Alaburna n’a jamais été aussi animé que ce matin, l’annonce du départ de Sainte Adela avait amené une vague de soulagement dans une grande partie de la population. Cette dernière étant tellement instable qu’elle aurait pu se pointer aux portes de la capitale et faire un boxon monstre avant de reprendre sa route vers le one piece. Mais visiblement, la dragonne céleste n’était pas d’humeur à rester profiter du soleil d’Alabasta et avait préféré continuer sa route. Ce n’était pas plus mal aux yeux de l’agent Fawkes, elle n’aurait pas aimé devoir assurer davantage la sécurité de cette dernière. Au moins maintenant elle pouvait vaquer à ses occupations. 

Le soleil de plomb était toujours de la partie, tandis qu’Isis déambulait dans les rues de la ville profitant de l’occasion pour replonger dans une certaine nostalgie. Elle ne s’était jamais sentie à sa place entièrement dans le temple de Karakuri, le sable projeté par le vent de son île natale lui avait manqué et c’était avec plaisir qu’elle arpentait les rues de la capitale d’Alabasta. Son objectif pendant son temps de repos était de renouer avec ses racines, et elle comptait bien faire cela avec panache. Elle se dirigea vers le magasin de son père qui était resté comme dans ses souvenirs.

C’était une échoppe aux couleurs safran et bordeaux qui vendait essentiellement des bières Kephrenatis ainsi que diverses pâtisseries aux goûts d’amandes et de miel. Voir tout cela la fit repartir en nostalgie, d’autant que lorsqu’elle s’approcha de la vitrine, elle se fit alpaguer par une vendeuse des plus sympathiques.

Myriam - “Ah ton père m’avait bien dit que tu repassais en ville, ça m’aurait fendu le coeur que tu passes pas voir tata Myriam !”

L’agent Fawkes se retourna dans la direction de la voix te vit une personne d’une cinquantaine d'années, un peu rondouillarde mais à l’aura calme et apaisante. Cette personne, c’était un peu sa madeleine de proust ici. Myriam travaillait pour son père depuis près de trente ans, elle était d’une gentillesse inégalée et avait toujours eu une grande affection pour Isis. Cette dernière se rappelait bien du nombre de fois où elle avait échappé à la surveillance de son père pour venir se glisser derrière le comptoir et rafler quelques biscuits au miel. 

La vendeuse avait toujours agi comme si elle n’avait rien vu, et parfois même elle avertissait la jeune fille si son père était dans l’échoppe pour la faire fuir discrètement. C’était également une grande amie à sa mère, et ce fût sans doute la seule à prendre sa défense quand Sabek voulait envoyer sa fille à l’étranger. Nulle doute qu’à ses yeux, c’était la personne la plus adorable de tout Alubarna. Décrochant un sourire des plus francs et sincère, la jeune femme retomba en enfance et se précipita vers Myriam pour la prendre dans ses bras.

Isis - “Il était hors de question que je passe ici sans venir boire le thé avec toi. Tu m’as tellement manquée.”

Les deux complices s’installèrent sur une petite table  derrière le comptoir et prirent le thé en se racontant des mondanités et des racontars sur ce qui s’était passé durant son enfance. Tant de choses avaient changé, ses amis s’étaient dispersés, peu de gens étaient encore présents à Alabasta. Cela attristait la jeune voir de voir le monde continuer de tourner sans elle mais ainsi allait la vie. 

L’agent Fawkes éluda bien entendu la partie où elle s’était alliée au gouvernement mondial dans le cipher pol. Elle mentionna juste qu’elle avait des arrangements avec le gouvernement mondial pour soigner certains de leurs agents en mission du fait de son titre de médecin. Il valait mieux en dire le moins possible sur tout cela pour ne pas éveiller les soupçons, et c’était également un moyen de protéger Myriam. Isis le savait, la seule chose au monde qui, plus il a de gardiens, moins il est gardé, c’est le secret.  Autant ne pas entraîner des gens qu’elle apprécie dans ses combines.

Myriam - “Tu es devenue médecin ? C’est formidable ! Tu devrais t’installer ici à Alabasta, je suis certaine que tu te feras une patientèle conséquente. Il y a tellement de miséreux qui n’ont pas de quoi se faire soigner. Ton père pourrait peut-être même en glisser un mot au prince et ..”

Isis - “C’est adorable de ta part, mais je ne peux rester. Je suis astreinte aux règles monacales, je ne vis pas pour le profit, juste pour aider en échange de certains services. Je me suis détachée de toute possession matérielle.”

Myriam - “Haha, la vie au temple t’as bien changé, mais je respecte ta croyance. C’est très noble de croire encore en ce genre de valeur.”

