Il referma avec lenteur la revue sur la table, ému. Jamais encore il n'avait lu quelque chose d'aussi merveilleux, d'aussi instructif, d'aussi passionnant! Chacun de ces mots avait été choisis avec soin, reportant précisément les résultats principaux du groupe de recherche. Et quels résultats! Ces scientifiques étaient des biologistes de génie, et leurs découvertes révolutionnaires! Ah… Quel sentiment doux, quelle joie inimaginable d'être tombé sur ce trésor. Les yeux brulant sous l'influence de la passion, fixant le vide, son esprit se remémorait chaque phrase, chaque tournure de cet article. Une poésie, une véritable œuvre d'art. Bientôt sa mémoire retint toutes les tirades, à la manière d'un acteur préparant son monologue. Qui se serait douté qu'un Dendenmushi puisse paraître si grand! Oui, ces gens devaient être formidables.
Alan s'imaginait déjà faisant partie de cette élite suprême, parcourant les mers muni des outils les plus sophistiqués. Penché sur une nouvelle espèce, il était plongé dans une conversation des plus sérieuses. Oui, c'était vrai… Ce poisson possédait d'étranges tâches verdâtres en relief, il faudrait les étudier avec attention. Tout en prenant des précautions, le groupe s'afférait avec lui pour percer ces mystères. Magnifique! Il s'agissait de glandes émettrices de venin. Très puissant qui plus est. D'un hochement de tête, il approuva la remarque imaginaire d'une de ses collègues. Ce poison n'était pas mortel, il se contentait de paralyser ses proies et prédateurs. Peut-être que le groupe de recherche médical pourrait en tirer profit… Il fallait leur envoyer les résultats.
Plus que des suppositions, l'enfant respecté qu'il était dans son rêve était écouté avec attention. Chacune de ses idées étaient retenues, et beaucoup de chercheurs venaient demander conseils auprès de lui. Puis, soudainement, un monstre marin surgissait des flots agités, effrayant ses compagnons. Alan partait alors au combat, terrassant avec élégance le roi des mers. Puis, par un élan de passion, il disséquait avec précision l'étrange animal, perçant le secret de son fonctionnement. Seul son comportement dans son milieu naturel restait inconnu. Notre grand et pourtant petit biologiste plongeait alors sous la surface, afin d'observer le spécimen en direct, sans craintes. Tel un héros.
Un verre se brisa sur le sol, sortant le gamin de sa rêverie. Quelques cris d'exaspérations résonnèrent, tandis qu'une serveuse s'excusait prestement, embarrassée. Mais un verre de moins dans l'estomac d'un alcoolique peut rapidement se traduire par une terrible offense, Alan le savait d'expérience. La jolie terrasse ombragée et bordée de fleurs devint sans tarder le théâtre d'une scène forte intéressante. Certains tentaient de contenir l'homme vexé, tandis que le patron venait à la rescousse de son employée. Vraiment, les marins, ils étaient irrécupérables…
Mais ce genre d'événements courants n'attirait pas notre ami. De plus une idée folle venait de s'encrer au fin fond de son cerveau, accaparant son attention. Peu importe comment tournait le monde, son objectif était tout tracé. Il replaça sa vieille casquette sur ses cheveux roux, avant ranger précieusement la revue dans son petit sac en cuir. Un petit ricanement d'excitation lui échappa, ce nouveau but ne lui plaisait que trop. Mais son approfondissement attendrait demain. Pour le moment, l'île et sa biodiversité étaient à découvrir! Il n'y avait posé le pied que peu de temps auparavant, et personne n'avait put le renseigner sur les différentes espèces de ce lieu… Il lui fallait donc faire ce qu'il préférait : étudier ! C'est ainsi que, sur ses joyeuses pensées, il reprit la route.
Longeant dans un premier temps les maisons afin de se protéger sous leur fraicheur, ses pas le firent traverser la rue asséchée. D'ici, on ne pouvait percevoir la mer, uniquement des bâtiments jaunes délavés recouverts de tuiles rougeâtres. Peu importe où son regard pouvait se poser, le village semblait bruler sous le soleil. D'étranges flammes transparentes s'élevaient du sol aride, dansant sur les jambes des rares passants. Elles dévoraient leur eau et mordaient leur chaire. L'astre allait bientôt atteindre son plus haut point, l'heure n'était plus à la promenade mais à la sieste. La température ne cessait de croitre, l'air s'alourdissait.
