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Un moineau au pays des artificiers

Un moineau au pays des artificiers



L'épéiste se tenait sur le ponton de la navette. Comme à son habitude, il avait payé sa traversée en assurant la protection du navire et de ses occupants, contre les forbans et autres criminels de cette mer. Alors que le navire bravait les dernières vagues, en direction du port, Hayato admirait l'architecture locale. L'enceinte fortifiée s'étendait en un arc de cercle, surmontée d'une tour en pierre ; elle marquait l'entrée de Koneashima, une île à la réputation explosive à plus d'un titre. Outre les volcans qui avaient ravagé les terres, les locaux avaient réussi à dompter une poudre particulièrement intéressante, tant à des usages commerciaux et récréatifs, que militaires. C'était d'ailleurs pour cette raison que le futur criminel entrait à présent dans la baie : se renseigner sur les propriétés de cette technologie lui semblait nécessaire.

Après avoir remercié le capitaine pour le trajet, le vagabond s'aventura sur la terre ferme. Bien vite, il fut émerveillé devant les multiples particularités locales. Des paysages à couper le souffle, mêlant une nature sauvage et la main de l'homme, tentant de la domestiquer, s'étendaient sous ses yeux. La flore luxuriante jouxtait les montagnes escarpées, mais aussi les terrasses artificielles où poussaient des maisons au style architecturale fin et coloré. De multiples vendeurs à sa sauvette, autant d'attrape-touristes, proposaient des modèles de feux d'artifices tous plus exotiques et spectaculaires les uns que les autres, afin d'attirer l’œil du chaland. Passant son chemin, l'épéiste leur signifia par gestes qu'il était sans le sou, ce qui eut pour mérite immédiat de les pousser vers un autre quidam à escroquer.

Soudain, le bretteur aperçut une patrouille de marines en uniformes. Il lui semblait pourtant que, selon les rumeurs qu'il avait pu glaner, l'île était dirigée par plusieurs familles indépendantes du gouvernement mondial. Se serait-il fourvoyé ? Il s'approcha d'un marchand de fruits et légumes et s'aventura à le questionner sur le sujet.


- Ah, ça ! répondit-il d'un air soucieux. Y'a eu du mouvement cette année, jeune homme. On a été pas mal secoués, ces derniers temps. J'vais tout te raconter...


Intarissable une fois lancé, le sexagénaire lui narra la visite du dragon céleste, l'attentat sur sa personne imputé à la famille Akitsu et l’exécution de leur seigneur, en réponse immédiate. Pour faire bonne mesure, le gouvernement mondial avait envoyé un émissaire imposer sa régence sur l'île, peu de temps après. Les rumeurs allaient évidemment bon train, à ce propos. Il n'était pas expert en politique, mais du peu qu'Hayato connaissait des intrigues, l’enchaînement semblait trop bien huilé pour être une simple coïncidence. D'autant plus si on considérait l'importance de la fameuse Grixendre. Le gouvernement mondial se serait-il payé le culot d'une ingérence sur cette île d'une manière si flamboyante ? Cela semblait peu probable, si la vie du dragon céleste avait réellement été mise en danger. Mais s'il n'avait été question que d'un coup de théâtre et d'un concours de « malheureuses circonstances »... Oui, la manœuvre était possible. Tout du moins le pensait-il.


- Je vous remercie, monsieur, lui lança Hayato.


Il eut beau chercher dans ses poches, il ne trouva aucun pauvre Berry pour lui acheter quoi que fut. Dépité, il s'inclina et s'en alla la tête basse, en soupirant. La vie qu'il s'imposait depuis maintenant cinq ans portait ses fruits. Il était plus vif d'esprit, plus mûr et son corps s'était endurci. Malgré tout, il n'en était pas encore à la moitié de son chemin, l'épéiste le sentait. Il avait tant à découvrir, à apprendre et à maîtriser, que la masse de savoirs et d'expériences à acquérir lui donnait parfois le tournis. Mais, un pied après l'autre, avancer demeurait possible. C'était ainsi qu'il concevait sa vie, pour l'heure. Des éclats de voix le tirèrent de sa réflexion. Un marchand de breloques se querellait avec une jeune femme aux cheveux noirs de jais. Cette dernière n'avait pas sa langue dans sa poche :


- À ce prix là, c'est du vol. Et je m'y connais en voleurs ! Faites-moi un prix, avant que je ne vous livre à la marine.
- Que... C'est du racket ! s'empourpra le marchand.
- Ça s'appelle négocier à la dure, vendeur du dimanche ! Je vous en offre dix mille Berrys.
- Mais... C'est à peine la moitié du prix !
- Vous avez raison, c'est encore trop cher... Cinq mille Berrys.
- Mademoiselle, vous allez me ruiner...
- Oh ! Tiens ! Une patrouille de la marine ! Je suis certaine qu'ils seraient très intéressés par la teneur de votre stock.
- Huit mille Berrys ! C'est à prendre ou...
- Okaaaaaay, déclara soudain la jeune femme d'une voix guillerrette.


En un instant, elle déposa la somme dans la main du marchand, avant de s'emparer d'un petit œuf doré, source de tout ce remue-ménage. Quelques secondes plus tard, elle flânait de nouveau d'étal en étal, sa petite acquisition bien à l'abri dans une des nombreuses poches de son habit noir et rouge. Une capuche écarlate lui couvrait une bonne partie de la tête, une bande de tissu noir dissimulait la partie basse de son visage, mettant encore plus en valeur ses yeux si particuliers. C'était d'ailleurs là le point le plus marquant de son anatomie. Hayato avait tiqué, en apercevant les iris rouges de la jeune femme, avant de reprendre contenance. Cette dernière recommença à « négocier à la dure » plusieurs fois, arrachant à prix cassés de multiples breloques dorées, pierres d'allure semi-précieuse ou livres écornés datant d'un autre temps. Ses choix se portaient systématiquement sur des objets rares, ou qui semblaient receler un tant soit peu de valeur, à un prix inférieur à la dite valeur estimée.


*Elle est douée... et sans pitié.*, comprit bien vite Hayato.


Intrigué, le vagabond se rapprocha, alors qu'elle s'octroyait le luxe d'acheter un objet au dixième du prix annoncé, suite à la découverte d'un défaut, qu'elle avait probablement inventé de toute pièce pour faire céder le vendeur. L'épéiste sourit, avant de se racler la gorge. La jeune femme tourna un regard étonné vers lui, puis le détailla des pieds à la tête. Avant qu'il ne puisse ouvrir la bouche, elle le prit de vitesse :


- Vous avez l'air d'un clodo.
- Et vous avez l'air observatrice, répliqua immédiatement le bretteur.


Un flottement étrange s'installa sur la place du marché, suite à cet échange surréaliste. Soudain, ils se mirent tout deux à pouffer en même temps, devant leurs bêtises respectives. La négociatrice leva les mains en signe de paix, avant de reprendre d'un ton apaisé :


- Pardon. J'étais tellement prise dans le jeu que c'est sorti tout seul. Je ne m'attendais pas à ce genre de réponse, par contre ! Vous êtes un original, vous !
- On me le dit souvent, abonda Hayato en s'exclaffant. Je m'appelle Hayato. Vous êtes plutôt douée, comme négociatrice.
- On me le dit souvent, répliqua la jeune femme d'un air espiègle. Moi c'est Katrina. Vous... vous êtes pas vraiment un clochard, je me trompe ?
- Non, je suis un vagabond.
- Ah oui ! se moqua-t-elle de nouveau. Toutes mes excuses ! C'est vrai que ce n'est pas du tout la même chose !


