Quelques jours plus tôt, sur une île absolument quelconque...
-Nwehehehehehehehe. C’est bien gentil de vouloir nous faire la navette, sourit Roderik en prenant place à bord du navire.
-Au contraire. C’est un plaisir de vous revoir. Merci à vous, répondit gaiement une énigmatique figure encapuchonnée.
Aujourd’hui, une partie de la petite bande du World Shredder rejoignait le Transnorth, un navire capable d’accueillir à son bord un peu plus d’une centaine de personnes. A ses débuts, le Transnorth était un simple navire de transit, affrété par un armateur parmi tant d’autres, pour faire office de navette dans les mers du nord.
Un jour pourtant, le navire avait été abordé par la troupe du capitaine Delmudd Umschlagszt. Le raid des pirates avait été expéditif, au point que la sécurité du navire avait très rapidement jeté l’éponge. Tous les voyageurs, ainsi que l’équipage, avaient été paisiblement déposés aux abords de la première île contenant une base de la marine susceptible de les recueillir. Umschlagszt était un pirate qui n’avait jamais connu de terribles coups du sort ; pour cette seule raison, il s’efforçait de ne jamais en asséner aux autres, même si la perte d’un navire était déjà significative. Son précédent navire était en fin de vie, usée par leurs voyages incessants, et il était grand temps qu’il s’en approprie un nouveau. Ni plus, ni moins.
Ce jour-là, ils s’étaient à peine souciés de délester les voyageurs de leurs possessions. La majorité d’entre eux n’avaient même pas été fouillés, et purent tranquillement repartir avec leurs affaires. Parmi les rares à posséder des signes ostentatoires de richesse, on n’avait guère cherché à récupérer quoi que ce soit qui n’était pas immédiatement revendable.
Tout s’était passé pour le mieux. La troupe d’Umschlagszt avait été secondée par deux autres, celles du World Shredder, des alliés récurrents, et une autre, qu’il ne connaissait pas, recrutée pour l’occasion par leurs collègues. Avec deux cent hommes répartis sur trois navires, leur prise avait été ridiculement simple.
Le mois suivant, les trois équipages avaient mis à profit leur bonne entente pour effectuer quelques raids communs, avant de chacun reprendre sa route de son côté. Mieux valait ne pas trop attirer l’attention, au risque d’avoir des militaires à leurs trousses. C’était aussi ça, qui faisait la force de ces pirates. Ils étaient membres d’un réseau flexible, libre et désuni, mais partagé par des liens de confiance relativement solides. Tout le monde savait par avance à quoi s’attendre avec les autres, et on prenait bien soin à ne jamais aller au-delà.
C’était un système que le World Shredder se plaisait à développer. Cela leur correspondait parfaitement. Avec le temps, ces pirates étaient devenus des mercenaires temporaires qui trouvaient toujours un employeur, ou plus exactement des associés, au point tel qu’ils n’avaient même plus l’utilité d’un navire propre.
Quand il s’agissait de mener un assaut, ils n’étaient jamais seuls. Ils étaient simplement là où il le fallait.
De sorte que quand il s’agissait de simplement se déplacer, ils trouvaient toujours, à un moment où à un autre, une connaissance capable de les récupérer.
C’était pour cette seule aptitude que leur capitaine actuelle occupait cette place. Nerassa Roderik avait le sens des affaires dans la peau, et était une formidable commerciale entièrement dédiée à sa petite troupe.
Quand elle n’était pas occupée à jouer au pirate, du moins.
-Chouette bateau, quand même, s’exclama la borgne en souriant. C’est combien, pour voyager en première classe ?
-Ah ! J’ai bien peur qu’elles ne soient déjà toutes occupées. Mes hommes n’ont pas vraiment à se gêner, en temps normal. Et ils ont eu tendance à… s’étaler, depuis le temps.
-Han. Bonjour l’hospitalité, bravo.
-Vous voyagez gratuitement à bord, non ?
-Ouais. A bord d’un navire qu’on vous a aidé à avoir, même.
-Mmmh...
-Hehehe, pas besoin de faire cette tête là, s’amusa-t-elle en lui tapotant gentiment le bras. C’était contre rémunération, bien sûr, voyons. Nan, nan, c’était pour autre chose, que je demandais. J’me disais juste… pour une fois que j’avais la possibilité de voyager comme monsieur tout le monde dans un bon gros bateau… et gratuitement… dans une vraie belle suite royale… ça doit être le rêve, nan ?
-Euhm, non. Nous n’avons pas non plus de suite royale. Et si c’était le cas, elle serait à moi.
-Chut ! Je veux pouvoir rêver en paix.
-Pour me reprocher d’avoir quelque chose que je n’ai pas ?
-Exactement.
-…
-Rhooo, humour. N’empêche que si j’étais à la tête d’un navire-dortoir, je m’amuserais bien à m’aménager un bon gros coin douillet. Façon nabab. Et une baignoire remplie de berries.
-Baignoire ?
-Oui, une baignoire. Ce qui devrait être l’un des plaisirs coupables de toute pirate qui se respecte, ça. Prendre un bon bain bien chaud et faire tinter les pièces avec le shampoing, juste pour voir ce que ça fait, au moins une fois dans sa vie. J’verrais bien un canard caoutchouc incrusté de rubis dans la baignoire, aussi.
-… ?
-Ouais, ouais, un canard. C’est super cool, les canards. Tiens, par exemple. Est-ce que vous saviez que la reine Elisabeth II avait un canard en plastique, sur mesure et tout, avec une couronne attachée ? Moi j’dis, c’est la classe. Je tuerais pour en trouver un à mon effigie, avec un bandeau sur l’œil, boucles blondes et tout le bazar. Enfin, je dis tuerais, au figuré, hein, faut pas déconner non plus bien sûr.
-Euh…
Elle était folle. Ou donnait parfois cette impression, en tout cas.
Dans le monde, il y avait bien des personnes qui devenaient pirates par choix, des originaux romantiques qui rêvaient de liberté, et se laissaient tenter par le style de vie onirique, inspiré du carpe diem.
Mais pour Roderik, c’était encore autre chose. La jeune femme avait tout simplement l’air d’énormément s’amuser. D’être pirate pour plaisanter, tout simplement. Un peu comme si le monde était un théâtre, et qu’elle avait choisit de jouer ce rôle en exagérant largement son personnage.
Malgré ça, elle restait diablement bien organisée. Avec elle, le carnet de commandes du World Shredder,
-Mmmh… bref. Une idée de quand on va pouvoir partir ? Z’avez un trajet spécifique de prévu, d’ailleurs, ou bien je peux faire une petite course en chemin ?
-Peut être. Tout dépend de si vous parvenez à me faire croire qu’il ne s’agira pas d’un énorme caprice inutile qui nous fera perdre un temps fou.
-Chouette. Parce que vous voyez, en ce qui concerne mon arme secrète… je vais avoir besoin de faire un petit quelque chose, avant de le récupérer.
Le pirate s’interrompit. Avec sa cape et sa cagoule, Roderik ne pouvait pas voir ses traits, et pourtant, elle pouvait sentir le regard courroucé qu’il lui prodiguait.
-Est-ce que vous parlez de votre expert ?, articula-t-il douloureusement. Je croyais que vous étiez sûre de sa coopération ?
-Ah, nan, calme, tout doux, tout va bien, y’a pas de soucis alors pas besoin de sortir les gros sabots hein, merci !, s’offusqua faussement Roderik. Sig’… euh… si je vous ai promis un truc, c’est que ça va le faire, bien évidemment, hein.
-Expliquez moi ça. Votre « arme secrète ». Quel est le problème ?
-Y’a PAS de problème, assura Nerassa. Justement. Rhooo, allez, quoi. Je vous ai déjà fait faux bond sur quoi que ce soit, avec mauvaises surprises et tout ?
-Mmmh… vous êtes sûre de vraiment vouloir avoir une réponse ?
-Oh que oui, que je veux. Allez-y, j’vous défie. Trouvez un truc à redire à mes magouilles, allez-y.
-Eh bien…
-…
-Il y a bien eu la fois où…
-…
-Ou encore…
-…
-Euh… eh bien…
-…
-…
-…
-…
-Ou alors, reprit la pirate, vous pouvez dire que je suis une jeune femme merveilleuse, parfaitement digne de confiance, peut être bien l’une des meilleures avec lesquelles vous n’avez jamais eu l’occasion de collaborer, et que vous pouvez avoir une confiance aveugle dans mes charmants petits plans bien ficelés. A moins que ça ne vous brûle la langue de me faire autant de compliments, bien sûr. J’ai cru comprendre que c’était le cas de beaucoup de monde, en fait.
-Eeehm… nous allons dire que… pas faux. Tout simplement.
-Ca suffit à me rendre toute contente, pad’soucis.
-Zut, j’avais pas besoin de ça. BREF. En ce qui concerne votre expert, alors. Est-ce que l’on pourra compter sur lui ?
-Abso, lu, ment. C’est l’un de mes meilleurs informateurs, j’ai passé des années et des années avec lui, ya absolument aucun moyen qu’il me refuse quoi que ce soit, et encore moins ça, et encore moins si je lui rends au préalable un petit service en allant faire la petite course que je vous ai demandée. Ca prendra une toute petite journée, et ça sera parfait.
-Bon. Bon, bon, d’accord. Et qu’est ce que c’est, exactement, comme course ? Quelque chose de dangereux ?
-Rhooo, vous vous méfiez de moi, ou quoi ?
-Oui, parce que je sais à quoi m’attendre.
-Eerk.
-Répondez, Nerassa.
-Nan, c’est rien de bien méchant. J’vais juste aller acheter un cadeau.
-C'est-à-dire ?
-C'est-à-dire littéralement rien d’autre qu’un cadeau. Un cadeau d’anniversaire. Pour sa maman.
-… euh ?
-C’est dans un mois. J’la connais très bien depuis super longtemps, et comme elle a toujours été super avec moi, je comptais lui offrir un maxi machin bien juteux pour l’occasion. Maintenant que j’ai les moyens, en plus, hein. Mais quitte à le faire, autant avoir ce joli levier de pression supplémentaire sur mon bon vieux copain. Qui n’est rien d’autre que l’homme dont nous avons besoin ! La vie est pas bien faîte, quand même ?
-C’est complètement… idiot.
-Meuh non, c’est un échange de bons procédés entre de vieux compagnons, rien de moins. Alors, maintenant que j’ai tout dit, heureux de savoir ?
-Je préfère… ne pas répondre. Oui.
Pad'Bol
Un poil moins de quelques jours plus tôt, sur une autre île elle aussi absolument insignifiante…
C’était en 1623. A cette époque, Sigurd était officier dans la milice de son royaume natal. Lieutenant sur le navire du colonel Hammerfest, pour être plus précis. Le personnage était un quinquagénaire à la bedaine aussi prononcée que sa barbe était fournie. Dans les hautes sphères de la milice nationale, l’homme était connu pour appliquer des méthodes de véritable rouleau compresseur, utilisant la supériorité numérique et technologique de ses forces pour écrabouiller les quelques pirates mal équipés et encore moins bien organisés qui avaient la drôle d’idée de s’aventurer dans le Royaume. Il agissait vite, et il agissait bien, sans jamais se précipiter au point de tomber dans un traquenard astucieux.
C’est en tout cas la réputation qu’il s’était lentement façonné au cours des années. Le colonel avait une carrière qui s’étalait sur un peu plus de trente-cinq ans. Car Hammerfest, c’était un nom qui était parfois entendu dans les milieux militaires de North Blue, même au-delà des frontières de son pays.
Néanmoins, ceux qui le croisaient aujourd’hui étaient plutôt attendris par son allure de gentil bonhomme vieillissant. Pour Dogaku, qui n’avait jamais entendu parler de son passé, le militaire avait été une figure franchement sympathique doublée d’un mentor bienveillant. Qui avait un très fort penchant pour toutes les bonnes choses qui pouvaient se faire dans toute boulangerie ou pâtisserie digne de ce nom. Son embonpoint fort prononcé en témoignait joyeusement, et il ne manquait pas d’en faire profiter ses collègues, plusieurs fois par jour.
C’est donc avec un petit stock de viennoiseries faîtes maison que Sigurd quitta sa caserne, de bon matin, toutes ses affaires rassemblées dans un sac à l’allure de boudin. Tout en mâchonnant un croissant fourré aux myrtilles, le blondinet s’engouffra dans une petite allée, en direction d’une taverne proprette dont la clientèle était un cran au-dessus du comptoir à marin usuel. Il s’arrêta devant, jeta un coup d’œil l’intérieur, sans vouloir entrer. Pas encore.
Il n’était pas là pour tuer le temps. Il avait rendez-vous.
Et la personne qu’il cherchait… il finit par la trouver. C’était une silhouette encapuchonnée, indubitablement une femme, et vêtue d’un large poncho brun. Dans le genre de ceux que pouvaient porter des marins devant travailler sous une forte pluie. Ou d’un personnage louche qui ne souhaitait pas être reconnu en public. A voir selon le cas.
En l’occurrence, c’était très sûrement les deux, songea Sigurd en soupirant. Ce qui ne l’empêcha pas le moins du monde de s’approcher tranquillement de sa plus vieille amie, attablée seule, dans un coin, en compagnie d’un log pose qu’elle s’amusait à trafiquer avec des aimants en tous genres.
-Et… oui ! C’est bien la terrifiante Nerassa Roderik qui a oublié de se changer après son dernier pillage de la veille, la salua le jeune homme en s’approchant. Croissant ?
-Aaah, désolée. J’aurais bien aimé me faire toute belle pour toi, beau blond, mais… miomf’… j’ai eu une petite anicroche sur la fin de mon voyage qui m’a empêché d’avoir du linge propre.
-Ah ? T’as la police sur les talons, en plus ? On est filmés, t’as été suivi, j’vais me faire arrêter pour complicité ou autre ?
-Police ? Naaaan, t’inquiètes. Un gorille de la mafia qui s’est invité chez nous. Le seul truc que Harvesgr a trouvé à lui balancer dessus, c’était ma valise. Et comme elle s’est ouverte après coup… j’l’ai fait plonger pour tout récupérer, mais… boah. Longue histoire. Miomf’. Ch’est eftra, ch’truc. Ch’est quoi, de fraies myrvilles ?
-Une pirate bien élevée ne parle pas la bouche pleine, nan mais. Alors, t’as tué combien de personnes, cette semaine ? Des innocents, au moins, j’espère ?
-Bah, j’ai réussi à pas avoir la moindre anicroche depuis le début du mois, mais comme j’étais absolument certaine que t’allais encore me poser la question, j’ai fait exprès d’éventrer un petit vieux avant de venir, juste pour pouvoir te dire oui. Alors, heureux ?
-J’vais prendre ça pour un non.
-Ah mais je suis sérieuse, plaisanta-t-elle.
-…
-Aaaaallez, fais pas cette tête. C’est très bien, d’être pirate, tu sais ?
-Euuuh… j’ai cru entendre un truc débile. Tu peux répéter ?
-J’ai dit que c’était…
-Hop, indiqua-t-il en lui fourrant une chouquette dans la bouche.
-… phreeuh bweeeurf d’eurrrhhbfbfmmm bumhe pfrapfeuh.
-Ca sonne mieux comme ça, ouaip.
-‘Bruti.
-‘Brutie, répliqua-t-il en souriant. Alors, tu deviens quoi de beau, en ce moment ?
