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| La grande médecine |



L’histoire d’Arcadia n’était pas des plus glorieuses. Entre les nombreuses guerres civiles et les vagues d’exode rurale, celle-ci passa la richesse à l’extrême pauvreté. Évidemment, la misère attire les êtres les plus infâmes de ce monde, profitant du chaos pour se dissimuler ou proliférer leurs grotesques doctrines. Mais comme toute histoire, celle de cette île évoluait, et plutôt dans le bon sens. Grâce à un appui du Gouvernement Mondial, notamment de ses services secrets, qui démantelèrent et mirent fin à long règne de certains criminels de renom.  

À présent, les constructions fleurissaient, la misère se réduisait à vue d’œil sans réellement disparaître. Chaque chose en son temps. Tant que le gouvernement mettait la main dans la poche, ça ira. L'après était plus inquiétant. Cependant, un espoir existait réellement et la raison de la présence de l’officier Levi n’était pas un hasard. Il avait bien l’intention de poser sa pierre à l’édifice, et rien de mieux que la construction d’un hôpital pour cela. Le terrain acheté, les plans conçus, les travaux lancés, le tout n’était qu’une question de mois à présent.  

Quelles étaient les réelles motivations d’Ethan pour un tel investissement ? Investir dans un premier temps, puis s’enrichir dans un second. Soigner les gens était une noble cause, mais les soins n’étaient pas gratuits pour autant. Arcadia, en construction, attirait bon nombre de travailleurs qui, malheureusement pour eux, se blessaient beaucoup au cours des chantiers incessants. Des hôpitaux comme ceux que l’officier projetait d’implanter ici ne courraient pas les rues, que ce soit ici ou ailleurs dans le monde. Contrairement à Seize, le Levi’s Hospital ne ferait pas la charité, mais assurerait les soins pour les patients. Pour assurer une telle chose, il fallait les meilleurs médecins.  

Ethan entra dans un des nombreux bars du quartier de Sévène. Pas le genre d’établissement qu’il fréquentait à l’accoutumer, mais il avait un objectif précis en tête. Il s’installa à une table face à un homme aux traits dissimulés par de nombreux tatouages tribaux. Pas réellement le genre de type que fréquentait l’officier. Se fier aux apparences n’était cependant pas toujours une bonne chose. Malgré les nombreux dessins qui arboraient le visage de cet homme, Levi le connaissait et le reconnaissait. Il observa l’individu qui fut surpris de le voir assis à sa table.  

- Alors, Fergus, c’est ici que tu te planques maintenant ? La marine te dégoute-t-elle tant que ça ?  

L’homme, d’un certain âge mais néanmoins bien conservé, inspira une taffe de sa pipe, recracha une grande quantité de fumée avant de répondre. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres.  

- J’ai toujours été un homme d’action, tu le sais, Levi. Ta famille toute entière le sait, d’ailleurs. Leur dernier coup, à ces connards de la scientifique, de me foutre dans une vieille garnison pour bien la boucler et ne pas les déranger, c’était la goutte d’eau. Autant, le reste de fratrie, je comprends ce qu’ils foutent là-dedans. Des pures produits Levi. Mais toi, Ethan, le raté de cette usine qui pond des génies du combat, qu’est-ce que tu fous encore dans cette organisation ?  

Ce dernier commentaire fit serrer les dents d’Ethan. Il a toujours été considéré comme un petit homme fragile, sans caractère, sans présence, sans aucune autorité naturelle, réellement le raté de la famille. Méprisé de tous ceux de son sang, sauf peut-être de son père et de sa sœur, l’officier fut confronté au désespoir durant toute son enfance. Mourir ou Survivre. Survivre, oui. Un verbe que son père employa chaque fois qu’il en eut l’occasion. Les seuls mots auxquelles Ethan, jeune enfant, s’accrocha pour survivre à cette jungle. Il s’accrochait toujours à ce seul verbe, qui le mena à l’Amirauté.  

- Heh. Pourquoi ne suis-je pas étonné d’une telle fin ? Les grands scientifiques, comme les grands soldats, toujours à se tirer dessus pour être sous les projecteurs.

- Tu sembles savoir de quoi tu parles, rétorqua le médecin.  

- Disons que, comme toi, on a tenté de définitivement me rendre muet. Mais contrairement à toi, j’ai réussi à m’entourer de personnes qui se battent pour me maintenir où je suis.  

