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Pour un Cipher plus propre

Cher journal,

La nuit recouvre la ville de sa chape sombre et mystérieuse. L’air est lourd et de gros nuages, gonflés d’une pluie qui ne tardera pas à se déverser sur les pauvres malheureux qui auront fait l’erreur de rester dehors, ont entrepris de recouvrir le ciel, la lune et les étoiles, et avec eux le peu de clarté qu’il restait à diffuser. Dans ce quartier chic de la banlieue de Marie Joie, si rayonnant et pimpant en pleine journée, l’obscurité a envahi les rues, seulement troublée à intervalles réguliers par la lueur vacillante des lampadaires au gaz qui se dressent comme des gardiens dérisoires devant chaque maison, tels de faibles îlots de clarté dans une noirceur presque omniprésente.

Tap, tap, tap, tap.

Le pas lourd du veilleur de nuit brise le silence. Le cliquètement de son ceinturon, le hoquet de la lanterne qu’il tient à la main, font écho au martèlement de ses bottes. La lumière qu’il amène avec lui illumine soudainement la rue, et je me recroqueville sur moi-même pour me faire la plus petite possible derrière la haie ! L’homme passe sans me voir, traverse la rue du même pas lent et régulier qui le porte chaque nuit, et va poursuivre sa patrouille dans la ruelle suivante.
Je redresse la tête et jette un rapide coup d’œil : la rue est de nouveau déserte et parfaitement silencieuse. Vite ! Je me redresse d’un bond, et je m’élance ! A côté de moi, la silhouette sombre de mon équipier en fait autant. Tels des félins vêtus de noir, nos capes voletant derrière nous dans un très bel effet (très classe, en toute modestie !) nous traversons la ruelle en quelques rapides enjambées, à un endroit où les lueurs des lampadaires de recoupent à peine. En un instant, nous regagnons le couvert rassurant de l’obscurité.

La maison qui s’élève à présent devant nous est une vieille demeure bourgeoise à l’allure austère, faite de vieilles pierres sombres et de boiseries usées, dont les hautes fenêtres noires et aveugles semblent nous dévisager d’un air menaçant. C’est fou comme un simple changement de lumière peut à ce point modifier la perception que l'in a d'un bâtiment ! C'est comme si derrière chaque fenêtre se cachait une silhouette anonyme, tapie derrière la vitre opaque pour nous observer. Une seule fenêtre, au tout dernier étage, brille d’une lueur ténue, preuve qu’il y a bel et bien de la vie dans ce manoir.

Je hoche la tête en direction de Yoligan, dont je devine la présence plus que je ne la vois. D’un même geste, nous dégrafons nos capes et je retourne la mienne pour révéler une doublure d’un blanc profond. Je me recouvre de ce drap blanc, muni de deux trous au niveau des yeux, devenant aussitôt la plus élégante des fantômes à avoir jamais marché dans cette ruelle (les autres étant soit des enfants déguisés venus réclamer des bonbons, soit de véritables spectres de personnes décédées et donc aussi laides que des cadavres, la concurrence n’est pas très rude !) ! Je pousse le vice jusqu’à décomposer une partie de mon corps sous la forme d’un nuage gazeux et légèrement translucide.

Toujours aucune réaction, ni de la part du veilleur de nuit au loin, ni de l’oppressante demeure ou de ses hypothétiques habitants, vivants ou non, ni du ciel qui menace. Alors telle un fantôme -car j’en suis une plus vraie que nature à présent- je me glisse en avant telle un souffle de vent, me décompose intégralement, passe sous la porte, et me reconstitue à demi de l’autre côté. Je déclare d’une voix forte et aussi glaciale qu’un vent d’hiver :

« - Houuuuu ! Je suis le spectre de vos crimes passés ! »

Pas de réponse. Aucune réaction. Seul le tic-tac régulier d’une pendule, dans une pièce voisine, brise le silence pesant que j’ai eu l’audace de troubler. Je regarde rapidement autour de moi, mais mes yeux ne m’informent pas de grand-chose dans ce noir complet. La minute complète que je passe à attendre, immobile, me permet de m’assurer que personne n’a remarqué ma présence. Je me retourne alors vers la porte dont je tire les verrous un par un, le plus délicatement et silencieusement possible en les enveloppant dans mon drap pour en étouffer les sons, afin de laisser entrer mon complice.
Je lui chocote :

« - Rien ici. Hum, je veux dire : houuuu, le pauvre mortel que nous venons hanter n’est pas iciiiii. Allons voir en hauuuuut. »


Dernière édition par Caramélie le Ven 20 Aoû 2021 - 22:08, édité 1 fois
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Pour un Cipher plus propre 6is0
"Terreur Nocturne avec Caramélie"

Un monolithe sombre gratte alors le cadre de la porte grinçante, la cognant d’ailleurs sur son battant qui manque de se décrocher ; une main gantée surgit alors de cette forme sombre, laissant apparaître ce qui semble être des phalanges osseuses sous le cuir parsemé de trous. Le grognement rauque accompagne ensuite son geste sec de fermeture alors que le monstre sort de l’obscurité :

« Monter… »

Le dos tourné à sa compagne du paranormal, la chose semble se frotter le visage en échappant une vapeur sanguine. Et ceci fait, d’un mouvement de main sa capuche tombe sous laquelle rien ne s’y trouve ; en effet, l’homme en armure médiévale occidentale n’a pas de tête. Ou du moins, seules quelques vertèbres ressortent, gigotant naturellement comme possédées par une force mystique, invisible. Le corps alors tourné vers la spectre, qui témoigne ses impressions à cette vision épouvantable, il exprime péniblement ses songes en tâtonnant le vide :

« La science… permet bien des choses… mais c’est à nous… de garder la tête… sur les épaules. »

Et sur ces mots, une sphère lumineuse faisant penser à une citrouille apparaît dans sa main droite, un visage monstrueux y souriant. Le couloir, puis la pièce perdent alors une partie de ses ténèbres, au profit des ombres valsant en rythme avec la progression du duo occulte ; seule exception étant, le pendule de l’horloge qui nous accueille de toute sa puissance. Une horloge massive, semblant défier la gravité depuis des siècles en demeurant fermement encrée au sol de marbre ; de nombreuses aiguilles parcourent son cadran, on peut aisément en compter plus d’une dizaine, pour presque autant de sigles différents, dont la signification et l’agencement semble échapper à toute logique humaine.

En parcourant ce qui se trouve être la pièce de séjour, des citrouilles éclairant lugubrement ses recoins, d’imposants escaliers menant vers l’étage supérieur forment le mur auquel est adossé le menhir de bois et de mécanique. Et malgré ses pas, alourdis par son armure, le monolithe demeure silencieux grâce à l’épaisse pile de tapisseries, diverses et variées, qui jonchent le sol malgré sa fourbe aspérité. Par endroits, le pas est rebondi ; à d’autres, il s’enfonce de plusieurs centimètres ; mais les axes principaux épargnent le chevalier sans tête de cette dangereuse originalité. De nouveaux songes lui viennent à l’esprit, ponctués par l’orage qui ronfle au loin :

« Peut-être… mieux vaudra-t-il… éviter de guerroyer… ici. »
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Cher journal,

Je parcours les couloirs vides de la demeure, mon corps à demi vaporeux flottant à mi-chemin entre le sol et le plafond. Je ne le fais pas seulement pour rentrer dans mon rôle de composition de fantôme, ni pour éviter de faire du bruit (sur cet aspect de toute manière, l’armure géante qui m’accompagne ruinera tous mes efforts au moindre plancher que nous traverserons !), mais surtout pour me tenir à la hauteur des plus de deux mètres de haut de mon équipier, la tête au niveau de la sienne (du moins là où elle devrait se tenir, puisque la tête du véritable Yoligan est enfouie quelque part sous le torse de sa cuirasse).
Alors que nous parcourons le couloir qui traverse le deuxième étage -toujours aussi désert que les précédents- un bruit rompt le silence. Un grondement, suivi d’un écoulement semblable au son que ferait une averse de pluie. Je m’imagine que l’orage a enfin éclaté avant de constater avec étonnement, en regardant par la fenêtre, que tout est calme dehors.
C’est alors qu’une mélopée, chantée d’une voix de baryton, retentit dans la maison :

« - Belle qui tiens ma vie
Captive dans tes yeux
Qui m’as l’âme ravie
D’un sourire gracieux
Viens t'en me secourir
Ou me faudra mourir. ♫»


J’échange un regard avec le Cavalier Sans Tête, et nous continuons en silence.

