« C'est toi qui l'a recruté Curious, c'est ta responsabilité, à toi de te démerder pour l'entraîner » et gnagnagna et gnagnagna. C'est dingue comment dès que tu essayes d'améliorer les choses, de ramener des petits nouveaux dans la fabrique pour prévoir le futur de demain – très beau ce pléonasme, je note – tout le monde te tombe sur la gueule. A commencer par l'autre abruti de voisin. Jour, Nuit. Jour, Nuit. Jour, Nuit. P'tin, qu'est-ce qu'il y a de compliquer à saisir ? La nuit on dort, on décide pas de s'improviser saxophoniste au clair de lune. Alors du coup j'arrive au bureau, claqué avec une seule envie : rester pioncer à faire semblant de remplir la paperasse. Et oui, je suis pas qu'agent de terrain, à temps partiel je m'occupe des escargocopieuses, des conneries comme ça. Ah et aussi, quand mon supérieur a vraiment décidé de me râper les raisins, c'est moi qui me coltine
l'entraînement des demi-portions.
Je fais la gueule mais ça pourrait être pire, il y en a qu'un aujourd'hui, c'est un môme que j'ai mis sur les railles y'a pas longtemps. Je lui avais fait parvenir un message qui lui demandait de venir immédiatement dans le salle B22 y'a environ trois quarts d'heure. Et j'ai beau eût tenté de trouver une excuse à mon retard pendant ces quarante-cinq longues minutes, j'ai rien trouvé. Du coup v'la que je me ramène en B22 comme une fraise. Pour vous faire une idée, la B22 c'est comme une salle d'entraînement bien spacieuse avec des tapis, des cordes, des haltères mais en un peu plus ... un peu moins … fin le toit goutte quoi. Non c'est pas top prestige, mais il le fait exprès le vieux saligaud, il est au moins aussi rusé que moi et sa fourberie n'égale que la haine qu'il a envers moi. Je parle de Josh, le superviseur de la section.
Bref, j'arrive dans la salle, en soulevant au passage un nuage de poussières tellement personne passe jamais ici. Le gnome me lance un regard de glace, pour changer. Juste qu'aujourd'hui il a une bonne raison de m'en vouloir.
Mais c'est qu'il se vexerait facilement. Bon, je vais pas en remettre une couche parce qu'après ça va être une plaie, surtout qu'on m'a demandé de lui faire la totale. Enfoiré de Josh, tu m'le paieras un jour.
Parole d'expert, le jour où je suis tombé sur un type costaud et que j'ai balancé mon tekkai en rigolant je l'ai regretté. L'idée c'est qu'un mur en pierre, tu peux toujours le démolir avec un boulet de canon. Mon tekkai à l'époque il se rapprochait plutôt du mur de paille. Une palissade quoi.
Une petite démonstration ça fait toujours plaisir. Ça donne un objectif aux élèves et ça leur donne envie d'atteindre notre niveau. Aucune chance qu'ils y arrivent aussi bien, ça demande beaucoup d'expérience. Trop, peut-être. Je démarre, un pied après l'autre, il faut tapoter l'air « c'est comme caresser un petit oiseau avec les pieds sauf qu'il faut mettre beaucoup de force et être très impulsif » m'avait dit mon entraîneur de l'époque. Ça vous donne une idée du niveau d'humour des instructeurs. L'air s'évade sous mes pieds en un petit nuage blanc en laissant un son distinctif parcourir le vieux gymnase. Mon corps voltige d'un angle à l'autre de la salle. Je lui montre toutes les possibilités : un pied, deux pieds, cloche pied, vers le haut, vers le bas. La vitesse s'accélère, mes muscles chauffent et je vois le retard dans ses yeux. Il n'est plus capable de lire mes déplacements. Je triche un peu en y mêlant par moment du Soru.
Tiens, un qui répond sans faire une tête ébahie suivi d'un « komen sa pk je ti1 2bou ? », on va p'tet pouvoir en faire quelque chose.
