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Négociations musclées

Rappel du premier message :

Les négociations avec le roi d’Erbaff se sont bien passées, si l’on omet le fait qu’il veuille m’utiliser contre les Mangemondes et Kutroshinsky. Soit, ce n’était pas prévu mais je vais peut-être pouvoir rallier les Mangemondes à ma cause. J'ai passé un accord avec Erbaff et je compte bien leur prouver ma valeur.

J’ai d’abord fait un détour par Parisse pour y tester le stratagème que j’escompte user à ChâteauGéant. Et aussi parce que de Parisse, l’une des aiguilles du trilog pointerait sur ma destination.

Heureusement, le transport était plus simple depuis Parisse. Généralement il me suffisait d’un bâton plus ou moins long, auquel j’ajoutais la mouette de la gazette comme appât, et à l’eau. Je réitérais le processus en utilisant la nouvelle prise, à laquelle j’injectais des phéromones pour accélérer la pèche, comme appât jusqu’à obtenir une poiscaille suffisamment grande pour me transporter sans encombres, avec un regard royal pour le soumettre.

Mais sur Erbaff… Les oiseaux faisaient la taille d’une cabane, et une branche la taille d’un tronc. Je crois que c’est ce qu’on appelle la pèche au gros ? Qu’à cela ne tienne, mes hormones me permettaient d’adapter ma taille au décor. Tandis qu’à Parisse, la méthode traditionnelle était plus que suffisante.

Et ainsi me voilà à dos d’un serpent de mer géant qui me véhicule jusqu’aux Mangemondes.

Le voyage fût long. Heureusement que la gazette est toujours accompagnée d’une belle volaille. Ma monture changea par deux fois au cours du trajet : attaquée par un monstre marin plus fort, que j’ai domestiqué ensuite. Non sans profiter de la chair laissée par le perdant pour me remplir la panse. Qui a dit que l’océan est dangereux ? Il offre tout ce dont on a besoin pour y survivre.

Finalement, je suis arrivé à destination. J’ai demandé à Plouf Plouf, le monstre marin, de rester dans les parages au cas où je doive quitter l’île dans l’urgence sans prendre le temps de pécher. Je me suis ensuite assis sur ce rivage.

« Marc ? Tu m’entends ? Tu peux venir ? »

Je fis bien des rencontres pendant mon séjour à Parisse, et ma seconde sur Armada m’envoya des personnes dont les compétences devaient me plaire. Et bien testons les de suite !

Du petit miroir d’un pouce que je porte en médaillon autour du coup sortirent quelques mèches de cheveux noires. Elles formèrent un grand ovale devant moi où un miroir apparût. L’instant suivant, un vieil homme traversa le dit miroir.

« Bonjour Marc. »
« Capitaine. Ou dois-je t’appeler chef ? Patron peut être ? »
« En tant que pirate je dirais que capitaine est le plus approprié. Mais Reyson c’est bon aussi. »
« C’est noté capitaine. »
« Peux-tu cartographier cette île et me l’a montrer ? »

Le vieil homme acquiesça avant de s’asseoir , et devant lui une maquette en trois dimensions commençait à prendre forme sous l’apparence d’un hologramme, démarrant par ce rivage et se complétant petit à petit.

« Val ? Pendant ce temps est ce que tu peux aller observer les gens de ChâteauGéant pour analyser leur coutume vestimentaire depuis le monde miroir ? Je veux qu’à chaque fois que je changerai de quartier ou de lieu, j’ai la tenue appropriée pour passer inaperçu. »

Cette fois ce sont des cheveux châtains qui sortirent de mon médaillon pour prendre la forme d’une main au pouce levé, signifiant la confirmation de la demande. Des cheveux noirs succédèrent à la main et se configurèrent en un point d’interrogation.

« Je ne t’oublie pas Alice. Tu peux tâcher de trouver le point d’accès le plus près du dirigeant de cette île ? »

Nouvelle main de cheveux au pouce levé. Les directives étaient données, et pour la première fois je n’aurais pas à agir et récolter les informations seules. Elles me seront offertes sur un plateau, et ce sans risquer de se faire repérer. N’est-ce pas magique ? C’est probablement le début d’une belle et longue collaboration. La combinaison des fruits du miroir, de la cartographie, et des vêtements, avec mes pouvoirs hormonaux… J’ai tellement hâte que j’ai dû mal à contenir mon excitation, comme une pucelle à l’idée de son premier baiser. Les Mangemondes n’ont aucune idée de ce qui les attendent.

Je m’installe près de la carte holographique en cours de complétion et je laisse mon Empathie voyager sur l’île pour combler ce qui manque sur la carte : les êtres vivants. Je me rends compte bien vite, et à ma grande surprise, qu’il y a bien plus d’humains que de géants, et que ces derniers ne se comptent qu’en centaines. Le problème viendra-t-il plutôt des humains ? En recoupant la carte, la localisation des êtres vivants, leur niveau de puissance, … J’essaie de deviner où se trouve le grand chef, d’identifier les quartiers et bâtiments particuliers : caserne de la milice, palais, etc…

Une fois toutes les données en main, Marc retourna dans le monde miroir et je camouflai le miroir sous une fine couche de terre : assez épaisse pour qu’on ne voit plus le miroir, pas assez pour m’empêcher de quitter le monde miroir par là. Mon issue de secours était ainsi préparée, il ne me restait plus qu’à me lancer.

Les cheveux châtains de Val sortirent du médaillon tandis que je me dirigeais vers ChâteauGéant. Je lui donnais un petit caillou qu’il posa sur ma tête avec ses cheveux, et pof, l’instant d’après ma tenue avait changé. Je modifiai également mon corps grâce aux hormones en fonction des directives de Val : que je ne sois pas le seul blanc au milieu de noirs, ou le seul blond au milieu de roux par exemple.

