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Marine Academy - I [FB 1608]

Tain j’ai un pivert dans la tête, là…

Pas forcément l’truc à dire en face d’un lieutenant fouineur comme le bouledogue qui m’observe, palme à moitié tendue façon j’te salue packe t’es mon supérieur hiérarchique mais j’en ai rien à carrer d’tes grolles et tu déshonores l’uniforme. Déshonorer l’uniforme, déshonorer l’uniforme… Jvais t’le déshonorer, moi, ton uniforme, tu vas voir c’que c’est. Oh ! Non mais. Bordel. Gaarde àà vous ! Pas l’temps d’entamer les hostilités et d’expulser en m’cognant les neurones réfractaires à l’effort d’puis l’aube, bam, jme r’lève au sacro-saint appel à la discipline, comme monté sur ressort, et jsalue le coloneton qui s’est ramené en scrèd sans que j’l’entende.

L’méchant chien d’garde qu’était v’nu en éclatant la porte de mon bureau m’avertir de l’arrivée d’son maître adoré me jette un r’gard satisfait façon bisque, bisque, rage, puis décarre se branler sur la botte de l’hyper-galonné. Jconnais l’zigue d’aileurs. Frisottis, peau mate, yeux gris délavés comme une capote de soldat resté en sentinelle trop d’jours de plein soleil, jvois pas encore trop net mais c’est bien le colonel Taquin. Comme tous ces gens dont l’nom a été très bien choisi par l’histoire de leur famille, ça lui correspond pas trop mais en fait si. C’est pas un tendre, mais c’est pas un connard non plus. Un mec bien qui fait son boulot bien. Et qui parfois s’paie un rail d’humour. Genre là.

Encore la gueule de bois Commandant ? Vous êtes incorrigible.
Pas ma faute mon Colonel, y avait Clitis, l’lieutenant Wood vous savez, qui pendait sa…
Pas l’savoir. On les a repérés non loin de Baterilla et je venais vous dire que je pensais à vous et votre équipage pour aller appréhender Stockburn et ses six acolytes de malheur, mais finalement je pense que je vais choisir quelqu’un d’autre…
Quoi ?! Non mais déconnez pas. Mon Colonel. Sauf vot’ respect. Ca fait deux mois qu’on a rien eu à s’mettre sous la dent avec les gars, là… Faut qu’on bouge. Pis le Tambour va rouiller à force de rester à quai… Vous m’connaissez en plus, ’savez qu’jserai à la haut-
Pas l’savoir j’ai dit ! Puisque vous vous inquiétez de votre bateau et de votre équipage, j’en confierai la barre à… au commandant David Jaunes tiens, que vous tenez en haute estime, et
Cet enfoiré ?! Non mais z’êtes pas sér-
Commandant ! Il suffit ! J’ai dit, il en sera ainsi. Et en attendant, pour vous rappeler les responsabilités incombant à votre grade, vous irez m’accueillir le groupe de jeunes recrues qui doit arriver dans l’après-midi. Je compte sur vous pour les tester une dernière fois avant qu’ils n’aillent au front…

Humour mon cul…

Jdis rien. Taquin me r’garde le cul en bouche de poule, ou l’inverse, sûrement outré que j’aie pu oser insulter un collègue sous ses yeux. Jle comprends. J’sortirais pas d’cuvée, j’me serais probablement pas permis. Mais bon. Putain, penser que ce connard de Jaunes dirigera mon équipage et mon navire pour aller cueillir cet enchosé de Stockburn et récupérer sa prime, rah ! J’ai l’œil qui fume et la narine qui frémit, mais j’arrive à m’la fermer jusqu’à c’que sa sainteté d’colon s’soit taillée. C’est ça, barre-toi. Barre-toi et prie pour que ta douce soit moche, j’ai la vengeance mesquine.

Et accueillir des nouveaux… Nan mais j’ai une tête de père poule, moi ? Y en a sûrement qu’ont la fibre, mais c’pas moi, l’instruction. Ca s’saurait si j’étais bon ailleurs que dans un pageot ou sur un champ de bataille, bordel. Il est fou, lui… L’a fumé ptetre ? En douce, comme ça. C’est souvent ceux qu’on dirait pas qui s’adonnent à c’genre de trucs, paraît. Barf. Héhé. Il l’apprendra bien, tiens. R’marque. Quand j’en aurai perdu la moitié en route, ptet il s’dira qu’c’était pas le bon choix. Ca m’arrangera pas l’plan d’carrière mais ça lui f’ra les pieds. A taquin, taquin et demi…

