L'attaque de Pearl Harbor

Ca fait quelques jours déjà qu'on a quitté Tetsu Island. Un vent frais et puissant pousse la Lépreuse à vive allure en direction de Pearl Harbour. On suit le cap indiqué par l'Eternal Pose et le moral des hommes est bon. Quant à moi, si je suis ravie d'avoir retrouvé mes anciens camarades que sont Hefy, Wolfgang et Gaston, je broie du noir. Lola est partie, Red m'a largué, Izya m'a vaincue, et je me suis couverte de ridicule face à Kiyori. En gros j'enchaîne les déconvenues! De de fait, je ne sors que très rarement de mes appartements, hormis pour jouer avec mon fils. Sakazuki doit sentir que je ne suis pas au mieux de ma forme et me couvre de marques d'affections. Ca me touche et me chagrine à la fois. Quand est-ce que je suis devenue si pitoyable? Il faut que je me reprenne en main avant que l'équipage ne doute de moi.

Bien que j'aie retrouvé mes camarades de l'Académie, je regrette l'absence de Diego, mais bon, de ce que j'ai compris, l'homme-poisson bouge beaucoup. De plus, je ne vais pas l'embarquer dans des guerres qui ne sont plus les siennes. Quant à moi et ma bande, si on vogue vers cette forteresse, c'est qu'il y a encore des fidèles de Teach là-bas. Si Serena et Gin ont eu le bon sens de fuir avant la défaite de l'Empereur : leur opportunisme ne les sauvera pas. Je ne les traque pas uniquement par vengeance, je souhaite éviter à tout prix qu'un de ses anciens Lieutenants se revendique de l'héritage du Malvoulant et puis aussi, je caresse le fol espoir que si je ramène leur têtes à mon ex, il me laissera revenir dans sa vie. Feu l'ancien Empereur à commis l'erreur de laisser Red et ses alliés en vie, ça lui a couté son trône. Je ne laisserai pas l'homme que j'aime tomber de la même façon, même si lui ne m'aime plus. Je me dois donc d'éliminer méthodiquement toute menace. Et puis, surtout, j'ai besoin de réussir un truc pour regonfler mon égo.

Au bout d'une semaine, on arrive en vue de la cible. Immédiatement, j'ordonne qu'on ralentisse l'allure et qu'on vire à tribord. D'après les informations que j'ai, en naviguant en ligne droite depuis Treize, on arrive sur la baie qui abrite la cité fortifiée. Or, je n'ai pas très envie de me jeter mes hommes et mon navire fraîchement acquis et moi dans un piège évident. Heureusement, j'ai maintenant à ma disposition les conseils stratégiques brillants de ma princesse favorite. C'est ainsi que, conformément au plan établi, on contourne l'île pour aller accoster du coté boisé. Le temps est mauvais, il pleut à verse, ce n'est pas l'idéal pour l'utilisation de mes pouvoirs, mais ça nous permet d'approcher de Pearl Harbour en toute discrétion.

Me voilà donc à faire mouiller la Lépreuse coté jungle, sous les ordres d'Héfy et de Wolfgang, mes hommes démontent les canons et les débarquent sur la côte. La pluie et la densité végétale de la forêt tropicale n'aident pas à notre entreprise, Notre progression est lente et fastidieuse. Je sais que je pourrais accélérer la chose avec mon poison desséchant, mais le succès de la mission repose sur sa discrétion. On doit faire notre maximum pour conserver l'effet de surprise et porter un grand coup aux forces ennemies afin de me laisser les mains libres pour affronter Serena et Gin. Cependant l'averse contrarie nos plans. En effet, on ne pourra jamais brûler la poudre à canon dans ces conditions, or, sans la puissance de feu de nos pièces d'artillerie, impossible de percer les murs d'enceinte de la forteresse et mettre notre plan à exécution.