Identique à n’importe quel locaux, j’entre par le quartier où je ressentais la plus grande concentration et les plus faibles humains.
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Un bon dirigeant ne montre pas ses faiblesses, qu’il ait peur ou non, qu’il ait le choix ou non, il doit se montrer digne et fort en toute circonstances. En cela, le Mangemonde qui me fait face remplit ses devoirs. Devoirs qui m’incombent également alors que je ne dois rien laisser paraître lorsqu’il dévore la chair humaine : notre probable avenir si j’échoue dans ces négociations. Mais je ne dois pas y penser et réfléchir à mes arguments. La menace ne fonctionne pas avec eux, la force reste la force. Mais il y a quelque chose de plus important chez les peuples qui louent la puissance : l’honneur, la réputation, … l’égo !

« Vous n’avez surtout pas l’air d’un géant !
J’ai été sur Erbaff, vous êtes à peine aussi grand que leurs oiseaux. Sans ces entraves, même moi je pourrais être à votre taille.
Et bientôt la population d’Erbaff va se mettre à grandir davantage encore, ils seront aussi grands que les montagnes les plus hautes ! »


Quand il s’agit d’égo, et surtout de mâles, il est un sujet qui primera toujours sur tous les autres : la taille.

« Bientôt, très bientôt, vous ne serez plus considérés comme des géants, vous serez simplement des humains un peu grand. »


Ce coup d’estoc a-t-il fait mouche ? Gardera-t-il encore sa prestance ? Mais il ne faut pas que la provocation aille trop loin :

« Je peux y remédier. Je peux même vous rendre plus grands que les géants d’Erbaff.
Votre champion peut il en faire autant ?
Kutroshinsky peut il en faire autant ? »


Alors, est ce toujours la force brute seule qui compte ? Il y a plus d’un siècle, le détenteur du fruit des hormones était surnommé le faiseur de miracles. Pourquoi ne pourrais je pas en faire autant ?

« Porter mes couleurs c’est bénéficier de miracles dont vous n’avez jamais osé rêver. »
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巨 人

∆ feat. Reyson D. Anstis ∆


« Fais gaffe à tes paroles si tu veux pas finir à la broche mon gars ! »

Le Chef était visiblement susceptible concernant sa taille. Le fléau que subissait les Mangemonde était pour eux une véritable punition divine. Voir un humain en plaisanter et lui envoyer au visage était à la limite de ce qu'il pouvait supporter. Rouge de colère, il envoya un os encore gras et fumant en plein vers le visage du pirate, lui écorchant légèrement la lèvre inférieure.


« On est des géants, des vrais, LES MANGEMONDE !!! C'est que des petites natures sur Erbaff. »


Les traits rendus bien moins sympathiques du fait de son énervement, le dirigeant de ChâteauGéant fit un signe de tête à son champion. Hochant la tête à travers son heaume, le géant fit approcher ses hommes des sbires de Reyson avant de commencer à leur écraser le crâne de leur grosses mains. L'idée n'était bien sûr pas de les tuer, pas pour le moment, juste de les faire souffrir.


« Porter tes couleurs ? Tu rêves l'avorton ! On a essayé ça avec Kutro, ça a été une hécatombe. Vous les humains n'êtes que des incapables. Des animaux destinés à l'abattoir, rien de plus, rien de moins. »


Le dédain du roitelet était palpable. Le simple fait de se voir négocier avec un humain était une insulte. Pourtant, il ne pouvait pas se fermer totalement à la discussion, pas encore.


« Tout ce que je sais pour le moment c'est que tu menaces les miens, mais pour le reste, que des mots. Pourquoi tu ferais mieux ? »



© ciitroon
    J’ai toujours été prêt à tout dans ma vie, que ce soit pour mon ancien équipage les Saigneurs, pour mon allié et ami Red, pour Izya dont je ne saurais mettre de qualificatif. Et maintenant pour mes propres projets, pour mon but de toujours, je suis prêt à me donner entièrement, jusqu’à ma propre vie en essayant. Mais jamais je n’ai été dans une situation où la vie de mes alliés dépendait de mes choix. C’est pour mon objectif qu’ils sont là, par ma faute qu’ils souffrent à la merci des Mangemondes. Qu’est ce qui est le plus important pour moi ? Mon projet ou leurs vies ? Je n’ai eu aucun mal à rester de marbre lorsque le chef me jeta son os, mais entendre mes camarades crier me perturbe à l’intérieur et m’interroge. Je ne les connais que depuis peu… Mon visage ne montre rien, mais mes pensées se bousculent les unes les autres. Qu’est ce que je dois prioriser ?

    « Des mots ? Vous voulez des actes ? »


    Je montre les entraves en granit marin en levant mes bras. Je dois me reprendre : ils n’ont tué personne et me pose même une question. S’il m’accorde la parole, c’est que j’ai encore une carte à jouer, je peux nous sortir de là. Pourquoi choisir ? Si j’atteins mon but, on s’en sortira tous ! Et je dois avoir vu juste : le chef donne l’ordre de me libérer. En même temps, son fameux champion est juste derrière moi tandis que mes camarades leur servent d’otages. Qu’ont-ils à craindre ? D’une injection, mon corps se met à croître. L’écart entre mes interlocuteurs et moi se creuse, j’atteins les vingt mètres et tout à coup ils ne me semblent plus si grand. Je le suis même davantage que certains.

