The Violator

Un nouveau matin se lève sur Libertalia. La ville de Rochenoire est enfin terminée et j'en ai confié la gestion à ce bon vieux Rackham. De ce fait, j'en ai profité pour dispatcher une partie de mes forces vives à ce qui deviendra Tréno à l'Ouest et le Grand Bazaar à l'Est. Actuellement, je suis en train d'assister Priscilla qui construit la ville coté soleil couchant. A l'opposée, j'ai chargé une femme de la tribu des trois yeux, Maryann Sorrento d'y ériger une cité, si son travail me convient, je lui en ai promis le poste de mairesse. Cependant, j'aimerais aussi bâtir des villes au centre de l'île et au Sud, mais, malheureusement, je ne dispose pas de la main d'œuvre nécessaire pour mener autant de chantiers en même temps. D'autant plus qu'il me faudra aussi réparer la ligne de chemin de fer Nord que j'ai salement amochée lors de la chute de l'Asile. Et je ne parle même pas de rendre les terres cultivables. Thelwyn, un géant amoureux des choses qui poussent, éprouve toutes les peines du monde à cultiver les semences qu'Elize a eu la délicatesse de nous fournir. Selon le colosse, la terre est bonne, mais la pollution et un manque d'entretien l'ont rendue presque stérile. Ma volonté de reverdir l'endroit n'est donc qu'un rêve lointain et qui demandera beaucoup de travail et d'efforts. A moins que … oui. J'ai bien une idée. Mais, sera-t-elle disponible? C'est une grande et bonne question.

J'émerge donc de mon lit. Et je sors profiter de la fraîcheur du matin. L'aube est magnifique et colore le ciel d'orange et de mauve. Je distingue quelques rais de lumière passer au dessus des ruines de l'Asile alors que je savoure mon petit déjeuner en terrasse avec mes gars. Le ciel est voilé, mais mes compétences de démomètre m'indiquent qu'il ne devrait pas pleuvoir aujourd'hui. Ainsi les travaux ne seront pas ralentis pas les caprices de la météo. Tant mieux! La chose m'arrache un franc sourire. La matinée se passe bien, j'aide au mieux de mes capacités aux travaux, c'est à dire que je me contente de porter des choses, d'en dissoudre d'autres, et de coordonner les navettes ferroviaires de récupérations des débris de la Grand Prison. La seule ombre au tableau, c'est le stock de charbon qui se réduit comme peau de chagrin. Je me demande où les forces du Malvoulant s'approvisionnaient, parce que, mine de rien, le chemin de fer est super pratique! Bientôt on ne pourra plus récolter les débris de l'Asile pour nous aider à bâtir et ça risque de poser problème. Je dois donc soit trouver une source d'approvisionnement en houille, soit utiliser une autre énergie pour mouvoir les locomotives. J'aurais bien besoin de l'aide d'un ingénieur de génie sur le coup.

Bref, c'est peu après la pause déjeuner que les choses se mirent à prendre une mauvaise tournure. Un coup de den den affolé de Maryann.

"Jeska, on a un gros problème." m'annonce-t-elle paniquée.
"Quoi donc?" demandé-je à brûle pourpoint.
"Il est là!"
"Qui?"
"Frost!" souffle-t-elle.
"Mer... credi!" pesté-je entre mes dents.
"Je fais quoi?"
Je réfléchis à toute vitesse. "Tu lui dis que j'arrive. Mais que ça prendra un peu de temps. Je prends le prochain train en direction du centre, toi, demande à ton chef de ligne de m'attendre, compris?"
"Oui. Et moi, pendant ce temps, je fais quoi?" s'enquiert-elle.
"Tu le fais patienter. Et tu ne dis pas un mot sur Elize, compris?"

J'entends juste sa déglutition difficile, avant qu'elle ne raccroche. Je pense qu'elle doit me maudire, mais je n'ai pas le choix. Et à voir ma mine déconfite, Héfy qui m'accompagne dans chacune de mes aventures, s'inquiète.

