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Black Box


Résumé de l'épisode précédent:

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Trois journées s'étaient écoulées depuis mon réveil et à part ma voix nouvellement retrouvée, je ne sentais aucun mieux dans mon état de santé. Certes, je pouvais encore me lever, mais la panoplie de mes mouvements était somme toute assez restreinte. Cloué, je l'étais pour un bon moment.
Le docteur qui me soigna me fit aussi un debriefing complet après mon réveil. Red m'avait laissé avec la moitié de ses forces ce qui incluait le Globalement Inoffensif (un ancien cuirassé de la Marine) et quelques trois cents hommes. Dans ce lot, je n'incluais pas la centaine de prisonniers que nous fîmes après la bataille. Ils étaient à fond de cale, méditant sur leur destin à venir dont je détenais les rênes désormais. Mais je n'étais pas pressé de réfléchir à ce que j'allais faire de cette racaille, le moment viendra.

Ces trois derniers jours ne furent pas de tout repos. Malgré l'état de destruction avancée de l'Inoffensif, j'avais ordonné la levée des voiles. Cahin-caha, le cuirassé rallia l'île du Croissant Lunaire qui servait de base à Ashura. Quatre journées plus tôt, j'avais infiltré l'île dans le but de miner ses deux ports et détruire la flotte d'Ashura au mouillage, justement, pour éviter la bataille marine dans laquelle je fus impliqué par la suite. Aucune construction humaine ne tenait plus debout sur l'île, Levasseur avait opté pour la stratégie du pire en déclenchant l'autodestruction de la base. Il n'y avait rien à récupérer ici, sauf un précieux allié qui m'avait été d'un immense secours durant l'infiltration, le tueur à gage à la silhouette androgyne, Avada Kedavra. Nous n'eûmes pas à le chercher bien longtemps, il s'était remis de ses blessures et nous attendait, patiemment.

Mon petit état major était à présent rassemblé autour de moi dans mes quartiers. Il y avait bien sûr Avada Kedavra, l'artificier anarchiste Jonhatan Nivel, et Baker commandant de l'Inoffensif. Les plaies étaient assez pansées comme cela, il était temps de décider de la prochaine partition à jouer.

- D'abord, je crois que nous devrions faire le point de la situation à l'extérieur. Quelqu'un a trouvé un journal aujourd'hui ? Je suppose que notre bataille est passée inaperçue à Boréa non ? demanda Nivel de sa voix pincée comme s'il regrettait ce manque de médiatisation.  

- Naturellement, et c'est tant mieux. Ils savent déjà qu'Ashura a parasité leur pays, nul besoin de créer une psychose en parlant d'une horde de sauvages s'apprêtant à s'emparer de l'île. D'autant plus que la présence Marine n'est plus ce qu'elle fut, répondis-je.

- Oui, du coup, l'patron a une requête. Il veut d'la Dance. L'a un plan pas commode et la poudre l'y aiderait beaucoup.

- Ouais, naturellement que Red veut de la Dance... Rapide cet actionnaire, l'investissement n'est même pas à maturité, fis-je perplexe.

- C'est comme ça le business quand on traite avec les pontes, mec. Tu sais où trouver de la Dance pour satisfaire le Rouge ?

- Euh, j'ai bien ma petite idée. Il y a deux mois, quand j'ai démantelé la Cellule Tempest sur Boréa et par la même occasion provoqué la mort de la chimiste génocidaire Marie-Curie, j'ai trouvé son journal. C'est resté avec Dena' sur Boréa, mais dedans, il était mentionné l'existence de deux autres Cellules du Réseau sur North Blue. Trinity et Black Box. La dernière a la particularité d'être une Cellule ambulante, autrement dit, le laboratoire est monté sur un bateau, de préférence petit et rapide. Les Cellules ambulantes sont plus vulnérables que les Fixes, du coup, je pense qu'on pendra Black Box pour cible, au lieu de Trinity.

- Black Box, ça sonne bien. Le journal en question faisait-il état de sa localisation ?

- Bien sûr, Marie-Curie était une mégalo qui ne supportait pas d'être mise en concurrence avec d'autres chimistes de talents, elle a fait tout son possible pour découvrir les secrets de ses rivaux. Black Box a sa base, donc son bateau, quelque part dans les eaux territoriales d'Inu Town. Au large d'Inu, se trouve une petite île nommée Patland. Au large de cet îlot se trouve un amoncellement de déchets en tout genre que les courants marins ont rassemblé et agglutiné si bien que maintenant, l'ensemble forme un pied-à-terre solide. Selon les notes de M.C, le bateau, Le Cube puisque tel est son nom serait amarré à cette îlot de détritus.

- Donc c'parti, on fait voile vers Inu Town ? demanda Baker.

- Doucement, question renseignements et plans d'actions, on n'a pas encore fini.

- Oui Baker, vous allez à Inu, mais avant, débarquez-moi sur la côte de Lavallière, Dena' viendra me chercher. Vous irez seuls. Dans mon état, une simple rafale m'eut achevé alors une mission de ce genre, impossible.
Pour ce qui est des renseignements, Avada, je n'ai pas intégralement lu le journal à l'époque, le coup d'état imminent occupait mon esprit. Nous nous tiendrons au courant via escargophone, c'est comme ça que je dirigerai cette mission, depuis mon lit bien chaud à Lavallière.


- Autant nous confier tout le truc, fit Nivel tout content de mon absence dans ses pattes. Ça va boomer !

- Je peux rester avec toi non ? Je ne suis pas sûr de longtemps supporter cet imbécile.

- Haha, non, Avada, j'ai besoin de ta discipline pour tempérer Nivel. D'ailleurs, je te confie toute l'opération et les décisions si je suis injoignable. Nivel, tu obéiras à Avada. Nous n'avons aucun ordre à te donner Baker mais pour la réussite générale, vaudrait mieux accorder nos violons.

- Ça marche. Tant qu'y a l'intérêt du patron, j'vous suis !  

- Non mais tu déconnes ! J'vais pas obéir à ce malade de la gâchette ! Et puis...

- Et puis, sans moi, il t'aurais flingué sur Zaun. N'oublies pas que tu me dois la vie et que j'ai racheté ton contrat. Si tu ne veux pas lui obéir, tu n'as rien à faire sur cette mission et tu es libre de partir, coupai-je.
Mais tu ferais là une grosse erreur mon pote. Je ne serai pas à avec vous, donc pas vraiment besoin d'aller en finesse, tant qu'il n'y aucune chance qu'on fasse le lien entre vous et moi et qu'on me criminalise.
Votre objectif est simple : Trouver Le Cube et vous en emparer sans le détruire. Je compte faire d'une pierre deux coups. Trouver la Dance pour Red et m'offrir mon premier bateau laboratoire.
Si quelqu'un tente de s'y opposer, que ce soit une mouche, un enfant, ou ce satané Mouetteman, vous avez carte blanche. Tout ce qui se dressera en travers de votre chemin, éliminez-le !


- Ouais, ça va BOOMER !

- Heureux les simples d'esprits car le royaume des cieux est à eux.

- Ça suffit Avada, tu n'entretiens pas la bonne ambiance là... Je sens que ça va être pénible.

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Au large d'Inu Town...
 
Cinq jours plus tard, la silhouette massive du Globalement Inoffensif brisait la ligne d'horizon des eaux territoriales d'Inu Town. La petite île se profilait au loin, mais l'objectif des hommes du cuirassé se trouvait à 7 milles marins de là. Aussi mirent-ils le cap à tribord, vers le septentrion.
A part le boucan des réparations qui se poursuivirent tout le long, la traversée fut relativement paisible pour Avada Kedavra. L'androgyne s'était isolé dans le nid-de-pie du cuirassé et nul ne l'avait revu depuis. Sur le pont, l'on venait à se demander s'il était toujours vivant.

Nivel quant à lui était le maitre d'orchestre des "boucantiers" qui avaient élu domicile dans la salle des canons. Fort de son expérience, l'artificier aidait à la réparation tout en peaufinant ses armes, ses bombes personnelles qu'il comptait bien utiliser, quelque soit ce qu'en diraient ces rabat-joies de Loth et d'Avada. Trop longtemps qu'il n'avait rien nivelé, trop longtemps qu'il n'avait pas vu la beauté du chaos. Oui, Nivel en était certain, Inu Town maudira bientôt le jour qui l'avait vu débarquer, ses habitants n'étaient pas prêts de l'oublier de si tôt. Avec un rire se voulant diabolique, le rouquin au cache-œil se remit au travail en attirant les regards suspicieux des matelots qui, sûrement, se questionnaient son l'équilibre mental.

Baker ne se portait pas plus mal. Il avait à charge de diligenter trois cents personnes plus une centaine d'autres prisonniers et jusqu'à présent tout se passait à merveille. Le seul problème de taille était venu du côté des cuisines où les rations à préparer avaient augmenté de moitié à causes des captifs. Mais heureusement pour l'ambiance générale, un infortuné monstre marin tenta au second jour de la traversée de se frotter au cuirassé. Venues de nulle part, deux balles étaient venues se figer dans chaque œil du monstre offrant ainsi à l'équipage assez de viande pour passer le trimestre. Nul n'avait vu le tireur mais tous soupçonnaient fortement Avada.
Baker ne l'avait pas vu depuis cinq jours mais il savait qu'il ne tarderait pas bientôt à voir émerger sa silhouette androgyne, de même qu'il allait bientôt avoir des nouvelles de Loth demeuré lui aussi silencieux depuis qu'il l'avait déposé en bordure de forêt boréale.

L'heure était désormais venue de se réunir dans la salle de conseil stratégique où les techniciens avaient mis les petits plats dans les grands pour optimiser la communication. Un escargophone projecteur était installé autour d'une table ovale. Loth devait avoir le même chez lui et bientôt, ses lunettes aux verres fumées apparaîtront sur la surface murale blanche pour leur parler du Plan.

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Boréa - Ville portuaire de Lavallière

J'étais bien putain.
Nul besoin d'un tel langage grossier mais vraiment j'étais bien. Je ne ressemblais plus à une momie bien que des bandages sanglaient encore certaines parties de mon corps comme mes bras gravement brûlés par la Braise. Mais en général, les nouveaux soins que j'avais reçus de la part du médecin général de Boréa, dépêché par le jeune roi eurent vite fait de me mettre sur pied. Je ne pouvais toujours pas piquer un sprint ni battre un bébé au combat mais je me sentais bien.

Nous étions en début de semaine, et comme toute honnête personne, je me préparais à aller travailler. Pas vraiment comme une honnête personne mais bon, passons. Je menais un train de vie princier à Boréa grâce au statut de Consultant Royal que j'avais acquis. Si officieusement, je récupérais le Réseau Ashura pour mon compte, officiellement, j'avais été engagé par le Roi pour me débarrasser de ces nuisibles et c'était ainsi qu'on me percevait sur l'île. Un héros qui, par deux fois déjà, avait "sauvé" le pays. Tout d'abord du tueur en série connu sous le nom du Réplicateur et dernièrement de la génocidaire Marie-Curie. Ils ignoraient qu'il y avait une troisième fois, mais grand bien leur fasse.  

J'habitais dans une suite hôtelière à Lavallière où le personnel était au petit soin avec moi. Il y avait deux suites à cet étage-là, et l'autre était occupée par mon autre associé indispensable dans cette entreprise, une véritable encyclopédie du crime, Denavellion, plus communément appelé Dena. Une porte dérobée sous une tapisserie reliait les deux appartements. Pour des soucis de discrétion, c'est chez lui que nous décidâmes d'installer notre "QG" opérationnel pour suivre du mieux que nous pouvions la mission à venir sur Inu Town. Un escargophone-projecteur géant, un escargophone vidéo, un escargophone relayeur, un blanc-escargophone brouilleur, aucun moyen n'avait été lésé. Tout ce matos représentait une petite fortune que nous pouvions nous payer, avec l'aide ou non du roi, mais dans ce cas-ci, tout ceci avait été "emprunté" à l'université de Jalabert.

Il était neuf heures ce matin-là quand l'escargophone vidéo vrombit. Sur le blanc mur apparut le visage joufflu de Baker. La salle de crise de l'Inoffensif était plongée dans le noir et si j'avais pas su qu'autour de leur table se trouvaient Nivel et Avada, jamais je n'aurais pu les reconnaître.  

- Tout c'noir. Ça fout la chair de poule, ça fait trop conspirationniste, remarqua Dena' avec amusement.

- C'est juste pour un temps, ils vont bientôt sortir de là pour tâter du terrain. Alors les amis, comment se présage notre opération ?

- Bien, a priori. Mais après tout, une seconde avant de mourir, on respire encore. Donc ça ne veut rien dire, dit Avada.

- Euh... Nivel, tu m'dis ? fis-je, sentant qu'il valait mieux donner la parole au rouquin pour des renseignements moins philosophiques.

- Nous nous sommes positionnés à 9 milles nautiques au nord de Patland, derrière une succession de rochers. Nous avons eu l'ilot de déchets en visuel de lunettes astronomiques mais on n'a pas pu distinguer un quelconque navire. Normal à cette distance, en plus, c'est un euphémisme quand tu as parlé d'"îlot". Ce truc est une montagne de déchets, ça doit faire un étage ou deux. A mon avis ça doit avoir une base tectonique. M'enfin, peu importe, faut s'approcher pour savoir et avec la taille du cuirassé, on risquerait de les faire fuir de très loin. C'est un cuirassé Marine quoi.

- Tout juste, raison pour laquelle nous sommes ici. Si on pouvait y aller en trouant tout avec les gros canons, ce serait déjà fait. Vous allez devoir vous la jouer fine en première partie, comme sur l'île du Croissant. Comprenez petite équipe commando surarmée, furtive mais avec un potentiel de destruction conséquent.

- Ouais, z'y ont déjà pensé. Nous avons trois voiliers à aube à quatre places très rapides pour cette mission. Les hommes sont là et prêts.

- Trois voiliers hein. Vaudrait mieux que tu ne participes pas à cette mission commando, Baker, tes hommes ont besoin de toi sur le cuirassé et si jamais ça tourne au vinaigre, nous compterons tous sur toi. Du coup, il manque quelqu'un à cette table. Faites venir la dénommée Krav'ma Gah.

Ma dernière phrase souleva un tollé de chaque côté des escargaphones. Baker indigné se leva et tapa des paumes sur sa table qui oscilla violemment. Nivel brandit des poings en l'air en beuglant des protestations. Dena' me regarda comme si j'étais devenu complètement cinglé. Seul Avada resta de marbre.

- Non, hors d'question ! protesta Baker. Peut pas lui faire confiance ! Surtout pas ici, à cette table !

- Je porte encore la marque dans le dos Loth ! Là où sa lance a failli me perforer les poumons !

- Bah, ça t'apprendra peut-être à ne pas agir stupidement, comme par exemple combattre une femme-poisson dans l'eau ? rigolai-je.

Deviner leurs réactions n'avait pas été compliqué. Krav'ma Gah n'était autre que l'un des lieutenants de Benjamin Levasseur. Son seul lieutenant encore en vie. Maintenant, elle logeait dans les cales du cuirassé à l'instar des cent dix autres membres d'Ashura survivants de la bataille. Nivel et moi avions été séparés durant la dernière partie de la bataille et personnellement, je n'avais pas eu à faire avec la dame mais il m'avait été rapporté qu'elle et son escouade d'hommes poissons avaient causé la mort de beaucoup d'hommes de Red. M'était avis qu'ils seraient tous d'accord sur l'Inoffensif pour la pendre par les quatre fers puis répandre ses boyaux aux quatre vents. Mais moi, j'avais d'autres plans.

- Facilitez moi le travail les gars, je n'aime pas me répéter, je vais m'expliquer devant elle et vous en même temps. Puis, cette réunion manque de présence féminine, fais amener la dame, Baker.

Malgré qu'il ne fut pas d'accord, quelque minutes plus tard, il était de retour dans leur salle tendue de noir, la femme-poisson ferrée aux bras.

Lieutenant de flotte, Krav'ma Gah

- Bonjour Miss, fis-je. Qui vote pour son exécution ? demandai-je et à peine avais-je fini qu'ils levèrent tous la main, sauf Avada. Mais non, ne craignez rien, pour l'instant en tout cas. Puis-je vous appeler Krav ? Merci. Puis-je vous tutoyer aussi ? Merci.

- Va droit au but, mec, on s'en fout des formalités.

- Du calme Dena, on ne va pas brusquer la dame. Vois-tu, Krav, et tu le sais mieux que personne, les prisonniers n'ont aucun droit. Et tous autant que vous êtes, n'êtes que des cadavres sur pattes. Là, je te parle depuis Boréa -ta gueule Nivel, tout le monde sait sur l'île que je suis revenu blessé- et si tu me vois derrière cet écran c'est que nous tous, préparons une opération, une frappe chirurgicale contre un autre démembrement d'Ashura. Une Cellule plus précisément, Black Box de son nom. Tu connais ?

- Oui, répondit-elle d'une voix sans défaite et enrouée.

- Loth ?

- J'y viens. Si tu es là, c'est parce que j'aimerais que tu nous rejoignes. J'ai fait la même proposition à ton patron, il a refusé et le résultat c'est qu'à l'heure où nous parlons, il nourrit les poissons de North Blue. Et comme tu as pu le remarquer, personne dans le Réseau ne se soucie de vous, ne montera une quelconque opération pour vous sauver. Vous êtes tous remplaçables. Tous. Alors, voilà ce que je veux que tu ailles dire aux tiens, puisque tu es la plus gradée d'entre tous.

Dis leur que le sacrifice, c'est un truc de looser. On peut en dire que c'est la démonstration de la foi dans toute sa splendeur, du don ultime de soi. Mais on n'est plus là pour en récolter les lauriers. Parce que votre dieu, Lavoisier, s'il est peiné en ce moment, c'est parce qu'il a perdu sa force de frappe, mais vous, individuellement, il vous a déjà oublié comme la merde qu'il a déféqué ce matin. Alors, croupir en prison ou vous sacrifier pour lui...
Le martyr n'est qu'un noble concept sans intérêt. A moins qu'on ne parle d'une vie après la mort, ce qui entre-nous, soyons honnête, est un pari un poil risqué. Oui, il vous a peut-être promis 99 vierges et une rivière de miel mais si ça se trouve vous aurez peut-être une vierge de 99 ans et du jus de pissenlit. Beurk. Qui peut savoir ? C'est pourquoi je dis, vivons longtemps, vivons intelligemment, servons le plus offrant.

Hier c'était Lavoisier au sein d'Ashura. Aujourd'hui, c'est moi, au sein de Shadow Law. Demain, ce sera peut-être toi qui sait, Krav. Les plus faibles sont éliminés par la sélection naturelle, il en a toujours été ainsi. Mais en attendant ce moment, je vous offre la liberté et un boulot, sous mes ordres, jusqu'à ce que je sois éliminé par une espèce supérieure. Je vous demande de garder à l'esprit ce que vous aurez à gagner, individuellement. Je ne demande à personne de se sacrifier pour moi, parce que je me répète, le sacrifice, c'est un truc de looser.


- C'est ton monologue barbant qui va la tuer mec...

- Je... je n'ai pas envie de mourir, bégaya-t-elle.

- A la bonne heure ! fis-je en levant un toast imaginaire en l'air. Baker, enlève lui ses entraves s'il te plait, qu'elle nous rejoigne, elle fait partie des nôtres maintenant.

- Quoi c'est tout ?

- Tu veux quoi de plus Nivel ? Son casier judiciaire ou une enquête de voisinage ?
Je lui ai proposé de me rejoindre, elle a accepté, fin de l'histoire. Quand j'ai proposé à Avada de me rejoindre, il t’avait collé une balle dans le buffet et une dans mon épaule. Où en sommes-nous maintenant ?
J'aime prendre le thé avec ceux qui veulent ma peau, ça rend la vie plus pimentée. Et si l'envie t'en prends, Krav', n'hésite surtout pas à me trahir. Enfin, si t'en es capable,
achevai-je avec une expression carnassière qui ne m'était pas du tout familière.

- Bienvenue dans le groupe, Krav. J'espère que tu nous seras utile, le cas échéant, je me chargerai moi-même de te régler ton compte. Maintenant nous sommes au complet pour l'opération Loth, donne-nous plus de détails sur la cible. Tu nous as dit que chaque Cellule est dirigée par un chimiste-en-chef. Celui de Black Box, à quoi ressemble-t-il ?



Dernière édition par Loth Reich le Mar 8 Sep 2015 - 21:28, édité 1 fois
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- Il ressemble à ça, répondis-je en lui montrant une vieille coupure de journal.


- C'est le Prof. Machiavel, fit Krav, la tête baissée.

- Ah tu vois que la nouvelle apporte déjà sa pierre, Baker ? Comme elle vient de le dire, il s'agit du Prof. Machiavel, homme-poisson de la race des poissons-fugu, biochimiste de son état.

- Pour résumer les infos que j'ai pu trouver sur lui, il a grave pété les plombs, y a longtemps. Plus de vingt ans. Il a trempé dans des trucs louches, il a été accusé d'avoir conçu une arme qui a coulé un cuirassé. C'pour ça qu'il est primé à 10 millions. D'puis c'temps, plus d'nouvelles. 'fin, jusque-là. Il taffe pour Ashura.

- Ce que Dena' veut dire par "grave pété les plombs", c'est que son fils unique a été tué lors d'une tentative d'enlèvement par des hommes-poissons esclavagistes. Depuis, il aurait juré la perte de sa propre race et travaillerait d'arrache-pied pour concevoir une arme susceptible d'élimer toute vie marine dans un large rayon. Travailler pour Ashura ne signifie pas qu'il a arrêté de travailler sur cette obsession viscérale alors faite attention quand vous approcherez du Cube, il se pourrait que vous soyez confrontés à des armes marines d'un nouveau genre.

- C'est plutôt eux qui vont déguster des bombes d'un nouveau style ouais. J'y ai planché. Héhéhéhéhé.

- Questions escorte, de quelle protection dispose le navire-labo ? demanda Avada, directement à Krav qui se sentie soulagée d'être insérée dans le débat.

- Dans la doctrine de sécurité d'Ashura rédigée par La Braise, le navire principal d'une Cellule ambulante doit bénéficier d'une protection basique d'un minimum de quatre caravelles de combat. Leur armement par contre est diversifié et peut être soit conventionnel, soit spécifique aux affinités du chimiste-en-chef.

- Hein ?