    « Un humain incapable ? Des animaux pour l’abattoir ? De quoi ai-je l’air à présent ? »


    Un avorton à sa taille ? Je suis un géant. Oh bien plus petits que ceux d’Erbaff, mais ici la moyenne semble plus basse.

    « J’ignore ce que Kutroshinsky vous a offert, mais je ne suis pas lui. Je suis le pirate métamorphe ! Vous voulez voir ce que je peux vous offrir ? »

    Les doigts de mes mains deviennent plus pointues, prêts à faire la même démonstration qu’à Erbaff. Je n’ai besoin que d’un cobaye : le chef ordonne à l’un des Mangemondes autour de s’avancer. Évidemment, il n’allait pas me permettre de toucher à son champion…

    Je jette d’abord un coup d’œil au plafond histoire d’appréhender une potentielle catastrophe, mais il me semble suffisamment haut. C’est étrange comme l’architecture ici est adaptée à des géants deux à trois fois plus grands qu’eux. J’injecte des hormones de croissance à mon cobaye, mais une dose trop petite pour que les effets persistent plus de 30 secondes. Juste assez pour qu’ils puissent admirer un colosse de 60 mètres et avoir envie d’en demander davantage.

    « Personnellement, c’est ça que j’appelle un véritable géant. »

    Pas vous ?
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    ∆ feat. Reyson D. Anstis ∆


    « Eh bien, eh bien, eh bien... Un magicien ? Oui, voilà de quoi tu m'as l'air »

    Véritablement impressionné par cette démonstration, le dirigeant de ChâteauGéant s'était redressé. Admirant le résultant avec des étoiles dans les yeux, il en oublia la débauche de pitance qui lui était destinée. Hochant rapidement la tête de bas en bas, il semblait réellement emballé par ce qu'il venait de voir. Quand son sbire retrouva sa forme normale, il se mit à applaudir.


    « J'adore, oh ça oui, j'adore ! Hahahaha, un vrai géant, y'a pas de doute là dessus. Finalement tu me plais bien mon garçon. »


    Continuant de rire de bon cœur, il fit un signe de la main à son champion, lequel grogna dans son heaume pour seule réponse. Se servant de nouveau de ses chaînes en granit, il entrava les mains du pirate pendant que ses hommes laissaient ses compagnons en paix, bien que toujours captifs.


    « J'achète ! Ton pouvoir nous sera d'une immense utilité. Toi, par contre... »


    Soudain, le rire du Mangemonde devint plus sinistre. Son sourire se changea en un rictus malveillant.


    « Kutroshinsky m'a parlé d'une vieille légende une fois, ça oui, je m'en souviens comme si c'était hier. Il parait qu'on peut voler les pouvoirs d'un fruit du démon. Si on sait s'y prendre. Bah, toutes ces choses là c'est pas mon domaine. Lui en revanche... Va savoir ? Il aura bien son idée sur la question. Oui, il va se montrer utile au final. Druxar, emmène moi ces cloportes au geôles et prévient donc le Dévoreur. »


    Nouveau grognement avant que le champion ne se décide à obéir sans rien dire de plus. Lui et ses hommes tirèrent les prisonniers sans leur faire montre du moindre ménagement. Traînés au sol comme des animaux menés à l'abattoir, ils furent conduits hors de la salle du trône puis menés lentement vers les prisons. Celles-ci étaient putrides, horriblement sales, humides, remplies de moisissure et particulièrement obscures. Un véritable trou à rat digne des pires régimes autoritaires. En riant, les Mangemondes jetèrent les corps attachés des pirates dans la même cellule étroite. Agglutinés les uns sur les autres, ils pouvaient à peine bouger. Les laissant là sous la seule surveillance d'un petit géant à l'air bête qui passait son temps à renifler, ils prirent congé des captifs.



    © ciitroon
      « Vous allez bien ? Pas d’inquiétude, c’est pas possible de voler les fruits du démon. »
      « Sûr ? Ils réapparaissent bien à la mort du maudit. »
      « J’ai entendu parler d’un Empereur qui volait les fruits des gens il y a un siècle de ça. »
      « Donc c’est possible ? »
      « Disons que c’est possible que ce soit possible. »
      « Mettons que ça l’est. Qu’est ce qu’on fait ? »
      « Kutroshinsky doit être aux prises avec Izya sur Eoleria en ce moment. C’est peu probable qu’il vienne lui-même. »
      « Et même s’il envoie quelqu’un, ça mettra du temps. »
      « Le fléau hormonal frappera avant ! »
      « Mais s’il lui explique le possible procédé par denden ? »
      « Ils n’échapperont pas au fléau, vous savez combien de temps il m’a fallu pour maîtriser ces pouvoirs ? »
      « Oui mais ils sont suffisamment bêtes pour le faire quand même. »
      « Hum… il faut trouver une issue dans ce cas. Alice ? »
      « Je ne peux rien faire avec ça. »
      « Comment on les lui retire ? »
      « Je pourrais les briser, mais je suis trop faible avec les miennes… »
      « Et si elles t’affaiblissaient moins ? »
      « Ce serait… possiblement possible ? »

      L’avantage d’être dans une cellule étroite et sombre, c’est que si on gigote et se touche, c’est moins flagrant. Val, qui est le plus proche de moi, tente de glisser ses doigts dans mes entraves pour réduire la surface de contact entre le granit marin et moi, mais l’effort et la douleur se lisent sur son visage. Nous sommes tous des maudits dans cette cellule, tous affaiblis, et les geôliers ont bien serré les chaînes. Le vieux Marc, de part sa position, ne put aider qu’avec ses dents, et Alice avec ses pieds. Ils cherchaient à enfoncer leurs membres le plus loin possible sous les mailles, malgré l’étreinte qui leur arrachait la peau et qu’ils devaient étouffer pour ne pas alerter le garde. Une manœuvre qui prit du temps : atteindre la position dans laquelle il y aurait le plus de chance de réussir. D’après la trajectoire étrange des doigts de Val, je crois qu’il en a brisé deux dans son cheminement. Je ne peux voir les dents de Marc, mais je vois l’effort à ses tempes qui se gonflent. Sa tête cache les pieds d’Alice mais je ressens un liquide chaud glisser sur ma peau : du sang. Ils se donnent tous au maximum malgré la douleur. Ils savent que c’est notre seule porte de sortie.