"Il se passe quoi?"
"Frost est là." dis-je d'une voix blanche.
"Merde, on fait quoi?"
"Je vais le voir pour limiter la casse."
"Ha, ouais, c'est vrai, le chaperon qu'il t'avait collé s'est fait buter et tu ne l'as pas averti."
"Je devais aussi lui faire mon rapport une fois la conquête finie."
"Ha ouais, tu es mal, Jes' "
"Tu as besoin d'aide?" me demande Diego, l'homme poisson masqué à l'accent hispanique.
"Moi aussi je peux t'aider Jeska-chou." renchérit Priscilla, la Reine des Glamazones.
"Non, toi, tu restes là, j'ai besoin que tu continues de superviser le chantier." dis-je à l'okama. "Par contre, Héfy, Diego, vous venez avec moi."
"Pourquoi moooooiii?" gémit la blonde.
"Parce que j'ai besoin d'un plan et que je ne connais pas de meilleure stratège que toi. Et si ça venait à tourner au vinaigre, je pourrais compter sur la force de Diego."

L'homme-lamproie bombe le torse, et Héfy apprécie que je la caresse dans le sens du poil. Et comme prévu, on quitte la ville qui ne dort jamais pour rejoindre le Grand Bazaar. Dans le train, on parle stratégie, que faire pour tuer Frost. Après tout, il me simplifie la tâche en venant de lui même ici; et ce genre d'opportunité ne risque pas de se représenter de sitôt. Après une brève escale au centre de l'île, on remonte dans un wagon. Cette fois, les discussions sont plus détendues, on se remémore le bon vieux temps, et on rigole.

Finalement, l'après midi touche à sa fin et on met enfin les pieds dans la ville de l'Est. Et que dire sinon que Maryann a bien bossé. Forte de son sens des affaires, elle a réussi à se procurer pas mal de matériaux. Et sa cité semble déjà pleinement fonctionnelle : le port peut accueillir des navires aussi grands que celui de Frost. Quant au marché, l'abondance de tissus colorés masque à merveille la vétusté des bâtisses. Et surtout, le tout grouille de vie! Partout où mon regard se pose, je vois une échoppe ou une boutique. Ici tout se vend, et c'est sans doute ce qui fait la force de ce lieu! Et puis, soudain, je le vois. Ernest Snowfall est assis le plus naturellement du monde à la terrasse d'un café discutant avec Maryann. Je reste maître de mon envie de le tuer et je m'approche lentement.

"Bonsoir, capitaine. Quel bon vent vous amène?" dis-je en guise de salutation.

- Allons Bébé, pas la peine de la jouer aussi formel. On est entre nous non ?

Et je m'amuse d'autant plus que je déguste la colère de Jeska comme on goute un grand cru. On veut me tuer, on serre les dents, on se maitrise... Devant le fort, les faibles s'écrasent et ici l'empereur c'est moi, vous autres n'êtes que de pauvres larbins sans importance, alors allez y, rampez...

- Et puis il n'y a bien que Rossignol pour se contenter simplement de capitaine... Viens, t'asseoir avec nous.

Manque de bol il n'y a que deux chaises a la table, et les deux sont occupés. Que les autres restent debout, je ne partage pas ma table avec les sous fifres. Evidemment, ma présence a vidé le café et il ne manque pas de chaises a saisir, et j'attends avec impatience qu'un des péons de Jeska s'avise d'en attraper une.

En face de moi, la miss qui joue les hôtesses prend les devants, commençant à se lever pour céder la place à la patronne..

- Toi, va chercher un verre pour ta capitaine. Et inutile de lui faire de la place..

Et me tournant pour offrir un genou accueillant à Jeska, je me tapote la jambe pour lui faire signe de s'asseoir plutôt ici. Alors miss poison, montre a ton équipage a quel point tu as du cran, montre leur qui est le patron ici.

Je le trouve bien familier le Fléau. Déjà qu'il vient ici et se comporte comme s'il était en territoire conquis. Encore une fois, je fais des efforts pour rester maître de moi. Mais ce n'est pas l'envie qui me manque d'occire l'Empereur, seulement, je me retiens. En effet, je ne vois pas Sakazuki, et je me demande bien où il est. Maintenant mon expression accueillante de façade, je franchis les quelques mètres qui me séparent de la table à laquelle est assis Ernest Snowfall.

