prendre le dessus dans le combat. Manque de bol, aussi bien placé était ce coup, l'effet n'avait pas été celui escompté. En fait, il n'y en avait eu aucun. Pas de bol, le frangin vengeur n'allait pas laisser passer ça. Fini la bonté, sa main fendait l'air afin de venir s'abattre sur une joue déjà bien rouge. Mais Las Gambas n'en avait pas fini, il voulait marquer un grand coup et rééquilibrer le rapport de force, bien que cela soit irréalisable venant de sa part. Grâce à une manoeuvre habile involontaire de perte d'équilibre un court instant, il esquiva la gifle qui lui était destiné et désormais, la tête de Beag était à portée de coup. C'était son moment, il devait tout donner et placer toutes ses forces dans son poing et surtout éviter de rater sa cible et simplement brasser de l'air. Emporté par sa propre force lors de sa tentative de baffe, le frère Browser se retrouvait légèrement courbé, sa puissance lui donnait désormais le désagrément d'être à la hauteur de Kusaki et dans l'incapacité de réagir immédiatement. Faisant un petit saut pour s'octroyer davantage de force dans sa tentative d'envoyer son adversaire au tapis, Kusa abaissa son bras en même temps que ses pieds venaient retoucher le sol. L'impact était parfait, on aurait presque pu croire qu'il savait ce qu'il faisait. Son poing avait bien tapé mais, malheureusement, le résultat n'avait pas été à la hauteur de ses attentes. Son partenaire de combat de rue n'avait pas flanché et sa position n'avait pas changé. Alors, plutôt que de s'avouer vaincu, il hurla à la mort comme si il allait devenir blond aux yeux bleus et enchaîna deux coups de poings. Le premier avait été comme une caresse, mais le second avait fait son travail. Était-ce le hurlement ou un simple coup de chance qui avait donné tant d'efficacité à cette attaque, personne ne pourrait y trouver la réponse mais, en tout cas, Kusaki se tenait la main tant il s'était fait mal en cognant aussi fort. Il lui restait encore beaucoup à apprendre sur l'art du combat, que ce soit la théorie ou la pratique.

Mais, peu importait la liste des choses à faire dans son avenir incertain, il y en avait un qui n'était pas heureux de la situation actuelle des choses. Un coup lui avait fait détourner la tête, et c'était la fois de trop. Beag attrapa instantanément Kusaki Las Gambas dans ses bras, le serrant suffisamment fort pour entendre les os les plus fragiles commencer à craquer. Mais son but n'était pas de broyer son adversaire, même si cette solution était tentante. Tel un taureau furieux, sa prise solidement accroché, il se rua droit devant lui. Sa course folle semblait n'avoir aucun but précis jusqu'à ce que le dos de Kusa heurta du bois. La force de la collision brisa des planches et la pauvre Gambas se retrouva relâché au milieu de cette destruction massive. Ce dernier ne comprenait pas où il venait d'arriver et encore moins ce qu'il venait de se passer. Tout ce qu'il avait comme information, c'était qu'il avait pris un sacré coup sans voir ce sur quoi son dos avait amorti et qu'il avait terriblement mal. Mais quelque chose le remua malgré la douleur, une gouttelette qui venait de se poser sur son bras. Une sensation désagréable, une forte brûlure qui le déstabilisa, lui faisant faire quelques petits bonds en secouant son membre touché. Et, c'est sans faire attention, qu'il termina l'un de ses sauts sur les débris non identifiés. Cela aurait pu être anodin, mais il tapa sur une planche qui était en bascule. Immédiatement, l'autre extrémité s'éleva non sans dommage collatéral : Celui qui avait joué au bulldozer se trouvait juste au-dessus, jambes écartées. Directement, elle se logea dans ses parties, le forçant à pousser un cri et à tomber à genoux tout en se tenant l'objet de sa douleur. Pour la première fois, Kusaki lui avait fait poser genoux à terre, c'était la victoire assurée. Sans montrer un instant de compassion, il logea son pied au même endroit que la planche, celle-ci ayant éveillé en lui l'idée d'une technique suprême de combat. Beag était au sol, vaincu.


Bon bah, j'ai gagné. Malaxe-les bien, hein.


L'issue de ce combat était inattendue et même si elle était sans panache, Kusa était encore en un seul morceau et ça, c'était bel et bien une victoire dans la victoire. Enfin il pouvait souffler et surtout retrouver un peu de calme. Et c'est à ce moment que, quelques mètres plus loin, un bruit de verre cassé se fit entendre.