      Ils tirent de toutes leurs forces et le plus discrètement possible. Marc étant allongé sur moi, le garde ne peut voir ce qui se passe. Je sens l’étreinte relâcher doucement ses crocs. Encore un peu plus, juste un peu… Je me concentre pour enrober mes bras du noir de l’armement tandis que mes forces me reviennent. Dans un ultime effort commun, les mailles des chaînes se brisent et volent en éclat, alertant aussitôt le garde. Je bondis sur les fers d’Alice pour la libérer pendant que le géant déverrouille la porte de la cellule pour nous mater. Il l’ouvre et arme son bras sans aucune retenu. Son gourdin s’abat sur nous alors qu’on tombe et disparait dans le sol. Le sol ? Pas vraiment : l’arme du géant poursuit sa route et fait voler un miroir en éclat. Alice, aussitôt libérée, a formé un miroir sous le groupe et nous a fait passé dans le monde miroir.

      « Sauvés ! »
      « Ma main !! J’arrive plus à la bouger ! »
      « Attends, je vous retire les chaînes et j’apaise vos douleurs. »
      « Tu crois que ça va suffire ? Ça fait un mal de… ah… je sens plus rien. »
      « Ne sous estime jamais les hormones de Reyson. »
      « Bon, les gars, je voulais vous remercier et m’excuser de vous avoir mis dans cette situation. »
      « Ça peut arriver. On s’en est sorti. »
      « Vrai. Mais qu’est ce qu’on fait maintenant ? Les Mangemondes veulent ton pouvoir et on a pas rempli notre part du contrat avec Erbaff. »
      « Plouf nous attend à la plage et avec les nombreux miroirs de la cité on devrait pouvoir s’enfuir sans souci, mais est ce que c’est ce qu’on doit faire ? »
      « Qu’est ce qu’on peut faire d’autre ? »
      « Attendre. »
      « Comment ça ? »
      « Attendons que le fléau hormonal frappe. »
      « Ils ne pourront alors plus attendre de voler et maîtriser ton pouvoir, ils devront compter sur ta collaboration. »
      « Et ils n’ont plus d’otage pour faire pression. »
      « Mais qu’est ce qui l’empêcherait de réitérer son plan après que tu aies guéri le fléau ? »
      « Il nous faut un moyen de s’assurer sa loyauté… »
      « J’ai une idée. »

      Dans la cellule où nous étions enfermé, un plateau avec plusieurs fioles apparût au sol, près des morceaux de miroir, accompagné d’un message : « En guise de bonne foi de ma part, voici plusieurs échantillons d’une potion qui peut vous faire grandir pendant 1 heure.
      Je reviendrai dans trois jours. Ma proposition tient toujours : abandonnez Kutroshinsky, jurez moi fidélité sur votre honneur et portez mes couleurs. Je ferais alors de vous de véritables géants, plus grands mêmes que vos cousins d’Erbaff.
      Comme vous pouvez le constater : vous ne pouvez me capturer. Et même si vous parvenez par je ne sais quel miracle à me voler mes pouvoirs, vous ne saurez pas les maîtriser pour autant.
      Peut être aurez vous besoin d’un avorton coopératif dans trois jours ? »

      Les fameuses potions ont bien l’effet décrit dans le message, mais ils ont également le même effet qu’une drogue, donnant envie d’une autre dose ensuite, et elles sont accompagnées de parathormones pour augmenter le calcium dans le sang en le ponctionnant sur les os… A force d’en prendre, la personne en deviendra de plus en plus addictif et son squelette semblable à du verre fragile. Peut être qu’après un premier test sur un cobaye, où il n’observera que l’effet décrit et que le géant se sentait bien, le chef en prendra pour lui-même ou son champion, et qu’ils en consommeront suffisamment pour être à ma merci ? Peut être.

      « Et s’ils mordent pas ? »
      « Alors le fléau les fauchera suffisamment pour qu’ils ne soient plus une menace pour Erbaff et nous aurons tout de même accompli notre part. »
      « Juste. »
      « Préparez ma doublure pour le second entretien. »
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      ∆ feat. Reyson D. Anstis ∆


      Le moins que l’on puisse dire, c’était que Reyson n’avait pas prononcé ses paroles en l’air. La fléau qu’il brandissait comme menace n’avait pas été une partie de plaisir. Nombre d’humains étaient déjà morts ou agonisants. Les Mangemondes, bien que plus résistants, n’étaient pas épargnés non plus. La situation s’était rapidement transformée en une hécatombe. Soupçonneux et précautionneux, le chef de l’île avait pris ses dispositions pour limiter les contacts avec l’extérieur, et il avait eu bien raison de le faire. Son palais n’avait que peu été touché, mais pas épargné pour autant.


      Fou de rage suite à la disparition du pirate métamorphe, il avait jeté ses présents contre un mur. Non seulement il était furieux, mais il ne faisait pas confiance au forban. Vu ce qu’il avait déjà fait, le chef pensait qu’il devait s’agir d’une sorte de poison perfide, une fois encore.


