Le Deal du moment : -39%
Ordinateur portable ASUS Chromebook Vibe CX34 Flip
Voir le deal
399 €

Un nouveau joueur à la table [Rik, Lou, Gharr]

"Quand tu seras arrivé à Loguetown, trouve La Trinquette, un petit bistrot sympatoche pour un boui-boui loin du carré touristique. Vas-y fringué en grouillot, avec ta gueule de joueur de roller ball, t'as déjà un pied dans l'ambiance. Si le patron ne sait pas qui fabrique les faux berries, il pourra te mettre sur la piste d'un qui sait. Il a une salle de jeu à l'arrière. Sers-t'en pour faire monter la pression si jamais celle qu'il te sert ne te plaît pas."

Loguetown, la plus Grandline des villes des Blues. Comme là-bas, les éléments s'agitent en d'imprévisibles bourrasques qui brassent avec elles la chance et l'infortune d'un revers indistinct. La Marine y règne en maître incontesté, mais les terres sont vastes et les rats dans chaque coin d'ombre. Aussi, dès lors que l'on s'éloigne des zones commerciales où les touristes butinent innocemment les nombreux services proposés, la flétrissure gagne peu-à-peu les lieux et l'air se gorge des odeurs du crime et de l'admiration du personnage historique Gol D Roger. Un gang local, abonné aux cellules de la prison, a même adopté le nom des Rogers. Loguetown se présente belle et sécurisée sur le mondial, mais elle est, comme toutes les villes colossales, un foyer de contrastes et de diversité.

Ces deux Marines déambulant dans le quartier sont à eux seuls d'excellents exemples. L'un est grand, lourd, bronzé, barbu de bonne humeur. L'autre est petit, léger, pâle, glabre et constamment contrarié. Gharr a voulu Lou avec lui pour ses talents d'investigateur. Quand il faut faire parler l'intelligence et la perception, le Commandant Trovahechnik est le semi-homme de la situation. Il classe tout, chaque détail, chaque anomalie. Laissez ce petit corps déambuler chez vous et vous pouvez être sûr qu'il détectera les objets dont vous vous êtes servi et que vous avez mal rangé, la valeur de ce que vous avez eu le mauvais goût d'acheter, les infractions dues au manque de respect des 2417 pages sur les normes basiques de sécurité. Lou n'était pas un grand guerrier ni même une compagnie très agréable, mais sa nature exceptionnelle en faisait une perle de l'investigation, un chien pisteur de la faille, un vautour de l'imperfection humaine.

Le Capitaine porte un pantalon marron virant sur le roux aux genoux maintenu par des bretelles. Il a une chemise beige à larges carreaux et un gavroche plus foncé que sa barbe. Comme éléments de coquetterie, il s'est trouvé des chaussures autrefois vernies dont un des lacets n'est pas coupé par l'usure et un médaillon porté en pendentif contreplaqué or avec des reliefs baroques, limite rococos. Dans ce médaillon figure une photographie de l'une de ses filles. Hadoc a également rempli sa poche d'objets divers. Un mouchoir en tissu chiffonné, deux capsules de bière, des peluches, un fond de paquet de gomme parfumée, un opinel et quelques berries. Il a aussi pris la désagréable habitude de cracher dans chaque coin de rue après quelques renâclements de gorge qui ne sont pas sans déranger son compagnon de marche. Gharr s'appelle Gaston. Il a passé la trentaine, travaille au chantier navale ou ailleurs et doit sa carrure à des petits extras de gros bras ou de boxeur clandestin. Lou est d'ailleurs son Mickey, son manageur grincheux qui le traite de tocard parce qu'il n'étale jamais assez vite ses adversaires.

La Trinquette surgit d'une ombre de la rue et fait face au duo improbable en dehors de Loguetown. Ils entrent.La première porte mène à un hall d'immeuble classique, avec les escaliers en bois au bout du couloir. Un panneau d'avertissement de travaux reconverti en pancarte de bienvenue indique d'un doigt dessiné que le bar commence derrière le gros rideau pourpre tout de suite à gauche en entrant. Ca sent la lavande synthétique et la fumée de cigarette. Les tapisseries sont vertes et pleines de fioritures affreuses, mais c'est une marque de confort d'avoir de la tapisserie à peine jaunie en ce lieu. Lou et Gharr s'infiltrent derrière le rideau, l'odeur de cigarette s'intensifie.

Pour un endroit si mal situé, il n'a pas à rougir de sa respectabilité. On sent le crime chez la plupart des autochtones, mais pas seulement. Quelques habitués viennent boire un verre et profiter de l'ambiance. Sûr que c'est de loin l'endroit le plus chatoyant du pâté de maisons. Deux grisonnants enflés par l'alcool se lancent des "Poupouille" en grommelant sur leurs lancers de fléchettes. Quelques jeunes portant les couleurs d'un probable gang local rigolent en détaillant l'imbécilité d'une femme que plusieurs d'entre eux ont apparemment déjà besognée, certains en même temps. Le tout dépeint un endroit sans lois, mais pas sans tenue. Personne ne renverse, personne ne brise son verre ni n'insulte le barman. L'absence de quelqu'un fait planer l'ordre. En parlant du barman, il s'acharne sur un escargophone qui ne lui transmet pas assez distinctement les résultats du second tour du Davy Back Fight OPR. Les nouveaux trouvent une table libre et bien vite l'hôte vient vérifier qu'ils ne sont pas venus que pour vérifier la régularité discutable des pieds de chaise. Avant qu'il ne salue ses deux nouveaux clients avec toute la courtoisie qu'on lui devine, Gaston roule des épaules pour occuper le décor et, en se calant le dos au mur, commande.