Hayato sourit à s'en faire plisser les yeux. Cette discussion prenait une tournure tout à fait inattendue. Sans se départir de son calme habituel, il reprit la parole d'une voix paisible :


- Un mendiant est généralement sédentaire et ne poursuit d'autre but que de remplir sa bourse et son ventre. Un vagabond parcourt le monde en quête d'un idéal, ce qui l'empêche fréquemment d'amasser fortune.
- Je... Je n'y avais jamais pensé, avoua Katrina.


La jeune femme sembla le regarder d'un autre œil, interdite devant la discordance entre l'apparence d'Hayato et le contenu de sa pensée. Ce n'était pas la première fois qu'on lui faisait la réflexion ou, tout du moins, qu'il pouvait suspecter son interlocuteur d'entretenir pareille pensée. Katrina ouvrit la bouche de nouveau, un sourire aux lèvres, avant que son expression ne change du tout au tout, lorsque son regard glissa derrière l'épéiste. Ce dernier se retourna pour apercevoir, au loin, une bande d'hommes à l'aspect patibulaire, qui ricanait en voyant la patrouille de la marine disparaître. Suite à un geste de celui qui devait être le chef, la petite troupe partit dans la direction opposée à la leur.


- Ce fut un plaisir, Hayato, déclara Katrina avant de s'éloigner dans leur direction.
- Vous les connaissez ? tenta l'épéiste.
- Merci pour la discussion, mais j'ai à faire.


Sans un mot de plus, la jeune femme s'avança à pas mesurés dans la même direction que la bande. Ce ne fut qu'à ce moment que l'épéiste remarqua le katana dans son dos, habillement dissimulé dans les replis de son vêtement. Il fronça les yeux, ne comprenant que trop bien comment mettre bout à bout toutes les informations dont il disposait. Sa petite enquête sur la poudre attendrait, car il n'était pas rassuré quant à la suite des événements. Discrètement, il se mit à suivre Katrina de loin.


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Un moineau au pays des artificiers


Hayato n'avait jamais vraiment été formé à suivre discrètement quelqu'un. Par la force des choses, il avait dû apprendre lors de ses aventures, sans se payer le luxe d'exercices préparatoires. Ainsi, l'épéiste savait maintenir une distance suffisante, brouiller les pistes en se mêlant à des groupes par moments, bifurquer dans des rues parallèles ou bien, s'il en avait l'occasion, prendre de la hauteur. Le vagabond réussit donc à suivre bon gré mal gré la jeune femme. Cette dernière sortit de son sac des papiers que, même à cette distance, il put identifier : des affiches de recherche. Il n'avait pas besoin d'être un génie pour en comprendre la raison : Katrina était une chasseuse de primes, et elle venait de retrouver ses proies. Pourtant, malgré le sérieux de la traqueuse, Hayato n'était pas rassuré. Loin de lui un quelconque sexisme, il avait depuis longtemps appris que les femmes pouvaient être tout aussi redoutables que les hommes, sur ces mers. Néanmoins, Katrina se lançait dans un combat qui s'annonçait âpre : seule contre une vingtaine de criminels ! Car, à en juger par l'expression de la jeune femme, en fin de conversation, elle ne suivait pas les malfrats pour les inviter à prendre le thé.


À mesure que la traque se poursuivait, les badauds se faisaient de plus en plus rares. Il devenait compliqué de se cacher et, donc, de continuer la filature sans éveiller de soupçon. Il en allait ainsi pour Hayato, mais également pour Katrina. Cette dernière semblait bien plus expérimentée, car elle se payait même le culot de continuer à arracher des affaires éhontées, si elle croisait en chemin un objet qui l'intéressait. Néanmoins, lorsque les scélérats sortirent de la ville, la chasseuse croisa les bras et tapa du pied un instant. Elle attendit quelques minutes, avant de se presser vers les portes de la ville et de jeter un coup d’œil. De son coté, Hayato attendit qu'elle quitte la cité portuaire, avant de la suivre à son tour. Le manège dura plusieurs dizaines de minutes, même à l'extérieur de la ville. Légèrement anxieux à l'idée d'arriver trop tard, l'épéiste faillit se faire prendre en se montrant un rien trop pressé. Finalement, ils arrivèrent dans une petite crique, où la bande rejoignit le reste de l'équipage et, surtout, un énorme navire.


*Des pirates...*, comprit-t-il alors.


Puisqu'il l'avait suivie jusqu'ici, il réussit à repérer Katrina, dissimulée avec brio derrière un rocher en altitude. De sa cachette, elle bénéficiait d'une vue plongeante sur toute la scène qui se déroulait sous ses yeux. Équipée d'une longue vue, elle scrutait consciencieusement les lieux, sans doute à la recherche d'une opportunité. Hayato soupira. Elle semblait réellement déterminée à les capturer, seule contre tous ! Avec mille précautions, l'épéiste la rejoignit en silence, prenant bien garde à ne pas se montrer. Pour ce faire, il utilisa la végétation luxuriante de l'île pour progresser à pas comptés, à couvert des arbustes et des buissons. Enfin, il arriva au niveau de la chasseuse de primes, toujours concentrée. Il se racla doucement la gorge pour signifier sa présence. Instantanément, la jeune femme lâcha sa longue vue et, en un éclair, dégaina pour lui asséner un coup de sabre vertical.

D'un mouvement vif, Hayato arrêta le sabre en pleine course, de ses deux mains plaquées l'une contre l'autre. La jeune femme écarquilla les yeux, devant le spectacle. Après un instant d'hésitation, elle rengaina son arme, avant de jeter un regard mi-courroucé mi-intrigué au nouveau venu.


- Du calme, Katrina, ce n'est que moi, lui murmura-t-il.
- « Que » toi ? siffla-t-elle à voix basse. Qu'est ce que tu fiches ici ?! Tu vas tout faire foirer !
- Je vous évite de vous faire tuer, bêtement. Ils sont trop nombreux pour les attaquer seule.


Son regard changea du tout au tout. Si elle s'était montrée cordiale, voire guillerette jusqu'à présent, les mots d'Hayato lui firent monter la moutarde au nez. Ses joues s'empourprèrent et, toujours à voix basse, elle le houspilla sans se retenir :


- Du vent ! J'ai pas besoin d'un pseudo chevalier servant, ou d'un pauvre con pour me servir la devise du patriarcat ! Je peux m'en charger toute seule !
- Loin de moi cette idée, répondit Hayato avec calme. Il est évident que vous êtes compétente, là n'est pas la question.
- Accroupis-toi, au lieu de dire des conneries ! lui ordonna-t-elle soudain.


Sans se faire prier, l'épéiste se jeta à terre, avant de hocher la tête. Effectivement, continuer cette discussion sans se cacher relevait de la stupidité. Néanmoins, c'était bien la seule chose sur laquelle ils semblaient d'accord.


