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Presque trop facile…

Le sablonneux avait passé une bonne semaine à épier les faits et gestes de plusieurs Chimamire Kitsune présumés. Distribuant des mandales à droite et à gauche, toujours sous couvert d’anonymat, il avait même obtenus quelques informations croustillantes sur des livraisons de contrebande. Malheureusement, il avait prit la décision de renvoyer son équipage vers l’archipel de Shabondy afin d’œuvrer en solitaire et ainsi conserver son identité secrète. En prenant le contrôle du Kin’Koi et du Feelin Good, il avait mit un pied dans le commerce de l’île mais ce qui lui manquait cruellement, c’était la main d’œuvre. On ne combat pas une pègre solidement implantée comme celle de Bradley avec pour seul allié une poignée de Berrys. Ce qu’il lui fallait à présent, c’était des alliés. Beaucoup d’alliés. Et c’est là que Vasco Stracci pouvait entrer en scène.

Le capitaine corsaire, encapuchonné et masqué, ne cessait de fixer la grande horloge murale du bar à proximité, faisant les cent pas dans la pénombre, il attendait un navire avec une cargaison bien particulière. Car si l’employeur de Stracci lui avait ordonné de rentrer sur Doscar et de cesser toute entreprise hostile aux Chimamire Kitsune, le jeune homme avait tout de même envoyé quelques uns de ses hommes en renfort. Ce qui le motivait ? La part de Berrys promise par Azerios une fois Kikai No Shima définitivement débarrassée de la pègre de Bradley. Un navire marchand finit par arriver à quai, portant le sobriquet L’Epervier, il s’agissait bel et bien le bâtiment que le jeune pirate attendait. Une multitude de passagers commença à descendre à quai, certains commençaient même à décharger nombre de caisses de bois de toutes tailles. Un homme finit par attirer l’attention du sablonneux. Tiré à quatre épingles, costume impeccable, accompagné d’une belle tripoté de gentlemen. Pas de doute possible, les Doscarien étaient là. Le groupe se rendit rapidement au point de rendez-vous, un petit bar discret, non loin du Kin’Koi et lorsqu’Azerios entra, tout le monde était déjà installé. Il ferma le store de la porte d’entrée et s’avança lentement vers la grande table autour de laquelle les Doscarien avaient prit place. Le barman s’empressa de déposer deux bouteilles de whisky et une vingtaine de verres avant de quitter la pièce à son tour. Le silence s’installa et celui que l’on surnommait « le Veilleur » s’assit.


Aldo Clemente je présume ?

Lui même. Alors c’qu’on m’a dit au sujet du masque c’était pas une blague… lança le chef présumé de cette joyeuse bande avec un sourire.

J’irai droit au but. Plusieurs livraisons de grandes valeurs sont supposées quitter Kikai No Shima à la fin de la semaine. Je sais que la marine a été arrosée et n’interviendra pas.

Et tu veux qu’on pique tout ça sous le nez des Chimamire Kitsune. coupa Aldo en se servant un verre de whisky.

J’ai des projets.. et pour les concrétiser j’ai besoin de bras. C’est là que vous entrez en jeu Clemente.

Oh moi tant qu’j’ai ma part, j’ai déjà dit que j’étais partant. Et cette part d’ailleurs.. dis m’en plus.

Le partage est équitable, un beau soixante-dix / trente, en votre faveur.

C’est honnête. Non c’est carrément généreux putain. Qu’est ce que tu sais sur ces cargaisons que j’ignore ?

Seulement leurs emplacements. Pour le reste, je suis de ceux qui estiment que tout travail mérite salaire.


Les hommes d’Aldo Clemente échangèrent des regards et commencèrent à s’envoyer des coups dans le gosier. Pas de temps à perdre en discussions inutiles et autres négociations. Le sablonneux n’était pas idiot au point de penser pouvoir s’occuper de Bradley et sa clique en solo. Face à une organisation de cette envergure il fallait y mettre les moyens. Et ce, même si la marine commençait à mettre sérieusement son nez dans ces affaires. Non cette fois-ci, le jeune capitaine corsaire n’avait aucune intention d’être au premier plan, bien au contraire. Affaiblir l’organisation au maximum et laisser la justice triompher, voilà l’objectif principal qu’il s’était fixé.


J’ai quand même du mal à croire qu’une proposition aussi alléchante puisse me tomber dans les mains toute cuite comme ça…

Tout ce que tu as besoin de croire, c’est que je suis quelqu’un de pragmatique. Il y a un paquet d’oseille à se faire là dehors.. si toi et tes hommes êtes capable de suivre mes directives.

