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Hell, here we are...

La porte s'est refermée. On sentait la différence. L'air était écrasant. Menottes aux poignets, et entouré de gardiens, Grey s'imprégna malgré lui de cette ambiance. Sur sa droite, des barreaux derrière lesquels fumaient des marmites bouillonnantes. C'est ici qu'ils font la bouffe, dans l'entrée ? Et à gauche... Un siège en bois géant, sur lequel trônait un être tout aussi grand. Il était en train d'écrire. Tout avait l'air d'avoir été adapté pour lui. Une gardienne s'avança vers lui. Elle commença à lui parler.

- Mr le Vice-Directeur.

*Ce mec est le Vice-Directeur ? Mais c'est un Géant ! A quoi peut bien ressembler celui qui dirige cet endroit ?*

Petit à petit, une image s'est formée dans la tête du jeune homme. Encore plus grand, plus gros, une massue énorme, vert et boutonneux. Une sorte de Troll quoi. Il fallait au moins ça pour garder la prison dont on disait qu'il était impossible de s'évader. Mais revenons-en à nos moutons.

- Mr le Vice-Directeur ? Mr le Vice-Directeur ! Bon, passez-moi le Megascargophone !

Ce que s'empressa de faire un subalterne.

- MR LE VICE-DIRECTEUR ! LE NOUVEAU DÉTENU EST ARRIVÉ ! VÉRIFIEZ QUE TOUT EST BIEN EN ORDRE !

- Hum ?

Le Géant accorda enfin de l'attention à sa petite interlocutrice. Il devait être trop absorbé par ce qu'il écrivait, et du coup, la voix humaine n'atteignait pas ses oreilles. Mais maintenant qu'il savait qu'on l'appelait, la gardienne mit le Mégasargophone dans les mains d'un autre. Le Vide-Directeur reposa sa superbe plume dans l'encrier et regarda le groupe devant lui. Ses yeux s'attardèrent un instant sur un Grey quelque peu intimidé. Un Géant, quand ça vous fixe, ça laisse pas indifférent. Mais le garçon soutint néanmoins ce regard qui faisait presque sa taille.

- Oui, oui... Le rouquin... Alors, les papiers... Voilà. 11 Millions. Oui, on va pouvoir l'envoyer au 1er Sous-Sol. Mais d'abord, souhaitons-lui la bienvenue, et qu'on l'emmène au bain. Qu'il soit purifié !

Parmi la garde rapprochée de Grey, certains ricanèrent. Le détenu ne comprit pas pourquoi. Qu'y avait-il de drôle à ce qu'une personne prenne un bain ? Parce qu'il le ferait devant tout le monde ? Grey avait souvent été aux sources avec ses camarades de son île par le passé. Il ne serait pas gêné le moins du monde. On le prit par le bras, puis on l'emmena de l'autre côté des barreaux, là où il y avait les marmites. Ca sentait mauvais cette histoire.

- Pas de pouvoirs d'après nos informations. Vous pouvez lui ôter ses menottes. Que l'un de vous le garde en joue malgré tout.

Les entraves furent levées. Grey dut se déshabiller entièrement. On lui ordonna de se foutre dans l'eau fumante de l'un des récipients. Mais le jeune homme ne le fit pas. Normal, hein ? Ca devait brûler un max ce truc. Grey tenta de reculer d'un pas, mais une main dans son dos le poussa pour le faire tomber. Ce qui arriva. Projeté d'un seul coup dans le liquide pire que brûlant, Grey eut l'impression d'avoir été jeté dans le feu de l'enfer ! Un cri à en déchirer la nuit aurait été entendu si l'eau n'avait pas étouffé le son. Quand sa tête émergea hors de l'eau, le pirate s'empressa de reprendre sa respiration, interrompant son hurlement. Mais nul doute qu'il allait crier de nouveau.