Il me donne du "bébé" du "entre nous" et veut que je m'assoie sur son genou comme une vulgaire pouliche! La raclure! Il croit qu'on est amis? Amants? Clairement pas! T'es pas chez toi ici! Tu n'est qu'une tumeur que je vais exciser! Mais pas ici, et pas maintenant. Tant que tu tiens mon fils en otage, je ne ferai rien contre toi. Et tu le sais, sale … grrr! Tu le sais, et tu abuses du peu de pouvoir que tu as sur moi? Je déglutis difficilement, ce n'est pas tous les jours que je dois ravaler ma fierté. Et elle a du mal à passer, à croire que je commence à souffrir d'un excès d'égo, comme tous les pirates un peu connus.

Maryann me regarde, comme tous ici d'ailleurs. Un ordre, un geste de ma part et c'est le bain de sang. D'un très léger mouvement de tête de droite à gauche, j'indique à mes troupes de ne pas agir de façon inconsidérée. Et alors que je prends place sur le "siège" que m'offre le félon, je dis simplement.

"Un jus de pommes, s'il te plaît. Et si tu veux bien avoir l'obligeance de lui remettre la même chose, ce serait adorable. Merci."

La maire s'exécute sans mot dire. Quant à moi, je bouillonne, mais je dois me contenir, j'espère que ce malotru n'aura pas la goujaterie de dire que je suis lourde ...

"Alors, Frosty" poursuis-je avec emphase. "Que puis-je faire pour t'être agréable?"

Ce n'est pas la première question que j'ai envie de lui poser. Ce que je veux, ce sont surtout des nouvelles de mon angelot. Mais je refuse de lui donner plus de pouvoir qu'il pense en avoir sur moi. Alors je temporise et joue le hôtesses.

Tout le monde regarde la terreur et attend l'explosion. Je suis sur que même ceux qui comme moi n'ont pas le bénéfice de savoir ce qui se passe exactement sous son crane peuvent sentir les ondes de colère qui se dégagent de la pirate. Un ordre, un mouvement de sa part et tous ses braves larbins seront heureux de se jeter sur moi pour que je les tue, fier de mourir pour l'honneur de leur capitaine.

Mais quel honneur hein ?

Quelle fierté pirate ?

Quelle terrible terreur, maitresse des mers du nouveau monde ?

Rien qui ne se dégonfle comme un vulgaire soufflet devant la dure réalité et la juste loi du plus fort. Sans surprises, Jeska s'écrase, s'humilie, et derrière elle ses larbins ploient l'échine à leur tour en la voyant se soumettre. Braves chiens. Savoir reconnaitre son maitre c'est au moins avoir un peu de sens commun, peut être que je n'aurais pas besoin de tous les liquider.

- Pour m'être agréable ? Tu peux commencer par m'expliquer ce que tu crois être en train de foutre ici.

Parce que j'ai comme l'impression que tu as un poil outrepassé mes ordres pourtant on ne peut plus clairs et simple, et je n'aime pas beaucoup ça. Mais t'inquiète pas, avec moi tout se paye, et je n'oublie jamais rien qui ne me soit du.

Encore un frémissement de colère du coté des larbins. Ça n'aime pas mon ton familier ? Ça a du mal a s'habituer a l'idée que le vrai patron c'est moi? Peut être que je devrais en tuer un pour l'exemple ?

Attendons un peu, de toute façon ils ne vont pas partir...

La question de l'Empereur ne me surprend pas. Après tout, ne m'a-t-il pas envoyé ici pour que j'y crève? Je n'ose imaginer sa déception de me voir en vie et en train de faire de l'Asile mon quartier général tout en me constituant une armée de soldats loyaux et reconnaissants. Son plan s'est retourné contre lui et c'est bien fait! Ca lui apprendra à me sous-estimer! Son aigreur et son impolitesse ne sont que des signes de sa propre faiblesse. C'est à moi de ne pas me laisser emporter et de feindre l'obéissance et la naïveté. Je vois une froide colère remplir son regard alors je réponds.