      Quand Reyson revint, ses traits juxtaposés sur ceux d’une simple mouette, il ne manqua pas d’être conduit de nouveau devant le dirigeant des lieux. Les traits tirés et l’air agacé, le géant reçut donc le pirate sans grande joie, mais pas dans la salle du trône cette fois là. À cette immense pièce trop formelle, il lui préféra celle où il passait son temps à festoyer. Dans cette longue salle de banquet, une immense table en granit s’étendait à perte de vue. Nombre de mets étaient dressés, et il n’était pas toujours très difficile de deviner qu’il s’agissait très souvent de viande humaine. Ce n’était cependant pas tout, d’absurdes quantités de vin et d’hydromel étaient prêtes à couler à flots.



      « Te revoilà, maudit cloporte. Tes menaces étaient fondées. Les miens tombent comme des mouches, et je ne te parle même pas de tes congénères. Un véritable massacre, tu es décidément un horrible bourreau. »


      Approchant lentement de son chef, le Mangemonde en armure lui chuchota à l’oreille quelques secondes.


      « Ah tiens ? Eh bah, t’es malin petit bout d’humain. Druxar me dit que mes yeux me trompent. Pas mal. T’as de la suite dans les idées, y’a pas à dire. Bon, si tu veux bien cesser tes enfantillages et nous rejoindre, un repas nous attend. Je sais pas comment ça se passe chez vous, mais ici, quand on négocie, c’est en mangeant. »



      © ciitroon
        « Ça fonctionne ? »
        « Regarde : ils guident la Reyouette dans le palais. »
        « La Reyouette ? »
        « La mouette sur laquelle j’ai réfléchi l’image de Reyson. Reyouette. »
        « … »
        « En tout cas ils n’ont pas attaqué ta doublure sitôt qu’ils l’ont vue. »
        « C’est vrai, mais ça ne prouve pas l’absence de piège ni leur bonne foi. »
        « Ce n’est pas la salle du trône. On dirait un banquet ? »
        « Je vois quelques gardes autour, le champion qu’on a combattu et leur chef. Leur taille est normale, impossible de savoir s’ils ont consommé tes fioles. »
        « Il te considère comme un bourreau. Le fléau a fait son effet. »
        « Il te traite aussi de cloporte et d’enfant. »
        « Et de malin ! »
        « Rassure moi Reyson, tu ne vas pas manger ce qu’il propose ? »
        « Apportez moi une table. »

        La petite bande put observer ce qui se passait à travers le médaillon miroir porté par la doublure. Et c’est d’ailleurs à travers ce médaillon que la voix de Reyson retentit dans la salle du banquet.

        « Moue… Reyouette, place toi derrière la chaise. »

        La doublure s’exécuta en poussant le cri signature de son espèce. De là, un cheveux noir sortit du médaillon et forma un grand ovale sur la chaise. Enfin, un miroir apparût à l’intérieur duquel on pouvait me voir attablé, un verre de rhum posé sur le côté et un ragoût de mouette dans l’assiette – mon plat préféré.

        « Bonjour chef… je me rends compte que je ne connais pas votre nom, mais il m’importe peu.
        J’ai essayé la courtoisie et vos méthodes, maintenant on va faire à ma façon.
        Voici ma proposition : jurez moi une allégeance absolue. J’arrêterai alors le fléau qui fauche votre île et je vous redonnerai votre grandeur perdue : la taille des véritables géants que je renouvellerais chaque année.
        Et pour que vous ne perdiez pas totalement la face, je ferai en sorte que les Mangemondes soient en moyenne plus grands que vos cousins d’Erbaff. Car oui, j’entretiens un partenariat similaire avec eux, j’espère que vous saurez enterrer la hache de guerre.
        C’est à prendre ou à laisser. »


        Ici, ils ne peuvent pas m'atteindre et le temps joue en ma faveur. Je n'ai plus qu'à attendre qu'ils ploient le genou.
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        ∆ feat. Reyson D. Anstis ∆


        « Alors je laisse. Tout ça finira bien par se tasser, et c'est pas les humains qui manquent à travers les mers, on refera notre vivier. »


        Se raclant la gorge, le chef cracha par terre à la simple évocation par le pirate métamorphe de ses cousins éloignés d'Erbaff. Très visiblement agacé, il fit craquer entre ses grosses mains un tibia trop peu résistant pour un monstre de cet acabit.


        « Je ne traite pas avec les lâches. Tu veux négocier, tu viens en personne sale pleutre. »


        Restant fermement campé sur ses positions, la roitelet grassouillet se servit un verre de vin tellement grand qu'il passait presque pour une baignoire pour humain.    



        © ciitroon
          « Oh mais il n’est plus question de négociation. Ça ne se terminera qu’à la fin de votre peuple ou à votre abdiquation. »

          Pense-t-il réellement que les Mangemondes vont s’en sortir ? Que seuls les humains y perdront la vie ? Soit ils se rallient à la cause, soit ils se rallient à la mort.

          « Peut être aurez-vous changé d’avis dans une heure. »

          L’instant suivant le miroir ne reflétait plus que la salle à manger de ChâteauGéant, sans aucun lien visible avec le monde miroir.

          « Qu’allons-nous… »
          « Regardez dans tous les miroirs du palais et comparez ce que vous voyez avec la carte qu’a Marc, trouvez moi le point d’accès le plus près de leur réserve de nourriture.
          Ensuite dégottez moi les appartements royaux, c’est là qu’aura lieu notre prochain échange.
          Et enfin, alertez moi à chaque fois que vous en voyez un qui est encore en bonne santé. Ils contribueront à propager le fléau au sein du palais. »

          « Bien capitaine »

          Répondirent-ils tous à l’unisson.