Mon dieu, qu'avez-vous fait ?
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Et voilà un nouveau challenger. Le démon de la parole prise. Il revenait de ses courses afin de faire tourner à plein régime ses fourneaux. Devant le spectacle qui lui était proposé, il avait lâché ses sacs avec un air d'effroi. Il s'était absenté un moment, pensant que son fond de commerce était entre de bonnes mains, que rien ne pouvait arriver. Son retour enjoué à son échoppe avait été de courte durée, retrouvant son précédent interlocuteur au milieu des décombres d'une partie de sa baraque. Comment cela était-il arrivé ? Comment se pouvait-il qu'un seul homme avait réussi là où le temps et divers incidents avaient échoué. Fritz ne savait comment réagir, il était complètement désemparé, il venait de tout perdre en peu de temps, sa source de revenu et son unique amour, sa raison de vivre. Il restait planté là, sans réaction. Comment le destin avait-il pu être aussi cruel, lui qui avait voulu juste aider un homme et qui en retour n'avait obtenu que désolation et souffrance de la part de ce dernier. Il tomba à genoux. Des larmes ruisselaient le long de ses joues. Il n'avait rien connu d'aussi tragique dans sa vie, enfin peut-être que si, mais dans l'instant, ceci était l'expérience la plus douloureuse. Qu'allait-il pouvoir faire maintenant, quel était le but de tout cela.

Pendant ce temps Kusaki, triomphant dans une lutte qu'il jugeait totalement équitable, exaltait. Pour lui, ce n'était pas un simple coup de chance qu'il sorte vainqueur de ce combat, simplement du génie. Il était déjà en pleine réflexion pour trouver un nom à cette technique ultime dont il était l'unique créateur et utilisateur. En théorie. Le retour du cuistot dérangé ne l'avait pas vraiment fait sourciller, trop occupé à se montrer triomphant en posant son pied sur l'adversaire à terre qui se tenait les parties génitales en couinant. Il était loin le temps où ce gros gaillard faisait le malin et dominait outrageusement Kusa en combat singulier. Même si il avait sévèrement dégusté, l'euphorie de la victoire avait fait oublier la douleur des coups subit. Plus dure serait la chute, mais au moins, il pouvait savourer pleinement sa victoire sans avoir à se soucier de son état physique.



J-je..... J-je....


Fritz venait de se relever. Il était à bout. Sa peine n'était pas terminée mais avait muté en quelque chose de nouveau pour lui, une force incontrôlable. C'était désormais la haine qui avait pris le dessus. Ses yeux encore humide était braqué sur Las Gambas, qui lui, jubilait au milieu des ruines. Comment pouvait-il être aussi heureux d'avoir ruiné une vie et n'y prêter aucune attention encore en plus. Il fallait corriger cela, même si ça ne changerait pas le passé, Fritz savait qu'il n'avait pas d'autres possibilités. Venger ce tas de planche, sa cuisine, sa vie, détruite en si peu de temps par quelqu'un qu'il ne connaissait qu'à peine, en qui il avait placé sa confiance. Il était submergé par ses émotions, plus rien ne pouvait le raisonner, la vengeance est un plat qui se mange frit.


Tu as détruit ce qui était tout pour moi !


Kusaki avait petit à petit oublié qu'un autre problème se profilait à l'horizon, littéralement. Le cuistot. Voilà qui était fâcheux. Il voulait à tout prix l'éviter et voilà qu'il était de retour. Il ne comprenait pas trop la situation et ce qu'il lui reprochait. Après tout, il n'avait pas de compte à lui rendre. En plus, ce type était chiant à mourir, à toujours parler pour ne rien dire, comme si sa vie était d'un quelconque intérêt. Déjà qu'il n'était pas très certain de ce qu'était la sienne, à quoi bon connaître celle des autres. Il retira son pied du vaincu et remarqua concrètement l'objet de la discorde. La cabane-cuisine en pièce détachée. Voilà qui donnait du sens à cette histoire et lui donnait un peu plus compréhension de ces nouveaux événements. Enfin façon de dire, pour Kusa, tout ceci était beaucoup de bruit pour pas grand, il n'allait quand même pas en faire tout un plat. Deux trois clous, de l'huile de coude et tout reviendrait dans l'ordre sans rien changer. Évidemment, ce n'est pas lui qui allait payer pour les pots cassés, il avait autre chose à faire. Et puis de toute manière, vu l'état original de son boui-boui, ça ne changerait pas grand chose visuellement. Peut-être même que ce serait bien mieux qu'à l'origine. Mais, au vu des traces des larmes sur ses joues et du rouge qui les teintaient, il serait compliqué de faire entendre raison au cuisinier adepte de la friture.


Bwarf, un coup de peinture, deux trois planches et pouf, ça sera moche comme avant, pas la peine de monter sur tes grands chevaux comme ça.

Tu ne te débineras pas !

T'es en colère et pas content. T'as laissé la situation d'ensemble corrompre ta raison. T'es devenu exactement comme le mec par terre, pas très futé. C'est lui qui a tout cassé, moi je suis arrivé après. Je crois qu' il était pas content, il avait faim et comme c'était fermé, il s'est énervé et ainsi de suite.