Isis - “Je le pense aussi, tu m’as parlé des miséreux qui n’ont pas de quoi se faire soigner. Tu sais où je peux les trouver ?”

Myriam - “Euh oui, ils viennent généralement le matin, ils ne devraient plus tarder. Comme c’est l’ouverture, je leur donne les biscuits secs de la veille que je ne peux pas servir aux clients.”

Isis - “Parfait, est ce que tu as gardé le grand tapis rouge qu’il y avait avant dans toute la boutique ? J’aimerais te l’emprunter avec un peu de toile pour faire un petit abri.”

Myriam - “Oui je l’ai gardé au cas où, sers toi dans l’arrière boutique, je suis certaine que ton père n’aurait rien à redire à ce que j’aide sa fille dans son projet ..”

Isis remercia la quinquagénaire et alla chercher le nécessaire dans l’arrière boutique. Tant qu’elle était coincée à Alaburna en attendant l’appel de Reese, elle allait pouvoir s’occuper comme il se doit. Et pour ce qui est d’occuper son temps à des fins utiles, l’agent Fawkes n’était pas en reste. Les mains chargées de tapis, morceaux de bois et étoffe, la demoiselle mis au point son formidable plan.

Myriam - “Je dois t’avouer que je ne m’attendais pas à un tel succès.”

Pour être tout à fait honnête, Fawkes ne s’y attendait vraiment pas. Mais très vite le bouche à oreille avait fait son effet. Un médecin qui s’implantait à côté de la boutique Kephrenatis qui soignait tout le monde sans demander des honoraires exorbitants. Au contraire, elle ne demandait aux personnes que ce qu’ils étaient en mesure de fournir. Très vite, les patients les plus pauvres se sont dirigés vers elle pour obtenir des soins puis une clientèle plus aisée mais ayant sauté sur l’occasion pour se faire soigner à moindre coût. . Elle fût payée en toute monnaie : de la nourriture, des berries, quelques étoffes de bonne qualité etc…

C’était assez troublant de voir à quel point il y avait du monde qui n’avait pas accès aux soins en raison de prix de toubibs dans le coin. Isis ne lésinait pas sur ses efforts pour soigner le plus de monde possible. Le but n’étant pas d’amasser une grande fortune, mais plutôt de se faire connaître auprès du peuple comme Isis Kephrenatis, celle qui soigne tout le monde à moindre coût. Être aimé du peuple, c’est savoir se rendre utile pour lui dans des compétences que tout le monde n’a pas. La médecine lui offrait la possibilité d’apporter à son peuple d’origine.

Tout le monde y gagnait, la file d’attente étant assez longue, certains attendaient dans l’échoppe de son père à siroter des bières tout en mangeant de bonnes choses. D’ailleurs, Myriam lui apporta même des biscuits aux amandes et au miel pour lui faire plaisir. Les années ont passé, et pourtant le schéma de la tata qui donnait à manger à sa petite protégée n’a pas changé. Cela ému même la vendeuse qui cacha du mieux qu’elle pouvait son émotion.

Finissant l’attelle d’un homme qui s’est démis l’épaule, la jeune femme remercia sa bienfaitrice tandis que l’homme blessé remerciait sa doctoresse. Tout le monde semblait content dans l’histoire. Puis, un homme passa devant tout le monde. Un homme rondouillard s’approcha de la petite échoppe improvisée et s’avança vers la doctoresse en gesticulant brièvement.

Etranger - “Hey docteur, j’ai mal au bide, t’as pas un truc pour moi.”

Isis - “Je serais ravie de vous aider à aller mieux, mais voyez plutôt par vous même, j’ai de nombreux patients à voir avant de pouvoir vous ausculter.”
Pensée *Mais il se prend pour qui ce gros porc ? Il a cru que c’était le prince ou quoi ?*

La doctoresse continua son soin avec application malgré le grognement non satisfait de l’étranger. Il ne semblait pas avoir compris qu’il n’avait aucun droit de priorité ici. Aussi, il pensa à soudoyer l’agent Fawkes avec une bourse remplie de berries qu’il jeta à côté d’elle. Il devait bien y avoir de quoi vivre pendant une semaine dans l'opulence.

Etranger - “Je réitère Docteur, j’ai très mal. Oubliez ces bouseux, ils ont pas de quoi vous payez de toute façon.”

Parfait, un gros porc imbus de sa personne se mit à penser la jeune agent du CP5. Il s’était montré hostile envers son public cible. En temps normal elle aurait laissé passer pareille micro agression mais là ce n’était pas possible. Relâchant délicatement le bras recouvert de bandage de son patient, elle se releva et tout en gardant son sourire habituelle fini par dire.