J’arrive dans la cour d’honneur deux plombes après. Le régiment d’pimbêches me fait face, d’jà là depuis une, maintenu en place par un sergent-chef à gueule de clebs lui aussi. Ptain, c’est un chenil ce QG ou quoi ? Mh… Phase d’observation sans rien dire. Suis pas vieux moi, j’ai tout juste mes vingt-trois piges. Putain, jsuis commandant à vingt-trois piges ? Haha, c’te classe. Mais bref, eux sont carrément des mômes. Y en a, suis même pas sûr à les voir qu’z’ont les quinze ans d’base. Un r’gard en coin au bâtiment où crèche le Colonel, suis sûr qu’lui prend son pied à m’mater. Pis j’reporte mon attention sur les poucets. Okay les louloutes. Z’avez rien fait pour mériter ça, mais vous m’avez.

Okay, jcommence.

J’les vois s’resserrer les rangs, s’redresser la motiv. S’sentir enfin là où y doivent être. L’armée. Le QG, youpi. Qu’y pensent. J’les douche froid. Enjoué mais froid. La Marine, ça rigole pas, autant qu’ils le sachent vite.

Condoléances, mauvaise troupe ! J’suis l’Commandant Tahgel, mais ’pouvez m’appeler Commandant. Et c’est moi qui vais vous faire visiter les lieux. Des questions ? Tant pis, j’y répondrai pas. Mais par contre vous pouvez m’faire deux cents pompes pour montrer qu’vous êtes bien dignes de vous pointer chez moi. Ouais, là. Maintenant.

Pas comme ça qu’on fait d’hab ? Rien à foutre, comme ça que j’fais moi. T’assumeras, Taquin.

Allez ! Z’attendez quoi ?!


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Dernière édition par Tahar Tahgel le Lun 30 Juil 2012 - 23:33, édité 2 fois
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Marine Academy

South Blue, jamais je n'aurai dû me retrouver dans cette mer paumée et calme. J'avais eu la chance ainsi que le privilège d'être affecté sur l'un des navires de guerre de la Marine qui traversait la quatrième voie de Grand Line, celle de tous les dangers. Mais j'ai fait preuve d'immaturité en provoquant en duel l'un de mes officiers supérieurs, encore aujourd'hui je me demande quelle mouche m'a piqué ce jour-là. Résultat des courses, j'ai été affecté au quartier général de South Blue, puis j'ai été rétrogradé au grade de simple matelot avec en prime trois mois de corvée. L'année 1607 fut un véritable cauchemar, mais je ne peux m'en prendre qu'à moi-même, j'ai fauté, j'ai payé et puis l'officier auquel je me suis confronté n'a pas été trop sévère dans sa déposition, j'aurais pu être emprisonné et renvoyé de la Marine. Tout ceci n'est plus qu'un lointain passé, il faut que j'aille de l'avant et que je réfléchisse davantage. Il est temps pour moi d'être un homme responsable et de ne plus être ce gamin que j'étais l'an dernier, cette nouvelle année doit marquer un tournant dans ma vie !

Les trompettes résonnèrent dans le quartier général de la mer du sud, je me suis donc levé d'un bond de mon lit pour me diriger vers la cour principale. Tous les marins en firent de même et nous nous mimes en position pour recevoir l'invité de marque. Néanmoins, ce dernier n'arrivait pas, les minutes s'écoulèrent et furent longues et la chaleur commençait à devenir insoutenable, le soleil était à son zénith. Personne ne bronchait, tout le monde restait à sa place prenant son mal en patience. Soudain un homme arriva dans la cour, il était jeune, les cheveux bruns et ébouriffés c'était un haut officier et cela se voyait par rapport à sa veste. Il nous regarda d'un air sévère avant de prendre la parole. La tension était palpable, je me demandais qui était cet homme qui forçait le respect. Dès qu'il ouvrit la bouche les rangs se resserrèrent preuve de notre respect envers lui. Il marqua une courte pause avant de reprendre la parole. Je l'écoutais attentivement tout en comprenant que cet officier allait être un véritable tyran avec nous.

