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Effraction à plumes


Caoirse ne s'était jamais vue détective privée, même depuis le jour où elle cherchait les traces de son père disparu, ou possiblement "mort-vivant" - mais plus vivant que mort, malgré tout. Mais sur Boréa, il allait bien falloir qu'elle enfile les gants et l'uniforme - ou plutôt des moufles et un manteau bien chaud, vu le climat - afin de résoudre le mystère qui avait commencé il y a peu près un mois dans le relais de poste situé à Lavallière.

On en voit des vols originaux, comme de partout. Mais voler des lettres, ça ne s'était jamais vu pour le réseau postal familial. Des colis farceurs ou un peu bizarres, des tarés qui vous noyaient sous une vingtaine de lettres par jour, histoire de vous faire crouler, oui. Un vol de courrier, qui plus est, en masse, jamais. Si cela concernait le réseau un peu plus "élitiste", concernant des courriers confidentiels que les expéditeurs souhaitaient protéger à tout prix, la jeune blonde le comprendrait mieux. Voler du courrier du réseau basique, voire "banal", elle n'en voyait tout simplement pas l'intérêt.

C'est donc sur l'ordre tonitruant du vieux Joseph qu'elle s'était emmitouflée de la tête aux pieds pour se rendre sur Boréa, accompagnée pour la première fois par Coquelicot, le pélican. Le mois passé avec Lug avait payé et l'oiseau lui obéissait au doigt et à l’œil, du moins pour les bases. Le reste, elle devrait s'en occuper seule, étant donné que son frère aîné ne pouvait prendre des congés pendant des mois entiers pour l'aider autant sur le dressage de l'oiseau.

Les bottes claquant sur le pavé avec un bruit sonore, les clap clap réguliers du pélican la suivant dans la rue, maladroit et pataud, la blonde traversait les rues de Lavallière, tournant et retournant le problème dans sa tête. Ce vol n'avait pas de sens, ni le lieu d'être, à moins qu'une poste concurrente soit sacrément rancunière et peu scrupuleuse.

Cela expliquerait les plumes retrouvées régulièrement dans le bâtiment selon le rapport qu'on lui avait envoyé et qu'elle avait consulté durant le voyage. A moins que les voleurs ne se soient amusés à faire une bataille d'oreillers au passage. Mais des oreillers avec des plume de couleur orange, ça ne court pas les rues.

~

- Ils sont passés par cette fenêtre ?
- Oui ma p'tite dame.
- Cette fenêtre qui n'est pas atteignable, même avec une échelle ?
- Exactement. On l'ouvre en général avec un long bâton à crochet sur le bout. Et on la nettoie grâce à un système de cordage et de poulies en haut.
- Aucune trace de pas dehors ? Sur les murs ? Rien ?
- Rien du tout. C'est la treizième infraction depuis un mois, alors, vous imaginez bien qu'on a tout vérifié. On avait même calfeutré cette fenêtre. Vous voyez le résultat, ça n'a servi à rien.
- Ils l'ont... Cassée ?
- Ils l'ont cassée.
- ... Avec un caillou ?
- Avec un caillou.
- A cette hauteur, sans échelle, sans même avoir grimpé aux murs de pierre du bâtiment.
- Vous avez tout dit, alors je vais un peu arrêter de tout répéter, hein...
Clap clap !
- Coquelicot, reste-là mon grand, va pas foutre la pagaille. Je ne vois pas trop ce que je peux faire pour vous sur ce coup, vu que je vois pas vraiment comment c'est humainement possible ce genre de vol de cette manière, hein...
- Nous savons bien, nous avons cherché absolument toutes les pistes, et même les quelques détectives privés que nous avions engagés se sont cassés les dents sur cette histoire. Encore de l'argent fichu en l'air pour un petit rigolo qui ne nous fait absolument pas rire...