« - Pourquoi fuis-tu mignarde ♫
Si je suis près de toi
Quand tes yeux je regarde
Je me perds dedans moi
Car tes perfections
Changent mes actions.♪ »


Nous arrivons au dernier étage, différent des autres en ce qu’il est mansardé et surtout beaucoup plus agréablement décoré. On sent que l’on vit ici, que quelqu’un utilise ces pièces et y sème ses affaires. C’est comme entrer dans un petit cocon douillet, et par contraste tout le reste de la demeure semble n’être qu’une maison abandonnée, laissée en proie à la poussière et aux esprits tandis qu’ici serait le dernier bastion des vivants !
Nous traversons une petite cuisine improvisée, puis une chambre. Le bruit de l’eau qui coule est de plus en plus net, tout comme la suite de la chanson :

« - Tes beautés et ta grâce ♪
Et tes divins propos
Ont échauffé la glace
Qui me gelait les os
Et ont rempli mon cœur
D’une amoureuse ardeur ♫ »


Une dernière porte nous sépare de la voix qui chante. Une rapide inspection de l’interstice nous montre qu’elle est verrouillée ; il nous faut au moins trois secondes pour la crocheter. Puis, nous pénétrons en silence…

Devant nous se trouve un homme, debout dans sa douche, tourné de trois-quarts dans le sens opposé au nôtre. Âgé d’une trentaine d’années, la mine sereine, complètement nu, ses cheveux noirs et trempés plaqués en arrière sur sa tête. Il est occupé à se frotter avec un gant de toilette tout en chantant sous l’eau qui ruisselle sur son visage et ses épaules :

« - Mon âme voulait être ♪
Libre de passions
Mais amour s’est fait maître…. aaaaaah ! »


Il nous regarde, les yeux écarquillés, et tombe en arrière dans sa douche en hurlant de plus belle :

« - Aaaaaaaah ! »

C’est le moment ! J’écarte grand les bras sous mon drap, génère plus de fumée que jamais, et m’exclame de la voix la plus théâtrale que je sais faire :

« - Repens-toi, misérable mortel, car nous sommes les fantômes de tes crimes passés !
- Q…qu’est-ce que vous faites ici ? Et vous êtes qui, bon sang ?!!

Je répète d’une voix patiente, comme si je parlais à un petit enfant pas très malin :

« - Je viens de le dire : nous sommes les fantômes de tes crimes passés. »

L’homme se couvre le corps en s’enroulant dans son rideau de douche. Je vois à ses yeux qu’il cogite, et il s’exclame soudain.

« - Oh ça y est j’ai compris. J’ai été dénoncé, c’est ça ?
- Vous êtes agaçant à la fin ! Je suis une vraie fantôme, regardez ! Je suis immatérielle et tout ! Et mon compagnon le chevalier n’a pas de tête ! »

Mais l’autre n’en fait déjà plus qu’à sa tête, justement :

« - Ecoutez : soit vous êtes deux gamins qui ont choisi la pire maison possible pour réclamer leurs friandises d’halloween, soit vous êtes deux amateurs qui croient pouvoir rivaliser avec un agent d’élite. Dans les deux cas, je vais tapisser la salle de bain avec votre sang… ! »
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"Terreur Nocturne avec Caramélie"

Sitôt ces mots prononcés, le chevalier sans tête se met à rire comme s’il avait une gorge à déployer, accompagné par les têtes flottantes qui imitent son sourire absent. La voix macabre, le doigt osseux pointé sur sa personne, la menace résonne aux oreilles de la victime en devenir :

« Ainsi soit-il… mortel. Divertis-nous avant de rendre… ton dernier soupir. »

« Bande de malades… »

Le sang de l’agent ne fait qu’un tour. Attrapant sa serviette dans le même geste, il fait voler son pied mouillé direction des esprits frappeurs. La fantôme s’évanouit alors et l’armuré se penche sur le côté. La lame d’air siffle entre eux, sortant de la pièce tandis que suivent les balles d’eau s’écrasant sur l’armure du monolithe ; une citrouille restée proche de ce dernier explose d’ailleurs à l’impact, libérant une fumée dont seules les jambes ressortent. Profitant de l’ouverture et de sa jambe levée, il prend appui sur la baignoire et se propulse en avant pour venir au corps-à-corps, serviette à la taille :

« Les gars comme vous j’en fais ma friandise quand j’ai que ça sous la dent. Alors soit ton amie se rend et vous passez gentiment à table, soit… »

Il disparaît d’un coup, réapparaissant la seconde d’après le sourire aux lèvres. Son index est enfoncé dans un des trous créés par son attaque, au plexus :

« … Ce qui se trouve là-dessous va être broyé de l’intérieur. »

Aucune réponse. À vrai dire, depuis l’explosion le chevalier n’a pas bougé d’un millimètre :

« Quoi, déjà sonné ? C’est l’armure qui te fait tenir debout ? »

C’est d’ailleurs une fois aussi proche du monstre qu’il remarque à quel point cette chose le dépasse en taille. N’étant pas lui-même particulièrement grand, c’est à peine si sa tête atteint le supposé cœur de la créature. Il agite alors son doigt à l’intérieur pour tâter, furetant du regard autour de lui pour retrouver la comparse de son otage, quand son oreille attentive remarque quelque chose d’étrange : l’eau de sa douche coule toujours ; en fait non, à bien y regarder, le jet d’eau semble plus fort qu’avant son initiative. Cependant, certes le jet d’eau est plus fort, mais surtout la vapeur qui sort de la baignoire est bien plus importante. En outre, la pièce est devenue un véritable sauna, mais pourquoi diantre se dit-il, essaierait-elle de le fatiguer sous la chaleur ? Mais sait-elle qu’il n’a pas besoin de…

« Que… ? »

La porte derrière le chevalier claque d’un coup ; au moment où ses yeux rencontrent celle-ci, la chaleur le prend à la gorge. Son expression enjouée s’efface peu à peu pour redevenir sérieuse, alors qu’il tente difficilement d’inspirer. Et du sérieux, ses yeux laissent échapper une pointe de hantise. Que faire ? Lâcher son otage et risquer une attaque surprise ? Il n’arrive plus à parler. Il ne peut plus menacer comme prévu. Il a besoin de savoir qui les a envoyés. La panique prend le pas. N’ont-ils pas besoin de respirer non plus ? Ils peuvent pas être de vrais fantômes. L’homme tâte de nouveau de son index l’intérieur de l’armure. Rien. Comment est-ce possible ?! Sortir ! Vite !

Dès l’instant où l’agent retire son doigt du plexus, une main gantée squelettique vient l’écarter tandis que l’autre saisit sa gorge. La fumée, flottant en suspens au-dessus du torse, est soufflée la seconde d’après par une espèce de visage souriant, noirci par la suie. Devant cette apparition, l’homme échappe un cri avant de se débattre. Il s’apprête à retenter le tir pendant que la chose inspire, mais ces plus d’une centaine de kilogrammes d’os et d’armure le plaque au sol. Son visage prend des couleurs, ses muscles s’engourdissent, il voit cette moitié de tête approcher de plus près… puis la porte plus loin. Une idée désespérée lui vient en tête quand il pointe furtivement son index vers celle-ci.

Les gonds sautent, la porte avec dans la seconde qui s’étale sur le chevalier, provoquant un grand appel d’air au passage. L’homme profite alors de cette opportunité pour s’échapper en prenant la plus grande inspiration de sa vie. Il tousse… crache ses tripes… respire… titube… et s’allonge de nouveau… soupirant à son repos bien mérité… sous les yeux de la plus élégante des fantômes.


Dernière édition par Yoligan Niveren le Mar 21 Sep 2021 - 20:50, édité 1 fois
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Cher journal,

C’est le moment pour une bonne réplique bien sentie ! Tandis que j’accompagne l’homme, victime de mes gaz soporifiques, dans sa chute, je lui murmure avec une fausse douceur et un sourire ironique sous mon drap:

« - Bienvenue au pays des rêves. Je suis sure que le réveil vous plaira beaucoup. »

J’ai préparé ma phrase évidemment, même si je le nierai fermement si jamais on me demande ! En réalité j’en ai plein comme celle-là en réserve, adaptées à toutes sortes de circonstances : ça permet d’éviter de bafouiller ou de sortir une suite de mots maladroits. Sortir la bonne phrase au bon moment c’est ce qui distingue les vrais agents des amateurs !