Isis - “Inutile d’essayer de m’acheter, je suis la voie du temple, la voie du désintéressement. Votre or m’importe peu, je vous prierais de bien vouloir le récupérer et d’aller trouver un autre médecin. Toute vie est précieuse et mérite d’être sauvée.”

La demoiselle suscita l’admiration du petit peuple venu pour être ausculté. Eux les opprimés qui se faisaient perpétuellement rabaissés pouvaient voir en la doctoresse une protectrice, c’est ainsi qu’elle se définissait ou tout du moins en apparence auprès de son auditoire. L’homme se mit à jurer en crachant par terre et avant même que l’agent Fawkes ne put réagir, il tenta d’asséner un coup de poing dans la tête de cette dernière. Ayant tout juste le temps d’utiliser le Tekkai pour contrer le coup. Visiblement surpris par la dureté de la peau d’Isis, ce dernier se mit à se tenir le poing. C’était comme s’il avait tapé dans du métal.

Etranger - “Espèce de salope !”

Myriam - “Qui ose s’en prendre à mon Isis adorée ?”

L’étranger se retourna et vit la quinquagénaire le braquer avec un fusil à canon scié qui visiblement en avait vu des vertes et des pas mûres. Myriam était du genre surprotectrice avec ceux qu’elle aime, et même si Fawkes n’avait pas besoin de son aide pour se défendre, elle apprécia de voir sa tata à l’oeuvre pour ne pas montrer davantage de ses techniques. L’étranger pesta et pris la fuite, comprenant que la pré-retraité ne tirerait qu’en cas de mouvement suspect. Puis, baissant le canon de son fusil, la fusilière vint prendre des nouvelles de sa protégée.

Myriam - “Tu n’as rien Isis ? J’ai vu qu’il t’a mis un sacré coup de poing !”

Isis - “Ce n’est rien Myriam, j’ai la tête dure ne t’en fais pas. Tu as toujours ton crache-plomb à portée de main à ce que je vois. Y a des habitudes qui ont la peau dure.”

Myriam - “Ben ouais, sinon comment je vais m’occuper de faire dégager le vieux Billy qui essaient à chaque fois de me tirer mes meilleurs tonneaux de bières hein ? Faut avoir des réflexes dans la vie. D’ailleurs Billy … POSE !”

D’un geste habile, elle se mit à braquer un petit vieux qui avait penché un tonneau. Pris la main dans le sac, ce dernier remit le tonneau à sa place et s’en alla en marmonnant une injure comme “mégère”. Elle était comme ça Myriam, le coeur sur la main mais faut pas dépasser certaines limites. Reprenant son activité, cela ne fût qu’une heure après que la jeune moine se rendit compte que le sac rempli de berries était toujours là.

Myriam - “Et bien, une bonne chose de faite tu ne crois pas ? Ton idée a été un succès resplendissant, tu as peut être même eu un meilleur chiffre d’affaire que moi certains jours.”

Isis était littéralement sur les rotules, la nuit était tombée depuis plus d’une heure maintenant et elle venait de terminer son dernier patient. Se faire un nom auprès des plus pauvres demandé beaucoup de temps et d’organisation, mais tout cela c’était dans les plans de la demoiselle. Parce que c’est son projet, tout cela devait se goupiller comme elle l’avait imaginé. Son absence avait laissé le temps à certains d’oublier qui elle était. Maintenant, il y a fort à parier que tout ceux qui sont passés près de l’échoppe de son père ont reconnu la fille Kephrenatis. Habituellement, quand elle jouait au bon docteur samaritain, elle recherchait davantage des informations. Là c’était tout à fait différent, l’objectif était bel et bien distinct.

Elle avait fait d’une pierre deux coups. Elle avait amassé pas mal d’argent, tout en s’attirant une foule reconnaissante et partageant la nouvelle de sa réapparition dans les environs. Parfait, elle n’avait plus besoin de justifier son départ de 10 ans, elle était revenue et c’était bien là tout ce qui importait à la population locale. Nombreux étaient ceux qui l’avait reconnu durant ses consultations. Certains avaient même été à l’école avec elle pendant leurs jeunes années.

Le temps leur avait fait prendre d’autres chemins, et peut être même que si elle était restée dans ce chemin là, elle aurait été amenée à se perdre. Ces gens là n’étaient pas des mauvais bougres, mais la pauvreté les avait amené à prendre de mauvais chemin. L’argent, tout ce qui régentait les vies humaines. Beaucoup arrivaient à leur cinquantaine sans avoir amassez assez de richesse pour vivre dignement, ils avaient l’impression d’avoir raté leur vie.

Alors qu’elle se levait, son ventre se mit à gargouiller violemment. Elle n’avait pas eu le temps de manger avec tout cela, et les quelques biscuits que Myriam lui avait cuisiné ne l’avait pas réellement callée. C’est que, mine de rien, elle n’avait pas chômer durant tout ce temps.