          Cette fois nous jouerons la carte du risque zéro. Bien sûr il est peu probable qu’un miroir donne directement sur le garde manger, mais il suffit du point le plus près. A partir de là des cheveux d’Alice pouvent s’étendre dans la réalité et avancer au plus loin avant de former un minuscule miroir de quelques millimètres seulement, créant le nouveau point de départ pour une nouvelle mèche qui poursuit sa route, inlassablement, jusqu’à croiser des êtres vivants ou des mets. Et alors c’est un autre cheveux qui vient dans le palais, un qui peut injecter des hormones et ainsi continuer le grand œuvre du fléau.

          Heureusement, ou malheureusement – l’avenir nous le dira – je ne vois pas le résultat de mes propres yeux, ces corps qui s’empilent au fur et à mesure du temps qui passe et je suis bien trop pris dans mon obsession de réussir mon tout premier projet solo pour songer au fait que je suis en train de condamner la totalité d’une population innocente dont l’unique tort est de ne pas avoir accepté de se ranger sous mes ordres.

          Non, je n’y pense pas le moins du monde. Tout ce qui m’importe est qu’il cède ! Et il cédera. Oh il cédera…

          L’heure écoulée, c’est dans les appartements royaux qu’une Reyouette a fait son apparition, aux côtés d’un nouveau miroir où je suis toujours attablé à me délecter du même rhum que tout à l’heure, comme si rien n’avait changé. Et pourtant : je donne le rythme et même le lieu. C’est moi qui mène la danse. Il ne reste qu’à attendre mon interlocuteur et voir s’il s’est assagi. Ou s’il lui faut un temps de réflexion supplémentaire ?
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          ∆ feat. Reyson D. Anstis ∆


          Le simple fait de penser que le chef des Mangemonde se trouverait dans sa chambre était bien mal connaître les gens de ce peuple. Toujours à table, le géant n’en était même pas à la moitié de son repas. Se baffrer était une chose sacrée chez lui. Faisant choux blanc, Reyson pourrait plus tard retourner là d’où il venait. Malheureusement, l’entêtement du chef, mais aussi et surtout sa cupidité, l’empêchait d’écouter ce que le pirate avait à dire. Faisant la sourde oreille, il se moquait bien des conséquences, balayant les conséquences du fléau d’un revers de la main, comme si de rien était. Les heures passèrent, rapidement suivies par les jours, mais rien ne changeait en dehors du nombre de morts qui ne faisait que grimper en flèche. Malgré lui, le pirate métamorphe était en train de devenir un véritable boucher.


          Ce qui pouvait passer pour de la fierté mal placée de la part du chef des Mangemondes était en réalité plus compliqué. Loin de rester inactif, il avait pris soin de passer un coup d’escargophone à son allié: Kutroshinsky. Dorénavant empereur, l’ancien corsaire n’avait pas le temps de venir en personne car il était occupé par la Reine Céleste sur Eoleria, mais il accepta de dépêcher sa plus puissante et efficace nakama. C’est ainsi que la célèbre pirate et chimiste Lili Heinsengirl débarqua sur ChâteauGéant. Quand elle posa les pieds sur l’île, elle constata avec dépit l’état désastreux de la population locale. Les pouvoirs du Métamorphe étaient terrifiants, cela ne faisait aucun doute. Escortée au palais par le chef de la garde, elle put rapidement s’entretenir avec le chef, qui semblait, visiblement, commencer à tomber malade lui aussi. Installant son laboratoire de fortune dans les cachots, bien loin des fenêtres, elle ne tarda pas à entamer son travail. Reyson était redoutable avec ses hormones, cela ne faisait aucun doute, mais tout cela n’était jamais que de la chimie, domaine que Lili connaissait mieux que personne. Prenant ses précautions, elle fit collecter plusieurs échantillons pour débuter ses recherches mais n’oublia pas d’injecter au chef un cocktails de médicament de son cru pour l'aider à mieux tenir.



          « Bon, bon, bon, j'ai du travail, restez sage. Druxar, pas de nouvelles du capitaine Anstis ?

          - Non. Il se cache dans les miroirs.

          - Tiens donc ? Marrant. L'un de ses hommes a donc mis la main sur un fruit particulièrement puissant. Bon à savoir.

          - Rien qu'un lâche.

          - Hum. Et donc c'est toi qui l'a battu ?

          - Oui.

          - Pas mal. Pas mal du tout. »



          Quittant la pièce, la chimiste retourna travailler. Dorénavant, avec cette nouvelle donnée dans l'équation, il semblait que le statut quo venait d'être rompu. Reyson pourrait-il se permettre de prendre le risque de la laisser trouver un remède ?
           



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            « Tu vois ce que je vois ? »
            « Oui… »
            « Est-ce qu’on devrait lui dire ? »
            « Il s’agit de ses pouvoirs, il doit bien savoir ce que ça fait. C’est donc qu’il le veut. »
            « Je le savais puissant, mais je ne l’imaginais pas au point d’anéantir une population avec si peu d’effort ? »
            « C’est qu’on suit la bonne personne. Rappelle toi qu’un puissant peut tout autant provoquer des bouleversements juste que mauvais. Dans tous les cas il vaut mieux être de son côté, et ses intentions sont louables. »
            « Mais ses actes… ? »
            « S’il agit ainsi, il doit avoir ses raisons. Peut-être les connaitrons-nous bientôt ? »

            Ses raisons ? Les miennes ? Un puissant n’est pas exempt de folie et mon esprit a subi bien des épreuves, m’a joué trop de tours et a été brisé par trop de fois déjà. Red et Izya le savent bien : je suis capable de tout, du meilleur comme du pire. Surtout du pire. ChâteauGéant en est un parfait exemple.