- Aller, repars d'où t'es venu ! reprit-elle à voix basse. J'ai pas besoin de toi !
- Comment pourrais-je faire cela ? répliqua l'épéiste de la même façon.
- Mais... t'es con au point de t'être perdu, en plus ? s'étonna-t-elle, en clignant des yeux.
- Ce n'était pas le sens de ma question, lui sourit Hayato.


Ce simple sourire lui valut d'être transpercé du regard. Si les deux prunelles écarlates de Katrina avaient été des armes, il aurait été occis un millier de fois. Ses yeux semblèrent virer au cramoisi, tandis qu'une ombre inquiétante s'élevait derrière elle. Elle articula alors, soigneusement, chaque mot de sa phrase :


- Pour la dernière fois. Tire-toi.
- Comme je vous l'ai dit, comment pourrais-je vous laisser aller à la mort ? Vous êtes une personne bien, Katrina. Il n'est pas dans mes habitudes...
- Une personne bien ? releva-t-elle, interloquée. On a causé que quelques instants, qu'est ce que t'en sais ? T'as aucune idée de ce que j'ai vécu, ou de la situation !
- Dans ce cas là, expliquez-moi ? lui demanda-t-il, serein.


Malgré plusieurs tentatives de le raisonner, de le rejeter ou même de le menacer, l'épéiste ne céda pas. Katrina dût se rendre à l'évidence, et finit par capituler. Elle soupira ostensiblement, laissant ses épaules s'affaisser alors qu'elle se tenait l’arête du nez, d'un air dépité. La chasseuse de primes jeta un coup d’œil dans le camp des pirates, à l'aide de sa longue vue, mais ces derniers semblaient n'avoir rien remarqué du manège.


- Très bien, finit-telle par céder. Je vais tout te raconter et, lorsque tu auras compris que t'as rien à faire ici, tu me laisseras tranquille. Vu ?
- Pour la première partie, je vous en remercie. Néanmoins, je ne peux rien vous promettre, quant à votre seconde demande...
- Tais-toi donc, tête de mule, et écoute moi... soupira-t-elle de nouveau.


Tout en continuant à surveiller ses proies, la jeune femme lui raconta son histoire. Née dans une famille bourgeoise, dans une petite île marchande sans histoire d'East Blue, Katrina avait vécu une enfance faste et luxueuse. Fille cadette, après quatre frères, elle avait tout de suite été élevée comme une princesse. Son père la gâtait, sa mère lui apprenait l'étiquette et les domestiques la chouchoutaient. Elle s'était, tout naturellement, habituée à un certain niveau de vie et à des fonds illimités. Comme son père ne lui refusait rien, et qu'il avait la fortune et le pouvoir pour répondre à ses moindre désirs, Katrina avait finit par développer une fâcheuse tendance à collectionner tout ce qui lui semblait précieux. Plusieurs autres enfants de l'île la jalousaient – tout du moins c'était la version qu'elle lui rapporta – à tel point que plusieurs d'entre eux finirent par l'appeler « la pie » durant son adolescence, lorsque sa petite manie vira à l'obsession.


- Mon nom est « Sparrow », expliqua-t-elle d'un air fermé. C'était donc non seulement une moquerie, mais également une insulte envers ma famille.


Malgré les quolibets, sa maison prospérait. À tel point que la fortune qu'ils amassèrent fit, naturellement, des envieux de plus en plus nombreux. Les autres marchands rêvaient d'acquérir pareil succès, là n'était pas le mal. Le problème vint, fatalement, le jour où des pirates s'intéressèrent de plus près à cette fameuse réussite. Une matinée anodine bascula en crise qui laissa de profondes cicatrices à la jeune femme. L'équipage pilla et massacra une bonne partie du village, laissant pour mort toute sa famille. Elle survécut miraculeusement, mais tomba immédiatement dans la misère, puisque les forbans lui avaient tout ravi. Évidemment, pas une main secourable ne se tendit. Ils étaient trop heureux de la voir choir de son pied d'estal ! Elle fut envoyée en orphelinat jusqu'à sa majorité, où elle apprit la dure réalité de la vie. Néanmoins, ce que ses détracteurs n'avaient pas prévu, c'était la solidité du mental de celle qu'ils prenaient pour une précieuse petite princesse. Lentement, elle remonta la pente et s'endurcit. À sa sortie de l'orphelinat, elle s'engagea un temps dans la marine.


- À l'époque, je cherchais trois choses : devenir forte, amasser une fortune et, bien sûr, faire à la peau à ces salopards ! Sauf que, dans la marine, non seulement on a un solde au raz des pâquerettes mais, en plus, à moins d'être haut gradé, on ne décide pas où on va ! Du reste, j'ai pu apprendre à manier le sabre.


Après cinq ans d’entraînements intenses et de traques des pirates, elle avait fini par se rendre à l'évidence : elle n'arriverait à rien ainsi. Elle décida donc de se mettre à son propre compte et, avec l'aval de sa hiérarchie, quitta la marine pour obtenir sa licence de chasseuse de primes. Bien vite, forte de plusieurs années de service, elle réussit à traquer et livrer les petites primes des Blues, tout en récoltant des informations sur l'équipage qui avait détruit sa vie. Des mois durant, elle les pista sans relâche jusqu'à, finalement, retrouver leur trace sur Koneashima. Ici, la jeune femme sortit les deux affiches qu'avait entraperçues Hayato, qui s'empressa de les détailler de plus près :


- Tindall « The Cold » Roderick, sept millions de Berrys et Alston « Shady » Archer, un million de Berrys. Ils n'ont pas l'air commodes.
- Et dès que possible, ils auront l'air morts, affirma Katrina d'un ton péremptoire.


Elle sembla se calmer un instant, avant de grogner de mécontentement. D'un regard vers la crique, les pirates semblaient débuter un festin, danser et chanter à tue-tête. L'épéiste comprenait sans mal ses sentiments, à l'idée de voir cette bande de racailles profiter de la vie, après ce qu'ils avaient fait.


- Je suis désolé de ce que vous avez vécu, Katrina. Croyez-moi, je comprends ce que vous ressentez face à ces gibiers de potence, mais se précipiter vers la mort de vous servira à rien. Ils sont bien trop nombreux pour que vous les gériez toute seule...
- T'es vraiment tétu, comme type... souffla la chasseuse de primes, avant de céder. Très bien, j'avoue qu'ils sont plus nombreux que dans mes souvenirs... mais si on y va, on le fait à ma façon !
- Je suis tout ouie, répondit-il, avec un sourire satisfait.


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Un moineau au pays des artificiers



- Neuf heures et trente sept minutes, l'obèse, le nain et dix autres pirates reviennent avec du matériel de réparation, des caisses de nourriture et du rhum.
- Ça leur aura pris... une heure et quarante trois minutes, déclara Katrina. C'est dans la moyenne.