Isis - « Je meurs littéralement de faim, ça te dirait qu’on aille manger un bout quelque part ? Je t’invite bien évidemment ! »

Myriam - « Oh et bien, puisque tu insistes, je te proposes d’aller manger au restaurant là bas. On a qu’à traverser la rue. Ils sont toujours en manque de personnel et cherche à embaucher mais il n’y a pas assez de demande, tu te rends compte ? Plus moyen de trouver des bons employés, que des fainéants et des cyniques ! »

Alors qu’elles s’apprêtaient à bouger, elles furent rejoint par l’étranger de tout à l’heure ainsi que deux ses amis plutôt épais eux aussi. Vu les sourires malsains qu’ils tiraient, l’agent Fawkes se doutait qu’ils n’étaient pas revenus pour rien. Le sang allait devoir couler et cela n’était pas prévu dans les plans de la doctoresse. Elle devait conserver son apparence de jeune femme douce et pacifiste, et ces idiots vont peut être tout gâcher dans ses plans. Mince, elle n’avait pas prévu ce scénario là.

Etranger - « Tu te rappelles de moi ou pas ? »

Isis - « Effectivement, vous étiez venu tout à l’heure pour un mal de ventre, vous souhaitez une consultation ? »

Etranger - « Ne te fiche pas de moi ! Tu m’as humilié devant ces ploucs et je vais devoir te le faire payer ! On va t’éclater ! »

Isis - « Messieurs, inutile d’en arriver à de telles extrémités, vous ne gagnerez rien en frappant une faible jeune femme. Ecoutez, voilà tout l’or que j’ai récupéré de ma journée. Prenez-le, je vous l’offre en dédommagement ! »

L’un des gros bras s’approcha de la coquette somme présente devant la doctoresse et ouvrit le sac contenant les richesses. Le voyant faire, Myriam tenta de se saisir de son arme mais le deuxième gros bras vint lui glisser le canon du revolver sous la gorge. La situation était tendue, mais pour le bien être du projet, il fallait que tout se déroule sans accroc. Le gros bras tenant la recette d’Isis fit un grand sourire et vint se replacer auprès de l’étranger qui ricana en passant sans main dans des berries fraichement gagnés.

Etranger - «  Haha ! Ça ira pour cette fois, mais t’as pas intérêt à recommencer sinon je vais te buter à coup de poing dans la tête. J’espère que t’as bien compris la leçon ! »

S’apprêtant à répondre, Isis reçu un coup de poing féroce au visage qui la projeta au sol. Elle n’avait pas souhaité utiliser le tekkai pour se protéger de ce coup là. Ce n’était pas bien grave, elle avait ramassé mille fois plus durant sa formation au sein du Cipher Pol. Pour les gens extérieurs, cela représentait un gros coup de poing, pour elle, c’était une claque amicale. Tombant au sol et feignant d’avoir mal, la jeune agente se laissa faire dans le but d’éloigner le gêneur sans compromettre sa couverture. Mais ceci dit, c’était tout de même contraignant car elle venait de perdre une somme d’argent conséquente.

Quand il fût assez loin, sa chère Myriam vint prendre des nouvelles de sa petite protégée. Simulant avoir eu très mal, une petite larme perla au creux de son œil et elle mima la tristesse pour rester dans la peau de son personnage.

Myriam - « Je vais les retrouver ne t’inquiètes pas, ils payeront pour ce qu’ils t’ont fait»

Isis - « Non, ce n’est pas grave. Ne va pas risquer ta vie pour quelques malheureuses pièces d’or. Je ne saurais qu’en faire appart aider mon prochain. Je te préfère en vie à mes côtés plutôt que de risquer ta vie à suivre ses malfrats. »

Prenant les mains de sa vendeuse préférée, elle fini par ajouter d’une voix calme et posée.

Isis - « Tu veux faire quelque chose pour moi ? Je voudrais que tu mettes la nourriture dans la prochaine livraison prévue pour la côte. Il y a un orphelinat là bas, envoie y tout ce que j’ai pu accumulé aujourd’hui. Je n’en ai pas besoin pour vivre. »

Myriam - « D’accord, j’accepte, mais à une condition, tu viens dormir chez moi ce soir. Je ne te laisserais pas dormir dehors avec ces fous furieux qui trainent dehors. Ce n’est pas négociable ! »

Acceptant de bonne grâce l’invitation de sa tata de coeur, Isis soupirait de soulagement. Tout s’était bien passé, son plan s’est déroulée sans accroc. Il ne lui restait plus qu’à passer une nuit agréable et vérifier que son visage reste présentable pour demain. Après tout, ce n’est pas tous les jours que l’on va rencontrer un prince ...