Le théâtre du mystère


Une fois le péché déclassé la faute s’est crispée sur l’orthographe. Les didascalies ne sont pas présentes pour notre jeu. On entend les pas résonner en écho dans les couloirs du palais, pressant la marche bien accompagné des gardes du Prince. Le zéphyr souffle dans cette dédale impressionnante, passe à travers les fenêtres ouvertes et atteint délicatement nos visages, fébriles pour ces serviteurs et confiant pour moi. Je m'avance jusqu'à tomber sur la grande porte du bureau qui s'ouvre et en face se trouve le Prince et sa garde royale.

Je reste silencieux à sa vue et mes mirettes brûlantes allume ma dernière clope. Je la pinaille en savourant ma première bouffée que j'expire tout en silence. Vapeur invisible qui s'échappe à l'odeur vanillée. Je tapote du pied droit et lui adresse finalement un sourire avant de prendre la parole le premier. J'ai attendu un signe de sa part, un indice qui me laisserait causer sans faire de vagues.

- Les palais d'Eramulu sont tombés.

Annoncé-je fièrement, le ton grave mêlé à une voix rauque. Je pourrais m'attendre à tout de sa part, lui le plus sournois des hommes. Même à un rire gras fondu dans la masse. Et j'espère qu'il aura mes informations tant attendues. Sinon Nanohana tombera plus durement qu'Eramulu.

- Alors mes informations, vous les avez eu ? J'ai réglé ma part de notre marché...

Fis-je tranquillement en observant ces mimiques. Ses gardes se tiennent à distance de moi, même si l'on pense que je ne suis pas armé vu que mon sabre est invisible, on craint ma prestance. Ils en tremblent presque mais au fond ils ont peur de la réaction de leur Prince. Va t-il s'emporter, se marrer ? Le temps semble se figer dans l'assemblée et je ne démérite pas ma place.

J'attends le couperet, les rideaux sont levés !
    Hahypet Nerférati n'est pas un méchant de série B. Il ne donne pas dans le rire gras. En fait, il n'est même pas un méchant à proprement dit. Comme tout être vivant, il a sa part d'obscurité et sa part de lumière en lui. C'est juste que lui a pris conscience de cette graine de mal et a décidé de capitaliser dessus. Sournois, oui. Méchant ? Bien moins que toi, Mizukawa Sutero. Après tout, c'est toi le pirate, et c'est lui le prince. Tu peux appeler ça comme tu veux, de la triche, du destin, un coup de pot, mais voilà, c'est lui qui a les meilleures de chances de se faire rappeler par l'histoire comme étant le gentil.
    Toi, au mieux, tu seras le méchant qu'on aura toléré, presque pardonné, parce qu'il se sera montré utile. Après tout un Corsaire ne jouit de l'immunité diplomatique que tant qu'il est le chien-chien du Gouvernement. Qu'il morde la main qui le nourrit et hop, sa prime faisait un retour fracassant sur la scène politique. Et Hahypet ne peut s'empêcher de se demander ce qui peut bien te motiver autant à vouloir prendre un tel poste.

    - « En effet. Avec brio et discrétion. Un bon boulot. » te répondit-il en faisant signe de prendre place à la table basse, sur des coussins. Encore une fois, des fruits et des boissons, et un narguilé sont proposés. Cette fois, tu es un invité attendu, et ton hôte se montre prévenant. « C'est d'ailleurs dommage que vous vouliez mettre votre savoir-faire au service d'un Gouvernement pour lequel vous n'avez jamais montré un attachement particulier. Je glisse donc dans votre esprit la possibilité de devenir un corsaire... plus privé. Alabasta n'est après tout que liée par des promesses politiques à Marie-Joie.
    Mais ce n'est pas en une journée que vous pourriez comprendre le bien-fondé de ma proposition.

    Matsuya, dit Envy. Pirate solitaire. On ne lui connaît ni équipage, ni allié. Il navigue seul sur Grand Line. Il est arrivé ici à Nanohana, et il est reparti. Ce qu'il a fait sur le Leviathan, seules les personnes présentes pourraient répondre à cette question. Et apparemment, vous avez décidé que ces informations ne seraient pas utiles à votre quête.
    Ce qui fait qu'il ne reste que l'artillerie lourde. Comment retrouver un homme qui ne laisse pas de trace ? En mettant sur sa piste les meilleurs des limiers. Or, les meilleurs, ce sont encore les agents du Cipher Pol.
    J'ai un contact avec l'un d'entre eux. Je peux vous mettre en relation. S'il va être pour vous aider, je ne peux le certifier. Comme vous savez, on n'obtient jamais rien, sans rien. Je ne sais pas ce qu'il pourrait vous demander, mais si quelqu'un sait quelque chose sur Matsuya, c'est lui. »


    Le prince sort un den-den blanc et le pose sur la table. Il n'a pas menti : il peut te mettre en contact avec l'une des rares personnes à pouvoir peut-être traquer ce que l'ancien Corsaire est devenu. La question est : jusqu'où es-tu prêt à aller pour obtenir sa coopération ?


      Je suis prêt à tout afin d'atteindre mon but. Et je comprends très bien sa proposition d'être un corsaire privilégié car j'ai eu la même offre si l'on peut dire avec le royaume de Luvneel. Chevalier Noir du Roi Dayo et si je voulais être votre serviteur personnel ? C'est alléchant de voir qu'on est sollicité par le gratin de la haute sphère, mais mon engagement envers le Gouvernement est déjà amorcé. Et je n'ai qu'une parole, je pense l'avoir prouvé depuis...