Pourtant le petit rouquin s'en allait gaiment, contemplant le spectacle de la ville ardente. Jamais il n'avait connu une telle chaleur sur l'îlot Givy, si bien qu'il ne s'exposait que par jeu au danger de ce climat, sans même en comprendre les risques. Mourir de chaud? Pff! Quelle idée bizarre! Son inconscience le poussa même à traverser des champs brulés par le temps, juste pour réaliser quelques observations sommaires de certaines espèces. Sous une intensité lumineuse intense, il réalisait les croquis d'insectes et de plantes avec une difficulté grandissante. Son esprit s'embrumait peu à peu, se plongeant dans la fièvre lourde de l'insolation. Alors qu'il reportait sur son carnet l'anatomie d'une fourmi, l'équilibre du garçon se déstabilisa. Soudainement, la petite bête devint plus arrondie. Les traits fins de son abdomen devinrent grossiers et ses antennes semblable à des fils, alors que les détails de sa tête se dissimulait derrière une étrange brume. Surprit, le gamin se frotta un instant les yeux. Pendant une seconde, l'insecte devint clair, avant de se replonger dans le brouillard. La concentration le quitta face à cette mutation irréelle. La vadrouille avait peut-être assez duré, la soif le tiraillait… Mais parfois, la raison n'intervient que trop tard.
Son regard troublé se posa sur les environs désertiques. De l'ombre… Il n'y avait donc pas d'arbre ici? Même pas un buisson sous lequel s'allonger. Des gouttes de sueurs perlaient sur tout son corps, de plus en plus nombreuses. Son corps lui sembla progressivement sale, collant, puis puant. Il faisait trop chaud, beaucoup trop chaud. Pour la première fois de sa vie, Alan sentit son organisme tout entier se dessécher, arrosant son épiderme de son eau. Le soleil ne représentait plus pour lui une caresse chaleureuse, mais une morsure endiablée et douloureuse. Que se passait-il? Sa respiration lui semblait soudainement plus pesante, ses membres rouillés par un étrange sortilège. Pourquoi? De l'eau… Il devait s'hydrater, il devait boire. Se rendant enfin compte de ce besoin imminent, l'enfant voulu partir à sa recherche. Mais ses pensées ne parvenaient plus à s'exprimer clairement, sombrant peu à peu dans le vide. Il n'avait plus de repères, sa vue l'avait quitté. L'obscurité l'envahit, alors qu'il sentit son corps s'écrouler. Un bruit sourd, amorti par le sable retentit. L'inconscience prit le dessus.
Une sensation de fraicheur s'appropria de sa gorge, elle traversa son œsophage avant de descendre le long de son estomac. L'enfant se réveilla à demi, se croyant plongé dans le sommeil. Un long frisson parcouru son échine alors qu'une main glaciale se posa un court instant sur son front. Elle lui semblait morte. Avec effroi, il tenta de se défendre. Mais la peur l'envahit de plus belle, aucun de ses muscles ne lui répondait. Difficilement il déglutit, sentant avec surprise son corps se réhydrater. Le petit biologiste ouvrit légèrement les yeux après un rude effort. Son regard encore trouble ne put que distinguer une silhouette imposante et familière, dont les traits étaient rendus invisibles par la lumière du contre-jour. Ébloui de nouveau puis consumant ses dernières forces, il referma ses paupières. Seule son ouïe cru percevoir un écho lointain de ferrailles s'entrechoquant. Ce son familier relaxa sa tension, laissant ses membres se détendre dans un soupir.
Alan s'imaginait déjà faisant partie de cette élite suprême, parcourant les mers muni des outils les plus sophistiqués. Penché sur une nouvelle espèce, il était plongé dans une conversation des plus sérieuses. Oui, c'était vrai… Ce poisson possédait d'étranges tâches verdâtres en relief, il faudrait les étudier avec attention. Tout en prenant des précautions, le groupe s'afférait avec lui pour percer ces mystères. Magnifique! Il s'agissait de glandes émettrices de venin. Très puissant qui plus est. D'un hochement de tête, il approuva la remarque imaginaire d'une de ses collègues. Ce poison n'était pas mortel, il se contentait de paralyser ses proies et prédateurs. Peut-être que le groupe de recherche médical pourrait en tirer profit… Il fallait leur envoyer les résultats.
Plus que des suppositions, l'enfant respecté qu'il était dans son rêve était écouté avec attention. Chacune de ses idées étaient retenues, et beaucoup de chercheurs venaient demander conseils auprès de lui. Puis, soudainement, un monstre marin surgissait des flots agités, effrayant ses compagnons. Alan partait alors au combat, terrassant avec élégance le roi des mers. Puis, par un élan de passion, il disséquait avec précision l'étrange animal, perçant le secret de son fonctionnement. Seul son comportement dans son milieu naturel restait inconnu. Notre grand et pourtant petit biologiste plongeait alors sous la surface, afin d'observer le spécimen en direct, sans craintes. Tel un héros.
