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Le Retour de Moka

Le Songe de la Reine

On raconte…mais Dieu seul connait l’insondable et la sagesse que recèlent les histoires des peuples du passé. Gloire à Celui qui a fait des vies des anciens une leçon pour leur descendance !
[Un transmetteur d’Alabasta nommé Pirûz a dit :] Oyez ! Oyez ! Jeunes gens ! Et les autres plus très frais, venez à moi ! Venez écouter ce que j’ai à dire ! Moi, le transmetteur, sur la foi de ceux qui m’ont précédé et se sont chargés de transmettre cette histoire merveilleuse, rapporte qu’au début, le siège du pouvoir fut établi à Alubarna par notre seigneur Shaqûnq, lorsqu’une pierre tombée du ciel lui indiqua la place d’une oasis pour se désaltérer. Là, il fonda la cité du désert et la dynastie Néfertari, laquelle vit se succéder quatre-vingt-cinq souverains, de Shaqûnq à notre grande reine, Vivi Néfertari. Cette souveraine, vertueuse par sa générosité, son courage, et sa sagesse, fut récompensée par une très longue vie par Celui qui envoya le nuage ombrageux sur notre seigneur, aussi refusait-t-elle-même d’utiliser l’argent du trésor public pour les jouissances de la vie d’ici-bas, préférant faire pleuvoir sur le peuple la pluie revigorante du fruit de son travail. Certains disaient même….Hey toi ! Reste ici et ne te défile pas ! L’histoire ne fait que commencer ! Donc, nous disions que les rumeurs la faisaient même travailler dans les rues de la capitale, le visage voilé, vendant du thé aux passants qui ne la reconnaissaient pas. Quelle grande souveraine avons-nous là, que Dieu – loués soient ses attributs – continue de la protéger, elle et notre puissant royaume.
Asile de paix et de prospérité, Alabasta vivait et tirait toute sa subsistance de profits licites, même si, de temps à autres, pirates et autres forbans impies tentaient de semer le trouble en nos terres, et fort malheureux étaient ceux qui se livraient aux entreprises criminelles, car l’armée royale avait tôt fait d’écraser les adversaires de la Loi sous un déluge de feu et d’acier. Cet avertissement, qu’il serve par ailleurs à vous tous qui, assemblés devant moi, veulent écouter un discours de vérité, car c’est bien le poète solitaire de Nanohana qui dit :

Ô mon Dieu ! Préserve-moi de l’indigence et des vices,
Car tu me combles de tant de bienfaits en ces lieux,
Gardés pour Toi par une dynastie de gens pieux,
Aux bras de puissance armés pour la justice.


Toutefois, une certaine nuit, alors que la reine Vivi Néfertari reposait sur sa couche, elle eut un songe qui la terrifia. Se réveillant toute haletante, le front perlé de gouttelettes de sueur, elle appela ses servantes et leur demanda de lui préparer un bassin d‘eau froide, sur la terrasse de sa chambre. Par la même occasion, elle convoqua son fils et son vizir pour deviser de son cauchemar, car elle s’était prise, avec l’âge, à croire en la force prémonitoire de certains rêves. Les sièges destinés à ses invités furent disposés à la porte de la terrasse, séparés du bassin par un rideau de soie cramoisi, et la reine s’étendit dans l’eau, aidée de sa femme de compagnie. Lorsque les deux hommes qu’elle attendait arrivèrent, elle les invita à prendre place et leur fit apporter des rafraîchissements puis les aborda en ces termes :
- Ymdebekht, aîné de mes enfants, Rustem, mon fidèle vizir, mon repos d’ordinaire si paisible se trouva ébranlé par une vision d’horreur. Je ne sais que penser de ce que le Destin me donna à voir, m’aiderez-vous à démêler la trame du royaume sur lequel mon pouvoir ne s’étend guère ?
- Mère, croyez-bien que je ferai tout pour vous assister et partager avec vous le fardeau des sphères oniriques, car ne dit-on pas, en parlant des parents, que si l’un deux doit atteindre la vieillesse auprès de nous, alors nous devons bien nous garder de leur dire “Fi !”, comme nous ne pouvons les brusquer, obligés par l’amour de leur adresser des paroles respectueuses et leur tendre une main secourable, répondit Ymdebekht, la larme à l’œil.

- Grande Reine, sur ma tête et mon œil, je jure de vous prodiguer les conseils avisés de celui qui, pendant des années, se tint à votre droite pour la gloire de votre Maison et la grandeur de votre Royaume, ajouta Rustem, d’un ton solennel.
Demeurant interdite un moment, la monarque des étendues arides leva les yeux au ciel, alors que sa domestique s’appliquait à lui verser délicatement de l’eau sur les cheveux. Là-haut, la pleine Lune jetait sur la terrasse de marbre une lueur irréelle, inquiétante et blafarde, annonciatrice des choses mystérieuses dont seul le Plus Savant pouvait connaître l’issue, bonne ou mauvaise. Enfin, elle se décida à faire part de son étrange rêve aux quelques oreilles qui pouvaient l’entendre :

- Je me trouvais sur les quais de Nanohana, en pleine nuit, et il n’y avait pas âme qui vive…Au loin, sur les flots baignés d’une lumière incendiaire, s’approchaient onze navires gigantesques, et le feu, un si grand brasier, les suivait dans le ciel en poussant des hurlements terrifiants...Tout d‘un coup…

Elle s’arrêta, ses mains étaient engourdies et tremblaient.

- Tout va bien ? s’enquit la servante, qui avait remarqué que sa maîtresse fixait les paumes de ses mains et que celles-ci étaient anormalement raides.
- Oui, ne vous en faites pas, souffla la reine.