- Le petit Ethan serait donc devenu grand, puissant et important aux yeux d’une si grande institution. Quels sont tes projets, gamin ?  

- Le nouvel hôpital en construction, c’est le mien.  

Le toubib siffla d’un air impressionné par cette annonce.  

- Toujours autant de pognon chez vous.  

- C’est mon fric et non celui de ma famille, rétorqua sèchement le contre-amiral.  

- Bien, bien, fit-il en balançant sa main pour détendre l’atmosphère. Et donc ?  En quoi cela me regarde-t-il ?  

- Ne joue pas au con, Fergus. Tu observes chaque jour cet édifice en construction, songeur. J'ai pensé à toi dès mon arrivée ici. Alors, je t’ai suivi jusqu’à maintenant. Deviens le directeur de mon hôpital.  

Les yeux du jeune retraité s’écarquillèrent. Jusqu’ici relativement calme, son pouls s’emballa légèrement.

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On pouvait s’attendre à de longues négociations, mais pour un amoureux de la science et de la médecine, proposer la direction d’un tel projet, c’était un cadeau des dieux. La vie de Fergus n’avait guère un semblant d’intérêt depuis sa démission. À part de se documenter, expérimenter certaines avec les moyens du bord, il passait sinon le plus clair de son temps dans les bars du coin. Un énorme gâchis pour un tel talent. Marchant tous deux en direction desdits constructions, Ethan en profita pour lui dire l’essentiel du projet, sachant que dans l’ensemble, ce serait le médecin - disons plutôt le directeur – qui gérerait l’organisation de l’établissement. Finalement, le propriétaire des pierres ne s’occuperait que de l’administratif - et encore – et de l’aspect financier.

- Pourquoi moi, Levi ? Je veux dire par là que dans ton rang, probablement même dans ta flotte, tu as autour de toi des médecins hautement qualifiés.

- Tout simplement parce que j’ai besoin des meilleurs à mes côtés, fit-il en souriant avec malveillance.

Fergus cracha en détournant la tête.

- Plus sérieusement, l’ami. Je n’y connais foutrement rien en médecine, mais il n’y a qu’à voir comment t’as géré pour mon bras pour savoir à quel point t’es bon. Pendant ma rééducation, tous les médecins m’ont demandé qui avait conçu cette merveille. Je suis sorti plus rapidement que d’autres arrivés plus tard. J’ai moins souffert que la plupart. Et ce n’est pas dû uniquement à ma persévérance. J’ai refusé l’anesthésie pendant l’opération, j’ai alors tout vu et tout entendu. Tu as fait de pédagogie et de bienveillance avec ton équipe. Mon hôpital devra se munir de types comme toi pour survivre. Ce sera la jungle dedans. Les services pleins à craquer, beaucoup de demandes, peu de repos...

Le médecin s’esclaffa en fumant sa pipe.

- Gamin, tu tétais encore le sein de ta mère, que ton grand-père, ton père et moi-même étions sur les champs de bataille. Ton hôpital, c’est du quatre étoiles par rapport à ce que j’ai déjà vécu.

- C’est tout ce que je voulais entendre, monsieur le directeur. Pour le recrutement, tu as carte blanche. Tu peux utiliser mon nom, mon rang, ce que tu veux, du moment que l’équipe est complète et compétente.

Les deux hommes se serrèrent la main, le regard conquérant, fort et fier. Ils restèrent un moment à contempler le travail des constructeurs. Pour l’heure, l’établissement n’existait que dans des parchemins. Fergus avait quelques petits mois pour rassembler son équipe.
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6 mois plus tard, printemps 1628, Arcadia.  


Une foule de personnes, des politiques, des journalistes, des curieux, des gradés de la marine de passage... Bref, un bordel sans nom. Face à cette foule, une estrade où se trouvaient Ethan et Fergus, derrière laquelle se trouvait une armée d’hommes et de femmes en blouse, derrière laquelle se trouvait le nouvel hôpital : Levi’s hospital. Il s’agissait d’une cathédrale, un lieu béni des dieux, dans lequel la science et la spiritualité sauveraient des vies. Cette cathédrale aura un objectif bien plus important à l’avenir. Un bâtiment aurait largement fait l’affaire, mais Levi désirait en faire un culte qui lui serait utile à l’avenir.  