Il voulait que nous fassions deux cents pompes, il n'allait pas de main morte avec nous à peine arrivé il nous mettait déjà au pas. Je me trouvais au premier rang, je n'osais même pas le regarder droit dans les yeux de peur de m'attirer ses foudres et d'être son souffre-douleur pour le restant de son séjour. L'ordre étant donné tous les marins se mirent en position pour faire les pompes. Les bras fléchissaient, les visages étaient crispés, des grognements jaillissaient des gorges des hommes les plus faibles. C'était une torture sous cette chaleur, je résistais tant bien que mal. Lorsque l'exercice fut terminé les matelots et moi-même nous nous redressions de façon à reformer les rangs. Quasiment tout le monde avait le visage en sueur, moi de même. Finalement pas besoin d'être à Grand Line pour goûter à l'enfer, il suffit juste d'avoir un formateur un peu brute et le tour et joué. Sans le vouloir je croisais le regard avec le Commandant Tahgel, je baissais aussitôt la tête me mordant la lèvre inférieure.

*Bravo Cross, pourquoi l'as-tu regardé ? Un matelot baisse toujours la tête, on ne doit jamais croiser le regard avec un supérieur surtout quand c'est un Commandant et que toi tu n'es qu'un petit matelot.*
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C’vous a plus, z’en voulez encore ?

Lueurs d’inquiétude. Est-ce que j’vais les tuer d’ici ce soir ? Est-ce que c’est pour ça qu’on les a confiés à moi ? Qu’est-ce que j’vais leur pondre encore ? Sais pas trop, blanc-bec, laisse-moi l’temps, j’y bosse. Y m’aiment pas, jle vois à la sueur des cinq qu’ont crampé sans pouvoir s’rel’ver. Ca tombe bien, jveux pas qu’y m’aiment. Jveux pas qu’y kiffent l’armée. Jveux qu’y restent les conscrits à sale caboche qu’y sont tous et qu’un jour y s’mutinent. Qu’y en ait un qu’aille buter Taquin dans son lit un matin au réveil. Comme ça. Risqué, ça pourrait d’venir moi la cible. Mais rienàf, jsais m’défendre.

M’défendre, ouais.

J’fais jouer le haut d’mon dos, fais voltiger ces connes d’épaulettes que j’me suis pas encore décidé à virer. Deux tours d’arène pour mettre la press’, impressionner la piétaille, focaliser son attention sur moi et mes bottes qui les matent de près. Les noyer sous un torrent charriant des pierres de taille de l’esprit martial grosses comme ta sœur. Les éblouir d’mon aura blanche à peine maculée des excès d’la veille. Les rameuter à moi. Avant de.

Okay mauvaise troupe, à part les trois qu’on évacue, pouvez être fiers. Z’êtes bons pour la suite.

Roh… souriez, ça va pas être si terrible que ça. Connaissez déjà un peu la maison, m’semble, savez comment ça marche. Taper sur les loupiots pour bien les mettre dans l’bain, r’pérer les points faibles et les écarter, r’pérer les points forts et les transcender.

Ca vous dit, d’l’être ? Transcendés. Nan mais répondez pas, c’tait rhétorique.

T’sais pas c’que ça veut dire rhétorique, ptit gars ? Pas grave, tu mourras jeune.

Donc c’est c’que jvous propose, ouais. D’vous transcender. D’faire d’vous des guerriers, des tueurs. D’vous rendre capables de but-d’am’ner les méchants pirates d’vant le sceau implacable de la justice gouvernementale qu’elle est bonne et juste et impartiale ! D’claquer du révo les doigts dans l’nez en r’gardant la veuve souffrir l’orphelin ! De plein d’trucs ! Ouaich.

Mais pour ça mes ptits gars. Pour ça faut qu’vous m’laissiez ancrer en vous l’esprit du combat. Oh oui… Et ça va pas être simple, non, pas être simple du tout. Z’allez souffrir. Z’allez mourir même, pour certains. Mais juste lâcher pour la plupart.

Et l’prérequis, pour tout ça… L’prérequis c’est qu’vous soyez

A

TTEN

TIFS !


Pas d’préambule, jsaute sur le gars. Un gars. Un gras. Pas d’nom, pas d’matricule, pas d’raison. Quatrième ou cinquième rang vers l’intérieur d’la cohorte toute ouïe mais plus aux abois depuis lurette. Et j’l’agresse. Gratuitement. En m’retenant. Lui jveux pas l’tuer. Lui jveux juste qu’y serve d’exemple. Son menton fait poc et ensuite son corps fait flip-flap en vaguelant vers le sol. M’suis pas ret’nu assez, j’ai un tas d’fringues blanches et bleues à mes pieds, avec des vrais morceaux d’chairs inconscientes dedans.