La Commodore aurait adoré être là. Puis toute une série de connexions se fit dans le cerveau du détenu en un éclair. Commodore, qui allait prendre en chasse ses compagnons, de fiers combattants qui ne se laisseraient pas faire. Oui, fiers. Tout était question de fierté. Pour eux, pour les siens, Grey ne pouvait pas se laisser avoir. Il ne fallait pas que les Bloody Sorrow passent pour une bande de tocards !


- OUUUUAAAaaaah... Bain très plaisant ma foi...

La jouer au bluff. Commencer son cri de douleur et le transformer en bâillement. Mais fallait pas croire, la chaleur mordante de l'eau, il la sentait. Et ses effets s'en ressentaient. Grey devenait aussi rouge que ses cheveux. Chaque instant, il avait envie de hurler. Mais il réprimait ses cris, il se mordait les lèvres, à se les faire saigner. Pour ses camarades, plus un son de douleur ne sortirait. Il regarda ses geôliers sans sourciller, tout tremblant. Il résistait à son envie, se contenait de tout son être. Quand finalement des mains le tirèrent vers l'arrière, pour le sortir de là, il se rendit compte que le calvaire n'était pas terminé. Sa peau était toujours imprégnée de cette chaleur démentielle. Il fallait un moment pour que, graduellement, la douleur se dissipe. Mais quand on lui fila une serviette pour s'essuyer, la douleur regagna du terrain. on le frottait fort et sans ménagement. Apparemment, soit ils jugeaient le jeune homme incapable de se sécher seul, soit ils avaient considéré avoir déjà perdu assez de temps avec le nouveau. On donna à Grey une magnifique tenue à rayures qu'il enfila rapidement, puis on le refit passer de l'autre côté des barreaux.

L'air que le pirate avait trouvé jusque là lourd et chaud apparaissait soudain comme une caresse fraîche et plaisante. On lui remit ses menottes, puis les gardiens attendirent.

- Bon, on va le mettre dans la cellule 56.

- Oui, Mr le Vice-Directeur Judge !

On attrapa une fois de plus un bras de Grey, pour le guider à une porte qui donnait sur un escalier. En temps normal, dans une telle situation, Grey aurait cherché à mémoriser le maximum de choses, engranger les détails, pour, le moment venu, avoir plus de possibilités d'évasions. Mais ici, à quoi bon ? Il était foutu. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était garder la tête haute pour ses compagnons, qui eux aussi auraient fort à faire pour rester ensemble, surtout si le Commodore retrouvait leurs traces.
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Premier niveau d'Impel Down. Quelque soit l'endroit où on regardait, il n'y avait que des murs construits à partir de bonne pierre bien solide, avec des alcôves fermées par des barreaux. Les cellules des prisonniers. Grey et ses gardiens passèrent devant la cellule 22. Ils avaient encore la moitié du chemin à faire. Sur la route, le jeune homme remarqua qu'il y avait entre trois et huit détenus en moyenne par cellule. Ca devait dépendre de la carrure des types. Il y en avait des vraiment grands dans le tas. Un peu partout, des escarméras contrôlaient le périmètre de la zone, pour éviter les angles morts. Cela ne faisait que renforcer la sécurité, car ici et là, des geôliers armés faisaient leur ronde. Grey vit même un court instant une ombre massive en dehors d'une cellule, hache en main, se balader. C'était un homme ? Ou autre chose ? En tout cas, il avait l'air d'être du côté de la Marine, car le soldat qui se trouvait à proximité ne réagit pas. Un peu plus loin sur la route, vers les cellules 40 et quelques, des prisonniers commencèrent à s'intéresser au nouveau venu.

- Hé les gars, un nouveau !

- T'as fait quoi pour être la mon mignon ?

- Poil-de-carotte, hé ! C'est quoi ta prime ?

- Prépares-toi à morfler gamin ! C'pas pour les petits joueurs par ici !

Grey ne leur prêta pas particulièrement attention. Mais il garda en mémoire lequel l'avait traité de "poil de carotte". Au cas où. A présent, il ne lui restait plus que ça. Se venger s'il le pouvait. Mais enfermé H-24, ça serait difficile. Autre détail que nota le pirate, le sang. Les prisonniers en avaient plus ou moins sur leur jolie tenue rayée. Certes, des bagarres, devait y en avoir dans le coin. Mais certains en avait une belle quantité un peu partout, séché la plupart du temps. Voilà à quoi se résumait la vie carcérale ? Manger, dormir, se battre, attendre, et mourir ? Pas folichon...