-Que des choses extra ! Rien que la semaine dernière, j’ai déterré mon premier coffre au trésor caché au fond d’un ancien repaire de pirates, et franchement, les pièges mortels, c’était tellement marrant que…
C’était de vieux amis qui ne s’étaient pas revus depuis plusieurs mois, et qui avaient assez de choses à se raconter pour tenir des jours entiers. Sigurd avait récemment quitté l’académie militaire, diplômé bon gré mal gré, et rejoint le service actif en tant qu’officier subalterne. Rien qu’avec ça, il avait de quoi l’alimenter en anecdotes à foison. Et l’autre, qui était déjà ambassadrice de son équipage depuis près d’un an, n’était pas en reste.
Et ils allaient avoir tout le temps nécessaire pour le faire, songea Dogaku. Son cas était simple. Il disposait d’une permission exceptionnelle de huit semaines, qu’il avait décidé de passer chez lui. Il l’avait annoncé à son amie, qui avait décidé d’en faire de même. C’est pourquoi ils venaient se retrouver ici. Ils devaient tout simplement faire le voyage jusqu’à leur île, et aviser une fois sur place.
Du moins, c’était le plan de base. Mais la miss avait quelque peu changé d’avis, entre temps, et lui avait proposé d’essayer quelque chose de nouveau. Et quelque chose d’absolument insensé, peu importe comment elle lui tournait la chose. Il s’agissait simplement de rajouter une tout petite étape au voyage. De rien du tout. A première vue, du moins.
Lorsque Sigurd se retrouva conduit dans un port sensiblement moins fréquenté que ce qu’il avait l’habitude de voir, les nombreuses appréhensions qu’il avait calfeutré au fin fond de son esprit raisonnable émergèrent toutes en force, déterminées à lancer un dernier baroud d’honneur avant de ployer sous l’idiotie de leur propriétaire, et l’influence que sa complice pouvait avoir. Car aujourd’hui, Sigurd ne monterait pas à bord d’une navette de transit conventionnelle. Le bateau qui l’intéressait était un genre de navire qui hurlait « pirate » en toutes majuscules à quiconque le regardait de travers. Il s’agissait du Transnorth, celui-là même que Nerassa lui pointait du doigt, l’air triomphal, mais aussi particulièrement guillerette. C’était un voyage qu’elle attendait depuis des lustres, presque un cadeau qu’il lui faisait. Après toutes les demandes et suggestions qu’elle lui avait de moins en moins voilées au fil des saisons, son plus vieil ami avait enfin accepté de partir à l’aventure avec elle, sous la houlette d’un pavillon pirate, rien de moins. La miss avait pratiquement l’impression de partir en vacances, et ne s’en cachait pas.
-Votre carrosse est apprêté, princesse !
-… eeer… han… ohn…
-Si vous voulez bien vous donner la peine de monter…
-Nan. C’est… waw. J’ai encore le droit de changer d’avis et de me dire que je vais faire un truc idiot, ou pas ?
-Quoi, l’est pas beau mon bateau ? T’as pas envie de monter dessus ?
-…
-Les cabines sont tout confort, tu sais ?
-…
-Aaah, j’adore quand tu fais cette tête. Celle du « Pars en courant très trèèès vite avant que je ne t’attrape et te fasse tout plein de choses horribles comme tout. Comment oses-tu pourrir mes vacances avec un autre de tes plans à la con, Nera’ ? Mauvaise graine de mauvaise fille, va ! ».
-…
-…
-…
-…
-Euh… ouais, reprit Sigurd, étonnamment calme. J’allais te dire « ça faisait longtemps, la vache, t’imagines même pas comme tu m’as manqué ! ». Sauf que là maintenant, j’arrive pas du tout à me souvenir de pourquoi tu m’aurais manqué. J’veux dire, niveau plans à la con et mauvaises surprise, t’es lourdement dotée, mais… c’est quoi, tes bons cotés, déjà ?
-Tu es secrètement amoureux de moi depuis des années ?
-Naaan, ça se saurait, depuis le temps. Trouve autre chose.
-Alleeez. Tu sais très bien que tu t’ennuierais sans ma merveilleuse compagnie pour dynamiser ton morne quotidien…
-Depuis quand vous avez un bateau, au fait ? Surtout un gros et bien doté comme ça, là, l’a l’air bien équipé et tout. Vous avez jamais de bateau, normalement.
-Oh. On a eu la chance d’avoir un gentil marchand qui nous a laissé emprunter sa corvette. Chouette, nan ?
-Un navire volé, donc ?
-Naaan. C’est un emprunt, voyons. On va le rendre. Sûrement.
-Je vois pas la moindre raison pour laquelle vous feriez ça.
-Moi non plus. Mais peut être qu’on en trouvera une.
-…
-‘Fin, je veux dire… quand il sera cassé, sûrement. Nwehehehehehehehe.
-Très content de te revoir, moi aussi, oui oui. Alors… y’a quoi d’autre que je dois savoir, exactement, avant de faire une énorme connerie en acceptant quand même de monter à bord comme un bon pigeon qui te fait quand même confiance ?
-Ben...
-…
-Je suis vraiment super méga contente que tu viennes, ça faisait des lustres que j’espérais ça ?
-Aaaaw. Elle me prend par les sentiments. Je sens… énergie… faible… résistance… beuah…
-Et je peux même te refaire les yeux doux, si tu veux.
-T’as qu’un œil.
-Façon de parler, voyons. Et si j’utilise un peu mon décolleté, peut-être ?
-Nan, ça sera pas nécessaire, merci. Mais donc… c’est quand qu’on part ? Z’avez tout prêt comme je l’ai demandé ?
-Yep ! Paré, on a fait les stocks comme d’habitude, plus tes petits machins bizarres.
-Mwarharhar. Ca va faire des lustres qu’on a pas fait ça… vivement qu’on y soit.
-Hein, quoi ? Naaaaaan. T’as le sens de l’aventure, toi ?
-Bah eh, j’aime bien me balader dans la flaque, moi. Pis renaviguer avec toi, bah… ça va être chouette, ouais. Avec plaisir.
Une occasion comme ça ne se présentait pas souvent. Et ils avaient su la saisir en plein vol. Moins d’une semaine plus tôt, Roderik avait appris qu’un de ses « clients » occasionnels s’était fait devancer par un rival dans une chasse au trésor partagée, qui avait viré au règlement de comptes suite à plusieurs désaccords. Le trésor se trouvait sur une île d’East Blue, eux-mêmes étaient sur la mer du nord, et son ennemi avait maintenant cinq jours d’avance en navigation. Pour rattraper son retard, il n’avait guère le choix : il lui serait impossible d’arriver en premier en passant par Reverse, à fortiori sans posséder de navire adapté. Mais Nerassa avait pu lui agencer une solution de dernière minute : entre le navire d’Umschlagzst, sa propre connaissance de la flaque, et toute la bonne volonté de leurs équipages respectives, ils pouvaient toujours essayer de forcer le chemin de la flaque, et obtenir ce trésor bien avant l’autre.
Les délais avaient été courts, mais tout s’était fait fluidement. Son propre équipage était disponible, et lui faisait complètement confiance. Delmudd et sa bande avaient une sacrée dette envers eux, depuis la prise du Transnorth, et étaient pour la plupart de bonnes pâtes : même en étant pirates, ils passaient presque pour des gens biens. Et le troisième capitaine avait tout simplement besoin d’aide, au point tel qu’il avait accepté toutes ses conditions sans discuter. En bonne parties parce qu’elles étaient raisonnables, tout de même.
Ce qui avait le plus surpris la jeune femme restait pourtant la réponse que lui avait fourni le plus improbable de ses alliés. En plaisantant à demi mots, elle s’était excusée du contretemps, et lui avait proposé de se joindre à eux. Sans y croire le moins du monde, cette fois. Et Sigurd avait pourtant accepté, trois fois de suite, pour qu’elle convaincre que ça n’était pas une plaisanterie. « Pourquoi pas », qu’il avait dit. L’idée du voyage lui plaisait, tout spécialement s’il était assuré d’avoir son amie à ses cotés pour tout du long. Il savait maintenant que sa bande était relativement tranquille, et espérait que les autres seraient bien tenus en laisse ; la réputation que s’était fait Umschlagzst comptait en bien. Et puisque l’affaire n’impliquait aucun pillage, et que pas un croiseur de la marine n’avait la moindre raison de vouloir leurs têtes plutôt que d’autres, c’était pour lui l’occasion parfaite d’essayer ça.
Officier dans un équipage pirate. Il serait celui qui aurait la meilleure expérience de la flaque, et pèserait son poids de navigateur spéléologue dans un équipage de fléaux des mers. Il connaîtrait le terrible quotidien de la vermine des océans, se retrouverait incapable de ne rien faire de son quotidien sans avoir à interagir avec des forbans, et devraient guider cette bande hétéroclite dans des cavernes inondées pour un aller-retour de deux semaines, peut être plus. Leur objectif était simple : conduire le client et sa bande sur l’île au trésor, à partir de quoi il se débrouillerait seul. Il avait déjà payé sa traversée : tous les détails étaient réglés.
-Et je toucherai combien sur ça, au fait ?
-Nourri, logé, blanchi, c’est déjà beau, non ?
-Evidemment…
-Et je ne te quitte pas d’une semaine pour couronner le tout !
-Aw. Les sentiments.
-C’est beau, hein ?
-Donc je vais perdre deux semaines de ma vie, soit un quart de mes vacances, à aller faire le con avec toi pour une affaire de berries pour un pirate probablement sanguinaire que je ne connais même pas ?
-Et le pire, c’est que t’en meurs d’envie.
-Erf. Au fait, tu m’avais pas répondu. Ils ont déjà traversé la flaque, au moins ?
-Nop. Pas ensemble.
-Ils ont au moins quelques marins qui l’ont fait ?
-Une trentaine. Sur un total d’un peu plus de cent. Et on est les deux seuls pros. Indispensables. Gratifiant comme tout.
-Mmmh. Ouais. Reste donc juste à…
Il était prêt. Il ne lui restait qu’une seule chose à faire avant de pouvoir enfin monter à bord. C’était simple. Nerassa l’avait présenté aux autres comme étant un navigateur émérite, un habitué de la flaque, un autre de ses alliés réguliers, mais qui tenait coute que coute à garder l’anonymat. Ce qui était intégralement vrai. Restait donc à faire en sorte que personne ne puisse reconnaître Sigurd tout au long de la traversée qui s’annonçait. Et pour ça, elle avait trouvé une solution simple. Elle avait du faire vite, compte tenu des préparatifs précipités de leur voyage. Et lui tendit donc un large poncho de cuir brun à capuche, du même genre qu’elle-même portait actuellement. Sauf qu’en plus de ça, Sigurd devrait porter un masque. Un masque de luchador, rien que ça. Rouge écarlate, avec des bandes orangées pour lui souligner les yeux, et d’autres marques jaunes et blanches agencée selon une symétrie parfaite, qui évoquait immanquablement les ailes déployées d’un rapace. En le voyant, le jeune homme ne put s'empêcher de siffler en ricanant.
-Woah. Je dois mettre ça ?
-J’me suis dis que tu trouverais ça drôle. Ou alors c’est moi qui trouve ça hyper marrant, à voir.
-‘Brutie.
-Merci.
-Reste aussi à savoir comment j’m’appelle, souligna Sigurd.
-Uh ?
-J’ai pas trop envie que tu m’appelles Sigurd devant eux. Même sans le nom, c’est pas suffisant… pas trop envie de prendre de risques. Faut pas trop déconner non plus, quoi.
-Aaaah. Bah… euh…
-T’étais pas sensée penser à tout, des fois ?
-Euh… Pad’Bol !
-…
-On va t’appeler Pad’Bol. C’est comme ça que tu t’appelles, nan ?
-Seulement dans les parties d’Age of Navire. Ou de Creek Fighter. Ou de…
-Donc tu pourras de reconnaître. Et personne ne saura que c’est toi. Sauf moi. Et même si quelqu’un d’autre le savait, absolument personne ne remarquerait le truc. Ca te va ?
-…
-… oui ?
-T’es vraiment folle. J’achète, c’est extra.
-Nwehehehehehehehe. J’t’adore, Sig !
-Que non. Moi, j’t’adore. Mais t’as intérêt à pas me laisser m’ennuyer seul dans mon coin de tout le trajet.
-J’te quitte pas d’une semelle, promis !
-Alors ça roule. On peut y’aller.
Dernière édition par Sigurd Dogaku le Mer 3 Sep - 17:34, édité 1 fois
-El Señor Pad’Bol ?, s’étonna le capitaine Delmudd en découvrant son invité.
-Absolument !, lâcha Nerassa, enjouée. C’est bien lui. Notre sauveur, notre héros !
-…
-…
-Au début, elle voulait m’appeller Mucha Lucha. Ou bien encore la Chupacabra. Ou encore « El Señor Guacamole ». Donc, appelez-moi juste Pad’Bol, se lamenta Sigurd.
-Je vois… pourquoi pas. Si c’est… ce que vous voulez.
-Ca n’est exactement pas ce que je voulais, mais faut ce qui faut.
-Ah. Je me disais bien, aussi. Et le masque, c’est elle, aussi ?
-La question ne se pose même pas.
-Evidemment… je comprends.
-Eh bah c’est chouette. Vous êtes déjà copains, à converser comme ça ? Mais je comprends pas pourquoi vous le prenez comme ça, tous les deux, sourit la pirate. Ca te va très bien, le nom complet. Si si, Señor !
Maintenant qu’ils avaient emprunté la passerelle, plusieurs regards se tournèrent vers eux. Ils attiraient l’attention, sans le moindre doute. Tout d’abord, le capitaine Delmudd Umschlagszt, seul maître à bord du Transnorth. Non loin derrière, Nerassa Roderik, la représentante et l’actuelle capitaine du World Shredder. Et juste entre eux deux, un mystérieux personnage, vêtu d’une cape, d’une cagoule, et d’un masque de luchador stylisé qui en imposait.
Tout le monde devinait qu’il s’agissait là du spécialiste de la navigation souterraine dont on leur avait parlé. L’homme qui leur permettrait de traverser la flaque en toute sécurité, et qu’on leur avait demandé de ne pas déranger inutilement, tout du long de la traversée. Jusque-là, personne n’avait vu d’intérêt à parler de lui. Ils avaient bien d’autres choses à faire. Mais aujourd’hui, pourtant, il parvint à faire sensation. Un véritable lutteur masqué, à bord de leur navire, et qui les saluait d’un geste de la main tout en conversant avec deux capitaines pirates ? Il donnait l’air d’être un invité de marque, et un allié de choix, très certainement. Mais les apparences ne faisaient pas tout. Il s’agissait d’un bien curieux personnage, ce qui ne l’exempterait pas d’avoir à faire ses preuves.
Sauf pour ceux qui avaient pleine confiance dans les amis de leurs amis. Et le capitaine Umschlagszt était à priori de ceux-ci.
-Nerassa nous a beaucoup parlé de vous. Et vanté vos mérites, bien sûr.
-Beaucoup parlé de moi... beaucoup comment, par exemple ?
-Beaucoup comme il faut, t'inquiète. Nom, prénom, âge, parcours, études, occupation, adresse, denden… tout !
-Aw.
-Je plaisante, hein.
-J'ai cru comprendre que vous étiez quelqu'un d'extrêmement attaché à la discrétion. Votre masque, votre identité, je parle.