Voilà déjà trois jours qu'ils épiaient les pirates, jour et nuit, afin d'en décortiquer les habitudes, les tours de rondes, les heures des relèves et les particularités de chacun. Ils étaient réglés comme du papier à musique, ce qui semblait étonnant venant de forbans recherchant la liberté ! La plupart des membres de l'équipage – qui comptait cinquante trois personnes – étaient, sans aucun doute, des gredins sans matière grise ni capacité de combat digne d'être notée. Il en allait autrement pour le capitaine et son second. Roderick, primé à sept millions de Berrys, maniait le sabre et l'arme à feu habilement, mais savait aussi réfléchir et organiser son navire efficacement. Pour se faire obéir, il semblait opter pour la tactique sempiternelle des capitaines pirates : la peur, les privations voire les sévices corporels au moindre signe de rébellion. Son second nommé Archer, un bretteur, s’entraînait tous les matins pendant une heure et demi, avant de commencer à se soûler avec le reste de l'équipage, peu intéressé par autre chose que se battre, boire et s'amuser. Lorsque le soleil atteignait son zénith, Katrina avait estimé que quatre-vingt quatorze pour cent de l'équipage était soul « comme des cochons », afin de reprendre son expression. Seuls trois membres tenaient encore debout sans tituber : le capitaine, la vigie et le contre-maître obèse. Si les deux premiers prenaient leurs rôles au sérieux et s'alcoolisaient très peu, le troisième était tout simplement trop volumineux pour être éméché aussi facilement.


- J'ai tout ce qu'il me faut, affirma la chasseuse de primes. On passe à l'action demain, lorsqu'ils iront chercher les ravitaillement. On commence dès maintenant les préparatifs.


Sans un mot Hayato attrapa une lourde caisse et suivit la jeune femme. Ils avaient établis un camp de fortune, derrière le rocher où l'épéiste avait suivi Katrina, le premier jour. Eux-même avaient dû réaliser plusieurs aller-retours, afin de s'approvisionner en vivres et, surtout, en pièges. C'était d'ailleurs ces derniers qu'ils allaient commencer à placer. Les pirates étaient restés à quai pour réparer leur navire, grâce au travail acharné de leurs charpentiers. Ce matin, le capitaine avait inspecté l'avancée des travaux, ce qu'ils avaient suivi à la longue vue. Il avait semblé les féliciter, avant de pointer un dernier endroit endommagé. Katrina, en se fiant à leur vitesse de travail, affirmait qu'ils pourraient partir le lendemain soir, car les charpentiers devraient travailler jusque là pour réparer la dernière partie. Ce qui signifiait que leur date butoir venait d'être révélée ! La chasseuse de primes le tira de ses pensées :


- Place-les ici, ici et là ! Tu peux également en placer d'autre par là. Mais rien au milieu du chemin. Ça évitera que des curieux ou des promeneurs marchent dessus et les déclenchent. Demain, faudra que tu fasses attention aussi.
- Aucun problème, répondit-il avec assurance.


À l'aide d'une pelle, le bretteur creusa des trous et y plaça les engins achetés par Katrina, avant de replacer les morceaux d'herbe arrachés. Pendant ce temps, la jeune femme faisait le guet. Une fois leur besogne effectuée, le duo remonta se cacher et attendit le soir. Contrairement aux jours précédents, ils n'échangèrent pratiquement aucun mot, trop concentrés sur leurs taches respectives pour se laisser distraire si près du but. Lentement, le soleil avança dans le ciel, jusqu'à finir par disparaître derrière l'horizon. La lune se leva peu à peu, et les coups de marteau cessèrent. La majorité de l'équipage était alors tellement aviné qu'ils ne savaient plus parler, ou ronflaient déjà à même le pont. Seuls les rayons de la lune assurait une visibilité médiocre. Le roulement régulier des vagues s'échouant sur la berge prenait de l'ampleur, à mesure que l'équipage tombait dans les bras de morphée.

Avec mille précautions, le duo descendit de sa cachette lors de la rotation de vigie. Ils se coordonnèrent pour esquiver le champ de vision du garde, et lentement, dissimulèrent de multiples pièges tout le long de la baie. Ils remontèrent alors en quatrième vitesse, lorsque l'homme en haut de son perchoir se fut endormi, à la même heure que les jours précédents. Si la vigie de jour était un modèle de professionnalisme, sa relève nocturne ne tenait pas la comparaison.


- Maintenant, on se repose. Je prends le premier tour de garde.
- Bien.


Sans un mot de plus, Hayato se glissa dans son sac de couchage et une fois n'était pas coutume, s'endormit immédiatement. Il fut réveillé par la main de Katrina sur son épaule, au beau milieu de la nuit. En silence, il se leva, s'étira, puis attrapa la longue vue, tandis que la chasseuse de primes sombrait à son tour. Plusieurs heures durant, l'épéiste surveilla un navire où la tranquillité n'était brisée que par les vessies à vider ou les contenus d'estomacs à régurgiter. Au petit matin, toutes les fripouilles se réveillèrent une à une, vaquant à leurs habitudes relevées ces derniers jours. Ce ne fut qu'à ce moment là que le vagabond réveilla doucement sa partenaire. Sans un mot, cette dernière s'étira, avala sur le pouce de quoi lui tenir au corps, avant de lui prendre la longue vue des mains.


- Ils partent. Ils sont douze aujourd'hui aussi. Ça ira ?
- Je m'occupe d'eux. Lorsque je reviendrai, nous nous occuperons du reste de l'équipage comme prévu.

- Grouille-toi ! reçut-il pour toute réponse. Ou tu vas les manquer.


D'un hochement de tête, l'épéiste s'éclipsa pour suivre la piste en hauteur. Bientôt, il arriva au niveau de la zone piégée et patienta. Petit à petit, les échos du groupe se firent entendre : les tintements de leurs armes, les échos de leurs pas, ainsi que leurs échanges grossiers :


- Bordel j'ai encore la gueule de bois... 'Me faut du rhum pour faire passer ça ! Mouahaha !
- Soigner le rhum par le rhum, hein Godrus ?
- Mouahaha ! T'as bien raison, Chibibi !


Alors que la bande de pirates arrivaient aux abords des pièges, plusieurs d'entre eux tombèrent grossièrement dans le panneau. Hayato et Katrina avaient laissé traîner des pièces d'or au niveau des traquenards, de sorte que les esprits limités et embrumés par l'alcool ne firent qu'un tour :


- OH ! lança un sous-fifre. Un trésor, les gars !


En un instant, une demi-douzaine de sous-fifres se ruèrent dans des chausses-trappes, pourtant évidents. Lorsqu'ils posèrent leurs pieds devant leurs Berrys de la providence, des déclics sonores retentirent. Avant qu'ils ne puissent réagir, des feux d'artifices s'élevèrent dans tous les sens. Les trésors pyrotechniques brûlèrent les pirates les plus proches, qui se mirent à hurler et à se rouler par terre. Ceux restés en arrière tentèrent de venir les aider, mais furent immédiatement interceptés par un bokken en travers du crane. En un instant, la dizaine de forbans de bas-étage furent réduits au silence. Il ne resta plus que le contre-maître obèse et son acolyte, qui lui arrivait aux chevilles. Les deux larrons se regardèrent d'un air encore embrumé par l'alcool, avant de fixer leurs prunelles agitées vers le responsable de cette embuscade : un homme en kimono rapiécé armé d'un bout de bois. Ils se frottèrent les yeux, comme pour être certains de ce qu'ils voyaient, avant que le plus petit ne lance :


- Oï, Godrus... pourquoi un mendiant nous attaque ?
- Mais on s'en fout, débile ! répliqua l'obèse. On le défonce ! CHIBIBI ! ATTAQUE COMBINÉE !
- C'est parti ! Hihihi !


