Ancre jetée à plusieurs mètres de la plage visée, Lilou attrape l'une des rames en venant se glisser dans la barque qui les conduira tous les deux jusqu'à la terre. Elle s'installe, malgré le ressac des vagues, sans les sentir. A force d'être au large, elle a pris l'habitude de n'en avoir plus rien à faire. Son équilibre ne se résume plus à ça, elle est une fille des eaux, les plus déchainées, les plus dangereuses, et rien ne peut vraiment l'inquiéter. Kiril lui fait passer le sac dont ils auront besoin pour récupérer des ressources pour la suite de leur voyage. Mais dans ce dernier, c'est le bruit caractéristique du verre qui s'entrechoque qui lui fait relever les yeux vers lui.
Sérieusement ?
Avec le bruit, il y a toujours l'odeur de l'alcool, et son attitude de vrai con lorsqu'il en consomme. Parfait. Tout ce qui manquait à ces dernières journées difficiles sans un cap fixe où se rendre. Son regard se fait dur, elle est peut-être surtout étonnée qu'il ait encore de la réserve.
La question reste parfaitement silencieuse, il n'a plus besoin qu'elle l'articule pour l'entendre. Avec dédain, elle relâche le sac à l'intérieur de la barque et vient s'asseoir en lui refilant les deux rames. Il se débrouillera pour atteindre la plage et pour se faire la conversation tout seul, de fait. Elle, elle lui tourne consciemment le dos, ramenant ses jambes contre elle, posant ses bras sur ses genoux pliés, à regarder l'horizon qui se dessine malgré la pénombre de la nuit. Seulement à la lumière d'une lune qui tient déjà ombrage, elle lâche un soupir de circonstances.
Laissez-nous deux jours, indique-t-elle autant à Aimé qu'à Linus, qui hochent la tête de concert. Deux jours d'un silence glaçant s'il le faut, quand bien même l'oasis au loin n'a rien d'un coin d'hiver. Une fine bruine rend l'ambiance plus moite encore, alors qu'ils s'éloignent de l'attrape-rêve. Elle l'entend tenter derrière, éclaircir sa voix pour prendre la parole, mais d'un signe de la main : elle le coupe tout net. Ne t'avise surtout pas. Son ton est sec, aussi intraitable qu'elle.
De lui parler. De lui adresser la parole. Elle lui a déjà dit : ils n'échangeront pas un mot lorsqu'il sera dans cet état. Sa déception est palpable, comme à chaque fois qu'il se laisse sombrer au fond de sa bouteille. Mais plus encore, c'est l'impuissance qui la ronge de ne rien pouvoir faire contre ça. Elle a beau être forte, parfois plus que bien des hommes qui l'ont sous-estimé, elle perd chaque bras de fer en cherchant à faire plier les démons qui le hantent. Aucun n'a frémit en sa présence, n'a osé reculer d'un pas pour prendre de l'élan.
Il n'y a qu'elle qui lutte pour deux, dans un combat perdu d'avance avec lui.
Elle n'exprimera pas sa déception. Elle n'a jamais réussi à mettre des mots dessus, sans doute parce qu'on n'en a pas inventé qui saurait expliquer concrètement ce que ça lui inspire. Entre l'énervement et la frustration, la balance ne s'équilibre jamais. Et puis des soirées où ça va trop loin, le ton monte parfois plus qu'il ne devrait. Il n'y a jamais trop d'elle pour le maitriser, et jamais assez d'excuses pour qu'elle lui pardonne à bord de l'attrape-rêve. De toutes les facettes qu'il collectionne, il n'y a que celle-ci qu'elle abhorre vraiment.
Sérieusement ?
Avec le bruit, il y a toujours l'odeur de l'alcool, et son attitude de vrai con lorsqu'il en consomme. Parfait. Tout ce qui manquait à ces dernières journées difficiles sans un cap fixe où se rendre. Son regard se fait dur, elle est peut-être surtout étonnée qu'il ait encore de la réserve.
La question reste parfaitement silencieuse, il n'a plus besoin qu'elle l'articule pour l'entendre. Avec dédain, elle relâche le sac à l'intérieur de la barque et vient s'asseoir en lui refilant les deux rames. Il se débrouillera pour atteindre la plage et pour se faire la conversation tout seul, de fait. Elle, elle lui tourne consciemment le dos, ramenant ses jambes contre elle, posant ses bras sur ses genoux pliés, à regarder l'horizon qui se dessine malgré la pénombre de la nuit. Seulement à la lumière d'une lune qui tient déjà ombrage, elle lâche un soupir de circonstances.
Laissez-nous deux jours, indique-t-elle autant à Aimé qu'à Linus, qui hochent la tête de concert. Deux jours d'un silence glaçant s'il le faut, quand bien même l'oasis au loin n'a rien d'un coin d'hiver. Une fine bruine rend l'ambiance plus moite encore, alors qu'ils s'éloignent de l'attrape-rêve. Elle l'entend tenter derrière, éclaircir sa voix pour prendre la parole, mais d'un signe de la main : elle le coupe tout net. Ne t'avise surtout pas. Son ton est sec, aussi intraitable qu'elle.
De lui parler. De lui adresser la parole. Elle lui a déjà dit : ils n'échangeront pas un mot lorsqu'il sera dans cet état. Sa déception est palpable, comme à chaque fois qu'il se laisse sombrer au fond de sa bouteille. Mais plus encore, c'est l'impuissance qui la ronge de ne rien pouvoir faire contre ça. Elle a beau être forte, parfois plus que bien des hommes qui l'ont sous-estimé, elle perd chaque bras de fer en cherchant à faire plier les démons qui le hantent. Aucun n'a frémit en sa présence, n'a osé reculer d'un pas pour prendre de l'élan.
Il n'y a qu'elle qui lutte pour deux, dans un combat perdu d'avance avec lui.
Elle n'exprimera pas sa déception. Elle n'a jamais réussi à mettre des mots dessus, sans doute parce qu'on n'en a pas inventé qui saurait expliquer concrètement ce que ça lui inspire. Entre l'énervement et la frustration, la balance ne s'équilibre jamais. Et puis des soirées où ça va trop loin, le ton monte parfois plus qu'il ne devrait. Il n'y a jamais trop d'elle pour le maitriser, et jamais assez d'excuses pour qu'elle lui pardonne à bord de l'attrape-rêve. De toutes les facettes qu'il collectionne, il n'y a que celle-ci qu'elle abhorre vraiment.