-C’était pas spécialement… euh, ouais, se contenta de répondre Dogaku.
-Je sais. Aussi ai-je pris soin de vous préparer un lieu de vie adapté. Une cabine où vous pourrez travailler, vous reposer et vous restaurer en toute quiétude. Le tout en première classe, précisa-t-il en riant doucement.
-Uh uh. Je vois.
-Eeeeeeeh !, s’exclama la borgne. Attendez. Lui il a le droit à une cabine première classe et pas moi?
-Eh ouaip. Pourquoi, pas toi ? Har har har. Pleure.
-Mais c'est injuste! Tu m'avais dit qu'il n'en restait plus!
-Quelqu'un a bien voulu faire un geste... en quelque sorte. Et comme notre nouvel ami allait avoir besoin d'un espace de vie convenable...
-Je crois que j'aime beaucoup ce type, en fait.
-Et moi, j'mérite rien de convenable, sûrement?, s’offusqua faussement la blonde.
-Sûrement pas.
-Tu peux manger en public, toi. Pas lui. Je me trompe?
-Bien sûr qu’il peut, suffira qu’il se lave le masque après coup ! Ou qu’il le relève.
-Et prévoyant en plus de ça. Incroyable. S'il ne pillait pas pour gagner sa vie, j'le soupçonnerais presque d'être un type bien.
-Merci du compliment, Señor.
-Ah mais il faut, c'en est un, sourit Dogaku, le ton riant.
-J'en conclu donc que vous n'êtes vous-même pas un pirate, sourit à son tour le capitaine, le visage lui aussi caché par une longue cagoule.
-...
Dogaku ne dit rien, mais il se crispa d’un coup. Même avec son masque, cela se voyait à sa posture, déjà tendue, et maintenant sensiblement plus raide. Il n’était pas dans son élément, et le pirate abordait maintenant des points qui ne lui plaisaient pas le moins du monde.
-Ou du moins, un pirate qui aurait le pillage en horreur... un drôle d'oiseau, continua Umschlagszt. Mais je n'y crois pas.
-Hem.
-Je ne dirais rien à personne, bien évidemment. Ne vous inquiétez pas. Je tenais simplement à vous signaler qu’il va vous falloir être particulièrement vigilant tout au long de notre traversée. Vous ne risquez rien. Ni avec moi, ni avec aucun de mes hommes. Mais si vous tenez à préserver votre identité… et je peux parfaitement le comprendre… il va vous falloir faire attention à ce que vous dîtes, et à ce que vous faîtes. La manière dont vous vous comportez. Car nous ne sommes pas indiscrets. Mais nous ne sommes pas idiots non plus. Est-ce que vous me comprenez ?
-Ehm. Ouais, ouais. Je vais me surveiller. Message reçu.
Deux jours de navigation. Voilà tout ce qui les avait séparé de la ligne continentale. Ils auraient pu la rejoindre un peu plus vite, s'ils avaient tracé la ligne droite depuis leur départ jusqu'à leur destination. À la demande de Sigurd, pourtant, ils bifurquèrent à mi chemin, inclinant leur route vers le Nord quitte à perdre un peu de temps. C'était un mal nécessaire, à ses yeux, et même indispensable. Il connaissait les règles de navigation de base au sein de la flaque, et avait l'expérience des terribles obstacles que l'on pouvait y trouver. Mais ceci ne lui permettait aucunement de voyager dedans l'esprit tranquille.
Au contraire, passer par une voie souterraine qu'il avait déjà suivie, et dont il connaissait les étapes, était la base d'une expédition simple et sans accroche. Mais même ainsi, ils pourraient toujours s'échouer, faire de mauvaises rencontres, subir des avaries et se perdre par inadvertance.
Pour s'en convaincre, il suffisait d'observer attentivement l'énorme, la gigantesque masse minérale qui se dressait face à eux. Les falaises de l'unique continent du monde étaient comme un rempart de crocs rocailleux vers lequel ils avaient toutes leurs chances de s'écraser. En apparence. Car pour la fraction de marins initiés à la spéléologie de la flaque, les brèches qui émiettaient cette muraille étaient innombrables. Il s'agissait parfois d'interstices au sein desquels un navire était condamné à s'écraser. Ce pouvait être des voies sans issues, des impasses qui ne donnaient sur rien d'autre que la Mort. Les plus grands points d'accès, ceux qui prenaient la forme de colossales grottes débouchant à l'air libre, étaient souvent les mieux connues. Mais pas nécessairement les meilleures, ni les plus rapides, et encore moins les plus sûres.
On racontait qu'il y avait des signes dans la roche, un langage dans les appels d'air, des subtilités dans le fracas des vagues, qui permettaient aux spécialistes de déterminer à coup sûr les caractéristiques des tunnels dans lesquels on pouvait s'enfoncer. Sigurd, lui, n'avait jamais rien repéré de tel. Il n'avait pas eu le luxe de s'attarder sur les détails, tant les manoeuvres d'approche s'avéraient exigentes.
Et ce jour là ne ferait pas exception.
Ils n'étaient qu'une centaine de petits marins, montés à bord d'un unique vaisseau.
Et la quiétude respectueuse, le calme solennel qui les avait gagné à l'approche du continent n'avait plus lieu. Pour s'échanger les ordres, pour manoeuvrer dans le vacarme des récifs, les hommes s'écriaient tant bien que mal.
Ils y étaient. L'entrée du labyrinthe.
Maintenant, c'était au sort de prendre place.
Au contraire, passer par une voie souterraine qu'il avait déjà suivie, et dont il connaissait les étapes, était la base d'une expédition simple et sans accroche. Mais même ainsi, ils pourraient toujours s'échouer, faire de mauvaises rencontres, subir des avaries et se perdre par inadvertance.
Pour s'en convaincre, il suffisait d'observer attentivement l'énorme, la gigantesque masse minérale qui se dressait face à eux. Les falaises de l'unique continent du monde étaient comme un rempart de crocs rocailleux vers lequel ils avaient toutes leurs chances de s'écraser. En apparence. Car pour la fraction de marins initiés à la spéléologie de la flaque, les brèches qui émiettaient cette muraille étaient innombrables. Il s'agissait parfois d'interstices au sein desquels un navire était condamné à s'écraser. Ce pouvait être des voies sans issues, des impasses qui ne donnaient sur rien d'autre que la Mort. Les plus grands points d'accès, ceux qui prenaient la forme de colossales grottes débouchant à l'air libre, étaient souvent les mieux connues. Mais pas nécessairement les meilleures, ni les plus rapides, et encore moins les plus sûres.
On racontait qu'il y avait des signes dans la roche, un langage dans les appels d'air, des subtilités dans le fracas des vagues, qui permettaient aux spécialistes de déterminer à coup sûr les caractéristiques des tunnels dans lesquels on pouvait s'enfoncer. Sigurd, lui, n'avait jamais rien repéré de tel. Il n'avait pas eu le luxe de s'attarder sur les détails, tant les manoeuvres d'approche s'avéraient exigentes.
Et ce jour là ne ferait pas exception.
Ils n'étaient qu'une centaine de petits marins, montés à bord d'un unique vaisseau.
Et la quiétude respectueuse, le calme solennel qui les avait gagné à l'approche du continent n'avait plus lieu. Pour s'échanger les ordres, pour manoeuvrer dans le vacarme des récifs, les hommes s'écriaient tant bien que mal.
Ils y étaient. L'entrée du labyrinthe.
Maintenant, c'était au sort de prendre place.
La Flaque. C’était peut-être l’endroit du monde à la faune la moins fréquentable. En densité et en comptant les innombrables cadavres. Une voie privilégiée pour naviguer sur toutes les blues. Inutile de dire qui utilisait ces passages dérobés, profitant des chemins connus d’eux seuls. Ainsi, il n’était pas rare de faire route sans jamais croiser un autre navire. Et il valait mieux, tant les manœuvres étaient périlleuses. Seulement, aujourd’hui n‘était pas un de ces jours chastes. Juste une putain de journée poissarde.
En effet, il ne fallut pas plus de deux heures pour qu’on annonce un catastrophe à l’avant du navire. La Flaque était en général utilisée par des frégates rapides et quasi indétectables, seulement les lignes qui pouvaient laisser passer des navires importants n’étaient pas légion. Et lorsque deux navires imposants se faisaient face …
« Heu … Capitaine ! Navi’ à t’ibo’d ! »
« Crénom de … Comment veux-tu que je vois sous terre ?! Il ressemble à quoi ?! »
« J’sais pas Capitaine, il fait tout noir ! Mais j’ai vu d’la lumiè’ Capitaine ! »
Le pirate ronchonna, se passa la main sur le menton. De la lumière, dans la Flaque … bon, c’était certainement un navire. Autres pirates, marines … pire ? Il rouspéta de plus belle. De toute façon il n’y avait pas beaucoup de solution : fallait prendre une autre route ou s’arrêter et demander poliment qu’on vous laisse le passage.
« Heu … Ahem … L’expert de la Flaque … un … avis … sur … ce problème ? »
-Euh… bordel ?, s’exclama Sigurd.
-Comment ça, « bordel » ?
-D’où c’est qu’on a un navire à contresens !? Ca devrait pas !
-Comment ça ?
-PARCE QUE C’EST IMPOSSIBLE ICI !, glapit le jeune homme.
Quand tout allait bien, Sigurd avait les moyens de faire en sorte que tout aille pour le mieux. Mais en présence d’imprévus, c’était toujours bien différent. Et en l’occurrence, le navire d’en face avait suffit à plonger le jeune marin dans un état de panique incompréhensible. Mais pas pour tous. En plus de Dogaku, c’était bien un tiers de l’équipage qui s’affairait aux alentours avec une nervosité palpable.
Une atmosphère que le reste de l’équipage pouvait sentir sans réellement comprendre, ce qui créa un malaise de plus en plus pesant dans l’assemblée.
-A quoi jouez-vous exactement ?, insista Umschlagst. Qu’est-ce que vous voulez dire « impossible » ?
-Regardez autour de vous, réfléchissez un peu. Comment on avance, là, à votre avis ?
Delmudd ne répondit pas tout de suite. Ils étaient dans un large tunnel serpentin. Sombre, étroit, obscur… et donc ?
Eh bien, ils se trouvaient dans une caverne. Sigurd les connaissait. Certains de ces passages étaient perpétuellement traversés par d’énormes appels d’air, qui permettaient aux navires de voguer dans les veines de la flaque en laissant leurs voiles se faire porter par le vent. Dans d’autres, c’étaient les courants marins et souterrains qui imposaient aux navires de suivre tel ou tel itinéraire. Et c’était également en bonne partie pour ces raisons qu’il était dangereux de s’aventurer en aveugle dans la flaque. Sigurd avait choisi un de ces seconds passages pour cette portion de la traversée, pour s’épargner la peine d’avoir à composer avec des appels d’air difficilement prévisibles, et susceptibles de les décaler dangereusement.
A l’inverse, il était strictement impossible de naviguer en sens inverse dans ces couloirs. A moins de disposer de rameurs en quantité ou qualité particulière, ou de certains artifices plus élaborés… comme c’était possiblement le cas ici. Sigurd prit brièvement le temps de l’expliquer auprès des pirates d’Umschlagst.
-Mais dans ce cas… comment font-ils, eux, pour avancer à contrecourant ?, demanda le capitaine.
-C’est très précisément ce que j’aimerais savoir, ouais !
Heureusement, Nerassa et lui avaient fait en sorte que l’équipage dispose du matériel nécessaire pour avoir quelques options en cas de pépin. C’était une question d’expérience, et de prévoyance. Et en l’occurrence…
-APPELS DE PHARE ! FAÎTES LEUR DES PUTAINS D’APPEL DE PHARES ! DÎTES LEUR DE RALENTIR !
-SORTEZ LES GRAPPINS, ATTAQUEZ LES MURS, FREINEZ LE NAVIRE !
-RAMEURS EN SENS INVERSE, FAÎTES TOUT CE QU’ON PEUT POUR RALENTIR !
-PREPAREZ LES BARILS DE FIENTES, C’EST PTETRE UN MONSTRE MARIN DE TYPE POISSON-LOUPIOTTE FACON BAUDROIE GEANTE !
Les deux compères s’étaient chacun armés d’un porte-voix, et distribuaient leurs consignes en se complétant sans fausse note. Et pas une seule personne ne s’opposa à Sigurd lorsqu’il s’élança jusqu’à la proue du navire pour essayer de hurler autres de s’arrêter. Une collision de deux navires au sein de la Flaque, personne ne voulait de ça.
-EH LES MECS, ON A UN NAVIRE EN FACE DE VOUS ET… STOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOP !
-Comment ça, « bordel » ?
-D’où c’est qu’on a un navire à contresens !? Ca devrait pas !
-Comment ça ?
-PARCE QUE C’EST IMPOSSIBLE ICI !, glapit le jeune homme.
Quand tout allait bien, Sigurd avait les moyens de faire en sorte que tout aille pour le mieux. Mais en présence d’imprévus, c’était toujours bien différent. Et en l’occurrence, le navire d’en face avait suffit à plonger le jeune marin dans un état de panique incompréhensible. Mais pas pour tous. En plus de Dogaku, c’était bien un tiers de l’équipage qui s’affairait aux alentours avec une nervosité palpable.
Une atmosphère que le reste de l’équipage pouvait sentir sans réellement comprendre, ce qui créa un malaise de plus en plus pesant dans l’assemblée.
-A quoi jouez-vous exactement ?, insista Umschlagst. Qu’est-ce que vous voulez dire « impossible » ?
-Regardez autour de vous, réfléchissez un peu. Comment on avance, là, à votre avis ?
Delmudd ne répondit pas tout de suite. Ils étaient dans un large tunnel serpentin. Sombre, étroit, obscur… et donc ?
Eh bien, ils se trouvaient dans une caverne. Sigurd les connaissait. Certains de ces passages étaient perpétuellement traversés par d’énormes appels d’air, qui permettaient aux navires de voguer dans les veines de la flaque en laissant leurs voiles se faire porter par le vent. Dans d’autres, c’étaient les courants marins et souterrains qui imposaient aux navires de suivre tel ou tel itinéraire. Et c’était également en bonne partie pour ces raisons qu’il était dangereux de s’aventurer en aveugle dans la flaque. Sigurd avait choisi un de ces seconds passages pour cette portion de la traversée, pour s’épargner la peine d’avoir à composer avec des appels d’air difficilement prévisibles, et susceptibles de les décaler dangereusement.
A l’inverse, il était strictement impossible de naviguer en sens inverse dans ces couloirs. A moins de disposer de rameurs en quantité ou qualité particulière, ou de certains artifices plus élaborés… comme c’était possiblement le cas ici. Sigurd prit brièvement le temps de l’expliquer auprès des pirates d’Umschlagst.
-Mais dans ce cas… comment font-ils, eux, pour avancer à contrecourant ?, demanda le capitaine.
-C’est très précisément ce que j’aimerais savoir, ouais !
Heureusement, Nerassa et lui avaient fait en sorte que l’équipage dispose du matériel nécessaire pour avoir quelques options en cas de pépin. C’était une question d’expérience, et de prévoyance. Et en l’occurrence…
-APPELS DE PHARE ! FAÎTES LEUR DES PUTAINS D’APPEL DE PHARES ! DÎTES LEUR DE RALENTIR !