Nous voilà donc, planqués dans la jungle à attendre la fin du grain pour pouvoir enfin commencer l'assaut. De longues heures s'écoulent avant qu'une éclaircie n'arrive. L'après-midi touche à son terme et la luminosité est en train de baisser. De là où je suis, on distingue clairement les fortifications et les gardes qui patrouillent. Entre les murs et la jungle, une zone dégagée d'une centaine de mètres à été aménagée. Héfy avait raison, si on sort du bois la fleur au fusil, on va se faire tirer comme des lapins. Heureusement, mon amie a un plan de génie. Les canons sont installés dans les bois, à une dizaine de mètres de la lisière de la forêt, et sont prêts à faire feu. Jamais les gens qui ont conçu ces défenses ont imaginé qu'on attaquerait de ce coté avec l'artillerie. Certainement qu'ils se sont dit que ce serait impossible de transporter les derniers arguments du roi dans la jungle.

Mais impossible n'est pas Jeska!

L'avantage d'avoir eu à attendre la fin de l'averse, c'est que mes hommes ont pu se reposer. Ils sont certes trempés, mais les efforts fournis pour porter les canons et se frayer un passage dans la jungle se sont presque évaporés. On a réussi à garder la poudre au sec dans des barils, et Wolfgang est en train de mettre en place les pièces d'artillerie. Il les organise en petits groupe de trois qu'il oriente avec soin. Sur un navire, les mortiers sont montés sur roues, et soigneusement enchâssés dans un rail afin de canaliser et de contenir le recul de l'arme. Ici, ce n'est pas le cas. Il nous sera donc impossible de faire un second tir. C'est pour palier à ce problème qu'on a divisé notre puissance de feu en petit groupes. Si jamais on ne démolit pas le mur à la première salve, on pourra en enchaîner neuf autres. En espérant que la fortification cède avant qu'on ait épuisé nos possibilités de tir.

Je tourne la tête vers mon stratège et mon artilleur. Tout est prêt, je n'ai qu'à donner le signal. Je suis super stressée. C'est ma première fois en tant que chef des opérations et je crains de me louper. Avant, j'avais Red à mes côtés qui pouvait assurer si ça tournait mal. Encore avant, je me reposais sur Shoma. Et du temps où j'étais dans la Marine, j'avais toujours l'appui de mes supérieurs. En gros, j'ai toujours eu quelqu'un derrière moi pour me sauver les miches. Or, là, je suis seule et j'appréhende. Héfy le voit et me fait signe de respirer. Je lui répond d'un sourire forcé, mais je m'exécute. Etrangement, il m'a suffit d'un inspiration et d'une expiration pour retrouver ma sérénité. Je ne suis pas seule, mes amis sont avec moi et… je sais que je peux compter sur eu. Alors, silencieusement, je donne le départ de l'assaut.

Et très vite les détonations des canons déchirent le silence du crépuscule. La première volé de boulets égratigne le mur et alerte les soldats ennemis. Très vite, je vois ces derniers s'affairer comme des fourmis alors que la seconde et la troisième salve endommage les fortifications et font s'effondrer une partie du mirador. Deux séries de tirs de plus et la paroi vacille, mais tient bon! Nom d'une biscotte, ils les architectes de la base n'ont pas lésiné sur les moyens! L'effet de surprise est passé et je vois que l'opposition s'organise. Wolfgang abat quelques adversaires qui essaient de remobiliser leurs hommes, malheureusement, il ne le élimine pas assez vite et voilà les forces de Teach en train vider leurs munitions dans les bois. Heureusement, à cause de l'obscurité et du couvert que la jungle nous offre, les pertes de notre coté sont minimales. Héfy ordonne qu'on continue de faire parler la poudre et, finalement, après trois déflagrations, le fort cède et une brèche se dessine!

C'est une première victoire, mais on est encore loin d'avoir gagné! Cette fois, je passe à l'action. J'envoie des bulles de poison lacrymogène sur les miradors et les tours afin de couvrir notre avancée. Et d'un signe de main, je donne l'ordre d'attaquer! C'est alors que, dans un cri barbare, mes troupes sonnent l'assaut! Ces derniers se déversent dans la cité de Pearl Harbour comme un torrent qui vient de briser une digue. Fortes de leur nombre et de l'effet de surprise, mes troupes balaient tout sur leur passage. Mais, plus vite que je ne l'aurais cru, une résistance s'organise. Les locaux, armés de leur connaissance des lieux et d'une volonté farouche ripostent. Les affrontements sont d'une violence inouïe, le sang coule a flots sur les pavés, et on commence à essuyer de nombreuses pertes.