Je n'ai aucune explication à recevoir de toi ! Je ne serais plus abusé par ma naïveté ! Je n'ai plus rien à perdre ! Tu as apporté malheur, désolation et destruction à mon empire gastronomique !

Ton empire gastronomique ? Le tas de planche par terre, là ?

Ne m'oblige pas à te tuer !

Hé oh, par allégeance... Et puis merde, va te faire voir, on comprend rien à ce que tu racontes, alors arrête de me tenir la jambe.


Le temps de la parole était terminé, place aux actes. Bergueur Fritz ne pouvait plus se retenir, sa colère avait atteint le point de non retour face à quelqu'un qui se fichait éperdument des conséquences de ses actes. Il dégaina une spatule, seule chose qu'il avait sur lui pouvant éventuellement être utile pour se battre et se rua à corps perdu vers l'objet de sa haine sans réfléchir un seul instant à comment tout ceci allait se dérouler et se finir. Comme il l'avait dit, plus rien n'avait d'importance, il n'avait rien à perdre, tout à gagner en satisfaisant son désir de se venger. De son côté, Kusa ne comprenait pas tout ce qui venait de se passer. Il avait machinalement répondu mais au final, le cuistot avait encore eu le dernier mot. A peine sa réponse allait-elle franchir le seuil de sa bouche que l'autre taré de la malbouffe avait sorti une spatule et commençait une course folle vers lui. Encore un combat, ça ne l'enchantait guère, les séquelles du précédent commençait à se refaire sentir. Toute cette discussion n'avait fait que réduire son taux d'endorphine et, par conséquent, sa capacité à faire abstraction de ses contusions. Mieux valait-il que cela ne dure pas trop longtemps, sinon il serait bien le prochain à passer à la friteuse. Machinalement, il tapota sa ceinture avant de se souvenir qu'il n'avait toujours pas son bokken. Tant pis, il ferait avec les moyens du bord et fort heureusement pour lui, il avait le choix en matière de planche à ses pieds. Sans perdre un instant, il récupéra la première venue. Le temps de relever avec sa nouvelle arme que Fritz était pratiquement à son niveau, tête baissée. Même si Kusaki n'était pas très doué au combat, son nouvel opposant l'était encore moins, à tel point que, même en menant l'offensive, il ne semblait pas regarder ce qu'il faisait. Au moins, toute cette affaire allait vite se terminer. Une fois le cuisinier, toujours concentré dans sa course folle, à sa hauteur, il lui assena un grand coup de planche dans le visage, le faisant tomber directement au sol. Home run. Ceci n'avait été qu'une formalité. Encore une nouvelle technique secrète pour le compte de Las Gambas. Relâchant son arme improvisée, il se tapa dans les mains afin d'enlever les saletés qui s'y étaient accrochés, satisfait du devoir accompli et du travail bien fait.

Enfin, il en avait terminé avec toutes ces histoires, sauf si son partenaire de jeu précédent revenait à la charge. Mais, en jetant un oeil au sol, ce dernier avait disparu. Il s'était redressé et avait quitté la zone, sûrement pour aller vérifier que tout était bien en place après le coup bas de la chance de Las Gambas. Finalement, ce combat était officiellement terminé sur ce KO technique. Cela éloignait tout doute de devoir rester plus longtemps sur cette île pour Kusa. Maintenant, il pouvait partir l'esprit tranquille. Mais, avant toute chose, il voulait garder un trophée, souvenir de combats acharnés où il en est sorti triomphant. Farfouillant dans les décombres, il ramassa une petite boite avec de la poudre dedans. Sans vraiment savoir ce que c'était, il la fourra dans sa poche, pas de petit profit. Cependant, autre chose lui donnait envie au milieu de tout ce bordel, une petite friteuse. Le problème, il y avait encore de l'huile chaude dedans, voilà qui rendait la chose compliqué, qu'est ce qu'il allait pouvoir en faire. Il n'allait quand même pas la jeter au sol, ça risquerait de l'éclabousser et, encore une fois, le brûler. Encore un nouveau problème, ça en devenait récurrent. Alors qu'il tripatouillait la friteuse à la recherche d'une solution simple et efficace à ce fâcheux contretemps, quelqu'un lui agrippa la jambe. Par un quelconque sixième sens ou un mystérieux pacte fait avec la divinité de la friture, Fritz avait senti que quelqu'un osait toucher une de ses précieuses fritures, encore une chose impardonnable pour lui sur le compte de Kusaki. Ce dernier secoua ardemment sa jambe, mais ce pauvre bougre de cuisinier s'était solidement accroché.



Mais bordel, ça n'en finira jamais...