Je prends le temps de m’assurer que notre victime est bien inconsciente, mais toujours vivante ; je lui asperge le nez et la bouche d’encore un peu de gaz par acquis de conscience. Cela fait, je me tourne vers l’armure sans tête un peu amochée à côté de moi :

« - Tout va bien Yoli… Cavalier sans tête ? Tu n’as pas respiré trop de gaz ? »

J’essaie de décrypter comme je peux l’attitude de mon compagnon au visage plus qu’inexpressif :

« - Si jamais tu sens que ta tête tourne ou que tes paupières sont lourdes… eh bien il y a un lit dans la pièce à côté. Je n’ai pas de remède, désolée… ! »

Retour à notre cible ! Bogoris Kučera , quarante ans, agent du Cipher Pol et surtout hautement suspect dans une affaire de fuites d’informations relatives aux convois de prisonniers ! Des journées de travail et une étude minutieuse de ses rapports de mission nous a permis d’y dénicher plusieurs incohérences qui, après vérifications, on conduit à la présente arrestation préventive pour un interrogatoire plus poussé. Arrestation en toute discrétion évidemment, d’où notre intervention particulièrement subtile et ce qui va suivre :

Je pioche devant son lavabo un gobelet plein d’eau, une brosse à dents, et un tube de dentifrice "colmate, pour un sourire étincelant". Je prends le tube, et le vide consciencieusement dans la bouche de ma victime jusqu’à ce que ça déborde. Je prends ensuite la brosse à dents et l’enfonce d’un coup sec ! Et pour finir, je verse le contenu du gobelet pour donner au tout un aspect plus réussi.
Et voilà ! Le rapport d’"hospitalisation" (j’insiste sur les guillemets !) mentionnera que M. Kučera a été victime d’un tragique accident de brosse à dents ! C’est beaucoup plus fréquent que ce que tu peux imaginer, journal ! Il faut dire aussi que les gens ont vraiment de drôles de manies d’employer les objets du quotidien pour des usages inappropriés !

Je retrouve mon collègue qui a fini de mettre de l’ordre dans la salle de bains. Cela ferait tâche si demain la femme de ménage, ou n’importe lequel de ses collègues venu aux nouvelles, découvrait un champ de bataille avec une porte à demi sortie de ses gonds, un rideau de douche arraché et des flaques d’eau partout.

Ma cape de fantôme voltigeant autour de moi, je retourne dans la pièce précédente et commence à ouvrir un à un les placards et les tiroirs. Nous vidons soigneusement tout, en nous efforçant de mettre le moins de désordre possible, pour récupérer tout ce qui peut ressembler à un document, une lettre, ou une information intéressante. Tout y passe : tiroir à chemises, boites à chaussures, armoire dédiée aux cravates, bibliothèque, collection de magazines de pin-up des années 1620-1627… Nous nous assurons de l’absence du moindre double fond, du moindre livre déguisé en journal intime révélant toutes ses sombres activités (mais qui serait assez bête pour consigner toutes ses activités d’agent secret à la limite de la légalité dans un journal ?), mais notre butin est finalement assez maigre. Nous trouvons bien une correspondance que nous nous ferons une joie d’éplucher en détail, quelques formulaires à l’aspect vaguement officiel, et dans le doute nous emportons aussi la collection de magazines de pin-up, mais rien ne nous saute aux yeux. Il nous faudra éplucher ça à tête reposée.

Plus tard, car pour le moment d’autres affaires requièrent notre attention ! Nous avons encore du travail devant nous, et la journée qui vient promet d’être longue ! Nous rangeons soigneusement tout notre bazar, puis je laisse ensuite Yoligan se charger du corps inanimé tandis que je glisse les quelques documents dans les tréfonds de mon drap blanc. Nous nous empressons ensuite de quitter l’endroit avant que l’orage n’éclate.
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"Terreur Nocturne avec Caramélie"

« Je peux continuer… nos prochaines victimes… nous attendent. »

En apercevant le reflet de son pseudo-visage sur le miroir de la salle de bain, le chevalier lave son visage, qui apparaît enfin avec le reste de la tête et ses mains, avant de passer le lavabo à la javel. Le reste de la pièce est aussi javellisé pour ne laisser aucune trace de leur crime ; un grand tableau est installé à la place des impacts sur le mur, là où la lame d’air et les balles d’eau ont frappé. Monsieur Kučera ayant l’habitude de bouger régulièrement son meublier pour éviter les traces d’âge, le personnel n’aura pas le réflexe de fouiller derrière avant que l’équipe des chasseurs de fantômes soit passé nettoyer. Maintenant affublé d’un caleçon à cœurs et d’un pyjama défait bleu-nuit, l’homme gît au sol de sa salle de bain, la brosse à dents dans sa bouche d’où éclatent les bulles du dentifrice à chaque ronflement.

Une fois dehors, les capes du duo les recouvrent de nouveau pour repartir aussi simplement qu’ils sont venus. Quelques ruelles plus loin, une hippomobile et son cheval attendent nos fantômes qui appellent les urgences par escargophone, afin qu'elles viennent « sauver une victime d'un tragique accident ». Et alors que sa camarade est aux rennes du véhicule, vêtue en cochère, le chevalier détache ses plaques d’armure pour les accrocher ça et là sur le carrosse ; l’habillage donne un aspect qui, combiné au reste déjà bien royal, vient ajouter une touche gothique ; les impacts, quant à eux, assaisonnent ce que s’apprête à joindre le chimiste que je suis.

Maintenant démuni de l’amure qui me faisait presque doubler en corpulence, mon costume d’agent du Cipher Pol apparaît alors sous la faible lumière des lampes du carrosse. Soupirant en posant la dernière pièce, je conseille à ma camarade d’une voix bien plus calme, presque enrouée, pendant que je sors une sacoche et un masque en papier de ma veste :

« Mets ton masque et ne respire pas ce que je vais mettre sur les plaques d’armure, ça peut décaper tes poumons en une inspiration. »

De cette sacoche, j’en extrais une sorte d’éponge pour les frotter sur les surfaces métalliques, en particulier les traces de lutte ; le résultat est immédiat, le métal est rongé à chaque passage, vieillissant le matériel sans la rouiller comme si ces plaques avaient toujours été là et bien entretenues. Grâce à ce procédé, la voiture vient de prendre pas loin de dix ans sans paraître délabrée, et l’armure précédemment utilisée ne va pas nous encombrer pour la suite. C’est l’étape la plus longue de la mission, mais ça nous facilite la suite car nous avons besoin de ce carrosse en particulier. En effet, notre prochaine cible est férue des voitures militaires de la Grande Guerre Albane, et nous devons justement aller la chercher en traversant les rues bondées des quartiers actifs de Mari-Joie. Profitant de ma grande taille, je grimpe dans le véhicule sans avoir à utiliser son marchepied ; pendant le trajet mon visage change jusqu’à arriver à un résultat qui me convient et me rend méconnaissable.

Garés tranquillement, attendant patiemment l’arrivée de notre invité, j’en profite pour ouvrir les volets de cocher, histoire de discuter un petit peu :

« Pas trop froid dehors ? »

S’ensuit donc un peu de temps en « tête à tête », jusqu’à l’arrivée du VIP que l’on reconnaît presque instantanément ; et pour cause, l’agent ne cachait presque pas sa joie de voir l’hippomobile, car la vue de cette dernière semble lui décrocher un sourire jusqu’aux oreilles. Descendant de celle-ci en ajustant la cravate, puis la longue barbe du faux visage, je racle la gorge pour jouer une nouvelle identité d’agent ; la voix est vieillie, grinçante, transpirant la malice par un ton légèrement aigu mais demeurant masculin :

« Bonsoir ? »

L’interlocuteur sort des ombres, aussi habillé d’un costume d’agent du Cipher Pol, retirant un instant ses lunettes de Soleil pour que l’on puisse le reconnaître, avec ses yeux gris et son visage bouffi. Manifestement ce qu’il a sous les yeux l’enchante tout particulièrement, c’est à peine s’il peut garder l’expression neutre typique de sa profession :

« Qu’entendez-vous par-là ? Me souhaitez-vous le bonsoir ou affirmez-vous que c’est un bonne soirée que je le veuille ou non ? Ou peut-être voulez-vous dire que vous vous sentez bien ce soir en particulier ? Ou tout simplement que c’est un soir où il faut être bon ? »

Le grand vieillard se retient de rire un instant avant de répondre, feignant une sorte de désemparement pendant qu’il ouvre la porte de la voiture :

« Tout cela à la… fois je suppose. » Le barbu tend ensuite sa main : « Avez-vous la lettre, agent ?
– La voici, agent. »

Répond l’homme au double menton en la lui donnant, montant dans le même geste quand son interlocuteur lui fait signe. Un petit cliquetis régulier se fait subtilement entendre lorsque l’invité use du marchepied, que le grand barbu camoufle d’une quinte de toux de vieillard.