- Ce qu'elle veut dire, Baker, rejoint ma mise en garde précédente, à savoir que les commandos auront peut à faire avec des armes relevant de l'obstination de Machiavel pour les armes marines. Chaque Cellule est le reflet de son chimiste-en-chef. Sur Boréa, Marie-Curie a éliminé un groupe ethnique de 105 individus pour implanter sa cellule sur leurs terres et se faire passer pour eux. Parce que le génocide, c'était son truc. Ses hommes se battaient avec des produits chimiques et ce genre de chose qu'elle révérait.  

- Quatre caravelles minimum ? Donc un canevas de cinquante à cent hommes ennemis. Nous ne disposons que de trois embarcations d'assaut rapides de quatre places chacune. Notre commando se composera donc de douze hommes ou femmes.

- Même si ça n'a pas marché des masses, je vous propose de faire un remake de la tactique que nous avions adopté sur l'île du Croissant. Il y a d'autres hommes-poissons dans les prisonniers qui peuvent constituer le commando de Krav ainsi donc...

DRRRRRRRRRRRRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIINGGGGGGGGGGGGGGGGG !

- C'quoi ?

- Euh, ça vient de ma suite. C'est peut-être le service traiteur qui sonne. Avada, je te confie la suite des opérations, tu as toute légitimité pour décider de la marche à suivre. Si Nivel fait ses nivelleries, descends-le, rigolai-je. Encore bienvenue dans l'équipe Krav, j'espère que tu sauras convaincre les tiens que Lavoisier est fini et que le nouveau business se trouve chez Shadow Law. Ah dernière chose Avada, ne changeons pas.  

- Ne changeons pas, répondit-il en en coupant la transmission.

- C't'un genre d'code s'cret ?

- Avada a compris, c'est l'essentiel. Par contre, je suis intrigué par cette sonnerie, je me demande qui ça peut bien être.

- T'as parlé d'service traiteur nan ? Mais z'avons d'jà pris not'déjeuner.

- Je sais, je vais aller voir. C'est peut-être Phrâne.

Dubitatif, je soulevai la tapisserie qui cachait la porte secrète qui reliait nos deux suites et pénétrai dans la mienne. C'était étrange, j'avais demandé à la réception de ne me déranger que pour les cas d'ultime nécessité et ma liste d'invités ne comprenait que le nom de Phrâne Thomson, un héraut de l'aurore qui faisait le lien entre le roi de Boréa et moi. Alors quelle ne fut ma surprise quand j'ouvris la porte pour me retrouver face à face à une femme... Que je ne connaissais ni d’Eve ni d'Adam.

Elle se tenait dans l'encadrement de la porte. Son maintien était militaire, droit et altier. Ses longs cheveux bruns parsemés de mèches bleutées et violacées tombaient gracieusement sur son épaule et sa généreuse poitrine. Ses lèvres violacées par un gloss se courbèrent en un aimable sourire derrière lequel j'entrevis une froide résolution à tuer qui me fit froid dans le dos. D'ailleurs, dans son sourire, je pensais reconnaître une sinistre familiarité avec le sourire de quelqu'un qui voulait ma peau depuis longtemps. La dame était d'une tête plus grande que moi, plus musclée aussi. De lourds chapelets et colliers sertis de médaillons perlaient à son cou lui donnant un certain air gothique qui en définitive seyait bien à Boréa. Je ne pus m'empêcher de remarquer que malgré son soutien droit comme un "i", elle s'appuyait sur une épaisse claymore fourrée qui devait lui servir de canne de marche, ou de coupe-tête, à voir. Bref, la damoiselle n'avait rien d'amical et ce n'était pas le genre de femme que tout homme rêverait de croiser à l'assaut du matin. Parce que croyez-moi, il se dégageait d'elle une aura meurtrière que soulignaient ses yeux d'un gris-amande.


- Je ne crois pas avoir engagé de service d'escorte maso ou même sado d'ailleurs, introduisis-je en blaguant. Vous êtes vous trompé de porte madame ?

- Je ne crois pas, Loth Reich, répondit-elle d'une traite et sans timbre.

- Hmmm, pardonnez mon manque de modestie mais je crois que tous les lettrés de Boréa connaissent mon nom par les temps qui courent. Que puis-je faire pour vous madame... ?

- Santana. Midnight Santana. Mais mes amis m'appellent Bee.

- Et ?

- Et je suis la commandante de la nouvelle 444e Division des Marines de Boréa, répondit-elle en riant de bon cœur cette fois-ci.

- Je suis maudit... pensai-je.

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Au large d'Inu Town...

Une balle dans une cuisse avait calmé les ardeurs sur le pont de l'"Inoffensif.
Le déchainement d'indignation de l'équipage avait été mille fois pire que celle de "l'état major" face à la décision d'incorporer les prisonniers dans les opérations en cours. Avada maudissait l'absence de  Loth qui le forçait à jouer les leaders, ce qu'il détestait. Et comme il n'était pas plus loquace que guide, il avait fait usage de sa meilleure arme de persuasion... Son arme à feu de poing. C'était comme ça qu'il avait ramené un semblant de discipline sur le pont.

Une femme, quelque soit sa race, s'habituait vite. Krav s’accommodait bien maintenant à l'équipe et parlait avec plus d'entrain que la honte et la timidité qu'elle avait exprimé une demi-heure plus tôt. C'était le temps qu'il avait fallu pour qu'elle retranscrive point par point l'offre et le discours que Loth lui avait tenu. Avada qui avait assisté à la tentative de persuasion de Krav pouvait certifier que la large majorité des prisonniers n'était que des suiveurs défaitistes qui auraient vendu leur loyauté contre une miche de pain. Et tant qu'ils ne resteraient que des subalternes se chargeant de tâches pas plus importantes que la sécurisation d'une maison vide, une éventuelle trahison ne saurait être préjudiciable. L'androgyne repéra malgré tout un duo d'irréductibles semblant fanatiques de Lavoisier qui s'opposèrent jusqu'au dernier moment à Krav avant d'abandonner et de jurer fidélité au nouveau patron. C'étaient des hommes-poissons de la race des requins-citrons, répondant aux noms de Bill et Gin.

La question des prisonniers étant soldée, celle de la mutinerie des hommes de Red désamorcée par l'aura meurtrière d'Avada et l'autorité de Baker, tous pouvaient se concentrer sur la mission du jour. Récupérer Le Cube. Le commando se composerait de trois unités commandées par Avada, Nivel et Krav. Chaque équipe, quatre membres chacune, aurait une tâche précise et l'ensemble devait s'emboiter comme des poupées Russes pour une efficacité de cent sur cent.

- L'unité 1 sera celle de Krav', exposa Avada sur le pont où une table de concertation stratégique avait été installée. Krav', ton unité sera chargée du renseignement. Déjà, aux lunettes, nous avons pu voir que l'îlot des déchets était un lieu désert, évité des autochtones et des pécheurs. Donc nous balader là-bas en barque déclencherait immédiatement les suspicions.  

- Donc le renseignement devra être sous-marin.

- Oui. Dans tes subalternes homme-poissons, qui sont les meilleurs nageurs ?

- Bill, Gin, et Foy.

- Tu as ton équipe alors. Renseignement bref et détaillé, discrétion absolue seront de rigueur. Vous avez dix minutes. Si vous ne donnez pas signe de vie jusque-là, le cuirassé passera à l'assaut.

- À tes ordres, fit-elle.

- Woh, woh, woh, t'es sûr de toi man ? De vouloir baser notre plan sur les renseignements qu'ils pourraient nous fournir ? Krav, bon, d'accord, elle semble être de la bonne graine. Foy aussi, ça va, il est même rigolo. Mais Bill et Gin ? Ce sont des tarés, ils sucent Lavoisier, t'as vu comment ils se sont opposés à elle dans la cale ? Moi je dis que leur soumission est bidon. Ils vont faire capoter notre opération ! Krav n'a aucun contrôle sur eux. Qu'est-ce que tu ferais s'ils vont directement voir l'ennemi pour leur révéler que nous sommes là ? pesta Nivel après le départ de l'unité de renseignement.

- Mais j'espère bien qu'ils feront un truc comme ça. Je ne t'ai jamais dit qu'il était dans mes plans qu'ils survivent à cette opération, répondit Avada d'un air machiavélique.

- Loth, sors de ce corps...


Dernière édition par Loth Reich le Mar 8 Sep 2015 - 21:38, édité 1 fois
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Au large d'Inu Town...

Avada et Nivel n'eurent pas à attendre longtemps, l'escouade de Krav revint dans le temps impartie. Ils débarquèrent sur le pont éclaboussant tout le monde d'eau de mer.

- C'est la merde et pire que ce qu'on avait envisagé.

- Comment ça ?

- Qu'y s'rait dur d'oreille l'roux ? fit Bill, le plus petit des hommes-poissons citron. "Petit" enfin, tout était relatif, il déployait tout de même quelques 150KG de purs muscles et avoisinait le mètre quatre-vingt.

- T'y sais c'qu'y s'dit nan Bill ? Un roux, ça vieillit pas. Ça rouille, par la cervelle, hahahaha ! enchaîna Gin.

- Mais c'est qu'ils se foutent de moi ! s'emporta Nivel qui fit un pas vers Gin, un véritable mastodonte du haut de ses deux mètres trente. Autant dire que l'artificier semblait aussi menaçant qu'un chaton devant un tigre.

- L'est lent à la détente, c'que j'y disais. Matière rouillée. T'y vas faire quoi ?

BANG !
Pendant un instant éphémère, tous crurent qu'Avada avait encore une fois fait usage d'une arme, avant de voir Gin faire un vol plané sur le pont. Il s'écrasa tête la première sur un des mats de l'Inoffensif. Tous les yeux se posèrent sur la main tendue de Krav. Plus de bienveillance ou de malice sur son visage à présent, une froide colère brillait dans son regard. C'est seulement à ce moment que nombre de personnes comprirent pourquoi c'était elle qui commandait l'escouade des hommes-poissons d'Ashura. Musclé rimait souvent avec gueulard alors qu'en définitive, la réelle puissance résidait dans l'action.

- Vous n'allez pas nous faire perdre plus de temps. Si je vous reprends à parler pour provoquer, vous ne vous en tirerez pas à si bon compte, dit-elle froidement aux deux requins citrons lui lancèrent des regards lui souhaitant une mort longue et douloureuse, sans pour autant riposter. Veuillez me pardonner, ça ne se reproduira plus, j'en assume toute la responsabilité, continua-t-elle en faisant une courbette à Nivel.

- Nan, nan, t'es pas responsable, hi hi, marmonna-t-il, gêné. Nul n'est responsable de la connerie des autres Krav. Et si on reprenait ? Pourquoi sommes-nous dans la merde ?

- Je vais vous faire un petit croquis, vous comprendrez.


- Voilà. Nous sommes ici, à l'ouest, derrière les rochers. Sur Immondus...

- Immondus ?

- Il fallait bien lui donner un nom, pas tout le temps l'appeler, "l'île de déchets". Ça ferait un peu...

- On s'en fout, va à l’essentiel.

- Oui, okey. Donc, sur Immondus, nous avons repéré trois postes de guet. Ils sont là, en rouge sur l'île, positionnés de telle sorte que à couvrir un angle de 180°. Rien de ce qui viendra de l'ouest, du nord-ouest ou du sud-ouest ne leur échappera. Du moins, à la surface.
Ensuite, nous sommes tombés au mauvais moment, aujourd'hui, c'est jour de livraison. Autrement dit, il y a un navire marchand qui est venu récupérer la fournée produite. Je l'ai matérialisé ici, en rouge, ancré à la jetée avec le Cube. Ce bateau marchand aussi bénéficie de la protection minimale conseillée. Donc, il n'y a pas quatre navires d'escorte comme nous l'avions supposé durant le coup de fil à Reich, mais huit. Quatre autour du Cube, quatre autour du navire marchand. Bien-sûr, ils sont posés de telle sorte à prévenir toute attaque venant de l'est.


- C'est une bonne nouvelle.

- Ah bon ? Tu te rends compte que ça va doubler le nombre d'affreux à combattre ?

- Et alors ? Je croirais que ça te ferait plaisir d'avoir plus de choses à faire sauter ? C'est une bonne nouvelle parce qu'au moins, nous sommes sûrs qu'il y a de la Dance. Parce que je me demandais ce que nous aurions fait, si une fois le Cube entre nos mains, nous nous rendions compte qu'il n'y avait pas un gramme de poudre ? Il faut juste adapter notre stratégie en fonction des nouvelles donnes.

- Je suis toujours partant pour faire péter des trucs mec ! se réjouit Nivel en faisant de grands moulinets avec ses bras. T'en as, de supers plans ?

- Non, du tout, fit paisiblement Avada.

- Mais...

- Puis-je proposer quelque chose ?

- Bien sûr, mais à Loth, pas à moi, Krav'. C'est son opération, lui qui décide de la stratégie.

- Ouais tu dis ça parce que tu n'en as aucune ouais.

- C'toujours mieux que la tienne. Tout faire péter, opina Baxter. Appelons le binoclard alors.

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Boréa

Je me demandais de quelle manière avais-je bien pu offenser une quelconque divinité pour voir débarquer à ma porte un officier de la Marine alors que je coordonnais une opération des plus illégales… Je trouvai qu’il y avait un certain air attendu dans le regard et le sourire de Midnight –magnifique prénom d’ailleurs-, comme si elle s’attendait à ce que je sois intérieurement gêné, comme si elle s’attendait à me prendre sur le fait à préparer un mauvais coup. Bien entendu, extérieurement, je restai placide, et mimai un poli air étonné.

- Ah vous remplacez Earl Grey ? Terrible perte, il avait joué un rôle décisif dans le démantèlement de la Cellule Tempest deux mois plus tôt, je l’avais côtoyé à cette occasion. Mes condoléances.

- Merci, mais je ne le connaissais pas personnellement et il est mort en faisant son devoir, répondit-elle paisiblement. Vous m’invitez à rentrer ? Il ne fait pas bon de se tenir sur le pas d’une porte par les temps qui courent.

- Vous invitez à rentrer ? Disons que je suis assez occupé…

- A faire quoi ? Il n’y a personne, fit-elle remarquer en balayant l'antichambre de la suite du regard.

- Pourquoi n'ai-je pas rempli la pièce de bimbos... pensai-je, amer. Je suis en convalescence, regardez mes bras.

- Accident de travail, je présume ? Voyez-vous, j’ai été nommée hier, vous êtes la seconde personne que je rencontre, après le roi.

- Dois-je me sentir honoré ? Pourquoi tenez-vous tant me voir ?

- Pour parler d’une mission prioritaire que m’a confiée ma hiérarchie. Démanteler Ashura. Et c’est naturellement alors que je viens à vous qui avez été mandé à cette même mission par le roi Maximillian.

- Ah. D’accord, c’est plus clair maintenant. Mais ma mission, je l’ai remplie, Ashura était représentée sur Boréa par Tempest. Après la mort de Marie-Curie, plus d’activité illicite concernant la Dance dans ce pays.

- Je n’arrive pas à me décider Loth Reich, si vous mentez pour avoir le monopole de la gloire ou parce que vous cachez un secret bien plus inavouable. Malgré que vous ayez aidé la marine à plusieurs reprises dans le passé, vous n’êtes pas quelqu’un qu’on pourrait qualifier de très fréquentable, surtout au su de votre passif avec des personnalités comme le Gila.
Et vous savez quoi, je doute encore plus de vos intentions dans ce pays après ce qui s’est passé il y a une semaine.


- De quoi parlez-vous ? demandai-je, ignorant cette attaque de front pour me concentrer sur ce qu’elle insinuait. Elle savait quelque chose et je me demandais quoi.

- Je parle de la tentative d’invasion de Boréa par mille deux cents hommes d’Ashura. Je parle de Crescent Moon Island, je parle de la Benjamin Levasseur alias La Braise, je parle de votre opération commando contre les forces de ce dernier.
Allons, laissez-moi rentrer jeune homme, parlons d’Ashura,
acheva-t-elle avec le sourire goguenard d’un chasseur ayant acculé sa proie.

Je restai de marbre mais n’en fus pas moins secoué intérieurement. Elle savait à propos de l’opération Maple (J’avais ainsi nommé l’infiltration de mon escouade sur l’île du croissant en hommage à une célèbre opération de débarquement de la Marine). Non, c’était pire que ça, me dis-je quand je lui cédai le passage et qu’elle me dépassa pour franchir le seuil. Mêlée aux effluves d’essences de fleurs qui émanaient d’elle, je perçus une odeur très particulière, difficile à décrire tant je n’en avais pas encore sentis son équivalent dans la nature. Et pour cause, cette odeur n’avait rien de naturelle, c’était celle de l’agent Orange, un puissant gaz incapacitant qui causait des dégâts respiratoires et pulmonaires semblables à un accident de décompression. J’en avais utilisé sur l’île du Croissant. La vérité m'apparut alors avec la puissance d'un train en course. Midnight ne savait pas pour l’opération Maple, pire, elle y était.

La Commandante s'assit dans un fauteuil rembourré, croisa les jambes et me regarda l'air à l'aise. Son regard était éloquent, elle attendait ma contrattaque, ma justification, maintenant qu'elle m'avait fait comprendre qu'elle en savait plus qu'elle ne l'aurait due. Elle se servit même dans le minibar, elle était décontractée, elle savait que notre affrontement serait purement verbal. Je n'étais pas fou pour l'attaquer physiquement. Non, je ne l'étais pas.

- Ainsi donc vous y étiez ? Je ne vous ai pas vu et pourtant, ma mémoire est eidétique.

- Grand bien vous fasse alors. Disons que j'étais sous une forme qui permettait de passer inaperçue.

- Vos amis vous appellent Bee aviez-vous dit ? Un zoan alors... Bien joué. Je suis désolé pour l'utilisation l'agent Orange, j'en repère encore les effets sur vous. C'est pour ça que vous boitez, je suppose.

- Les risques du métier. Alors, vous m'expliquez ce que vous faisiez sur Crescent Island ? Parce que jusque-là, je n'ai pas compris.

- Même si j'ai dit le contraire quelques minutes auparavant -et vous avez raison, je veux garder toute la gloire pour moi-, je poursuivais la mission que m'a confiée le roi. Un coup d'état était en préparation, j'y ai remédié.

- En faisant appel à des criminels comme Jonathan Nivel ou le tueur à gage Avada Kedavra ? Vous jouez avec les limites de la légalité.

- Ah bon ? C'est une supposition ou une affirmation ? Les avez-vous vu avec moi ? Obéir à mes ordres ? En ce qui me concerne c'était juste une heureuse coïncidence qu'ils fussent sur la même île que moi et qu'ils attaquassent presque au même moment que moi.

- Mumumu, soit, je ne les ai pas vus. Mais dites moi, vous avez été battu et la Braise vous a emmené ligoté sur son navire. Il a quitté Crescent avec une demi-trentaine de bateaux mais il n'est jamais arrivé à Boréa. Comment avez-vous fait pour l'arrêter ?

- Voilà une question à la quelle je ne saurai répondre. Je vous avoue que j'étais dans les pommes et qu'une explosion m'a réveillé. C'était le chaos et quand j'ai pu arriver sur le pont, toute la flottille était en feu, mentis-je.

- Sans ennemis apparents ?

- Oh si, un seul. Jonathan Nivel. Je vous rappelle que c'est lui qui a détruit la moitié de la flotte alors qu'elle était encore ancrée aux ports de Crescent. Il a fini son travail en mer. Comment, je l'ignore. Pourquoi ? Je l'ignore encore plus. Ce que je sais, c'est que la Braise est morte et moi, je panse mes plaies.

Elle n'était pas dupe et je le savais. Mon tissu de mensonge était malgré tout assez viable, c'était le genre de Nivel même si là, c'était trop gros pour être vrai. Mais je ne pouvais lui avouer que j'avais pactisé avec Red et que c'est uniquement à l'aide de ses deux cuirassés que nous avions pu endiguer la menace que représentait Benjamin Levasseur.
Avant qu'elle ne puisse ouvrir la bouche à nouveau, une distraction impromptue déboula dans la suite et j'eus besoin de toute la maitrise instantanée de soi pour ne pas faire une mortelle gaffe alors qu'une perche lumineuse m'était tendue. La diversion en question se personnifiait sous les formes supers généreuses d'une rousse échevelée, vêtue de maillot de bain deux pièces recouvert par un pyjama affriolant. Instantanément, je sus qu'elle était envoyée par Dena' et qu'elle était rentrée par la porte cachée sous la tapisserie qui se trouvait dans ma chambre.

- Bébé, qui s'est ? me demanda-t-elle d'une voix mielleuse.

- Le commandant de la nouvelle base de Marine d'ici, répondis-je d'un ton dégagé. Je vous avais dit, Commandant, que je me reposais et comme vous pouvez le constater, cette pièce n'est que le salon de la suite, y a trois autres chambres personnelles.

- La demoiselle, répondit Midnight comme si elle doutait que la bimbo fît partie de cette gente, attendra sûrement que nous ayons fini, non ?

- Non, ça ne peut pas attendre, répondit la bimbo. Faut qu'il vienne voir un truc, ma sœur attend.

- Oui, viens voir, Loth, fit une seconde voix féminine du fond de la chambre.

- Sa sœur ? Vous savez vous amuser apparemment, Reich. Allez donc voir ce que vous veulent vos dames, je reste dans le coin, je n'en ai pas encore fini.

- Ouais, super. Merci.

La lolita à mon bras, nous pénétrâmes dans une des chambres à coucher que nous refermâmes soigneusement. A l'intérieur, trois autres filles du même genre languissaient sur le lit en mode dépravée. Dena avait réagit très rapidement en faisant appel à ces escortes pour me fournir une raison de m'éclipser. Et cela signifiait qu'il était temps de reprendre provisoirement du service au bout du fil, et diligenter cette entreprise illégale alors que dans mon salon, attendait une commandante de la Marine. J'avais déjà joué à de dangereux jeux de funambule avec l'autorité mais jamais avec une telle promiscuité.
Attention au retour de flamme.

  • https://www.onepiece-requiem.net/t12978-fiche-technique-de-loth
  • https://www.onepiece-requiem.net/t10961-loth-reich-le-marchand-heretique

 
- T'as aimé mon cadeau ?

- La prochaine fois, essaie d'en trouver qui fassent moins lolita et filles de joie, répondis-je une fois dans la suite de Dena, dans notre QG improvisé. Je suis à vous pour dix minutes au moins, alors allons à l'essentiel et rapidement, dis-je à Avada et aux autres au bout du fil.