"Oh ça?" dis-je en désignant d'un large mouvement de bras l'île et tous ces habitants."Je comptais t'en faire la surprise, mais … " je laisse un petit temps passer. "Tu es arrivé trop tôt!" poursuis-je sur un ton de reproche badin. "Tu m'as demandé de te conquérir l'Asile, mais je n'allais quand même pas te livrer une île en ruines!"

Je ne lui laisse pas vraiment le temps d'en placer une et je développe. Je lui parle des villes qu'on est en train de restaurer, du chemin de fer qu'on répare, et même de la terre sur laquelle rien ne pousse malgré nos efforts. Bien évidemment, j'insiste sur le fait que tout ce qu'on accomplit ici, c'est pour lui. Et je passe sous silence la venue d'Elize et l'alliance que j'ai noué avec les anciens pirates de la Flotte d'Ivoire.

"Alors tu vois, il y a encore beaucoup de travail pour rendre tout ça présentable, mais les travaux avancent bien. Est ce que ça te plait?"

- Mouais, ça fait pas très pirate...

Et surtout, je n'ai pas l'impression que les gens du coin aient bien conscience de la chaine de commandement qui prime ici. Ça sent la loyauté acquise à la libératrice à plein nez, et je suis a peu prés sur que dans la fureur de l'action elle aura oublié de leur signaler qu'elle agissait ici sur ordre, à ma botte, et uniquement pour mon compte.

Il faudra faire un point.

- Enfin, il suffira de transformer tes villes en centre d'entrainement et peut être qu'on obtiendra quelque chose d'utile.

Au moins sur Pearl Harbor je suis arrivé à temps pour ne pas la voir transformer une superbe forteresse en centre de loisirs et de vacances. A croire que je suis le seul a comprendre quelles sont les bases nécessaire à l'établissement d'une vraie puissance, d'un vrai royaume. Assez puissant et vaste pour lever des troupes capables d'écraser les trois autres prétendants à la seule couronne qui compte.

- Et en parlant de surprise, comme tu as l'air d'aimer ça je t'en ai amené une aussi. Devine qui est le petit chiard qui voulait voir sa môman ?  

Suivant un signe qu'ils ont étés les seuls à voir, mes gars finissent de distraire le môme au nom d'amiral pour lui montrer la table ou se trouve sa mère et le laisser filer vers le bar. Sakazuki. Quelle idée de filer ce nom la a un gosse, je peux pas le saquer, et il a de la chance d'être le boulet chainé attachés aux pieds de sa pirate de mère pour la contrôler, sinon ça fait beau temps que je l'aurais balancé par dessus bord.

En tout cas il arrive. Et il n'est pas seul, dans son ombre se trainent deux silhouettes massives et monstrueuses, poils blanc, griffes et crocs jaunes sales de la taille de sabre, yeux rouges et fous. Deux yétis suivent le petit môme qui court vers sa mère pendant que tout le monde se planque devant les monstres. Des yétis que sa mère connait, ils servaient de matons a Teach du temps ou la Fin de Toreshsky lui servait aussi de prison, des monstres assoiffés de sang et de carnage, que l'esprit du Malvoulant a brisé a grand coup de haki royal, des bêtes qui sont maintenant plus proches des cyborgs du gouvernement que de simples animaux, assujettis, obéissants, et qui ne doivent qu'au contrôle que mon haki exerce sur eux  de ne pas décapiter et croquer immédiatement le petit môme idiot a qui je les ai offert.

- Tu as vu maman ? Papa m'a offert des yétis !

Et puis il y a ça aussi. Et derrière la bouffée de peur qui embrase la louve qui s'inquiète pour son petit, je sens grandir encore la haine et l'impuissance... Qu'est c'est c'est bon !

- Il m'a dit que tu lui avais fait croire que son père était mort... Ce n'est pas très gentil de ne pas lui avoir dit que j'étais son papa.

Franchement, qu'est ce qu'il y a de plus con, naif, et facilement manipulable qu'un môme ? Et quelle terrible faille ils font dans l'armure des plus coriaces. Je me demande si je pourrais envoyer Jeska buter Damien ?