Patron, sers-moi une mousse. Et pour le mickey, un verre d'eau sans bulles, sans glace, sans paille et, si possible, sans goût.
  • https://www.onepiece-requiem.net/t1985-le-set-samourai
  • https://www.onepiece-requiem.net/t1888-le-capitaine-hadoc-a-emherge
Ma cigarette s'écrase dans le cendrier, la sentence tombe pour le malheureux qui vient d'y laisser tout son solde.

Navré mon gars, la maison ne fait pas crédit.

Teddy, qu'il s'appelle, si j'ai bien retenu son nom. Ou ptetre Bobby, je sais plus. De toute façon, jm'en cogne. Le seul truc qui m'intéresse chez lui, c'est son oseille et je viens de le ratisser jusqu'à son dernier Berry.

En un sens je lui ai rendu service, il avait rien à faire à cette table de toute façon. C'est le genre civil sans histoire, bien rangé à sa vie miséreuse; trop honnête, trop faible pour passer dans l'arrière salle de la boutique. Il a épargné un mois durant peut-être pour arriver dans la cour des miracles et se voir offrir l'opportunité de faire fortune, et quand le grand soir est arrivé, ce soir-même, il a tout perdu. Il va rentrer dire à sa femme et sa ribambelle de gosses qu'il est désolé, qu'il agissait simplement pour faire leur bonheur, et au bout du compte, tout le monde se mettra à sangloter. Ce sera fort en émotions, tiens.

Mais voilà, Teddy implore ma pitié. Voudrait récupérer un maigre pécule pour sa famille. Mais non Teddy, t'es pas serveur t'auras pas de pourboire; tu mérites peut-être pas ce sinistre sort mais le mérite n'a rien à voir là-dedans. Alors tu vas dégager sans faire de vagues.


Écoute mon vieux, tu connaissais les règles en arrivant. T'as joué, t'as perdu, fin de l'histoire. Alors avant qu'un moins sensible que moi ne se charge de te foutre à la porte, tu ferais mieux de rentrer chez toi de ton plein gré.

Il devrait plutôt me remercier de lui avoir refusé de jouer ses biens. Montre héritée du grand-père, chapeau moins miteux que le reste de ses frusques, ou même ses chaussures. Tout y serait passé.

Les autres gars de la partie regardent le dépouillé sans une once de compassion. Tous des crocodiles prêts à le bouffer s'il se jette à l'eau. Je crois bien être le gentil de l'histoire, c'est un comble. Je lance un dernier signe de tête à Teddy lui désignant ainsi la sortie, et il sort de la pièce. Il sort de ma vie.


Reprenons si vous le voulez bien, messieurs.

Que reprenons-nous exactement ? La partie. Un talon de 52 cartes qui sentent bon le tabac, pas de tapis mais une simple table ronde en bois tachée ça et là de traces d'alcool. Pas de lustre au plafond mais plutôt une lampe fatiguée qui génère une opaque lumière, touche finale offrant au cadre l'aspect illégal qui lui colle si bien. Cet endroit, c'est la salle de jeu de La Trinquette.

La première fois que j'y suis allé, j'étais un simple visiteur. On m'a lorgné, on m'a jaugé, on m'a accepté. Je me suis taillé ma place à coup de mains gagnantes. Maintenant, je rentre quand cela me chante, j'ai même ma chaise attitrée. Et pour ne rien gâcher, le patron m'a à la bonne. Je joue pour lui et prend 35% des bénéfices. Si y'a des pertes, c'est pour ma poche. Mais le bilan est largement positif.

Je vais pour battre les cartes, mais un individu pas comme les autres fait irruption dans la pièce. Pas comme les autres et pourtant si passe-partout. Taille moyenne, poids moyen, cheveux grisonnants et air bonhomme. Seuls quelques habitués peuvent se vanter de reconnaître en lui Barton, l'intendant de la boutique. Le messager du grand manitou des lieux. Il me hèle d'un signe de main, il doit avoir des nouvelles.


Sans moi sur celle-ci gentlemens.

J'abandonne la partie quelques instants pour le rejoindre à l'autre bout de la pièce, où nous commençons à converser à mi-voix.

Comment ça se passe, Gambler ?

La pêche est bonne, ton patron pourra payer ses folies à sa nouvelle femme avec ce que je brasse.

Surveille ton langage.

Tiens, le salaire pour la journée d'hier. 100 000 et des poussières.

Une enveloppe grassement remplie d'où déborde même quelques liasses transite de mes mains aux siennes.

