Un d'perdu...

- La cible ?
- Des marchands d’armes.
- Connus ?
- La marine locale les a à l’œil depuis quelques semaines.
- Autant dire qu’ils agissent depuis des mois… Et nous sommes censés les arrêter avec ceux ici présents ? Quatre hommes. Pourquoi quatre d’ailleurs ? Où est Mattew ?
- Indigestion.
- Indigestion ?
- Indigestion.
- ça fait combien de fois ce mois-ci ?
- Seulement trois. Ah non, quatre si on compte son empoisonnement aux baies.
- … Pourquoi il n’est pas à l’eau et pain sec déjà ?
- Son efficacité ?
- Sa bonne humeur ?
- Sa bravoure ?
- Son…  euh… efficacité ?
- Déjà dit.
- Euuh…
- Discipline.
- Ah oui, sa discip… T’es con.
- Hehe.
- Bon quand vous aurez fini. Qui le remplace ?
- Justement, c’est de ça que j’aurais voulu vous parler.
- Tu me vouvoies maintenant… ?
- Hum hum… Excusez-moi de l’interruption caporal, mais il me semblait que nous n’allions nulle part. Hemet, monsieur. Hemet Balgrid. Votre recrue pour cette mission.
- …
- …
- … Euh, oui c’est de ça que je devais vous parler… Il nous affecte une recrue de la régulière. Et si vous lisez l’ordre de mission, vous verrez qu’on est juste bon pour une filature.
- ... Bien. Allez vous préparer.  Hemet ?
- Oui monsieur.
- Rentrez sans que l’on vous en ait donné l’autorisation encore une fois et la seule mission que vous aurez pour les trois prochains mois sera le nettoyage des cabinets, après le passage du soldat Mattew… Vous pouvez disposer.
- … Bien monsieur.

La ville est endormie, bercée par la pluie. L’orage fait rage, le tonnerre tonne. Un coup.  Tout est sombre, silencieux. Puis un autre. Un éclair, la rue s’illumine. Puis revient la nuit. Les trois hommes attendent, las. Aucun ne bouge, malgré les bourrasques qui maltraitent leurs visages, ils attendent. La transaction aura lieu cette nuit.

Mattias frissonne, son imper noir n’a pas suffi à le protéger de l’eau plus de quelques heures et elle commence à passer sous ses vêtements. Figer, les deux pieds s’enfonçant dans la boue, il fixe l’entrée de la bijouterie. Il plisse les yeux. La pluie torrentielle est comme un épais manteau d’eau qui empêche de voir à plus de quelques mètres. Alors, il cherche. Des silhouettes, des ombres. Tout ce qui lui indiquera que leurs cibles ont bougé. Il attend. La concentration est mise à rude épreuve. Rester sans bouger, les sens à l’affut pendant des heures. Encore plus quand rien ne se p… BrrBrrBrr. Le denden accroché à son bras vibre.

- Ils sont en mouvement. On les suit jusqu’au lieu de la transaction. De votre côté ?
- RAS.
- RAS aussi du côté de l’équipe Gamma. Ça ne devrait pas tarder à bouger de votre côté.
- Bien reçu.

Clac.


L’homme jure dans sa barbe. Foutue pluie, foutu vent et foutue courte paille. Il n’a jamais été chanceux quand il s’agissait d’inclure le hasard. Encore une fois il avait perdu. Il resserre son imper comme il peut, réflexe. Ça n’empêchera pas la pluie de rentrer, ça, il est trempé depuis un moment déjà. Malade, voilà ce qu’il va être.

Une énième bourrasque. Les gouttes lui fouettent le visage. Un mouvement ? Non. Son imagination. Le marine est toujours là à espionner l’entrée de leur planque, sans bouger. D’ici on ne peut voir qu’une silhouette, une ombre dans la nuit. Il se concentre. Ça devrait bientôt commencer.


Trois équipes de deux hommes. Une filant les acheteurs potentiels. Une surveillant le périmètre et la sortie de derrière. Et la dernière, la sienne, qui se laisse découvrir. Pourquoi ? Les vendeurs s’attendent à ce que la marine les surveille. Il aurait été bizarre qu’aucun marine ne rôde le jour de leur transaction. Il a donc envoyé l’un de ses hommes relever le marine de la régulière devant l’entrée principale.

Allongé sur le toit d’une maison proche, il observe le malfrat. Il ne peut apercevoir Matthias, mais la silhouette de l’homme qu’il observe semble se déplacer lentement. L’opération est lancée.