Je fulmine. Il trouve que ça ne fait pas assez pirate. Je lui en ficherait moi des forbans! Red aussi trouvait que je ne me comportait pas assez comme une fille de la flibuste. Je ne comprends pas, il y a un dress code du bon boucanier? Tsss... Big Mom vivait sur Whole Cake Island avait un équipage assez hétéroclite, et même Buggy régnait sur un cirque. Et ce n'est pas une métaphore. Je ne suis pas certain qu'on aurait osé leur dire qu'ils ne font pas très pirate. Mais soit, Libertalia n'est pas la Ruche, Armada ou Jaya de la grande époque. J'ai envie de faire de cet endroit quelque chose qui me ressemble, mais il semble aussi évident que je ne serai pas libre de le faire tant que je travaillerais pour Frost. Je vais donc devoir temporiser ou jouer l'obéissance de façade et faire progresser mes projets dans son dos.

Puis soudain, moi aussi j'ai le droit à une surprise. Je vois enfin mon petit angelot. Sakazuki précipite vers moi. Sans réfléchir, je quitte mon siège et je laisse mon enfant me percuter avec toute la force de son amour. Je sens mon coeur bondir dans ma poitrine quand ses petits bras m'étreignent. Et moi aussi je le serre fort contre moi. Peut être même un peu trop.

"Maman, tu me fais mal." gémit-il.

Je le libère de mon câlin et je le regarde.

"Tu as tellement grandi." lui dis-je dans un franc sourire. "Un vrai petit homme." je voie ses joues rosir un brin. "On va passer du temps ensemble, promis. Mais …" Je vois dans les yeux bleus de mon petit bout de chou qu'il n'a pas envie que je poursuive ma phrase. "Tu peux aller jouer avec tes amis yétis si tu veux ou avec Héfy, Diégo et les autres, tu leur à beaucoup manqué tu sais?"

Le petit ange file vers la compagnie de son choix tandis que je le couve du regard. Mais très vite mes yeux se tournent vers le Fléau et si mes pupilles pouvaient tuer, l'Empereur serait mort et enterré à l'heure qu'il est. Cette fois, je ne me rassois pas sur la jambe, je reste debout, toisant le Marine félon de toute ma hauteur et ma fureur.

"Nous savons tous les deux que tu n'est pas son géniteur. Qu'est-ce que ça signifie?"

Je crains de connaitre déjà la réponse, mais je préfère demander, histoire d'être sûre.

Mais Sakazuki ne va nulle part. D'abord parce que je ne lui en laisse pas le temps, et ensuite parce qu'il sait très bien qu'il doit rester la. Le môme est plus facile à dresser que sa mère, mais ce n'est pas grave, j'aime qu'on me résiste...

- Ce que ça signifie ?

Ma colère se déverse comme une vague de haine et de violence autour de moi. Je l'imagine comme un cri, brutal, prégnant, la matérialisation de mon esprit, de ma volonté inflexible qui va se confronter a toutes les autres alentour, et qui les écrase, les détruit, les piétine ! Les gens s'effondrent dans les rues, dans les maisons, tombant pèle mêle la ou mon esprit les fauche, yeux exorbités, bave aux lèvres,  corps agités de tremblements, gisant soudain comme autant de pitoyables marionnettes dont moi, maitre du jeu, viendrait de couper tous les fils.

Voila ce qui se passe quand on met un empereur en colère. Quand on me met MOI en colère. Est ce que tu comprends Jeska ? D'une parole je peux décider de la vie de tous ceux qui s'agitent vainement ici en croyant contrôler leurs existences, d'un geste je peux détruire cet endroit que tu crois avoir construit. Tout ce que tu penses être à toi est a moi !

La seule vérité c'est qu'il n'y a que celui qui peut détruire complétement quelque chose qui la possède vraiment. Et il n'y a rien que je ne puisse détruire, et j'ai l'impression que tu l'as oublié.

- Tu vois Sakazuki. Est ce que je ne te l'avais pas dit ? Même les adultes mentent parfois. Même ta maman peut mentir.