Mais, je ne me suis pas encore jetée dans la mêlée. Héfy, mon amie, sait que je brûle d'y aller. J'ai subi trop de dommages émotionnels ces derniers jours et j'ai furieusement envie d'un exutoire. Cependant, je me conforme au plan. Je ne peux y aller tout de suite. Après tout, je suis une pirate connue et reconnue maintenant. Si j'arrive dans la bataille trop tôt, nos ennemis auront le temps de s'équiper pour lutter contre moi, ou pire de fuir. Alors que là, je laisse mes larbins servir d'appât pour ferrer les deux gros poissons de l'île. Et, à ce moment là, ce sera à moi de jouer! Et même si la patience n'est pas mon truc, j'ai une confiance absolue dans les stratagèmes de mon amie. Si je veux la victoire, je dois ronger encore un peu mon frein et me conformer au plan établi.

Après quelques minutes qui me semblent être une éternité, j'ai le feu vert de la princesse pour y aller. Il faut dire que les adversaires, malgré les tirs précis de Wolfgang, sont en train de reprendre les miradors et on ne peut les laisser avoir une position aussi avantageuse. Ma maitrise du rokushiki me permet d'être sur les lieux quasiment instantanément. Merci Soru! Merci Geppou! Me voilà donc sur les remparts à nettoyer l'embryon de résistance adverse. Je passe en mode Kraken pour disposer de huit tentacules de poison vert en plus de mes bras pour m'aider dans cette tâche. L'opposition n'est pas au niveau, et je les balaie comme des feuilles mortes. C'est étrange, malgré le fracas de la bataille en bas, je devrais ouïr les râles d'agonie de mes victimes. Or, je ne les entends plus. Souffrirais-je d'une panne d'oreille? Non, je capte fort bien les sons des combats. Alors pourquoi? J'ai l'impression que je n'y fais plus attention. J'ai trop tué, trop fait souffrir, et tout ça ne m'atteint plus. Audition sélective? Sans doute. J'ai toujours envié l'indifférence avec laquelle Red arrivait à faire les pires massacres et, maintenant que j'y suis, je réalise que je devrais être horrifiée de ce que je suis devenue. L'enfant que j'étais aurait honte de l'adulte que je suis, et pourtant… et pourtant… je fais des veuves et des orphelins comme un charpentier plante des clous. Je me demande si ce détachement n'est pas un mécanisme de défense de mon esprit afin que je ne devienne pas complètement cinglée. Une façon de protéger le peu d'estime que j'ai encore de moi-même.

Le plus triste dans l'histoire c'est que l'adversité est tellement peu stimulante que j'ai le loisir de laisser divaguer mon esprit à de telles réflexions existentielles. Quand soudain… des coups de canons se font entendre. Le crissement de la pierre, l'odeur d'ichor, de souffre et de chair brûlée, oui, indubitablement, il s'agit de pièces d'artillerie! Quel malade a été assez fou pour en installer à l'intérieur d'un fort! Certainement un esprit paranoïaque et dérangé qui craignait une rébellion. Mais force est de constater que ce dispositif leur sauve la mise. L'avancée de mes hommes est stoppée net.

"Mettez-vous à couvert, je m'en occupe!" tonné-je par dessus les cris des combats.

Mes hommes comprennent que ça va barder. Et je n'attends pas les retardataires. Je déploie avec force mon haki royal, assommant net les artilleurs ennemis. Sans personne pour les manier, les canons resteront muets. Mais, afin d'assurer le coup, je couvre mon poing de haki de l'armement et je fonce vers l'enceinte intérieure. Je frappe la paroi de pierre et je laisse mon haki s'infuser dans le mur, le fragiliser de l'intérieur, et puis ce dernier vole en éclats! La déflagration et les dégâts sont encore plus impressionnants que celle des boulets de canon. Et quand la poussière retombe, il n'y a que des gens inconscients. Vraiment?

Non.

Au milieu des décombres se dessine une silhouette familière. De taille moyenne, fine et élancée, sa chevelure rousse ondule face au vent comme des flammes. Enchâssée dans un juste-au-corps en cuir qui met sa féminité délicieusement en valeur, Serena "la veuve noire" Ajeel. Elle réajuste son tricorne et dégaine son arme.