-SORTEZ LES GRAPPINS, ATTAQUEZ LES MURS, FREINEZ LE NAVIRE !
-RAMEURS EN SENS INVERSE, FAÎTES TOUT CE QU’ON PEUT POUR RALENTIR !
-PREPAREZ LES BARILS DE FIENTES, C’EST PTETRE UN MONSTRE MARIN DE TYPE POISSON-LOUPIOTTE FACON BAUDROIE GEANTE !
Les deux compères s’étaient chacun armés d’un porte-voix, et distribuaient leurs consignes en se complétant sans fausse note. Et pas une seule personne ne s’opposa à Sigurd lorsqu’il s’élança jusqu’à la proue du navire pour essayer de hurler autres de s’arrêter. Une collision de deux navires au sein de la Flaque, personne ne voulait de ça.
-EH LES MECS, ON A UN NAVIRE EN FACE DE VOUS ET… STOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOP !
« Je t’avais dit qu’on aurait dû accepter ce que Jonas demandait et monter dans son sous-marin. »
« Ouais … mais on aurait pas pu aller sur place dans les temps … »
« Toujours est-il qu’on a un problème de … taille en face. »
« Les ingé’ ont mis les turbines en route, on devrait éviter la collision. »
« Mpf. Et eux ? »
« Sais pas. Sont pas de la marine, ça se voit. Vais leur demander gentiment de faire demi-tour. »
« Mouais … s’ils ont pas de turbines … »
« Hors de question qu’on soit plus en retard que ça. Ou alors t’iras expliquer à Ombre pourquoi on s’est perdu dans la Flaque … »
« Il nous attend à Bo.. ?! »
« Non, non, c’était manière de parler. T’es vraiment obligé de hurler ? »
« … »
« Ah, c’est quoi ces lumières ? »
« Je dirais qu’ils font des appels … de lanterne. Foutredieu, mais ils avancent trop vite. »
« Merde. Va voir les ingé, active la sauce, et évite de nous faire rencontrer un mur. »
« Yep. Et toi, sois gentille avec eux. »
« Tu veux dire quoi par là ? J’suis pas gentille habituellement ? »
« Si, si. Une crème. »
Menteur. Il suffit de quelques enjambées et d’un saut carpé digne d’un ballet de Lausanne pour que la jeune femme atterrisse sans un bruit sur le navire qui leur faisait face. Saut de plus d’une vingtaine de mètres qui passa presque inaperçu dans la cohue générale. La donzelle se réceptionna avec grâce et tapota doucement l’épaule du Capitaine, semblant surgir de nulle part.
« Excusez-moi, mais vous avancez trop vite et il n’y a pas assez de place pour nos deux navires. Pourriez-vous faire demi-tour ? »
D’une nonchalance et d’un flegme sans borne, la femme venait de remettre son fusil sur son épaule. Elle était habillée d’une tunique qui lui couvrait le torse jusqu’au nombril et présentait un nombre hallucinant de poches sur sa ceinture. Elle se passa une main dans les cheveux et soutint le regard placide du Capitaine qui ne comprenait pas trop d’où elle venait. Tout le monde s’activait dans tous les sens pour éviter la collision fatidique et elle était là, comme si de rien n’était. Pire encore, elle semblait impatiente. Au même moment, le son d’une machinerie inquiétante se fit entendre, provenant de l’autre navire. Puis un bruit de fracas colossal. Les murs de la caverne s’ébranlèrent, tirant des cris d’angoisse à tout le monde.
« Me dites pas que … »
« Heu … mon chou à la crème ? Ahem … Hé hé, tu vas trouver ça bête mais … on a une voie d’eau ... Tu peux demander à nos invités s’ils peuvent … enfin tu vois … »
« T’es … sérieux ? »
« Oh, Nigel a confondu ‘puissance max’ et ‘en douceur’ … oh … je passe sous un tun… »
« On est déjà sous un tunnel, crétin … »
La donzelle se retourna vers le pirate.
« Z’êtes un pirate, hein ? Bon, pas l’habitude de traiter avec vous, mais vu les circonstances … on va avoir besoin d’un remorquage. *soupir* Et je vous suggère de nous l’offrir … »
« Ouais … mais on aurait pas pu aller sur place dans les temps … »
« Toujours est-il qu’on a un problème de … taille en face. »
« Les ingé’ ont mis les turbines en route, on devrait éviter la collision. »
« Mpf. Et eux ? »
« Sais pas. Sont pas de la marine, ça se voit. Vais leur demander gentiment de faire demi-tour. »
« Mouais … s’ils ont pas de turbines … »
« Hors de question qu’on soit plus en retard que ça. Ou alors t’iras expliquer à Ombre pourquoi on s’est perdu dans la Flaque … »
« Il nous attend à Bo.. ?! »
« Non, non, c’était manière de parler. T’es vraiment obligé de hurler ? »
« … »
« Ah, c’est quoi ces lumières ? »
« Je dirais qu’ils font des appels … de lanterne. Foutredieu, mais ils avancent trop vite. »
« Merde. Va voir les ingé, active la sauce, et évite de nous faire rencontrer un mur. »
« Yep. Et toi, sois gentille avec eux. »
« Tu veux dire quoi par là ? J’suis pas gentille habituellement ? »
« Si, si. Une crème. »
Menteur. Il suffit de quelques enjambées et d’un saut carpé digne d’un ballet de Lausanne pour que la jeune femme atterrisse sans un bruit sur le navire qui leur faisait face. Saut de plus d’une vingtaine de mètres qui passa presque inaperçu dans la cohue générale. La donzelle se réceptionna avec grâce et tapota doucement l’épaule du Capitaine, semblant surgir de nulle part.
« Excusez-moi, mais vous avancez trop vite et il n’y a pas assez de place pour nos deux navires. Pourriez-vous faire demi-tour ? »
D’une nonchalance et d’un flegme sans borne, la femme venait de remettre son fusil sur son épaule. Elle était habillée d’une tunique qui lui couvrait le torse jusqu’au nombril et présentait un nombre hallucinant de poches sur sa ceinture. Elle se passa une main dans les cheveux et soutint le regard placide du Capitaine qui ne comprenait pas trop d’où elle venait. Tout le monde s’activait dans tous les sens pour éviter la collision fatidique et elle était là, comme si de rien n’était. Pire encore, elle semblait impatiente. Au même moment, le son d’une machinerie inquiétante se fit entendre, provenant de l’autre navire. Puis un bruit de fracas colossal. Les murs de la caverne s’ébranlèrent, tirant des cris d’angoisse à tout le monde.
« Me dites pas que … »
*pulupulupulu*
« Heu … mon chou à la crème ? Ahem … Hé hé, tu vas trouver ça bête mais … on a une voie d’eau ... Tu peux demander à nos invités s’ils peuvent … enfin tu vois … »
« T’es … sérieux ? »
« Oh, Nigel a confondu ‘puissance max’ et ‘en douceur’ … oh … je passe sous un tun… »
*clac*
« On est déjà sous un tunnel, crétin … »
La donzelle se retourna vers le pirate.
« Z’êtes un pirate, hein ? Bon, pas l’habitude de traiter avec vous, mais vu les circonstances … on va avoir besoin d’un remorquage. *soupir* Et je vous suggère de nous l’offrir … »
-Meeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuh !
Un son inhabituel dans les cavernes de la flaque, sans aucun doute. Parmi les beuglements des officiers qui ordonnaient tant bien que mal aux autres marins de manœuvrer, c’était le mugissement d’une vache que l’on pouvait entendre en ce moment. Un animal qui n’avait rien à faire sur un navire, mais qui s’avérait être l’un des principaux lieutenants d’un des capitaines pirates ayant rejoint le Transnorth. On connaissait déjà Nerassa Roderik, à la tête de la petite bande du World Shredder, et Delmudd Umschlagzt, qui possédait le navire.
Restait à introduire Philomé Tombomery, le capitaine du troisième des équipages pirates à avoir pris place à bord de ce navire. Fils d’esclave, l’adolescent avait profité d’une insurrection dans ses champs agricoles pour faire évader toute sa famille, ainsi que tout leur campement. La grande majorité d’entre eux avait décidé de se laisser prendre en charge par la révolution, que ce soit pour la rejoindre, ou pour se faire transférer sur l’un des havres coupés de tout –et plus particulièrement de la marine mondiale- dont disposaient les gris.
Une poignée d’autres avaient préféré tenter leur chance sans leurs libérateurs, pour des raisons diverses. Et Philomé était de ceux là. Le jeune homme était devenu marin, avant de très vite se faire une place au sein de la piraterie. Un choix de vie répréhensible, mais qui lui avait indiscutablement profité. Cela faisait maintenant cinquante ans et trois cent soixante neuf coffres au trésor qu’il vivait de ça. Et qu’il en vivait très bien.
Outre ces années d’expérience, le capitaine Tombomery était devenu un combattant de premier plan, qui avait peaufiné son art au fil des décennies pour devenir ce qu’il était aujourd’hui. Un spécialiste du Cow-Combat, un art martial inspiré de la technique des matadors, à ceci près que l’homme et l’animal coopéraient lors du ballet mortel qui faisait d’eux d’aussi terribles combattants.
-Qu’est ce que c’est que ce bordel ? Prairie, qui c’est ce bordel !?
Cette voix était celle… d’un petit garçon. Qui se nommait Philomé Tombomery. Et qui, il y a trois mois de cela, avait rencontré un pirate ayant consommé un bien étrange fruit démoniaque. Un fruit conférant à son détenteur le pouvoir de manipuler librement l’âge de ses victimes… et qui avait servi à jouer un bien vilain tour à notre petit pirate.
L’animal touchait à sa cinquième année dans la piraterie, et incarnait la preuve qu’on n’avait pas besoin du fruit de l’humain, ni de la chance d’être Un canard parlant le patois pour réussir à vivre parmi la lie des océans sans être humain. Jusque là, Prairie s’était contentée de vaquer paisiblement à ses occupations sur le pont du Transnorth, surveillant l’activité des environs avec le flegme professionnel d’un contremaître militaire. Mais avec l’arrivée pratiquement inaperçue de la nouvelle arrivante, Prairie s’était précipitée en faisant preuve d’une agilité surprenante pour s’interposer entre Umschlagst et l’intruse révolutionnaire qui l’avait interpelé. Cette dernière ne réagit pas outre mesure, adressant simplement un regard curieux à l’animal qui n’avait pas grand-chose à faire ici.
Et tout autour, on ignorait encore très largement la scène, trop affairé à manœuvrer de manière à préserver le Transnorth. Ceci jusqu’à ce que, tout de même…
-Euuuuuh… il se passe quoi, ici ?, demanda Sigurd en repérant l’attroupement. Tiens, elle est avec nous, cette femme ?
-Pas vraiment, non. Et c’est précisément ça le problème, indiqua posément Delmudd en détaillant soigneusement du regard la nouvelle arrivante.
-Oh. Et donc ? Vous êtes du navire d’en face ?
-Hu hu. C’est bien ça.
-Vous nous avez foutu dans une merde noire, grommela Sigurd. Ou du moins, c’est pas passé loin. Coup de bol.
-Coup de bol ? Je ne crois pas, non…
La demoiselle développa son propos à nouveau. Et c’est ainsi que Sigurd eu rapidement la réponse à une question qu’il n’avait pas encore posé : comment diable avaient-ils fait pour remonter le courant ? Avec leur sous-marin et ses moteurs, voilà comment. Moteurs qui avaient vraisemblablement rendu l’âme, à en croire l’intruse.
Et là voilà qui exigeait d’eux un remorquage en bonne et due forme. Ce qui n’était pas de l’avis de qui que ce soit sur le navire ; on avait bien mieux que ça à faire.
-Désolé mais ça va pas être possible, nan, cracha le jeune Philomé en cajolant sa vache de la main. On est pressés, et dans le genre vraiment. C’est triste pour vous, mais va falloir que vous vous démerd…
-Nan, nan, tout doux, intervint Sigurd. Bien sûr qu’on peut vous remorquer… pour peu que votre truc soit pas trop lourd ou trop amoché et qu’on parvienne à stabiliser le navire en aval pour harnacher tout ça.
-On va certainement pas faire ça, objecta le pirate. Pas de temps à perdre.
-Que dalle, ça va rien changer concernant nos plans. Et puis eh, si des gens ont une avarie critique qui leur pourri la gueule, c’est normal de les aider, quoi. On les prend avec nous, on les remorque jusqu’à ce qu’on trouve un relai, idéalement. Ou au pire, un coin où on pourra accoster et les débarquer pour fassent leurs réparations peinards. J’connais pas de relai dans le coin, mais les zones où se poser, ça devrait finir par tomber assez vite si on fait gaffe.
-Un… relai ?, questionna le gamin.
-Euh… ça s’appelle des « villages pirates » dans la brochure touristique du coin. Jamais eu l’occasion –ni vraiment l’envie en fait- de me balader là dedans, mais ils ont de quoi faire quand faut se poser durablement, à priori. Ca vous irait ?, adressa Pad’Bol à ses compagnons, ainsi qu’à leur interlocutrice.
…
A la louche, 1K pour Tombomery / Prairie. Ne me les nuke pas, merci xD
Un son inhabituel dans les cavernes de la flaque, sans aucun doute. Parmi les beuglements des officiers qui ordonnaient tant bien que mal aux autres marins de manœuvrer, c’était le mugissement d’une vache que l’on pouvait entendre en ce moment. Un animal qui n’avait rien à faire sur un navire, mais qui s’avérait être l’un des principaux lieutenants d’un des capitaines pirates ayant rejoint le Transnorth. On connaissait déjà Nerassa Roderik, à la tête de la petite bande du World Shredder, et Delmudd Umschlagzt, qui possédait le navire.
Restait à introduire Philomé Tombomery, le capitaine du troisième des équipages pirates à avoir pris place à bord de ce navire. Fils d’esclave, l’adolescent avait profité d’une insurrection dans ses champs agricoles pour faire évader toute sa famille, ainsi que tout leur campement. La grande majorité d’entre eux avait décidé de se laisser prendre en charge par la révolution, que ce soit pour la rejoindre, ou pour se faire transférer sur l’un des havres coupés de tout –et plus particulièrement de la marine mondiale- dont disposaient les gris.
Une poignée d’autres avaient préféré tenter leur chance sans leurs libérateurs, pour des raisons diverses. Et Philomé était de ceux là. Le jeune homme était devenu marin, avant de très vite se faire une place au sein de la piraterie. Un choix de vie répréhensible, mais qui lui avait indiscutablement profité. Cela faisait maintenant cinquante ans et trois cent soixante neuf coffres au trésor qu’il vivait de ça. Et qu’il en vivait très bien.
Outre ces années d’expérience, le capitaine Tombomery était devenu un combattant de premier plan, qui avait peaufiné son art au fil des décennies pour devenir ce qu’il était aujourd’hui. Un spécialiste du Cow-Combat, un art martial inspiré de la technique des matadors, à ceci près que l’homme et l’animal coopéraient lors du ballet mortel qui faisait d’eux d’aussi terribles combattants.
-Qu’est ce que c’est que ce bordel ? Prairie, qui c’est ce bordel !?
Cette voix était celle… d’un petit garçon. Qui se nommait Philomé Tombomery. Et qui, il y a trois mois de cela, avait rencontré un pirate ayant consommé un bien étrange fruit démoniaque. Un fruit conférant à son détenteur le pouvoir de manipuler librement l’âge de ses victimes… et qui avait servi à jouer un bien vilain tour à notre petit pirate.