J’fais pas ça uniquement pour le blé tu sais ? Mais faut que j’y trouve mon compte. Puis Vasco a demandé si gentiment…

J’imagine. L’affaire est entendue ?

L’affaire est entendue. On va préparer tout ça.


Les deux hommes conclurent leur accord par une ferme poignée de main et le sablonneux laissa les Doscariens à une beuverie bien méritée après le long voyage qu’ils venaient d’entreprendre. Il se rendit aussitôt au Kin’Koi, son nouveau quartier général et s’installa dans le bureau de Gram pour l’y attendre. L’homme ne tarda pas à le rejoindre.


Votre virée a porté ses fruits ? demanda le tenancier d’un air détaché en allumant sa cigarette.

Assez oui, les choses se mettent en place doucement. Tu as pu parler à Henry ?

Il confirme. Mais faudra être rapide, depuis l’arrivée des renforts de la Marine, les Chimamire Kitsune sont vraiment sur les dents…

On fera au mieux.


Henry était une petite frappe que le sablonneux avait malmené à son arrivée sur Kikai No Shima, un homme insignifiant mais qui avait l’oreille partout. C’est lui qui avait rencardé le corsaire au sujet des différentes cargaison et il espérait pouvoir compter sur ses informations. Il se leva calmement, hocha la tête lorsqu’il passa devant Gram et sorti du bureau en silence. Les choses allaient bouger, le jeune capitaine des Sandstorm Pirates devait garder l’initiative et il savait qu’il n’y aurait qu’une seule chose à faire pour ça : battre le fer tant qu’il était encore chaud.
    Dix heures du soir, les rues de Kikai No Shima restaient bien animées et pourtant, c’était le moment idéal pour frapper. Saper les efforts d’une organisation criminelle en toute discrétion sur une île contrôlée par la Marine n’était pas des plus simples. Il fallait être d’autant plus vigilant, car se faire prendre par les autorités serait catastrophique. Le jeune homme pourrait, dans ce cas de figure, faire une croix sur ses projets et serait peut être même amené à compromettre son statut de corsaire, d’où l’importance d’agir prudemment. L’objectif du soir était clair, organisés en trois équipes, Azerios et sa bande prendraient d’assaut trois points stratégiques tenus par les Chimamire Kitsune et s’empareraient de précieuses cargaisons. Aux dires d’Henry, il s’agirait principalement d’armes et de drogue, de quoi faire d’une pierre deux coups en se remplissant les poches tout en contrariant King Bradley. Durant les deux derniers jours, le plan avait été répété bon nombre de fois et tout le monde savait ce qu’il avait à faire. Le sablonneux s’empressa de rejoindre son groupe, cinq Doscarien à l’aspect patibulaire qui l’attendaient non loin de son objectif.


    Messieurs. Ne perdons pas de temps.


    Manteaux longs sur les épaules, idéals pour planquer fusils mitrailleurs et autres joyeusetés, les gaillards se mirent en route. Ils ne tardèrent pas à arriver aux abords de leur cible, un petit entrepôt non loin des docks. D’après le rapport qu’Henry avait tenu, la cargaison était à l’intérieur sous bonne garde et deux patrouilles de deux hommes se relayaient toutes les quatre heures. Le sablonneux ordonna une halte afin de pouvoir s’occuper de ladite patrouille en toute discrétion avant l’assaut. Dans ce contexte, l’effet de surprise était primordial, il se faufila parmi les caisses entreposées le long du quai, profitant de l’obscurité jusqu’à repérer l’entrepôt décrit par Henry. Et sans surprise, la patrouille rodait non loin, comme prévu, deux gaillards imposants faisaient leur ronde. Presque trop facile… Le corsaire masqué s’approcha lentement dans la pénombre jusqu’à se retrouver dans leur dos. Et sans qu’ils n’aient le temps de comprendre ce qui était en train de se passer, il saisit une dague pour sceller leur sort. Se plaçant dans le dos du premier, il plaqua sa main gauche sur sa bouche pendant qu’il lui tranchait la gorge avec l’autre main et avant même que son compère n’ait le temps de moufter, il projeta la dague tout droit dans son thorax. Rapide coup d’œil pour s’assurer qu’aucun autre adversaire ne se trouve dans les parages, il sifflota brièvement, ses hommes accourent et le groupe se dirigea vers la porte principale de l’entrepôt.