Encore trois, quatre minutes plus tard, arrivés. La cellule 56. Pas loin d'une porte fermée. Mais de cette porte proviennent des cris. Cris de douleur, d'agonie. Le pirate ne sait pas ce qu'il se passe derrière, et il n'a pas trop envie de savoir. Il préfère se concentrer sur sa nouvelle chambre. Et ses nouveaux "camarades". Ils sont quatre. Un type un peu plus grand que Grey, mais beaucoup plus large. Un autre plus petit d'une tête, mais tout fin avec un air de fouine. Ainsi qu'un vieux, avec la barbe blanche et la peau sur les os. Et enfin, un dernier, plutôt jeune, peut-être plus vieux que Grey de quelques années, recroquevillé dans son coin en train de parler tout seul. Le genre qu'on qualifierait de fou.


Les geôliers pointèrent leurs armes sur les détenus, histoire de les faire reculer et leur passer l'envie de tenter un truc. Mais les prisonniers ne firent même pas un mouvement. Seul le grand et le tout fin eurent un sourire entendu. Le vieux regarda avec indifférence. Le dernier... pas de changement. Un gardien poussa alors Grey dans le dos, ce qui le fit entrer dans la cellule, et referma derrière. Après quoi ils repartirent aussitôt. Ne restaient plus que le pirate déchu et les autres, qui le regardaient attentivement.

- C'est quoi ton nom ?

C'était le gros. Son sourire malsain était toujours présent sur sa tronche. L'autre, le tout fin, ricanait à côté. Grey prit bien le temps de les observer, ces deux-là. Ils étaient louches.

- Grey.

- Drôle de nom. Ca va pas bien avec ta tête.

Par "tête", il entendait sûrement "cheveux". Ce n'était pas la première fois qu'on lui faisait la remarque. Mais comme ce n'était pas une insulte, le pirate laissa couler.

- Moi, c'est Gosch. Chui comme qui dirait celui qui maintient le calme dans cette cellule, tu vois c'que j'veux dire ?

Grey resta stoïque. En gros, c'était le chef de cellule. Celui qui était le Boss. Facile à comprendre quant on voyait la carrure des autres. Que des plus petits et maigres. Pas étonnant qu'il se soit imposé. Du coup, le pirate se contenta de hocher la tête. Pas envie de se prendre le chou dès la première minute.

- Bien... Lui, c'est Drwate. Mon second. On connait pas le nom de celui qui parle tout seul. Et le vieux, il aura qu'à se présenter lui-même si ça lui chante.

Mais ça n'avait pas l'air de lui chanter. Il était complètement indifférent au nouveau venu. Drawte, par contre, c'était l'exemple même du sous-fifre/lèche botte. Il ramassait les miettes, avec la protection du Boss en prime.

- Ta prime, c'était combien ?

Tiens, le sous-fifre parle. Et comme le nouveau détenu s'y était attendu, c'était une voix mielleuse, un peu aiguë. Il posait la question qui avait sans doute valeur d'info en or dans le coin. A partir de ça, on te jugeait et on déterminait quel genre de crapule tu étais.

- 11 Millions.

- Héhé, moi j'étais à 10. Le Boss, il était à 14,5 Millions. Alors le fous pas trop en rogne. Le Gouvernement était prêt à l'envoyer au 2ème niveau, mais comme il est intelligent, il a su faire en sorte de rester au 1er.

- J'essayerais de m'en souvenir.