L’animal touchait à sa cinquième année dans la piraterie, et incarnait la preuve qu’on n’avait pas besoin du fruit de l’humain, ni de la chance d’être Un canard parlant le patois pour réussir à vivre parmi la lie des océans sans être humain. Jusque là, Prairie s’était contentée de vaquer paisiblement à ses occupations sur le pont du Transnorth, surveillant l’activité des environs avec le flegme professionnel d’un contremaître militaire. Mais avec l’arrivée pratiquement inaperçue de la nouvelle arrivante, Prairie s’était précipitée en faisant preuve d’une agilité surprenante pour s’interposer entre Umschlagst et l’intruse révolutionnaire qui l’avait interpelé. Cette dernière ne réagit pas outre mesure, adressant simplement un regard curieux à l’animal qui n’avait pas grand-chose à faire ici.
Et tout autour, on ignorait encore très largement la scène, trop affairé à manœuvrer de manière à préserver le Transnorth. Ceci jusqu’à ce que, tout de même…
-Euuuuuh… il se passe quoi, ici ?, demanda Sigurd en repérant l’attroupement. Tiens, elle est avec nous, cette femme ?
-Pas vraiment, non. Et c’est précisément ça le problème, indiqua posément Delmudd en détaillant soigneusement du regard la nouvelle arrivante.
-Oh. Et donc ? Vous êtes du navire d’en face ?
-Hu hu. C’est bien ça.
-Vous nous avez foutu dans une merde noire, grommela Sigurd. Ou du moins, c’est pas passé loin. Coup de bol.
-Coup de bol ? Je ne crois pas, non…
La demoiselle développa son propos à nouveau. Et c’est ainsi que Sigurd eu rapidement la réponse à une question qu’il n’avait pas encore posé : comment diable avaient-ils fait pour remonter le courant ? Avec leur sous-marin et ses moteurs, voilà comment. Moteurs qui avaient vraisemblablement rendu l’âme, à en croire l’intruse.
Et là voilà qui exigeait d’eux un remorquage en bonne et due forme. Ce qui n’était pas de l’avis de qui que ce soit sur le navire ; on avait bien mieux que ça à faire.
-Désolé mais ça va pas être possible, nan, cracha le jeune Philomé en cajolant sa vache de la main. On est pressés, et dans le genre vraiment. C’est triste pour vous, mais va falloir que vous vous démerd…
-Nan, nan, tout doux, intervint Sigurd. Bien sûr qu’on peut vous remorquer… pour peu que votre truc soit pas trop lourd ou trop amoché et qu’on parvienne à stabiliser le navire en aval pour harnacher tout ça.
-On va certainement pas faire ça, objecta le pirate. Pas de temps à perdre.
-Que dalle, ça va rien changer concernant nos plans. Et puis eh, si des gens ont une avarie critique qui leur pourri la gueule, c’est normal de les aider, quoi. On les prend avec nous, on les remorque jusqu’à ce qu’on trouve un relai, idéalement. Ou au pire, un coin où on pourra accoster et les débarquer pour fassent leurs réparations peinards. J’connais pas de relai dans le coin, mais les zones où se poser, ça devrait finir par tomber assez vite si on fait gaffe.
-Un… relai ?, questionna le gamin.
-Euh… ça s’appelle des « villages pirates » dans la brochure touristique du coin. Jamais eu l’occasion –ni vraiment l’envie en fait- de me balader là dedans, mais ils ont de quoi faire quand faut se poser durablement, à priori. Ca vous irait ?, adressa Pad’Bol à ses compagnons, ainsi qu’à leur interlocutrice.
…
A la louche, 1K pour Tombomery / Prairie. Ne me les nuke pas, merci xD
[hrp : mais pourquoi les tuer ? les révos sont des gentils, Amiral Sigurd ! :'(]
La donzelle laissa quelques secondes s’égrener, jetant un regard noir au pirate. Regard qui s’adoucit en s’arrêtant sur Sigurd. Elle acquiesça avec un nouveau soupir, lâchant le pommeau de son épée. Réflexe dur à contenir, elle semblait être une combattante aguerrie. Une combattante aguerrie et lasse, si lasse … Il faudrait négocier et elle n’avait pas le temps.
« Sans vouloir insister, nous sommes aussi très pressés. Le sort de … hum … un endroit repose sur nos épaules. On ne peut se permettre de perdre trop de temps … Nous devons aller sur North Blue, et vous ? Je vous paierai pour le détour si besoin … mais vu les circonstances, ce n’est pas trop négociable. » fit-elle, avançant dans la lumière, laissant mieux voir son jolis minois à la lueur d’une lanterne.
Visiblement, elle était connue car la couleur du visage du Capitaine changea de couleur. Passant du rouge au bleu puis au jaune et, enfin, au gris. Elle remonta son fusil sur son épaule et glissa son regard sur le jeune homme qui avait été aimable dès le premier abord, et c’était bien le seul.
« Quel est ton nom, mon gars ? » lâcha la jeune femme, se fondant dans un rôle de vétéran de guerre qui lui avait servi bien souvent.
« Moi, c’est Raven. Je pense que vous venez à peu près de percuter le problème qu’on a ici … j’ai une mission très importante à accomplir et mes ratés de compagnons ont réussi à s’écraser dans la falaise. Si vous ne pouvez pas ramener le sous-marin, serait-il simplement possible que vous nous preniez en passagers ? Je ne dis pas que des pirates ont une mission moins importante que la mienne, mais je le pense très fortement. » continua-t-elle tandis qu’Umschlagszt refermait lentement la bouche.
Difficile de croire que ce petit bout de femme, garçon manqué avoisinant le mètre soixante, pouvait avoir une prime aussi élevée. Mais lorsque le CV qu’on présentait était aussi fourni que le sien, on avait pas l’habitude de se voir refuser beaucoup de choses … Même quand on était révolutionnaire.
« L’endroit exact ? Hm. Vous n’aurez qu’à suivre mon cap, mais si et uniquement si vous ne pouvez pas remorquer le sous-marin à un endroit où il peut être rapidement réparé. Pas un de ces ‘villages pirates’, donc. Merci beaucoup, les cabines sont par-là ? » lâcha-t-elle, comme si l’affaire était déjà entendue.
« Mais … je … elle est partie … » grommela le Capitaine, tout penaud.
« Pas d’bol ? » glissa Umschlagszt, visiblement dépassé par la situation.
Après tout, c’était toi qui avait eu la sainte idée de pas envoyer la donzelle se faire refaire une permanente, et chez les pirates, en matière de manières il y avait tout à refaire.
La donzelle laissa quelques secondes s’égrener, jetant un regard noir au pirate. Regard qui s’adoucit en s’arrêtant sur Sigurd. Elle acquiesça avec un nouveau soupir, lâchant le pommeau de son épée. Réflexe dur à contenir, elle semblait être une combattante aguerrie. Une combattante aguerrie et lasse, si lasse … Il faudrait négocier et elle n’avait pas le temps.
« Sans vouloir insister, nous sommes aussi très pressés. Le sort de … hum … un endroit repose sur nos épaules. On ne peut se permettre de perdre trop de temps … Nous devons aller sur North Blue, et vous ? Je vous paierai pour le détour si besoin … mais vu les circonstances, ce n’est pas trop négociable. » fit-elle, avançant dans la lumière, laissant mieux voir son jolis minois à la lueur d’une lanterne.
Visiblement, elle était connue car la couleur du visage du Capitaine changea de couleur. Passant du rouge au bleu puis au jaune et, enfin, au gris. Elle remonta son fusil sur son épaule et glissa son regard sur le jeune homme qui avait été aimable dès le premier abord, et c’était bien le seul.
« Quel est ton nom, mon gars ? » lâcha la jeune femme, se fondant dans un rôle de vétéran de guerre qui lui avait servi bien souvent.
« Moi, c’est Raven. Je pense que vous venez à peu près de percuter le problème qu’on a ici … j’ai une mission très importante à accomplir et mes ratés de compagnons ont réussi à s’écraser dans la falaise. Si vous ne pouvez pas ramener le sous-marin, serait-il simplement possible que vous nous preniez en passagers ? Je ne dis pas que des pirates ont une mission moins importante que la mienne, mais je le pense très fortement. » continua-t-elle tandis qu’Umschlagszt refermait lentement la bouche.
Difficile de croire que ce petit bout de femme, garçon manqué avoisinant le mètre soixante, pouvait avoir une prime aussi élevée. Mais lorsque le CV qu’on présentait était aussi fourni que le sien, on avait pas l’habitude de se voir refuser beaucoup de choses … Même quand on était révolutionnaire.
« L’endroit exact ? Hm. Vous n’aurez qu’à suivre mon cap, mais si et uniquement si vous ne pouvez pas remorquer le sous-marin à un endroit où il peut être rapidement réparé. Pas un de ces ‘villages pirates’, donc. Merci beaucoup, les cabines sont par-là ? » lâcha-t-elle, comme si l’affaire était déjà entendue.
« Mais … je … elle est partie … » grommela le Capitaine, tout penaud.
« Pas d’bol ? » glissa Umschlagszt, visiblement dépassé par la situation.
Après tout, c’était toi qui avait eu la sainte idée de pas envoyer la donzelle se faire refaire une permanente, et chez les pirates, en matière de manières il y avait tout à refaire.
Du point de vue d’un civil, il n’y a pas de gentils dans le monde, seulement des intérêts et des ennuis potentiels !
-Je crois qu’elle se sent pas, la cocotte, grommela le matador.
-Je crois plutôt qu’elle se sent chez elle, en fait, corrigea la borgne.
-Meuh nan, pas du tout, voyons. « Sans vouloir insister » ? Elle nous balance le truc dans le gosier et on est censés dire Amen en s’agenouillant, s’assombrit Sigurd.
-Dîtes pas ça trop fort, elle a l’air de bien vous aimer. Ca serait bête de perdre des points comme ça.
-Bien m’aimer ?
-Question de regards, indiqua simplement Philomé. D’attitude et de réaction. Elle était plutôt expressive. Et vous avez pris le rôle du gentil mec compréhensif. Bravo. Maintenant ça va être à moi de lui faire comprendre qu’à moins qu’elle ait soixante millions de berries à nous refourguer illico, ainsi que la tête de Brackham passée au fer, elle peut crever si elle croit qu’on va lui obéir comme des caniches.
-Brackham ?
-L’enf#&@%*$ ! de s@&=%$@! de misérable petit @#&%$£*§*% !!! qui a voulu me devancer pour mon coffre au trésor. Sans lui, on en serait jamais là.
-Oh. Je vois.
L’activité aux alentours d’étaient calmées, maintenant que la situation était globalement sous contrôle. Le navire avait été immobilisé et stabilisé, de sorte que l’on aurait pu rester ainsi éternellement. Les manœuvres n’avaient plus à s’ajuster perpétuellement pour s’adapter les unes aux autres, ce qui permettait à leurs officiers d’encadrement de se réunir.
Et au-delà de ceux-ci, c’était une frange très importante de l’équipage qui écoutait avec grand intérêt ce que se disaient leurs représentants respectifs.
-Pourquoi elle est partie vers les cabines, d’abord ?
-Toilettes ?, suggéra Nerassa.
-Pour nous laisser le temps de nous mettre d’accord avec de reprendre les négociations maintenant qu’elle nous a fait son offre, avança Umschlagst, lucide. Et, ou, pour vérifier par elle-même quelle était notre capacité d’hébergement excédentaire, puisque nous aurons vraisemblablement un quatrième équipage à accueillir.
-Comment ça, nous aurons !? Il est hors de question que l’on perde du temps à…
-A accueillir le temps que nous puissions les déposer jusqu’à un endroit convenable, insista le capitaine du Transnorth sans hausser le ton.
-C’est ce que j’ai proposé, ça, non ?
-Oui. Personnellement, j’ai beaucoup aimé votre idée, Monsieur Pad’Bol. Les mener jusqu’à un endroit où ils seraient capables de se reprendre en main. C’est la solution la plus… idéale… compte tenu de leur avarie et de nos propres impératifs. En espérant en trouver un sur notre chemin… ou peut être que eux sauraient le faire ?
-Ben le premier truc très rigolo qu’on va pouvoir lui dire, sourit Nerassa, c’est qu’on ne va pas pouvoir l’emmener dans la direction qu’elle voudrait puisqu’on a pas de turbines pour aller à contrecourant, parce que les sous-marins suréquipés c’était un tantinet au-delà de notre budget initial. Donc on va devoir s’enfoncer plus en avant dans la flaque, et éventuellement faire demi-tour quand ça sera possible… aucune idée de quand ni de où ni dans quel sens.
-Laissez tomber. Ca ne marchera pas, votre truc, signala Tombomery d’un ton brusque. Parce que pour faire ça, ça suppose de pouvoir réparer leur moyen de transport. Et pour le réparer, faudrait déjà pouvoir le déplacer jusqu’à votre joyeux campement de pirates. Et à moins d’une très bonne surprise qui arrangerait tout le monde, leur machin était assez massif pour qu’on manque de se crasher dessus, non ?
-Oh merde. Sig’ ?
-J’crois qu’il a raison, miss. Mais appelle moi Pad’Bol, tu veux ?
-Qu’est-ce que vous dîtes, vous deux ?
-Beeen… que c’est une excellente question, oui. Est-ce qu’on a de quoi tracter leur bidule. Peut être. Dépend de ce qu’ils entendent par sous-marin. Si c’est un truc vraiment gros, ça risque pas, ouais.
-Et dans ce cas ?
-Dans ce cas, elle avait l’air de dire qu’elle voulait qu’on l’emmène nous même jusqu’à là où il faut… et qu’elle pourrait nous dédommager.
-Et est-ce que nous avons le choix ?
-Ca c’est une autre excellente question à laquelle j’aime pas trop la réponse, grommela Dogaku. Elle avait pas l’air de dire ça.
Léger silence. En bonne partie parce que les intentions révolutionnaires étaient encore incertaines, mais aussi parce que l’on attendait la réaction d’une personne en particulier. Le commanditaire, Philomé Tombomery, bien sûr. Qui comprit bien que la majorité des regards étaient braqués sur lui. Pour autant, le jeune soixantenaire ne se pressa pas pour répondre à cette éventualité qui ne lui plaisait pas.
Jusqu’à ce que, finalement…
-Soixante millions.
La voix ferme, l’air décidé, le pirate marqua tout de même une pause avant de reprendre :
- Attendez, nan, je dis des conneries. Cent millions. Cent millions, ouais. Ca serait un bon prix pour aider l’une des pires têtes de la révo’ à accomplir un truc en urgence.
-Cent millions ? Vous avez pété les plombs ?
-Mmmh… ça commence à me plaire, tout ça.
-Nera, pitié. Raisonnable.
-Je pense aussi que c’est une demande… excessive, nuança Umschlagst.
-Carrément que c’est excessif, ouais !
-Et pourquoi pas ?, argumenta la borgne. Ils nous demandent d’abandonner une carte au trésor pour les aider. Et une carte au trésor, ça peut taper de quatre-vingt à cent-dix millions de berries, mine de rien !
-Qu’est-ce qui te rend aussi catégorique sur le montant ?, s’étonna Dogaku.