"Toi et moi, on a des comptes à régler." me siffle-t-elle avant de passer à l'attaque.

Les coups de cette diablesse sont rudement précis. il faut toute ma maitrise du rokushiki et ma sphère sensorielle pour m'en sortir indemne. Je sais, pour l'avoir affrontée sur Treize, que sa maîtrise du haki de l'observation est presque optimale. Sa capacité à anticiper mes esquives et mes contres est surréaliste. De plus, contrairement à la bataille contre le Malvoulant où je l'avais affrontée dans un lieu clos, cette fois, je n'ai pas l'opportunité de la gazer. Enfin, ça, c'est ce qu'elle doit penser, car moi, grâce à mon Ghastly Wind, le nuage de poison paralysant que je viens d'exhaler la suit comme son ombre. Et très vite, c'est moi qui prend l'ascendant. Entre mes deux bras, mes huit tentacules et mon nuage, elle a toute les peines à suivre. Car dorénavant, ce n'est plus tant une question de prédire mes attaques que d'avoir le capacités physiques pour toutes les éviter. Tant est si bien qu'au bout d'une vingtaine de minutes de combat acharné, j'atteins enfin mon objectif : l'envelopper dans mes vapeur débilitantes.

Aurais crié victoire top tôt? La façon dont est sort de ma brume c'est comme si elle n'a pas été affectée par ma toxine. Prise par surprise, sa lame couverte de haki me creuse une jolie estafilade sur la joue gauche. Heureusement que j'ai de bons réflexes! Elle fait pleuvoir les coups afin de ne pas me laisser le temps de me ressaisir. C'est rudement intelligent. Autant que d'avoir un masque à gaz qui lui protège le visage! Cependant…

"Tu crois être la seule à avoir gardé un atout dans sa manche?"  

Je vois dans son regard l'éclair de rage et de compréhension. Elle a vu sa défaite, et pire encore, elle est dans l'incapacité de s'y soustraire. Grâce à mon haki de l'armement qui surclasse le sien, je bloque sa lame dans ma main gauche tandis que la droite vient lui attraper le visage, la soulève et la plaque violemment sur les pavé de la cour intérieure. En plus pour assurer le coup, j'envoie une onde de fluide offensif directement dans la caboche, histoire de lui montrer qui est la patronne. Le choc est si terrible que le sol se fissure et se creuse. Sonnée, mais pas inconsciente, la lieutenant de feu Teach lâche son arme que j'écarte par précaution d'un coup de pied.

"P... pitié…" murmure-t-elle à bout de forces. "Epargne-moi et … je te servirai fidèlement, tu n'auras pas à le regretter..."

Je regarde cette femme à la réputation si horrible. Je sais qu'elle vient de South Blue tout comme moi. Je sais par quels méfaits elle a obtenu sa prime. Et surtout, je ne suis pas sans ignorer le nombre de malheureux qui se sont retrouvés dans la même position qu'elle à présent et qu'elle n'a pas hésité à torturer jusqu'à ce que mort s'ensuive. Alors non, Serena, je n'aurais aucune pitié pour toi.

"Evidemment que tu vas me servir!" dis-je d'un voix plus grave que d'habitude. "Tu es mon marchepied pour les hautes sphères de la piraterie!"

Du poison rouge sort de ma paume et lui englobe le visage alors que je la laisse choir au sol. La toxine dissolvante lui consume les chairs dans une douleur qui doit être abominable. Mais pire encore, la substance l'empêche de respirer. Je la vois se contorsionner comme une damnée, ses cris étouffés par mon pouvoir. Elle essaie d'enlever cette substance qui la tue à petit feu, mais grâce à mon nepharious requiem, j'ai le contrôle absolu de mes poisons liquides, et je ne la laisse pas se soustraire à mon emprise. Finalement, elle ne lutte plus et s'abandonne au sol. Elle convulse pathétiquement encore quelques instant avant de s'immobiliser, définitivement cette fois.

La victoire est à nous! Je lève mon poing droit au ciel et la clameur de mon équipage me gonfle la poitrine. J'ai fait, non… on a fait tomber Pearl Harbour! J'ordonne à Wolgang de hisser le drapeau de Red et le mien sur le grand mât, en lieu et place de celui de Teach. Je me prépare donc à savourer une victoire bien méritée.