Dernière édition par Yoligan Niveren le Mar 21 Sep 2021 - 20:50, édité 1 fois
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Cher journal,

La carrosse grince et son plancher descend de plusieurs centimètres lorsque notre passager monte à bord. Mon collègue ferme la porte avec tout le professionnalisme qui sied à ce genre de tâche, puis prend place à l’arrière. Juchée à l’avant sur la banquette de conductrice, j’ajuste mon chapeau haut de forme, vérifie le pli de ma tenue de cochère, fais claquer mon fouet et lance mon plus beau :

« - Yeeeha ! »

Notre attelage de quatre chevaux se met en branle, et leur trot raisonne en rythme tranquille sur les pavés.

Les lumières du petit matin illuminent déjà les allées de ce petit coin tranquille de Marie-Joie. C’est l’occasion d’apprécier les majestueuses maisons blanches aux toits bleutés, les immenses fenêtres peu avares en dorures, les longues haies et les arbres entretenus avec soin. Nous ne sommes pas loin du centre du monde, et ici ça se sent !
Nous quittons finalement le quartier résidentiel, et suivons une route un peu plus campagnarde, suivant une allée bordée d’arbres longeant une rivière dont les rivages semblent avoir été crées juste pour permettre les promenades du dimanche. De là, nous prenons la direction de la ville intra-muros là où se trouve entre autres le quartier général local du Cipher Pol, notre destination.

Notre passager à la mine réjouie, à l’arrière, a de quoi être de bonne humeur. Pas seulement parce que nous avons fait l’effort de lui offrir un voyage de grande classe dans un carrosse de collection loué à grands frais (ne t’en fais pas de soucis journal, tout sera notifié en tant que frais de mission !) et décoré par les efforts de mon compagnon, mais surtout par le contenu de la lettre qu’il a reçu la veille. Cette dernière, qui porte le sceau tout à fait officiel et pas du tout contrefait du CP8 à qui appartient notre homme, lui annonce qu’il est convié à un entretien avec son supérieur visant à évaluer ses possibilités d’évolution de carrière. Une manière de dire que, s’il s’en sort bien, il pourrait ressortir de cet entretien avec le grade d’agent coordinateur ou de chef d’équipe. Rien que du bonheur en perspective, à ceci près que cette convocation est parfaitement fausse ! Ce que notre pauvre victime risque de le découvrir dans peu de temps…

Mon attelage négocie un virage avec la perfection tranquille de ceux qui ont l’habitude de parcourir ce trajet, et nous quittons  la grande route pour nous engager sur un axe secondaire qui monte vers la ville. Quelques bâtiments décorent le paysage ici, moins pimpants mais tout aussi authentiques avec leurs briques peintes et leurs façades rustiques. Nous passons sous un pont, tout en briques lui aussi, en apparence tout à fait anodin amis qui a pour Yoligan et moi un écho tout à fait particulier. Nous y sommes !
D’un même geste, mon collègue et moi actionnons chacun une poignée située de notre côté. Le véhicule en entier est animé d’un grincement tandis qu’un mécanisme s’enclenche… et que l’habitacle tout entier se détache brutalement du châssis ! Propulsé par un énorme ressort, le voilà projeté en l’air à toute vitesse, droit vers le pont !

Mon visage s’illumine déjà de la satisfaction du travail bien fait, jusqu’à ce que je me retourne et que je constate… que notre passager est toujours là ! Debout sur la route à côté de la carcasse de notre véhicule, tenant à la main une porte visiblement arrachée à l’habitacle au moment où celui-ci a commencé à quitter le sol, il répond à mon visage surpris par un sourire amusé.

« - Dommage, on dirait que c’est raté n’est-ce pas ? »

BamBamBABABAM ! Les débris du carrosse retombent en pluie sur le sol tput autour de nous.
L’homme laisse nonchalamment tomber la porte dans l’herbe, époussète son costume, et me fixe soudainement d’un regard dur, aiguisé comme une lame. Je ressens instantanément un frisson : cette personne est dangereuse, bien plus que ne le laissent supposer son physique bedonnant et son visage ingrat.

« - Vous ne pensiez tout de même pas me tromper avec une contrefaçon si grossière d’un modèle de carrosse McGwyre de 1396 d’Alba ? Ni avec tous ces efforts déployés : depuis quand le CP8 investit autant de moyens pour flatter ses agents ? Ça ne me laisse que deux possibilités : soit ils ont un énorme service à me demander et ils essaient de me mettre bien, soit ce n’est pas mon Cipher Pol qui vous envoie. Et comme on demande rarement un service à quelqu’un après l’avoir emplafonné en haut d’un pont…»

A l’instant d’avant il se trouvait devant moi, et le voilà soudainement dans mon dos, l’index posé sur ma tempe, l’autre main prête à saisir mon poignet. Les pans de son vêtement émettent un bruissement après une ou deux secondes, comme si le temps figé par son mouvement si rapide reprenait brusquement ses droits.

« -… voilà qui m’amène à vous demander : qui vous envoie, et qu’attendiez-vous de moi ? »

Je sens mon cœur s’accélérer brusquement. Pourtant, j’arrive a maintenant l’illusion apparente d’un calme parfait. Je reste droite, le visage figé dans un demi sourire, et fait ce que toutes les personnes mal élevées font : répondre à une question par une autre question.

« - Qu’est-ce qui vous rend si suspicieux ? Ça pourrait n’être qu’un affreux accident à cause d’un modèle défectueux. Auriez-vous fait quelque chose qui justifie qu’on vous voudrait du mal ? »

Je sens le souffle de l’homme dans mon cou. Sa présence s’impose sur moi comme celle d’un prédateur prêt à dévorer sa proie. Même sans le voir, je sens qu’il sourit cruellement tout en répondant :

« - Ne joue pas à l’idiote avec moi, petite fille. Si je suis rentré dans votre jeu à tous les deux au lieu de vous égorger tout de suite, c’est pour savoir à quoi j’ai affaire. Maintenant ta vie ne tien plus qu’aux réponses que tu pourra apporter à mes questions NE BOUGE PAS DE LA, TOI ! » Lance-t-il brusquement à l’adresse de Yoligan.

Je joue l’apaisement, et réponds sur un ton raisonnable :

« - Très bien, très bien… nous sommes entre personnes intelligentes, je suis sure que nous allons pouvoir dialoguer aimablement. Pour commencer… »

Je sens l’homme se raidir.

« - Qu’est-ce… ? »

Il tente de me serrer le poignet, mais sa poigne n’est pas aussi ferme que je m’y attendais. Ou qu’il s’y attendait lui-même. Il s’écarte brusquement, quoique toujours en posture de combat.

« - Qu’est-ce que tu essaies de me faire, sale gamine ?! »

Mince ! Visiblement, il s’est rendu compte que je l’aspergeais de gaz soporifique depuis le moment où il a eu le malheur de se coller à moi ! J’y suis allé doucement, discrètement pendant que nous parlions, mais il a eu le temps d’en ingérer une certaine quantité avant que les symptômes ne se manifestent.

« - Alors déjà, ce serait bien d’arrêter de me rappeler tout le temps que vous me trouvez jeune avec cet air méprisant. Est-ce que je vous appelle "vieil homme" à chaque phrase, tout ça parce que vous êtes un papy de cinquante ans ? »

L’essentiel étant réglé, je descend de ma banquette, fais quelques pas vers l’homme chancelant, et tends la main vers lui sans plus chercher à dissimuler davantage les volutes de gaz que je réunis autour de lui.