-Carte Kingin, on en est à la cinquième étape sur sept même si t’étais pas là. Et j’connais les statistiques de pirates, on a pas mal d’oreilles qui traînent dans les tavernes, et c’est clairement pas le genre de trucs qui sont gardés secrets. Dès que les ressources d’un pirate augmentent, la première chose qu’il fait c’est de le crier au monde entier en s’offrant un train de vie de luxe pour bien montrer qu’il a réussi.
-Oh. ‘Kay.
-Conclusion : on lui dit toute la vérité, on lui expose notre situation, et… je rigole trop si elle se met à penser que notre histoire de coffre au trésor, c’est du flanc.
-D’un autre coté, qu’est-ce qu’on serait venus foutre dans la flaque, sinon ?, grinça le gamin.
-Dépend, ricana Sigurd. J’ai jamais réussi à comprendre ce qui poussait les équipages pirates ou marines un tant soit peu bien portants à aller faire les cons sur la route de tous les périls et même jusqu’au nouveau monde alors qu’ils étaient bien là où z’étaient, et pourtant…
-Clair que vu comme ça...
Cent millions. Une somme intéressante. Ils auraient à la partager entre trois équipages, ce qui resterait un montant très confortable pour chacun d’entre eux.
Mais qui relevait très probablement du rêve, comme le signalèrent abondamment les plus raisonnables du lot.
-Et puis, c’est un peu idiot, objecta un officier. C’est pas vraiment comme si on avait le choix dans toute l’affaire. Je veux dire, c’est RAVEN qu’on a en face, et…
-Bien sûr, qu’on a le choix !, riposta Nerassa. Vous êtes fous ? On est plus d’une centaine à bord et notre navire est en parfait état ! C’est EUX qui ont besoin de NOUS, merci. Alors c’est complètement inutile de vous laisser aveugler par la ribambelle de zéros qui peut traîner sur son avis de recherche, parce que sérieusement… sérieusement… sérieusement… oh mais attendez… ou alooors… au pire elle nous laisse la livrer à la marine, ça nous dédommagera largement pour la gêne occasionnée, ouais, ricana la pirate. Avec une prime aussi irréelle, j’pense que la marine fera une exception et nous filera quand même les sous même si on a pas la licence, nwehehehehehehehe.
-J’ai une licence, signala Tombomery.
-Gneeh ?
-On est malins ou on l’est pas, dans la vie, petite.
-Venant d’un enfant de huit ans, chais pas comment je dois le prendre, ça.
-Trèèèèèèès malin, bravo.
-Vous avez fini avec vos conneries, oui ?
-Bref. Ce que je voulais dire, c’est que quoi que vous fassiez, vous ne devez pas avoir l’air intimidés et vous devez garder à l’esprit que l’on est en situation de force. Et encore mieux que ça, si vous pouviez vraiment arrêter d’avoir peur, ça serait pas plus mal. C’est qui le capitaine de ce navire, déjà ?
-Oui, oui, plia Umschlagst.
-Et c’est le coffre au trésor de qui qu’on va aller chercher ?
-Tsss.
-Et c’est qui la négociatrice à qui on loue habituellement les services ? Allez, faîtes ce que je vous dis.
-Ouais, ouais, d’accord…
-Bien. Alors vous vous comportez comme des capitaines pirates et vous venez avec moi pour négocier avec votre miss de la révolution à 200 millions de berries, allez zou. Encore que… nan. Vous trois, s’il vous plait. Dîtes lui qu’on l’attend sur le pont, de venir quand elle sera prête.
-Et surveillez-la en attendant, rajouta Tombomery. Pare que tant qu’à faire, hein.
-Je crois qu’elle se sent pas, la cocotte, grommela le matador.
-Je crois plutôt qu’elle se sent chez elle, en fait, corrigea la borgne.
-Meuh nan, pas du tout, voyons. « Sans vouloir insister » ? Elle nous balance le truc dans le gosier et on est censés dire Amen en s’agenouillant, s’assombrit Sigurd.
-Dîtes pas ça trop fort, elle a l’air de bien vous aimer. Ca serait bête de perdre des points comme ça.
-Bien m’aimer ?
-Question de regards, indiqua simplement Philomé. D’attitude et de réaction. Elle était plutôt expressive. Et vous avez pris le rôle du gentil mec compréhensif. Bravo. Maintenant ça va être à moi de lui faire comprendre qu’à moins qu’elle ait soixante millions de berries à nous refourguer illico, ainsi que la tête de Brackham passée au fer, elle peut crever si elle croit qu’on va lui obéir comme des caniches.
-Brackham ?
-L’enf#&@%*$ ! de s@&=%$@! de misérable petit @#&%$£*§*% !!! qui a voulu me devancer pour mon coffre au trésor. Sans lui, on en serait jamais là.
-Oh. Je vois.
L’activité aux alentours d’étaient calmées, maintenant que la situation était globalement sous contrôle. Le navire avait été immobilisé et stabilisé, de sorte que l’on aurait pu rester ainsi éternellement. Les manœuvres n’avaient plus à s’ajuster perpétuellement pour s’adapter les unes aux autres, ce qui permettait à leurs officiers d’encadrement de se réunir.
Et au-delà de ceux-ci, c’était une frange très importante de l’équipage qui écoutait avec grand intérêt ce que se disaient leurs représentants respectifs.
-Pourquoi elle est partie vers les cabines, d’abord ?
-Toilettes ?, suggéra Nerassa.
-Pour nous laisser le temps de nous mettre d’accord avec de reprendre les négociations maintenant qu’elle nous a fait son offre, avança Umschlagst, lucide. Et, ou, pour vérifier par elle-même quelle était notre capacité d’hébergement excédentaire, puisque nous aurons vraisemblablement un quatrième équipage à accueillir.
-Comment ça, nous aurons !? Il est hors de question que l’on perde du temps à…
-A accueillir le temps que nous puissions les déposer jusqu’à un endroit convenable, insista le capitaine du Transnorth sans hausser le ton.
-C’est ce que j’ai proposé, ça, non ?
-Oui. Personnellement, j’ai beaucoup aimé votre idée, Monsieur Pad’Bol. Les mener jusqu’à un endroit où ils seraient capables de se reprendre en main. C’est la solution la plus… idéale… compte tenu de leur avarie et de nos propres impératifs. En espérant en trouver un sur notre chemin… ou peut être que eux sauraient le faire ?
-Ben le premier truc très rigolo qu’on va pouvoir lui dire, sourit Nerassa, c’est qu’on ne va pas pouvoir l’emmener dans la direction qu’elle voudrait puisqu’on a pas de turbines pour aller à contrecourant, parce que les sous-marins suréquipés c’était un tantinet au-delà de notre budget initial. Donc on va devoir s’enfoncer plus en avant dans la flaque, et éventuellement faire demi-tour quand ça sera possible… aucune idée de quand ni de où ni dans quel sens.
-Laissez tomber. Ca ne marchera pas, votre truc, signala Tombomery d’un ton brusque. Parce que pour faire ça, ça suppose de pouvoir réparer leur moyen de transport. Et pour le réparer, faudrait déjà pouvoir le déplacer jusqu’à votre joyeux campement de pirates. Et à moins d’une très bonne surprise qui arrangerait tout le monde, leur machin était assez massif pour qu’on manque de se crasher dessus, non ?
-Oh merde. Sig’ ?
-J’crois qu’il a raison, miss. Mais appelle moi Pad’Bol, tu veux ?
-Qu’est-ce que vous dîtes, vous deux ?
-Beeen… que c’est une excellente question, oui. Est-ce qu’on a de quoi tracter leur bidule. Peut être. Dépend de ce qu’ils entendent par sous-marin. Si c’est un truc vraiment gros, ça risque pas, ouais.
-Et dans ce cas ?
-Dans ce cas, elle avait l’air de dire qu’elle voulait qu’on l’emmène nous même jusqu’à là où il faut… et qu’elle pourrait nous dédommager.
-Et est-ce que nous avons le choix ?
-Ca c’est une autre excellente question à laquelle j’aime pas trop la réponse, grommela Dogaku. Elle avait pas l’air de dire ça.
Léger silence. En bonne partie parce que les intentions révolutionnaires étaient encore incertaines, mais aussi parce que l’on attendait la réaction d’une personne en particulier. Le commanditaire, Philomé Tombomery, bien sûr. Qui comprit bien que la majorité des regards étaient braqués sur lui. Pour autant, le jeune soixantenaire ne se pressa pas pour répondre à cette éventualité qui ne lui plaisait pas.
Jusqu’à ce que, finalement…
-Soixante millions.
La voix ferme, l’air décidé, le pirate marqua tout de même une pause avant de reprendre :
- Attendez, nan, je dis des conneries. Cent millions. Cent millions, ouais. Ca serait un bon prix pour aider l’une des pires têtes de la révo’ à accomplir un truc en urgence.
-Cent millions ? Vous avez pété les plombs ?
-Mmmh… ça commence à me plaire, tout ça.
-Nera, pitié. Raisonnable.
-Je pense aussi que c’est une demande… excessive, nuança Umschlagst.
-Carrément que c’est excessif, ouais !
-Et pourquoi pas ?, argumenta la borgne. Ils nous demandent d’abandonner une carte au trésor pour les aider. Et une carte au trésor, ça peut taper de quatre-vingt à cent-dix millions de berries, mine de rien !
-Qu’est-ce qui te rend aussi catégorique sur le montant ?, s’étonna Dogaku.
-Carte Kingin, on en est à la cinquième étape sur sept même si t’étais pas là. Et j’connais les statistiques de pirates, on a pas mal d’oreilles qui traînent dans les tavernes, et c’est clairement pas le genre de trucs qui sont gardés secrets. Dès que les ressources d’un pirate augmentent, la première chose qu’il fait c’est de le crier au monde entier en s’offrant un train de vie de luxe pour bien montrer qu’il a réussi.
-Oh. ‘Kay.
-Conclusion : on lui dit toute la vérité, on lui expose notre situation, et… je rigole trop si elle se met à penser que notre histoire de coffre au trésor, c’est du flanc.
-D’un autre coté, qu’est-ce qu’on serait venus foutre dans la flaque, sinon ?, grinça le gamin.
-Dépend, ricana Sigurd. J’ai jamais réussi à comprendre ce qui poussait les équipages pirates ou marines un tant soit peu bien portants à aller faire les cons sur la route de tous les périls et même jusqu’au nouveau monde alors qu’ils étaient bien là où z’étaient, et pourtant…
-Clair que vu comme ça...
Cent millions. Une somme intéressante. Ils auraient à la partager entre trois équipages, ce qui resterait un montant très confortable pour chacun d’entre eux.
Mais qui relevait très probablement du rêve, comme le signalèrent abondamment les plus raisonnables du lot.
-Et puis, c’est un peu idiot, objecta un officier. C’est pas vraiment comme si on avait le choix dans toute l’affaire. Je veux dire, c’est RAVEN qu’on a en face, et…
-Bien sûr, qu’on a le choix !, riposta Nerassa. Vous êtes fous ? On est plus d’une centaine à bord et notre navire est en parfait état ! C’est EUX qui ont besoin de NOUS, merci. Alors c’est complètement inutile de vous laisser aveugler par la ribambelle de zéros qui peut traîner sur son avis de recherche, parce que sérieusement… sérieusement… sérieusement… oh mais attendez… ou alooors… au pire elle nous laisse la livrer à la marine, ça nous dédommagera largement pour la gêne occasionnée, ouais, ricana la pirate. Avec une prime aussi irréelle, j’pense que la marine fera une exception et nous filera quand même les sous même si on a pas la licence, nwehehehehehehehe.
-J’ai une licence, signala Tombomery.
-Gneeh ?
-On est malins ou on l’est pas, dans la vie, petite.
-Venant d’un enfant de huit ans, chais pas comment je dois le prendre, ça.
-Trèèèèèèès malin, bravo.
-Vous avez fini avec vos conneries, oui ?
-Bref. Ce que je voulais dire, c’est que quoi que vous fassiez, vous ne devez pas avoir l’air intimidés et vous devez garder à l’esprit que l’on est en situation de force. Et encore mieux que ça, si vous pouviez vraiment arrêter d’avoir peur, ça serait pas plus mal. C’est qui le capitaine de ce navire, déjà ?
-Oui, oui, plia Umschlagst.
-Et c’est le coffre au trésor de qui qu’on va aller chercher ?
-Tsss.
-Et c’est qui la négociatrice à qui on loue habituellement les services ? Allez, faîtes ce que je vous dis.
-Ouais, ouais, d’accord…
-Bien. Alors vous vous comportez comme des capitaines pirates et vous venez avec moi pour négocier avec votre miss de la révolution à 200 millions de berries, allez zou. Encore que… nan. Vous trois, s’il vous plait. Dîtes lui qu’on l’attend sur le pont, de venir quand elle sera prête.
-Et surveillez-la en attendant, rajouta Tombomery. Pare que tant qu’à faire, hein.
Elle était simplement assise là, non loin des cabines à lustrer son arme. D’un œil impatient, elle demanda simplement s’ils avaient fini puis elle suivit sans maugréer plus que d’habitude. Elle repassa son arme en bandoulière puis suivi jusqu’au pont supérieur. Raven avait visiblement pris le temps de contacter l’équipage du sous-marin car des turbines se mirent à vrombir dans le silence de la Flaque. Une légère lumière vacillante s’échappa des profondeurs, au loin.
« Cent millions ? » s’étonna-t-elle en arquant un sourcil.
On pouvait sentir plein de choses dans sa voix. L’amusement, la colère, l’indignation. Et ce n’était pas fini. Elle passa ses pouces à sa ceinture et secoua la tête.
« Faut pas déconner. Dix, et c’est plié. Parce que jusqu’à preuve du contraire, on aurait pu dégager le passage à coup de torpille depuis longtemps, sauf qu’on ne l’a pas fait. » négocia-t-elle avec une lueur mauvaise dans le regard.
Bon. C’était la faute de leur crétin de navigateur, mais ça elle n’était pas obligée de le dire. Mais elle avait l'ouïe fine. Très fine. D'aucuns appelaient ça "mantra" d'ailleurs.
« Dix pour l’air libre et une île, la première qui passe. Vous aurez pas de quoi nous héberger longtemps … J’ai vérifié. » grogna la donzelle, plantant son regard dans celui qui faisait office de Capitaine.
Pour appuyer son argument, elle croisa les bras.
« Ou alors on peut tenter de forcer le passage mais on risquerait certainement de vous créer une voie d’eau. Nous avons besoin d’un endroit où nous pouvons faire surface et nous amarrer. Et tranquillement, pas avec une marmaille grouillante de piratillons. Donc dix millions, c’est largement assez pour vous. Vous n’êtes pas sans savoir le sort qu’on réserve aux pirates en temps normal, non ? » continua-t-il, lourde de sous-entendus.
Et bien oui, ils étaient des révolutionnaires tout de même. Révolutionnaires et pirates, ça s’entendait pas très bien. Donc dès qu’on touchait à l’or du peuple, il était normal de montrer les crocs. Dix millions, c’était peu payé, mais c’était toujours ça de pris et c’était peu ou proue la teneur de son argument. Ajoutant à cela qu’elle était pressée et excédée, il y avait un bon mélange.