Il me dévisage un bref instant et regarde dans le vide. Il cogite, le temps d'ingurgiter ce que je viens de lui apprendre et puis il recule, sprint sur quelques mètres et saute. Son premier saut est pas mal, il sait utiliser l'élan qu'il prend pour le transformer en ascension verticale. Quatre bons mètres de hauteur je dirais. Ah et voilà le second. Classique, il pense à prendre appui plutôt qu'à se jeter vers le haut, résultat il perd de la hauteur et redescend aussi sec sur le sol.
Pendant qu'il se remet à gambader, je vais chercher un gros tapis en mousse et je le tire près de nous. Un petit sifflement et trois-pommes se retourne vers moi.
J'avais oublié à quel point les entraînements étaient chiants pour celui qui enseigne. Ça va être long, mon dieu que ça va être long.
l'entraînement des demi-portions.
Je fais la gueule mais ça pourrait être pire, il y en a qu'un aujourd'hui, c'est un môme que j'ai mis sur les railles y'a pas longtemps. Je lui avais fait parvenir un message qui lui demandait de venir immédiatement dans le salle B22 y'a environ trois quarts d'heure. Et j'ai beau eût tenté de trouver une excuse à mon retard pendant ces quarante-cinq longues minutes, j'ai rien trouvé. Du coup v'la que je me ramène en B22 comme une fraise. Pour vous faire une idée, la B22 c'est comme une salle d'entraînement bien spacieuse avec des tapis, des cordes, des haltères mais en un peu plus ... un peu moins … fin le toit goutte quoi. Non c'est pas top prestige, mais il le fait exprès le vieux saligaud, il est au moins aussi rusé que moi et sa fourberie n'égale que la haine qu'il a envers moi. Je parle de Josh, le superviseur de la section.
Bref, j'arrive dans la salle, en soulevant au passage un nuage de poussières tellement personne passe jamais ici. Le gnome me lance un regard de glace, pour changer. Juste qu'aujourd'hui il a une bonne raison de m'en vouloir.
— Bon alors écoute trois-pommes, je vais t'appeler comme ça parce que je retiens jamais ton prénom et que ça te ressemble mieux. Ça fait ta taille quoi. Trois grosses pommes si ça peut te faire plaisir.
— On peut en venir au fait ?
Mais c'est qu'il se vexerait facilement. Bon, je vais pas en remettre une couche parce qu'après ça va être une plaie, surtout qu'on m'a demandé de lui faire la totale. Enfoiré de Josh, tu m'le paieras un jour.
— Est-ce que tu as déjà entendu parler du « Rokushiki » ? Je m'en doutais. C'est le nom d'un art martial qui est développé au sein des Cipher Pol, et à moindre mesure, au sein du gouvernement mondial tout entier. J'imagine que tu te souviens de l'explosion mortelle dont je t'ai sorti ? C'était grâce à une combinaison de deux techniques : le Soru et le Geppou. Pour faire simple, le Rokushiki regroupe six techniques : Soru et Geppou donc, Shigan, Tekkai, Rankyaku et Kami-E. Quand tu les auras toutes apprises, tu deviendras un véritable agent de l'apocalypse. Ou pas. Connaître et maîtriser c'est pas la même chose. Un peu comme utiliser son cerveau et réfléchir. Et de toute façon, ça t'empêcheras pas de te faire violemment martyriser par un type tout simplement plus puissant que toi.
Parole d'expert, le jour où je suis tombé sur un type costaud et que j'ai balancé mon tekkai en rigolant je l'ai regretté. L'idée c'est qu'un mur en pierre, tu peux toujours le démolir avec un boulet de canon. Mon tekkai à l'époque il se rapprochait plutôt du mur de paille. Une palissade quoi.