Le jeune amiral détestait cette situation où il devait s’exprimer devant des journalistes, sous les regards curieux des grandes personnalités locales ou régionales. Néanmoins, après avoir scruté l’ensemble de son public, remettant certains visages au passage, il se décida à prendre la parole. Ce qui lui faisait autrefois défaut devait devenir sa force. Gérer des hommes devenait son quotidien, s’exprimer devant la foule, être sous le feu des projecteurs... l’époque où il se cachait derrière les jupons de son horrible mère était maintenant révolue.

- C’est un moment assez particulier pour moi. La réalisation d’un rêve qui aboutit enfin. Une inauguration est toujours particulière et je mesure aujourd'hui par l'importance de votre présence, par la qualité des intervenants qui m'ont précédé, par la force aussi de leur investissement collectif dans la réalisation de ce projet, la dimension très symbolique que revêt cet instant pour toutes celles et tous ceux qui sont à l'origine de ce projet. Et je suis particulièrement heureux d'être parmi vous qui avez beaucoup donné pour que cet hôpital devienne une réalité, heureux d’être aux côtés de mon ami Fergus, qui s’est démultiplié pour que cet hôpital puisse être fonctionnel, heureux d’avoir derrière moi une équipe exceptionnelle et hautement qualifiée, heureux de me retrouver face à vous tous...

Ethan n’avait absolument rien préparé. Écrire un texte l’angoissait et le rendait bien moins humain. Il puisa son inspiration, instantanément, d’une source inconnue. Des mots, des phrases, qui ne représentèrent pas forcément quelque chose. La présence de toutes ces personnes, par exemple, l’agaçait plus qu’autre chose. Remerciements aux divers acteurs, description de son sentiment de joie, de fierté, petit passage historique sur le lieu où l’établissement a été conçu... Tout y passa. Il se tourna ensuite vers son équipe, ses médecins, ses chercheurs, son armée.  

- Alors je voudrais profiter - je n'avais pas eu l'occasion de le faire parce que mes fonctions ne m'y autorisaient pas ou ne m’y prédestinaient pas - d'être ici dans un hôpital où il y a beaucoup de personnels soignants pour vous dire à toutes et tous l'immense gratitude, l’immense reconnaissance que j'éprouve pour le travail que vous avez accompli dans ces circonstances particulières où notre monde se trouve, aujourd’hui encore, et vous dire aussi qu’aucun mot n'est suffisamment fort pour exprimer l'étendue de cette reconnaissance et de cette gratitude.

S'en suivit une visite de l’hôpital, d’un énième discours dans lequel Levi affirma que l’édifice était extensible dans le but de toujours être à la pointe de la technologie. Ensuite, Ethan et Fergus furent traînés à une espèce d’apéro de hautes personnalités, chose plus que gênante pour les deux hommes qui se forcèrent à y boire un coup. À la première occasion, ils s’extirpèrent, simulant une urgence : les malades et blessés n’attendaient pas.  

Au sommet de la cathédrale, qui offrit aux deux compères une vue inégalée sur toute la cité, Levi s’alluma une mèche.  

- Tu mourras jeune, gamin, en fumant ces conneries.  

- Tu m’empêcheras de passer de l’autre côté, dit-il en contemplant l’horizon avec un air amusé. T’es prêt pour demain ?  

- Je l’ai toujours été, rétorqua le médecin avec indifférence. Tu pars demain ?  

- Avant le lever du soleil. La cheffe me convoque en urgence. Au moindre problème d’envergure, tu m’appelles sur ma ligne directe. Une garnison entière assure la sécurité de l’hôpital.  

Un petit verre pour célébrer l’ouverture de l’hôpital, de braves discussions sur l’avenir de ce monde, puis ils se séparèrent. Fergus, dans la cathédrale où il crécherait l’ensemble du temps, tandis qu’Ethan rejoignit le port avec une petite escorte. Il partait le cœur léger, sachant son bijou entre de bonnes mains. Il n’avait que rarement eu si bonne impression en observant un homme travailler. L’inquiétude ne se dissipa pas puisqu’elle n’avait jamais existé. Au départ de son cuirassé, il s’accouda au bastingage en sortant une nouvelle mèche. Jetant un dernier regard vers la cathédrale qui dépassait un peu les nombreux immeubles, il se ravisa et rangea son paquet.  





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