Alors qu'il levait sa jambe libre de toute emprise pour écraser son pied sur le visage du cuistot, ce dernier en profita pour faire perdre l'équilibre de Las Gambas. Le pirate s'écrasa sur le sol. Cette fois-ci, se relever n'était plus une option dans l'immédiat, son dos avait heurté violemment les pavés. Le choc de trop. L'histoire se suit et se répète. Bref, une journée presque normale pour sa jeune vie depuis qu'il s'est auto-proclamé pirate répondant au nom de Kusaki Las Gambas. Profitant de cet instant de faiblesse, Fritz se glissa au-dessus du corps de sa Némésis. A califourchon sur celui qui lui avait tant donné du tort, il empoigna le col de sa chemise pour relever sa tête. Les yeux dans les yeux, le face à face final était en marche.


Tu étais le gardien, c'était toi ! Tu devais maintenir la sécurité dans mon commerce, pas me condamner à la fermeture ! Je te faisais confiance, Jean Fish...

Je te hais.

Quoi ?

JE TE HAIS


Le cuisinier ne comprenait pas. Il relâcha sa prise et se releva. Il était perdu. C'était lui la victime dans cette histoire, c'était lui qui venait de tout perdre, par la faute d'un seul homme, un homme encore allongé au sol. Comment pouvait-il être haïs alors qu'il ne voulait rien de tout cela, tout partait d'un bon sentiment et de la promesse d'un repas. Non. Il n'y avait aucune logique dans ses paroles, rien de censé. Qui était vraiment cette personne. Un schizophrène, un lunatique, un personnage fantasque et capricieux. Fritz tournait en rond sur lui-même à la recherche d'une quelconque réponse à un problème insolvable. Il en avait presque oublié qu'il avait Kusaki à sa merci peu de temps auparavant et désormais lui tournait le dos. Avait-il fait une erreur quelque part, avait-il mal jugé la situation et, emporté par sa colère, avait provoqué tout cela. Sa soif de vengeance s'était retournée contre lui. Ou alors était-il en train de devenir fou ? Est-ce qu'une personne aussi changeante, d'un demeurant charmant au départ puis totalement rebutant à l'arrivée, pouvait-elle réellement exister. Etait-il au moins réel ? Il pouvait être possible que ce soit une manifestation de son esprit, son alter-ego, tout ce qu'il n'était pas et qu'il ne voulait pas devenir. Et pourtant, emporté par ses émotions, lui qui était si heureux dans sa vie, courtois, toujours prêt à aider, était devenu tout l'opposé. Non tout ceci était impossible, il devait y avoir une explication rationnelle derrière tout cela.


J-je.... Je ne comprends pas. J'ai.... Je.... Non. Pourquoi. Pourquoi me haïr ? Moi. Qu'est ce que j'ai bien pu faire pour mériter ça...


En réponse à cela, à une question simple, ce n'était pas des mots qui parvenaient à ses oreilles, mais des rires. La situation le dépassait, tout était hors de contrôle, son monde s'était écroulé et la logique avait complètement disparue. En se retournant, il remarqua que le sociopathe était désormais assis, il se maintenait le dos tout en continuant de rigoler. Kusaki s'était traîné sur le sol pour se remettre dans une position plus pratique. Il ne savait pas bien ce qu'il faisait et encore moins ce qu'il allait faire par la suite, mais voir le cuistot dépossédé de ses moyens lui procurait un amusement sans égal et sa question avait été la cerise sur le gâteau. Pas pour les bafouillements, la prononciation ébranlée de ses mots ou son ton incertain mais simplement parce que lui-même n'était pas sûr d'avoir une volonté propre sur ses agissements, que ce soit par ses paroles ou ses actes. Il venait de réduire les rêves et les ambitions d'un homme à néant, le travail d'une vie et l'avait poussé à abandonner la morale pour revenir aux instincts les plus primitifs de l'Homme. Tout cela pour une seule raison valable à ses yeux : il monopolisait la parole. Kusaki Las Gambas avait perdu la mémoire et son véritable nom mais pas seulement, sa raison et sa moralité étaient, et cette journée entière en était la preuve, aux abonnées absentes. Un chien fou, un détraqué courant en boucle après sa queue sans prêter attention aux dommages collatéraux. Ceci en faisait à la fois un personnage totalement ridicule mais aussi un danger permanent imprévisible, pour lui comme pour les autres.


POURQUOI ? Pourquoi est-ce que tu... vous...  Pourquoi ces rires ? Pas assez de mal n'a déjà été assez fait ? Pourquoi en rajouter une couche ? Qu'ai-je raté dans l'histoire ? Qu'est ce qui m'échappe ? Quel est le but de tout ça ?