Vigilance constante ! Principe de base si vous cherchez à survivre. Les méchants peuvent arriver d’n’importe où, d’derrière un troquet à sale gueule de bar pas net, d’derrière le bastingage d’un navire que vous croyiez que c’était celui du commandant machin, ou d’derrière les jupons d’une marâtre trop bien conservée pour être vraie. Capisce ?

Sont mignons, m’répondent en chœur. Chevrotant le chœur. Que capisce, mon commandant. J’aime bien qu’on m’dise mon commandant. Ca sonne doux, jtrouve. Pas toi ?

On va vérifier ça… Z’êtes prêts les louloutes ? Bien, donc on lâche les armes dans l’coin là-bas. On les lâche ouais, les récupérerez plus tard, voilà… Allez, dépêchons, dépêchons. Bon, et maint’nant on s’refout en rangs, voilà… Allez allez, pas qu’ça à foutre. Bon. Et maint’nant. Baston générale.

M’regardez pas comme ça, z’avez bien entendu. En douce dans vos ptites cervelles vous choisissez un d’vos ptits copains, n’importe lequel, d’préférence pas votre voisin. Vous l’choisissez bien. Et vous courrez lui foutre dessus sans l’prévenir. Ceux qui tiennent encore debout dans dix minutes ont gagné leur fin d’journée. Les autres continueront.

Prêts again ? 5, 4. 3. 2.


J’me r’cule pour les laisser à leur aise. M’pose cont’ un mur. Allume un clope en saluant du crin l’Taquin qui m’mire depuis là-bas. Des gars d’la troupe déjà à demeure s’installent au-d’ssus d’moi sur le chemin d’ronde pour spectater. Vrai qu’ça va valoir le coup d’mire. Ptet. Allez, y s’languissent. S’trémoussent. Silence. Et mon allumette qui tombe à terre.


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Le destin était vraiment contre moi, à peine avais-je terminé mes mois de corvées que l’on me mit sous les ordres d’un Commandant tortionnaire. Je voyais sur son visage qu’il prenait un vrai plaisir à nous maltraiter, néanmoins il faisait cela pour notre bien. Subir et se taire, voilà la règle d’or dans la vie d’un matelot lors d’une session d’entrainement. Les rangs étaient reformés, l’officier en profita pour nous parler, un vrai bavard celui-là, il parle beaucoup trop à mon goût et je n’arrive pas à le suivre. Je suis littéralement perdu dans ses phrases jusqu’au moment où je vois l’un de mes camarades se faire jeter au sol. Il était inconscient, le choc fut violent, le Commandant Tahgel n’était pas allé de main morte. Il nous expliqua qu’il fallait toujours rester sur ses gardes et ceux dans n’importe quelle situation. J’avais envie de lui dire que si le pauvre bougre n’était pas sur ses gardes c’était parce qu’il se trouvait dans une session d’entrainement et non sur les flots. Mais, je préférais me taire, inutile de faire l’intéressant et la recrue dure d’oreille. Toutes les armes que nous possédions devaient être déposées dans le coin là-bas au fond. Une fois cela fait, les rangs se reformèrent et nous étions près à continuer cette journée d’horreur.

Maintenant que l'échauffement des pompes n'étaient plus que du passé, il était temps de passer à un exercice un peu plus primaire : une baston générale pour reprendre les mots du Commandant. Tous les matelots se dispersèrent dans le camp d'entrainement à la recherche d'un partenaire et d'un peu d'espace, personne ne voulait se gêner. Pendant ce temps le formateur s'en alla, du moins il s'adossa sur un mur pour nous regarder. Je le regardais, il me regarda, des gouttes des sueurs dégoulinaient le long de mes tempes et l'un de mes camarades m'attrapa par le col de ma chemise blanche profitant de mon absence. Cette prise me ramena à la réalité, celle de me battre. Je me dégageais sans trop de problèmes et je vis tomber mon assaillant. Il faut le dire, je n'ai pas le niveau d'un simple matelot, mais celui d'un deuxième classe ce qui n'est pas le cas de mes compagnons du jour. Mon homme étant à terre j'observais de nouveau le Commandant, il avait sorti une allumette qu'il fit tomber par terre près de sa chaussure. J'avais l'impression que ce geste m'était destiné, alors je bondissais sur Tahgel, tel un fauve enragé. Néanmoins, il n'était pas Commandant pour rien me stoppant net dans mon élan, je me retrouvais à terre comme un vulgaire vermisseaux.