Mais en réalité, Grey s'en foutait pas mal. Qu'est-ce que ça pouvait faire, la grandeur de la prime, une fois qu'on était en prison ? Tous au même régime, non ? En parlant de ça, la bouffe arrivait. Un verre d'eau, et un morceau de pain par personne. Ca, c'était de la diète. Voyant les yeux avides de Gosch, Grey le lui balança. Mais il garda le verre d'eau. Il n'avait pas faim. Pas trop soif non plus, mais l'eau était vitale pour ne pas mourir dans la journée. Grey nota le regard mauvais du Boss quand il comprit que le rouquin ne céderait pas sa flotte. Mais il lui avait filé son pain, alors pour cette fois, ça irait, visiblement. Le pirate tourna son regard vers l'extérieur de la cellule. Tout ce qu'on y voyait, c'était d'autres cellules. Avec d'autres types dedans. Alala, combien de temps devrait-il endurer ça ?
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- Hé, le nouveau.

Grey avait passé son temps la tête collée contre les barreaux, à regarder l'inintéressant couloir remplis de prisonniers. Certains avaient voulu parler avec le dernier arrivé, mais celui-ci n'avait pas envie. Finalement, il se retourna vers le Boss de la cellule. Le pirate lui avait pourtant dit son nom. Et c'était pas le genre compliqué. Dans le coin, on devait être appelé "le Nouveau", jusqu'à ce qu'un autre arrive pour prendre la relève.

- Ils vont nous filer une autre ration. Tu sais ce que ça veut dire, hein ?

Le sous-fifre, Drwate, ricana. Plus stupide, tu meurs. Pour sa part, Grey comprenait le message. Mais en entendant "tu sais ce que ça veut dire", ça lui rappelait surtout qu'il n'aurait peut-être pas dû donner son premier repas. La faim se faisait ressentir. Histoire de pas se prendre la tête, le "nouveau" émit un simple grognement.

- T'as d'la chance que ce soit moi le Boss. Dans d'autres cellules, les mecs apprécient pas trop qu'on leur réponde pas clairement. La 34, par exemple, on n'y met plus que des types costaux, histoire qu'ils claquent pas trop vite face au Boss. Bien sûr, le type en prend pour son grade à chaque fois, mais il aime ça. Alors estimes-toi heureux, mais rappelles-toi que j'pourrais prendre exemple sur la 34.

Le sous-fifre ricana une fois de plus. Il devait comprendre de quoi parlait son chef, ils étaient dans le même délire depuis longtemps visiblement. Histoire d'avoir fait semblant de boire les paroles, Grey émit un autre grognement. Gosch cracha par terre, mais n'en fit pas plus. Enfin, ça se sentait que sa colère grimpait. Encore une bourde du genre et le "Boss" prendrait des mesures. Une bourde dans le genre de celle qui allait suivre.

Les geôliers atteignirent la cellule 56. L'un était armé, l'autre tenait la ration. Il passa la mangeaille à travers les barreaux, et quand les gardes allèrent à la cellule suivante, Grey prit son dû. Ca avait pas l'air fameux. Mais c'était ça ou rien donc... Il croqua dans son pain. Aussitôt, les barreaux tremblèrent. Gosch venait de foutre son poing dedans. Juste à côté de Grey, il avait sûrement son air le plus menaçant. Mais cela n'effraya nullement le pirate. Le Colonel qu'il avait affronté à Inu Town, ça c'était de la terreur. Enfin, avec le recul, plus tellement, mais à l'époque, si.

Grey mâchouillait toujours son pain d'un air neutre en regardant la brute lui faire face. Le bonhomme n'appréciait pas d'être regardé de la sorte. Il tapa encore plus fort sur les barreaux. Soit dit-en passant, ça n'avait pas l'air d'alarmer les gardes.


- Dis donc, le nouveau. Qu'est-ce que tu fous ?

- Bin, j'ai faim, alors je mange.

Et sur ce, il reprit un autre morceau. Le sous-fifre ne savait pas s'il fallait rire ou pas. Rire, parce que le Boss allait se déchaîner devant un gamin qui ne respectait pas les règles, ou au contraire se retenir pour éviter de rendre son patron encore plus fou, et s'attirer ses foudres. Alors il attendait, comme le vieux. Et comme les types des cellules voisines qui pouvaient voir le spectacle.