- Mère ? Que se passe-t-il ? demanda le prince, la voix étranglée par une appréhension sourde.
- Je suis un peu fatiguée mon fils, ne sois pas inquiété…Revenons un moment à ce rêve. J’étais donc face à cette flotte de navires, le feu toucha bientôt tous les bâtiments autour de moi, la ville entière s’était embrasée…Et je demeurais seule, au milieu des flammes, avec une étrange cage à mes côtés.

- Une cage ? Enfermait-t-elle quelqu’un ? questionna le vizir, palpant son opulente barbe grise comme il le faisait toujours lorsqu’il réfléchissait.
- Oui, une lourde cage de fer noir, avec un l’intérieur une ombre à forme humaine portant une chaîne autour du cou. Celle-ci était attachée à un anneau, lui-même fixée à une stèle sur laquelle figurait l’emblème de notre Maison, le scarabée noir de jais au Soleil occulté…Menacée d’une morsure brûlante, j’allais bientôt périr lorsque l’ombre me susurra « Libère-moi. », mais je ne savais comment m’y prendre ! Je n’étais pas assez forte pour briser la chaîne qui la retenait prisonnière, de même que mes bras fébriles ne pouvaient écarter les barreaux de sa prison…Au comble du désespoir, je me mis à genoux, priant pour que cette chose soit libérée et soudain, tout s’évanouit. La porte de la cage s’ouvrit avec un fracas assourdissant et l’ombre en sortit, se ruant sur l’incendie et luttant contre lui jusqu’à ce que tout plonge dans l’obscurité. Sur cette dernière vision, je me réveillai…
- C’est l’annonce d’une invasion, annonça le vizir, d’une façon qui ne faisait aucun mystère sur son scepticisme à ce sujet.
- J’ai songé à la même chose que vous, vizir Rustem, mais je ne vois aucune nation sur Grand Line pouvant concurrencer notre pays, tant par la puissance de son armée que par l’étendue de ses terres ou ses richesses, surenchérit Ymdebekht, sur le même ton.
- Par Dieu ! Si même mes confidents ne me croient pas ! Comment pourrais-je garder l’héritage de Shaqûnq du danger qui le guette ? tonna la reine.
- Votre Majesté, je ne suis qu’un pauvre vizir, sans réelle connaissance en oniromancie, mais comprenez bien que votre auguste ancêtre ne gouverna pas son empire sur des rêves, comme les puissants de ce monde prêtent attention à ce qu’ils voient les yeux ouverts, pas à ce qu’ils imaginent les yeux fermés, dit Rustem, révérencieux pour atténuer la dureté de ses propos.
- Mère, je ne puis non plus me risquer à tenter de projeter quelconque lumière sur les propos d’un sombre sibyllin que vous nous contâtes là, mais je connais peut-être quelqu’un qui serait en mesure de nous aider, tempéra Ymdebekht.
- Quelqu’un ? Dis m’en plus, mon fils.

- Il y a un derviche en ville, arrivé depuis le mitan oriental de notre royaume, qui accepte volontiers d’expliquer les rêves contre quelques piastres, dois-je le faire venir ?
- Non, n’éprouve pas un saint homme en le convoquant comme un esclave, va à lui avec Rustem, et interrogez-le pour moi.
- Sur ma tête et mon œil, cela sera fait, dit le prince, quittant les lieux sans plus attendre, talonné par Rustem.

Ensemble, les deux hommes allèrent dans l’hospice où le derviche séjournait, et c’est sur le passage de leur carrosse qu’un poète alcoolique joua sur son luth ces vers :

Que font les princes et les ministres cette nuit ?
Cherchent-ils dans nos rues quelque plaisir ?
Non ! Je ne sens-là que l’odieuse ire,
Des êtres apeurés d’un mal inouï !


Arrivés dans l’hospice, ils pénètrent les portes de bronze du maristan, et ce qu’ils virent dans la pièce centrale les émerveilla. Baigné par la lumière de la Lune, qui irradiait la cour intérieure de sa lueur enchanteresse, le derviche tournoyait en chantant, les malades et éclopés de toutes parts versant sur lui une averse de confettis, comme une pluie de papillons. Le vizir Rustem ne voulant s’approcher davantage, le prince Ymdebekht continua seul jusqu’au derviche qui, tout d’un coup, s’adressa à lui :

- Hey ! Prince d’Alabasta ! Es-tu venu m’instruire sur une chose que je connais déjà ? Car la Reine a bien rêvé d’une invasion, facilitée par onze traîtres, ceux-là menés par un général incendiaire, mais ne vous en faites pas ! s’écria-t-il en tournoyant toujours, sur les chants de ses comparses.

- Tu as annoncé la ruine d’Alabasta et veux que je garde mon calme, as-tu perdu la raison derviche ?! s’indigna Ymdebekht.

- Rien n’arrivera si vous trouvez votre mamelouk, un esclave-soldat qui a oublié son nom et son identité, il n’est qu’une ombre, mais assez grande pour occulter même le Soleil ! Il éteindra le brasier de la guerre ! poursuivit le derviche, un sourire aux lèvres.


- Ce mamelouk a-t-il un maître ? intervint Rustem, qui s’était avancé aux côtés du prince.

- Non ! Trouvez-le vite !

Interloqué par ce qu’il venait d’apprendre, Ymdebekht sortit de l’hospice à grandes enjambées et, mandant un cheval et une escorte, ordonna à Rustem de partir à la recherche de l’esclave, tandis que lui-même allait rapporter à la Reine ce qu’il avait appris sur son rêve.

- J’entends et j’obéis, fit Rustem, se touchant le cœur et le front avant de prendre la route.

Et ils se séparèrent, Ymdebekht retournant au palais royal, Rustem s’engageant sur la voie des dunes, un souffle saturnien le poussait alors vers les côtes de l’Ouest.
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