    N’oubliez pas, une fois à l’intérieur, s’ils tentent quoique ce soit.. ne faites pas de quartier.


    Ouvrant délicatement la porte, le corsaire entra, suivi de près par ses hommes de main. Le groupuscule progressa en silence dans un entrepôt sombre et anormalement calme. Ils arrivèrent devant une nouvelle porte métallique derrière laquelle des voix étaient perceptibles. Entrouvrant légèrement cette nouvelle porte, le sablonneux jeta un coup d’œil par l’ouverture. À quelques mètres, plusieurs hommes étaient rassemblés autour d’une table et jouaient aux cartes. Se tournant vers ses hommes, il décompta avec des doigts pendant que ces derniers préparèrent leurs armes et une fois le dernier doigt baissé, il tira la porte vers lui et se rua en direction de la table, deux revolvers dégainés.


    Bougez pas !

    En un rien de temps, les types se retrouvèrent braqués et si les plus téméraires eurent le temps de saisir leurs propres armes, ils abandonnèrent bien vite l’idée de s’en servir.

    Lâchez ça ! Et j’veux voir vos mains ! Debout et contre le mur la bas ! Exécution !


    Tous se levèrent, les mains en l’air et ils se regroupèrent dans un coin, tenus en joue par deux des Doscariens. Les autres aidèrent le sablonneux à ouvrir l’une des caisses non loin. Ce dernier ne put s’empêcher de sourire sous son sinistre masque, Henry n’avait pas menti. Dans la première caisse, plusieurs fusils mitrailleurs ainsi que des munitions. Il s’agissait bel et bien d’une cargaison d’armes et les choses se présentaient plutôt bien.. presque trop bien.


    Vous savez pas ce que vous êtes en train de faire les gars… lança l’un des prisonniers.

    La ferme. Messieurs, attachez et bâillonnez moi ces connards. On a du boulot.


    Une fois les petites frappes Chimamire Kitsune neutralisés et enfermés dans ce qui semblait être d’anciens sanitaires, les Doscariens s’empressèrent de transporter les caisses une à une vers l’Asie sortie de l’entrepôt. Dehors, d’autres gaillards s’affairaient à charger le tout sur plusieurs chaloupes. Il fallait faire vite avant que les occupants de l’objectif suivant ne puissent avoir vent de quoique ce soit. Le capitaine corsaire regarda la précieuse cargaison disparaître dans l’obscurité, jusqu’ici la chance semblait lui sourire.. mais une étrange impression demeurait, comme si tout ceci était bien trop facile…
      Les premiers coups devaient sans doute tous être terminés, Azerios jeta un coup d’œil à sa petite montre à gousset avant de rejoindre son commando Doscarien. Jusqu’ici, les gus avaient remplis leur rôle à la perfection et le groupe prit la direction de la cible suivante. Quelque soit l’issue de cette nuit, les Chimamire Kitsune réclameraient sans doute vengeance. Le cambriolage suivant était prévu dans une ancienne librairie. Le bâtiment était présumé abandonné depuis plus de six ans et se trouvait dans un quartier résidentiel calme. L’endroit idéal pour entreposer une grosse cargaison de drogue en attendant son transit. Là encore, le bâtiment ne payait pas de mine et ne semblait pas plus gardé que ça. À croire que malgré le contexte, Bradley et ses hommes continuaient de se penser intouchable.