Succinctement l'androgyne me décrit la situation actuelle et je fus de son avis. Loin d'être un handicap, c'était une opportunité certaine de récupérer la Dance mais l'objectif secondaire était toujours viable, c'est à dire s'emparer du Cube sans l'endommager. Machinalement je redressai mes lunettes sur mes arêtes, plusieurs fois. Dena' qui connaissait bien mes mimiques depuis trois ans déjà qu'on faisait les quatre cents coups ensembles savait que les remontées mécaniques de mes verres étaient le signe que mon cerveau fonctionnait à plein régime à trouver une stratégie. Quand enfin, j'enlevai mes lunettes pour désinfecter mes yeux à l'aide d'un collyre, je détenais le plan à suivre.

- Nivel, tu me fais un récapitulatif des moyens dont vous disposez ?

- J'ai préparé quinze Egg, dont la moitié est incendiaire. Même si tu n'aimes pas ça, j'ai aussi une nuée de Pies-surprises. Ça c'est pour les moyens non conventionnels. Pour les généraux, y a les roquettes, grenades, les bombes à minuteries et autres.

- Je vois. Écoutez tous, le plan se déroulera suivant quatre phases.

[...]

- Désolé de vous avoir fait attendre, Commandant.

- Avez-vous satisfait vos dames ? me demanda-t-elle quand je revins à elle dix minutes plus tard.

- Nan, rien de tel, je n’allais pas me permettre de tirer la bagatelle avec une invité telle que vous dans mon salon. C’était un souci de partage de cadeaux, de chaussures. Vous savez mieux que moi ce que les femmes ont dans la tête. Revenons à nos moutons. Nous en étions à la mort de La Braise.

- Oui, Benjamin Levasseur a entraîné la branche armée du Réseau avec lui dans la mort. Mais Ashura subsiste et ce que je suis venue vous offrir, c’est ma collaboration.

- Vous voulez que je travaille avec la Marine ?

- Oui, comme il vous est arrivé de le faire dans le passé.

- La donne a changé depuis et je ne peux plus faire confiance à la Marine. Ne vous en déplaise, Ashura a sûrement quelqu’un de haut placé dans les rouages du Gouvernement qui le prévient des assauts de la Marine. Si je veux réussir, je dois opérer seul.

- Il n’y aura aucun souci de fuite puisque par Marine, j’entendais moi. Vous ne travaillerez qu’avec moi et je n’en referai à personne. Enfin, qu’à une seule personne. Tous les risques de fuite seront alors contenus.

- Quelle est cette autre personne si digne de confiance ?

- Le vice-amiral Swiffer Jones, mon Maître, fit-elle en souriant. Durant la traque de Marie-Curie, vous avez fait équipe avec le Lieutenant Will Kelly qui a ensuite trouvé la mort en la combattant. C’était mon cadet parmi les disciples du vice-amiral. Vous voyez, nous avons plus de points communs que vous ne le pensez.

J’étais acculé et refuser son offre aurait engendré plus d’entraves qu’autre chose. Je n’avais pas le choix, je devais accepter tout en essayant de limiter la casse. Déterminer les termes de notre partenariat resterait la clé pour échapper à ses griffes. Certaines branches d’Ashura avaient besoin d’être définitivement élaguées et je pouvais lui en faire part pour bénéficier de sa puissance mais quand il s’agira des démembrements que je devais m’approprier pour reprendre le Réseau à mon compte, je devais l’éloigner. Je n’aimais pas ça, avoir Midnight dans mes pattes risquait de grandement compliquer mes opérations.

- D’accord, j’accepte le principe. Mais je suis en free-lance et pas à vos ordres, sachez-le dès maintenant. Je ne suis pas contre le principe des partages de gloire et des retombées de notre collaboration à venir mais je tiens à garder mon indépendance et à choisir mes pistes, sans vous donner de raisons. Je ne vous suivrai pas sur les vôtres qui ne me sembleront pas prometteurs.

- Ça me va à merveille, qu’il en soit ainsi.

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Au large d'Inu Town...

Ils étaient fin prêts. Loth leur avait détaillé la marche à suivre et Avada veillait à ce que chaque phase de la stratégie du binoclard soit suivie à la lettre.


Phase 1  
La mort était silence. Cette première partie vit l’entrée en scène de l’escouade N°3, celle que commandait Avada. L’androgyne avait composé son équipe sur la base de ses points forts : la distance et la furtivité. Leur objectif était simple, éliminer les trois postes de guet pour permettre au reste de l’équipe d’approcher sans déclencher les hostilités.
Sur conseil de Krav, Loth opta pour une approche sous-marine d’Immondus par les snipers, ce que désapprouva fortement Avada. Malgré tout, il s’y plia. La tactique prônée par Krav avait ses raisons. L’intégralité de la surface de la mer autour d’Immondus jusqu’à cinq kilomètres à la ronde était jonchée de détritus. L’eau bleutée n’était même pas visible. Il était inutile pour Avada et ses hommes de plonger profondément, la ruse de Krav consistait à évoluer sous la surface immédiate, drapée dans une combinaison noire recouverte d’algues marines pour se fondre dans le décor. Des tubas déguisés comme de vulgaires branches d’arbres permettraient aux snipers de respirer tout en évoluant sous le couvert des immondices.

Ils étaient quatre à se laisser charrier par le courant qui les dirigeait inexorablement vers Immondus. C’était ainsi que l’île avait pu s’agglutiner. Ils bougeaient rarement, parfois un pied ou deux pour corriger leurs trajectoires. Trois d’entre eux avaient pour cible les trois postes et un autre, Avada, restait en retrait pour veiller au grain. Les guets avaient tous la même configuration, des empilements de sacs derrière lesquels se plantait un garde en faction derrière une mitrailleuse lourde qui ne demandait qu’à cracher ses balles. La courte distance qui séparait les postes d’observation exigeait une attaque simultanée de peur de voir les autres engager des représailles et donner l’alerte. Avada avait bien fait les choses durant ces cinq derniers jours, la synchronisation de son équipe avait été rudement travaillée. Quand ils furent en place, c’est-à-dire à trente mètres environ de la surveillance, toujours sous la flotte, leur leader donna le top départ sous la forme d’une éphémère raie de lumière reflétée par un miroir.

Synchronisés telle une même âme, les snipers émergèrent des déchets, fusils de précision au poing. A cette distance, prendre appui n’avait pas été compliqué, ils étaient déjà pied à terre en fait, c’était la côte d’Immondus. Pépères depuis trop longtemps, les gardiens d’Immondus étaient trop peu enclins à prévenir une attaque de cette nature. Trois bruits étouffés naquirent quand les balles quittèrent leurs barillets et traversèrent les modérateurs de son qui les rendaient silencieuses. Les gardes derrières leurs Gatlings et forteresses de sables s’effondrèrent quand les balles se logèrent dans leurs boites crâniennes. Un pas après l’autre, les membres de l’escouade prirent à leurs tours positions derrières les forteresses et se hâtèrent de sécuriser les lieux. Avada débarqua après son équipe et constata avec émerveillement que les mitrailleuses Gatlings étaient mobiles et montées sur des roues. Il lui vint alors la bonne idée d'amender le plan de Loth avec cette belle découverte...
Phase Une : Réussie.


Phase 2  
Durant cette phase, le gros des forces de l’équipe entra en scène. L’Inoffensif contourna les récifs qui lui offraient camouflage et fit voile vers le sud-est en décrivant un arc de cercle. L’objectif avoué était de surprendre Black Box en pleine transaction par le sud pour les pousser à fuir vers le nord ou le nord-ouest. Baxter diligenta son équipage d'une main de maître. La flottille de Black Box, privée de ses guetteurs du flanc ouest ne vit qu'au dernier moment le cuirassé géant profiler sa masse derrière la crête d'Immondus. Au dernier étage du château fortifié du centre du navire, les jumelles de Baxter lui offrirent une vue imprenable sur leurs ennemis. Krav' et son équipe -et il estimait toujours que l'idée de Loth d'incorporer les prisonniers était mauvaise- avaient donné des infos justes, il y avait huit caravelles dans le même genre que celles qu'ils avaient affrontés au large de Boréa. Séparées en deux groupes de quatre, elles formaient un cercle autour de deux navires du même acabit amarrés à une jetée. Une certaine activité régnait sur l'estacade, des hommes transportaient des caisses et des sacs. De la Dance, se dit Baxter qui leva la main pour donner le top départ.

Le canon principal tonna et le recul fit vibrer l'Innofensif. Le boulet mourut quelque part à tribord de la caravelle la plus à droite du quatuor qui couvrait le flanc sud de la môle. Suivant le plan de Loth, ces quatre bateaux seront les adversaires de l'Innofensif. Ce premier tir était un coup de semonce destiné à peaufiner les derniers ajustements et dégripper le canon. Dès qu'ils furent prêts, non seulement le canon principal mais aussi les auxiliaires crachèrent leurs boulets dans un tapage assourdissant. Comme l'avait prévu Loth, les gardiens du sud ouvrirent à leur tour le feu sur le cuirassé, protégeant le commerce. Baxter n'en avait cure de ce qui se passait au delà des quatre adversaires de son cuirassé, les autres bateaux étaient l'affaire du reste de l'équipe. Sa mission à lui consistait à se taper les gardiens du sud qui étaient tout aussi entraînés que la défunte flotte de La Braise. Ils étaient rapides, manœuvrant avec agilité, conciliant voiles et rames pour slalomer entre les boulets du mastodonte. Ils firent mouche en premier, un obus vint heurter le flanc de l'Innofensif et éjecta quelques marins dans la flotte ce qui porta à son comble l'exaspération de Baxter. Successivement, deux autres boulets embrassèrent la coque du géant, y causant des dommages moyens.

La bataille durait depuis moins de dix minutes et Baxter en avait déjà par dessus les coquilles de cet adversaire agile et insaisissable qui se jouait de l’imposante masse et de la lenteur du cuirassé pour le prendre à défaut. Mais, sourit le capitaine, tout ceci était connu, il connaissait mieux que personne les points faibles de son bijou. Nivel aussi avait pu observer durant la bataille contre la Braise que les boulets de l'Innofensif tardaient à toucher leurs cibles. Aussi avait-il planché sur un genre spécial de boulet que Baxter ordonna qu'on charge dans le canon. Ils n'avaient pas eu le temps de le tester, mais rien ne valait les conditions réelles, n'est-ce pas ?

- Boulet spécial "Kiss of Anarchy !", tonna Baxter quand le projectile fusa de la pièce d'artillerie.

Avec un boulet spécial Anarchy, nul besoin n’était de faire mouche, il était d'ailleurs déconseillé de viser pour toucher. Si l'ennemi était une formation serrée de bateaux comme il en était question en ce moment, il était préconisé de viser un vague point équidistant entre les éléments de la formation. Au point X à égale distance entre les deux navires les plus à droite des quatre, le boulet explosa.
Vu de ces deux navires, la chose aurait sûrement ressemblé à une averse de liquide. Ce fut exactement ce qui se passa. La première phase d'enclenchement d'un boulet spécial Anarchy consistait à répandre et à vaporiser du carburant à sur un large périmètre. Selon les explications simplistes de Nivel, il suffisait de voir son boulet comme une espèce de puissant spray. La seconde phase consistait naturellement à embrasser tout ça.

L'équipage des navires avait seulement du voir une intense lumière orangée avant de voler en éclat. Du point de vue de Baxter, ce fut une colossale langue de feu qui naquit et lécha les caravelles. La déflagration suite à l'embrasement n'était qu'un prémisse, la principale arme d'un boulet Arnachy était le feu. Un hommage ironique de Nivel à Benjamin Levasseur qui ne jurait que par cet élément.
"Enfer chrétien, du feu. Enfer païen, du feu. Enfer hindou, des flammes. Toutes les religions le confirment, Dieu est né rôtisseur", disait La Braise. Les hommes de Black Box ne pouvaient qu'être d'accord en ce moment même, sautant dans la mer de détritus pour échapper aux mèches purificatrices du feu ou pour éteindre leurs vêtements rongé par l'élément. Une joie enfantine anima Baxter et l'équipage. Le capitaine se reprit ensuite et intima à ses hommes de faire pareil, il restait encore à se débarrasser de deux navires.
Phase Deux : En bonne voie.


Phase 3  
Pendant que deux caravelles brûlaient comme du petit bois, la débandade était à son comble sur la jetée. Précipitamment, le transfert de la Dance du Cube vers le navire marchand s'interrompit et ce dernier prit la mer vers le nord, devancé par son escorte de quatre navires qui lui ouvrirent la voie. L'équipage marchand avait été prompt à mettre les voiles contrairement à celui du Cube dont les réflexes de fuites étaient sûrement rouillés par une trop grande et paisible sédentarisation sur cette île détritus oublié de tous. Quoiqu'il en fût, ce roulement de tambour, ces précieux moments gâchés par l'équipage du Cube à coordonner leurs manœuvres fut ce dont avait besoin l'escouade d'Avada. Deux de ses commandos déboulèrent de chaque flanc de la montage d'immondices et canardèrent les hommes de Machiavel avec les mitrailleuses montées sur roues dont étaient équipés les hommes du guet. Les balles sifflèrent, les chairs devinrent passoires, du sang gicla par litres, des hommes hurlèrent et supplièrent. Puis la résistance s'organisa tant bien que mal.

A plat ventre, camouflé de déchets, l'androgyne logea trois balles coup sur coup dans des têtes. Un bref coup d’œil lui permit d'estimer l'équipage du bateau laboratoire à une trentaine d'individus. Ils en avaient déjà éliminé une dizaine d'entrée de jeu grâce à la surprise et la létalité des Gatlings mais c'était terminé à présent, cela deviendrait plus ardu. Surtout, si de quatre, ils passaient à deux. Les deux hommes qui faisaient feu avec les mitrailleuses succombèrent sous la riposte ennemie.
Avada doutait bien que la situation tournerait à leur désavantage mais leur mission à eux n'avait jamais été de s'emparer du Cube, juste de retenir l'équipage assez longtemps pour que l'Inoffensif se débarrasse de ses gêneurs et vienne empêcher toute retraite du navire-labo. A ce moment, les centaines d'hommes du cuirassé pourront submerger ceux du Cube de leur nombre.

En attendant ce moment, biens dissimulés, Avada et le seul homme qui lui restait, canardèrent le pont. L'objectif était d'éliminer et d'empêcher quiconque de tenir la barre ou de tendre les voiles. Résultat, l'équipage était à plat ventre, sur le pont ou sur la jetée, ripostant par tirs interposés, visant dans le vide, incapables de localiser d'où provenaient les tirs embusqués.
Phase Trois : En bonne voie.


Phase 4  
Cette dernière partie concernait les fuyards que nul n'entendait laisser s'échapper. L'objectif était bien sûr d’annihiler l'escorte mais aussi de récupérer le navire marchand. Pas intact à tout prix comme avec le Cube, mais moins il serait détruit, mieux ce sera, avait estimé Loth. Pour l'instant, les cinq navires étaient pépères, fendant l'onde vers le nord, loin du cuirassé, loin du commando sur Immondus. Le navire marchand avait repris sa place au cœur de la formation en diamant de ses quatre caravelles gardiennes. Les hommes d'escorte étaient aux aguets, le fusil et le canon prêts à cracher.
L'alerte vint du navire à droite de la formation qui repéra un canoë esseulé dans la mer. Visiblement, quatre hommes étaient à son bord et ils ne semblaient disposer d'aucune arme susceptible de les inquiéter. Malgré tout, c'était la guerre et les marchands de pluie n'entendaient pas laisser quiconque entraver leur commerce. La caravelle fit feu et manqua de peu le canoë qui manœuvra pour éviter les salves suivantes.

Leurs manèges étaient étranges, constatèrent les équipages marchands. Ils ne rapprochaient ni ne s'éloignaient. Ils se contentaient juste d'esquiver mais n'attaquaient point. On aurait dit que leur principal souci était juste de garder une bonne distance. Puis sans prévenir, des espèces de tonneaux, des barils, émergèrent du fond de l'océan et flottèrent paresseusement à la surface. Cela interloqua plus que tout les équipages ennemis qui cessèrent le feu pour se questionner sur la nature de ces choses qui venaient de surgir de nulle part, au sein et autour de leur formation.
Mais quand une des vigies armées de ses lunettes astronomiques identifia un des occupants du canoé, il ne fit aucun doute au sein des équipages qu'ils allaient passer le pire quart d'heure de leurs vies. Et peut-être ne s'en relèveront-ils jamais.

- C'est Nivel ! Jonathan Nivel de Las Camp ! beugla-t-il.

Le Niveleur était dans la place et il était temps de donner de la voix au nivellement. Le nom de Nivel provoqua la scission et la débandade au sein de la formation, comme une colonie de termite devant un fourmilier. Leur manège à garder une distance raisonnable puis ces tonneaux, tout était clair pour chacun maintenant.

- Hihaaaaaaa, craignez mes Egg of Anarchy ! hurla Nivel en brandissant un détonateur.

Il pressa un des multiples boutons de la commande et le premier baril provoqua une fantastique explosion qui éventra et coupa bonnement en deux la caravelle au nord de la formation. Ce n'était pas une bombe conventionnelle, ceux qui avaient assisté à la mise à feu et qui recelait d'un peu de lucidité pouvaient en témoigner.

- Hihaaaaaa, ce sont des bombes à pression, ce qu'elles lâchent, c'est de l'air comprimé et surchauffé, là aussi pas besoin de viser juste, faut juste être à proximité. Hihahahahaaaaa, que le spectacle continue. Danse of Anarchy ! se réjouit Nivel qui, tel un maître d'orchestre, bougeait frénétiquement sur son canoë, donna le tempo, appuyant ici et là en observant émerveillé ces bijoux exploser, réduire en charpie et bois flotté la flottille marchande.

Le plus jouissif était sans doute qu'ils ne pouvaient riposter. Et quand un imbécile au canon s'y essaya, le baril explosa avec encore plus de puissance qu'elle n'en détenait, résultat de la puissance combinée des deux explosifs. Il se marrait bien Nivel, voir tant de destruction le plongeait dans un état quasi orgasmique. Il était dans son élément, le chaos était sien.
Phase Quatre : En bonne voie.


Il s’amusait tellement, Nivel, comme un gamin ayant un parc d'attraction pour lui tout seul, qu'il ne vit pas que quelque chose clochait. Mais Avada, lui, savait qu'un retour de bâton imprévu s'approchait. De son côté, l'affaire était en passe d'être soldée, l'Inoffensif avait envoyé par le fond les deux navires restants et se mettait en position pour obstruer le passage au Cube qui avait, malgré les coups de feu de l'androgyne, mit les voiles. Non, ce qui clochait venait de chez Nivel.
Mais pour comprendre ce qui n'allait pas, il fallut se poser la question de la nature de l'apparition spontanée de ces tonneaux. Ils avaient émergé comme par magie, pilepoil autour de leurs cibles. Bien sûr, le hasard n'y était pour rien dans cette manœuvre, à une centaine de mètres sous la surface, l'escouade N°1 de Krav s'était chargée, avant même l'élimination des hommes du guet, de s'immerger avec ces tonneaux. Leur mission consistait à suivre d'en dessous la flotte marchande et à les piéger avec les tonneaux surprises en laissant le soin à Nivel d'enclencher ses bijoux.

Une fois leur mission terminée, l'escouade de Krav devait revenir prêter main forte à Avada pour la prise du Cube. Ils n'étaient pas remontés à la surface depuis et un quart d'heure s'était déjà écoulé. S'étaient-ils enfuis comme des lâches ? Non, s'ils voulaient s'échapper, ils seraient partis depuis le moment où ils avaient été envoyés en reconnaissance. Ils n'auraient pas attendu l'opération principale, ni de mener à bien leur propre part pour disparaître. Avada et Baxter arrivèrent à la conclusion que quelque chose les avait empêchés de rejoindre la surface. Et une fois cette certitude établie, leurs regards furent irrésistiblement attirés vers la grosse tâche noire qui se décalquait sous le minuscule canoë de Nivel. Une autre masse sombre se profila sous l'Inoffensif. Dans l'eau trouble, Baxter parcouru de sueur froide fit s'illuminer deux grands yeux jaunes.

Apparemment, tout ne se déroulerait pas comme prévu.



Dernière édition par Loth Reich le Mar 25 Aoû 2015 - 2:30, édité 1 fois
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Tout ne se déroula pas comme prévu et l'imprévu était de taille. Au sens premier. Nivel et son escouade se rendirent compte du danger bien trop tard tandis que l'équipage du cuirassé avait ses armes prêtes et pointées vers la mer où la masse noirâtre se faisait de plus en plus précise.

Du côté de Nivel, de grosses bulles apparurent à la surface jonchée de déchets. Alors qu'il s'amusait comme un fou à faire exploser ses barils, le Niveleur s'arrêta soudain, figé et frappé d'horreur. Sa première pensée farfelue fut que la mer était en train de bouillir tant les bulles étaient nombreuses. C'est ensuite seulement qu'il vit la forme sombre qui ombrageait le dessous de son canoë. Il le vit lui aussi, ces deux grands yeux jaunes. Nivel ordonna bien trop tard à ses hommes de pagayer comme si leurs vies en dépendaient, et il n'aurait su être plus proche de la vérité.
Quand la petite embarcation tangua violemment, ils se retrouvèrent tous vautrés, les bras et les jambes si étroitement emmêlés qu'il sembla peu probable qu'ils puissent les démêler avant plusieurs années. Le canoë fut soulevé de la surface par une espèce de geyser, une explosion d'eau à la verticale. L'embarcation vrilla, fit plusieurs tours en éjectant ses passagers. La peur et l'horreur emplirent le cœur de tous, parce qu'ils en étaient certains, aujourd'hui était le dernier jour de leur vie. Semblant suspendus en plein air, comme si le temps ne s'écoulait pas à la même vitesse pour eux, l'escouade N°4 vit avec effroi émerger l’innommable. Un monstre marin à la peau tachetée comme celle d'une vache, des cornes et surtout une dizaine de rangée de dents aussi grande que Nivel...

La créature ouvrit la gueule pour cueillir deux membres de l'escouade qui étaient tombés plus vite que les deux restants. L'anarchiste poussa un cri d'épouvante quand les dents de la mort se refermèrent sur ses acolytes, broyant leur chair, se délectant de leurs sangs. Mais, il se reprit instantanément, Nivel. Il savait que le temps du deuil viendra. Celui-ci était celui de l'action, car il tombait lui aussi, inexorablement vers cette gueule béante qui ne demandait qu'à se repaître de sa chétive constitution.
Cependant, Nivel avait d'autres projets d'avenir que celui de finir dans les entrailles d'un monstre, aussi fourra-t-il la main dans sa sacoche et en ressortit deux bâtons de dynamites qu'il alluma avec sa pierre à feu. Juste avant de finir mangé, il balança les bombes dans la gueule ouverte de la créature. Elles explosèrent arrachant au monstre un beuglement de douleur.
Gagné, pour le moment. Nivel et l'homme qui lui restait tombèrent dans la mer de détritus. D'autres sentiments chassèrent alors la peur : la désorientation, la paranoïa, la panique. Car ils le savaient, ils n'étaient pas encore sortis de l'auberge, la créature avait juste été sonnée pour un moment. A présent, il lui serait facile de ne faire qu'une bouchée d'eux parce qu'ils étaient dans l'eau. Ils étaient dans son élément.