Le directeur du relais de poste, Jim Horrek était un vieil homme de petite taille - il s'était probablement tassé avec l'âge - avec un peu d'embonpoint sur le ventre, et une myopie très avancée. Joufflu, les joues rougies par le froid ambiant dans le grand bâtiment où transitait une grande partie du courrier de North Blue, il avait des yeux de chien battu, et de grosses cernes qui trahissaient son inquiétude quant à la situation.

Caoirse contemplait la fenêtre cassée d'un œil dépité et sceptique, ainsi que les plumes d'une douce couleur orangée qui jonchaient le sol. Elle poussa un soupir, tandis qu'elle surveillait du coin de l’œil son pélican qui déambulait avec un air curieux et pataud les allées où les lettres et colis étaient rangés et triés.

C'était décidément un véritable casse-tête. Plus que se casser les dents pour le moment, elle s'y cassait plutôt le cerveau. Elle finirait par avoir une migraine à force, mais il fallait bien qu'elle fasse quelque chose pour ce pauvre homme.

- Joseph Gherbrian m'avait dit que vous pourriez peut-être faire quelque chose pour nous, mais si même vous, vous restez dubitative devant cette histoire, j'imagine que le relais finira par être délocalisé afin d'éviter ce genre de problèmes, reprit le vieil homme d'une voix déprimée.
- Pour le moment, je vous avoue que je n'arrive pas à mettre les morceaux ensemble. Mais je compte bien faire tout mon possible pour débroussailler à nouveau cette histoire et faire en sorte qu'on trouve le coupa-
Sbloorhhhghl
- Mais c'est pas possible Coquelicot, t'aurais pas pu régurgiter ton repas dehors !

Au même moment, la porte du relais de poste s'ouvrit dans un grincement sonore, qui fit se retourner la jeune femme et le vieux Boréalin. Caoirse tenait fermement le bec de son pélican, afin d'éviter qu'il ne rende au sol un peu plus de son repas matinal et odorant. Position fortement cocasse pour un nouvel arrivant, vous imaginez bien.

- Désolée camarade, mais le relais est fermé pour aujourd'hui, la livraison de courrier attendra qu'on règle quelques petits soucis ! Cria-t-elle d'une voix forte en guise d'accueil.
- On ne vous pas prévenue ? Répliqua Jim Horrek avec surprise.
- Prévenue de quoi ?

Froncement de sourcils, mine étonnée.

- La garnison de Boréa a envoyé quelqu'un afin de vous soutenir dans cette recherche. Au cas où la situation dégénère, si vous voyez ce que je veux dire. Et puis, ça les intrigue cette histoire, vous comprenez.

Ah, un partenaire. La jeune femme admettait qu'il ne serait pas de trop. Si cela ne tenait qu'à elle,
elle aurait jeté sa casquette pour ne plus s'occuper de cette affaire emmêlée de nœuds obscurs.
  • https://www.onepiece-requiem.net/t14649-comme-une-lettre-a-la-pos
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Deux semaines… Cela faisait deux semaines que je m’étais enfin décidé d’envoyer une lettre à ma famille, lettre qui m’avait pris au moins deux bonnes semaines à écrire. Je n’en avais jamais rédigé une et je ne savais pas quoi dire dedans. Que j’avais commencé mon aventure par rencontrer un équipage pirate, que je m’étais lié d’amitié avec eux, mais qu’ils m’avaient lâchement abandonné à la première occasion et qu’à cause de cela, je m’étais retrouvé Marine alors que je ne les portais pas vraiment dans mon cœur et que, par-dessus tout, j’étais seulement à quelques jours en bateau de chez eux ? Eh bien… Oui. J’avais fini par tout raconter, dans les moindres détails. Même mon arrivée sur Boréa a été inscrite… Et même la perte d’un de mes hommes. L’électrochoc. Cet évènement a même été la principale motivation de cette lettre… Cela m’avait rappelé que je pouvais mourir à n’importe quel moment, dans l’anonymat, sans que ma famille le sache. Cette pensée m’avait délié les mains et j’avais écrit toute la soirée.