Excellent, tu te surpasses. J'ai des nouvelles pour toi. Le patron veut que tu joues au Bellagio pour lui ce soir. Nouveau casino, très cossu, de la clientèle de luxe à appâter. Tu prends ?

Le Bellagio hein... Comment refuser.

Parfait. Tiens, il y a plus d'un Million là-dedans, tâche d'en faire bon usage.

Et comme il est arrivé, Barton repart. Rapidement, je glisse ma future mise dans une poche intérieure de ma veste. 1 Million de Berrys, ça fait une belle somme. On en viendrait même à se demander comment le patron d'un pareil boui-boui peut sortir autant de fric de ses caisses. Mais c'est pas mon problème. L'argent n'a pas d'odeur. Et puis, j'ai pas palpé autant depuis le Blues Poker Tour. Le challenge n'en est que d'autant plus excitant.

À l'idée de rejouer sous peu avec de gros poissons, je décoche un léger sourire qui se dissipe sans tarder tandis que je retourne à la table. Il me reste encore quelques clients à traiter avec le respect qu'il mérite, cet après-midi.


Messieurs, je suis à vous.
    Voyage: négligeable.

    Logue Town: insuffisante.

    La Trinquette: nécessairement insuffisante.

    Avancement de l'enquête: correct.

    Ça ne fait pas la moyenne, mais ça semble suffisant pour que les autorités décident de m'envoyer dans ce trou. Mission de première importance disent-ils. Faux. C'est une mission qui ne dépend pas directement de l'amirauté. Elle entre donc dans les missions de second, voir troisième rang. C'est une formule toute faite ont ils répondu...

    Et bien elle est mal faite, mal formulée. A cela Hadoc a rigolé. Un peu.

    Hadoc... Il est l'élément le moins décevant de cette vaste entreprise. Bien que porteur de nombreux défauts inhérents à son statut d'homme de terrain, il n'en possède pas moins un discernement valable et une retenue salvatrice. Hormis pour ses gouts vestimentaires, horriblement frivoles. Cela fait maintenant deux mois et douze jours que j'ai été assigné à son équipage, à sa demande. L'homme est clairvoyant et a su reconnaître mes qualités. Ça en fait au moins un. De plus sa rigueur et son sens de la discipline le rendent supportable, voir presque respectable.

    Notre collaboration se révèle efficace. L'objet en était au départ une entreprise illégale et frauduleuse de faux-monnayage. Mais certains détails me font penser que nous remontons un morceau plus gros, que le nombre d'infractions à verbaliser va augmenter. Hadoc partage mon sentiment. Mais je ne dois pas l'appeler Hadoc, je dois l'appeler Gaston. Et il m’appelle Mickey.

    Nous arrivons à destination: La Trinquette. Un bui-bui aussi infâme que les autres. Cela se confirme dès l'entrée, ça s'intensifie exponentiellement une fois dans "l'arrière salle". Je ne suis pas encore assis, et déjà une dizaine d'infractions aux Codes. Toutes immédiatement consignées dans mon carnet de poche, idem pour les notes concernant la clientèle. Même si nous sommes sous "couverture" et que ce n'est pas le but de notre visite ici, cela pourra être utile en temps voulu. Et ça doit être fait.
    Je relève mon crayon et c'est l'instant que choisit le Barman pour arriver.

    Patron, sers-moi une mousse. Et pour le mickey, un verre d'eau sans bulles, sans glace, sans paille et, si possible, sans goût.


    Malgré la touche d'ironie, je me sentirais presque touché par le fait que le Capitaine se souvienne de ma commande habituel. Mais en fait... non.

    Ce qui me frappe par contre, c'est la chemise du Barman.

    De beaux vêtements pour un barman. Trop beaux pour un simple troquet.

    Hadoc feint de l'avoir remarqué aussi, par un hochement de tête entendu. Peut-être est-ce le cas, c'est remarquable. Ça et la foule d'autres détails qui font que cet endroit jure: les alcools de North Blue derrière le bar. Trop rares, trop chers pour ici. Le parquet poncé et comme neuf, comme pour dissimuler des traces de passages d'objets lourds, de coffres. Les trois gros bras en civil, presque discrets, on leur a demandé de faire un effort. Le joueur qui vient de perdre trop proprement, craintivement. Le tricheur qui n'ose pas sortir ses cartes de sa manche, repérable à ses démangeaisons d'avant-bras répétées. Les casseurs de l'arrière, sages comme des images.

    Le barman nous apporte nos commandes. Mon eau goûte la stagnation... Je rend son ironie à Gaston.

    J'espère que ta bière est aussi infecte que l'est mon breuvage.

    Un raclement de gorge me fait savoir que la barman a entendu et n'apprécie pas. Le vil.

    Je répète plus fort, pour que t'entendes : ton eau, barman, goûte l'urine tiède.

    C'est parce que c'est de l'urine tiède, Demi Chose.

    La joute verbale est lancée. Trop tôt hélas, car je suis en train de rater l'ensemble de la scène qui se déroule juste derrière notre tenancier: un joueur vient de se lever de la table, pour échanger une enveloppe avec un nouveau venu. Je tente de détailler les deux bougres, alors que le barman me fixe tel un Merlan.