- Maman ? Pourquoi tu mens sur papa ?!
- Elle a peur Sakazuki. Peur que tu deviennes un vrai pirate, peur que tu la quittes. Elle a peur de toi, alors elle te ment. Et tu sais ce qui se passe quand on ment ?
- On doit être puni !

Oh, comme je l'ai bien sermonné et dressé pour en arriver la. Mais les mômes sont si malléables, si sensibles, si facile à modeler pour peu qu'on alterne assez vite la carotte et le bâton. Le môme retient ses larmes, bien droit sur ses appuis, poings serrés. Il a mis du temps a croire a son histoire, du temps à accepter le poison que j'ai instauré dans son esprit, goutte après goutte. Mais c'est sa mère qui vient de sceller sa croyance en réagissant exactement comme je lui ai dit qu'elle le ferait.

- Tu as raison. Quand on ment on doit être puni. Mais nous ne voulons pas être trop durs avec ta maman n'est ce pas ? Après tout, même si c'est une menteuse et une traitresse, nous l'aimons tous les deux...

Derrière Jeska qui est resté debout malgré la claque mentale que je lui ai infligé, les larbins se sont effondrés comme frappés par la foudre, mais sont encore conscient, affrontant probablement la plus grosse migraine de tous les temps, ou l'équivalent d'un point de vue traumatisme cérébral.

- Tu te souviens de ce que nous avons dit sur ce qu'est un bon capitaine Sakazuki ?
- Un vrai Capitaine ne fait qu'un avec ces nakamas ?
- Exactement Sakazuki. Alors nous n'avons pas besoin de faire mal à maman...
- On a qu'a les punir eux !

Je ne crois pas ce qu'il se passe sous mes yeux. Sakazuki, mon enfant, Frost me l'a pris. Il a pris la place que j'avais dans son cœur. Il m'a pris sa confiance. Je blêmis, horrifiée devant le spectacle qui se joue. Mes hommes sont dans les vapes et seuls restent conscients les deux boules de poils et de crocs que le Fléau à amené avec lui, l'Empereur, mon fils et moi. Dire que je pensais que c'était le moment idoine pour me débarrasser d'Ernest Snowfall! En moins de temps qu'il ne faut pour dire Alabasta, le rapport de forces s'est inversé. Rien que la présence de mon petit ange lui garantissait que je ne tenterai rien, mais là, non seulement je me retrouve pieds et poings liés, mais en plus, il a réussi à me blesser au cœur! Je reste debout, malgré tout, les larmes aux yeux, les lèvres tremblantes et les poings serrés à m'en faire blanchir les jointures.

J'ai perdu ce combat avant même qu'il ne commence. Ca me tue de l'admettre, surtout devant ce faquin avec son petit sourire en coin. Je ne suis pas douée pour réfléchir, aors je reste là quelques secondes, figée, à envisager les quelques possibilités qu'il me reste. Je n'ai pas de solution autre que de m'avouer vaincue. Ca me crève, mais je n'ai pas le choix. Si je mets genoux à terre maintenant, je peux encore sauver ces gens qui croient en moi. Alors, bien que ça me vrille les tripes, je choisis de m'incliner.

"Je …" Nom d'une biscotte, que c'est dur! Chaque mot me donne envie de vomir. "Je vous ai menti. J'ai mal agi et je m'en rends compte à présent. Je vous présente mes excuses. Et je vous demande humblement de bien vouloir me pardonner."

Je n'ai pas dit explicitement que préfère subir leur colère que de laisser l'ire de l'Empereur frapper mon équipage, mais c'est la direction vers laquelle je souhaite les guider. Quoique, je préfère enfoncer le clou.

"C'est moi et mes mensonges qui vous ont fait du mal. Vous pourriez vous en prendre à ces gens, mais ce ne sont que des pions pour moi, ils ne signifient rien."

Au risque que la ficelle soit un peu grosse.

Je me lève pour me rapprocher de Jeska et la regarder droit dans les yeux, assez prés pour que nous soyons les seuls a entendre les mots que je lui murmure.