Cependant, quelques jours après le dépôt de la lettre aux services postaux, plusieurs histoires de vols de courrier avaient éclaté. La poste subissait de nombreuses infractions complètement irréalistes et, à chaque fois, la totalité de la correspondance du port de Lavilliere disparaissait. Au début, je ne m’étais pas trop inquiété, je me disais que ma lettre était sans doute partie avant ces affreuses histoires. Mais plus le temps passait, plus je m’inquiétais. À faire l’aller retour, le courrier devait prendre moins d’une semaine à faire l’aller retour entre Tanuki et Boréa. Alors, sans doute que ma famille prit quelques jours pour rédiger la réponse, mais j’aurais déjà dû la recevoir. Et le fait était que je n’avais eu aucune après deux semaines. Plusieurs possibilités s’offraient à moi : soit ils avaient besoin de plus de temps, soit leur réponse était en chemin, soit ma lettre faisait partie des victimes ou soit leur réponse avait subi le même sort.

Je devais bien l’avouer, les deux dernières solutions ne m’arrangeaient pas du tout. J’en devenais limite irritable. Tous les jours, je faisais chier mon équipe, j’allais au service postier plusieurs fois par jour plein d’espoir et repartait toujours dépiter. Enfin, la moitié de mes troupes se moquaient bien de moi, surtout Juno qui, à chaque fois qu’il me voyait avec le moral dans les chaussettes, n’hésitait pas à rajouter une couche pour bien me mettre mal, du style « Et s’ils avaient eu un accident ? », « Peut-être qu’ils sont morts » ou encore « Ils s’en foutent peut-être de toi, hein ? ». Depuis ce jour, le bâtiment ENTIER de la garnison était nickel ! Tous les jours, le petit argenté faisait le ménage, aidé par les autres qui ne pouvaient s’empêcher de le suivre. Même Iban, lui qui était la plupart du temps réservé, il s’amusait à me lancer plusieurs petites crosses. En ce qui concernait Nick… Il faisait rien de mal, mais sa tendance à rire à n’importe quelle blague me gavait, alors je l’envoyais de corvée, lui aussi.

Fallait dire aussi, nous n’avions pas grand-chose à faire non plus. Le calme était revenu après le kidnapping des enfants. Le retour du quotidien et des rondes à travers la ville. La Marine avait quand même plusieurs pistes possibles sur les infractions et je sautais à chaque fois sur l’occasion pour être au courant, voir même de participer. Seulement, toutes furent soldées par un échec : soit les personnes étaient présentes sur les lieux du crime au mauvais moment ou soit il y avait juste rien. C’était terriblement frustrant et je passais cette frustration sur mes hommes, surtout pendant les entraînements. Ils avaient déjà du mal en temps normal, alors lorsque j’étais sous tensions, les pauvres en prenaient pour leur grade. La frustration était vraiment la chose que je détestais le plus. Il me fallait une piste, une vraie piste.

Ce fut alors qu’un beau jour, le colonel Gray me convoqua dans son bureau et me proposa la mission suivante : me rendre aux services postaux pour les aider dans leur enquête, histoire de leur servir de couverture. Il n’eut même pas besoin de me poser la question que j’avais sauté de mon siège pour accepter cette requête. Enfin, de l’action et surtout, de l’action qui me concernait. Il me regardait d’un air assez surpris, peut-être pensait-il que j’allais refuser et que je voulais être placé sur une mission plus « importante », mais celle-ci me convenait tout à fait. Je rassemblais alors mes trois compères et je sortis de la garnison en direction de la poste.

Heureusement, la route fut assez courte, car elle fut particulièrement longue pour mes nerfs. Chacun y mettait son petit grain de sel.