    Laissons le à "Gaston", il sait communiquer avec cet sous-espèce.

    Celui qui vient de plumer, le joueur, ne me dit rien. Jamais vu. Il a les stigmates classiques de l'homme qui s'est vendu au Jeu, sans grande perte ni gain. Un "professionnel" comme ils appellent ça. Un charlatan. L'autre par contre ne m'est pas inconnu. Sa tête, je l'ai déjà vue dans un classeur. Le 715, au QG: Henry Bart, flagrant délit de racket, il y a de ça 10 ans et 1 mois tout juste. ... Le bon vieux temps des bureaux.. Mes mugs avec mon nom dessus, signe de respectabilité et de réussite...

    Mais pas de temps pour la nostalgie. Henry Bart donc. Il a purgé une très courte peine, trop courte, dans un cachot de North Blue, puis il a disparu. Jusqu'à maintenant. Je note.

    Et le nain! Je te parle!

    Cet interpellation d'une grande finesse me rappelle à la réalité. Le barman à trop belle chemise est toujours là, mécontent.

    Arrête de baver, tu vas salir ton beau parquet poncé.

    Dis-je.

    Sentant la présence morale de Hadoc de plus en plus pesante, je rattrape le coup.

    Je suis pas venu pour ton eau d'ailleurs. Mon poulain, ici à ma droite, cherche un combat. Un vrai... Sans règle. Tu connais un challenger?

    Le barman me regarde, sans trop avoir l'air de comprendre.

    Il boxe comme un pied, mais ce sera suffisant j'imagine?

    Ça c'était pour les casseurs et les trois videurs en planque. Vu leurs sourires simiesques, l’appât fonctionne.




    Dernière édition par Lou Trovahechnik le Lun 11 Juil 2011 - 17:58, édité 1 fois
      Lou tient son rôle à la perfection, surtout quand il ne joue pas. Cela ne faisait pas partie du contrat qu'il avait signé quand il s'était engagé à la Marine. Gharr est surpris par son équipier qui affiche la même sympathie caractéristique que l'uniforme qu'il incarne. Il y avait eu l'effort du déguisement, de l'attitude, de l'investigation, tout cela devait-il prendre fin parce que le petit homme avait la franchise brodée sur chacun de ses costumes ? Le Capitaine fixe le Commandant avec des yeux ronds et le barman prend cette mimique pour de la peur, comme si l'un des deux inconnus savait à qui appartient cet endroit. Bien vite, Gaston se reprend et s'adapte à l'inconscient talent d'improvisation de son binôme. Ce n'était pas parce que Mickey avait les jambes courtes qu'il était aisé de le suivre. La crainte marquée du boxeur conforte bientôt le serveur pas si serviable que ça dans son sentiment de domination des lieux, il ose même une réplique au client insultant.

      Dans son élan d'héroïsme, le voilà qui approche, les naseaux dilatés par l'illusoire témérité du gnome. Arrivé à la hauteur de Lou - façon de parler - il compte lui porter en guise d'addition un talent bien moins éloquent. Il ne lève pourtant pas la main, pas plus que le ton. Tout ce qui monte chez lui, c'est une paire d'yeux nigauds braqués vers ceux du complice barbu hissé debout pour calmer l'ambiance. Gharr a un véritable talent pour imiter Dolph Lundgren dans son registre dissuasif. Le visage reste impassible, mais les yeux parlent et font comprendre qu'un seul geste assez rapide pour écraser une mouche se solderait par des représailles directes et indélébiles. Assimilant le devoir qu'a le grand de protéger le petit, le barman esquive la collision pour reprendre le dialogue avec Lou qui a prit le tempos de fureté dans les coutures de la salle.

      Mickey gagne le second round de la joute et là Hadoc coupe sa respiration. Il vient de calmer l'homme à la belle chemise, mais il ne pourra pas refroidir les ardeurs des gros bras des environs qui s'intéressant de plus en plus au spectacle des deux nouveaux qui manquent de respect à leur rince-gosiers. L'arrière salle d'où émane pas mal de fumée de cigarette commence aussi à s'intéresser au jeu de la pièce principale, il y a comme une odeur d'hémoglobine sur le parquet qui attire tous ceux qui s'en délectent.

      Fort heureusement, le petit homme transforme la scène de tension en mise en scène de présentation. Il mêle provocation et suffisance pour mettre en valeur Gaston. Constatant que l'assemblée boit la tisane du manager, le challenger prend la salle à témoin et déclare.

      Pariez tout ce que vous avez sur moi. Je suis prêt à édenter n'importe quel connard qui pense que son paternel est le seul mec à avoir la main lourde. Tiens, j'ajoute même une assurance. Si je me perds le combat, je vous rembourse le double de ce que vous avez misé chacun. Alors, qui veut devenir riche ?

      Voilà qui inverse la vapeur. Plus personne ne veut molester la poule aux oeufs d'or qui caquette devant eux. Quand un homme vous donne le choix entre gagner et gagner, il devient l'ami de tout le monde. Gharr tapote l'épaule de son complice et il devient difficile de savoir si c'est au manager ou au Commandant qu'il s'adresse.