TCHAC ! L’agent projette un violent rankyaku qui découpe les pavés de la route, le squelette du châssis de notre carrosse piégé, et l’attelage retenant encore nos quatre chevaux dont d’un, fauché par l’attaque, chute au sol en hennissant pitoyablement !
Je me prépare à riposter mais déjà, lancé par un rapide soru, l’homme passe devant moi, esquive Yoligan, et se hisse à califourchon sur l’un des chevaux libérés !

« - Allez, hue mon grand ! Yaaa, yaaa ! »

Et le voilà qui détale au galop !
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"Course hippique avec Caramélie"

Ni une, ni deux, à peine le premier cheval parti qu’un second lui colle au train ; la voix du vieillard se fait entendre depuis le cheval poursuivant, sur lequel l’agent est précairement installé :

« Je prends les devants ! »

En effet, un des cauchemars du vieil homme est l’équitation, car depuis son enfance il n’a jamais été capable de monter et de tenir sur un cheval sans qu’il lui arrive des surprises ; c’est donc avec une appréhension tout juste dissimulée qu’il disparaît entre deux voitures rejoignant la route. Chose notable, depuis qu’il a prévenu sa camarade, celui-ci a ses lunettes sur le nez, semblant marmonner quelque chose.
La course donne l’avantage au premier, qui a bien plus d’expérience que le second, une expérience qui se remarque par l’écart qui se creuse progressivement. Du côté du coureur hippique en tête, voyant son poursuivant suivant difficilement la cadence, il se permet une raillerie bien placée :

« Alors le vieux, on a du mal à suivre ? Peut-être qu’il est temps pour vous de prendre votre retraite ! Prenez exemple sur votre cheval ! »

Ce à quoi le grand barbu répond naturellement, visiblement confus et après bien plusieurs longues secondes, entre deux slaloms maladroits :

« Pourquoi voulez-vous que je pende mes emplettes ? Quelles emplettes ? Pour les pendre où ?
– J’ai dit : pren-dreuh vo-treuh re-trai-teuh !
– Qui va prendre ma retraite ? Il y a une nouvelle taxe sur les retraites c’est ça ?
– Mais nooon ! » s’exclame-t-il avant de baragouiner une injure au vieillard, sortant violemment de la route principale.

Moment de vérité, si le vieil homme ne peut pas sortir du mini boulevard c’est qu’il est définitivement maudit. Il double une voiture, puis deux, mais au moment de tourner sa grande taille lui fait défaut : son centre de gravité étant trop haut, il se retrouve catapulté sur le côté tandis que le pauvre canasson dérape dans le sens opposé comme s’il venait d’oublier de freiner ; l’arrière-train fait face à la bordure extérieure du virage, les fers crissent sur les pavés. La prise réflexe des jambes de l’agent est telle qu’au lieu de s’éjecter il réalise un tour complet par le ventre, baissant sa tête pour esquiver les membres inférieurs – en n’oubliant pas de maintenir ses lunettes sur son nez –, pour se retrouver de nouveau sur le dos. Étonnamment, la distance entre les deux coureurs semble particulièrement amoindrie ; encore plus étonnant, le cheval qui vient de réaliser la cascade semble d’autant plus déterminé à rattraper l’autre, ce qui arrache un sourire au cavalier barbu qui a cru mourir quelques instants plus tôt :

« C’est pas très gentil de dire ça monsieur, dois-je vous rappeler que je suis votre aîné ?
– Comment ?! »

Il reste bien sûr encore plusieurs mètres d’écart, les ruelles étroites n’aidant pas à la manœuvre, mais c’est suffisant pour le plan que vient d’imaginer le retardataire. Réajustant ses lunettes, il prononce deux mots :

« Soustraction ! Multiplication ! »

Les sabots de son cheval se mettent alors à cracher des flammes, propulsant la monture à chaque pas en rougissant les fers, ce qui laisse des traces au sol sur son passage. À nouveau, le destrier fait preuve d’un courage exemplaire, au grand dam du fuyard qui laisse exprimer sa surprise :

« Quoi ?! Mais c’est absurde ! Comment fait-il pour ne pas avoir peur de ce que vous lui faites faire et votre incompétence ?!
– Peur ? Bien sûr qu’il a peur, mais c’est plus fort que lui. On lui a dit qu’il était trop vieux pour continuer les courses hippiques, et ce malgré sa dévotion envers son ancien propriétaire qui a préféré le remplacer. C’est lui qui en avait marre des routes tranquilles, moi je n’ai fait que lui tendre la main, c’est d’ailleurs à cause de son âge que vous ne l’avez pas choisi pour fuir, n’est-ce pas ? »

À cela le compagnon du barbu siffle des narines, crevant davantage l’abcès qui le sépare de son adversaire de circonstance. Pour ne rien arranger, le galop d’un troisième étalon se fait entendre ; ou plutôt, celui d’un nuage avec une tête d’équidé. Lâchant un grincement amusé à la vue d’un spécimen aussi ravissant, il ne peut s’empêcher de rajouter :

« Vous voyez, semblerait que vous avez misé sur le mauvais cheval, monsieur Baldig !
– Ah vous croyez ? »

Brusquement, le bedonnant Baldig fait sauter son destrier sur une planche posée sur une charrette, donnant accès à une plateforme qui mène aux toits du quartier. Pourquoi autant d’efforts pour continuer cette course à cheval vous demanderez-vous, après tout c’est un agent confirmé qui a de la bouteille dans le métier, peut-être est-ce l’idée de se faire arrêter par un duo en fin de vie et un nuage sur pattes qui a provoqué cette réactance ; ou encore, peut-être est-ce le gaz soporifique qui l’empêche d’avoir les idées claires ; certainement un mélange des deux. Arrivés au niveau de la planche, le vieillard fait signe de galanterie au monticule de coton blanc, disant ensuite à son compagnon qu’ils vont faire la course ensemble contre ce gros vilain qui l’a discriminé pour son âge. Le cheval-nuage passe alors devant le cheval-roquettes avec une grande aisance, montant gracieusement aux toits en deux fois moins de temps que son prédécesseur.

Quant au duo de vieux, la planche se casse en morceaux lorsque le cheval-roquettes pose son sabot, rappelant un problème au barbu scientifique sur cette stratégie : il ne peut pas utiliser la propulsion sur un sol aussi fragile que les tuiles, chose que semble avoir prévu leur adversaire. De plus, les fers sont si chauds que leurs clous conduisent la chaleur, ce qui risque à terme de brûler son courageux destrier. Ils doivent donc reprendre la course à l’ancienne en attendant que ça refroidisse, cependant ils ont maintenant une alliée de choix pour remettre le pied à l’étrier.


Dernière édition par Yoligan Niveren le Sam 28 Aoû 2021 - 17:37, édité 1 fois
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Cher journal,

Notre cible galope de toit en toit avec une audace et une habileté qui m’impressionnent ! Laissant loin derrière lui mon coéquipier trop chargé, il avale la distance en semant derrière lui une désolation d’ardoises arrachées !
C’est une belle action, mais c’est stupide. Il faudrait être idiot pour croire que son cheval pourra faire plus de quelques enjambées avant de déraper du toit et de se vautrer les quatre fers en l’air ! Je n’aurais alors qu’à me glisser jusqu’au cavalier désarçonné et… ah bah non en fait, oublie ce que je viens de dire journal : l’agent Baldig vient de sauter du bord du toit et, avec une maîtrise parfaite de sa monture, d’atterrir sur le suivant ! Et le voilà qui repart dans un bruit d’ardoises qui se brisent, semant derrière lui une pluie d’éclats bleutés !

Déçue mais pas décidée à abandonner pour si peu, je déporte mon cheval grâce au nuage très dense de gaz caravole qui nous enveloppe, et l’amène sur le toit d’une rangée de maisons parallèle à celle empruntée par l’agent.

« - En avant Fendlabise, rattrapons le !! » (Fendlabise c’est le nom de mon cheval. C’est plus chic que de s’appeler juste « Journal », mais ne sois pas jaloux : contrairement à toi je l’abandonnerai une fois son rôle achevé)

Fendlabise galope avec un enthousiasme débordant ! C’est comme si, après avoir passé sa vie à tirer tranquillement des carrosses, il réalisait soudain qu’il avait toujours rêvé de participer des courses, et qu’en plus il se révélait doué pour ça ! Le voilà cheval de course, cheval policier, cascadeur ! Il bande ses muscles avec force, agite avec rapidité ses sabots tandis que sa crinière voltige dans le vent ! Et je n’ose pas lui avouer qu’en réalité c’est moi qui fait tout le travail en nous faisant tous les deux flotter dans le nuage, ce qui nous empêche de tomber, tandis que son galop ne sert qu’à nous apporter la propulsion et la vitesse qui manquent à mon gaz caravole.

