Si vis justitia, para bellum.
Affidavit.
Royaume de Goa - Jour 4.
Un rai de lumière, stratégiquement envoyé par le soleil en plein dans mon œil, me tire d'un sommeil inconfortable et peu reposant. Toute la nuit, j'ai été pensif quant aux propos de Rafaelo, et à ce que je comptais faire maintenant. Ma soif de meurtre semble toujours me picoter le gosier, mais différemment : ma lame n'a pas faim, elle attend patiemment, ronronne comme un chaton qui dormirait lové dans le creux de mon cœur. Je me lève et me redresse sur la paillasse crasseuse de la chambre de l'auberge qui l'est tout autant ou j'ai passé la nuit. Par contre, si ma lame ne crie plus famine, je ne peux pas en dire autant de mon estomac, qui fait des bruits si tonitruants qu'ils pourraient même faire fuir Il Assassino en personne...
Je me mets une beigne. 'Faut que j'arrête penser à ce type. Il a joué avec moi, et puis il m'a laissé partir. Et maintenant je suis vivant, loin, et il ne me retrouvera jamais. Aujourd'hui est un autre jour et pour l'heure... Et bien... Il s'agit de celle du repas. Masque et lame en poche, je me dirige vers la porte sans être bien réveillé. C'est à ce moment là que je remarque, non loin du pas, une enveloppe cachetée.
Une enveloppe sur laquelle mon nom est inscrit à l'encre. Je sais pas pourquoi, mais je sens que ça pue, cette histoire. Je la ramasse, et rompt le sceau de cire. A l'intérieur se trouvent une lettre et un portrait.
- Lettre :
Salutations, Grim Reaper.
Le temps est venu pour toi d'investir ton rôle : cet homme doit être protégé et survivre à la Révolution. La mission, que tu accepteras, sera d'éliminer tous ceux qui tenteront de nuire à sa vie. Si tu échoues, sa mort t'incombera aux yeux de tous. Si tu réussis, tu seras largement récompensé.
Son nom est Eirikr Von Avazel.
X.Fabuleux, il m'a retrouvé. Mais pourquoi est-ce que j'ai autant la poisse, moi ? C'est trop demander, une simple petite traque au criminel de bas étage ? Pourquoi est-ce qu'en plus de devoir protéger quelqu'un (ce qui n'est absolument pas dans mes habitudes), je dois participer à un coup d'état révolutionnaire ? Car oui, il s'agit à mon avis bel et bien d'un coup d'état, au vu des mots que Rafaelo avait prononcé la veille et qui résonnent encore à mes oreilles toujours endormies : "Le jeu n'est pas de tuer. Le jeu est de semer le chaos. Frapper la fourmilière, mettre le feu à la souricière. Que penses-tu que je fasse ici, à Goa, sinon déclarer la guerre au Roi ?" Sans compter le mot "Révolution", qui, tel qu'il est écrit dans la lettre, ne laisse rien présager de bon non plus...
- Portrait :
Et moi, je trempe jusqu'au cou là-dedans. Quelle vie, de devoir aider à fomenter un putsch révolutionnaire...
A tous les coups, je vais y passer, moi, dans l'histoire. Si ce prince de pacotille meurt, Rafaelo me tue sûrement. S'il vit, il y a quand même toujours plus de chance pour que j'entre dans les ordres plutôt qu'un tel coup d'état réussisse.
Le truc, c'est que je n'ai ni l'intention de mourir, ni l'intention de devenir curé.
Du coup, qu'est-ce que je fais ? Je m'enfuis, loin, tout en sachant pertinemment que celui qui me menace est un monstre intangible et qui semble tout voir et tout entendre ? Ou alors je tente quand même ma chance, dansant sur une corde au dessus du vide avec la Mort ?
Le choix est vite vu.
Si je veux pouvoir continuer à tuer et me venger de mon ancienne maîtresse, je dois à tout prix survivre. Et cela passe par la case "Réussite du coup d'état", même si je ne suis pas sûr que ça marche... Après tout, comme le dit l'adage... "Quand on veut être sûr de son coup... On plante des navets. On ne pratique pas le putsch."
Je ne vais pas m'attarder sur pourquoi je dois protéger ce Prince Eirikr. Il est très certainement un des alliés de Rafaelo, et doit de ce fait être la cible de nombreux assassins... Des assassins comme moi (bien que sûrement moins professionnels). Qui doivent donc avoir les mêmes méthodes que moi. Ainsi, en faisant mon boulot comme si c'était un contrat normal, il est plus que probable que je tombe sur mes homologues. Et si j'arrive à les débusquer avant qu'ils ne passent à l'acte... Autant dire que ce sera aussi facile que de voler une sucette à un enfant, en plus d'être complètement dans mes cordes : je préfère de loin le rôle de traqueur que celui de garde du corps.
Rôle dans lequel il faut que je rentre dès maintenant. Car ma traque commence... Ou plutôt ma collecte d'informations, à visage découvert. Je dois d'abord découvrir où se trouve ce Eirikr Von Avazel... Et à mon avis, un noble de son envergure...
Je regarde les hautes murailles qui ceignent le centre du royaume.
A mon avis... Il doit loger dans la ville haute.
Je me mets en chemin. Nom du contrat : Eirikr Von Avazel. Ou presque...