Alors qu'Hayato se mettait en garde, prêt à recevoir la charge, il fut prit de court. Au lieu de se ruer sur lui, le nain sauta vers l'obèse. Le vagabond pencha la tête sur le coté, circonspect devant le spectacle, avant de comprendre. Godrus attrapa au vol son partenaire, tournoya sur lui-même et, avant que l'épéiste ne puisse réagir, lui envoya son acolyte dans le thorax à la vitesse d'un boulet de canon !


- CHIBIBI PUNCH ! scandèrent-ils, parfaitement synchrones.


La technique surprit le bretteur, qui en eut le souffle coupé. Alors qu'il reprenait ses esprits et tentait de se remettre en garde, il chercha des yeux les deux pirates. Avec un tel handicap d'entrée de jeu, il risquait fort de se faire... Le bruit de vomissements le tira de ses pensées. À quelques pas de lui, tant le nain que l'obèse vomissaient trippes et boyaux, dans une cacophonie de gargouillis infames.


- Ah... je savais... beurg ! Que c'était pas une bonne... idée... cette dernière bouteille de rhum...
- Chibi... bi ! T'es encore complètement bourré ! Beurg ! Espèce d'idiot !
- Parle pour toi ! Pourquoi t'as... tourné aussi vite ?! Cré... crétin !


Une goutte de sueur perla à l'arrière du crane du vagabond. Ce dernier se ressaisit et, alors que les deux compères finissaient de rendre leurs excès de la veille, il les assomma sans aucune pitié. S'ils étaient tous de ce calibre là, peut être avait-il eu tort de s'en faire pour Katrina. Au même moment, une explosion dantesque retentit dans la crique. Bientôt, des échos de combats et de feux d'artifices lui parvinrent. Cela ne pouvait signifier qu'une seule chose : la chasseuse de primes était déjà passée à l'action ! Elle comptait réellement se battre seule contre eux tous ? Ses entrailles se glacèrent. Même s'ils étaient faibles, à plus d'une trentaine contre elle, elle ne pourrait pas se défaire de tout l'équipage, du capitaine et de son second en même temps ! Sans plus attendre, Hayato laissa les énergumènes sur place et fonça en direction du navire.

Plus il se rapprochait, et plus les clameurs de la bataille gagnaient en intensité. Il ne fallut pas longtemps au vagabond pour découvrir les premiers cadavres calcinés, tranchés et éparpillés sur le sable rougi. Les bombes continuaient de se déclencher, ajoutant au capharnaüm et à la confusion de l'équipage, qui courraient dans tous les sens pour éteindre les feux, mais également pour chercher des ennemis ou, tout simplement, pour vomir leur trop plein de rhum de la veille.

Au milieu de cette pagaille, une seule pensée occupait l'esprit d'Hayato : trouver Katrina.


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- Mais... MAIS BORDEL ! Elle est toute seule, bande de crétins ! Défoncez-là !
- C... Capitaine ! Elle a tué Shady A. !
- Y'a des bombes qui éclatent dans tous les sens !
- Et y'a des feux à éteindre partout, capitaine ! On... ON PEUT RIEN FAIRE !


Tandis que quelques courageux se ruaient sur la femme en noir et rouge, cette dernière assura sa prise sur son sabre. En un instant, elle se défit du menu fretin, sous le regard noir de Roderick. Ce dernier fulminait, à tel point que les jointures de ses articulations blanchissaient, à force de serrer comme un beau diable sa propre lame. Qu'une femme, seule, puisse mettre en déroute la majeure partie de son équipage, tuer son second sans la moindre difficulté et exploser son navire de nouveau... Ça le mettait en rogne !


- MAIS T'ES QUI À LA FIN, ENFANT DE PUTAIN ?! lui vociféra-t-il dessus.
- J'aurais dû m'en douter... une raclure dans ton genre n'a même pas la bienséance de se rappeler de ses victimes.


La chasseuse de primes, tout en gardant l'équipage à l’œil, descendit le tissu qui lui couvrait la bouche, laissant apparaître une vilaine cicatrice qui lui barrait le bas du visage. Alors que son ire gagnait des sommets, une ombre inquiétante l'enveloppa, forçant les âmes les plus faibles à reculer en tremblant. La jeune femme fusilla du regard le capitaine, avant de lâcher d'un ton mordant :


- Je suis la femme qui va te tuer, Roderick Tindall... Katrina Sparrow !


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Un moineau au pays des artificiers


Un moineau au pays des artificiers 2-Brute-Sabreuse-profiler-Sparrow-180x400


La bretteuse lançait une charge hargneuse. Sous les regards effarés des rares sous-fifres restants, Katrina menait la danse. Le capitaine, pris de court, se défendait du mieux qu'il pouvait. Si la jeune femme avait usé d'artifices et de l'effet de surprise pour occire la majeure partie de son équipage, Roderick devait admettre qu'elle ne déméritait pas au sabre ! Il esquiva d'un cheveux une tranche de taille visant à le décapiter. Grognant, pestant, jurant, le pirate enrageait de se voir ainsi dominé. Laissant libre court à sa rage, il lança une contre attaque sauvage, paré de justesse par la jeune femme. Profitant de cette ouverture inespérée, elle l'entailla au bras ; une blessure plus superficielle qu'elle ne l'aurait voulu, du fait de la réactivité du forban. Malgré tout, elle maintenait une pression croissante sur l'homme qu'elle exécrait plus que tout, le forçant à reculer peu à peu.

Soudain, une ombre lui apprit qu'un matelot se joignait au combat. Elle l'esquiva, l'envoya sur son capitaine d'un coup de botte, et entreprit d'user de ce déséquilibre pour pourfendre les deux criminels dans le même mouvement. Horrifiée, elle vit le capitaine lui renvoyer son homme de main dessus, à l'aide d'un coup de pied musclé. D'une roulade sur le coté, la chasseuse de primes esquiva le pirate volant, qui termina sa course tête la première contre le bastingage, dans un craquement glaçant. Elle se releva mais, trop tard, le vent avait tourné. Goguenard, Roderick avait retrouvé ses appuis et sortit un pistolet, en plus de son sabre. Il la mit en joue et entreprit de la canarder pour la maintenir à distance.


- Les gars ! vociféra-t-il. Profitez-en pour l'abattre !


Comme un seul homme, le reste de l'équipage fondit sur Katrina. Bouillonante de rage, cette dernière comprit, au rictus de sa némésis, qu'il ne se retiendrait pas de tirer dans le tas, malgré la présence de ses sbires. Elle se débattit comme une lionne, laissant sa lame virevolter dans une danse mortelle. Tout en gardant un œil sur les mouvements du capitaine, elle vrillait, plongeait, se contorsionnait pour éviter les attaques maladroites du menu fretin, tout en contre-attaquant dans la seconde. Bientôt, le dernier ennemi tomba dans un râle d'agonie, laissant la jeune femme en sueurs et le souffle court.


- Gyahahahaha ! T'es faites comme un rat, petite !