            « Une humaine a rejoint le palais. Elle ne ressemble pas aux locaux mais sa tête ne me dit rien, elle ne doit pas être très réputée. »
            « Et le chef ? »
            « Il ne donne aucun signe montrant qu’il ait changé d’avis. »
            « J’aurais préféré m’en faire un allié… On a suffisamment attendu. Nous frapperons un grand coup cette nuit. Vous avez bien repéré ses quartiers et vers quelle heure il s’assoupit ? »
            « On l’a surveillé du mieux qu’on pouvait ces derniers jours oui. Tu es sûr de toi ? »
            « Je le suis. »



            « Nous aurions pu accomplir bien des choses ensemble si nous étions dans le même camp… »

            Au beau milieu de la nuit, dans les ténèbres, par le procédé habituel des petits bouts de miroirs qui cheminent avec les cheveux d’Alice, je suis parvenu jusqu’à lui, dans cette pièce immense encore plus démesurée que les géants eux-mêmes. Devant les portes de ces appartements royaux, les Mangemondes censés monter la garde dorment de leur sommeil le plus profond suite à l'injection que je leur ai faite. Debout, adossé à un miroir à ma taille dont je suis sorti, j'observe silencieusement le chef de ChâteauGéant tandis que mon empathie me signale que Druxar s'est mis en mouvement. Il a repéré le danger qui menace son suzerain malgré le fait qu'il dormait probablement lui-même. C'est véritablement un puissant guerrier, et loyal qui plus est. Mais il ne sera pas assez rapide malheureusement.

            « Ta fierté t'aura coûté beaucoup : ton peuple, ta vie, ton héritage... Que vas-tu laisser ? Si seulement tu avais accepté ma proposition : les Mangemondes auraient pu être les plus géants des géants. J'aurais même pu stimuler votre matière grise qui semble tant te faire défaut.
            Mais avec des si, on change bien des choses. J'aurais moi aussi changé bien des pans de ma propre histoire. Je crois encore en une alliance possible : sinon le fléau se serait propagé bien plus rapidement. Mais pas avec toi, j'ai bien compris que tu es obstacle insurmontable à ce projet. Nos égos sont incompatibles, tu vas donc devoir être remplacé...  »


            Mes mots sont un murmure, un souffle quasi inaudible, exprimés plus pour moi-même que pour lui.

            « J'espère profondément que ton successeur sera plus malin, ou je ne donne pas cher des derniers survivants. »

            Alors, d'un bond je prends de la hauteur avant de fendre vers sa gorge avec ma dague enrobée de haki, les bras dopés aux hormones et avec toute ma force.

            Lorsque Druxar ouvre les portes si violemment qu'elles sortent de leurs gonds, Reyson n'est déjà plus là. La tête chaude du chef de ChâteauGéant roule encore sur le sol tandis que sur le miroir placé au centre de la chambre apparaissent ces mots :

            « Vous avez jusqu'à l'aurore pour changer d'avis. Placez ce miroir sur le trône, rassemblez les survivants dans la grande salle et ployez le genou. Dans le cas contraire, mon fléau fauchera les derniers rescapés.»

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            Hurlant de rage, Druxar laissa sa colère éclater en détruisant une bonne partie du mobilier de la chambre à coucher du chef avant de se calmer. La nouvelle bouleversa une partie des Mangemondes, mais certains y virent au contraire l'occasion de tirer leur épingle du jeu. La nuit continua donc mais ne fut pas particulièrement calme. Nombre d'individus cherchèrent à prendre le pouvoir et la plupart y perdirent la vie. Druxar, au petit matin, ressortit comme le grand vainqueur, et le nouveau chef incontesté de l'île. Son armure couverte de sang, il jeta le miroir devant le trône de la salle principale. Quelques gardes étaient présents dans la pièce, mais ils n'étaient qu'une poignée. Ils représentaient les plus fidèles serviteurs du géant. À ses côtés, le guerrier avait également avec lui la charmante Lili. Toute pimpante, elle affichait un large sourire. Quand le miroir afficha le pirate qui se terrait toujours dans l'autre monde, le nouveau chef ne lui laissa pas l'occasion de parler.


            « Reste donc caché comme un lâche, je refuse ton offre. »


            Les bras croisés contre sa poitrine, la chimiste au service de Kutroshinsky se mit à rire avec une certaine effronterie.


            « Vu votre réputation, je m'attendais à mieux, capitaine Anstis. Un fléau ? Franchement, peu de sérieux. Mes braves compagnons n'ont plus besoin de vous. »


            Écartant les bras, elle pointa plusieurs géants du menton comme pour montrer à quel point ils allaient bien. Bluff ou réalité, elle semblait en, train de faire comprendre au Métamorphe qu'elle était parvenue à rendre la maladie inopérante. Levant l'index, elle fit mine d'avoir oublié quelque chose.


            « Maintenant que j'y pense, j'ai un message du Dévoreur. En substance: fais attention à tes arrières le moustachu. Tout ce qui vient de se passer ici était une déclaration de guerre, j'espère que vous êtes prêt à en assumer les conséquences. »


            Rien d'autre. Toujours aussi peu respectueuse, la pirate sortit une petite boite en acier de sa poche et en sortit quelques bonbons qu'elle avala goûlument.
             



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              Druxar semble avoir pris les commandes mais son avis tranché sur ma personne empêche toute négociation. De toute façon, nous n’en sommes plus là, les ultimatums ont déjà été annoncés. C’est dommage. Vraiment dommage… On ne peut plus reculer.