Agile malgré tout, notre étrange assemblage avale la distance, évitant de justesse les cheminées et les lucarnes ! A ma demande mon brave Fendlabise enjambe le vide, saute, vise trop court, flotte de manière assez improbable dans les airs et se pose sur le toit voisin ! Puis il repart, aussi vite qu’il s’est arrêté !
Notre cible nous devance toujours, et jette régulièrement des coups d’œil dans son dos. A chaque fois ce qu’il voit semble lui déplaire, et à chaque fois il éperonne sa monture avec un peu plus d’ardeur en s’écriant : « Yaaa ! Yaaaa ! » ! Et, l’imitant, j’encourage mon cheval en criant à mon tour « Yaaa ! Yaaaa ! » !

Nous sommes dans un quartier industriel de l’île, et heureusement car à cette heure, peu de badauds sont présents pour assister à la scène. Quelques ouvriers sont là malgré tout, visiblement contrariés par le spectacle (les gens ne savent pas apprécier les choses à leur juste valeur, journal !), et ces derniers nous invectivent et nous pointent du doigt ! Malheureusement pour eux, trop occupés qu’ils sont pour penser à regarder autour d’eux, ils se font renverser par un cheval et un cavalier propulsés par une roquette !!

Soudain, notre adversaire change de stratégie. Toujours agrippé à son cheval, il vide les étriers, écarte les jambes… et projette vers moi une série de rankyaku, de lames d’air ! Tchac ! La première creuse un sillon dans le toit à un demi mètre de nous ! Vlaaam ! Une seconde décapite due cheminée ! Et re-tchac ! Je dois parer une troisième avec mon tekkai pour éviter qu’elle ne blesse mon pauvre Fendlabise !

« - Sauvage ! »

Trahir le Cipher Pol passe encore. Menacer de me tuer pourquoi pas. Se mettre en danger et saccager les demeures de pauvres habitants en galopant sur leurs toits, à la limite. Mais risquer de tuer un brave cheval qui fait bravement son travail, ça c’est vraiment criminel !!
Laissant un peu de marge à ma monture, qui ne semble pas trop apprécier ça si j’en juge le brusque écart de surprise qu’il fait, je concentre dans mes mains une quantité de gaz. Avec la même force que j’emploierais pour asséner un shigan , je propulse ensuite ce nuage concentré à la manière d’un tir de canon ! Ça fait un bruit comme « Fsssshhhhht !! », mais en plus impressionnant. Le projectile file droit, laissant une fine et élégante trainée de fumée derrière lui, parfumant l’air matinal d’un délicat parfum fruité… et explose juste à côté de ma cible ! « Fsssshhhhht !! » à nouveau, mais toujours avec élégance, et puis en étant impressionnant ! Le gaz se disperse rapidement et enveloppe ma cible. Cette dernière tente un écart sur le côté, manque de se renverser dans le vide, fait bondir sa monture tout en se couvrir la bouche et le nez en se protégeant de son bras, et émerge du nuage de gaz sans dommage apparent.

« - Manqué, hahaha ! »

Moi, je continue ma course. Et tandis que Fendlabise galope tout droit, maintenant habitué à l’étrangeté de la situation et visiblement confiant dans le fait que je vais lui éviter de plonger dans le vide, je m’efforce de ramener la moindre parcelle de gaz sur ma cible. Cette dernière, qui ne manifestait aucune réaction dans un premier temps, se met soudainement à tituber. Son cheval aussi. Leur course ralentit sensiblement, ils heurtent une cheminée, dévient de leur trajectoire… et tombent dans le vide ! ... Malheur !!!

J’éperonne ma monture avec une énergie désespérée, comme si je ne le faisais pas déjà depuis le début de la course et comme si ça avait servi à quelque chose alors qu’elle galope déjà aussi vite qu’elle peut ! D’un bond gigantesque et Cara-Assisté, Fendlabise saute du rebord et atterrit sur le toit où se trouve le malheureux agent et sa monture, shootés au gaz soporifique… juste au moment où ces derniers basculent !
Vite ! Je bondis de ma selle et m’élance dans le vide à sa suite ! En un soru je suis sur eux ! Je saisis en catastrophe le cheval par ce qui me passe sous la main : une patte et une touffe de crins, et les retiens de toutes mes forces tandis que je me mets à gonfler ! Gonfler, gonfler, et prendre la forme d’une ronde, élégante, et très aérienne Caragolfière !
Une violente douleur de propage dans les bras alors que je tente de retenir le cheval en dépit du bon sens ! Heureusement, j’arrive à ralentir suffisamment sa chute pour que nous atterrissions tous les deux en douceur sur le pavé, tandis que les badauds qui attendaient là reculent prudemment.

L’agent Baldig, lui, se trouve à quelques mètres de là. Je le vois émerger d’un petit trou dans le sol épousant la forme de sa silhouette. Il est résistant ! Déjà il se relève et, titubant comme un ivrogne, tente de s’éloigner de moi en grimaçant et en se forçant à garder les yeux ouverts.
A ce moment-là, un bruit puissant emplit la ruelle. Un bruit semblable à une grosse roquette montée sur un cheval lancé au galop !!
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"Joute épique avec Caramélie"

Et alors que les bruyants clapotis explosifs parcourent la ruelle, approchant les lieux du crash le mini escargophone en main, un sous-officier de la Marine aux longs cheveux bruns et grosses lunettes rondes suit une discussion sur son fidèle cheval :

« Caporal, je viens d’avoir un trente-neuf en visuel, mais…
– Qu’y a-t-il, Première Classe ?
– Ça se passe sur les toits Caporal.
– Arrêtez vos pitreries. Vous savez très bien ce qu’est un trente-neuf n’est-ce pas ?
– Oui, un trouble de la circulation, mais je vous dis que ça se passe sur les toits Caporal.
– Je n’ai pas le temps avec vos sornettes ! Que se passe-t-il bon sang !?

– Un fou furieux a perdu les pédales et a mis en pagaille la toiture de plusieurs bâtiments dans mon arrondissement, Caporal. Je viens d’appréhender le suspect.
– Cette voix… Votre… ? Il a parcouru autant de distance sur les toits, Adjudant Revinen ?
– Disons plutôt qu’exceptionnellement l’Adjudant Koukan m’a légué son arrondissement, en échange du mien.
– Mais qu’est-ce que… ? »

Le jeune Adjudant sourit, réajustant ses lunettes pendant que des renforts viennent encercler le suspect particulièrement désorienté :

« L’uniforme… ce serait pas… ?
– Ne vous laissez pas avoir par ce costume de pacotille, les vrais agents ont un uniforme plus résistant que ça, c’est pas une pauvre chute qui va la déchirer. Ici c’est la capitale du Gouvernement Mondial, pas le cirque des fraudeurs. Mettez-le en joue soldats !
– En joue les gars ! »

Comme par appelé par un réflexe pavlovien, le soi-disant agent lève les mains en l’air, le sourire du vendeur aux lèvres :

« Allez-y… ! Tirez… ! Tirez sur votre allié du CP, vous le regretterez aussitôt que vous aurez pressé la détente.
– Oh mais si vous réalisez le moindre geste brusque c’est ce qui va arriver oui, mais nous préférons vous garder vivant, histoire de savoir pour qui vous travaillez.
– Pour qui… ? Pour le Gouvernement Mondial bien sûr. »

Le silence s’impose dans la seconde, le doute étant instauré. D’un côté, un homme fatigué en costume prétend être CP, tandis que de l’autre un Adjudant récemment installé met en doute sa bonne foi, le tout devant des soldats et des civils qui maintenant tendent l’oreille. Pour que l’honneur du Gouvernement Mondial soit sauf, il faudrait résoudre publiquement cette situation, ici et maintenant, car simplement l’emmener par doute ouvrirait les portes aux théories conspirationnistes. La sueur perle sur le front de nombreux hommes, maintenant leur suspect dans la ligne de mire ; la jeune cochère, quant à elle, est remerciée pour son sauvetage des chevaux puis gentiment écartée de la ronde, disparaissant de la vue de tous.