      Oublie pas de parier sur moi coatch, peut-être que tu seras fier de moi si je te fais gagner beaucoup d'argent.

      Enfin il retourne son attention vers le barman qui a pu testé son visage de guerrier à l'époque maintenant lointaine où ils étaient ennemis potentiels.

      Patron, je dormirai pas si j'ai pas défoncé une petite gueule de de gonze et un petit cul de gonzesse. Trouve-moi le premier vite fait et je pourrai m'offrir le second avant tard au soir. Les boxeurs, ça se couche tôt.

      Le barman acquiesce et retourne à son escargophone. Le terme "combat de coqs" revient à chacun de ses coups de fils.
      • https://www.onepiece-requiem.net/t1985-le-set-samourai
      • https://www.onepiece-requiem.net/t1888-le-capitaine-hadoc-a-emherge
      La partie peut reprendre ses droits. Un brelan de 10 me rapporte quelques 5 000 Berrys et de nouvelles félicitations de la part de tous. Je souris d'un air entendu, mais je ne les écoute pas. Ou qu'à moitié tout du moins. Plus intéressante que ma partie, la scène insolite qui se déroule au milieu de la grande salle captive mon attention.

      Tandis que je causais affaire avec ce cher Barton, un duo hors du commun est entré dans la boutique. Et les deux spécimens font du remous depuis leur intrusion. Jamais vu leurs gueules par ici. Mais compte tenu leurs manières, ils vont pas tarder à se faire un nom dans le secteur, s'ils ne laissent pas leur vie en route dans ce petit jeu. Mais ça n'a pas l'air de prendre cette tournure, alors je tends l'oreille.


      Passe.

      Désormais exclusivement concentré sur leur conversation avec Alfie, le barman, je ne perds pas une miette de l'échange. Les lunettes enfoncées sur mon nez m'offrent le meilleur camouflage qui soit pour épier en toute impunité le curieux manège. Certains autour des nouveaux venus ne se gênent pas pour les lorgner sans une once de discrétion, mais j'ai un chouilla plus de tenu que le raté primaire, je crois.

      Alors, bien calé derrière mes verres teintés, j'écoute. Gaston est boxeur, le bout d'homme est son coach. S'il est court sur pattes, sa langue est en revanche bien pendue. La réciproque est loin de se vérifier pour son acolyte. Gaston a des muscles et le fait savoir. Gaston veut taper. Dans leurs styles respectifs, l'un comme l'autre n'ont pas l'air commodes. Car oui, c'est un duo on ne peut plus hétérogène qu'ils forment.

      La fin du monologue du boxeur soulève un point intéressant. Le poulain à son jockey cherche un challenger. Pas facile la vie de sportif, dans la pègre. Enchainer les combats clandestins pour gagner sa vie, ça peut rapidement devenir usant. Sans compter les paris truqués, les menaces et les accidents potentiels...

      Mais à chacun ses emmerdes. Si je suis pas du genre à m'apitoyer sur mon sort, faut pas s'attendre non plus à ce que je verse une larme pour mon prochain. Surtout quand c'est un mastodonte pareil. D'ailleurs, si les remarques sur l'attitude du bonhomme fusent à demi-voix, personne ne relève directement le défi jeté à la figure de tous ici présents. Gaston en impose.

      Derrière le comptoir, Alfie a déjà dû propager la rumeur comme quoi un nouveau molosse cherchait un os sur qui se faire les crocs. L'affaire est bien partie pour se régler sans que j'intervienne mais...


      Bah, après tout.

      Tant qu'il y a de l'argent à se faire sans forcer, je suis sur le coup. Alors, je vais m'incruster sans y avoir été convié dans la conversation. Si on décrypte bien son one man show, c'est ce que Gaston attend. Qu'un courageux se manifeste.

      J'attrape mon verre vide, rejette ma chaise et quitte la table sans un mot. Quatre paires d'yeux me regardent faire, étonnées.

      J'arrive au comptoir dans un parfait timing, quand le silence retombait. Une bonne partie de la pièce m'observe. Je le sais, même si je suis dos à l'assemblée.


      Alfie, ressers-moi le même, tu veux ?

      Alfie vient de raccrocher, il s'exécute sans tarder. Une première gorgée de whisky ingurgitée, je me retourne et fixe tour à tour Gaston puis associé avec une petite moue, manière d'évaluer de manière ostensible le potentiel des deux compères. Avant de me lancer.

      Si tu cherches du combat, je peux t'offrir ça.

      De timides applaudissements ponctuent ma remarque, mais on attend surtout la suite.

      Me faire arranger le portrait pour pas un rond, c'est pas mon moteur, mais je peux organiser ça si c'est le tien...

      Petit silence, nouvelle gorgée. Puis viennent les explications.

      T'as pas peur de l'adversité on dirait, tant mieux. T'en as une paire et tu le montres. Bien. Mais ici, on ne veut pas d'un simple match de boxe. Ici, on veut du show, du spectacle, du combat.