Le silence. La fin des rires. Kusaki avait encore une main dans le dos, sa séance de décontractions des zygomatiques n'avait peut-être pas arrangé sa situation physique. Il avait terminé de s'esclaffer face à l'absurdité de la situation et était redevenu muet. Il ne regardait même pas un instant Fritz. Il réfléchissait, chose assez rare pour lui, et prenait son temps à choisir ses mots. Il n'avait aucune idée de ce qu'il voulait dire mais, il voulait faire ça bien, faire ça proprement, sans pour autant tourner sept fois sa langue dans sa bouche. Mais ce n'était pas tant pour la réponse à ces questions qu'il se martyrisait l'esprit, plutôt pour lui-même. Énoncer à haute voix ce dont il n'avait jamais pris le temps à penser depuis qu'il s'était réveillé sur cette plage, vide de tout souvenirs. Trop occupé, trop fier pour s'en préoccuper ou tout simplement trop idiot pour y prêter attention.


Oui. C'est vrai. Pourquoi. Pourquoi me suis-je réveillé ici ? Pourquoi je n'ai aucun souvenirs. A vrai dire je ne me souviens pas de ce que j'ai mangé hier. Ai-je au moins mangé hier. Des futilités. Banalités. Pourquoi... C'est vrai ça, tout le monde autour est dans son petit confort, dans sa petite vie, mais qui suis-je au milieu de tout cela, qu'est ce que j'ai fait, qu'est ce que je ferais....De bonnes questions, malheureusement, je ne trouve pas les réponses qui vont avec. Pourquoi ? Bonne question, une de plus.

Je me fiche de tout cela, je veux des réponses. Pourquoi moi ?

Et pourquoi pas ?

Je.... Ma cuisine, ma cabane, ma vie... Pourquoi me haïr, qu'est ce que ça veut dire ?

Parce que je déteste... Non. Parce que je, pour reprendre les termes de la question, hais qu'on monopolise la parole.

QUOI ?! Quoi ?! Je.... Tout ça parce que j'ai parlé, parce que... Non, c'est ridicule.

Non, ça ne l'est pas. A quel moment ai-je dit « j'adore vos histoires, continuez ». Non je ne l'ai pas dit. Déjà parce que je me fiche de la vie misérable d'un cuistot qui fait frire des gosses...

UN CHAT

Oui... C'est pareil. Et de deux, parce que je n'ai jamais eu le temps de le dire. Si j'avais voulu le dire. Ne prends pas ça pour une invitation pour m'achever avec tes histoires... Quoi que maintenant au moins, tu en as de nouvelles, un peu plus incroyable... Ta cabane brisée, tout ça...

C'est une blague.... Une vaste blague.

Bien sûr que non ! Aussi vrai que je ne m'appelle pas Jean Fish, et j'ose espérer très franchement que ce n'est pas véritablement le cas parce.... Quel nom lamentable...

ASSEZ !


Un cri. Un hurlement de désespoir. Un unique mot pour clore cette discussion. Non pas que Kusa n'était pas prêt à remettre une couche et continuer à mettre en avant son éloquence mais quelque chose avait changé dans la situation actuelle des choses. Il n'y avait plus de haine, plus de colère dans le regard, l'expression et les mouvements de Fritz, tout cela avait muté. Ce n'était plus que folie. Il avait abandonné la logique et la raison, il avait sombré face à son incompréhension totale, face à un interlocuteur qui avait l'air de ne pas se soucier de lui, de ce qu'il avait fait, qui se moquait éperdument de donner une véritable réponse à ses interrogations. Il avait atteint son point de rupture, son point de non retour. Il n'y avait plus rien qui pouvait le faire revenir en arrière, plus rien qui ne saurait l’empêcher d'aller jusqu'au bout. Kusaki traînait son derrière sur les pavés, il lui fallait reculer, tout cela n'annonçait rien de bon pour lui.
  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ
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Fritz se pencha. A ses pieds se trouvait l'un de ses couteaux de cuisine, dispersé précédemment lors de la destruction partielle de la cabane durant le combat entre David Las Gambas et Goliath Beag. C'est ainsi que tout se terminerait, par la lame affûtée du cuisinier. Il le découpera, morceau par morceau, après avoir définitivement coupé tous les liens avec la vie, percé sa peau d'autant de trou qu'il jugerait suffisant. Peut-être le fera t-il frire ensuite, ou bien il continuera à couper des tranches jusqu'à que plus un seul reste du corps soit visible. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il se délectera allégrement de la situation. La ligne était franchie. Il voulait faire durer le moment, prendre le temps de choisir le meilleur morceau. Il avançait d'un pas lent, couteau à la main, vers Kusaki. Ce dernier continuait à reculer tant bien que mal et retarder l'échéance. Il savait que sans appui, il n'aurait pas le temps de se relever et échapper à la séance de boucherie. Il n'arrivait pas à trouver une quelconque solution, pas la moindre chose farfelue, il n'y avait qu'un seul résultat possible et il n'était pas vraiment souhaité et souhaitable. Cette fois-ci serait la bonne, l'heure de régler définitivement ses comptes. Il n'était pas vraiment terrorisé, dans le fond il savait qu'il était plutôt coupable de ce qui se passait. Était-il nécessaire de provoquer autant de grabuge ? Probablement pas. Était-ce volontaire ? Possible.