Je voyais les autres marins s'arrêter de combattre, sans doute étaient-ils surpris de voir que l'un des leurs avait osé s'attaquer à un officier supérieur. Je n'étais pas à mon premier coup d'essai, à croire que j'aimais m'attaquer à plus gradée que moi. A quoi cela servait que je me dise en début de journée de rester impassible et de suivre les ordres du formateur, si au final je fais le contraire ? Peut-être que cela est dans ma nature ? De toute façon le mal était fait et puis cela me permettait de me mesurer à plus fort que moi, car les gus qui sont derrière moi ne valent pas un pet de lapin. Je regardais le Commandant qui fumait tranquillement sa clope et mes lèvres se mirent à bouger.

« Pouvez-vous me rendre plus fort ? » Dis-je.

Je n'en revenais pas de lui avoir dit cela, mais je le pensais très fort. Maintenant je devais attendre que le Commandant Tahgel me réponde du moins s'il le voulait, car il pouvait très bien me dire : un mois de corvée de chiottes ! Rien qu'à l'idée de penser à récurer encore les chiottes de la base de South Blue, j'en avais des frissons.
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Ah, l’coup d’mire, sûr qu’ça a dû l’valoir. T’sais, comme au cirque pendant le numéro du trapéziste où tu te dis que nan c’est pas possible y vient pas de faire ce qu’y vient de faire sans se rétamer, y a eu un murmure dans mon dos. Sur le chemin d’ronde au-d’ssus de la grand-porte. Y a eu. Car maint’nant que j’ai foutu la serre autour du cou du blanc-bec qui m’a sauté sur la grappe comme un chaton sur le râble de son père, car maintenant que je l’ai ramassé et que je le tiens à bout d’bras devant moi deux pouces loin du sol, c’est silence complet. Même les gladiateurs ont stoppé net leur numéro public. Même les sentinelles en haut de leurs tours de garde savent plus où donner du regard tellement y a plus d’bruit dans le reste du bâtiment qu’elles sont censées surveiller. Même la nuit y a plus de raffut qu’ça, faut dire, avec les ronflements qui sortent des dortoirs et de la chambre du colonel. Mais là.

Rien. Et tous attendent, et tout attend que j’dise un truc, jusqu’aux cailloux qui rendent inégale la surface de la cour, jusqu’à la poussière qui vole encore des beignes que se sont déjà mises quelques uns des autres gars du régiment. Que j’lui déboîte les vertèbres et l’existence, que j’l’envoie au ciel.

Si je peux te rendre plus fort ? Haha, t’as du cran matelot.

Z’entendez ça les furoncles !? Votre copain a du cran ! Prenez-en d’la graine, tas d’moules…


La dernière invective est gratuite. Elle me sert à trouver ma contenance et ce sur quoi j’vais embrayer. En face et autour on se tâte pour savoir si c’est une invitation à me prendre au mot et à me foncer tous dessus pour faire comme le petit camarade. Mais après avoir regardé son voisin on se dit que c’est pas forcément une bonne idée et on bouge pas, continuant à me regarder. Sage décision les enfants. J’en reviens au petit protégé qui commence à bleuir un zeste de la mouille à force de rester suspendu en l’air à chercher l’air. Respire mon jeune ami, respire. Regarde, j’relâche un peu.

Sûr que jpourrais. Mais pour dev’nir plus fort faudrait déjà qu’tu l’sois un peu.

Non mais. On m’a pas comme ça moi. On m’force pas la main dans une négociation. Bordel de dieux.

Quand les cendres tombent de mon mégot j’estime que ça a assez duré et j’contracte les muscles pour le balancer. Le mégot. Mais le soldat aussi. Loin. Le soldat. D’une pichenette. Le mégot. Et d’un moulinet façon lancer d’poids olympique. Le soldat. Il atterrit sur deux congénères un peu bruts de décoffrage qu’amortissent sa chute à genre vingt toises de moi. Les deux brutes se relèvent pas pour cause qu’elles ont l’une pris ses bottes dans l’arête nasale et l’autre son bras dans les dents. Mais lui oui, lui s’relève. Alors soudain jme dis que ptêtre il mérite un peu d’attention. Que ptêtre il est plus qu’un bientôt-mort destiné à servir de chair à canon faire-valoir à son prochain officier tutélaire.

Mais plus tard, pas d’vant tous les badauds du cugé.

Pour l’instant z’allez tous m’reprendre l’exercice, ça fait pas encore dix minutes.