      Cachés à l’écart avec son groupe, le sablonneux observait la librairie. Fenêtres bardées de planches, l’endroit avait effectivement l’air abandonné. Mais un homme finit par en sortir, clope au bec, un fusil entre les mains. Impossible de l’approcher sans être repéré, il envisagea un assaut frontal, seulement le moindre bruit pourrait avertir ses complices à l’intérieur. Le capitaine des Sandstorm Pirates patienta quelques instants jusqu’à ce que l’homme souffle sa dernière bouffée. Mais au lieu de retourner à l’intérieur, l’homme resta planté devant la porte, scrutant les environs avec attention. Impossible d’utiliser ses pouvoirs de maudit, il fallait trouver une autre solution. Azerios décida donc de tenter d’entrer dans le bâtiment par un autre moyen. Il ordonna à son équipe de patienter ici et entra dans le bâtiment derrière lequel ils étaient cachés. Avalant les marches quatre à quatre, il parvint à rejoindre le toit, position qui lui offrit une vue imprenable sur la rue et sur l’entrée de la librairie. Impossible cependant de passer d’un toit à un autre, la distance était trop grande. Le corsaire pesta en fixant l’homme qui gardait l’entrée. Il dû se résoudre à utiliser ses pouvoirs de maudit. Heureusement pour lui, là où il se trouvait, personne ne pourrait être témoin de ce qu’il s’apprêtait à faire. Il jeta tout de même un coup d’œil autour de lui pour s’assurer que personne ne puisse voir quoique ce soit et il pointa son indexe droit en direction du garde. La distance n’était pas négligeable mais il n’avait pas le choix, utiliser une arme ferait sans doute trop de bruit. Songeant aux entraînements avec Djaymily, il visa son adversaire et retint son souffle avant de tirer une première balle de sable qui passa à quelques centimètres de sa cible, l’alertant au passage. L’homme se tourna en direction de la librairie, remonta les marches, mais avant même qu’il n’ait le temps de dire ou de faire quoique ce soit, la seconde balle de sable durcit le frappa à l’arrière du crâne et il s’écroula, dévalant les escaliers pour s’étendre sur les pavés. Redescendant rapidement dans la rue, le sablonneux fit signe à ses hommes de le suivre et très vite il cacha le corps encore chaud dans les haies qui bordaient le bâtiment.


      Allé on se concentre les gars… En avant. chuchota l’homme au masque avant de pousser délicatement la porte de la libraire.


      Là encore, Azerios entra en premier, revolvers en main, suivi par ses sbires. Tous traversèrent le magasin désert pour atteindre l’arrière boutique. Il s’approcha de la porte mais cette fois-ci, aucun bruit ne semblait provenir de derrière. Tournant la poignée, il entrouvrit cette dernière et ne parvint pas à distinguer quoique ce soit. Un courant d’air frais s’échappa de la pièce accompagné d’une odeur singulière et d’un geste rapide, il poussa la porte pour se ruer dans la pièce suivante. À sa grande surprise, il n’y avait rien. Une grande pièce totalement vide et la grille qui menait à la ruelle de derrière était grande ouverte. Un homme s’approcha alors d’un pas lent et toutes les armes se braquèrent sur lui.


      Pas un pas de plus.. fais voir tes mains et vite ! lança Azerios d’un ton menaçant.


      L’homme se figea, et après quelques secondes d’inertie, il leva les mains. Mais alors que la situation semblait parfaitement sous contrôle, des éclairs jaillirent de ses mains pour frapper les Doscariens de plein fouet. L’attaque fut si soudaine mais surtout si rapide que tous furent foudroyés sur le coup. Voyant ses compagnons s’écrouler autour de lui, le sablonneux eut le réflexe de revêtir son armure de fluide offensif.. quelques secondes à peine avant d’encaisser un assaut à son tour. L’éclair le projeta en arrière et il s’écrasa violemment contre le mur. Engourdi malgré sa protection, il resta assit au sol à fixer son assaillant, à travers son masque. Ce dernier s’approcha de lui et s’accroupît en le toisant d’un air satisfait.


      Alors c’était vrai. J’sais pas qui vous envoi, mais.. c’est vraiment un sale timing.


      Avaient ils été trahis par Henry ? Était-ce un piège ? Non, l’homme avait mit le doigt sur la vérité. Une simple question de timing. La cargaison qui se trouvait dans cette arrière boutique avait sans doute été déplacée par ce type. Le sablonneux fut tiré de ses pensées par une vive douleur qui le saisit au bas ventre. L’homme avait dégainé une lame courte et l’avait transpercé. Impossible d’utiliser le fluide offensif, il se retrouvait comme paralysé par l’éclair qu’il avait encaissé tantôt. Se relevant lentement, il tourna les talons pour sortir dans la ruelle derrière la librairie. Mais avant de disparaître, il se tourna une dernière fois et craqua une allumette.


      Qui que vous soyez… King Bradley vous salue.


      Et il lança l’allumette avant de fermer l’imposante grille de l’arrière boutique. Lorsque son projectile toucha le sol, il s’embrasa rapidement. Le parfum singulier senti plus tôt était en réalité l’odeur d’un produit inflammable. Et très vite la librairie s’embrasa. Le sablonneux, meurtri, abasourdi devant cet échec, le corps toujours engourdit par l’attaque foudroyante, rassembla ses forces pour se relever. Péniblement, il parvint à se redresser et se dirigea vers la porte menant à l’intérieur du magasin, laissant derrière lui ses camarades tombés…
        Pendant quelques instants, il tenta de reprendre ses esprits. L’assaut foudroyant l’avait complètement sonné. Mais pas de temps à perdre, les flammes gagnaient rapidement du terrain et l’endroit commençait à devenir irrespirable. Il traîna malgré tout son corps jusqu’à l’entrée et posa se hâta de poser la main sur la poignée de porte qui le délivrerait de cet enfer, mais se stoppa net. Plusieurs voix émanaient de l’autre côté, il se concentra pour tâcher d’entendre de quoi il retournait.