Barbotant dans cette eau noirâtre d'immondices et infestée de moustiques ainsi que de larves en tout genre, Nivel tenta de se repérer. Vers le sud, il y avait la jetée, le seul pied-à-terre qui pouvait encore l'extirper de cet environnement marin si toutefois il parvenait à l'atteindre. A moins qu'il ne se dirigeât vers les épaves fumantes de la flottille marchande qu'il avait en partie détruite ? Non, ce serait du suicide, il y avait encore des ennemis à bord. Mais à peine avait-il envisagé de faire des brasses vers la jetée qu'il vit que là-bas aussi, ils avaient leurs propres problèmes à régler, un autre monstre était aux prises avec le cuirassé. Un autre bien plus grand que celui qui s'en était pris à eux. Fugacement, il nota qu'ils étaient de la même espèce de vaches marines. Une mère et son petit, se dit Nivel qui vit son dernier homme plonger à pic, comme un flotteur dont l'hameçon serait pris entre les dents d'un poisson. Terrible comparaison qui immobilisa l'anarchiste de peur. Il était désarmé, dans l'eau il ne pourrait lutter contre un poisson. Ses minutes étaient comptées.

Si Avada et les hommes de Baxter n'avaient pas encore porté assistance à Nivel, c'était parce qu'ils avaient leur propre chat à fouetter. Enfin, une vache plutôt. Colossale, géante et furax. Intelligente qui plus est. Elle s'extirpa de la mer à bonne distance du cuirassé puis replongea violemment, se servant de sa masse pour frapper l'eau.

- C'est qu'elle cherche à nous couler avec un raz-de-marée ! s'exclama Baxter pris au dépourvu face à la vague géante qui fonçait sur son cuirassé.

Si la vague ne fut pas assez puissante pour retourner l'Inoffensif, elle fit un malheur sur le pont où se hâtaient une centaine d'hommes d'équipage. Ceux qui n'eurent pas le réflexe de se cramponner très fort passèrent par dessus le bord. Ils furent une vingtaine en tout, et quand la mer de détritus se teinta de vermillon, Baxter sut que leur sort était consommé. Littéralement.

- Feu à volonté, descendez-moi ça ! hurla-t-il de rage.

Les canons tonnèrent dès que la créature refit surface. Elle reçut le boulet du canon principal en pleine poire. La déflagration l'envoya valdinguer et raser la surface. Le monstre s'encastra dans le navire marchand dont il écrabouilla la plus grande partie. Blessé, le monstre était plus furieux que jamais et son long feulement strident remplit d'effroi ses adversaires, ses proies plutôt. Il plongea et déclencha une nouvelle fois une onde de fond vers le cuirassé.

Pendant que Baxter tonnait de faire feu sur la lame de fond qui fusait vers eux, Avada réfléchissait à la situation. Qu'aurait fait Loth dans cette situation, se demanda-t-il. Même s'il n'aimait pas penser comme le binoclard, il savait que sa froide abnégation était bien utile quelque soit la situation. Il aurait réfléchi, Loth réfléchissait beaucoup, beaucoup trop d'ailleurs. Mais c'est qu'il faisait, lui, Avada, en ce moment. Il réfléchissait alors que sa spécialité était de tirer pour tuer. Il réfléchissait, s'interrogeait car quelque chose semblait clocher dans le déplacement des monstres. Aussi bien celui qui attaquait l'Inoffensif que celui que Nivel essayait d'éloigner en jetant au hasard de la dynamite dans la mer.
Quand le premier, le plus petit avait attaqué, Avada n'avait pu s'empêcher de se demander pourquoi le canoë de Nivel en particulier alors qu'une flottille mal en point gisait à quelques encablures de là. Peut-être parce que l'escouade de Nivel paraissait plus inoffensif ? Soit, mais alors pourquoi la mère du petit était-elle apparue sous le cuirassé, le bateau le plus mastoc du coin ? Pourquoi avait-elle soigneusement ignoré le Cube, petit et désarmé qui se trouvait juste à côté ? Pourquoi quand elle s'était écrasée sur le navire marchand, ne l'avait-elle pas dévoré en une bouchée alors qu'il regorgeait de gens ? Pourquoi les raz-de-marées qu'elle provoquait ciblaient uniquement l'Inoffensif en épargnant le Cube ?

D'ailleurs en parlant du Cube, Avada remarqua avec stupéfaction que le bateau n'avait pas de voile. Tout ce temps, il avait tiré pour que personne ne les tende, pour que le navire ne puisse pas appareiller mais il n'avait pas remarqué que de voiles, le bateau cubique n'en disposait pas... Quel bateau en ce monde n'avait pas de voile, se demanda-t-il. Certes, le bateau-laboratoire disposait de roues à aube mais cela n'expliquait pas cette anomalie. Le regard de l'androgyne fut attiré par les espèces de longues tiges qui dépassaient de la proue. Ce n'étaient pas des figures de proue non... cela ressemblait plus à...

- Des attelages... murmura-t-il. Ces monstres sont apprivoisés, ce sont eux qui tractent le Cube. Voilà pourquoi il n'a pas de voile, il n'en n'a pas besoin. Et s'ils attaquent sans causer de dommages volontaires au Cube, ni à la flottille marchande c'est qu'ils ont sûrement des ordres. Quelqu'un, à bord de ce navire contrôle ces créatures... conclut l'androgyne qui se jeta à la mer sans réfléchir davantage.

La vache-mère était obnubilée par le cuirassé, aucune chance qu'elle le remarque nageant sous la croûte de détritus, se dit Avada. Il nagea plus rapidement qu'il ne l'avait fait auparavant dans sa vie. Il voyait la silhouette du Cube non loin de lui. Des monstres marins apprivoisés, ce n'était pas rare du tout, surtout quand on ajoutait à l'équation la nature du chimiste-en-chef de Black Box. Machiavel était un homme-poisson de la race des poissons fugu avait dit Loth. Il devait être dans ses cabines ordonnant d'une manière ou d'une autre à ces monstres d'attaquer ses ennemis.
Ventouses à la main, Avada s'accrocha à la coque du Cube qu'il se mit à grimper pendant que le cuirassé était toujours aux prises avec la vache-mère. Leste comme un félin -d'ailleurs ce n'était pas pour rien qu'il était surnommé Bobcat ou le Lynx-, Avada glissa sur le pont et se tassa. Une vingtaine de personne en arme y étaient et regardaient hypnotisés le combat du cuirassé contre le monstre. Trop concentrés en somme pour remarquer l'ombre indicible qui rasait les planchers et se glissait dans les cabines. A l'entrée du corridor qui desservait les appartements de l'équipage, le Lynx tomba sur un gêneur qu'il fit taire d'un coup de couteau dans la nuque. Mort instantanée. Il tira le corps et l'enferma sans état d'âme dans une cabine. Sa progression était prudente. L'intérieur était espacé et sentait la pharmacie. Normal pour un bateau qui devait être bourré de produits chimiques. Avada descendit au niveau de la cale, et continua sa prospection...


Le monstre-rejeton revenait à la charge et Nivel pria pour son âme. Aucune échappatoire, aucune bombe, aucune fumisterie cette fois-ci, il était cuit, c'était fini. A moins que...

- Gyojin Karaté, Technique des milles tuiles !

Une violente onde de choc frappa la vachette marine en pleine gueule. C'était Krav', elle émergea auprès de Nivel qui eut les larmes aux yeux de gratitude. Elle semblait blessée, plusieurs coupures et ecchymoses constellaient son visage potelé. Une marque profonde de morsure avait lacéré son épaule droite. Il était évident pour l’anarchiste que ces monstres étaient la cause de l'incompréhensible disparition de l'escouade N°1. Krav' ne s'arrêta pas à cette seule contrattaque, elle plongea. Nivel aurait voulu lui crier de ne pas l'abandonner tout seul, mais il savait qu'elle ne s'enfuyait pas. Elle plongeait pour mieux attaquer. Et quand elle refit surface, ce fut à la vitesse d'un boulet de canon. Tête la première, Krav' percuta violemment le monstre à l'abdomen si bien qu'elle le propulsa hors de l'eau.

- C'est pas fini, haleta-elle. Gyojin Karaté, Technique de la lance aqueuse !

De sa paume, Krav' frappa la surface de l'eau, la modela, et en fit une sorte de javelot qu'elle propulsa sur le monstre en l'air. La force de pénétration de l'eau à cette vitesse était incroyable. Sans mal, elle perfora l'abdomen tachetée de noir de la créature, l'empala, et ressortit par son dos. Krav avait visé le cœur du monstre. Le rejeton mourut avant de tomber à grand bruit dans la mer.

- Il reste la mère, fit-elle époumoné en replongeant pour aider le cuirassé.

- Euh, merci du coup de main !


Dans les entrailles du Cube, Avada trouva la salle principale du laboratoire. Un coup d’œil à travers de sa porte vitrée lui confirma la présence de quelqu'un. Une personne, un autre homme-poisson certes, mais qui ne ressemblait pas du tout à Machiavel. Celui-ci était rose et semblait descendre d'une quelconque espèce de raie. Il était là, posé sur un tabouret, et jouant de la flute. Bobcat le regarda faire pendant une minute. La porte du labo était certes vitrée mais des trous permettaient la circulation de l'air. Alors pourquoi, se demanda Avada, n'entendait-il aucun son ? Aucune note, aucun sifflement ne provenait de l'air que jouait l'homme-raie. Dans un éclair, il comprit soudain que c'était lui qui contrôlait les bêtes. Pas de son signifiait juste que lui, en tant qu'humain, ne pouvait l'entendre. Cette flute pouvait très bien générer des ultrasons perceptibles uniquement des monstres ou des hommes-poissons. Quoiqu'il en fût, il devait l'empêcher de continuer. Aussi, sortit-il de sa cachette et pointa son pistolet muni de silencieux vers la tête de la raie qui se retourna pour voir son ultime adversaire.

________________________________________
Boréa

- Loth, tu veux bien revenir, Anya pose encore des soucis !

- Encore ? répondis-je d'un faux air exaspéré quand la bimbo fit une molle irruption dans le salon. C'est quoi le souci cette fois-ci ?

- Bah, les bracelets, elle ne veut pas me donner celui avec l'améthyste, répondit-elle avec une moue boudeuse. Pourtant elle sait que ce sont mes pierres préférées !

- Non, ce sont MES pierres préférées, pensai-je. Veuillez m'excuser encore une fois Commandant, mais je crois que nous avons fini non ? Nous avons un accord sur le principe de partenariat. On se recontactera quand je serai à même de partir en mission pour explorer de différentes pistes.

- Oui, je ne vais pas abuser plus longtemps de votre hospitalité Reich, dit-elle en se levant, à mon grand soulagement intérieur. Avant de passer le seuil, elle s'immobilisa soudain et se retourna. Ah j'allais oublier, j'ai une salutation à vous transmettre, reprit-elle avec ce sourire qui me rappelait tant quelqu'un de familier dont je n'arrivais pas à me souvenir. Ma sœurette vous passe le bonjour.

Sa sœurette...
Je n'avais pas besoin de plus de détails, je savais maintenant pourquoi son sourire me semblait si familier. Et son lien de parenté me parut alors d'une violente évidence. Midnight Santana était la sœur de ma Némésis, une marine totalement timbrée qui se faisait appeler Lady Ombeline. Elle n'avait de cesse de me poursuivre, faisant capoter mes projets, cherchant à me prendre sur le fait et me capturer, sans succès. Depuis que j'étais à Boréa, j'étais en paix mais j'avais la hantise de la voir débarquer du jour au lendemain. Maintenant j'avais pire. Sa grande sœur.

- Elle est présentement prise par une mission de longue haleine sur East Blue. Des révolutionnaires à mater, vous savez. Mais bientôt, elle viendra me rendre visite. Ensemble, j'espère que nous pourrons travailler à éradiquer Ashura. Bientôt, Reich, sourit-elle de cette manière énigmatique de quelqu'un qui préparait un mauvais coup.

Oui, j'étais maudit.

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- Alors, vous avez eu des problèmes avec un monstre marin ? introduisis-je après le départ de Midnight.

- C'ment ? T'sais qu'il y avait des monstres ?

- Des ? Oh, je pensais qu'il n'y en aurait au moins un.

- Quoi ? Et tu dis ça aussi paisiblement ? Tu sais combien de gars on a perdu à cause de ces sales bestioles ? s'emporta Nivel.

- Calme-toi, tu veux ? Hormis, les prisonniers, tous ceux qui sont avec vous ont signés pour jouer de leurs vies et je ne suis le babysitteur de personne. Ce que j'avais, c'étaient des soupçons. Une île de déchets, ça devait forcément attirer la vermine, les fossoyeurs de métaux, les récupérateurs en tout genre. Mais vous m'aviez dit que le coin était désert alors j'en ai tiré deux conclusions. Soit Black Box éloignait tous les curieux à coup de plomb, ce qui aurait été une entreprise risquée sachant qu'à Inu tout près d'eux, il y a une base de la Marine, soit quelque chose de plus inquiétant rodait dans le coin. Ajouté à ça que Machiavel est un homme-poisson, j'ai pensé qu'il aurait ramené une quelconque créature pour semer la terreur et éloigner la vermine.

- Mais tu aurais pu nous en parler. Mon équipe a évolué en sous-marin, Nivel a perdu tous ses hommes, Krav' aussi, fit Avada.

- C'étaient des soupçons, et moi je ne fomente mes plans qu'avec des certitudes. Je m'attendais à ce que l'escouade de Krav' repère quelque chose durant sa reconnaissance mais comme il n'en fut rien, je me suis dit que je m'étais gouré. Mais comment Krav', tes trois hommes-poissons sont morts tués par les monstres ?  

- Ils nous ont surpris. Juste après la phase 4 quand nous avons libéré les tonneaux. On s’apprêtait à remonter quand ils nous sont tombés dessus. Bill, Gin, et Foy, morts, tous, fit-elle.

- Palsambleu ! Je ne pensais pas que ça aurait pu être un tel carnage... Désolé, tous, pour vos hommes mais ce sont les risques de la vie que nous avons choisi. Nous ne pouvons pas tout prévoir. Maintenant, où en est l'opération, Avada ?

- Réussie dans les grandes lignes. J'ai été sur le Cube, j'ai tué celui qui manipulait les monstres grâce à sa flûte et ils sont devenus moins furax. 'fin, à ce moment là, il ne restait que la mère qui se déchainait contre le cuirassé. Les canons et Krav' aidant, elle s'est enfuie dès qu'elle ne fut plus sous l'emprise du son de la flûte. Le Cube est à nous, il est intact, le matériel de production, le four, tout est tel quel. Pas l'équipage par contre qui a tenté de résister et nous avons été obligés de les éliminer, n'en reste que ces deux là attachés à ces chaises, répondit Avada en tournant l'objectif de l'escamera vers deux hommes assis et entravés sur le pont d'un navire que je supposai être le Cube.
Nous avons aussi repêché la carcasse du navire-marchand détruit durant le combat contre le monstre et nous avons pu récupérer 50KG de Dance.

- C'est parfait tout ça, mesdames, messieurs. Mes félicitations les plus vives, vraiment. Mais où est le Prof. Machiavel dans l'histoire ? Où est le chimiste-en-chef ?

- Bonne question, on se le demande aussi. Aucune trace de lui, ni avant, ni après.

- Et ses hommes, que racontent-il ?

- Rien du tout, nous avons pas encore interrogés.

- P'tôt mouïr qu'b'lancer ! vociféra le plus âgé des prisonniers de Black Box.

- Fais lui plaisir, Avada, répondis-je, nous n'avons besoin que d'un seul d'entre-eux.

BANG !
Aucune hésitation. A peine eussé-je achevé ma phrase que l'androgyne s'était retourné et avait logé sa balle entre les deux yeux de l'homme barbu qui venait de parler. J'admirais Avada, j'admirais sa froide résolution à tuer, sans ciller. Si j'avais plaisanté en lui disant de le tuer, j'aurais en ce moment la mort d'un homme sur la conscience, mais non, je l'aurais moi-même descendu si j'avais été sur place. Nivel, Baxter et Krav', ils sursautèrent tous devant la spontanéité de cette mise à mort. Mais celui qui devait se faire dessus était le jeunot ligoté sur la chaine voisine. Il tremblait, retenait ses larmes avec difficulté. Après avoir vu sa flottille détruite, puis son équipage éliminé, voilà que quelqu'un qui devait être un mentor pour lui se faisait froidement abattre sous ses yeux. Le sang et des bouts de la cervelle de l'aîné maculaient à présent le visage livide et exsangue de peur du jeunot.
La préparation était terminée, il avait assez mijoté, il était prêt à être servi. Saignant.

- Je n'aime pas me répéter petit, fis-je au bout du fil, où est le Professeur Derek Machiavel ?

- J..je....je l'ign...ore

- Mauvaise réponse. Avada !

- NOOOON ! PITIÉ ! J...JE SAIS QUEL..QUE CHO..SE !

- Tu as une minute.

- Il, il ne vient presque jamais ici, dit-il d'une traite comme s'il s'efforçait de parler le plus rapidement possible pour couvrir son bégaiement. Je suis nouveau, héhé, nouveau, héhé, depuis trois mois seulement, et je l'ai vu seulement trois fois. Il vient, il prépare la fournée mensuelle et se casse, héhé. Il vit pas avec nous héhé, mais je sais, je sais, l'vieux, celui là, continua-t-il en désignant le mort, m'a dit qu'il trainait avec un certain Ned, Ned Lampre. J'en sais pas plus, héhé, c'est mauvais de s'intéresser aux activités du big boss pour une recrue. Héhé.

- Ned Lampre ? C'est encore qui celui-là ? demandai-je.

- Jamais entendu parler.

- Moi non, plus.

- Pas plus qu'moi.

- J'sais, répondirent Dena' et Avada simultanément.

- Pourquoi ça ne m'étonne pas. Dena' ?

- Giorgio Lampre ou tout simplement Ned, est un ben célèbre marchand d'armes. C't'un biz familiale d'puis des générations. Sont célèbres pou'leur droiture ces gusses-là. Sur Inu, l'est actionnaire de la Muramasabre, filiale du numéro cinq mondial de la vente d’armes de corps à corps.  Sont droits comme des "i" les Lampre, font du biz proprement, c'est ce qu'y disent. Y fournissent la marine, les pays indépendants, les royautés, tout ça. Ça m'étonne qu'l'héritier du clan traine avec un pourri comme Machiavel.

- Je confirme, ce n'est pas de la démagogie. Les Lampre mettent vraiment un point d'honneyr à faire des affaires proprement, sans aucun lien avec la mafia. J'ai eu l'occasion de remplir un contrat sur Giorgio.

- Ah ouais ? Et il vit toujours ? Ça m'étonne.

- Avec Nivel ci-présent en plus d'une troisième personne, ils sont les seuls contrats que je n'ai jamais rempli. Je devais éliminer Giorgio durant un match de hockey sur gazon. Il était dans les tribunes avec sa fille, je l'ai épargné puis épié pendant des mois et il m'est apparut que les allégations de mon mandataire concernant le supposé commerce d'humains auquel il se livrait étaient fausses. En plus, il était d'une telle attention envers ses hommes, d'un tel amour envers sa famille, ses filles, sa femme que je sus que cet homme était profondément bon.
Alors, j'ai abandonné mon contrat et payé le dû de mon employeur.


- Un tueur avec une conscience ?

- Détrompe-toi Nivel. "Payé son dû", hahahaha. C'est ta manière de dire que tu lui collé une balle dans la tête pour t'avoir menti sur ta cible ? Je sais mieux que personne que tu tues sans conscience la veuve et l'orphelin, si tant est qu'on te déballe tout, haha.
Revenons à nos moutons. Donc, quelque chose cloche dans le profil c'est ça ? Giorgio ne devrait pas fricoter avec un fou comme Machiavel. Mais le petit n'a pas pu nous mentir, il se pisse trop dessus pour ça. Donc, nous devons enquêter et savoir, même si je pense savoir de quoi il en retourne déjà.


- Ne nous fait plus tes cachoteries, accouche.

- Non, je préfère garder mes idées pour moi, vous comprendrez bien assez tôt. Ceci est la seconde partie de la mission, je ne l’avais pas prévue, mais voilà, elle s'impose. Vous devrez vous rendre sur l'île d'Inu Town et découvrir tout ce que vous pourrez sur Ned et donc sur Machiavel et...

- Attends, attends, Loth. Nous avons le labo, nous avons la poudre, pou'quoi courir après le scientifique ?

- Parce que je dois avoir le monopole, Baxter. Les démembrements d'Ashura qui ne passent pas sous mon giron doivent être élagués. "Si ton bras droit est pour toi une occasion de chute, coupe-le et jette-le loin de toi, car il est préférable que tu perdes un membre plutôt que ton corps entier ne soit jeté dans la géhenne", dit une écriture sainte.
Shadow Law sera mon corps. Et tant que je laisserai subsister des membres infestés et malades comme Black-Box, mon corps tout entier sera en danger, tu comprends ? Et Black Box, ce n'est pas le bateau, ce n'est pas la poudre, c'est le cerveau qui produit sa poudre. Tu ignores à quel point ils sont rares les scientifiques capables de produire cette poudre. Malheureusement, Machiavel est comme Marie-Curie, trop instable pour être contrôlé, incapable de discipline. Donc, pour la santé de mon business et pour affaiblir Lavoisier, Machiavel doit disparaître.


- S'ils doivent s'rendre sur Inu, j'ai un contact là-bas, qui leur facilitera les z'infos. S'appelle Romaric l'gusse, Rom' pour les intimes. Il crèche dans la p'tite ville de Chom. Mais zieutez vos derrières, la caserne des marines est sur place. Y aussi des boutiques de Muramasabre, l'entreprise de Ned. Tenez son num', passez lui l'bonjour d'ma part. Y vous f'ra un bon prix.

- Avada et Nivel, vous irez donc dans la ville de Chom.

- Moi aussi j'aimerais y aller, fit Krav'.

- Euh d'accord, accompagne-les, ça ne peut pas faire de mal.