Son arme à feu braquée sur elle, le capitaine se gaussait comme un forcené. Il arma le chien, sous l’œil brûlant de haine de Katrina, avant de tirer. Cette dernière esquiva d'un pas chassé éclair, avant de se ruer vers lui. Trop tard, elle nota l'absence de détonation. Trop tard, elle remarqua le sourire du pirate qui s'élargissait. Trop tard, elle hoqueta, lorsqu'il appuya réellement sur la gâchette. Une douleur cuisante vint ébranler sa jambe droite, et la précipita à terre. La balle était ressortie, laissant un filet de sang s'écouler sur le pont du navire. Roderick s'avança pas à pas, une grimace inhumaine déformant ses traits, son arme fumante toujours pointée sur elle. Lorsqu'il arriva presque à portée de sabre, Katrina tenta bien une manœuvre désespérée, au dernier moment, mais son adversaire lut la tactique et la désarma d'une violente torsion. Son sabre voltigea plus loin, avant de se ficher lourdement sur le bois du navire.


- Gyahahahaha ! Qui devait tuer qui, déjà ? Adieu, la pisseuse !


Muette de rage, Katrina regarda le sabre du pirate s'élever, tandis qu'un torrent de larmes inarrêtable lui obstruait la vision. Elle cria, le maudit, mais ne réussit qu'à renforcer l'hilarité du capitaine. Lorsque l'arme s'abbatit, elle manqua un battement de cœur. En un instant, sa vie défila devant ses yeux humides. Anéantie, elle ferma les yeux et hurla de fureur.





Le bruit d'une parade brisa le rire tonitruant du pirate, puis un soupir s'éleva devant elle. Lentement, elle ouvrit les paupières avant d'écarquiller les yeux :


- Je savais bien que vous vous étiez résignée un peu vite, Katrina. Mais je ne pensais pas que vous ruseriez de la sorte...
- Oi ! s'égosilla Roderick. T'es qui, espèce de pouilleux ?!
- H... Hayato ! s'exclama-t-elle.
- Vous vous êtes admirablement battue. Penser que vous puissiez en vaincre autant...


Le regard acéré du bretteur se posa sur le capitaine pirate, avant de lancer :


- Laissez-moi m'occuper du reste.


Loin de se démonter, le pirate tenta une attaque vicieuse. L'épéiste lut la feinte au sabre, de sorte qu'il put esquiver et dévier le pistolet. Lorsque ce dernier tira, la balle se perdit dans le ciel ombragé. Roderick jura et tenta de reculer, mais Hayato le colla et poussa son avantage au corps à corps. En seulement quelques échanges, le capitaine comprit la différence de niveau et serra les dents. Ce minable, qui ne devait jamais changer de vêtement vu leurs têtes, le malmenait avec un simple sabre en bois ? C'était une blague de très mauvais goût ! Immédiatement, il tenta de multiplier les coups fourrés, les feintes et les coups brutaux, en vain. Si Katrina s'était révélée bien plus coriace qu'il ne l'aurait cru, ce sale gueux était encore un cran au dessus ! Il... il était plus fort que lui ! La panique saisit un instant le pirate, qui se dégagea d'un bond en arrière, avant de jeter un regard haineux à la jeune femme, encore à terre.

Ce fut à ce moment qu'il comprit sa porte de sortie.

Immédiatement, il visa Katrina et tira. Cette dernière, devant l'éclat mauvais dans le regard du forban, avait déjà roulé sur le coté pour esquiver la balle. Malgré tout, lors des échanges suivant, il continua le manège encore, encore, et encore ! Jusqu'à ce que la jeune femme soit à bout de souffle. Hayato avait beau faire, il n'arrivait pas à empêcher le gibier de potence de s'écarter un court instant, avant d'attaquer à distance sa coéquipière. Au fur et à mesure que le combat s'étirait, Roderick esquivait de plus en plus le combat au corps à corps et courait en tous sens pour harceler la chasseuse de primes. Ulcérée de rage, cette dernière n'arrivait plus à bouger, ce qui n'échappa ni à Hayato, ni à sa némésis. Un sourire mauvais plus tard, il tira une énième balle mais, cette fois, l'épéiste s'interposa. Il reçut le projectile au bras gauche, écopant d'une blessure peu handicapante pour le moment.


- Gyahahahaha ! Vous me faites rire, les simplets ! On pas le temps pour ce genre de conneries, dans un combat ! Dans la vie c'est chacun pour sa gueule, les mômes !
- Ferme-là ! lui hurla la jeune femme. T'as aucune idée de ce que c'est que la vie, raclure !
- Ne rentrez pas dans son jeu, Katrina.


La voix calme de l'épéiste surprit le meurtrier, mais également la chasseuse de primes.


- Il utilise votre haine contre nous... commença Hayato.
- Tu crois que je l'ai pas vu ?! Cette pourriture mérite de crever !
- Alors laissez-moi faire ! lui intima le vagabond, d'une voix calme mais sans appel.


Sans leur laisser le temps de palabrer une seconde de plus, Roderick recommença ses mesquineries. Il prenait ses distances, forçant Hayato à lui courir après puis, dès qu'il avait une ouverture, il attaquait Katrina au pistolet. Cette dernière, épuisée, tentait de rouler sur le coté, mais tous les combattants sur ce pont savaient qu'elle n'était plus en état d'esquiver. Les balles se logèrent, l'une après l'autre, dans le corps de l'épéiste. Tant bien que mal, il arrivait à éviter d'être touché aux organes vitaux, mais les impacts s'additionnaient douloureusement. Tant et si bien qu'il commença à baisser la cadence. Cette vision d'horreur meurtrit la jeune femme, qui s'en mordit les lèvres plutôt que de crier.


*Qu'est ce que je fous ?!*, s'étonna-t-elle en pensée.*Je le laisse se faire blesser, plutôt que de l'aider. Je suis trop conne !*


Elle sécha ses larmes d'un geste rageur. Alors qu'un nouveau coup de feu touchait cette fois-ci l'épéiste à la jambe gauche, la chasseuse de primes rassembla ses dernières forces et se propulsa à travers une porte du bâtiment naval. Dans un fracas énorme, elle disparut hors de portée du pirate, avant de lancer en hurlant :


- Fais-lui la peau, Hayato !
- Evidemment, sourit l'intéressé.


Malgré tout, l'épéiste avait perdu beaucoup de sang. Son corps tout entier le faisait souffrir, tant les balles l'avaient criblé. Sûr de lui, le pirate changea de stratégie et déchargea son arme à feu de nouveau sur Hayato, jusqu'à ce qu'il arrive à court de balles. À gestes comptés, l'épéiste en esquiva la majeure partie, mais ses blessures accumulées l'empêchèrent de bouger comme il l'entendait. Il dut mettre un genou à terre, sous la douleur et la faiblesse qui le taraudaient. De nouveau goguenard, le pirate s'approcha rapidement, sabre au clair, pour en finir. Au dernier moment, Hayato dévia son sabre d'une parade et le frappa d'un coup de poing retentissant au menton. Sonné, Roderick eut toutes les peines du monde à esquiver les attaques suivantes. Le bokken du vagabond se déchaîna en tous sens, jusqu'à ce que son adversaire ne s'écroule, inconscient.