Un verre se brisa sur le sol, sortant le gamin de sa rêverie. Quelques cris d'exaspérations résonnèrent, tandis qu'une serveuse s'excusait prestement, embarrassée. Mais un verre de moins dans l'estomac d'un alcoolique peut rapidement se traduire par une terrible offense, Alan le savait d'expérience. La jolie terrasse ombragée et bordée de fleurs devint sans tarder le théâtre d'une scène forte intéressante. Certains tentaient de contenir l'homme vexé, tandis que le patron venait à la rescousse de son employée. Vraiment, les marins, ils étaient irrécupérables…
Mais ce genre d'événements courants n'attirait pas notre ami. De plus une idée folle venait de s'encrer au fin fond de son cerveau, accaparant son attention. Peu importe comment tournait le monde, son objectif était tout tracé. Il replaça sa vieille casquette sur ses cheveux roux, avant ranger précieusement la revue dans son petit sac en cuir. Un petit ricanement d'excitation lui échappa, ce nouveau but ne lui plaisait que trop. Mais son approfondissement attendrait demain. Pour le moment, l'île et sa biodiversité étaient à découvrir! Il n'y avait posé le pied que peu de temps auparavant, et personne n'avait put le renseigner sur les différentes espèces de ce lieu… Il lui fallait donc faire ce qu'il préférait : étudier ! C'est ainsi que, sur ses joyeuses pensées, il reprit la route.
Longeant dans un premier temps les maisons afin de se protéger sous leur fraicheur, ses pas le firent traverser la rue asséchée. D'ici, on ne pouvait percevoir la mer, uniquement des bâtiments jaunes délavés recouverts de tuiles rougeâtres. Peu importe où son regard pouvait se poser, le village semblait bruler sous le soleil. D'étranges flammes transparentes s'élevaient du sol aride, dansant sur les jambes des rares passants. Elles dévoraient leur eau et mordaient leur chaire. L'astre allait bientôt atteindre son plus haut point, l'heure n'était plus à la promenade mais à la sieste. La température ne cessait de croitre, l'air s'alourdissait.
Pourtant le petit rouquin s'en allait gaiment, contemplant le spectacle de la ville ardente. Jamais il n'avait connu une telle chaleur sur l'îlot Givy, si bien qu'il ne s'exposait que par jeu au danger de ce climat, sans même en comprendre les risques. Mourir de chaud? Pff! Quelle idée bizarre! Son inconscience le poussa même à traverser des champs brulés par le temps, juste pour réaliser quelques observations sommaires de certaines espèces. Sous une intensité lumineuse intense, il réalisait les croquis d'insectes et de plantes avec une difficulté grandissante. Son esprit s'embrumait peu à peu, se plongeant dans la fièvre lourde de l'insolation. Alors qu'il reportait sur son carnet l'anatomie d'une fourmi, l'équilibre du garçon se déstabilisa. Soudainement, la petite bête devint plus arrondie. Les traits fins de son abdomen devinrent grossiers et ses antennes semblable à des fils, alors que les détails de sa tête se dissimulait derrière une étrange brume. Surprit, le gamin se frotta un instant les yeux. Pendant une seconde, l'insecte devint clair, avant de se replonger dans le brouillard. La concentration le quitta face à cette mutation irréelle. La vadrouille avait peut-être assez duré, la soif le tiraillait… Mais parfois, la raison n'intervient que trop tard.
Son regard troublé se posa sur les environs désertiques. De l'ombre… Il n'y avait donc pas d'arbre ici? Même pas un buisson sous lequel s'allonger. Des gouttes de sueurs perlaient sur tout son corps, de plus en plus nombreuses. Son corps lui sembla progressivement sale, collant, puis puant. Il faisait trop chaud, beaucoup trop chaud. Pour la première fois de sa vie, Alan sentit son organisme tout entier se dessécher, arrosant son épiderme de son eau. Le soleil ne représentait plus pour lui une caresse chaleureuse, mais une morsure endiablée et douloureuse. Que se passait-il? Sa respiration lui semblait soudainement plus pesante, ses membres rouillés par un étrange sortilège. Pourquoi? De l'eau… Il devait s'hydrater, il devait boire. Se rendant enfin compte de ce besoin imminent, l'enfant voulu partir à sa recherche. Mais ses pensées ne parvenaient plus à s'exprimer clairement, sombrant peu à peu dans le vide. Il n'avait plus de repères, sa vue l'avait quitté. L'obscurité l'envahit, alors qu'il sentit son corps s'écrouler. Un bruit sourd, amorti par le sable retentit. L'inconscience prit le dessus.
Une sensation de fraicheur s'appropria de sa gorge, elle traversa son œsophage avant de descendre le long de son estomac. L'enfant se réveilla à demi, se croyant plongé dans le sommeil. Un long frisson parcouru son échine alors qu'une main glaciale se posa un court instant sur son front. Elle lui semblait morte. Avec effroi, il tenta de se défendre. Mais la peur l'envahit de plus belle, aucun de ses muscles ne lui répondait. Difficilement il déglutit, sentant avec surprise son corps se réhydrater. Le petit biologiste ouvrit légèrement les yeux après un rude effort. Son regard encore trouble ne put que distinguer une silhouette imposante et familière, dont les traits étaient rendus invisibles par la lumière du contre-jour. Ébloui de nouveau puis consumant ses dernières forces, il referma ses paupières. Seule son ouïe cru percevoir un écho lointain de ferrailles s'entrechoquant. Ce son familier relaxa sa tension, laissant ses membres se détendre dans un soupir.
Dernière édition par Alan Carman le Jeu 18 Oct 2012 - 0:33, édité 1 fois