Et qu’ça saute, oh ! Sinon j’en connais qui vont mal finir leur semaine d’intégration…


Mon r’gard doit en dire long. Ou la menace être convaincante. Après trois grognements ceux qui sont encore en forme se remettent à se taper dessus comme des mous. Ca les a coupés dans leur élan, jleur en veux pas. Mais peu importe. Reprendre le rythme du combat à n’importe quel moment, c’est aussi une leçon en soi. Et à celui qui s’est tapé l’incrust dans mon espace vital, que j’sens frustré qu’y ait pas d’suite immédiate à son acte qui pourtant mériterait la sulfateuse lourde :

Toi aussi moussaillon. Au galop.

Et demain tu r’viendras ici-même avant l’aube, qu’on cause un peu toi et moi.


Il y r’tourne et quand j’décide qu’enfin ça fait dix minutes, à deux ou trois heures près, y en a plus que douze debout. Ca m’semble un bon score. Les autres partent à l’infirmerie, eux s’pieuter. On vous avait promis les soirées endiablées des dortoirs militaires, c’est pour ça qu’vous avez signé ? Ben la fiesta c’sra plus tard, héhé. Pour l’instant vous pioncez. Et à la bonne tienne Taquin. Après un r’gard en coin vers la f’nêtre depuis laquelle le susmentionné colonel a pas pu louper grand-chose, jme tire pour une soirée pas si intéressante que ça à base de rien foutre et qu’on peut zapper. Et à coup d’ellipse temporelle on s’retrouve à l’aube suivante.


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L’aube qui s’lève est rouge. Rouge du sang qu’a dû couler la nuit avant. L’sang des gladiateurs d’hier qui sont allés finir sous la douche c’que z’avaient commencé la veille en mode j’ai peur du patron dans la cour d’honneur sans pouvoir le finir faute de forces suffisantes. Et derrière c’ciel d’apocalypse s’dresse une journée intéressante, qui tarde pas à dérouler ses moments exceptionnels devant moi. D’abord le gars. Cross Jones qu’y s’présente. M’attendrait là depuis trois plombes si j’en croyais son air meurtri par les rigueurs de la nuit. Mais jsuis pas comme ça, moi on m’berne pas avec des cernes et la ganache qui tremble d’angoisses pré-traumatiques.

T’es prêt, Cross Jones, matelot seconde classe ?

Le café et la turlute du matin sont bien passés, jsuis plus amène que la veille et moins peau de vache. Problème par contre, ça l’a induit en erreur. Le pauvre se perd à sourire mou pour répondre que oui, et souffre quand je lui fais manger ses dents pour vérifier. Prêt, ça ? Et mon cul c’est du poulet ? J’lui dis d’ailleurs. Que c’en est pas. Mon cul. Du poulet.

Mon cul, c’est pas du poulet matelot, compris ?

Pis après j’lui dis d’se rel’ver, qu’il a une tache là, pistache. Et j’lui en mets une, de pistache. Pour l’faire rentrer vite dans les clous. Les clous du mur. Il y rentre bien. Il y colle même. Et puis après il s’effondre et j’ai peur de l’avoir cassé. J’m’approche comme pour lui souhaiter bonne chance dans sa vie future, sans une once de regrets parce que scénaristiquement c’est pas possible que ce soit déjà fini. Et j’aurais eu le temps de lui pisser dessus avant qu’il se relève. Mais il se relève quand même et c’est pas mon trip, donc au lieu de ça je fume un joint pour l’attendre. Ca m’détend encore.

Compris mon commandant !

Le bougre manque pas d’aplomb. M’regarde avec ses yeux d’ange futur défunt qui va retourner à la poussière façon grand huit. M’regarde l’air de dire apprends-moi j’en veux beaucoup.

J’le répéterai pas sous la torture, mais ça m’touche. J’me revois à sa presque place cinq ans plus tôt, et j’me dis que si j’avais pas débuté caporal direct j’aurais ptet voulu qu’on m’donne les moyens de pas crever troufion. Alors j’me dis que jvais les lui donner, t’auras au moins gagné ça Colonel.

Me r’cule de quelques pas, le laisse souffler pis. Dans l’silence de l’arène qui s’fait pesant au point qu’même les pendus d’la veille se mettent à crisser d’la cravate dans la brise matinale, j’lui dis d’venir, d’me donner tout c’qu’il a. Et advienne que peut.

Allez, viens donc matelot, donne-moi tout c’que t’as. Et advienne que peut.

Le temps d’finir la phrase, j’espérais ne pas l’avoir. Mais j’ai vu un peu trop haut, ptet, alors j’rabaisse mes exigences et j’encaisse sans broncher l’temps d’chargement d’sa course ultime.