Alors seulement, l'épéiste tomba à genoux, le souffle court. Lorsqu'il eut retrouvé un peu de forces, il se releva difficilement, avant d'aller chercher Katrina. L'épéiste l'épaula, plutôt que de la porter dans les bras. Puisqu'il commençait à la connaître, se retrouver ainsi traitée comme une demoiselle en détresse aurait ravivé le caractère sanguin de la jeune femme. Lorsqu'ils arrivèrent devant le corps inanimé du capitaine, la chasseuse de primes serra les dents. Soudain, elle frappa du pied le corps à terre ! Hurlant, pleurant, déchaînant sa colère à de multiples reprises, Katrina tomba à genoux, sous le coup de la douleur, avant de continuer à frapper Roderick de ses poings. Imperturbable, Hayato la laissa s'échiner jusqu'à ce que, à bout de forces, haletante, la jeune femme se mette à pleurer à chaudes larmes.

Elle leva les yeux aux ciel, pour crier à plein poumons.

Enfin, sa coéquipière reprit son calme. Sanglotante, mais un sourire satisfait aux lèvres, Katrina Sparrow sembla s'apaiser. Elle s'effondra alors, avant qu'Hayato ne la rattrape.


- Vous pouvez être fière de vous, Katrina, lui lança-t-il à mi-voix.


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Un moineau au pays des artificiers


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Katrina se réveilla en sursaut. D'un coup d’œil affolé autour d'elle, la jeune femme découvrit une chambre typique d'une auberge. Les rayons du soleil filtraient à travers la fenêtre sur sa gauche, baignant la pièce d'une douce lumière ambrée, réchauffant les corps et apaisant les esprits. Elle se tenait assise, en sueurs, sur un lit confortable en face de la porte d'entrée. Un petit bureau en bois s'alignait sur sa gauche, à coté de la fenêtre tandis qu'à sa droite, elle découvrit un futon sur lequel se tenait assis un homme. En quelques secondes, elle reconnut les cheveux hirsutes, coiffés vaille que vaille en un catogan, la cicatrice barrant un front à la peau tanné, ainsi que le kimono bleu élimé. Hayato dormait, assis, son bokken contre son épaule. Même inconscient, le vagabond restait sur le qui-vive, tout en dégageant cette aura de calme qu'elle avait appris à connaître. Lorsqu'elle bougea, le grincement du lit lui fit ouvrir instantanément les yeux. Leurs regards se croisèrent et, tout de suite, l'épéiste lui sourit.


- Vous êtes réveillée, déclara-t-il sobrement.
- Vous enfoncez une porte ouverte, le taquina-t-elle d'emblée.


Un flottement plus tard, les deux coéquipiers pouffèrent de nouveau. Les rires réveillèrent leurs blessures, les ramenant immédiatement dans le moment présent. Le sabreur lui résuma alors les vingt quatre dernières heures, que la chasseuse avait passées à dormir. En se servant d'un denden mushi sur le navire, Hayato avait prévenu la marine qui avait envoyé sans tarder une escouade à leur rencontre. Il leur avait alors remis l'équipage tout entier, en utilisant la licence de Katrina, qui trônait à présent sur le bureau à coté d'elle. Le vagabond reprit d'un air ennuyé :


- Je me suis permis d'utiliser une partie des récompenses pour payer nos soins, mais également quelques jours dans cette chambre.
- T'as bien fait, Hayato, le rassura-t-elle immédiatement. Tu veux qu'on partage les primes, j'imagine ?
- Sans façon, vous pouvez garder la somme restante.


Katrina cligna des yeux, interloquée devant cette décision prise sans même y réfléchir une seconde. Elle était partagée, naturellement, entre l'envie de garder la prime pour elle et de fêter sa vengeance, mais également le besoin de prouver sa reconnaissance à cet homme qui, deux jours auparavant, était un parfait étranger.


- Merci, lança-t-elle soudain. Je ne t'ai même pas remercié, après... Et je ne me suis pas non plus excusé pour mon comportement... Je pensais vraiment que je pourrais...tu sais...
- C'est oublié, Katrina, la rassura-t-il. Je suis heureux que vous vous en soyez sortie, et que vous ayez pu atteindre votre but.
- AH ! réalisa-t-elle soudain. Les balles ! Tu... T'es pas passé sur le billard ?
- Le docteur qui vous a soigné m'a retiré les balles et m'a pris en charge. J'avoue avoir du mal à garder les bandages, ils m'empêchent de m'entraîner correctement...
- Que... Quoi ?


Elle n'en revenait pas. Elle avait compté plus d'une douzaine de coups de feux et, deux jours après, il était sur pied avant elle ?


- Ah... J'oubliais... J'ai peut être aussi usé d'un peu de la récompense pour m'offrir un repas... ou deux. Hum. Je pense que de bons repas m'ont également aidé à reprendre des forces rapidement. Après tout, je n'ai pas souvent l'occasion de faire bonne chère et de dormir dans un vrai lit, en ce moment !
- Tu... tu crois que tu t'es remis aussi vite parce que t'as bien mangé et que t'as dormi sur un futon ?
- C'est le cas depuis toujours. Cela dit, en plus de l'auberge, c'était une deuxième entorse à mes règles. Cependant, dans la situation c'était compréhensible, j'imagine...


En quoi était fait cet homme ? Et surtout, qu'est ce qu'il avait dans le crane pour dire de pareilles âneries ? N'importe qui aurait été hospitalisé pendant des jours, sinon des semaines, après avoir été transformé en passoire ! Mais surtout...


- C'est quoi ces histoires de « règles » ? Je... avec la traque et la mise en place des pièges, on n'a pas vraiment eu le temps de discuter, après tout.
- C'est vrai, nous avons été fortement occupés. Si je devais résumer les six dernières années de ma vie...


Le vagabond attrapa son menton d'un air pensif, actionnant ses méninges pour trouver des formulations claires et succinctes. Lorsque ce fut chose faite, il reprit la parole face à la blessée :


- Mon père adoptif a été trahi par son fils, et laissé pour mort au milieu d'un incendie par une famille rivale. C'est d'ailleurs son assassin qui m'a laissé cette cicatrice au front. J'ai dû l'aider pour le seppuku, mais je lui ai également promis de vivre, prospérer, avant de le rendre fier pour le restant de mes jours. Avant de pouvoir le venger, je voyage à travers les Blues pour murir et devenir assez fort...
- Haha ! T'as failli m'avoir ! Ouch... me fait pas rire, ça fait mal. On dirait une histoire de mafioso, ton truc ! Pardon, pardon, c'est juste que ça te ressembles pas du tout de blaguer comme ça !
- C'est la vérité, Katrina, répondit-il d'un ton serein.


Un froid glacial tomba dans la pièce. L'ardeur du soleil sembla régresser, alors qu'une bise polaire souleva les rideaux. Les yeux de la chasseuse de primes perdirent toute chaleur, alors qu'ils se posaient sur le bretteur. Lorsque le regard de Katrina glissa lentement vers son sabre, au pied du lit, Hayato lui lança un regard interrogatif. Il n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche, que la jeune femme dégainait et tentait de le décapiter. Par réflexe, il para la lame, se releva et esquiva l'attaque de taille suivante.


- Tu m'as menti ! SALOPARD !
- Katrina, attendez ! tenta-t-il de la calmer.