      Quelques petits vieux haussent la voix, une majorité de clients hoche la tête, m'offrant son approbation.

      Voilà ce que je te propose, Gaston. T'es un mec gaillard, t'es bien bâti et t'as l'air de le savoir. On a compris. Mais si tu veux prouver ce que tu vaux, faudra se plier aux règles de la maison. Si t'es sûr d'avoir les épaules pour, rendez-vous à la cave du vieux Eb' dans deux heures. Alfie t'y conduira. D'ici là, ça me laisse le temps de peaufiner les détails.

      Ici, tout le monde a saisi le message. Quelques gars sortent déjà précipitamment pour aller prévenir qui doit l'être, prêts à assister à une rencontre digne de ce nom. D'autres viennent me serrer la poigne et me remercier en offrant leur tournée. En un instant, je suis entouré d'une nuée d'amateurs de combats chauds ravis de bientôt pouvoir assister grâce à moi à leur passe-temps favori.

      Oh, pour les appointements, ça fera 30% des bénefs. À prendre ou à laisser.

      Dernière remarque pour Mickey. D'une traite, je vide un dernier verre offert par la maison. Avant de traverser la pièce fort de ma côte de popularité sous un tonnerre de congratulations et autres applaudissements. Je dois sans tarder aller m'occuper des modalités de la rencontre.

      Messieurs, à très bientôt j'espère.
        Je n'ai jamais trouvé qu'un seul défaut à ma taille, que certaines âmes autoproclamées "éclairées" qualifient aisément de "petite": celui d'avoir le nez au niveau des aisselles des gens. Aujourd'hui, dans ce "bar", ce désavantage prend toute son ampleur. Depuis que l’échalas aux allures de roublard et aux manières de gentlemen en solde chez Wibra à offert ses services comme entremetteur, la populace d'ici, déjà fort désobligeante à l'hygiène, s'est mise à remuer, provocant parmi ses rangs des torrents de sudation. L'odeur est on ne peut plus exécrable, et l'idée d'avoir mon nez au niveau de leurs effluves en devient, passez moi l'expression, "dégueulasse" !

        Mais je ne peux par contre nier que nous progressons: avec le pugilat qui se prépare, nous avons réussi un joli coup, surtout grâce à moi en fait. Et ce coup va nous faire gagner du temps. Mes fosses nasales s'en réjouissent déjà. Hourra.

        Le grand dadet qui s'est présenté à Gharr est célèbre ici. De son allure, on peut conclure qu'il est un homme malhonnête et lâche, à qui on ne peut pas faire confiance, mais dont la loyauté est monnayable. Ajoutez les vices dont il fait montre, à savoir la boisson, le jeu et le tabac, et vous pouvez le mettre sans doute aucun dans la catégorie "anarchiste nuisible et criminel irrécupérable". Il y a fort à parier que ce soit dans son sang depuis des générations, et que ses aïeuls aient un lourd passé de voleurs de pomme consanguins derrière eux.

        Je n'aime pas ce garçon.

        Mais qu'il fasse son office... Qu'il serve. Le rebut laisse dire qu'il s'occupe de tout, monnayant pas moins de 30% des gains. Je veux bondir, le remettre à sa place en lui rappelant qu'il enfreint pas moins de 23 articles du Code avec pareil pourcentage, et que même si, sacrilège, il n'en a cure, un déchet de capote comme lui ne mériterait pas plus que 0,36555555555555... %!

        Mais la main calleuse de "mon" capitaine prend appui sur mon épaule, et je comprend par ce mouvement d'une grande finesse qu'il veut que je me taise. Soit. Il est le Capitaine. C'est comme ça.

        Notre entremetteur passe plusieurs coups de fil, et le barman (dont le nom est stupide) nous remet un verre, bien malgré lui, mais ça semble être une coutume. Comme une dernière volonté ? Ces simplets sont sans aucun doute persuadés de nous mener droit à l'abattoir. Pensant cela, ils en sont d'autant plus simplets.
        On pause un verre d'eau face à moi, je regarde la face bouffie de Alfie, le préposé au débit de boisson. Il me rend ce regard en l'accompagnant d'un crachat dans mon verre. Je sors mon calepin, et note son stupide patronyme sur ma liste noir. Je ferai sauter sa licence, ses crédits, ses possessions et celles de sa famille une fois cette mission terminée. Je range mon carnet. Il est inquiet. Il a raison.

        Enfin l'arnaqueur en chef raccroche l'escargot-phone. Il nous met au parfum: le combat aura lieu ce soir, pour la mi-nuit. Je demande à voir l'arène. Il sourit tel un arracheur de dents et nous invite à le suivre, Gharr et moi. Nous quittons la pièce à trois et une fois dans l'escalier, loin des oreilles indiscrètes je lui glisse chaleureusement:

        Un coup fourré et Gaston te coupe un doigt.

        A Gaston de surenchérir.

        C'est un minimum...

