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D'une prison à l'autre

À l'aube, Olek avait été transporté inconscient du port d'Inari jusque dans les cachots du navire-prison en direction de Grand Line. Il ne vit ni le Colonel Yoshi qui l'observait avec ses jumelles, bien à l'abri du centre de commandement, ni Astral Ernesto qui, tapi dans l'ombre des docks, transmettait à sa manière son dernier adieu au pirate. Inari serait bien plus calme sans lui, qui aurait cru que cette force de la nature, cet électron libre allait rester aussi longtemps. Les circonstances avaient été très atténuantes, il fallait l'avouer. Drogué et enfermé dans les ténèbres à son insu pendant près de deux ans, personne ne ressortait indemne d'une expérience pareille et le leader de la cabale ne put s'empêcher de se demander quels genres de traumatismes avaient élu domicile dans l'esprit d'Olek. Il lui souhaita toute la chance du monde avant de disparaitre dans une ruelle, Astral avait encore beaucoup de travail et la journée était tout juste naissante.

Le pirate, ex-prisonnier de nouveau prisonnier, se réveilla plusieurs jours après le départ en mer du cuirassé. Il ne fut pas surpris de se retrouver à nouveau enchainé, mais les bruits alentour laissaient paraitre qu'il n'était pas seul, ça, c'était une bonne nouvelle, et les mouvements de balancier de la cage lui apprirent qu'il était en mer au lieu d'être six pieds sous terre, une meilleure nouvelle encore. Sa situation s'était nettement améliorée et même s'il était bien loin de sa forme d'antan, il retrouvait petit à petit son humeur joviale et son esprit champêtre. Lorsque le repas arriva enfin, des huées et des insultes fusaient dans tous les sens de la part de ses co-détenus, Olek, lui, récupéra, son bol sans un bruit et englouti la bouillie en un quart de seconde, comme s'il s'agissait du plus succulent des steaks. Quelques types à ses côtés le regardèrent avec dégout, deux trois gifles dans leur gueule suffirent à les calmer et à remplir le ventre du colosse de quelques ragouts supplémentaires.

Dans le temps, Olek aurait papoté, fait le beau, cherché à se faire des Alliés ou juste à se foutre sur la gueule par plaisir. Il ne ressentait plus ce genre d'envies à présent, quelque chose en lui s'était brisé sur Inari, la fougue et l'innocence de la jeunesse s'étaient dissipées, aussi surement que l'éclat d'excitation qui brillait autrefois constamment dans ses yeux. Il n'était plus le même et son regard avait changé avec lui. Beaucoup plus sombre et inquiétant, mais au lieu d'être terne, vaincu et  éteint par les atrocités de la vie, il luisait au contraire d'une folie douce, aussi profonde que les océans, de celle que seuls les malheureux ayant connu un sort pire que la mort pouvaient afficher. Une compréhension erronée de la vie et de ses mystères qui lui donnait une confiance, une assurance dont les fondations mêmes étaient corrompues.

Il resta donc silencieux, dans son coin la plupart du temps, guérissant de ses récentes blessures et attendant patiemment l'heure des repas, moment auquel il réclamait son dû auprès de chaque prisonnier de l'étage. Qui non s'en rechigner lui cédait toujours leur gamelle. Les Marines chargeaient de les surveiller, s'amusaient de la scène sans intervenir, à leurs yeux les pirates auraient mieux fait de tous s'entretuer, ça leur aurait évité un voyage aussi long, eux qui avaient femmes et enfants attendant à la maison. Il y avait bien eu un ou deux téméraires qui avait essayé de se défendre contre l'oppression d'Olek, ils avaient fini la tête écrasée dans le plancher suffisamment vite pour dissuader toute autre tentative. À croire que les grosses pointures se trouvaient dans les étages inférieurs. En réalité, une poignée de pirates bien plus puissants qu'Olek étaient cachés dans le lot, mais aucun de bougea, ni ne fit mine de le remettre à sa place, par flegme principalement, mais également par inquiétude, le jeu n'en valait pas la chandelle pensaient-il, ses yeux du diable fraichement acquis devaient peser sur la balance sans qu'il ne s'en rende compte.

La mutinerie débuta des niveaux inférieurs, en quelques heures ce fut le chaos total, comme à leur habitude, pirates et marines s'entretuaient, il n'y avait plus d'espoir ni d'intérêt à essayer de maintenir l'ordre ou de calmer la foule, mais bien à tous les éliminer, c'était une question de survie pour l'équipage. Arriver à bon port avec la cargaison vivante n'était plus une priorité, le cuirassé était attaqué sur deux fronts, de l'intérieur par les prisonniers et de l'extérieur par un navire pirate, dont les boulets de canon transperçaient les côtes de l'embarcation qui ne tiendraient plus longtemps. Le contre-amiral Silver et ses hommes effectuaient un travail remarquable, mais des mines défaitistes de plus en plus nombreuses prenaient place sur le visage des soldats. Ils luttèrent jusqu'au dernier, avec bravoure, sans se rendre ni tenter d'implorer la pitié d'ennemis qui n'en avait de toute façon jamais eu.

Olek ne participa quasiment pas aux combats, il se savait encore trop faible physiquement et ne trouvait aucun intérêt à se fatiguer sur du menu fretin, il brisa tout de même quelques cous et colonnes vertébrales pour faire bonne figure en se dirigeant vers le pont. Il avait rejoint au passage la troupe de timbrés qui était responsable de tout ce merdier, dirigée par un type aussi grand que lui du nom de Jack, un chic type qui savait manier d'une poigne de fer sa clique de dégénérés. Dans d'autres circonstances, Olek était sur qu'ils auraient pu être amis, sans se douter une seule seconde que leur destin s'entrecroiserait très prochainement. Ils apprirent, sur le pont alors que l'eau commençait à chatouiller dangereusement leurs mollets, que l'évasion du jour était sponsorisée par Ravrak l'Immortel et son Ange Noir.  Deux noms inconnus du glaiseux de l'Amerzone, mais qui semblaient faire beaucoup d'effet aux quelques deux cents pirates rescapés. Olek se promit de travailler sa culture G dans les prochains mois, le monde avait surement bien changé en deux ans, lui qui était une étoile naissante à l'époque n'était aujourd'hui plus qu'un taulard de plus aux yeux du monde.

Ils furent escortés comme du bétail vers un cuirassé tout juste en meilleur état et prirent la route de l'île la plus proche, Alabasta. Le colosse se doutait qu'un truc pas net se tramait, la solidarité entre Pirates n'existait que pour répondre à quelques machinations dissimulées derrière.  Rien n'était gratuit dans ce monde, sauf peut-être la violence, puisque même la connerie se payait tôt au tard, et souvent très cher. Chaque chose en son temps pensa Olek alors qu'il abandonnait ses congénères pour rejoindre la soute et le garde-manger, avant de s'y enfermer et de bloquer la porte à l'aide d'une dizaine de caisses.  À table! Les problèmes pouvaient attendre, son estomac, lui, non.
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