- Qu'est-ce qu'on doit chercher exactement, Loth ?

- Un drame. Cherchez un drame dans la vie de Ned. Demandez si ces derniers temps, il a changé. Et appelez-moi directement quand vous aurez la réponse, je vais préparer la suite, car je connais déjà la réponse, j'ai juste besoin de confirmation.
Nivel, tu m'avais dit avant la prise d'Immondus que tu avais préparé des Pies-surprises ?


- Oui, mais je n'ai pas eu le temps de les utiliser contre les monstres.

- C'est quoi des Pies....

- Cool, emmène les avec toi, amène toute ton attirail avec toi. Tu le répètes depuis le début mais c'est maintenant que ça ma boomer mon pote. La petite ville de Chom ne sera plus jamais la même après ton passage !

________________________________________
Chom - Inu Town

Une heure plus tard, ils marchaient tous les trois dans une venelle de Chom. Petite ville pittoresque en pleine campagne avec tout ce qu'elle offrait de tranquillité, d'originalité et de senteurs. Tout ici respirait la paix et la retraite. Si cet endroit était un paradis pour quiconque voulait se faire oublier, Nivel par contre s'y sentait nauséeux. Toute cette paix lui donnait envie de dégobiller, tous ces visages radieux, ramollis par une trop longue période de prospérité. Tant qu'il y avait la paix, les hommes se ramollissaient et tant qu'ils se ramollissaient, le Gouvernement profiterait d'eux. Il avait envie d'empoigner ces gens et de les secouer pour qu'ils sortent de leur léthargie. Il avait hâte que Loth tienne sa promesse, que bientôt Chom connaisse le Nivellement.

La venelle desservit la plus grande rue commerçante de l'île où s'animait un marché florissant. Une centaine de personnes, touristes comme autochtones, s'y était donnée rendez-vous pour faire des affaires. Brocantes, vide-greniers, marchés aux poissons, à la viande de brousse, aux armes, aux jouets, il y avait de tout et de quoi trouver son bonheur.
Avada réajusta sa cape sur sa tête et ses comparses l'imitèrent. Nivel et lui étaient connus et Krav' pourrait être reconnue par Machiavel ou quiconque lui étant affilié. Elle avait été le commandant de tous les hommes-poissons d'Ashura et Machiavel était inclus dans ce lot.
Ils se dirigèrent vers un petit bar de la rue commerçante, le Dealer. C'était là que Rom', le contact de Dena' leur avait fixé rendez-vous. Nivel bouscula Avada du coude et lui montra d'un signe de tête la silhouette imposante de la base de la 316ème Division des marines d'Inu Town qui se profilait au loin. Ils entrèrent ensuite dans le bar bondé après et prirent place juste à côté de l'entrée.

Sitôt après, un petit homme frêle coiffé de dreadlocks les accosta et leur fit le baratin habituel destiné à appâter les pigeons qu'ils étaient censés être pour leur vendre des cigarettes.

- Nous ne désirons pas ce genre de marchandise, susurra Avada. Tu as nos infos, Rom' ?

- T'as mes billets ?

- Non, mais j'ai des plombs, fit Avada en collant sous la table, son semi-automatique entre les jambes de Rom' qui devint blême de peur. Je paye uniquement après livraison et satisfaction, alors si tu ne veux pas devenir eunuque, accouche.

- Il blague pas ce gars-là, mon pote, crache le morceau. Que sais-tu de Ned Lampre ?

- Pas grand chose les potes, inutile d'en venir là, hein. Ça dépend, que veux-tu savoir ?

- Déjà, est-ce qu'il va bien ? Lui est-il arrivé des choses étranges ces derniers temps ? Ces dernières années ? C'est ce que Loth nous a dit de demander non ?

- Précisément, lui est-il arrivé quelque chose de dramatique ?

- Ah ça oui. Y a trois ans, il a tout perdu, enfin sa famille quoi. Ses deux filles, sa femme, mortes.

- Comment ? demanda Avada qui pensait déjà connaître la réponse et par extension là où voulait en venir Loth.

- A ce qui se dit, elles auraient été tuées durant la mise à sac de Balnear. C'est une ville touristique pour richards sur West Blue. Des pirates selon les rumeurs.

- Des pirates hommes-poissons, je présume ?

- Oui, oui, c'est ça même. Les Héritiers de Poséidon, ils s'appellent.

- J'en ai entendu parler. Ce sont des suprématistes extrêmement violents et se réclament de la haine des générations passées, dit Krav'.

- Tu ne sais pas où pourrait se trouver Ned sur l'île ?

- Si je le savais, je serai un homme riche, mec. Beaucoup de gens cherchent à savoir là où il pionce. Beaucoup, mais nul ne le sait. On parle qu'il aurait un complexe souterrain mais on ne sait pas.

- Bon, merci. Tu as mérité tes billets. Allons-y.

...

- Donc j'ai tout bon, dit Loth au bout du fil.

- Comme toujours. Comment tu savais qu'il y avait ce cauchemar dans sa vie ?

- Réfléchis un peu Nivel, s'agaça Avada. Avec ce que nous savions de Ned, avec ce que j'avais vu, j'aurais mis ma main à couper que cet homme était irréprochable. Mais s'il s'était avéré juste qu'il fréquente un individu comme Machiavel, cela signifiait qu'il avait changé. Mais un homme de cet acabit et de cette foi dans la justice, moulé et formaté par sa famille dans le business clean ne pouvait virer de bord si facilement. A moins d'un immense drame qui aura chamboulé sa vie.
Et Loth nous avait dit durant le débriefing que Machiavel avait lui aussi pété les plombs, suite à la perte de son fils, tué par un gang d'hommes-poissons esclavagistes. Et que depuis, il travaillait sur une arme marine susceptible d’annihiler toute vie marine. Il a juré la perte de sa propre race.


- Donc, ce qui pouvait unir un homme de la droiture de Ned avec une ordure comme Machiavel, c'était la même douleur, la même ambition ? Que dis-je, haine ?
Ben bravo, ça m'a pas traversé l'esprit.


- Ne soyons pas trop durs avec Machiavel, c'est peut-être cet évènement qui l'a moulé aussi. Mais oui, dès que le gosse a parlé de ça, j'ai tout de suite fait le lien. En plus, Ned est riche et l'ambition de Machiavel nécessite sûrement beaucoup d'investissement. Je suis sûr qu'il a essayé de contacter Lavoisier et d'avoir des subventions, mais le boss d'Ashura se la joue invisible auprès du petit peuple et n'aurait sûrement pas été intéressé par un tel projet. Machiavel s'est alors tourné vers un homme qui ressentait sa peine et qui en sus avait les moyens. Je vous avais prévenu au début que vous risquiez de tomber sur des armes marines d'un autre genre. Vous êtes tombés sur des monstres marins, mais c'est maintenant que ma mise en garde va s'accomplir.

- Mais Rom' n'a pas pu nous donner d'indication sur l'habitation de Ned. Apparemment, c'est super secret.

- Ah bon ? J'aurais été là qu'j'l'aurais découvert. C'ptit m'déçoit ! grogna Dena'.

- Je savais aussi qu'il serait introuvable, c'est pour ça que j'ai demandé à Nivel de prendre ses bijoux sur lui. Même si Ned a changé en apparence, certains traits profonds de sa personnalité n'ont pas pu s'effacer comme ça, même pas avec le terrible drame qui fut le sien.

- A quoi penses-tu ?

- A cet amour pour ses hommes dont tu as parlé, Avada. A cet amour de son travail, du legs de ses ancêtres. Depuis longtemps maintenant, je suis partisan de la stratégie de "taper sur la ruche pour faire sortir la reine". Ici, c'est le roi.

- Yeaaaaah ! Là, j'ai compris, ça va boomer ! Je plastique ses boutiques d'armes pour le forcer à sortir de son trou, c'est ça ton idée ?

- Une à une, par intervalle de deux heures, histoire que l'info ait le temps de circuler. Vous deux, aidez Nivel à placer ses charges. Fais bien en sorte qu'on sache que c'est toi Nivel, que ton nom soit porté haut au firmament. Quand Ned émergera, vous le cueillerez.

- Mais il y a des marines, Loth. Ils vont rappliquer, ça va être invivable.

- A situation désespérée, mesure désespérée mon pote. Ned doit sortir pour nous dire où se trouve Machiavel. Minimise les dommages collatéraux Nivel, mais grosso merdo, tu as carte blanche. Tâte-les du Nivellement.  



Dernière édition par Loth Reich le Mar 8 Sep 2015 - 21:40, édité 3 fois
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Dans sa course effrénée à travers la voûte céleste, le soleil déclinait de son zénith quand l'horreur étreignit la petite ville de Chom. Au delà, ce fut toute l'île d'Inu Town qui se souvint à jamais de ce funeste jour comme de cette fois où un anarchiste fou perpétra une série d'attentats à la bombe qui coutèrent la vie à plus d'un.
Mais pour le moment, Chom était aussi paisible qu'elle pouvait l'être en cette période de grand tourisme. Habitants et vacanciers vaquaient à leurs paisibles train-train quotidien sans se soucier, sans savoir que parmi eux s'étaient glissées trois personnes aux intentions biens obscures.

Vivons cette journée historique à travers les yeux de Tom.
Il était jeune Tom, à peine son quart de siècle en poche, avec tout ce que ça comportait de vivacité, de rêverie et d'ambition. Sans qualification particulière, pour gagner sa croûte le jeune homme avait, après bien des efforts, déniché un travail de vendeur dans l'une des boutiques Muramasabre de l'île. Depuis tout petit, il avait une passion pour les armes blanches et rêvait, au mieux, de devenir un aussi fameux forgeron que Kitetsu ou au pire, d'être un bretteur reconnu parcourant les mers à la chasse de prime. En entendant un jour d'accomplir les hauts faits qui peuplaient ses nuits de rêves de gloire, de pouvoir, d'argent et de femmes, il travaillait dur à la boutique N°4 de Muramasabre, celle qui était située rue des hachoirs, sur la place du marché. Si ce travail n'était au début qu'un honnête moyen de trouver son pain quotidien, il fut vite évident que Tom avait un don dans ce domaine. Plutôt beau gosse, négliment décoiffé et stylé, ce brun aux yeux verts avait tout du mec ténébreux qui faisait chavirer les coeurs de la veuve et de l'orpheline. Il avait aussi à son arc "un bon bagout et du tchacthe" comme cela se disait dans le métier. En d'autres termes, une verve facile en sus d'un don de persuasion qui avaient fait de lui le meilleur vendeur de Muramasabre depuis ses débuts. En guise de promotion, la gestion de la N°4 lui avait été confiée. Vendeur, il l'était toujours, couplé à son nouveau rôle de chef de boutique.

Pour Tom, c’était une journée de travail semblable à n’importe quelle autre. Il était arrivé avant six heures et avait arrangé les locaux pour les heures à venir. Exeptionnellement aujourd'hui, il serait le seul vendeur dans sa boutique. Il avait la veille, donné une permission d'une journée à ses trois subordonnés.
A partir de huit heures, les clients commencèrent à défiler, la plus part étant des touristes faisant du lèche-vitrine d’un air ébahi en contemplant les sabres exposés. Sous les coups de dix heures, il avait vu défiler un petit troupeau de bleuets de la marine venus acquérir des sabres de kendo. Ils n’étaient pas spécialement nantis, aussi Tom les aiguilla-t-il vers les sabres d’occasions, presque attaqués par la rouille. Tom savait qu’ils reviendront, ces bleuets, dans quelques années, acquérir d’autres lames plus dignes de confiance, quand ils en auront les moyens et surtout la stature et l’expérience.
Juste après les douze coups de midi, un excentrique entra dans la boutique. Depuis le temps maintenant, il était habitué aux styles vestimentaires des plus interrogatifs. Le nouvel arrivant était de noir vêtu, attifé dans une espèce de combinaison à excroissance végétale. Enfin, c’est comme ça qu’il aurait décrit la chose, ou simplement aurait-il dit que l’homme -nan, il n’en était pas sûr non plus-, que cette personne était vêtue d’algues. Un chapeau conique à fanfreluche masquait la partie haute du visage de la personne si bien que Tom ne put voir la couleur de ses yeux. Et quand elle s’adressa à lui, ce fut d’une voix sans timbre, sans genre. Elle désirait un Yamata, le quatrième du nom plus précisément.

« Les Yamata, les cinq du nom ayant été fabriqués par le célèbre forgeron ninja Tenzou Yamata sont des wakizashi de légendes, tous propriétés de la dynastie Fang du pays des Lucioles. Le quatrième Yamato a été dérobé l’année passée durant une exposition, et je puis vous certifier que dans notre maison, le recel est banni. Les enseignes Muramasabre ne commercent que des lames légales, avec titres de propriétés » avait-il annoncé non sans fierté.

Il tenta ensuite, comme il était préconisé dans la politique de la maison, d'orienter le client vers des articles de qualités équivalentes mais là parfaitement légales et de première main. Habituellement, Tom parvenait toujours à ses fins, mais là, il fit chou blanc. Le mystérieux client se retira après avoir refusé toutes les alternatives que lui proposait Tom. Derrière son comptoir à aiguiser un couteau à peler, le jeune vendeur regarda partir son client cagoulé et se dit qu'il était vraiment étrange. D'ailleurs à son entrée, n'avait-il pas un sac en bandoulière ? Mécaniquement, Tom promena son regard dans le magasin. Non, finalement, il s'était trompé se dit-il, sûrement les excroissances végétales sur la combinaison de cette loufoque personne l'avaient-elles induit en erreur. Il chassa ce type bizarre de son esprit et se hâta vers le fond de sa boutique pour vaquer à une de ses tâches.
C'était une belle journée.

Quelques minutes après cette rencontre incongrue mais normale quand on avait pour métier de vendre des sabres, Tom était toujours occupé au fond de sa boutique quand sa belle journée bascula dans l'horreur. Il entendit un gros bruit, semblable à celui d'une explosion. Tout ce dont il se souvint ensuite ce fut qu'il se réveilla sonné au milieu de débris entassés pêle-mêle. Quelqu'un l'avait retiré des décombres et l'avait allongé dos contre terre. Tout autour de lui, des gens se pressaient, parlaient, criaient, pleuraient, s'interrogeaient. Lui, ne semblait pas blessé à l'exception de ce tintement strident et continu dans ses oreilles. Tom attribua ce désagrément passager à la détonation de la bombe, car oui, il le savait sans qu'on ne lui dise -il n'était pas idiot-, il savait que sa boutique venait d'être plastiquée et qu'il avait eu de la chance d'en ressortir vivant. Il se surprit lui-même car le sentiment qui l'animait en ce moment n'était ni la peur, ni la colère mais seulement de la peine. Pourquoi quelqu'un en ce monde commettrait-il un acte aussi abominable ?
Quand il parvint enfin à se lever, il tenta de se renseigner, de savoir s'il y avait eu des victimes. Certes dans sa boutique, il n'y avait aucun client au moment de l'explosion, mais dans les alentours, peut-être que... (Et son cœur s'emballa à cette pensée).

« La déflagration a été contenue par les cloisons en fibre de la boutique, c’est un vrai miracle. T’imagines qu’il y avait cinquante personnes dans le resto juste à côté ? Ça aurait pu être un vrai carnage » confia un vieux marine à son collègue.
Aucune victime... Tom sentit un énorme poids se délester de sa cage thoracique. Ses jambes flageolèrent de soulagement et il faillit s'écrouler. Quelqu'un, un marine le rattrapa à temps à coup de : « Hé, c’est pas toi l’gamin qui a survécu ? J’te cherchais, j’ai des questions à t’poser pour l’enquête. Viens par ici. »

S’ensuivit de longues minutes de débriefing à même la rue bondée de curieux. Quand il eut fini de raconter ce qu’il savait, Tom avait une certitude, son client accoutré de noir était le plastiqueur que recherchait la Marine. Il n’avait pas rêvé, le client avait bien un sac avec lui en entrant mais s’en était déchargé en ressortant. Et dans ce sac, il y avait eu un engin de mort.
Tom fut libéré mais au lieu de rentrer chez lui, deux de ses supérieurs, Ady et Cléo de leurs noms, l’accostèrent et l’emmenèrent dans une autre enseigne Muramasabre, la N°3, celle située rue de l’alberta. Ils tenaient à être là pour lui, à le soutenir dans ces moments difficiles et Tom leur en fut reconnaissant. La boutique N°3 était pour ainsi dire le quartier général de Muramasabre. Pour une curieuse raison, elle ne portait pas le N°1, mais était incontestablement la boutique la mieux pourvue, la plus grande, la plus animée.

Assis dans un salon au premier étage de l’immeuble qui abritait le N°3, Tom entendait la rumeur des clients qui marchandaient au rez-de-chaussée. Il était encore pas mal déboussolé et les questions de ses supérieurs qui voulaient connaître la raison de l’attentat ne l’aidaient pas. Même s’ils remerciaient le ciel qu’il s’en soit sorti vivant, Ady et Cléo sous-entendaient sans subtilité que Tom aurait peut-être vexé un client, à un moment ou un autre du mois, voir de l’année, qui expliquerait cet acte ignoble. Mais Tom voyait bien qu’ils ne croyaient pas tant que ça à leurs soupçons, parce qu’ils savaient -et nul n’aurait pu en douter- qu'il était bien le meilleur vendeur que Muramasabre ait jamais recruté. C’était d’ailleurs pour cette raison qu’on l’avait muté du N°3 au N°4, pour que sa verve et son talent incomparable boostent les ventes de ce magasin qui commençaient à décroitre.

En fin de compte, les hautes strates de Muramasabre ne crurent pas bon de fermer toutes les boutiques par prévention et conclurent à un dramatique évènement isolé. Aussi laissa-t-on Tom tranquille sans l’assaillir de plus de questions. Avachi de tout son long dans un canapé moelleux, il se détendit et chercha même le sommeil sans succès. A défaut, il regarda à travers la baie vitrée qui donnait une vue panoramique sur le rez-de-chaussée. La boutique était bondée, une quarantaine de clients –dont une large majorité de conscrits de la Marine- s’y pressaient. Tom ne saurait dire s’il approuvait ou non la décision de sa hiérarchie. Les intentions obscures de plasticien ne rassuraient pas face à une éventuelle absence de récidive mais d’un autre côté, il fallait montrer son assurance au public et ne pas céder face à la terreur.
Perdu dans ses pensées, les yeux de Tom se perdirent dans la nuée de client. Non, en fait, ils se mirent à suivre sans qu’il ne s’en rende compte lui-même, un individu à la dégaine étrange. Enfin, pas aussi étrange que celui qui était venu dans sa boutique à lui mais… Assurément avaient-ils quelque chose en commun. Celui-ci était clairement une femme à en juger par les proéminences sur son torse, mais une femme voilée, de blanc, comme une prêtresse. Une prêtresse trimballant un sac à main comme la dernière des stylées… Et encore, cela aurait pu lui paraître juste curieux s’il n’avait pas vu la blanche voilée déposer discrètement ce sac entre deux étagères. Nul ne l’avait vu, nul ne l’aurait pu, la configuration des lieux empêchait ça. A moins d’observer la scène du dessus, comme il en avait l’occasion en ce moment même.

« Ils ne vont quand même pas remettre ça ! » pensa furieusement Tom avant de beugler un : « Décampez ! Y a une bombe ! »

Et une nouvelle fois l’horreur s’installa.

[…]

« Vous avez sauvé quarante-neuf vies aujourd’hui, Mr Dylan » lui dit le Colonel Ogaryan Mortimer en personne d’une voix chaleureuse. « C’était une bombe à minuterie, elle avait été programmée pour exploser trois minutes après le départ du plasticien. Votre alerte les a pris de court, presque toutes les personnes ont pu sortir avant la pétarade. »

"Presque", avait-il dit ?
Allongé dans un lit d’hôpital, Tom serra des poings de rage pendant qu’un noeux de chagrin se formait dans sa pomme d’Adam. Il n’avait pas besoin des détails du colonel, cette fois-ci, il avait tout vu, il ne s’était pas évanoui, il n’avait eu aucune absence. Il avait vu le flash orangé de la déflagration, il avait vu son monde et l’immeuble se retourner comme un gant. Il avait vu le sang, il avait vu les corps de quatre personnes. Ady, Cléo et deux marines qui aidaient les gens à sortir et qui n’avaient pas pu sauver leur propre peau. Tom ne s’expliquait pas sa survie encore une fois mais il aurait préféré mourir avec ses amis, parce que là, il avait l’impression d’être un chat noir attirant les bombes partout où il allait. Deux attentats en moins de deux heures avec lui comme dénominateur commun. Ady avait-il raison ? Était-ce lui que le -non, les-, que les terroristes voulaient éliminer avec tant d’acharnement ? Si c’était le cas, il lui fallait partir, parcourir des milliers de kilomètres pour ne plus être entouré de gens, s’enfuir loin de tout individu pour ne plus mettre personne en danger.

« N’y pensez même pas » fit le Colonel en le repoussant d’une poigne de fer dans le lit. « Le syndrome du survivant est très puissant, je sais ce qui peut se passer dans votre tête. Mais je vous le répète, ce n’est pas de votre faute gamin, au contraire, vous êtes un héros. Mes conscrits vous doivent la vie. »

« Vous… vous…ne comprenez rien… » hacha Tom qui aurait voulu hurler. Ce vieux fou ne comprenait rien. Pourquoi ne voyait-il pas qu’il mettait tout le monde dans l’hôpital en danger en l’empêchant de partir ?

« Si, si, je comprends fiston. D’ailleurs, je vais te montrer. Regarde, c’est une carte du plasticien. Les deux attentats ont été revendiqués. Par Jonathan Nivel. C’est un anarchiste célèbre sur West Blue. Il s’est échappé de sa prison y a quelques temps, j’ignore ce qu’il fait sur North, encore moins pourquoi il s’en prend à Muramasabre et à Inu Town, mais je t’assure qu’il ne continuera pas longtemps ! » garantit le vieux Colonel d’une voix ferme avant de s’éloigner comme s’il partait à la guerre.

Malgré lui, et pour la seconde fois de la journée, Tom sentit ce poids indistinct glisser et tomber de lui. Certes, la douleur de la perte de ses amis et d’innocents était toujours aussi vive mais sans le sentiment de culpabilité, elle était un chouïa moins lancinante.  
Tom constata ensuite avec gêne que le Colonel ne bluffait pas, on le prenait vraiment pour un héros ; plusieurs fois au cours de l’heure, des anonymes se glissèrent dans sa chambre pour le féliciter de son courage ; plusieurs marines défilèrent devant lui, l’embrassant tendrement sur la joue pour les femmes ou le gratifiant d’un solennel salut militaire pour les hommes. Quelques collègues endeuillés et larmoyants vinrent lui rendre visite sous les coups de quinze heures. Ensemble, ils pleurèrent à chaude larme leurs amis morts avant que mine de rien, l’un d’entre eux ne lâche une info qui, pour Tom, ressembla à une bombe.