          Gharr joue le jeu. Un pauvre cave à passer à tabac, pas de problème, un doigt à couper, pas de problème, une paire de couilles à arracher...ah ben là, peut-être pas quand même. Le trio file d'un bloc de pauvreté bien tassée à un autre. Le mystérieux Eb' le reste, le guide Alfie ne prononce pas le moindre mot durant le voyage. Hadoc se contente de mémoriser la route. Dans les bas quartiers, tout est déchets et poussière. Une poussière en état de siège, revendiquant face à quiconque qu'elle ne possède aucun propriétaire pour être le fruit de tout le monde. Elle s'amoncèle, de couches en couches, translucide puis opaque. Personne ne prend le droit de la souffler ailleurs car elle est le cimetière des espoirs brisées et rêves éteints. Terne, fade, indigeste, voilà comment sont les rues grisâtres de la ville en ses zones désincarnées. La Trinquette semble loin, aucune vie n'anime plus les environs. Alfie, Mickey et Gaston avancent comme un caillot, d'une artère à l'autre, avec pour musique le silence discret d'un fragment social trop enfoncé dans la misère pour que son cri s'élève jamais aux oreilles de toute façon hermétiques des gens d'en-haut. Et l'absence de bruit sonne le deuil d'un quartier mort malgré les quelques bouquets de sans-abris éméchés qui ponctuent les murs de façades ébréchées.

          Ne nous apitoyons pas sur le sort de la face sombre de Loguetown. Au contraire, réjouissons-nous, car ce désert inerte vomissant l'agonie par toutes les portes est le trophée des grandes villes, celles qui fonctionnent et ont assez de riches pour supporter davantage de pauvres. Plus la coupe est grande, plus la saleté s'y dépose. Ne soyez pas désolés de comprendre que cette ville ne fait pas exception, prenez plaisir, en faisant face à ces immondices humanoïdes, de constater combien leur présence atteste de tout le merveilleux d'une ville si célèbre dans le monde que Grandline jalouse de l'avoir laissée aux Blues.

          Une porte rouillée par la pluie et l'urine s'ouvre. Les voyageurs sont arrivés à destination. Un être au visage creux et violent se tient de l'autre côté. Il arbore des tatouages typiques de prisonniers et ses aisselles rivalisent avec la puanteur de son haleine gâtée par des dents depuis longtemps pourries. Il a pourtant beaucoup d'énergie, sans doute la drogue aide-t-elle cette loque imbibée de sueur séchée à tenir un tel entrain. Outre la vieille pisse et la transpiration, l'endroit empeste le sang et le fauve. Le corridor traversé sur quelques mots d'Alfie et le nouvel hôte donne l'impression de débarquer dans un squat punk après une virée d'enfer. Le sol croque sous la pression des pieds et traverser pieds nus ce simple hall serait un risque considérable pour qui n'est pas en ordre sur son carnet de vaccination.

          Eb', surexcité, sert généreusement la main du manageur et de son champion en riant comme un violon dont on n'a pas encore appris à jouer. Impossible de dire s'il est heureux ou moqueur, impossible et de toute façon inutile. Le désormais quatuor file d'ans une arrière cours aérée où le parfum d'Eb' laisse place à ceux des cages. Une dizaine de chiens musclés comme des taureaux aboient de rage contre les barreaux. Gharr se débat dans la tête de Gaston. Le chien fantôme se retrouve face à des paquets de viande piqués et drogués pour offrir un carnage dans des combats illégaux. Ses poings se serrent et l'envie d'en écraser un contre la pomme d'Adam de ce méprisable Eb' se fait presque irrésistible. Lou se fait une orgie d'infractions et le lieu devient un endroit qui n'a pas le droit de subsister, même dans les zones les plus démunies où aucune justice ne se rend jamais. La balance a retrouvé la vue et son jugement ne se fera pas tard dans cet autel de la dépravation.

          La cours traversée, une nouvelle maison, visiblement construite à l'intérieur du pâté de maisons, couvre l'écoeurant mélange de bassins chimiques et de matières fécales. L'air devient plus respirable, il semble même y faire plus frais. La porte refermée derrière le groupe coupe l'arrivée de puanteur et le bâtiment montre un regain de luxe relatif à la Trinquette.

          La cave est grande, c'est un ancien gymnase reconverti. Du sable jeté au centre et enclavé dans une cage sert de tatami aux combattants. Il y a plusieurs objets en dehors du ring qui ne sont pas sans évoquer le genre de baston qui s'y dispute. Chaises, chaînes, bâtons de clous rouillés, tubes de néons, batte en aluminium avec option jus d'organes coagulé, tout est mis en place pour laisser deux êtres s'entretuer dans un échange barbare et excitant pour la foule. Il ne serait pas absurde d'imaginer que les chiens ne se combattent pas qu'entre eux, cette fosse n'a aucune règle ni aucune éthique. Le binôme de la Marine vient de tomber sur une cavité immonde où la terre et l'enfer copulent dans la crasse et l'indifférence.

          Coach, va me falloir un petit coin à moi pour m'échauffer avant la rencontre. Tu peux négocier ça?

          Un coin pour se calmer d'abord, puis pour prier. Beaucoup d'âmes seront pesées dans les jours qui viennent.