- — Toujours est-il que tu vas devoir apprendre les six avant de sortir de cette salle. Bien sûr, je prévoirai de la bouffe, je suis pas un monstre. Alors ce qu'il faut que tu saches c'est que chaque instructeur a sa méthode. Certains aiment la pratique, c'est à dire te bastonner à mort pour que tu comprennes que dans le tekkai faut contracter. Il paraît que la proportion d'utilisateur de cette méthode est inversement proportionnelle à la taille de leur sexe. C'est ceux qui sont en manque d'ego quoi. T'as aussi ceux qui te laissent te démerder en te balançant des principes philosophiques en attendant que tu découvres le Saint Graal. Ça ne marche jamais, sauf quand le type est un génie, et il l'aurait probablement trouvé tout seul de toute manière. Je m'égare. C'est une tendance chez moi, tu l'auras sûrement noté. Venons-en à ma méthode : Je prône la pratique à travers une véritable explication. Et plutôt que de continuer ce long discours qui n'en finit plus, on va directement passer à l'apprentissage du Geppou.
Une petite démonstration ça fait toujours plaisir. Ça donne un objectif aux élèves et ça leur donne envie d'atteindre notre niveau. Aucune chance qu'ils y arrivent aussi bien, ça demande beaucoup d'expérience. Trop, peut-être. Je démarre, un pied après l'autre, il faut tapoter l'air « c'est comme caresser un petit oiseau avec les pieds sauf qu'il faut mettre beaucoup de force et être très impulsif » m'avait dit mon entraîneur de l'époque. Ça vous donne une idée du niveau d'humour des instructeurs. L'air s'évade sous mes pieds en un petit nuage blanc en laissant un son distinctif parcourir le vieux gymnase. Mon corps voltige d'un angle à l'autre de la salle. Je lui montre toutes les possibilités : un pied, deux pieds, cloche pied, vers le haut, vers le bas. La vitesse s'accélère, mes muscles chauffent et je vois le retard dans ses yeux. Il n'est plus capable de lire mes déplacements. Je triche un peu en y mêlant par moment du Soru.
- — Voilà, dis-je en redescendant tout en douceur. Pour que tu comprennes bien, un petit cours s'impose. Pourquoi tiens-tu debout ?
— Mes jambes me maintiennent en équilibre.
Tiens, un qui répond sans faire une tête ébahie suivi d'un « komen sa pk je ti1 2bou ? », on va p'tet pouvoir en faire quelque chose.
— Plus précisément, la gravité t'attire contre le sol qui est plus dense que toi ce qui permet à ton poids d'exercer une force sur le sol pour tenir en équilibre sans pour autant s'enfoncer. Le geppou c'est le même principe, à une petite exception près, l'air est moins dense que toi. Donc pour prendre appui dessus, il va falloir t'habituer à cette densité limitée, et puiser la puissance ailleurs que dans la résistance de l'air, c'est à dire dans tes muscles.
Il me dévisage un bref instant et regarde dans le vide. Il cogite, le temps d'ingurgiter ce que je viens de lui apprendre et puis il recule, sprint sur quelques mètres et saute. Son premier saut est pas mal, il sait utiliser l'élan qu'il prend pour le transformer en ascension verticale. Quatre bons mètres de hauteur je dirais. Ah et voilà le second. Classique, il pense à prendre appui plutôt qu'à se jeter vers le haut, résultat il perd de la hauteur et redescend aussi sec sur le sol.
— Le sol bien dur c'est les deux petites roues de ton vélo. A un moment faut trouver ton équilibre tout seul. C'est pareil ici. Cherche à te propulser grâce à tes jambes, pas grâce à l'air. Il faut que tu retiennes le maximum de ton poids par toi-même et que seul un petit morceau reprenne appui sur l'air et là tu réussiras.
Pendant qu'il se remet à gambader, je vais chercher un gros tapis en mousse et je le tire près de nous. Un petit sifflement et trois-pommes se retourne vers moi.
- — Commence par là, quand tu pourras sauter et prendre appui là-dessus sans déformer la mousse, tu pourras tenter le niveau au-dessus.
J'avais oublié à quel point les entraînements étaient chiants pour celui qui enseigne. Ça va être long, mon dieu que ça va être long.