        Soldats ! Établissez un périmètre de sécurité ! Il faut maîtriser cet incendie. hurla une voix féminine.


        La Marine ? Déjà ? Plus de doute possible, le corsaire et ses hommes étaient bel et bien attendus. Et ils s’étaient précipités dans le piège. Impossible pour le jeune homme de sortir par la porte d’entrée. La ruelle derrière ? Probablement que la marine avait déjà encerclé le bâtiment. Une seule option s’offrait à lui : le toit. Il se rua vers l’escalier et monta, marche après marche, appuyant sur la plaie béante laissée à son bas ventre. Une ascension interminable plus tard, il parvint enfin sur le toit. La porte, sans surprise verrouillée, fut immédiatement enfoncée et il retrouva l’air libre. Les flammes gagnaient rapidement du terrain, une épaisse fumée noire se dégageait de toutes les ouvertures. C’était sa chance. Jetant un rapide coup d’œil dans la rue en bas, il aperçu un beau paquet de soldats qui s’affairaient à acheminer de l’eau pour tenter de stopper les conflagrations. Il reconnu alors l’officier qui semblait donner des ordres puisqu’il s’agissait du Lieutenant Colonel Earlgrey, la femme qui l’avait escorté vers Marineford quelques semaines plus tôt. Raison de plus pour ne pas traîner dans le coin, il se rendit de l’autre côté et jaugea la distance qu’il y avait entre la librairie et les différents bâtiments adjacents. Repérant un toit bien plus haut, il n’eut là encore d’autre choix que d’utiliser ses pouvoirs de maudit. Mais avant ça, il évalua la situation. Aubaine pour lui, sa fuite serait sans aucun doute couverte par l’épais nuage de fumée noire qui masquait le ciel tout autour du bâtiment. Se changeant en un nuage de sable extrêmement volatil, il se laissa porter dans l’épaisse brume incendiaire et quitta le toit de la librairie sans délais.

        Redescendant lentement du bâtiment qu’il avait gagné, il parvint à rejoindre la rue et observa prudemment les environs. Pas de soldat, pas de curieux, la librairie se trouvait à un pâté de maison. Impossible que quiconque ait pu discerner quoique ce soit, la fumée, très dense, montait haut dans le ciel et laissait deviner que la Marine était en passe d’échouer à stopper l’incendie. Le sablonneux se hâta de regagner le Kin’Koi, comprimant péniblement sa blessure. Entrant par la porte de service, à l’abris de tous mes regard, il se faufila jusqu’au bureau de Gram et s’empressa d’ouvrir la porte.


        Déjà de ret.. putain mais qu’est ce s’est passé ?? lança l’homme en se levant précipitamment.

        On était attendu. Me faut un toubib…


        Gram sortit du bureau avec précipitation et revint quelques minutes plus tard avec un homme d’âge mûr équipé d’une trousse en cuir marron. Ce dernier le fit asseoir et dégagea la plaie pour l’examiner. Poussant un soupir d’exaspération, il ouvrit sa trousse et en sortit un flacon, des compresse et quelques outils chirurgicaux. L’homme, qui avait manifestement l’habitude des soins dispensés à la va vite, désinfecta la plaie avec de la recoudre. Et en une quinzaine de minutes, le saignement fut stoppé et la blessure traitée.


        Merci.

        Pas trop d’effort pendant quelques jours et vous oublierez vite cette blessure.

        L’homme hocha la tête en terminant de nettoyer ses outils, puis il rangea le tout soigneusement avant de quitter la pièce sans rien ajouter.

        Tu peux avoir confiance, il a l’habitude de recoudre les malfrats du coin.

        Ou est ce que t’as déniché un médecin aussi rapidement.. ?

        Quand on tient un établissement de jeu sur Kikai No Shima.. faut être préparé à toute situation. Mais que s’est il passé ? Les infos d’Henry n’étaient pas fiables ?

        Elles l’étaient. Mais comme je disais on était attendu.