« Donc vous êtes en train de nous dire que le Gouvernement Mondial approuve de tels dégâts dans sa capitale ?
– Oh ça… je vais très certainement obtenir une pénalité sur mon salaire en compensation… pour les rembourser.
– Tant que vous payez sur votre salaire tout est permis ? Avez-vous conscience des conséquences sur le quotidien de nos citoyens en attendant les réparations ? De l’emploi du temps des ouvriers qui va être chamboulé en urgence exprès pour tout ce cirque ?
– C’est plutôt vous qui en faîtes un cirque… À Marie-Joie, tant qu’on a les moyens, tout a un prix… même la patience. C’est pas pour rien que la vie ici est plus chère mais bien plus rentable que sur n’importe quelle île perdue des Blues… non ?
– Et vous pensez sérieusement que la population a besoin de souffrir à chaque fois ce genre d’exactions ? Juste parce qu’on a les moyens de tout acheter ? Vous pensez sérieusement que le Gouvernement Mondial a besoin de leur donner des raisons de suivre les révolutionnaires ? Après le discours qu’a fait Genji Nakamura, jamais le Cipher Pol n’emploierait ce genre de procédés qui leur ouvrirait la voie ! Vous ne pouvez pas être un de leurs agents. N’est-ce pas, révolutionnaire !? »

Le ton de l’Adjudant est vindicatif ; l’index de ses soldats se crispe sur la gâchette de leur fusil à silex ; les mains tremblent sur le sabre de leurs frères d’arme. Ils n’attendent qu’un ordre pour faire couler le sang, ils se fichent de savoir si c’est un agent ; tout ce qui leur importe, c’est de débarrasser cette vermine qui profane leurs convictions. Le faux agent commence aussi à suer du front, son visage changeant de couleur pour blêmir, avant d’agiter violemment sa jambe vers ma direction en criant désespérément :

« Raaah !
– Feu ! »
Le peloton tire comme un seul homme.
« Addition ! »
Quatre énormes sphères vertes apparaissent autour du révolutionnaire, explosant en même temps au contact des balles. Du coin de l’œil, l’Adjudant s’assure d’être synchro avec son alliée de l’ombre en tendant un bras devant lui :
« Vous ne m’aurez…
– Champ de mines, puissance deux. »

Plusieurs étincelles apparaissent en l’air avant qu’une colonne rectangulaire verte en jaillisse et vienne frapper violemment le sol, soufflant l’air alentour et plaquant sa victime qui n’a plus la force d’éviter la technique combinée. Enterré de nouveau dans son propre trou, c’est à peine si son corps dépasse de la surface, malgré sa corpulence bien ronde. Et ce n'est que quelques secondes plus tard que la colonne s'évapore en une dernière explosion descendante, laissant le dos saillant fumer et l'expression inconsciente sur le visage à double menton applati.

« Ligotez-moi ce misérable avant qu’il se réveille et nous crache un nouveau mensonge. Je l’emmène avec moi. »

Observant la cochère, installée à la fenêtre d’un étage du bâtiment derrière le suspect, le duo échange un regard complice, satisfaits de leur résultat. Le premier traître à « l’hôpital » et le second au « QG », il ne reste plus que leur rencontre avec l’intermédiaire de mission afin de confirmer sa réussite.


Dernière édition par Yoligan Niveren le Mar 21 Sep 2021 - 20:50, édité 1 fois
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Cher journal

Le soir est tombé, et avec lui une vague de fraîcheur qui enveloppe toute l’île. Le carrosse de belle facture estampillé Hôpital de la Bonté des Dragons Célestes, avec ses belles boiseries blanches, ses roues cerclées de fer sculpté et ses portes jadis immaculées, dénote quelque peu dans le paysage sauvage et boueux de la route forestière.

A cause de l’orage de la veille, les ornières qui parsèment le chemin sont remplies d’eau de pluie qui éclabousse le châssis, tandis que notre véhicule cahote au milieu des nids de poule en charriant avec lui des flots de boue. Mon comparse, courbé sur la banquette avant, fixe le chemin en maintenant les rennes et tente de guider tant bien que mal notre attelage en évitant les flaques les plus profondes. Je me tiens à côté de lui, pelotonnée dans un manteau qui, à défaut d’être élégant (c’est un vieux modèle démodé de l’année dernière, que je ne conserve que parce qu’il est confortable mais que je ne sors que pour les tâches salissantes !) a l’avantage de me protéger des trop nombreuses éclaboussures qui maculent déjà notre véhicule !

« - Elle a dit pourquoi elle voulait nous retrouver aussi loin, déjà ? »

Notre véhicule traverse une flaque particulièrement large, et je remonte mon col en fourrure juste à temps pour protéger mes joues d’un jet de terrible boue qui tente de nous asperger !

« - Si c’était pour le côté discret, n’importe quel hangar ou petit bureau ouvert tard le soir aurait suffi ! »

Mon compagnon en est, tout comme moi, réduit à faire des hypothèses mais cela ne m’empêche pas de poursuivre :

« - Alors oui c’est sûr, ça fait mystérieux et secret de se donner rendez-vous dans une ruine désaffectée au milieu de la forêt. Personne ne risque de nous voir par hasard là-bas, et elle aura l’air super théâtrale quand elle se révèlera à nous en faisant mine d’être dans son élément alors qu’on vient de passer plus d’une heure à galérer dans les bois ! Mais entre nous, on est d’accord que c’est une énorme perte de temps, de moyens et d’efficacité ? »

S’il subsiste encore de belles forêts sur l’île de Marie Joie, rares sont cependant les endroits préservés de toute trace de la présence humaine. Nous arrivons finalement dans une clairière, dans laquelle se trouve ce qui a dû être autrefois un rutilant petit pavillon de chasse aux murs blancs et à la toiture en ardoises bleues. Encore fonctionnel en théorie, je n’ai aucune envie d’essayer d’ouvrir ses portes d’un autre âge ni de découvrir ce qui se cache derrière ses fenêtres aveugles ! Un empire de lierre est parti à l’assaut des murs, et un champ de ronces a établi son royaume sur un bon tiers du pavillon et de la clairière alentour.

« - Regarde ça un peu ! Je me demande… »

Me m’interromps soudains, et je sens que mon collègue a deviné la même chose que moi. Nous ne sommes pas seuls …! Yoligan arrête les chevaux et nous tendons l’oreille un instant, en silence. Il n’y a pas le moindre bruit, mais nous ressentons toujours cette « anomalie » désagréable qui nous fait nous dire qu’il y a un autre être humain ici. Je descends de la cariole, imitée par mon collègue, et laisse mon manteau sale sur la banquette. Pas question d’avoir l’air négligée devant notre chef de mission ! Nous faisons quelques pas dans la pénombre de la forêt lorsqu’une voix annonce :

« - Vous êtes assez prêts comme ça, je crois. »

L’instant d’avant il n’y avait personne, et pourtant je distingue à présent une silhouette qui se détache devant la paroi du pavillon abandonné. D’une voix douce mais parfaitement claire, je suggère :

« - Si six scies scient six cyprès, six cent six scient six cent six cyprès ? »
« - La pie niche haut, l’oie niche bas, mais où niche l’hiboux ? L’hiboux niche ni haut ni bas. »
« - Cent soixante six saussices salées, ce n’est pas sain pour la santé. Six suffiraient. Savourons les sans se salir. »

L’atmosphère se détend sensiblement alors que nous reconnaissons la validité de nos mots de passe respectifs.

« - Agent d’Isigny, agent Niveren, j’espère que vous avez de bonnes nouvelles à m’annoncer. »

Sortie de la pénombre, l’agente coordinatrice Justine Fontaine se révèle à nous. Agée de quarante ou cinquante ans -en fonction de ce que dissimule son habileté au maquillage-, elle a de jolis cheveux courts blond platine, un regard sauvage, et le sourire de quelqu’un qui n’hésite pas à  se salir les mains -et qui aime ça !

« - Tout à fait ! » dis-je avec un air ravi ! « La marine a été très coopérante, et même l’hôpital n’a pas fait trop de difficultés pour nous rendre l’agent Kučera. Ils m’ont expliqué qu’il valait mieux le laisser sous sédatifs vu qu’ils ne lui ont pas encore retiré la brosse à dents, alors je l’ai copieusement nourri au gaz soporifique.
- Une brosse à… ? » Elle secoue brièvement la tête « Peu importe. Le directeur Konstantov sera satisfait. Et, certainement, il sera satisfait de vous aussi si je lui glisse un mot à votre sujet. »

Assez fiers de nous, nous conduisons notre cheffe de mission jusqu’au carrosse où se trouvent, soigneusement saucissonnés dans des sacs à patates, eux même enchainés aux banquettes, et surtout gavés de gaz soporifiques, nos deux agents doubles.