Il en avait vu des choses depuis son éveil sur la plage de galet de Las Camp, affronté ou confronté plusieurs personnes et que tout ça se termine déjà était plutôt une déception. C'était le sentiment global qui le prenait aux tripes. C'était une honte, une honte pour lui qui avait hurlé au milieu d'un combat entre gang être le grand pirate Las Gambas. Pas si grand finalement. Et il y avait de fortes chances que son corps soit raccourci après son trépas, alors pour la grandeur...
Et le voilà, aujourd'hui, à reculer sans cesse face à la menace d'un couteau, frottant son derrière au pavé, acculé, sans aucune solution, dos au mur... littéralement. A force de battre en retraite, Kusa se retrouvait bloqué par ce qui restait de la cabane. Mais Fritz était tout proche, encore quelques pas de sa part et il pourrait très nettement sentir son souffle venir frapper son visage. Dans un dernier espoir, Kusaki chercha appui afin de se relever, faire face dignement à son tragique destin au lieu de rester le cul par terre. Cependant, l'appui n'était pas stable, la zone de contact entre la surface solide et la paume de sa main tremblait. Quel autre choix avait-il de toute manière, il lui fallait tenter sa chance. Il était désormais à portée d'un premier coup de couteau, c'était imminent, il en était certain, il le voyait dans le regard du cuistot. Il le voyait aussi très nettement à la façon dont ce dernier soulevait son bras porteur de l'arme blanche. Il n'avait qu'une seule solution, aussi bancale était-elle, tant sur le plan physique que métaphorique. Sans rien perdre au temps qui lui restait, il força sur son appui pour se relever, après il aviserait si jamais il lui était possible d'agir avant de trépasser.

C'était seulement un court instant, à peine un frémissement dans le cours du Temps, mais pour Kusa, en tant que dernière action d'un condamné, tout ceci durait une éternité. La main placée sur un support branlant, lui se relevant, le couteau s'abaissant, tout allait si lentement, à presque en oublier le destin tragique qui l'attendait au bout de tout cela. Alors qu'il était à mi-hauteur de revenir dans le match et d'être droit dans ses bottes, même si il n'en porte pas, son dernier espoir s'envola. La surface instable avait finalement décidé qu'elle ne le soutiendrait pas jusqu'au bout. Lâché par Roy, puis par ça. Une vie de solitude, il ne pouvait compter que sur lui-même, voilà la seule certitude et son seul réconfort. Alors qu'il allait à nouveau se retrouver le cul par terre, il fut aveuglé par une lumière venue de nulle part. Un signe, une intervention divine, ou un moyen de l'empêcher de regarder le couteau s'approcher et s'enfoncer dans sa chair, l'histoire retiendra simplement que tout ceci n'était que le reflet du soleil de la lame qui allait s'abattre sur lui.
Et c'est bien ce moment qui importait. Alors aveuglé, Kusaki n'avait rien vu de ce que la réaction en chaîne de ses propres actes allait, de nouveau, causer. Avant d'être face à la folie d'un homme, bien avant d'être au sol, il triturait une friteuse. Cette même friteuse qu'il avait posé un peu au hasard au moment où sa jambe avait été agrippé. Tout du long, elle avait patiemment attendu là, sur une planche branlante, un support à peine fixé. Et c'était ce même morceau de bois qui avait servi d'appui à la main de Kusa. Elle n'avait pas tenu longtemps face à la pression, les deux clous à peine planté avaient sauté et c'est ainsi que la planche bascula, devenant ainsi une catapulte avec, en guise de projectile, une friteuse, encore pleine d'huile, plus ou moins chaude.
Elle n'avait pas reçu assez d'impulsion pour voler vers d'autres cieux, elle allait simplement filer droit et planer vers de nouvelles aventures. Mais, sur cette trajectoire parallèle au sol pour encore quelques mètres, se trouvait un obstacle, entravant alors ce premier essai malencontreux de propulsion de friteuse : l'homme au couteau. Heureux hasard ou faiblesse scénaristique, elle filait droit et la collision était inévitable. En pleine face. Voilà où s'était logé son propre appareil de cuisine. Trahis par son ustensile favori, l'amour de sa vie, le fil directeur des grandes histoires. Fritz se retrouvait donc sa friteuse en pleine poire, le forçant ainsi à lâcher son couteau et à s'arrêter, pour le moment, dans son action de meurtre prémédité. C'était le moment d'agir pour Kusaki, user de sa nouvelle technique suprême secrète pour achever l'adversaire et mettre les voiles, peu importe l'endroit tant que c'était loin d'ici avant que le cuistot puisse avoir le temps de réagir ou répliquer. Tant de possibilités mais si peu de temps pour s'offrir une porte de sortie dans toute cette affaire. Finalement, aucune solution ne parvint à son esprit, mais autre chose commença à jaillir de sa personne. Se retournant promptement, recourbé, il se vidait de ses entrailles. Aucun signe ne pouvait prouver que Kusa était malade, d'où son état actuel. Peut-être était-ce un trop plein d'excitation, comme un gosse à la vieille de Noël et que, tel un mixeur, tout ce bouillonnement d'esprit avait brassé ce qu'il avait dans les tripes avant que cela remonte à la surface.