L’a du cœur, ça fait plaisir. Après un dernier glaviot dans l’sable déjà mouillé par le sang d’ses dents, il prend son appel et m’fonce dessus comme j’ai d’mandé. Brave gamin. Brave homme, faut en avoir dans l’slip et sur les joues pour oser faire ça malgré les deux avoines précédentes.

Et s’y s’est mis à courir moins rapid’ment qu’prévu, au moins jsuis pas déçu par le carré d’la vitesse de son poing. Bien droit vers la pommette, le tueur m’évite d’un tif de poisson, autant dire de peu, et m’décoiffe les poils du philtrum. Bon, en une clef rapide c’est plié et le voilà à suer sa maman, mais c’était bien tenté. J’vais pour lui pourrir l’estomac par derrière quand jsens un truc me chatouiller les côtes… Héhé, l’impudent perd pas l’nord, cherche à m’caresser les côtes avec son poing même en position d’faiblesse. C’est bien, c’est bien, j’sens l’effort qui lui coûte un max.

Reste conscient, reste conscient.

Que jdis en serrant toujours plus fort au-d’ssus d’son coup. Et comme un jeu du foulard pour ado crédule, sauf que là c’est vrai et qu’ça marche vraiment, j’me fais un d’voir de lui endurcir la couenne à coups d’apoplexie. Il lutte un temps, céde un autre alors j’relâche, retrouve du poil de la bête alors j’reprends, et ainsi d’suite. Pis on enchaîne sur les moments où j’lui d’mande de me donner tout ce qui lui reste. Et il le fait, et on y r’tourne, et il le fait et on y r’tourne.


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On arrive au point où c’est la pause de une heure après. Pause clope, pause buvette. D’l’eau, l’alcool de trop bonne heure déshydrate, et c’est pas c’qu’est souhaitable dans un entraînement qui va lui tirer les verts du nez. Les bleus. Enfin bref, y m’tape la discut sur comment va sa femme et ses mômes, façon rapprochement maître-élève, t’as vu t’as vu. J’lui dis qu’j’en ai rien à carrer, d’autant qu’jsuis pas sûr qu’y soit pas en train d’m’entourlouper. Avoir une régulière et des chiards à son âge et s’enrôler, c’est l’genre de conséquence de personnage que j’bitte pas bien.

Stoppe le verbiage, matelot. T’es prêt ?

Y stoppe et m’dit que oui, alors on y r’tourne. Et toute la sainte matinée, foie de moi, on y reste. Clitis vient même me chambrer sur le sujet. Jamais j’t’ai vu aussi investi Tahgel, qu’y m’dit. Ta gueule, que j’lui réponds. Et j’lui envoie la poupée Jones dans les bras. Poupée virile, mais poupée quand même, qui pèse son poids et qui sous la surprise lui casse la parlotte. Fait moins l’malin, s’tire et nous laisse. On r’prend, sous les yeux des sentinelles qui s’relèvent. Et jusqu’à la prochaine pause.

Mon commandant ?
Ouais ?
Mon commandant, est-ce que…
Mais quoi ? Crache mon gars, t’vas pas me faire croire que t’es timide après ce que tu m’as montré…
Eh bien en fait j’aurais voulu savoir s’il était possible de, euh…

Et voilà qu’il me balance son gros secret qui tache. Monsieur veut savoir si on peut s’entraîner à l’arme blanche maintenant qu’il s’est bien grippé les articulations en bouffant à maintes et maintes et tellement nombreuses que je le redis une troisième fois : et maintes reprises le sable de la cour. A l’arme blanche ? J’le regarde sans jacter un mot au début. Puis pris d’une idée vachement pédagogue, j’lui dis qu’okay, vas-y mon gars, sors-moi donc ta rapière et saute-moi d’ssus.

Là c’est lui qui gère pas l’info. Y m’demande si j’parle bien d’un vrai sabre qui coupe et j’lui dis que oui, pourquoi, ça te pose un problème ? Y m’dit que non mais j’sens bien qu’c’est à reculons qu'y va chercher l’arme posée pas loin. Moi j’dégaine Narnak mon bon vieux copain et j’attends comme tout à’ l’heure. Et comme tout à l’heure j’lui dis d’venir en m’donnant c’qu’il a encore dans les veines.