« Et bah alors, on s’reconvertit en postier ?
- Vu l’temps qu’il y passe ces temps-ci, c’est dans la continuité.
- Les postiers doivent vraiment en avoir marre de toi. Ils vont encore croire qu’tu viens pour voir si t’as une réponse.
- Ils vont finir par t’refouler à l’entrée.
- Ou ils vont d’offrir un poste là-bas ! J’imagine déjà : Kan Kagami, sabreur des colis postaux ! »

Alors que le blond et la gueule d’ange continuaient leur commentaire lourd, je remarquai que nous arrivions à destination. Je m’approchai alors le pas pressé vers la porte et la poussai sans problème, même si cette dernière grinça assez fortement, pendant qu’Iban lança sa seule vanne :

« Un-un problème pour ouvrir votre courrier ? Pas de problème, avec l’agilité et le savoir faire de la famille Kan, votre enveloppe n’a qu’à bien se tenir ! »

Avant de se rendre compte que ses dernières paroles furent audibles par les personnes à l’intérieur de la poste. Il se figea en un instant, nous regarda un à un avant de rougir fortement et de se cacher derrière moi. Je le regardai par-dessus mon épaule et soupirai longuement.

« T’es vraiment irrécupérable. » Murmurai-je avant reporter mon attention vers les deux personnes qui se trouvaient à l’intérieur de la bâtisse.

Je connaissais bien une de ces deux personnes : le directeur. Un vieil homme, tout ce qu’il y avait de plus banal. Cependant, je n’avais jamais vu l’autre personne, tellement recouverte de couches de vêtements que je ne pouvais pas du tout voir qui s’était, mais une chose était sûre : elle ne venait pas du coin.

Après que le vieil homme ait fini de parler, j’opinai du chef avant de le saluer façon militaire tout en regardant derrière moi pour m’assurer que les trois autres suivent le mouvement et je pris finalement la parole :

« Je me présente, Caporal Kan Kagami. Je suis avec les matelots Nick,
- Salut !
- Iban,
- Bo-bonjour…
- Et de Juno.
- …
- Et nous allons vous accompagner pendant votre enquête sur ces vols de courrier.
- AH, je vous reconnais. Vous êtes le garçon qui n’arrête pas de déranger mes employés pour savoir si vous avez reçu une réponse. Malheureusement, nous avons encore subi un vol hier soir…
- Encore ?! »

D’agacement, je claquai mes doigts tout en soupirant longuement, puis j’observai un peu aux alentours. Le directeur reprit alors la parole tout en désignant la personne à côté de lui :

« Je vous présente Caoirse Coat, elle est postière sur notre réseau. Elle nous a été envoyée parce qu’elle a déjà de l’expérience dans ce genre d’affaire… Un peu spéciale.
- ‘Fin, un peu spéciale… J’ai jamais eu affaire à des vols, surtout pas à ce genre de vol complètement tiré par les cheveux.
- Vous allez l’accompagner tout au long de son enquête.
- Nous somme là pour ça ! »

Je m’approchai de cette fameuse postière et lui tendit la main avec un sourire bienveillant sur le visage :

« J’espère qu’on trouvera le fin mot de l’histoire ensemble.
- J’espère aussi… Qu’il arrête d’nous faire chier avec sa lettre. » Ajouta le garçon aux cheveux argentés avec un ton dédaigneux.

Je ne répondis même pas à ses paroles, un seul regard noir dans sa direction lui fit comprendre qu’il allait devoir faire le ménage une fois rentré à la garnison. Je soupirai une nouvelle fois et je reportai alors mon attention vers Caoirse en lui demandant :

« Et… Ce pélican, il est à vous ? Il a pas l’air bi- Nick, arrête de l’emmerder ! »

Et oui, dès qu’il y avait une connerie à faire, notre joueur invétéré était le premier à se jeter dedans. Celui-ci avait directement repéré le grand volatile – fallait dire, le louper, c’était comme manquer un éléphant dans un couloir – et s’était amusé à le taquiner un peu. Si l’oiseau se rebiffait, je ne bougerais même pas le petit doigt, tant pis pour lui.
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