- Si ces gens ne signifient rien pour toi, alors je vais devoir chercher quelqu'un de plus proche à punir... Tu vois ce que je veux dire ?

Pas de ça avec moi miss poison, ce genre d'écrans de fumée facile ne prend pas. Si tu veux te sortir vivante d'ici avec ton marmot, il va falloir que tu me donnes plus que ça. Et je tiens a ce que tu montres à tes hommes a qui tu obéis quand tu dois choisir entre un ordre injuste venant de moi et leur bien être à eux...

- Pour un mensonge tu n'as qu'a choisir un de ceux la et lui trancher la langue. Qu'est ce que tu en penses Sakazuki ?
- Je.. Je ne sais pas papa...

Je dégaine un couteau de ma ceinture, l'envoyant se planter aux pieds des sbires de Jeska qui nous regardent, consternation, haine et colère se lisant dans leurs yeux. A coté de nous Sakazuki hésite, se triture les mains, oscille. Pff, encore une éducation de fillette, heureusement que je suis la pour en faire un vrai pirate...

Jeska détourne le regard et se penche pour ramasser le couteau, hésitant probablement sur le choix du sujet à découper... Brave fille.

Maintenant je peux me montrer magnanime.

- Je crois que maman a compris maintenant, qu'est ce que tu en penses Skazuki? Tu crois qu'elle nous mentira encore ?
- Oh non !
- Je suis d'accord avec toi. Tu peux les laisser intact et poser ce couteau. On te pardonne...
- Et on peut lui faire la surprise maintenant ?
- Mais oui, maintenant on peut, vas y fils, fais lui la surprise.
- papa et toi allez pouvoir vous marier !

Et le fiel qui se répand dans les veines de Jeska m'est plus agréable que le plus doux des breuvages.

Je passe de la peur de le voir s'en prendre à Sakazuki à la honte d'avoir à mutiler un membre de mon équipage, puis le soulagement de voir que finalement je n'aurai pas à faire du mal à l'un de mes amis. Et, pour finir, la stupéfaction : je peux enfin épouser Frost! Je suis passée par tant d'émotions en si peu de temps que mon cerveau ne capte pas très bien la nouvelle et que je ne peux que balbutier.

"Que... quoi?" Je cligne des yeux comme si je venais de sortir d'un rêve éveillé et que j'avais encore du mal à déterminer si je étais dans le réel ou dans mes songes. "Je … " Je comprends enfin dans quelle situation je suis, et bien qu'il me soit impossible de refuser, ma tête oscille de droite à gauche, contredisant totalement mon discours. "Oui, bien sûr c'est une excellente nouvelle!"

J'affiche un sourire de circonstance, mais mes poings demeurent fermement serrés. Je suis furieuse, et Snowfall le sait. Il savoure mon impuissance comme le plus doux des hydromels, je vois dans son regard que tout ça l'amuse. C'est le moment que choisit mon petit bout d'ange pour se glisser entre l'Empereur et moi et de s'écrier.

"Câlin famille!"

Oui évidemment, pour lui, c'est maintenant une vérité. Frost et moi sommes amants. Mais je ne peux empêcher mon corps de se raidir quand je sens la main du Fléau passer dans mon dos et m'attirer vers lui. Mon angelot bondit et s'accroche à mon cou alors que nous échangeons une tendre étreinte en trio. Ravi de son initiative, mon garçon se laisse choir et s'en va retrouver ses deux "copains" velus. Et alors que je m'apprête à y aller aussi, je réalise que le visage de Frost s'est rapproché du mien. J'ai un subtil mouvement de recul, mais à l'instant où mon regard croise le sien, je comprends qu'un refus de ma part aurait des conséquences funestes. Alors, je ferme les yeux à m'en fendre les paupières, je ravale le dégoût qu'il m'inspire et je me laisse embrasser.

Toutes mes pensées vont vers mon petit Sakazuki, son bien être est ce qu'il m'importe le plus au monde. Alors, si je dois jouer au papa et à la maman avec Frost pour assurer sa sécurité, soit. J'épouserai cet abruti.

Enfin, si je ne l'ai pas tué avant …