« Mr Lampre va venir me voir ? Moi ? Ici ? » répéta-t-il avec une voix rauque.

« Bah oui, toi, idiot ! T’es un héros pour toute la ville. Le Survivant ! » répondit l'ami qui lui confia la nouvelle.

Presque immédiatement après, une doctoresse aux airs sévères vint chasser ses amis sous prétexte que Tom avait besoin de repos psychologique. Elle voulut même lui donner des calmants-nerfs mais il s’y opposa férocement. Son grand patron en personne allait lui rendre visite, ce n’était sûrement pas le moment idéal pour qu’une quelconque drogue lui lobotomise le cerveau. Giorgio "Ned" Lampre, cet homme qui depuis l’horrible évènement qui avait fauché sa vie ne sortait quasiment plus de ses appartements dans un lieu tenu secret… Il allait donc sortir de sa retraite pour venir le voir, lui, Tom Dylan, un simple chef-vendeur… Tom se sentit gratifié au-delà de toute mesure que son patron s’intéresse autant au petit peuple. Dans son honneur et sa gratitude, il remarqua -seulement maintenant- que sa doctoresse était une femme-poisson à la peau bleutée et striée de rainures. Tom ne manifesta pas plus de surprise que nécessaire, des hommes-poissons en cette période estivale, ce n’était pas ce qu’il y avait de plus rare à Inu Town. Un promoteur immobilier homme-poisson lui-même avait depuis longtemps flairé la manne et avait construit un complexe semi-aquatique à l’est, à l’extérieur de Chom. On appelait l’endroit Minus Atalante et tous les hommes-poissons débarquant à Inu, pour tourisme, ou pour exercice saisonnier de leur travail -comme cette doctoresse sûrement- y trouvaient logis.

Pendant que la doctoresse faisait de réguliers va-et-vient pour soit prendre sa température, soit vérifier ses réflexes cognitifs -ce que Tom trouva curieux et exaspérant à force-, il eu le temps de soigner un peu son apparence, essuyer la suie et la poussière qui maculaient son visage, arranger du bout des doigts une ou deux bricoles en désordre dans sa chambre d’hôpital puis ouvrir grandes les fenêtres à guillotine pour laisser entrer la lumière et le vent. Quand la doctoresse revint pour la énième fois, elle lui annonça d’une voix monocorde qu’il allait recevoir de la visite, puis elle introduisit Giorgio Lampre sans plus de cérémonie avant de s’en aller en claquant la porte.

Etrangement, la première pensée qui traversa Tom fut qu’on devrait s’abstenir de rencontrer ses héros sous peine de déception. Ned Lampre n’était plus cet homme bien bâti dans la maturité de l’âge qu’il avait rencontré jadis. Il n’avait plus rien de l’archétype de l’héritier d’une grande famille de samurai. Certes, il revêtait toujours son éternel kimono à trois pièces et à sa ceinture pendouillait toujours un katana mais ses cheveux autrefois bruns avaient blanchis, des rides de vieillesse semblables à des toiles d’araignées marbraient son visage. Ned avait l’air étrangement sans substance, comme quelqu’un ayant vieilli de 50 ans en 3 ans seulement. Malgré tout, quand il s’adressa à Tom, ce fut avec la voix ferme et vigoureuse de ses jeunes années.

« Tom Dylan… Je me souviens de vous, vous avez reçu le prix du meilleur vendeur pendant ces cinq dernières années, et j’aurais dû venir en personne vous les remettre mais toujours, quelque chose m’en empêchait, toujours une occupation m’appelait ailleurs. Je suis désolé qu’on se rencontre dans une telle situation mais une fois encore, vous avez porté haut les couleurs de Muramasabre. En survivant deux fois, en sauvant des vies » débita-t-il.

« Ce..ce n’est rien. C’..c’est normal, monsieur. Ce métier est toute ma vie, je donnerai ma vie pour Muramasabre. Merci de vous être déplacé jusqu’ici pour moi. » bégaya Tom.

« Nous vous en remercions aussi, Monsieur » fit une voix féminine pleine de sarcasme qui n’était autre que celle de la doctoresse femme-poisson.

« Ceci est une conversation privée, Doctoresse ! J’ai demandé à ce que nul ne nous dérange ! »

Tom aurait dit pareil si quelque chose dans l’attitude de la doctoresse ne lui clouait pas le bec. En tant que vendeur, il avait appris à analyser plusieurs facteurs que les gens normaux négligeaient et qui pourtant donnaient une mine d’information. Comme par exemple, le langage corporel. Celui de la doctoresse -qui se tenait contre et faisait dos à la porte fermée avec une mine espiègle- indiquait clairement que ses intentions n’étaient pas très catholiques… D’ailleurs, dit une voix analytique dans le cerveau de Tom, n’avait-elle pas la même carrure que la prêtresse voilée de blanc qu’il avait aperçue dans la boutique N°3 ? Oui… se dit la voix avec horreur… En tout cas, elles avaient en commun leurs petites tailles, à peine le mètre-cinquante…
Irrésistiblement, Tom sentit ses cheveux se dresser sur sa nuque. C’était un traquenard, il le savait.

« Doctoresse, m’avez-vous compris ? D’ailleurs donnez-moi votre nom, j’irai me plaindre de votre odieux comportement à vos supérieurs ! » tonna autoritairement Ned Lampre.

Dans sa voix, Tom le devina, n’était pas uniquement présentes l’indignation et l’outrance d’avoir été interrompu par un médecin visiblement irrespectueux mais quelque chose de plus viscéral. De la haine. Oui, l’essence même de la haine était visible dans les yeux de Giorgio Lampre et Tom fit facilement le lien avec l’horrible épisode qui secoua sa vie. Si Ned ne connaissait la doctoresse ni d’Ève ni d’Adam, il haïssait par contre son espèce, sa race.

« Mon nom ? Je suis Krav’ma Gah. Mais mes amis m’appellent Krav’. »

« Attention, monsieur ! C’est un des plasticiens ! » avertit Tom qui se leva de son lit, avant de sentir une puissance douleur lui traverser l’épaule droite.  

« Du calme le Survivant ! » chantonna la voix follement amusée de Jonathan Nivel que Tom reconnut avec horreur.

Le Niveleur, tel un oiseau de proie, était perché sur le rebord de la fenêtre de la chambre d’hôpital et à sa droite se trouvait un autre individu dont Tom assimila la silhouette à celle de la personne emmitouflée de noir et d’algues. Le plastiqueur de sa boutique.  

« Tu dois te dire, le Survivant, "mais que me veulent-il ? Pourquoi me poursuivent-ils ? Après avoir fait exploser deux magasins, pourquoi viennent-ils me chercher jusque dans mon lit d’hôpital ? Qu’ai-je bien pu faire sur terre pour mériter un tel acharnement ?
Bah la ferme ! Nous ne sommes pas là pour toi, hihahihahiha ! »
s’amusa Nivel.

« Nous avons tapé sur la ruche, le roi est sorti, nous l’avons suivi jusqu’à ce qu’il soit seul et débarrassé de ses chiens de gardes. »

« Vous ! Vous avez détruit mes magasins et tué quatre personnes uniquement pour me faire sortir ? » murmura Ned qui sentit le piège se refermer sur lui.

Il empoigna son katana, mais aussitôt, il sentit une époustouflante douleur dans les côtes qui le terrassa et lui coupa le souffle. L’attaque venait d’un angle mort dans lequel était situé Krav’.

« Inutile de résister Ned. Je vais vous demander de venir avec nous » enjoignit Avada.

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- Enchanté de vous rencontrer enfin, Mr Lampre. Sur vous, j'ai entendu pleins d'histoires. Que des bonnes, croyez-moi.  

L'escouade était dans un ancien quartier désaffecté à la périphérie de Chom. Après la capture de Ned, ils s'étaient échappés par la fenêtre laissant Tom Dylan assommé sur son lit. Le magnat des armes blanches était à présent attaché les deux mains derrière le dos, assis sur un sol argileux. En face de lui, Jonathan Nivel tenait à la main un alerto den den qui relayait la voix de Loth tout en transmettant à ce dernier sur Boréa les détails de l'apparence de Lampre. Le binoclard tenait à avoir un visuel sur le magnat.

- Qui êtes-vous et pourquoi faites vous ça ? demanda Ned à l'escargophone, conscient qu'il était observé par quelqu'un qu'il ne pouvait pas voir.
Pendant qu'il s'adressait à la machine, son regard était fixé de biais dans la direction de Krav'. Un regard qui semblait juger Krav' indigne de respirer le même air que lui.

- Nous sommes des gens qui veulent avoir une petite entrevue avec votre cher associé. Vous, vous ne comptez pas dans l'équation, vous n'êtes que notre fil d'Ariane.

- Quel associé ? J'en ai des centaines, trancha-t-il sans détacher ses yeux haineux de la femme-poisson qui semblait amusée par cette attention viscérale.

- Votre plus cher associé, j'entends. Celui qui vous permettra d'assouvir votre vengeance envers les hommes-poissons.

Pendant un bref instant, Ned sembla si surpris qu'il ouvrit la bouche d'une niaise manière. Il était évident que son alliance avec Machiavel était un secret de polichinelle et qu'il pensait que personne d'autre n'était au courant de ce partenariat. Mais presque instantanément après, il reprit contenance et nia en bloc les allégations de la voix désincarnée sortant de l'escargophone.

- C'est inutile de nous mentir Nedou ! Hihahihahihahihaaaa ! chantonna Nivel. Nous avons ruiné l'autre business de Machiavel, je sais pas s'il t'en a parlé de sa petite production de poudre. Nous savons que tu le finances, nous savons à quel dessein ! Et ce que nous voulons, c'est Machiavel, tout simplement, Hihahihahi !

- Hmmm, vous ne le trouverez jamais ! mâchonna Ned avec dédain.

- Je lui casse un membre pour le forcer à parler, L' ?

- L' ? Un diminutif je suppose ? Vous ne voulez pas me dire votre nom ? Vous qui vous dissimulez derrière un den den mushi ?

- Non, autrement, je serai obligé d'ordonner votre exécution et je n'ai rien contre vous.
Krav', ce sera inutile d'en venir à de telles extrémités avec lui. En plus de descendre d'une vieille famille de samurai, cet homme n'a plus rien à perdre. Sa vengeance est le seul but de sa vie depuis l'incident, il ne vendra jamais celui qui permettra de l'assouvir.


- Il n'est pas bête celui là ! fit Ned, narquois. Ne vous reste plus qu'à rester gentiment spectateur de l'avènement du Léviathan. Le monde va changer !

- Le Léviathan ? C'est le nom de l'arme que met au poing Machiavel ? Chimique ou explosive ? demanda Nivel avec un intérêt professionnel.

- Hahaha, vous gaspillez votre salive Nivel ! Vous n'arrivez pas à la cheville de Machiavel. Ne pensez même pas à l'arrêter, vous et votre joyeuse bande d'amateurs. D'ailleurs, merci de m'avoir capturé, hahahaha ! Merci d'avoir plastiqué mes magasins ! Hahahaha !

- Pourquoi merci ?

- Allez, on décampe d'ici, les marines nous ont retrouvé ! dit Avada en apparaissant subitement. Il y a en a cent environ et parmi eux, Ogaryan Mortimer en personne !

Bang ! Bang ! Bang !
Il en arrivait de tous les côtés, pas seulement du nord dont Avada s'était chargé de surveiller. Les marines tiraient à vue et l'escouade dut se tasser pour éviter la pluie de balles. Après le meurtre de deux d'entre eux, les marines voulaient en découdre et envoyer les responsables six pieds sous terre.
A Boréa, dans la suite de Dena', Loth serra des poings, enragé par cette impuissance et ces blessures qui l'éloignaient du théâtre des opérations. Il en était réduit à observer des bribes de la bataille qui se profilait à travers les yeux penchés de l'Alerto den den qui avait été jeté sans considération dans la confusion des tirs.  

- Krav', prends Ned et rends toi au point de débarquement ! Nivel et moi allons faire diversion !

Elle saisit Ned par la peau du cou et ils disparurent à l'angle de la rue délimitée par un vieux moulin à vent. Certes, les marines avaient été plus rapides à retrouver leur piste qu'ils ne l'avaient pensé mais ils s'y étaient tout de même préparés grâce au quart d'heure d'avance qu'ils avaient eu sur eux. Avada s'évanouit dans le décor des rues délabrées préférant le combat à distance tandis que Nivel emplit d'une joie hystérique chantonna et bougea rythmiquement ses mains à l'image d'un maestro devant un chœur. Ce létal maestro avait préparé aux marines des notes minées, antipersonnel. Dès que les premiers soldats marchèrent et déclenchèrent les mines à pression, ce fut une cacophonie sans nom. Ça explosa de partout, ça tonna de partout, dans un ensemble lyrique de mort et de souffrance. Nivel aimait voir son art à l’œuvre, cela lui procurait un plaisir infini. Assez pour lui faire baisser sa garde et lui faire oublier que seul leur flanc Est avait été piégé et que des soldats, il y en sortait de partout. Un violent coup à la tempe le ramena brutalement à la réalité. Il rasa le sol, fit plusieurs tonneaux et finit sa course dans une vieille maison mangée aux mites. Son agresseur, un colosse de muscle pointa son bazooka sur la maison et s'apprêta à tirer quand il vit quelque chose clignoter sur son bras. Il réalisa trop tard que Nivel ne fut pas aussi sans défense qu'il parût. Pendant qu'il lui collait une mandale, le Niveleur avait englué une de ses bombes adhésive à son biceps. L'engin explosa en arrachant le bras du pauvre marine qui s'écroula dans les doux bras de l'inconscience.

Le combat à la manière des pistoleros ne lui plaisait guère, à l'androgyne. Dans cet environnement contigu, il fut obligé de se débarrasser de son fusil de précision et d'utiliser ses deux armes de poings. Malgré tout, ce changement de style de combat n'entamait en rien son adresse, mais pour une raison qu'il ignorait, il ne tirait pas pour tuer. Virevoltant entre les marines inexpérimentés, Bobcat logeait ses balles dans les points incapacitants de ses adversaires puis les laissait immobilisés derrière lui. Genou, coude, main, épaule furent ses cibles favorites. Il constella son sillage d'estropiés sans être une seule fois inquiété. Leurs adversaires n'étaient pas de première main, mais ils n'étaient pas non plus à sous-estimer, se dit-il quand il vit Nivel faire un vol plané à la suite d'une déconcentration. L'androgyne jura intérieurement la stupidité du Plasticien.
Son instinct aiguisé le prévint d'un danger bien au dessus du commun des moutons qu'ils affrontaient. Aussitôt après, un jet d'air lui rafla la joue éclaboussant sa combinaison noir de vermillon. Très lentement, Avada Kedavra se retourna pour faire face à Ogaryan Mortimer. Les traits durcis du Colonel n'exprimaient qu'une pure colère. Sa main droite se crispa sur une rapière au clair.

- Arrêtez de couper les branches de notre jeunesse !

- Élaguer des branches est devenu ma spécialité depuis un moment, Colonel.

- C'est bien pour cela que je suis ennuyé. Et quand je suis ennuyé, je ne peux laisser partir une prime comme la tienne, 45 millions de Berry, Avada "Bobcat" Kedavra !

Par une étrange coïncidence, l'Alerto den den avait été ramassé par un marine et son objectif était à présent tourné vers le combat que se livraient le vieux colonel et l'androgyne. Ainsi, à des centaines de kilomètres de là, Loth et Dena' suivaient ce duel de titans. Il apparut clairement que Mortimer était sans doute un de ces vieux officiers qui avait refusé une promotion visant à le faire rejoindre le cercle très fermé de l'amirauté, préférant sûrement enseigner et dépenser le reste de son existence dans son petit bled paumé.
Pour un combattant à distance, Avada évoluait vraiment comme un virtuose, se dit Loth qui peinait à suivre les mouvements de l'androgyne, pas à cause d'un problème avec l'objectif de la caméra mais bien à cause de la vitesse de déplacement des deux adversaires. Autant dire que Dena', lui, ne voyait que des ombres flous se mouvoir vaguement.
L'opposition des styles était frappante. D'un côté, un sniper reconverti en pistolero qui, constamment, cherchait la distance et un fin épéiste qui cherchait exactement le contraire. Mortimer cisaillait, Avada esquivait puis tirait. Du plat de son épée, le Colonel détournait les balles puis dardait à nouveau son aiguille qui, à l'instar d'une langue de serpent, piquait, se rétractait en un clin d’œil, asticotait le cœur de l'androgyne qui, à son tour, contrait, parait, feintait bas, et envoyait ses balles harceler la jugulaire du vieux loup.

- W..whoua... bégaya Dena' qui ne voyait que des étincelles jaillir épisodiquement des échanges. Ils sont très forts... d'un même niveau !

- Non.

Forts, ils l'étaient à n'en pas douter, au dessus de ce que pouvait faire Loth et l'intéressé le reconnaissait volontiers. Ce qu'il reconnaissait aussi c'était la supériorité du Colonel sur le tueur à gage. En pure force, et en technique. Dans cet affrontement entre des idéologies aussi opposées que le combat à distance et rapproché, l'avantage fut au vieux marine. Non seulement, il ne laissait pas de marge à Bobcat pour s'éloigner au point de s'offrir une distance de confort, mais il pouvait lui aussi attaquer à distance. Après un vif mouvement du poignet, quand sa rapière troua l'espace, une lame d'air lancéolée en résulta et prit Avada de court par sa vitesse. Nul été un réflexe salvateur de dernière minute, l'androgyne voyait son poumon droit perforé. Heureusement, il s'écarta in extrémis du sillage du jet d'air. Tout de même, il lui balafra profondément le côté droit au niveau de la cage thoracique et se débarrassa des bouts de tissus et de chairs qui ornaient cette partie de l'anatomie de Bobcat. Il recula et épongea de sa main le sang qui suintait de sa blessure. Le Colonel souffla.

- Je suis trop vieux pour ces trucs là. Rends-toi et tu bénéficieras d'un procès. Pour tous tes crimes et pour ceux perpétrés aujourd'hui.

- Non, mon colonel !
- A mort !
- Mettez-le à mort maintenant !
- Il le mérite !

- La Justice Expéditive ne fait pas partie de mes devises. Je te laisse le choix Bobcat. Le tribunal ou ma rapière ?

- Ogaryan Mortimer, "Le Juste", hein ?
En gros, tu me demandes si je préfère être trainé dans l'arène pour y subir la mort ou marcher tout droit pour y faire face ?


- Tout à fait.

- Question inutile ! murmura Avada en changeant d'arme de poing. La mort n'est qu'une grande aventure de plus.

- Dans ce cas, adieu. Sentence du Juste !

- Ténèbres emplumés !

Cette transition incertaine nommée Crépuscule pointait le bout de sa robe. Il arrivera bientôt, nimbé dans son voile de carmin et apportera à Inu Town la douceur et la brise d'un soir d'été. Mais ils en étaient encore loin, alors, la stupeur des marines de voir le théâtre des opérations plonger subitement dans les ténèbres fut compréhensible, d'autant plus qu'aucune action des deux adversaires ne semblait viser ce résultat.
Après les derniers mots échangés, le Colonel s'était mué en une sorte de toupie humaine, tournoyant sur lui-même en déclenchant une micro-tornade autour de lui. La singularité fusa sur Avada qui maintint son calme olympien. Son seul geste fut de pointer sur la tornade tranchante son arme de poing qui ressemblait à s'y méprendre à ces pistolets d'eau dont raffolaient les bambins. Sauf qu'à la place de l'eau, ce furent des sortes de paillettes qui en jaillirent. Point de balles. Mais des paillettes, oui, tous ceux qui avaient assisté à la scène en étaient certains. Immédiatement après, le ciel s'était couvert de noir.
Un noir bruyant, piaillant, braillant, égosillant, couinant... Était-ce possible ? Était-ce vraiment des...

- Des piafs ? s'étonna Dena' sur Boréa.

- Pas "des piafs", répondit Loth avec une grimace.

L'ornithologie lui avait permis de revenir à la vie, de reprendre goût aux choses banales après sa libération de sept longues années de séquestration par une secte suprématiste humaine nommée le Conclave. Alors Loth détestait qu'on écaille, qu'on généralise ou qu'on vulgarise les noms des oiseaux.

- Ce sont des pies bavardes à langue dorée, une espèce endémique de West Blue.

- Et p'quoi des piafs d'West Blue viennent-ils s'la jouer au d'ssus d'un combat comme si on les avait invoqués ?

- Bah parce qu'elles ont étés invoquées justement. Le dernier tir d'Avada contenait de la poudre d'or dont raffolent ces créatures. Elles ont été relâchées au même moment que partait le coup de feu, donc, comme attendu, elles se sont ruées dessus. Là, elles ont l'air de s'attaquer aux soldats mais en fait, elles ne font que picorer les micros paillettes d'or collés à leurs vêtements.
Ne me demande pas qui les a relâchées, y a justement, non loin, un individu notoirement connu pour provenir de West Blue...


- Nivel... C'est c'que t'as appelé les "Pies-surprises" ? Tu lui a dit d'les prendre avec lui.

- Yep, Nivel élève ces animaux.

- Ah bon ? Nivel n'peut élever quoique c'soit d'vivant à moins de... Oh non... C'dégeux ! s’exclama Dena' d'un air révulsé en devinant la suite des opérations.

- Nous sommes d'accord, fit Loth en relevant de l'index ses lunettes.

Et comme pour confirmer les dires inaudibles qui s'échangeaient dans cette suite de la ville portuaire de Lavallière, à Inu, une voix follement joyeuse s'éleva au dessus du ramdam et du charivari des oiseaux s'égosillant et des marines jurant, et hurlant, attaqués par les becs féroces des corvidés. Simultanément, un seul homme, le meilleur de tous, remarqua le terrible piège qui se refermait sur ses hommes et lui. Il s'époumona comme jamais dans sa vie, cherchant à coup de rapière à se faire le plus entendre de ses hommes.

- DÉGAGEZ ! BOMBES VOLANTES !

- Hihahihahi ! Pour mourir, il n'est jamais trop tard Mortimer !
Moi je les appelle, Bombes Sales ! Hihahihahihahihaaaa !