Bweuh.... En fait..... j'ai bien dû manger hier.... vu ce qui vient de sortir.


En fait, si son repas de la veille, avait décidé de se faire la malle dans cette affaire, ce n'était ni question de maladie, ni de surmenage de ses méninges. Alors que la friteuse avait terminé sa course sur son propriétaire légitime et s'apprêtait à finir comme le Concorde, l'huile qui se trouvait encore à l'intérieur avait réussi à s'échapper du réservoir et profitait d'un moment de liberté en apesanteur avant de subir la dure loi de la gravité. En l'occurrence, la première chose qui se trouvait dans la ligne de mire de la chute gravitationnelle n'était rien d'autre que le visage du cuisinier, déjà abîmé par l'assaut d'un de ses bébés. L'huile n'était pas bouillante, mais suffisamment chaude pour faire des dégâts sur la peau. Et voilà, voilà pourquoi Kusaki Las Gambas avait subitement décidé de larguer la cargaison. Le liquide de friture, dans la fin de son envol et son inexorable chute, avait atterri sur le visage du cuisinier, une coulée d'huile du front jusqu'au menton. Une bonne partie de sa face avait été touché. Mais le problème ne venait pas simplement d'un visage partiellement graissé.


Tu cois vraiment pouvoir m'arrêter ainsi ? Me jeter de l'huile au visage ? J'ai vécu toute ma vie auprès des fourneaux, je ne crains plus la chaleur !... Qu'est ce que tu as à vomir ?


Presque oublié avec tout ce fatras, la foule, bien qu'ayant arrêté de prêter attention à ces scènes de violence et de mauvais théâtre de rue, continuait à défiler non loin. Et c'est là qu'une petite fille commença à hurler, la mère se précipitant sur elle pour lui cacher les yeux. Fritz Bergeur ne comprenait pas la situation actuelle. Que se passait-il ? Qu'est ce qui lui échappait ? Profitant de l'inattention de son adversaire, il l'empoigna, peu importe si il avait fini ou non sa vidange, et le retourna afin qu'il puisse lui faire face. Kusa détourna immédiatement le regard, sentant bien que son estomac était encore à deux doigts de sortir lui-même. C'était bien pire qu'une gueule de bois.


Quoi ! Pourquoi tu ne me regardes pas ! Qu'est ce que tu as fait ? Qu'est ce que tu m'as fait ?


Après les cris d'une enfant, une petite partie de la populace s'était regroupé afin de comprendre d'où cela venait et surtout, à quel propos. Et ils avaient vu. Certains dégouttés par la scène, d'autres effrayés, aucun d'entre eux ne savaient comme agir et réagir face à ce qu'ils avaient en visuel. Des chuchotements, du commérage, rien de plus, rien de moins. Au milieu de tout cela, Fritz était dans l'incompréhension la plus totale. Il relâcha Kusa pour s'approcher des gens et trouver une réponse à cela. Mais à chacun de ses pas en avant, les gens faisaient un pas en arrière, détournant les yeux, certains avaient même tourné les talons et quitté l'endroit au plus vite, afin de ne pas être mêlé à tout cela. Il devait y avoir quelque chose, sans s'en rendre compte, il avait été la malheureuse victime d'un malus de charisme mais n'arrivait pas à comprendre d'où cela venait. D'un coup, il se rua vers ce qui restait de sa cabane. Il savait dedans qu'il y avait assez de matériel lustré pouvant servir de miroir et ainsi, l'éclairer un peu plus dans la situation actuelle.

Et c'est dans son reflet que la réponse se trouvait. Après des années au-dessus d'huiles chaudes, le visage de Fritz, ainsi que le reste du corps, s'était complètement habitué aux chaleurs intenses, aux agressions grasses et brûlantes, c'était comme une seconde peau. Mais la chaleur est une toute autre chose et cette fois-ci, plutôt que les émanations et deux trois gouttelettes, c'était directement l'huile chaude qui avait souillé son visage et de ce fait, attaqué jusqu'à l'épiderme sa peau, provoquant des cloques un peu partout, la chair à vif et à l'air et enfin, des morceaux de peau carbonisé. Un spectacle horrible et d'horreur. Il ne pouvait y croire. Comment avait-il pu omettre cela, oublier totalement la douleur au profit de sa vendetta.