              Je ne peux plus reculer.

              Je laisse échapper un soupir en écoutant les provocations de la femme inconnue. Elle est donc liée à Kutroshinsky. Pour toute réponse, je fis mine de regarder derrière moi avant de reporter mon regard sur la dame et de hausser les épaules nonchalamment. Surveiller mes arrières ? Il n’y a rien derrière moi et si Kutroshinsky n’est pas venu lui-même, c’est qu’il est probablement déjà occupé avec Izya ou ailleurs, sur une affaire plus importante que ses propres alliés Mangemondes. Vois Druxar, vois l’importance que vous revêtez pour le Dévoreur. Vois toute l’aide qu’il a pu vous apporter lorsque ton peuple agonise et tires en tes propres conclusions. Moi, lâche que je suis, j’en ai terminé ici. Mais pas avant un ultime au revoir.

              Je me lève alors de ma chaise et fais glisser ma dague dans ma main directrice. Les Mangemondes se mettent aussitôt sur leur garde sauf Druxar qui est déjà prêt et qui n’a qu’une envie : m’affronter pour faire voler ma tête comme j’ai fait voler celle de son chef. Et il le sait pertinemment : il l’emporterait.

              Comme il l’a déjà emporté.

              Je m’avance pourtant vers le miroir d’un pas décidé, le regard fixé sur le champion Mangemonde, et je disparais soudainement. Aussitôt Druxar fait volteface, sentant ma présence. Mais je ne suis pas là, ni dans cette pièce ni dans ce grand château, et tandis qu’il le comprend une lame d’air fait déjà route vers le sommet de ChâteauGéant pour faire s’écrouler le toit sur les personnes rassemblées dans la salle du trône.

              « Est-ce vraiment nécessaire ? » me demande Val tandis que je retrouve ma taille initiale, là sur le toit d’une maison adjacente au palais, mais je l’ignore en ordonnant :

              « Lâchez-les. »

              L’instant suivant, du grand miroir derrière, une nuée de mouettes commence à s’échapper du Monde Miroir pour gagner le berceau des Mangemondes. Mes cheveux croissent et touchent chacun des milles volatiles qui prennent leur dernier envol chargé de deux lots d’hormones qui n’étaient pas présents dans le fléau initial : d’abord un cocktail suffisamment puissant pour provoquer rapidement des infarctus, et ensuite un mélange capable de transformer n’importe quel bodybuilder en une personne rachitique. Les faibles mourront et les forts faibliront.

              « Rentrons. »

              Je suis descendu dans la rue, suivi par Alice, Val et Marc avant d’entamer une marche funèbre dans la cité de ChâteauGéant. L’odeur de la mort emplissait l’air depuis quelques jours déjà, des corbeaux se repaissaient de ce qui devait être le repas des Mangemondes, des cadavres gisaient ça et là. Le bruit des chutes rythment notre départ : un humain, un géant, ou une mouette qui rend l’âme, car elles ne sont pas immunisées aux hormones excrétées par leurs voisines. Je protège mes camarades et moi en nous injectant les hormones antagonistes et on poursuit religieusement notre marche dans un silence de plus en plus pesant à force d’observer le nouvel état de cette île. A chaque pas, l’air semble plus glacial. Je ne remarque pas mes alliés s’éloigner un peu : le froid émane de ma personne. Plus j’avance, plus j’enterre mes émotions au fond de moi. Plus je me renferme, plus j’avance. Des cristaux de glace apparaissent sur les vitres des fenêtres où je passe. Cet enfer hivernal que j’ai subi à Impel Down, j’ai fini par l’incarner : une prison intérieure dans un décor glacial. Et ce Buster Call contre lequel je lutte, j’en suis devenu un.

              Alors que l’on monte sur Plouf, mon monstre marin domestiqué, Alice et moi regardions l’horizon devant nous. Mais Marc et Val observaient l’île que nous venions de laisser.

              « Tu vois ce que je vois ? »
              « Oui, je le vois… »

              Alors que les petits points dans le ciel représentés par les mouettes tombaient un à un, une page sombre de l’histoire venait de s’écrire. Si la Malletaille était jusqu’à lors le plus grand fléau des Mangemondes, il en est à présent un autre.

              Et il porte mon nom.

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              De son imposante stature, le nouveau chef des Mangemonde observa les débris du toit chuter. Dégainant son immense épée, il les balaya d'une puissante lame d'air qui les pulvérisa en une multitude de petits morceaux trop peu dangereux pour blesser les géants rassemblés. Surprise, Lili sursauta mais n'eut aucun mal à esquiver les gravas qui lui tombaient dessus. Sifflant d'une manière faussement impressionnée, la chimiste ne put s'empêcher de laisser échapper un petit rire.

              « Rien que ça ? Que c'est puéril. »


              Ne prenant pas le temps de répondre, Druxar soupira derrière son heaume en n'accordant qu'un regard à Lili. Bien vite, il apprit que des mouettes avaient été relâchées sur l'île par le pirate Métamorphe. Son épée toujours à la main, il se rua donc avec ses gardes pour s'occuper du problème en personne. Les oiseaux ne firent pas long feu, mais ils ne manquèrent pas de contaminer beaucoup de monde. Du fléau, les humains étaient les victimes principales. Bien des géants avaient été touchés, c'était évident, mais le ratio était bien plus grand en ce qui concernait les esclaves. Le passage de Reyson sur l'île avait été une véritable hécatombe dont ChâteauGéant n'était pas prêt de se remettre de si tôt.
               



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