Dernière édition par Loth Reich le Lun 7 Sep 2015 - 1:09, édité 1 fois
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L'idée même de ces "bombes sales" révulsait Loth. Malgré tout, il ne pouvait qu'apprécier leur ingénieux diabolisme et efficacité. Des pains de dynamite noircis et attachés à des oiseaux dressés pour fondre sur vous. Avant de comprendre votre horrible situation, vous vous retrouverez assailli de bombes volantes prêtes à vous péter à la gueule. C'est en somme ce qui arriva à l'escouade de marines venue capturer Nivel et Avada.
Malgré qu'ils fussent cernés par la nuée de pies bavardes, l'avertissement du Colonel sauva de nombreuses vies ; Il y eut ceux qui furent assez réactifs pour trouver une contre mesure -comme brandir un bouclier- ou qui réussirent d'une manière ou d'une autre à se débarrasser ou à s'extirper de la nuée, ou encore qui firent appel au Tekkai pour se protéger des déflagrations qui suivirent.

Dès que Nivel appuya sur l’infâme bouton qui scellait le sort des corvidés, ils explosèrent comme des grains de maïs sur une plaque chauffante. A cette différence qu'il ne plu point des popcorns mais un rebutant déluge de sang, de chairs réduits en confetti et de plumes macérées. Nivel ne s'attarda pas davantage pour voir les réels dégâts causés par ses ignominieuses bombes, pas plus qu'Avada d'ailleurs qui avait pris la tangente dès l'apparition des oiseaux.
Le but n'avait jamais été de combattre la marine, mais après avoir attiré l'attention sur eux par leurs attentats et les morts collatérales qui en résultèrent, c'était devenu une option presque certaine. Nivel avait proposé l'option de piéger davantage différents endroits de la ville et de faire courir les marines en déclenchant les bombes à intervalle irrégulier pour les tenir éloignés d'eux mais Loth écarta cette idée, ne voulant plus causer de victimes collatérales.

- J'espère vraiment qu'avec ça, ils nous foutront la paix pendant un moment ! haleta Nivel un quart d'heure plus tard, les mains sur sa tempe ensanglantée. Tiens, tu as récupéré mon Alerto den den ? J'avais vu un marine le prendre.

- Avant de m'enfuir, oui. Ils n'étaient pas question d'abandonner quelque chose là-bas qui puisse les faire remonter à Boréa. Toujours là Loth ? demanda-t-il au mini-escargophone qu'il tenait au poignet.

- Bah oui, où veux-tu que j'aille ? rétorqua Loth, miné par son impuissance. Très beau combat tous les deux, j'ai de la chance de vous avoir. Les marines devront compter leurs blessés et pour les indemnes, prendre une douche qui risque de durer très longtemps, alors, je pense que vous serez tranquille un bon bout de temps. Mais n'êtes vous pas sur la plage, au point de débarquement où vous avez foulé pour la première fois Inu ? Où est Krav' ?

Ils se séparèrent pour chercher la femme-poisson. Sur la petite portion de côte, chacun des pas de Nivel produisait un doux bruit croustillant dû aux graviers naturels qui formaient un tapis multicolore dominé de gris. Avada était d'un naturel leste et furtif et quelle que soit la situation, ne produisait aucun son en déplacement. Au bout d'un moment, Nivel éleva la voix et héla Bobcat. Il trouva le plasticien derrière une grande dune de graviers. Au pied de l'amoncellement de cailloux gisait le corps meurtri et cassé de Ned Lampre. Des boursoufflures et hématomes sanglants et saignants constellaient son corps. Ses bras formaient des angles inquiétants qui suggéraient sans équivoque qu'on les lui avait cassés, à plusieurs endroits. Assurément, le magnat avait eu une mort longue et douloureuse.

- Mais...mais..pourquoi ? demanda Nivel abasourdi. Tu n'lui avais pas dit de n'pas le brutaliser, Loth ?

- Oui, répondit sombrement le binoclard dont le projecto den den reflétait sur le mur l'image de la carcasse de Ned. Elle voulait lui casser des membres pour le faire parler, elle l'a fait.

- Bon, c'est clair maintenant, elle a choisi son camp, susurra Avada en faisant coulisser la glissière de ses semi-automatiques qui éjectèrent des douilles usagers avec un son de claquement sec.

- Malheureusement. Je lui avais pourtant dit que le sacrifice, c'est un truc de looser.

- Woh ! woh ! woh ! Calmos vous deux. Elle s'est laissée emporter, elle est passionnée Krav'. Mais c'est pas pour ça qu'elle nous a trahi ! Faudrait juste lui mettre les points sur les "i" concernant la désobéissance, c'est tout, intervint Nivel qui regardait alternativement Avada et l'escargophone personnalisé de Loth comme s'ils avaient perdu la tête.

- Comme je le pensais, il n'a rien remarqué. Bon, tu lui expliques Loth ? Je n'en ai ni le courage, ni l'envie.

- Tu étais le plus farouche opposant à l'insertion des prisonniers d'Ashura dans nos rangs, Nivel, et maintenant tu défends Krav', sûrement parce que tu estimes qu'elle a fait ses preuves et par dessus tout, tu te sens reconnaissant parce qu'elle t'a sauvé la vie. Alors, je vais te la faire courte. Krav' n'a jamais été des nôtres. Tu n'as pas trouvé étrange la facilité avec laquelle elle s'est débarrassée du monstre qui allait faire de toi son quatre heures ? En deux coups, tu m'as toi même dit.

- Et alors ? Elle lui a mis la raclée de sa vie, qu'est-ce que t'y trouves d'étrange ?

- Seulement le fait que ce même monstre est censé avoir tué les trois membres de son escouade. Mais surtout ce qui cloche le plus dans son histoire, c'est le timing. Entre le moment où les Egg barils ont été délestées -et où tu t'amusais à détruire la flottille marchande- et le moment où Krav' est remontée pour te sauver les fesses, combien de temps s'est écoulé ?

- Je dirais une bonne dizaine de minutes.

- Alors réfléchis à ça Nivel. Au vue de la différence manifeste entre elle et le monstre qu'elle a démonté en moins d'une minute, te semble-t-il raisonnable que cette même créature ait pu lui tenir tête pendant tout ce temps -dix minutes- si on devait croire son alibi ?

- Bah ouais, c'est possible, parce que tu oublies un fait. Le monstre qui m'a attaqué n'était qu'un bébé, sa mère se confrontait au cuirassé. A eux deux, ils ont largement pu la retenir sous l'eau pendant ce temps et éliminer son escouade. Franchement les gars, vous cherchez la petite bête !

- Tu étais peut-être occupé à te sortir de l'eau mais pour ton information, elle a aussi démonté la mère avec la même facilité. La vérité c'est que la bête s'enfuyait déjà quand j'ai tué l'homme-poisson-raie qui les commandait avec sa flute.

- Non mais ce que vous dites est insensé. Pourquoi alors, nous aurait-elle sauvé si elle était toujours fidèle à Ashura ? répliqua Nivel qui ne se laissait pas démonter par les arguments de ses collègues.

- Elle ne l'a pas fait de bonté de cœur, crois moi. Mon scénario, le voici : quand j'ai proposé à Krav' de devenir une des nôtres et de participer à l'opération, elle y a vu le moyen de gagner des galons dans le réseau. Avec La Braise morte, si elle parvenait à s'échapper et à rejoindre Lavoisier, elle deviendrait immédiatement le nouveau commandant des forces paramilitaires du Réseau. Mais voilà, elle ne pouvait sûrement pas revenir sur Boréa la queue entre les jambes, elle devait prouver son efficience surtout après la défaite que je leur ai infligé. Et quoi de mieux que de saboter notre opération tout en nous privant de notre cuirassé ? Ce serait un cadeau de choix au Boss suprême.
Alors, elle s'est jointe à nous, elle nous a même filé des infos sur les protections des Cellules Ambulantes pour gagner notre confiance. Le terrain étant maritime, elle savait que nous allions l'envoyer en reconnaissance, avec des hommes qu'elle avait dans sa confiance. C'est ce que nous avons fait. Certains hommes-poissons d'un certain niveau, ou juste par affinité, possèdent la capacité de domestiquer ou juste d'apprivoiser via la terreur des monstres marins comme ceux qui vous ont attaqué. Je suppose que c'est durant la reconnaissance que son escouade et elle ont découvert les créatures nageant dans les bas-fonds de la mer. Des monstres domptés par Machiavel. Ce qu'elle ne savait pas, c'est que j'avais envisagé l'option "monstre marin" dès les premiers rapports sur la nature déserte du coin. Je vous avais déjà exposé mon raisonnement sur ce point.  


- Mais qu'est-ce qui te fais croire qu'elle a détecté les monstres durant sa reconnaissance et ne nous en a pas averti ?

- Sa réaction quand Loth a finalement décidé de soutenir l'opération avec le cuirassé. C'est à partir de là que j'ai commencé à avoir des soupçons à mon tour. Qu'avions nous prévu au tout début Nivel ? Durant la première communication par projecto den-den, quand elle nous a fraichement rejoint ?

- De composer une équipe de quatre individus chacune et de les diriger à nous trois, répondit-il doucement.

- Pourquoi ?

- Parce que le cuirassé était trop grand et qu'il ne pouvait approcher sans trahir sa présence.

- Tu vois maintenant ? Le non-engagement de l'Innofensif était la clé pour elle, elle a tablé dessus. Mais voilà, elle ignorait que ce jour était celui de la livraison de Dance, donc qu'il y aurait beaucoup plus de navires. Donc pour résumer, durant sa reconnaissance, elle a découvert deux choses capitales : Le doublement du nombre d'ennemi à combattre et la présence de monstres marins. Pour se garder une certaine marge de manœuvre, elle nous a parlé du plus évident. Les quatre caravelles supplémentaires.  
Maintenant, je reviens à la réaction dont j'ai parlé plus tôt, tu t'en souviens aussi, n'est-ce pas ?


- Elle a tenté de nous faire garder le plan initial, d'y aller avec trois escouades, sans le cuirassé. Ce qui était du suicide...

- Tout à fait. En plus, comme je n'ai pas reçu de rapport concernant des monstres marins alors que j'en attendais, je me suis dit qu'elle nous la mettait à l'envers. Si vous y étiez allés sans le cuirassé, vous serez tous probablement morts à l'heure qu'il est. Et c'est ce qu'elle désirait. Pour contrer sa tactique, j'ai adapté ma stratégie en conséquence, et j'ai tout misé sur l'escouade d'Avada, dans sa prise d'Immondus. C'est aussi pour cette raison que je n'ai pas jugé bon de vous parler de l'éventualité des monstres mais je savais qu'Avada avait deviné le double jeu de Krav'. Ensuite, elle a essayé d’amenuiser nos forces soit en laissant faire les monstres, soit en les lançant directement contre nous. Je ne sais toujours pas si c'est l'homme-raie qui les commandait réellement. Mais quand elle a vu que la situation tournerait en son désavantage avec le cuirassé qui était bien plus coriace qu'elle ne l'avait prévu -sans doute avait-elle tablé sur une destruction rapide par la vache-mère- elle a décidé de prendre les devant et de venir jouer les sauveuses. Voilà ce qui s'est passé mon cher.

- Mais... Et Bill, Gin, et Foy ? Vous voulez me faire croire qu'ils se sont justes tirés c'est ça ? rétorqua Nivel.

- Non, sur ce point, elle nous a dit la vérité, ils sont morts. Si elle est restée dans les tréfonds aussi longtemps, ce n'était pas seulement pour voir les monstres nous anéantir. Je pense qu'elle a dû livrer combat contre eux. Remarquez que séjà sur le pont, elle étaient rentrée en conflit avec Bill et Gin jusqu'à en venir aux mains. Ils n'étaient pas dans ses plans, sans doute voulaient-ils leur part du gâteau quand ça finirait, ou encore, Foy qui était plutôt cool voulait réellement me rejoindre. Quoiqu'il en soit, elle les aura éliminés pour garder la parti du lion.
Maintenant, elle veut nous empêcher de mettre la main sur Machiavel. Je ne sais pas trop quelle sera sa conduite si elle le trouve. Soit l'éliminer et ramener sa tête sur Boréa et déclarer que le travail à ses heures perdues du chimiste mettait en danger le Réseau, ou soit l'exfiltrer, et le ramener sur une quelconque base d'Ashura pour prouver qu'elle est capable de reprendre la sécurité en main.


- Dans tous les cas, elle et nous avons un objectif commun maintenant. Retrouver Machiavel.

- Cette sale trainée ! s'exclama Nivel, trahi. Dire que je lui avais accordé ma confiance !

- Le syndrome du sauvé, tu te sentais redevable. C'est quasi-mécanique. Alors Loth, tu penses qu'elle a réussi à briser Ned et à lui soutirer des infos ?

- Aucune chance, c'est d'ailleurs pour ça qu'elle l'a autant massacré de coups. Frustration de n'aboutir à rien du tout. Mais par chance, je sais où est Machiavel et je pense savoir aussi où est Krav'.

- Alalalalala. Qu'est-ce que tu ne sais pas, Loth ? demanda Nivel franchement pas convaincu par l'affirmation du binoclard.

- Ce que je mangerais demain, ça je ne le sais pas encore. Ne sous-estime pas le pouvoir de la déduction et de l'observation, Nivel. J'aimerais tellement que tu vois les choses de mon point de vue, tout te semblerait tellement plus clair ! En attendant, je confirme, je pense savoir où sont nos deux hommes-poissons et quand je vous l'expliquerais, tout vous semblera limpide aussi. Comment procéderons-nous ? Qui traquerons-nous en premier ? Krav' ou Machiavel ?

- Machiavel !

- Krav' !

- Bon... Dans ce cas les potes, poursuivons deux lièvres à la fois.

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- Vous avez chacun des préférences et donc vous allez vous séparer pour les satisfaire. Je précise qu’il vous faut les capturer vivants, chose que particulièrement toi Avada tu exècres. Mais j’insiste, je les veux vivants, messieurs. Vivants et intacts dans le meilleur des cas, précisa-t-il en voyant l’expression fourbe de Nivel.

- Moi je ne te promets rien, les explosifs, ça arrache des membres mon vieux… Si tu nous disais où ils sont censés se trouver, qu’on puisse en finir avec cette aventure sur Inu ?

- Et bien, Ned nous a volontairement donné des indications sur l’endroit où pourrait se trouver Machiavel. Qu’a-t-il dit quand vous l’interrogiez, juste avant qu’Avada et les marines ne débarquent ? T’en souviens-tu Nivel ?

- Euh... Il nous a remerciés de l’avoir capturé et d’avoir perpétré ces attaques contre son groupe, maintenant que j’y pense…

- Oui, c’est l’élément le plus significatif. Pourquoi nous remercierait-il d’avoir détruit deux de ses magasins en faisant quatre victimes au passage ? Quel intérêt pouvait-il bien avoir là-dedans ?

- Je ne vois vraiment pas. Les assurances ? Non, ça l’fait pas…

- Et pourtant, en tant qu’anarchiste, tu devrais savoir mieux que quiconque l’intérêt qu’il pouvait tirer de cette situation, Nivel. Ce n’est pas compliqué, vois les choses dans leur globalité, c’est un puzzle.

- La terreur ! répondit aussitôt le rouquin. Il veut profiter et voler sous le couvert du climat d’effroi que nous avons provoqué. Ah ! En plus, Ned a dit que l’arme que confectionnait Machiavel était prête ! Cet enfoiré va utiliser le Léviathan et tout le monde pensera que c’est moi… Bordel !

- Mes pensées, précisément. Et je crois que Krav’ a déduit la même chose et qu’elle a également identifié dans la foulée, le seul endroit sur Inu susceptible de servir de cible à Machiavel.

- C’est forcément Minus Atalante. J’ai entendu dire que c’est un complexe hôtelier semi-aquatique à l’extérieur de la ville qui regorge d’hommes-poissons en cette période estivale.

- L’endroit rêvé, assurément. Maintenant tu sais où doit probablement se trouver Krav’. Si, j’ai raison et que Machiavel se trouve là-bas, fais tout pour l’empêcher de mettre en œuvre son projet, peu importe que la bombe soit physique ou chimique. Je ne crois pas que ça aidera la cause des Niveleurs qu’on pense qu’ils défendent aussi la suprématie humaine.

- Bah non ! Je vais leur faire la fête à tous les deux !

- Et pour sauver les coussins au cas où le professeur ne se trouverait pas à Minus Atalante, Avada, tu te pointeras à son labo. Pour mettre au point des armes, faut bien des supports et une installation digne de ce nom. Vous m’avez rapporté que Rom’, le contact de Dena’, vous a parlé d’une rumeur comme quoi Ned aurait sa résidence sous terre. Il doit y avoir une part de vérité dedans, regardez le corps de Ned, que voyez vous comme parure ?

Nivel et Bobcat se penchèrent sur le cadavre en plissant les yeux comme s’ils cherchaient une chose microscopique. En réalité, cela leur pendait aux yeux depuis le début, mais ayant considéré ça comme indigne d’intérêt, ils n’y avaient pas accordé davantage d’attention. Le cou de Ned était ceint d’une chaine argentée d’où pendait un médaillon. Un second coup d’œil leur permit d’affirmer que le pendentif était fait d’un cristal bleu électrique. Nivel montra de l’index la chevalière du feu magnat qui était sertie du même cristal mais violacé cette fois-ci.  

- Cette île et la ville de Chom en particulier abritent des mines de cristal dont l’exploitation génère de conséquents revenus pour l’économie de l’île. Il est probable que Ned possède une mine de cristal, ce qui ferait une bonne cachette pour Machiavel.

- Euh, c'est pas tiré par les cheveux là ? Les cristaux, ça se vent partout ici, tu sais ?

- Certes Nivel. Mais prête attention à la forme de ces cristaux. Ils sont gros, non taillés, quelconques, sans aucune grâce. En gros, bruts. M’est avis que les pierres naturelles non travaillées doivent être bien rares à la commercialisation. C'est ce qui m'amène à dire que Ned aurait pu directement s'approvisionner à la source.

- Tu as sûrement raison. D’ailleurs, il a le teint blafard des gens qui n’ont pas vu le soleil depuis un bout de temps. Je vais retourner voir Rom’, s’il peut me dénicher une info probante sur les mines.

- Demande-lui de chercher en priorité les vieilles mines de cristaux désaffectées que Muramasabre aurait rachetées pour de quelconques raisons. Bonne chance les mecs, ramenez-les-moi vivants.

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Le souci avec Minus Atalante c'était qu'il était exclusivement dédié aux hommes-poissons. Dans cet environnement, la silhouette rousse et borgne-au-cache-œil de Nivel était aussi reconnaissable qu’un nez de Nasique au milieu de la figure. Malgré tout, dans l’immense complexe, il y a avait des humains qui s’occupaient des tâches subalternes comme la restauration, l'entretien, le jardinage, etc... On serait tenté de dire que les hommes-poissons recréaient ici leurs fantasmes de dominations sur les humains, à cette différence que les humains qui travaillaient ici le faisaient de leur propre gré et contre rémunération.
Le bon côté des choses fut aussi que la terreur et la frénésie générées par les attentats de Nivel n’avaient pas encore atteint Minus Atalante. Aisément, le roux franchit les maigres défenses murales à savoir quelques fils barbelés -Fallait dire que l’ambiance paisible d’Inu Town n’encourageait guère une sécurité abusée- et se faufila derrière ce qu’il considéra dès lors comme des lignes ennemies. Discret et furtif -tout le contraire de son caractère naturel-, Nivel se dirigea sous le couvert des ombres d’une pommeraie vers un lotissement à l’écart de l’ensemble des bâtiments du complexe. Là, des humains sortaient et entraient tout le temps, chargés d’assiettes, de nécessaires d’entretien et bons nombres de choses que le Niveleur ne crut pas essentiel de relever.

Perché dans les branches d’un gigantesque pommier, Nivel vit avec intérêt un employé passer en tirant un chariot rempli de linges usagers. Sans hésiter, il lui sauta dessus et d’un coup bien placé à la nuque, l’assomma. Il opéra ensuite une rapide transformation où il revêtit la tenue et le béret beige de fonction des employés de la blanchisserie. Il enleva son cache-œil puis attacha le corps inanimé de l’assommé dans l’arbre. Quand il se réveillera dans une petite heure, ses braillements suffiront à alerter le voisinage. Il se dirigea ensuite vers la maison des domestiques.
Elle était grande, répartie en plusieurs bloc de travail dont la blanchisserie qui était bondée et emplie de boucan. Ce qui fut parfait pour Nivel, car il passa inaperçu. Il délaissa son chariot et se dirigea vers un mur qui avait attiré son attention. Dessus était épinglée une carte. Grosso modo, le complexe hôtelier avait l'allure d'un champignon. La maison des domestiques représentait la tige -ou le stipe- tandis les lieux de villégiature formaient le chapeau en forme parabolique du champignon. Le chapeau n'était pas en bloc homogène cependant, il était émietté en petits blocs séparés par des piscines ou des plans d'eau.  

- T'es nouveau ? T’ai jamais vu ici ! lui dit un jeunot qui se tapa l’incruste. T’fais pas du mouron, moi-même, n’ai pas compris la carte les premiers jours. Mais on s'y fait !

- Oui, c'est ça, je suis nouveau. J'essaie de me familiariser avec les lieux.

- Ah, t'es en intégration donc ? Pas encore commencé à traffer ?

- Nope, pas encore. Dis-moi, en cette période, quelle activité retient plus l'attention des clients ? Où sont-ils le plus regroupés ? C'est que je ne voudrais pas gaffer en déboulant dans un groupe de... Enfin, je veux pas déranger quoi.

- Haha, t'inquiètes, sont tous sympas et ici le client est roi ! Y a un match de water-polo en ce moment, ici, dit-il en indiquant du majeur l'extrême droite du chapeau. La majorité des vacanciers y sont, le match oppose les Krakens aux Charybdes. Tu vois, certains reviennent ici à chaque vacance si bien qu'ils ont fini par former une équipe viable. Vraiment impressionnant les matchs, aurais aimé voir celui-là, ce sont les demis, tu sais... Eh, où tu vas ?

- Bah continuer mon intégration mon pote, on se revoit bientôt.

- Okey, demande "Léo", tout le monde me connait !