Tu.... Tu..... T-tu vi-viens.... TU VIENS DE RUINER MA VIE.


Son visage était une partie de son fond de commerce, il aurait pu tout reconstruire, repartir de zéro, mais avec une tête pareille, qui voudrait lui parler, venir lui commander un repas, qui lui ferait confiance pour cuisiner un plat. Après avoir hurlé, il se retourna précipitamment pour retrouver Kusaki mais, celui-ci avait profité de la situation pour se faire la malle. Le cuisinier sombra dans la folie, riant à gorge déployée, à genoux au milieu des décombres, se grattant la partie brûlée de son visage. Il était définitivement perdu.


***********



Las Gambas avait foutu le camp, volant au passage la friteuse qui lui avait plus ou moins sauvé la vie tout en ruinant celle de sans ancien propriétaire, ainsi qu'un petit bidon d'huile. Une compagne fidèle pour l'avenir, pour sûr. Il était assis dans une ruelle, profitant d'un moment de répit pour souffler. Il avait sacrément dégusté aujourd'hui et bien qu'il ne songeait qu'à quitter définitivement l'endroit, il avait besoin de se reposer, récupérer de ses aventures et, si la chance était avec lui, panser ses blessures avant de crever comme un chien en choppant une infection au coin d'une rue. Bien que cette ruelle se trouvait être fortement confortable, il ne pouvait se permettre d'y prendre une chambre entre la caisse en bois et la poubelle renversée. A chaque fois qu'il avait un peu tardé sur ses objectifs aujourd'hui, il se retrouvait dans des situations improbables avec nombre de problèmes.


Hé mais... C'est mon sabre ! Où t'étais passé, j'avais besoin de toi bordel, j'ai failli y passer.


Petit moment de joie pour Kusaki au moment de se relever, au sol, entre deux déchets, se trouvait son bokken. Vestige de son passé, sa seule possession et sa seule arme. Il était évident pour lui que seul ce sabre était capable de l'aider à être victorieux facilement dans ses combats. Malheureusement il n'avait toujours pas trouvé le bouton marche. Ainsi, utilisant son arme ultime comme canne, il se dirigea vers le port, non sans mal. Après plusieurs détours pour éviter les zones hautement fréquentées mais principalement pour reprendre le bon chemin, il débarqua sur les quais. Tête baissée pour éviter le moindre regard et risquer d'être encore une fois coincé sur cette île, même si cela ne durait que trente secondes, Kusa filait droit devant à la recherche d'une embarcation fiable avec laquelle il pourrait filer à l'anglaise sans qu'on lui pose trop de questions. Difficile de trouver le bon moyen, n'ayant aucun véritable concept de la navigation et pas vraiment de goût et de connaissance en matière de navire. Le seul bateau qu'il trouvait sympathique, c'était celui que Roy promettait de voler, mais c'était surtout la cave de son propriétaire qui l'avait intéressé  dans tout ça. Les planches et les tissus, ce n'était pas ce qui allait l'attirer en premier lieu sur quelque chose. Et puis finalement, Las Gambas opta pour la simplicité, ou plutôt la seule embarcation qu'il pouvait plus ou moins gérer et, en plus de cela, passer plus ou moins inaperçu. Une barque, une simple barque, attachée là, n'attendant qu'à être prise pour aller voguer vers un monde meilleur. Chargeant ses petites affaires nouvellement acquises, il était prêt à fuir. Embarqué, il largua les amarres et se repoussa loin du bord des quais pour commencer une nouvelle aventure au milieu de la mer, au combat avec vents et marées. L'esprit rempli de souvenir, tout comme son corps marqués de ses frasques, il poussa un grand soupir de soulagement, enfin il quittait Las Camp, une bonne fois pour toute espérait-il. Malheureusement, la poussée du pied qu'il avait exercé ne permettait pas vraiment une navigation en pleine mer. A la recherche d'une rame, il examina le contenu de sa coque de noix. Il n'y avait pas grand chose. Une rame était fixée sur le côté, hormis cela, ses affaires suffisaient pour remplir. Mais, il y avait une petite caisse aussi. Pendant ses tentatives hasardeuses pour avancer à grand coup de rame claquant sur la surface de l'eau, il tapait sur cette caisse afin de l'ouvrir. Au bout d'un moment, elle céda à la pression et laissa entrevoir son contenu.


Mouais, un bidon d'eau, c'est toujours utile même si y en a partout autour.... Tiens, un fruit bizarre ! Je suis sûr qu'il doit être délicieux !


Un voyage plein de promesses pour Kusaki Las Gambas. La grande aventure s'offrait à lui, dès qu'il aurait saisi comment ramer correctement pour avancer au lieu de tourner en rond.
  • https://youtu.be/dQw4w9WgXcQ
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