« J’m’en vais buter cette chierie de [################] de ce pas, putain de bordel de pro%+)@=§$%*) !!!!! »
Tel était globalement le fond de la pensée de Philomé, et ce qu’on pouvait assez facilement lire sur son visage. Mais juste avant que la vapeur ne lui sorte par les oreilles et qu’il ne se mette à hurler à sa vache et à son équipage de maîtriser l’intruse, Roderik décida de négocier une dernière fois. Si les choses passaient proprement, tant mieux. Et dans le cas contraire, tout dépendrait de si les révolutionnaires avaient vraiment les moyens de mettre leur menace à exécution. Elle n’y croyait pas le moins du monde, mais ne s’en inquiétait pas outre mesure. Ils avaient encore des cartes à jouer.
«-Eeeeerh, on va très vite tourner en rond avec cette crasse, grommela Nerassa. Je parle de l’accident, pas de vous, bien sûr. Même si vous comptez bien vous incruster, semblerait, sourit-elle en s’amusant. Mais bon, on va vous expliquer.
Sur le principe, laisser des gens perdus sans rien au beau milieu de nul part c’est clairement pas nos habitudes, même quand on est pressés. Et même quand on est en pleine dépêche pour aller déterrer un gros pactole avant une autre bande de sympathiques pirates qui se sont dit que de couler le navire de notre partenaire pour aller faire les courses sans lui, ça serait une chouette idée. Vous avez déjà essayé d’enterrer ou de déterrer des trésors ? J’vous jure que c’est une vraie folie. Perso j’adore être pirate rien que pour ça. Rien que l’odeur et la texture du bois frotté contre le sable chaud, c’est vraiment…
-Nera’, c’est peut être pas le moment ?
-Oh, oui… mais quand même, ça aide à bien poser de quel genre on est. Dooonc… y’a quand même des formes et des limites à bien tenir pour que ça marche. Parce que de une les menaces c’est bien gentil, mais… non, c’est pas bien sport. Faire comme à la maison ça va un temps aussi, mais ça lasse assez vite. On ne fonctionne pas comme ça. On est plutôt du genre sympas. Mais vous imaginez bien qu’on ne va pas abandonner notre trésor seulement pour vos beaux yeux ou votre affaire dont on ne sait rien, d’où le dédommagement. Et dix millions ne feront clairement pas l’affaire ; pour l’idée, considérez que nous partons sur une cagnotte à soixante millions de pesant d’or grand minimum à déterrer. Ca l’aurait peut être fait pour un gentil petit mercenaire isolé, mais là on est trois équipages de réunis sur notre coup. Cent personnes, à peu de choses près. Ce qui donnerait cent mille berries pour chacun d’entre nous, soit un train de vie standard si vous voyez de quoi je parle. Encore que les révos vivent sur le dos de l’habitant, donc c’est un peu particulier, je pense. Mais votre somme ne couvrirait pas du tout nos frais pour un voyage au sein de la flaque. Vous savez comment ça marche, ici. Pour pas avoir de problème, il faut de la préparation et du matériel en quantité. Et il n’y a aucune raison qu’on se contente de tellement peu alors qu’on est en route pour autre chose. Sans compter que ça me ferait vraiment mal d’un train de vie standard vu ce que je brûle en temps normal.
Et ça, c’est pour les modalités du contrat. Il y a aussi les petites trivialités techniques dont on ne pourra pas se passer.
Parce que, au risque de me répéter, on ne peut pas faire demi tour. On a pas de turbine pour aller à contre courant, nous. Il va donc falloir qu’on trouve le moyen de passer par-dessus votre sous-main dans un premier temps pour s’enfoncer au sein de la flaque, d’une manière ou d’une autre, et vous le remorquer ensuite, dans tous les cas. Ensuite on continue de force jusqu’au premier lac souterrain ou la première bifurcation potable qui se présente. La vraie question étant jusqu’où et combien de temps et dans quelle mesure vous accepterez qu’on vous remorque. Vous pourrez même choisir dans quelle direction on finira par ressortir si vous payez convenablement. Cf ci-dessus, puisqu’on ne fait pas cadeau. Mais même comme ça… j’en suis quand même à me demander si c’est vraiment une bonne idée de vous faire confiance ou si vous allez essayer de nous caser une entourloupe. Ou de nous attaquer directement sans même faire semblant de quoi que ce soit, vraiment. Et les menaces à répétition ne donnent pas spécialement envie de tenter le coup comme ça, à vue de nez.
Je pense que ça sera tout pour nous.
Quelque chose à ajouter ?, adressa-t-elle à Sigurd, qui suivait de loin.
-Globalement d’accord sur tout, ouais. Ca n’est pas parce que vous êtes révo ou connue ou mégaprimée que l’on va dire Amen à quoi que ce soit. Les drones décérébrés chez les clampins, ça n’existe pas vraiment chez nous, navré. Sinon, je signalerais juste que faire mumuse avec des explosifs dans un tunnel de ce genre, c’est pas nécessairement une bonne idée. A moins d’vouloir se prendre des pans d’tunnel effondré dans le buffet, chacun son truc. Vous pouvez tenter le coup si ça vous chante, cela dit. Je parle des torpilles, hein. Parce que nous aussi on a des canons, mais ça m’a vraiment, vraiment pas l’air d’une bonne idée vu la structure.»
A voir comment l’autre réagirait, maintenant. Si les choses tournaient mal, Sigurd et Nerassa considéraient qu’elle ne pourrait pas faire le poids seule contre eux tous. Ce serait un cas vraiment extraordinaire, du moins. Mais si les révolutionnaires prenaient le dessus contre toute attente… et qu’ils se retrouvaient à devoir composer avec des indésirables pour contrôler le navire…
Eh bien, ils trouveraient bien quelque chose à faire en court de route. La flaque était un endroit ridiculement dangereux, après tout. Sigurd et Nerassa savaient globalement éviter ou s’épargner tout ce qu’un marin craignait de rencontrer, mais s’ils avaient besoin de faire preuve d’un peu d’originalité…
Ils trouveraient bien le moyen de faire absolument n’importe quoi en cours de route.
Hahaha, merci Raf. Encore une excellente raison d’être civil : j’aime pas la hiérarchie xD
Ca me rappelle la première et dernière fois que Nash et moi sommes tombés sur un MJ sur un autre forum… nos persos s’étaient démarqués pour leur participation aux évènements culturels de leur cité (event x2), l’admin nous avait récompensé avec une promotion offerte par le seigneur du royaume lors d’une rencontre/cérémonie, puis comme on est resté fidèles à nos persos… on a fini exilés à l’autre bout du pays après une prise de bec avec le personnage xD
Au prochain épisode : le Transnorth file grattouiller un monstre marin pour "perdre accidentellement" le sous-marin qu'il trachte, puis se jette dans un gouffre pour être incapable de faire demi-tour! Wouhou!
Tel était globalement le fond de la pensée de Philomé, et ce qu’on pouvait assez facilement lire sur son visage. Mais juste avant que la vapeur ne lui sorte par les oreilles et qu’il ne se mette à hurler à sa vache et à son équipage de maîtriser l’intruse, Roderik décida de négocier une dernière fois. Si les choses passaient proprement, tant mieux. Et dans le cas contraire, tout dépendrait de si les révolutionnaires avaient vraiment les moyens de mettre leur menace à exécution. Elle n’y croyait pas le moins du monde, mais ne s’en inquiétait pas outre mesure. Ils avaient encore des cartes à jouer.
«-Eeeeerh, on va très vite tourner en rond avec cette crasse, grommela Nerassa. Je parle de l’accident, pas de vous, bien sûr. Même si vous comptez bien vous incruster, semblerait, sourit-elle en s’amusant. Mais bon, on va vous expliquer.
Sur le principe, laisser des gens perdus sans rien au beau milieu de nul part c’est clairement pas nos habitudes, même quand on est pressés. Et même quand on est en pleine dépêche pour aller déterrer un gros pactole avant une autre bande de sympathiques pirates qui se sont dit que de couler le navire de notre partenaire pour aller faire les courses sans lui, ça serait une chouette idée. Vous avez déjà essayé d’enterrer ou de déterrer des trésors ? J’vous jure que c’est une vraie folie. Perso j’adore être pirate rien que pour ça. Rien que l’odeur et la texture du bois frotté contre le sable chaud, c’est vraiment…
-Nera’, c’est peut être pas le moment ?
-Oh, oui… mais quand même, ça aide à bien poser de quel genre on est. Dooonc… y’a quand même des formes et des limites à bien tenir pour que ça marche. Parce que de une les menaces c’est bien gentil, mais… non, c’est pas bien sport. Faire comme à la maison ça va un temps aussi, mais ça lasse assez vite. On ne fonctionne pas comme ça. On est plutôt du genre sympas. Mais vous imaginez bien qu’on ne va pas abandonner notre trésor seulement pour vos beaux yeux ou votre affaire dont on ne sait rien, d’où le dédommagement. Et dix millions ne feront clairement pas l’affaire ; pour l’idée, considérez que nous partons sur une cagnotte à soixante millions de pesant d’or grand minimum à déterrer. Ca l’aurait peut être fait pour un gentil petit mercenaire isolé, mais là on est trois équipages de réunis sur notre coup. Cent personnes, à peu de choses près. Ce qui donnerait cent mille berries pour chacun d’entre nous, soit un train de vie standard si vous voyez de quoi je parle. Encore que les révos vivent sur le dos de l’habitant, donc c’est un peu particulier, je pense. Mais votre somme ne couvrirait pas du tout nos frais pour un voyage au sein de la flaque. Vous savez comment ça marche, ici. Pour pas avoir de problème, il faut de la préparation et du matériel en quantité. Et il n’y a aucune raison qu’on se contente de tellement peu alors qu’on est en route pour autre chose. Sans compter que ça me ferait vraiment mal d’un train de vie standard vu ce que je brûle en temps normal.
Et ça, c’est pour les modalités du contrat. Il y a aussi les petites trivialités techniques dont on ne pourra pas se passer.
Parce que, au risque de me répéter, on ne peut pas faire demi tour. On a pas de turbine pour aller à contre courant, nous. Il va donc falloir qu’on trouve le moyen de passer par-dessus votre sous-main dans un premier temps pour s’enfoncer au sein de la flaque, d’une manière ou d’une autre, et vous le remorquer ensuite, dans tous les cas. Ensuite on continue de force jusqu’au premier lac souterrain ou la première bifurcation potable qui se présente. La vraie question étant jusqu’où et combien de temps et dans quelle mesure vous accepterez qu’on vous remorque. Vous pourrez même choisir dans quelle direction on finira par ressortir si vous payez convenablement. Cf ci-dessus, puisqu’on ne fait pas cadeau. Mais même comme ça… j’en suis quand même à me demander si c’est vraiment une bonne idée de vous faire confiance ou si vous allez essayer de nous caser une entourloupe. Ou de nous attaquer directement sans même faire semblant de quoi que ce soit, vraiment. Et les menaces à répétition ne donnent pas spécialement envie de tenter le coup comme ça, à vue de nez.
Je pense que ça sera tout pour nous.
Quelque chose à ajouter ?, adressa-t-elle à Sigurd, qui suivait de loin.
-Globalement d’accord sur tout, ouais. Ca n’est pas parce que vous êtes révo ou connue ou mégaprimée que l’on va dire Amen à quoi que ce soit. Les drones décérébrés chez les clampins, ça n’existe pas vraiment chez nous, navré. Sinon, je signalerais juste que faire mumuse avec des explosifs dans un tunnel de ce genre, c’est pas nécessairement une bonne idée. A moins d’vouloir se prendre des pans d’tunnel effondré dans le buffet, chacun son truc. Vous pouvez tenter le coup si ça vous chante, cela dit. Je parle des torpilles, hein. Parce que nous aussi on a des canons, mais ça m’a vraiment, vraiment pas l’air d’une bonne idée vu la structure.»
A voir comment l’autre réagirait, maintenant. Si les choses tournaient mal, Sigurd et Nerassa considéraient qu’elle ne pourrait pas faire le poids seule contre eux tous. Ce serait un cas vraiment extraordinaire, du moins. Mais si les révolutionnaires prenaient le dessus contre toute attente… et qu’ils se retrouvaient à devoir composer avec des indésirables pour contrôler le navire…
Eh bien, ils trouveraient bien quelque chose à faire en court de route. La flaque était un endroit ridiculement dangereux, après tout. Sigurd et Nerassa savaient globalement éviter ou s’épargner tout ce qu’un marin craignait de rencontrer, mais s’ils avaient besoin de faire preuve d’un peu d’originalité…
Ils trouveraient bien le moyen de faire absolument n’importe quoi en cours de route.
Hahaha, merci Raf. Encore une excellente raison d’être civil : j’aime pas la hiérarchie xD
Ca me rappelle la première et dernière fois que Nash et moi sommes tombés sur un MJ sur un autre forum… nos persos s’étaient démarqués pour leur participation aux évènements culturels de leur cité (event x2), l’admin nous avait récompensé avec une promotion offerte par le seigneur du royaume lors d’une rencontre/cérémonie, puis comme on est resté fidèles à nos persos… on a fini exilés à l’autre bout du pays après une prise de bec avec le personnage xD
Au prochain épisode : le Transnorth file grattouiller un monstre marin pour "perdre accidentellement" le sous-marin qu'il trachte, puis se jette dans un gouffre pour être incapable de faire demi-tour! Wouhou!
Soupirs. Immenses et infinis. La patience de Rave semble être mise à rude épreuve.
« Je vois. Pirates, argent. Il n’y a que ça qui résonne chez vous. Le fait que vous nous ayez bouchés le passage pendant une mission où des vies humaines sont impliquées ne vous gêne en rien. Des rapaces. Les années passent et rien ne change. » fit elle en rajustant la sangle de son arme à feu.
« De une, vous êtes trop exigeants. De deux, vous tuez indirectement des hommes et des femmes par votre entêtement à ne pas régler une situation dont vous êtes à la source. De trois … vous ne pouvez pas avancer tant que nous serons dans le tunnel. Il en va de même pour nous. Donc nous allons arriver à un accord rapidement, et mettre de côté votre avidité maladive. Trente millions, vous nous laissez à la première dans ce sens – elle indiqua l’endroit d’où votre navire venait – puis on se quitte sans qu’on en vienne aux mains. Estimez-vous heureux de pas avoir croisé un autre Atout. Y’en a des moins patients que moi. » lâcha la Révolutionnaire, glissant par instinct son doigt sur la gâchette de son arme pendue à son épaule.
« On est bon ? » fit-elle, vous sondant tous du regard.
Le choix … ou pas vraiment. Mais elle ne semblait pas se douter de votre plan machiavélique. Il fallait croire qu’elle était à des lieues de penser de manière aussi vile qu’un pirate. Et la colère pouvait faire des erreurs, même chez un Atout telle qu’elle. Ou alors savait-elle précisément à quoi elle jouait ? Elle vous tourna ostensiblement le dos et glissant les doigts dans sa bouche elle siffla. On entendit alors le vrombissement d’un moteur et une écoutille s’ouvrit sur un homme avec une lanterne.*pulupulupulu*
« Heu Raven, c’est bon ? On va devoir heu … rester à l’air libre un petit moment … Nigel dit qu’on a fait un … » lui répondit-on, avant que la voix de Raven ne lui intime de se taire.
« C’est bon. C’est réglé, on y va. Trouvez de quoi attacher à ce rafiot, je reste avec eux pour le moment. Je veux que seul le strict minimum du personnel reste à bord du sous-marin. Et toi, ramène-toi ici. T’es le seul qui connaisse suffisamment la Flaque dans le tas. » ordonna-t-elle sèchement.
« Mais pourquoi, les pirates … » contesta la voix.