Pour sûr, ils te connaissent, pensa Nivel, une pie bavarde comme lui ne devait pas passer inaperçu. Mais soit, il l'avait bien aidé. Un match qui rassemblait la quasi-totalité des locataires, si ce n'était pas le moment rêvé de faire un sanglant attentat, Nivel ne s'y connaissait pas en anarchisme. Avant d'approcher le terrain de water-polo, il avala le kilomètre qui séparait la tige du chapeau du champignon. On avait tenu à éloigner le plus possible la masse humaine de celle des hommes-poissons. Chemin faisant, il croisa humains et hommes-poissons et saluait respectueusement à chaque fois, puis traçait son chemin. Le terrain de water-polo se situait à l'intérieur d'un massif bloc rectangulaire. A vue d’œil, Nivel estima qu'une telle structure pouvait accueillir trois à quatre centaines d'individus... Un carnage assuré. Il jura intérieurement, et se présenta à une des entrées puis expliqua au garde humain qu'il était en "intégration".

- Où est ta fiche de pointage alors ? demanda le gorille d'un air rusé.

Ce furent ses dernières paroles de la soirée. Il se réveillera, plus tard, à l'aube sûrement.
Le soleil s'était intégralement dérobé à présent et le crépuscule cédait lentement la place à la nuit. Sans dissimulation aucune, Nivel laissa le corps au crâne boursoufflé du garde là et fit son entrée. Il se fichait que quelqu'un le trouvât, l'heure était grave. Il se dirigea d'un pas rapide vers l'aire de jeu.
Nivel émergea d'une des nombreuses entrées qui desservaient l'aire et les tribunes l'entourant, un peu à la manière d'un Colisée.

- Putain... jura-t-il dans sa barbe en contemplant les tribunes d'où s'échappaient des clameurs. Ils doivent être au moins deux cents là... Déjà, c'est étonnant de penser qu'une telle quantité d'hommes-poissons est en vadrouille sur North Blue.

Il lui fallait chercher Krav' ou Machiavel parmi la profusion d'espèces et de couleurs de leurs congénères présents. A distance, à l'instar des serviteurs humains -mais qui parfois s’immisçaient dans les tribunes pour apporter telle ou telle chose à ces clients pointilleux- Nivel scruta les gradins avec sa longue-vue télescopique. Minutieusement, il passa les bancs au crible, ne laissant aucune place à la négligence. Certes, il cherchait les deux criminels mais aussi quelque chose de plus vague et anodin mais pouvant dissimuler un engin de mort. Comme un sac orphelin ou un quelconque conteneur délaissé au milieu de ces poiscailles.  
Il chercha longtemps. Pendant un quart-heure peut-être, deux heures sûrement, ou plusieurs soirées d'été rafraichies par Notos le Vent du Sud à n'en pas douter... Toujours est-il qu'il repéra la silhouette familière de Krav' au moment où ses yeux -entourés de cernes à cause des jumelles- commencèrent à fatiguer. Elle était là, la femme-poisson à la peau bleutée striée de cannelures zigzaguées. Elle parlait à messe basse à un autre homme-poisson à la peau légèrement rosée, dotée de grandes oreilles de chauve-sourie.

- Derek Machiavel... murmura Nivel.

Mais nulle part autour des deux criminels, un quelconque signe de bombe, dissimulée ou non. A croire que Machiavel était juste venu regarder le match et que Krav’ l’y avait coincé ?  Loth se serait-il trompé dans sa déduction ? Machiavel logeait-il ici, à Minus Atalante, parmi ses congénères qu'il haïssait tant, tout en préparant leur mort prochaine ? Et qu’en était-il de son supposé labo dans les mines ? Pouvait-il juste loger ici et travailler là-bas, dans les mines ?
Nivel chassa toute conjecture de son esprit. Mais si Machiavel vivait là, il avait eu tout le temps de repérer les lieux. La bombe -s'il y en avait une- était peut-être placée dans un autre endroit. Les vestiaires, la salle de communication, des machines, peut-être...
De solutions, le Niveleur n’en avait pas trente-six milles. Pour avoir des réponses, il lui fallait capturer le chimiste, sans oublier Krav'. A deux contre un, la tâche s'annonçait déjà ardue.
Imperceptiblement, il glissa sur sa droite, suivit la courbe en "U couché" des tribunes et les contourna vers la gauche. L’attention des spectateurs était si bien consacrée sur le match aquatique que nul ne fit attention à lui quand il se faufila dans les gradins en hauteur. Le terrain était disposé à la manière d’un amphithéâtre, la piscine de jeu se trouvant tout en bas tandis que les tribunes en marche d’escalier l’encerclaient.
Les cibles du Niveleur se trouvaient dans les gradins du milieu, près d'une sortie, observa-t-il. Ils avaient veillé à avoir une échappatoire mais Nivel ne comptait pas leur donner une chance de s’y engouffrer. Dès qu’il fut assez près pour passer à l’action, il alluma une dynamite. Dans l’atmosphère surchauffée des tribunes où vociféraient en chœur deux cents hommes-poissons, la dynamite passa pour un bâton de feu d’artifice. Mais nul ne s’y trompa et ne la confondit avec un pétard quand elle explosa avec puissance. Nivel la lâcha juste au dessus de la porte par laquelle aurait pu s’échapper ses cibles. La déflagration provoqua un éboulis dans les marches supérieures et les gravats ensevelirent la porte pendant que la terreur se répandit à la vitesse de la lumière dans les tribunes. Les cris de joie cédèrent place aux cris d’horreur et aux complaintes de douleur. Cette première explosion s’était produite dans un espace assez confiné et non occupée mais les éjections de gravats avaient déjà blessé plus d’un. Serein au milieu de la foule en totale débandade vers les différentes portes de sortie, Nivel regardait de haut ceux qu’il était venu capturer. Krav’ et Machiavel étaient eux aussi arrêtés et le dévisageaient.

- Tu nous as trahis alors que je t’avais accordé ma confiance Krav’, pour ça, tu vas payer !

- Laisse-moi rire ! Ton pathétique binoclard de patron et ses beaux discours ?! Haha, quand je ramènerai sa tête à Lavoisier, je serai faite commandante des forces armées du Réseau. Il a gagné une bataille et pense avoir remporté la guerre. Ce qu’il a fait, c’est faire tanguer le bateau Ashura, mais jamais il ne chavirera !

- Putain, Krav’ma, tu vois que t’en a ramené un ici ? Fallait que tu te pointes avec tes petits amis, le prototype du Léviathan n’est pas encore au point !

- On s’en fou de ta stupide arme là, mais tu t’entends ? Éliminer tous les homme-poissons, tu y crois vraiment ? Viens avec moi à Boréa, nous serons récompensés et..

Autant que Loth ne pût détourner Krav’ de sa foi en Lavoisier, elle ne put convaincre Machiavel. Au contraire, son dédain exprimé et manifeste contre le but du professeur l’irrita au plus haut point. Elle n’acheva pas sa phrase que ce dernier lui enfonça son poing dans la figure. Un poing bien mastoc entouré de piquants qui soulignaient son appartenance à la race des poissons-fugus. Krav’ valdingua dans la foule en délire panique pendant que Machiavel en profita pour prendre la poudre d’escampette. Nivel se réjouit intérieurement, l'arme n’était pas encore prête, avait-dit Machiavel. Sûrement, avait-il menti à Ned pour continuer à recevoir ses financements. Un escroc fanatique… Pauvre Ned qui avait eu foi en cette énergumène.
Nivel revêtit des lunettes de soleil, puis s’élança par-dessus la masse. Il jeta vers Machiavel un projectile de la taille d’une bille qui explosa en éblouissant le stade d’un puissant flash de lumière blanchâtre. Le Niveleur profita de sa diversion pour approcher le professeur. Sa poigne tenta de se refermer sur la maigre crinière de Machiavel mais ce dernier se déroba à la grande surprise de Nivel. Il avait compté sur l’aveuglement du chimiste mais réalisa dans la même seconde que le fugu était un poisson des profondeurs dont les yeux réfléchissaient sûrement la lumière sans l’absorber… Trop tard, un coup de pied ciseau descendant gifla le Niveleur et l’envoya bouler. Tout cela se passa en moins de deux secondes, durant le laps de temps qu’il fallut au flash pour naître, s’épanouir, puis s’éteindre.
Quand Nivel revint à lui, il vit Krav’ courir à son tour après Machiavel. Ce dernier atteignait déjà l’une des portes et jouait des coudes pour se frayer un chemin dans le tohubohu des hommes-poissons cherchant à s’enfuir. Mais il était toujours à portée de la main de Krav’ qu’elle tendait allègrement pour s’emparer de lui, la carte qui lui permettrait de faire un retour triomphal dans les rangs d’Ashura.

A un centimètre de son but, Krav’ se fit tirer en arrière par une force inconnue. On l’avait entravée à son insu, si bien qu’elle se retrouva saucissonnée les mains plaquées le long du corps. Ainsi ligotée, la femme-poisson fut projetée au plus bas niveau du stade, vers la piscine de jeu, où elle s’abima contre l’une des cages de but en fer. Après avoir lâché une plainte de douleur, elle coula dans le bassin.

- Envoyer une femme-poisson dans l’eau ? Sérieusement ? T’es pas très malin toi, dis-moi ? dit Nivel qui dépoussiéra ses vêtements.

Le nouvel entrant était jeune, à peine son cinquième de siècle dans les bagages. Il arborait le sourire insolent des marmots convaincus de détenir cette force capable de retourner monts et marrées. Nonchalamment, il ébouriffa sa crinière brune et déploya des cordes qui s’échappèrent de ses manches en ondulant comme des serpents.


- Ce que je sais, l’vieux, c’est que vous vous en prenez à mon employeur. Je suis Jeffrey Barbie et si vous voulez Machiavel, faudra me passer sur le corps ! répondit-il avec dédain et impertinence en jetant un coup d’œil du côté des sorties.

Le stade était vide à présent, la horde affolée s’était échappée comme une orgie de serpent devant un serpentaire. Et Machiavel avec eux.

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Rom’ avait été bien plus efficace que durant leur première rencontre. Et cette fois, Avada n’avait plus eu à le menacer d’émasculation par balle. Après un quart d’heure de recherche rapide, un contact lui avait confirmé les suppositions de Loth, à savoir que Muramasabre avait acheté plus de cinq ans plus tôt la vieille mine désaffectée de Kouri, une des premières à avoir été exploitée à Chom. L’info avait été facile à trouver parce que la transaction en elle-même n’avait jamais été un secret de polichinelle. Ce qui l’était par contre c’était l’utilisation que la firme faisait des carrières. Après un long moment de rumeurs et de chipotages, il fut admis que la société y avait installée une nouvelle forge gourmande en énergie pour frapper elle-même des katanas de premier ordre. C’était d’ailleurs pour cette raison qu’on voyait épisodiquement s’échapper de la fumée par l’un des évacuateurs d’émanation.
De la fumée de forge ou d'un laboratoire secret, s'était dit Avada.

Dame nuit s’était emparée d’Inu Town à présent, dévoilant une belle soirée estivale où une altière pleine lune dans sa robe opalescente paradait avec fierté dans le ciel nocturne. Une myriade d’étoiles et de constellations l’entourait et parsemait la voute céleste offrant un magnifique spectacle pour les amateurs de la nature. La courte silhouette de Machiavel se fichait éperdument de cette beauté. Elle se déplaçait à pas rapide, à respiration saccadée vers une entrée dérobée que nul ne connaissait à part lui, Ned et Jeffrey.
Enlevé par les ennemis d’Ashura -s’il devait avoir foi en ce que lui avait raconté Krav’ma-, Lampre était déjà mort. A cette pensée, Machiavel ressentit une certaine peine. Pendant ces dernières années, le magnat avait été son seul ami, le seul au monde qui comprenait sa douleur, celle d’avoir perdu l’éclat de sa vie, son fils unique. A partir de ce moment maudit, toutes ses journées avaient été plongées dans le noir, comme si quelqu’un s’était évertué à noircir les astres de sa vie.
Quelqu’un en effet s’y était décarcassé, quelqu’un, des gens de la même race que lui. Qu’il aurait voulu ne jamais naître homme-poisson ! Il sentit alors un mélange de peine, de désespoir et de honte. A son seul ami, il avait menti. Il lui avait dit que le Leviathan était prêt mais la vérité était qu’il sortait juste de l’état de prototype. Même après y avoir consacré vingt longues années, développer une arme chimique ciblant uniquement les hommes-poissons restait de l’ordre du fantasme. Peut-être, se dit-il, aurait-il dû associer un généticien à ses recherches… Mais il était trop tard pour ça maintenant, du moins, trop tard pour cette portion de sa vie, il devait effacer ses traces et repartir à zéro. Détruire le labo, emporter ses recherches et trouver un autre bienfaiteur partageant son mal de vivre et sa quête de vengeance.

Derek Machiavel pressa le pas dans les galeries abruptes et basses de la mine. Cet endroit autrefois inhospitalier et sûrement saturé de gaz quand il était encore en exploitation avait été rendu viable par les soins de Ned. Après bien des détours, des descendeurs mécaniques et des portes secrètes, Machiavel déboula dans le saint des saints. Son laboratoire. Maintenant qu’il devait partir et s’enfuir loin, il s’étonnait à apprécier la beauté de cette cavité souterraine éclairée par les cristaux phosphorescents de taille humaine qui tapissaient la roche. Au milieu de cette magnificence trônait l'appareil dont la conception aurait dû lui permettre de réaliser son ambition dévorante.



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- C'est terminé, Machiavel, énonça Avada en émergeant de la pénombre de la carrière, un semi-automatique pointé sur le professeur.

Ce dernier manifesta sa surprise en se ruant, les mains tendues comme un gardien de but, vers les précieux classeurs qui documentaient et répertoriaient plus de vingt ans de recherches machiavéliques. Avada réagit au pif et décocha une balle.

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Nivel s'épousseta puis s'asseya sur les gradins. Le combat était terminé.

Après la fuite de Machiavel sous le couvert de son garde du corps, le jeune Jeffrey Barbie, un étrange combat à trois s'était engagé. Tout le monde y était ennemi. Toute fois, l'avantage avait rapidement tourné en la faveur de Krav' dès les premiers coups d'échangés. Tout en bas des gradins, dans la piscine de jeu, elle était dans son élément. Envoyant pistolets d'eau sur pistolets d'eau, elle avait réussi à acculer ses deux adversaires, perforant au passage la côte droite de Jeffrey. Devant l'inefficacité des bombes conventionnelles à la déloger de son bassin, le vieux et le jeune n'eurent d'autres options que d'unir leur force face à cette force de la nature au maximum de ses capacités.
Barbie suggéra alors à Nivel d'extraire la femme-poisson en usant des artifices de la pèche traditionnelle au poisson-chat dans West Blue. Originaire de cet océan, Nivel comprit immédiatement la référence et se hâta vers la salle des machines sous les rafales d'eau pendant que Barbie jouait les appâts. Il en revint quelques minutes après -Barbie ne parvenait plus à tenir la cadence- avec un module cylindrique qu'il jeta dans la piscine. Des arcs électriques fusèrent de partout en se propageant l'eau. Le cri inhumain de Krav' secoué de spasmes et de douleurs à s'en écorcher la peau par le courant électrique parvint à leurs oreilles en même temps que les crépitements des arcs. Le calme revint une petite minute après et le corps inanimé de la femme-poisson remonta doucement à la surface, couché sur le ventre.
L'accord tacite et non verbal qui avait uni Nivel et le jeune encordé les poussa à cesser les hostilités sans prononcer mot. Chacun d'eux était mû par la certitude d'avoir rempli sa mission. Nivel ne s'inquiétait pas outre mesure du départ de Machiavel, il savait où retournerait le scientifique, il savait aussi qu'Avada l'y attendrait. Le plan de Loth couvrait toutes les échappatoires. De son côté, Barbie était certain que son employeur était sauf, les mines n'étaient-elles pas l'endroit le plus secret de l'île ? Il n'y avait aucun moyen se dit-il, que ces gens puissent découvrir ces lieux un jour.

Ces faits nous emmènent à ce moment, ou le Niveleur regarda Barbie partir, le centre de gravité lourdement penché du côté de sa plaie aux côtes. Il n’était pas allé bien loin, que déboulèrent une horde de gens armés et habillés de noir. Ils le mirent en joue et sans ménagement, le plaquèrent contre le sol et le menottèrent.

- Ça va, ça va, ce fut un allié de circonstance, souffla Nivel à la troupe en reconnaissant les hommes du cuirassé. Vous pouvez le laisser partir. Machiavel est à nous, non, Baxter ? demanda-t-il au petit homme trappu qui dirigeait le commando.

- Laissez-le alors. Oui, Avada a mis la main sur Machiavel, mais il est blessé. Une balle dans l'buffet.

- Tsss, ce mec... ou cette meuf... Incapable de capturer sans tirer. D'ailleurs, vous faites quoi là ?

- La nuit a camouflé notre débarquement, Loth a pensé que vous auriez p't'être besoin d'aide. Il voulait terminer tout ça avant l'lever du jour, avant que les marines n'reprennent leur chasse. C'pour quoi nous devons nous tirer maintenant. Où est ta cible ?

- Là, dans l'eau.

- Moche... Lui ai arrivé quoi ?

- T'es déjà aller sur West Blue, Baxter ? Sur la petite et charmante île de Tsurihô ?

- Non, jamais entendu parler.

- Et bien, cette île est connue pour sa vie rurale, moyenâgeuse, très peu évoluée depuis des siècles. Ils sont vachement anti-technologie et avant de débarquer sur l'île, faut laisser tout ce qui y a trait. Chaque année y a lieu un festival qui exhibe le savoir-faire ancestral de cette communauté et parmi les démonstrations, il y a la très célèbre pêche au poisson-chat. Pour pêcher ces teigneux poissons à la peau si tendre et goutteuse, les autochtones ont développé une méthode de pèche électrique, il y a plus d'un demi-millénaire déjà.

- Sont pas anti-technologie, t'as dit ?

- L'électricité existe dans la mer à l'état naturel, Baxter, répondit Nivel en se levant. Ils capturent des anguilles et les excitent pour qu'ils déchargent leurs courants dans la mer, électrocutant de ce fait les poisson-chat. Mieux encore, ils ont réussi à dresser ces poissons et à leur faire ça. Ce jeune là-bas, m'a rappelé cette technique, je suis allé dans la salle des machines et j'ai bricolé une bombe électrique. Le résultat, tu l'as devant toi, conclut-il en désignant la carcasse noircie et inconsciente de Krav'.

- 'tain, tu accusais Loth d'être lourd en détails, mais toi aussi ! Tu pouvais pas juste dire que tu l'as pécho au courant ?!

- Ouais, c'mec déteint sur moi, merde...

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Quelque part au large de Boréa...

Cinq jours plus tard, le Globalement Inoffensif croisait à quelques miles marins de la côte, dans les eaux territoriales de Boréa. Fraichement remis de toutes ses blessures, Loth vint à leur rencontre en canoë après s'être bien assuré qu'aucun marine d'élite -ou leur commandante- ne le suivait. Loth s'attarda et fit le tour du Cube, le navire-labo de Black Box que le cuirassé avait tracté jusque-là. Cette petite caravelle signifiait beaucoup pour lui, elle sera la première de sa future flotte...
Il débarqua sur le pont tout content de ces deux semaines de repos et de travail. Krav' et Machiavel étaient ligotés et bâillonnés à leurs chaises. Derrière eux, était rassemblée la centaine de bras d'Ashura que Loth voulait convertir à sa cause. Il passa rapidement son regard sur eux. Aucune étincelle, aucun signe d'individualité, ces gens ne seraient que de pauvres mains une fois le business en place.

- Bien joué les gars. La Dance ira donc à Red comme promis, Baxter. Quant à ces deux là, je les gardes, fit-il en désignant les prisonniers homme-poissons. Bien sûr, je garde aussi le Cube, que je renommerai en tant voulu.
Je ne me trompe pas en disant que nul n'a relié Machiavel aux évènements d'Inu Town ?


- Nope, personne. A coup sûr, c'est ma prime qui va augmenter, commenta Nivel. Avada aussi, p't'être, il a combattu le Colonel Mortimer.

- C'est super alors. Je vais présenter Machiavel au roi. Il suffira d'inventer une histoire, dire que je continue le nettoyage à Boréa et que j'ai capturé un autre scientifique véreux.
Hmmm ? T'as quelque chose à dire, Machiavel ?
demanda-il d'un air faussement surpris en regardant le professeur gigoter sur sa chaise.
Malheureusement, je n'ai aucune envie de t'entendre et je sais déjà que tu n'as rien qui m'intéresse. Tu as consacré ta vie à une chimère et moi, je suis Bellérophon. Les chimères, je m'en débarrasse.

BANG !
Encore et toujours cette froide létalité d'Avada qui comprenait chaque phrase incisive de Loth avant même que ce dernier ne les termines. Cette balle fit sursauter tout le monde, et le corps de Machiavel tombant sourdement sur le sol finit de les remplir d'effroi. Les faire capturer vivants pour les exécuter devant la masse ? Loth savait qu’ils se demandaient à quoi rimait ce procès expéditif mais le plus important était l'exemple qu'il devait donner. Machiavel était un jouet cassé mais il pouvait encore servir à montrer à la centaine de moutons sans noms qu'il s’apprêtait à recruter qu'il n'avait aucune pitié. Et sans directement se salir les mains, il leur montrait qu'il avait les bras longs. Sans mauvais jeu de mot.
Éclaboussée du sang et de matières cérébrales, Krav' tremblait comme une feuille sur sa chaise. Dans ses yeux bleutés, l'horreur.

- Tu as choisi le camp des perdants ma chère. Je t'ai mise à l'épreuve et tu as échoué. C'est vrai que dans ce combat que je livre contre Lavoisier, je n'ai gagné que de petites batailles, si tant est que l'élimination de Marie-Curie et de Lavoisier en soient. Il a perdu le N°3 de son organisation et peut-être le meilleur chimiste à part lui-même. Un autre de ses chimistes vient de disparaître. Certes, des Cellules, il en existe encore une dizaine et je ne compte pas m'y attaquer chacune à la fois. Il me suffira d'étêter l'organisation, de remplacer Lavoisier, et tous viendront se jeter à mes pieds. Le cas échéant, je lâcherai la marine sur eux, parce que le plus amusant dans cette histoire, c'est que j'ai publiquement le droit de faire ce que je fais. Je tiendrai ma promesse au roi, je débarrasserai Boréa d'Ashura et le remplacerai par Shadow Law, une organisation épurée de tous ces malades qui mènent ce joli business en étalant dans leur sillage des cadavres de civils innocents. Ashura oui, mais Ashura proprement. Sinon, dans l’immédiat, avec un peu de chance, le corps de Machiavel me rapportera le tiers de sa prime de 10 millions, acheva-t-il en rigolant.
Avada, tu te souviens de ce que j'avais dit à notre amie en partance ?

- Le sacrifice, c'est un truc de looser.

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