Et ça loupe pas. Tchic, dzing, et hop c’est plié. Monsieur Jones a un trait de là à là en rouge pourpre qui point, qui s’étire et qui s’élargit. En plein sur la gueule, à peu près dans la zone de la figure J2. C’est pas grand-chose, ça lui passera vite et s’il va à l’infirmerie on pourra même lui foutre un truc dessus pour que ça paraisse pas plus tard, mais c’est fait, et son sabre vole et se plante là-bas au pied de… Ah, Colonel Taquin. Ca va bonhomme, la forme ? Répond pas à mon phrasé pourtant plein de respect parce qu’il faut bien, tourne les talons et retourne le menton dressé comme si c’était sa virilité dans ses appartements. Et la journée s’termine là-dessus.

Enfin l’intéressant de la journée. Nouvelle ellipse.

Au cinquième jour, le temps de se remettre des coups à répétition et d’esquiver deux batailles rangées qui auront vu disparaître la moitié de ses copains d’arrivée dans le régiment, merci moi, je retrouve le gars Jones pour une nouvelle session de tape. Tape qu’on fait encore au corps à corps, et qu’on terminer pa, cette fois non pas UN, mais bien DEUX échanges à l’arme blanche qui coupe cher.

Et ainsi au septième jour après notre rencontre, au neuvième, et aux, dans l’ordre c’est mieux : dizième, onzième, douzième, quinzième parce que j’ai un peu trop donné la fois d’avant, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième. La récupération est de plus en plus rapide, les progrès sérieux, et même parfois ses poings me font quelque chose, délogeant un nerf ou brisant un ulcère. Ca a pas l’air comme ça, mais ça fait putain d’mal. Et idem à l’épée, jusqu’à ce qu’on arrive à faire matin castagne pure et aprèm escrime.

Tu t’dis que j’ai rien à foutre pour pouvoir me consacrer au brave garçon toutes ces journées. T’as bien raison, j’ai rien à foutre. Pour cause que comme dit au début d’cette histoire, un connard est parti avec mon bateau et mes hommes se castagner une proie qu’aurait dû me revenir. Le tout sur les ordres d’une enflure que j’ai envie d’épingler à un croc d’boucher pour la peine.

D’ailleurs.


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Dernière édition par Tahar Tahgel le Lun 30 Juil 2012 - 23:30, édité 2 fois
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Non, ce dernier message n’est pas l’histoire de comment j’accroche un colonel de la marine à un croc de boucher. Non. Reviens plus tard pour le vice-amiral décapité, par contre. Si tu veux j’ai des tickets en stock et. Pouf pouf.

Non, ce message est plutôt l’histoire de comment j’me suis tapé la copine du colonel Taquin par pure revanche mesquine, pendant que j’envoyais le ci-devant Cross Jones en mission de la plus haute importance, à savoir faire sortir ledit colonel de son bureau. Le tout pour clore son entraînement, lui faire mériter la promotion et la médaille, et surtout afin que je puisse repartir, l’esprit léger et la vengeance, basse et crasseuse forcément, assouvie, en mission pour servir la marine et le gouvernement, à l’époque c’était ma joie.

Arf. Et j’me rends compte en écrivant que j’ai déjà un peu tout dit, et que du coup y a plus grand-chose à développer. Soit, faisons comme ça.

C’que je peux dire pour préciser, par contre, c’est que la mission de la plus haute importance, le Jones s’en est sorti comme il fallait et au-delà même puisque personne est mort pas même Jaunes l’usurpateur, tout content d’avoir coffré Stockburn avec mon matos et mon super Tambour, maudit soit son nom sur quinze générations. Je sais pas quel prétexte il a inventé mais ça m’a suffi.

L’ouverture était faite, facile mais faite, j’en ai profité. La douce était pas moche, dommage pour lui, je me suis sauvagement servi, assez sauvagement pour la faire taire, assez doucement pour pas qu’elle en parle après. Pas même à son mari qui pourtant savait que. Qui au regard échangé quand on s’est croisés, lui rentrant dans ses appartements et moi en sortant en tout bien tout honneur, savait. Mais qui pouvait rien faire sinon ressasser son ignoble conduite et assumer en silence les conséquences de ses actes, c’est comme ça que ça marche.

Et Jones est reparti faire son bout de chemin ailleurs dans un bataillon qui s’est sûrement fait dézinguer par la suite, mais avec une bonne appréciation sur le rapport fait à son supérieur du moment, et une lettre de recommandation pour plus tard soulignant son « potentiel certain » et ses « aptitudes blah blah ». Alors que moi j’embrayais sur un autre truc de soldat à base de meurtre légal et d’offenses à l’ordre public autorisées. Vie classique de marin galonné, end of story.


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