« Fais ce que je te dis, s’il te plaît. » répliqua Raven, soupirant de plus belle.
Puis rapidement la machinerie révolutionnaire se mit en branle. Et avec elle la « crème » de ses membres.
Ravi de te pousser du côté civil de la force, hé hé. Pourtant les révolutionnaires sont tout gentil et mignon :'(
-JE CRECHE AVEC PAD’BOL !!
-JE VEUX NERA !!
-JE CRECHE AVEC PAD’BOL !!
-JE VEUX NERA !!
-JE CRECHE AVEC PAD’BOL !!
-JE VEUX NERA !!
-C’est bon, c’est bon ! On a compris. Fermez-là, vous deux, qu’on puisse s’entendre.
-OUAAAAAAAIS !!!
Les deux navigateurs des cavernes se jetèrent dans les bras l’un de l’autre en braillant joyeusement, ravis de la tournure que prenaient les évènements. Accueillir tout l’équipage d’un sous-marin révolutionnaire supposait d’optimiser au mieux l’espace disponible dans les cabines. Alors, quitte à devoir renoncer au confort et à l’intimité de quartiers privés, autant se retrouver en compagnie de quelqu’un que l’on appréciait vraiment. Sigurd n’avait pas la moindre intention de se retrouver en compagnie de Philomé, qui lui-même tenait expressément à dormir en présence de Prairie, la vache. Et le petit capitaine était au moins aussi dérangeant que celle de l’animal. De même, Pad’Bol n’était pas encore tout à fait à l’aise en présence de l’énigmatique et réservé Delmudd. Et le personnage ne l’intéressait pas tant que ça.
Il voulait juste rester avec son amie, qui était entièrement du même avis.
-Eh, où est-ce que vous allez, d’abord ?, s’offusqua Tombomery en les voyant partir tous deux.
-Ben chercher mes valises, tiens. Je crèche dans sa cabine, maintenant, alors j’vais faire de la place pour qu’on puisse accueillir du monde.
-Et moi, je l’accompagne pour l’aider, continua Sigurd.
-Il adore servir de mule, ouais.
-Je préfère le terme de sbire corvéable à merci pour tes beaux yeux, voyons.
-Et adorable en plus de ça !
-Et ça ne serait pas plus simple que ça soit Pad’Bol qui déplace ses trucs dans ta cabine, toi ?
-Qu’est-ce qui te fait dire ça ?
-Il avait juste un sac en arrivant. Ca change de tes sept valises pleines à craquer.
-Eh, oh. Une pirate digne de ce nom se doit d’avoir une garde-robe digne de ce nom, d’abord, objecta Nerasssa.
-Change pas de sujet, tu veux ?
-Han. Ouais mais lui il a la meilleure cabine de tout le navire, du coup on va chez lui.
-Le contraire irait plus vite.
-T’as vraiment sept valises ?
-ELLES SONT TRES BIEN MES VALISES, BON SANG. Et j’ai des excuses parce que je dois me trimballer mon atelier en kit pour tout l’matos de navigation, mes cartes aux trésors cryptées, de quoi pouvoir rester propre et tout en toutes circonstance, parce que j’ai beau être pirate je fais ma lessive toutes les semaines, oui monsieur, et…
-Bref, z’avez entendu la demoiselle, hein, coupa Pad’Bol. Amusez-vous bien avec les révos, nous on va en profiter pour se poser un peu. C’est pas que ça fatigue de de naviguer depuis des heures, mais vu qu’on est immobilisés, j’vous laisse vous amuser avec les manœuvres, vous m’ferez signe quand on sera parés pour repartir.
Et sur ce, Roderik et Dogaku s’empressèrent de déguerpir, fuyant la mauvaise humeur grandissante du tempétueux Tombomery. Trois cadres révolutionnaires eurent la mauvaise idée de l’approcher à ce moment pour discuter de la marche à suivre pour leurs manœuvres, et furent aussi mal accueillis qu’on pouvait l’imaginer. Mais ça, les deux amis n’en avaient cure : ils s’amusaient bien trop pour ça. Bavardant allégrement sur le chemin en direction des ponts intermédiaires, les compagnons jetèrent un dernier regard distrait en direction des parois rocailleuses de la Flaque avant de s’enfoncer dans le grand navire. Et quelques minutes plus tard…
-Euuh… attend ici, en fait. Je vais faire vite.
-Quelque chose à cacher ?
Ni une, ni deux, la jeune femme entrouvrit la porte au minimum, juste ce qu’il fallait pour se glisser sans que Sigurd n’ait la chance de…
-Euh… c’est de la neige que je vois au pied du lit ?
-Bien sûr que non, c’est… rien.
-On dirait des cristaux de… t’as fait tomber une salière ?
-Tatatatata, on ne regarde pas.
-C’EST DU SUCRE ? T’AS FAIT TOMBER QUOI POUR QUE DES CRISTAUX DE SUCRE SE FORMENT SOUS TON LIT ?? MEME DU SODA CA POURRAIT PAS !!
-RHAAA, NE RENTRE PAS, J’AI DIT !
-Arrête, c’est trop marrant au contraire !, ricana Dogaku en forçant l’entrée, arrachant par là même un cri à son amie qui s’écrasa contre lui en explosant de rire.
Ca n’était pas la première fois que Sigurd rentrait dans un des petits nids douillets de Nerassa, toujours nomade du fait de son style de vie chez les pirates. Et comme à chaque fois, c’était toujours un spectacle incroyable de voir ce que pouvait donner la tanière d’une aventurière où s’entassaient pèle mêle tout ce que l’on pouvait imaginer dans un fourbi pirate. Des tapisseries de tous genres, orientales, style renaissance, à l’asiatique, s’entassaient joyeusement devant une table basse où des invités pouvaient se prélasser sur des poufs et des peaux de bêtes. Un nombre impressionnant de grigris à dorures, de facture très aléatoire, submergeaient lourdement sur les diverses pièces de mobilier calées dans la cabine. Dans un coin, un petit atelier de travail, qui permettait à la jeune femme d’utiliser ses outils de navigation, ou de bricoler avec ses ustensiles pour fabriquer des log. Ailleurs, tout le matériel nécessaire à ce qu’on pourrait appeler un coin lessive. Et encore plus loin…
-J’adore tes piaules. Ca fait toujours caverne d’Ali-Baba, franchement.
-Ben voyons. Fais comme chez toi, surtout…
-Brahaha. C’est quoi, ce truc ?
-Une plante carnivore, déclara la miss en jetant un coup d’œil au pot de terre.
-Donc les morceaux de poulet, c’est pour…
-Ouais.
Sans surprise, et sans cesser de jeter un regard au fatras présent sur les alentours, Sigurd se laissa lourdement chuter dans le grand lit à baldaquin que la demoiselle s’était octroyée, un large et confortable matelas rectangulaire placé sur une épaisse boiserie ornementée. Ostentatoire, mais très agréable, jugea-t-il en s’écrasant.
-Y’en a qui se font vraiment pas chier, dîtes donc. C’est vraiment un navire de frêt, que vous avez volé ?
-Ben y’a les cabines de classe éco… et les premières classes… et les classes affaires… et le grand luxe. Et on ne s’est pas du tout fait chier, ‘ffectivemment.
Avachi sur la literie, une boite de poupées gigognes en cristal entre les mains, Sigurd se retourna paresseusement pour s’écraser ventre à terre sur le matelas. Moins d’une minute plus tard, Roderik en fit de même, à côté de lui.
-Flemme, lâcha-t-elle.
-Ouais. Et pas pressé, de toute manière.
-Carrément pas.
-…
-…
-…
-…
-Dis-moi, beau blond. Tu penses à ce que je pense ?
-Carrément, boucles d’or. Ca fait super méga longtemps, en plus.
-Ouuaaais.
Ni une, ni deux, la pirate retira ses bottines, se roula en boule sur le matelas, et se pencha en contrebas pour tirer de nul part un échiquier.
-Qui c’est qui commence ?
-J’prends les blancs !
-JE VEUX NERA !!
-JE CRECHE AVEC PAD’BOL !!
-JE VEUX NERA !!
-JE CRECHE AVEC PAD’BOL !!
-JE VEUX NERA !!
-C’est bon, c’est bon ! On a compris. Fermez-là, vous deux, qu’on puisse s’entendre.
-OUAAAAAAAIS !!!
Les deux navigateurs des cavernes se jetèrent dans les bras l’un de l’autre en braillant joyeusement, ravis de la tournure que prenaient les évènements. Accueillir tout l’équipage d’un sous-marin révolutionnaire supposait d’optimiser au mieux l’espace disponible dans les cabines. Alors, quitte à devoir renoncer au confort et à l’intimité de quartiers privés, autant se retrouver en compagnie de quelqu’un que l’on appréciait vraiment. Sigurd n’avait pas la moindre intention de se retrouver en compagnie de Philomé, qui lui-même tenait expressément à dormir en présence de Prairie, la vache. Et le petit capitaine était au moins aussi dérangeant que celle de l’animal. De même, Pad’Bol n’était pas encore tout à fait à l’aise en présence de l’énigmatique et réservé Delmudd. Et le personnage ne l’intéressait pas tant que ça.
Il voulait juste rester avec son amie, qui était entièrement du même avis.
-Eh, où est-ce que vous allez, d’abord ?, s’offusqua Tombomery en les voyant partir tous deux.
-Ben chercher mes valises, tiens. Je crèche dans sa cabine, maintenant, alors j’vais faire de la place pour qu’on puisse accueillir du monde.
-Et moi, je l’accompagne pour l’aider, continua Sigurd.
-Il adore servir de mule, ouais.
-Je préfère le terme de sbire corvéable à merci pour tes beaux yeux, voyons.
-Et adorable en plus de ça !
-Et ça ne serait pas plus simple que ça soit Pad’Bol qui déplace ses trucs dans ta cabine, toi ?
-Qu’est-ce qui te fait dire ça ?
-Il avait juste un sac en arrivant. Ca change de tes sept valises pleines à craquer.
-Eh, oh. Une pirate digne de ce nom se doit d’avoir une garde-robe digne de ce nom, d’abord, objecta Nerasssa.
-Change pas de sujet, tu veux ?
-Han. Ouais mais lui il a la meilleure cabine de tout le navire, du coup on va chez lui.
-Le contraire irait plus vite.
-T’as vraiment sept valises ?
-ELLES SONT TRES BIEN MES VALISES, BON SANG. Et j’ai des excuses parce que je dois me trimballer mon atelier en kit pour tout l’matos de navigation, mes cartes aux trésors cryptées, de quoi pouvoir rester propre et tout en toutes circonstance, parce que j’ai beau être pirate je fais ma lessive toutes les semaines, oui monsieur, et…
-Bref, z’avez entendu la demoiselle, hein, coupa Pad’Bol. Amusez-vous bien avec les révos, nous on va en profiter pour se poser un peu. C’est pas que ça fatigue de de naviguer depuis des heures, mais vu qu’on est immobilisés, j’vous laisse vous amuser avec les manœuvres, vous m’ferez signe quand on sera parés pour repartir.
Et sur ce, Roderik et Dogaku s’empressèrent de déguerpir, fuyant la mauvaise humeur grandissante du tempétueux Tombomery. Trois cadres révolutionnaires eurent la mauvaise idée de l’approcher à ce moment pour discuter de la marche à suivre pour leurs manœuvres, et furent aussi mal accueillis qu’on pouvait l’imaginer. Mais ça, les deux amis n’en avaient cure : ils s’amusaient bien trop pour ça. Bavardant allégrement sur le chemin en direction des ponts intermédiaires, les compagnons jetèrent un dernier regard distrait en direction des parois rocailleuses de la Flaque avant de s’enfoncer dans le grand navire. Et quelques minutes plus tard…
-Euuh… attend ici, en fait. Je vais faire vite.
-Quelque chose à cacher ?
Ni une, ni deux, la jeune femme entrouvrit la porte au minimum, juste ce qu’il fallait pour se glisser sans que Sigurd n’ait la chance de…
-Euh… c’est de la neige que je vois au pied du lit ?
-Bien sûr que non, c’est… rien.
-On dirait des cristaux de… t’as fait tomber une salière ?
-Tatatatata, on ne regarde pas.
-C’EST DU SUCRE ? T’AS FAIT TOMBER QUOI POUR QUE DES CRISTAUX DE SUCRE SE FORMENT SOUS TON LIT ?? MEME DU SODA CA POURRAIT PAS !!
-RHAAA, NE RENTRE PAS, J’AI DIT !
-Arrête, c’est trop marrant au contraire !, ricana Dogaku en forçant l’entrée, arrachant par là même un cri à son amie qui s’écrasa contre lui en explosant de rire.
Ca n’était pas la première fois que Sigurd rentrait dans un des petits nids douillets de Nerassa, toujours nomade du fait de son style de vie chez les pirates. Et comme à chaque fois, c’était toujours un spectacle incroyable de voir ce que pouvait donner la tanière d’une aventurière où s’entassaient pèle mêle tout ce que l’on pouvait imaginer dans un fourbi pirate. Des tapisseries de tous genres, orientales, style renaissance, à l’asiatique, s’entassaient joyeusement devant une table basse où des invités pouvaient se prélasser sur des poufs et des peaux de bêtes. Un nombre impressionnant de grigris à dorures, de facture très aléatoire, submergeaient lourdement sur les diverses pièces de mobilier calées dans la cabine. Dans un coin, un petit atelier de travail, qui permettait à la jeune femme d’utiliser ses outils de navigation, ou de bricoler avec ses ustensiles pour fabriquer des log. Ailleurs, tout le matériel nécessaire à ce qu’on pourrait appeler un coin lessive. Et encore plus loin…
-J’adore tes piaules. Ca fait toujours caverne d’Ali-Baba, franchement.
-Ben voyons. Fais comme chez toi, surtout…
-Brahaha. C’est quoi, ce truc ?
-Une plante carnivore, déclara la miss en jetant un coup d’œil au pot de terre.
-Donc les morceaux de poulet, c’est pour…
-Ouais.
Sans surprise, et sans cesser de jeter un regard au fatras présent sur les alentours, Sigurd se laissa lourdement chuter dans le grand lit à baldaquin que la demoiselle s’était octroyée, un large et confortable matelas rectangulaire placé sur une épaisse boiserie ornementée. Ostentatoire, mais très agréable, jugea-t-il en s’écrasant.
-Y’en a qui se font vraiment pas chier, dîtes donc. C’est vraiment un navire de frêt, que vous avez volé ?
-Ben y’a les cabines de classe éco… et les premières classes… et les classes affaires… et le grand luxe. Et on ne s’est pas du tout fait chier, ‘ffectivemment.
Avachi sur la literie, une boite de poupées gigognes en cristal entre les mains, Sigurd se retourna paresseusement pour s’écraser ventre à terre sur le matelas. Moins d’une minute plus tard, Roderik en fit de même, à côté de lui.
-Flemme, lâcha-t-elle.
-Ouais. Et pas pressé, de toute manière.
-Carrément pas.
-…
-…
-…
-…
-Dis-moi, beau blond. Tu penses à ce que je pense ?
-Carrément, boucles d’or. Ca fait super méga longtemps, en plus.
-Ouuaaais.
Ni une, ni deux, la pirate retira ses bottines, se roula en boule sur le matelas, et se pencha en contrebas pour tirer de nul part un échiquier.
-Qui c’est qui commence ?
-J’prends les blancs !