          • https://www.onepiece-requiem.net/t1985-le-set-samourai
          • https://www.onepiece-requiem.net/t1888-le-capitaine-hadoc-a-emherge
          On nous mène à la salle, et nous traversons le coté sombre de Logue Town. Ces quartiers que dans les bureaux, nous appelions "secondaires". C'est laid. Presque triste. Il n'y a rien, rien que la règne de la saleté, du désordre. Les gens sont misérables. Ça sent. Ici on s’apitoie sur son sort. On pleure. Avec de gros sanglots, une visage plaintif et sans retenue. L'étalage. A y penser, tout raser serait la moins pire des solutions. Les cendres ont toujours fait un bon terreau.

          Apparait la bâtisse. La bâtisse. Un amas de brique terne, cimentée au sable. Nous n'avons pas encore passé la porte, pourtant on ressent déjà ici, sur le pas, l'effroyable vicissitude du lieu. Une porte métallique grince. Elle semble être la seule chose solide en façade. Je frémis à cette idée: ce tas de pierre, lorsque la porte est ouverte, ne repose plus sur rien. Puis j'efface. C'est stupide, cette pensée.

          Nous entrons. Mon nez est violé par l'atmosphère ambiante. Un mélange de sueur rassie, de saleté, de trouille. Une coulée se fait sentir dans mes sinus. Les effluves font saigner mon nez.

          Gaston, passe moi donc un mouchoir.

          Face à nous, un primate tatoué. Je ne cherche même pas à cerner le larbin. C'est joué d'avance. Classe: nuisible à addiction. Dérisoire et dégoutant. Nous continuons. Je ne compte même pas les infractions aux Code: l'addition serait trop salée. L'endroit est de toute façon bon pour l'incendie. C'est l'affaire de quelques mois. Le temps que cette enquête en arrive à son terme.

          Mon ami Alfie, pour qui je réserve toujours un sort semblable à celui de cet endroit, est salué par son boss, son maître à penser, celui qui lui donne le sou, Eb'. Contraction de Eboueur surement. Il diffère des zéros croisés jusqu'ici. Il sautille, ça n'est pas approprié à l'endroit. Mais surtout, il dirige. Peut-être pas grand chose, mais c'est déjà plus. Plus qu'Alfie, qui lui ne fera jamais que servir. Eb' tente un contact faussement chaleureux. Il insiste, main tendue, et je surpasse mon dégout de l'humain moyen pour la lui serrer mollement. Sans même une once d'intérêt. Gharr a difficile à se contenir. De plus en plus. C'est au paroxysme lorsque nous attaquons une arrière coure transformer en chenil. De nombreux chiens y aboient, rageurs, les yeux injectés de sang. Malgré l'air extérieur, malgré notre traversée éprouvante du quartier comme de l'entrepôt, il ne fait pas bon être ici. L'odeur certes, mais aussi.. tout. Tout est lugubre et éprouvant. J'en compatirais presque avec ces animaux. Presque.

          Ce trajet semble long. Ce ne sont pas les blagues vaseuses de 'Eb, ou encore la tension retenue de Gharr qui vont le rendre plus agréable. Quand enfin, nous débarquons. Le gymnase. Difficile de le noter, tant les standards de cotation ont pris le large depuis notre descente du port. Si un effort crétin à été fait pour rendre l'endroit utilisable, il n'en reste pas moins une salle infect, matinée de sang et de sueur, de crasse et d'infractions. Au centre le ring. L'arène. Qui ne laisse aucun doute sur la nature du combat à venir. Et sur autre chose: cette nuit, Gharr va devoir tuer, que ce soit pour garder sa vie ou son devoir intact. Je crois qu'il l'a senti.


          Coach, va me falloir un petit coin à moi pour m'échauffer avant la rencontre. Tu peux négocier ça?

          Je ne répond pas. Je vais simplement quérir le vil 'Eb. Il pue le faux-jeton. Pour le moment ça nous sert. Une minute et seize secondes. C'est le temps qu'il prend pour me vanter la loge. Je le laisse baver son fiel. Enjoué, il me tapote le crâne, et me montre une porte dérobée, près du débit de boisson.

          Je fais signe à Gaston, il me suit, je lui montre la porte. Gaston entre. Je ne le suis pas. Le capitaine a des choses à faire. Seul. Moi, je prend sur moi, je me dit, je me le redit, nous avançons. La tension est montée, la mission se révèle comme ce qu'elle est. Je suis entre dégout et conviction: l'impression presque agréable de servir réellement à quelque chose, même si le service se fait au milieu de la pire fange qui soit.

          Le combat aura lieu d'ici quelques petites heures. Nous y serons vite. Ce ne sera pas une sinécure, ce ne sera pas joli, et je soupçonne le vil 'Eb d'avoir plus d'un tour dans son sac. C'est un vicieux. Je l'ai vu lorsqu'il voulait me serrer la main. D'habitude, personne n'insiste pour me toucher. Il faut prendre les devant. Dès lors. J'inspecterai la salle, le temps que Gharr ai fini. Connaitre et les portes de sorties, et les pièges potentiels ne pourra pas desservir. Courage. Si nous réussissons, bientôt on pourra abattre cet antre de l'indignité.