« - Tiens donc… l’agent Kučera. Et Baldig, cette vielle canaille ! Je suis surprise qu’il se soit laissé capturer ! Comment avez-vous fait pour le démasquer ?
- En sachant qu’ils étaient suspects puisqu’impliqués dans la préparation des convois, en épluchant leurs rapports de mission principalement ! En y regardant de près on y a retrouvé de subtiles mais régulières incohérences, qui les accusent avec certitude. »

Je suis assez fière de nous je dois dire, et nos heures de recherches ingrates passées dans les archives ont payé ! Quand je pense qu’on a même pas pu exploiter des larbins pour faire le travail à notre place à cause de l’impératif de secret de la mission, je trouve qu’on a mérité une augmentation ! Ou une promotion ! Ou les deux !!

« - Et à propos des autres suspects que je vous ai suggérés ? Les jumeaux du CP5 ?
- Rien de concret. Leurs rapports de missions sont horribles à lire, ils sentent fort le choux en plus, mais ils ont l’air réglo. Cela dit puisqu’on en parle, ce n’est pas le cas de notre dernier suspect ! »

Fontaine me jette un regard à mi-chemin entre l’envie d’en savoir plus et l’agacement de me voir faire des manières, mais je continue avec un visage ravi:

« - En creusant un peu plus loin les incohérences de nos deux agents, et en les recoupant avec les incohérences d’un autre dossier que nous avons inspecté de près, nous avons réussi à établir le lien avec une dernière personne, probablement le cerveau du groupe. »

Je m’interromps une seconde, juste le temps d’appuyer mon effet théâtral avant de reprendre :

« - Agent coordinatrice Fontaine, nous avons la preuve que vous êtes à l’origine des fuites concernant les convois de prisonniers, et que les agents Kučera et Baldig étaient vos complices. Par conséquent, vous êtes en état d’arrestation ! »

Et hop, du premier coup journal ! Et sans bafouiller ! J’ai manqué une belle carrière au théâtre, ou dans les escargofilms ! Qui sait, peut-être que quand j’en aurais marre de courir à travers les sept mers…
Si les regards pouvaient tuer, celui de Justine Fontaine m’aurait déchiquetée sur place ! Je la sens prête à bondir, à me lancer une menace cinglante, mais je l’interromps :

« - Je sais ce que vous allez dire : qu’on ne manque pas de toupet de menacer une agent d’élite comme vous, et que vous allez nous faire un sort ici et maintenant. Vos complices ont dit à peu près la même chose, et vous voyez où ça les a menés. Alors s’il vous plait (et je suis sincère en appuyant ma supplique), ne perdons pas notre temps et notre énergie avec ça et passons directement au moment où vous montez avec nous dans le carrosse pour aller retrouver le directeur Konstantov ! »

La femme esquisse un mouvement pour lever le bras, mais mon collègue la retient avec une facilité surprenante. Même elle semble étonnée de disposer soudain d’aussi peu de force.

« - Et parce que j’en ai marre de devoir courir sur les toits et massacrer les mobiliers de salle de bain pour parvenir à mes fins, j’ai commencé à vous vaporiser discrètement de petites quantités de gaz soporifique dans les narines dès le début de notre conversation. » J’ai un sourire de peste ravie de l’être : «  vous devriez commencer à en ressentir les effets à présent ! »
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"Conspirations avec Caramélie"

Un petit rire échappe à la traîtresse, qui s’amuse à tester ma clé de poignet avant de s’effondrer à genoux :

« Et qui croyez-vous pouvoir convaincre… avec ces maigres preuves ? Les incohérences dans les rapports sont l’adage du CP0 ! … »

Elle fronce alors des sourcils, écarquillant les yeux de toutes ses forces pour affronter le gaz de ma collègue :

« Vous croyez que de simples agents du CP5 comme vous… pourraient fourrer leur nez dans nos affaires ? …
– Bien sûr. Cela dit, j’aimerais que vous nous présentiez à votre tortionnaire, avant de sombrer.
– Ma… ? »

La femme s’écroule alors tandis que je lâche prise. Elle roule, roule, roule à terre ; elle se tord, se meut, se prend la tête. Elle crie, faiblement, puis montre du doigt une fenêtre à l’étage du mur de pierre qui nous fait face, quelques dizaines de mètres plus loin, avant de cesser de bouger en position latérale de sécurité.


Une semaine plus tôt, au parc pour enfants de Marie-Joie. Un homme affublé d’une longue veste difforme marron et de lunettes noires est tranquillement assis à un banc, caché par son chapeau qui le protège du Soleil. Il regarde les enfants jouer, sous le ciel bleu et la surveillance des adultes qui ne daignent même pas remarquer sa présence, bien trop exotique pour éveiller des soupçons. Un autre homme le rejoint alors, les cheveux grisonnants et l’âge mûr, une paire de lunettes rondes accrochée à la poche de sa chemisette à carreaux.

Les deux hommes, installés côte à côte, ajustent leurs lunettes sur le nez simultanément puis sortent tous deux le dernier numéro du WEJ, tournant les pages conjointement comme pour le feuilleter ensemble et partager leurs impressions. Cependant, une fois ceci fait, ils ne prononcent pas un mot ; ils changent de page, retournant parfois en arrière, leurs pouces se baladant d’un paragraphe à l’autre où des phrases sont surlignées :

« Le Marionnettiste a encore tiré les ficelles ! »

« Le corps de la victime reste introuvable malgré le travail acharné de la 132ème Karaté. »

« Le CP0 est de loin l’organisation la plus discrète sur ses dépenses, il paraîtrait que même des étoiles ne connaissent pas son budget annuel. »

« Surprenant ! La valeur des frites à Suna Land ne cesse de grimper ! »

Un sourire se dessine sur le visage de l’homme à lunettes rondes.



De retour au présent où j’inspire fortement, gonflant davantage mes poumons que lors de notre chasse nocturne ; je crie au milieu de cette forêt où nul ne peut nous entendre :

« Sortez Marionnette ! Nous savons beaucoup de choses à votre sujet, comme par exemple vos dons pour l’hypnose par les couleurs, alors ne faîtes pas de bêtises ! »

Depuis l’intérieur d’une fenêtre ouverte, on entend une petite voix incisive et geignarde :

« Tch ! J’arrive, puisque vous insistez ! »

Les rideaux blancs volent sur son passage, laissant apparaître une jeune femme aux traits enfantins et habillée dans un style lolita arc-en-ciel. Au même moment, trois agents sortent de nulle part pour s’affaler sur sa destination, faisant trembler le sol et prenant toute la boue sur la trajectoire, à la place de celle qui leur fait l'altruisme d'offrir son poids plume. À quelques largeurs d’épaules de ses esclaves gît sa victime inconsciente, dont les lunettes tombantes affichent des iris spiralés :

« Sachez que c’est un honneur de me voir, rares sont ceux qui connaissent ma relation avec l’agent Fontaine. Je dois tout de même vous féliciter, agents d’Isigny et Niveren, vous avez été au-delà de mes espérances. »

Elle fait signe à une autre femme, aussi en costume trois pièces, qui sort des bois et vient jeter le corps inanimé avec les deux autres ; ses collègues suivent le pas de Marionnette en usant du même pattern que les rondins de bois servant au transport de monuments, se relevant à chaque fois pour se rejeter à ses pieds :

« Montez, agents ; notre destination nous attend et nous devons discuter de la version officielle de cette affaire, pour les autres corps du Cipher Pol. »

Il est évident qu’une brèche dans le CP0 même est inconcevable pour l’organisme, l’élite la plus intègre du Gouvernement Mondial ne peut pas être corrompue de la sorte. C’est d’ailleurs pour cela que Marionnette, sa supérieure, a orchestré cette fin. Cependant de nombreuses zones d’ombres demeurent : Pourquoi ne devions-nous pas en savoir plus sur l’agent Fontaine ? Que serait-il arrivé si Marionnette était restée dans l'ombre de nos actes ? Une chose est sûre, ce qui se dira dans ce carrosse restera dans ce carrosse, et la mission du duo de fantômes est un franc succès… à quelques détails de l’histoire près.
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