        Qui avait bien pu les vendre ? Peut être qu’ils s’étaient tout simplement montrés trop gourmands, trop ambitieux mais surtout trop surs d’eux. Gram lui servit un grand verre de whisky qu’il vida aussi sec avant de se relever.


        Heu.. ou tu vas ? T’en as pas eu assez pour ce soir ?

        Je dois savoir comment ça s’est passé pour les autres… Merci pour ton aide Gram.


        Le sablonneux, toujours masqué, sortit du bureau et quitta le Kin’Koi. Sa blessure lui faisait un mal de chien et il n’était toujours pas remit de l’assaut foudroyant que l’inconnu lui avait asséné. Mais il lui restait une chose à faire, retrouver Aldo Clemente au point de rendez-vous. En espérant que ce dernier n’ait pas été éliminé par les Chimamire Kitsune.
          L’homme au masque arriva dans le petit bar miteux non loin des docks depuis lequel il avait planifié les différentes actions de la soirée. Il entra malgré l’écriteau « fermé » et se retrouva dans la salle commune seul avec le barman, un certain Victor. Ce dernier hocha la tête pour le saluer tout en continuant de nettoyer les chopes. Était-ce l’informateur de Bradley ? Peu probable, à chaque réunion, le sablonneux s’était assuré qu’il ne soit plus dans les parages. De plus, comme tout bon paranoïaque qui se respecte, Aldo avait fait vérifié qu’aucun denden espion ne soit dissimulé à chacune de leurs entrevues. Et quand on parle du loup, voilà justement que le Doscarien poussa la porte du bar. Accompagné d’un seul de ses gaillards, il avait lui aussi l’air d’être tombé sur un os.


          Dehors. lança-t-il à Victor.


          Le barman fixa alors l’homme au masque qui acquiesça comme pour lui faire comprendre que ça irait et il quitta le bar en silence, laissant les trois hommes seuls. Et cette fois pas de fouille, pas de vérification en quête de mouchard, pas de palabres inutiles ni de politesse.


          C’est quoi ce bordel ? Des types nous attendaient. Je sais même pas comment on s’en est sorti putain. J’ai perdu pas mal de mes hommes.. j’ai aucune nouvelle de l’équipe C… Alors je te le demande.. c’est quoi ce bordel ?

          Nous avons récupéré notre première cargaison avec succès.. puis nous sommes tombés dans un traquenard nous aussi. Je ne sais pas si les Chimamire savaient.. non ils étaient en train de déplacer leurs marchandises. Sûrement par précaution.

          Ou sont mes hommes ?

          Ils sont tous morts.


          Aldo Clemente poussa un profond soupir, on pouvait presque voir la rage émaner de lui. Un nouvel arrivant interrompit cette petite discussion, l’homme de main du Doscarien fit volte-face avec son revolver. Mais il s’agissait de l’un des leurs, un certain Marcelo, qui avait prit en charge le déplacement des caisses d’armes lors du premier braquage d’Azerios.


          Hé doucement la… On a mit les flingues en lieu sur. Mais personne ne nous a rejoint comme convenu.. il s’passe quoi ? s’interrogea Marcelo.

          L’opération de ce soir est un fiasco. On va devoir changer notre stratégie.

          Y’a pas de « on » camarade. Je me casse d’ici. Et je prends tous les flingues. trancha Aldo agacé.


          L’homme tourna les talons et sortit du bar sans rien ajouter, en compagnie de ses hommes. Retour à la case départ pour le sablonneux qui venait de perdre un temps précieux, en plus de voir une belle cargaison d’arme s’envoler avec les quelques hommes de main qui lui restaient. Il s’assit au bar, dépité, se demandant si l’échec de ce soir était bien l’œuvre du hasard. Qui aurait bien pu les vendre ? La seule personne externe qui aurait pu savoir pour les actions de cette soirée était Henry. Une petite discussion avec l’escroc s’imposait donc. Mais pas ce soir. Le sablonneux attrapa la bouteille qui traînait sur le comptoir, la déboucha et bu plusieurs gorgées en relevant légèrement son masque. Que dirait Djaymily si elle le voyait la, abattu, puant la défait à plein nez… Alors que ses premières actions avaient été de parfaits succès, voilà que le jeune corsaire se heurtait à ses premiers obstacles. Il se remémora alors les paroles de Vasco, qui n’avait cessé de lui répéter que peu importe le nombre de batailles perdues, le plus important restait de remporter la guerre. Il réajusta son masque et se leva, puis quitta le bar à son tour, disparaissant dans l’obscurité, résolu à poursuivre.