      - Votre narguilé est bien savoureux, mais je vous conseille le charbon naturel en petit cube et du lait au fond. Foutage de gueule ? Non, juste une grande métaphore pour pas me prendre comme le dernier des idiots. Si monsieur est un expert en tabac, monsieur pourrait être un expert stratégique.

      - On a qu'à dire que c'est vous qui cherchez l'homme en question, parlez lui à votre agent, ne me mentionnez pas. Ce sera en guise de votre dette. Et comme au Cipher Pol, ils ne sont pas idiots, il se doutera d'un autre et alors vous me le passerez. Pas sûr qu'il m'apprécie, j'ai tué bon nombres de leurs collègues...

      Toujours dans l'extrême franchise, à croire que cela va payer. Et le culot aussi, juste un peu pour faire la différence. S'il y'avait une chose à savoir ; ''Inretum Pathos, Selectum Bavia'' Je ne sais pas ce que ça veut dire, mais je trouve ça adéquat à la situation comme dirait Dayo.

      Prenant une autre bouffée du narguilé, j'esquisse un sourire.

      - Ben quoi ? Vous n'osez pas ? Peu importe sa demande, prêt à tout.
      Dis-je en clarifiant mon sourire, rares sont les personnes à m'apercevoir longtemps visible pour visualiser ces mimiques.

      Alea Jacta


        Un profond silence, comme un malaise. Il se terre dans une muraille insondable et ne dit plus un mot, à mon avis, il ne veut pas installer le dialogue avec le membre du Cipher Pol. S'agit-il de la peur qui façonnent ses briques autour de lui ? Un homme de sa carrure et de sa trempe, peur du gouvernement ? Avoir des contacts comme ceux là, pas chose aisé de les entretenir quand on sait pas y faire. Tant pis, je prends avec fermeté le den-den blanc et rend invisible ma tête pour ne pas trahir mes expressions.

        L'ambiance feutrée de la pièce sublime les esprits présents et le prince somme d'un geste de la main de nous laisser. Sans une once de crainte de ma part, je pense avoir gagné sa confiance après le service-rendu sur Eramulu. Les antennes sont dressées... Une mine presque décomposé au sourcil gras, c'est le ressenti de l'escargot.

        - Mushi Yosh !
        - C'est vous l'agent du Cipher Pol ?
        - Je ne connais pas cette voix, ce den-den est lié au Prince Nefertari mais au bout de l'antenne, il n'y a rien, aucune expression... Qui est-ce ?
        - Le futur Envy.
        - Qui est ? Selon mes rapports et l'étrangeté de l'escargophone, j'opterai pour Mizukawa Sutero.
        - Capitaine Mizukawa Sutero.
        - Et que voulez-vous de moi, Capitaine !?
        - Connaître la position exacte de l'ex-Envy, Matsuya.
        - Et en échange de cette information, j'aurais le droit à des frittes et du cola ?
        - Si c'est ce que vous désirez...
        - Ce que je veux le plus, c'est de voir votre tête sur un plateau, mais pas autant que celle de Matsuya...
        - J'peux vous apporter la tête de Matsuya.
        - Vous n'avez pas la carrure, ni la force, Mizukawa...
        - ... On va tourner autour du pot longtemps ? Donnez-moi une destination, n'importe. Je suis sûr ses traces et je l'aurais ! Alors que voulez-vous ?

        Il a raccroché... Furieux, je pose sur le bureau le den-den et me serre un verre de vin.

        - Pas commode, votre ami...
        - Ce n'est pas mon ami.


          S'ouvre peu à peu le rideau et les lumières sont braquées sur le den-den blanc qui retentit à nouveau, mon esprit en alerte retrouve l'apaisement après avoir entendu le son de l'escargophone. Je respire un bon coup et calmement, je décroche. J'attends une réponse et la douce musicalité du vent sur le désert enivre mon âme d'une couleur argentée. Elle la soudoie par une euphorie qui se veut discrète et nous remarquons un léger sourire se dessiner sur le visage du Prince, confiant de son contact. L'agent mystérieux confie alors le deal et se lave les mains de tout soupçons qui aurait le don de mettre un peu de chaos dans un théâtre ouvert à un public restreint. Je commence à m'y plaire de ces combines et savoure avant l'heure ma future collaboration...

          - Votre prochaine destination sera le royaume des Okamas... L2.S6
          - Et que dois-je faire là-bas ? Détruire l'île ? Tuer ? Saccager ? Torturer !?
          - Allons, rien de tout ça, on s'en serait occupé. Non, il nous faut une personne doué pour la discrétion absolue, une personne qui peut se rendre invisible pour dérober les bijoux de famille de Bianca Castafiore.
          - Ses couilles ?
          - Non, des bijoux d'une valeur inestimable qu'une certaine personne haut placée désire tant et quand cette personne le désire, on ne peut lui refuser, si vous voyez ce que je veux dire.
          - Et après cela, Matsuya ?
          - Tenez vos engagements et vous serez récompensé.
          - C'est comme si c'était fait !

          Et la conversation fût coupée et je réapparais entièrement, mine impassible à me demander si le magnéto-pose pourrait m'y emmener. Je vais devoir faire escale à Kuraigna, cette île de singes fous... Il semble être rechargé et je suis la deuxième aiguille qui pointe vers le sud-est, mais oscille quelque peu et dans une poignée solidaire de moignon à main, je tends le bras droit vers le Prince et lui adresse quelques mots avant de sortir de son palais, presque victorieux...

          -...

          - On garde contact ! Finis-je. Ces derniers mots resteront dans le flou volontairement. Ces derniers mots sont comme un mystère qui éclate et on ferme les rideaux rouges !

          En avant vers d'autres couleurs.