En vain. La chasseuse de primes boitait, mais son expertise au sabre s'en trouvait à peine diminuée. Dans sa condition précaire, bloqué dans un espace restreint, Hayato limita ses mouvements au maximum. Il para l'attaque suivante, tentant de raisonner sa coéquipière qui, de son coté, voyait rouge. Une ombre lugubre s'éleva, derrière la jeune femme. Menaçante, elle semblait grossir à mesure que la sabreuse enrageait. Soudain, après une autre passe d'arme bloquée par le vagabond, la jeune femme fut prise d'un malaise. Elle toussa, porta la main à son ventre, avant de sembler s'affaisser. Immédiatement, l'épéiste s'avança pour tenter de la rattraper :


- Attention, vous allez tom...


L'éclair lumineux fusa. Hayato se fustigea de sa bêtise: il avait baissé sa garde ! Il eut à peine le temps de pivoter, afin d'éviter que le coup d'estoc ne l'atteigne en plein cœur. Néanmoins, la lame mordit sa chair et laissa une belle balafre sur le coté gauche. Il grimaça de douleur, mais trouva la force d'éviter une nouvelle coupe en biais, déviant le sabre à l'aide de son bokken. La blessure sur son torse lui cuisait, alors qu'un sang chaud commençait à tremper ses pansements. Bien vite, le bretteur finit par comprendre ce qu'il avait à faire. En trois mouvements, il désarma Katrina, avant de lui saisir les bras et de la plaquer contre le mur. Elle se débattit de toutes ses forces, hurla, rua, mais l'épéiste garda son calme. Malgré la douleur, malgré la vile tromperie de la jeune femme pour attenter à sa vie, le vagabond comprit. Il avait été idiot, une fois de plus. Idiot de ne pas prendre en compte son passé.


- J'ai manqué de tact, Katrina.
- T'as manqué d'honneté, ouais ! Tu te payes ma tête depuis le début !
- Katrina...
- J'vais te buter, toi aussi !
- KATRINA ! tonna-t-il soudain.


Le brusque changement de ton surprit tant le sabreur que sa captive. Lui qui était un havre de paix, venait de briser le fil de la discussion aussi surement que la foudre fend le ciel. Malgré tout, la chasseuse de primes ne vit aucun signe d'agressivité dans sa posture. Elle avait beau l'avoir blessé profondément, sa plaie avait beau tremper le sol d'un liquide carmin, ses yeux ne trahissait aucune animosité. Lorsqu'il reprit la parole, son calme était revenu :


- Je jure sur l'âme de mon père, Suisou Jinro, que je ne vous ai pas trompée. Je n'ai rien à voir avec les bêtes sauvages que nous avons combattues ensemble. Je vous en prie, laissez-moi vous expliquer.


Comme elle hochait silencieusement la tête, visiblement calmée, Hayato relâcha légèrement la pression sur ses poignets. Cette fois-ci, le vagabond prit son temps. Il lui narra son enfance, sa rencontre avec Jinro-san ainsi que son adoption. Il lui détailla le code d'honneur de son clan, l'éducation poussée qu'il avait reçue et les relations qu'entretenait le clan Suisou avec la légalité. Leurs commerces s'ouvraient tant au gouvernement qu'aux révolutionnaires, mais aussi aux pirates triés sur le volet, à la pègre, aux civils ou aux chasseurs de primes. Bien qu'ils préfèrent vendre des biens courants et des services, il leur arrivait de toucher à d'autres secteurs d'activités lucratifs.

Les drogues et autres substances addictives pouvaient être vendues, si elles étaient de qualité irréprochable, mais la famille Suisou avait l'interdiction formelle d'en consommer. Les quartiers civils sous leur protection devaient s'acquitter d'un impôt, et ainsi participer au développement du clan, afin que celui-ci assure leur sécurité de manière pérenne. Ils avaient recours au recel d'information, aux coups montés et au trafic d'influence, afin d'écarter les éléments gênants, ou de corrompre les officiels peu scrupuleux. S'il leur arrivait de se battre, jamais ils ne tuaient sans raison, et jamais, ô grand jamais, un membre du clan n'avait touché ne fut-ce qu'un cheveux d'un innocent. Au contraire, s'ils apprenaient qu'un de leurs clients se lançait dans les mêmes activités que ce Roderick, un contrat était immédiatement placé sur sa tête, s'il échappait à la colère du clan. En d'autres termes, sa famille n'était pas blanche comme neige, il le savait, mais ils agissaient en tant qu'hommes d'affaires avec un sens moral et des valeurs qu'il ne laisserait pas être piétinées.

Tout d'abord interdite, Katrina déglutit difficilement sa salive, avant de glisser son regard vers la plaie d'Hayato qui, durant toute son explication, avait finit par détremper ses bandages. Elle le regarda alors droit dans les yeux, avant de hocher la tête. Circonspect, Hayato finit néanmoins par la relâcher, pour qu'elle le bouscule et se rue vers son sac. L'épéiste serra les dents et s'apprêta à recevoir une nouvelle charge, en se retournant. Il tomba nez à nez avec la jeune fille, les larmes aux yeux, qui sortait une trousse de premier secours.


- Assieds-toi, et laisse moi te recoudre, avant que tu te vides de ton sang.


De ses mains expertes, la chasseuse de primes retira les bandages, nettoya la plaie, la comprima puis commença à le suturer à vif. Elle s'affaira tout d'abord sans un mot, pour peu à peu le questionner de nouveau. Lorsque la plaie fut refermée, elle sortit de son sac des compresses puis des bandages propres qu'elle appliqua rapidement. Enfin, elle soupira avant de frapper gentiment la tête d'Hayato :


- T'aurais pu être plus clair dès le début, idiot !
- On va dire que je n'en ai pas vraiment eu le temps, répliqua-t-il avec un sourire.


De fil en aiguille, la discussion reprit son court comme au premier jour. Les deux épéistes, bien vite, se renseignèrent sur les plans de l'autres pour l'avenir. Si celui d'Hayato était tout tracé, Katrina ne s'était pas vraiment posé la question. Sa vengeance achevée, elle ne savait plus vraiment quelle voie suivre, à présent.


- Rejoignez-moi, en ce cas.
- Et devenir criminelle ? Ça serait le comble pour une chasseuse de primes !
- Il y a criminel et criminel, comme je vous l'ai dit. Et puis... Vous me devez bien ça, plaisanta-t-il en montrant ses bandages.
- Oh... vraiment ?
- Le chantage affectif fait partie de mes aptitudes. Je ne vous l'avais pas dit ?


Après un bref instant, le duo improbable éclata de rire, bien vite avorté à cause de leurs blessures respectives. Leurs affres calmés, la jeune femme se redressa, avant de sourire.


- Bon... et être membre de ton clan, ça paye bien ?
- Pour l'instant, pas vraiment. Mais à l'avenir, plus que la marine, en tout cas.
- Arrête de nous faire rire, idiot ! le morigéna-t-elle en ricanant.


Quelques jours plus tard, les deux sabreurs se séparèrent, non sans que Katrina lui ait laissé son numéro de denden mushi. Les promesses avaient été échangées mais, en attendant qu'Hayato n'arrive sur North Blue, la chasseuse de primes était libre de voguer comme elle le souhaitait et, d'enfin, profiter d'une vie libérée de toute contrainte.


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