- J'vais devoir te punir, le nouveau. Y'a pas le choix. Mais comme tu m'as filé le pain la dernière fois, j'serai pas trop méchant. Tu seras conscient pour le prochain repas, et tu ne feras pu la même erreur.

- Oh, c'était pas grand chose. J'avais pas faim. Mais maintenant que j'y pense, le vieil homme a l'air d'en avoir plus besoin.

- C'est à moi qu'on obéit ici !

Le coup de poing ne tarda pas. Mais Grey fut stupéfait de voir avec quelle lenteur s'avançait sur lui cette masse osseuse et musculaire. Pourquoi il n'allait pas plus vite ? Le jeune esquiva sans problème le coup. Il n'en fut pas le seul surpris. Son agresseur, le sous-fifre, et les autres prisonniers aussi.

- Hé le nouveau, t'es pas fou ?

- Tu veux le rendre encore plus furax ?

- Laisse-toi prendre une torgnole, tu verras, c'pas si terrible !

- T'as eu dla chance gamin !

Non, ils avaient tort. Ce n'était pas de la chance, ou de la folie. Comment l'expliquer simplement ? Oui, voilà. Cette attaque, elle était nulle. Mais le gros bonhomme ne l'avait pas compris. Il ré-essaya, encore et encore, mais chaque coup ne faisait que brasser un peu plus d'air. Il était déjà épuisé. Et ça se voulait chef de cellule ? Oui, définitivement, le regard du prisonnier signifiait clairement qu'il ne comprenait pas pourquoi il en était ainsi.

Dans la tête de Grey, par contre, l'idée faisait son chemin. Il n'était plus le même que lorsqu'il avait quitté son île. Comme il l'avait dit à la Commodore, lui et les compagnons étaient devenus plus forts. Ce gars que Grey avait en face de lui, il ne valait pas mieux qu'un petit chef de Gang sur les Blues. A se demander comment il avait eu sa prime. La Commodore en rirait. La Commodore. Repenser à elle, sa façon d'être, et ses intentions envers les Bloody Sorrow ravivait une haine dissimulée par la fierté. Quand le gros type lança son nouveau coup de poing, Grey l'arrêta d'une main, de la façon dont l'avait justement fait la Commodore contre lui. Parmi les spectateurs, plus d'un lâchèrent un "wow" admiratif, ou surpris, peu importe. Grey arma son poing libre, et donna un bon coup dans le ventre qui fit se plier en deux l'autre. A genoux, le chef de cellule tentait de reprendre son souffle. Il leva sa tête vers Grey, puis vers son sous-fifre.


- Drwate ! Choppes-le !

- Mais, Gosch, il t'a...

- Fais-le si tu veux pas être écrabouillé !

Qu'il vienne. Cet abruti devait depuis trop longtemps se cacher derrière son chef, à ricaner comme un imbécile face à tout les nouveaux qui devaient se plier aux règles sous peine d'être tabassé. Grey n'attendait qu'une chose, que cet idiot fasse un pas dans l'intention de le blesser. Le pirate avait la haine, mais le genre de haine... calme. Où on n'hurle pas comme un taré, où on détruit, froidement. Drwate avança, bras levé. Il manquait de conviction, mais peu importe, il avait attaqué. Le "nouveau" saisit son bras à la volée, lui donna plusieurs coups dans le ventre et les côtes, avant de violemment le projeter contre un mur nu de la cellule par coup de pied. Le corps du larbin glissa lentement contre la pierre froide, laissant une traînée de sang sur le mur.

Les spectateurs derrière d'autres barreaux étaient excités. Ils tapaient contre leurs cages, hurlaient, faisaient du bruit. Un bruit qui allait bien plus loin que les cellules capables de voir. Ca se répandait dans l'étage, tout simplement. Des bêtes qui avaient soif de sang. Grey posa alors son regard sur le chef de... non, sur l'ancien chef de cellule. Il n'avait pas dit son dernier mot. En même temps, on voyait dans ses yeux la peur. Il savait qu'il n'était plus en sécurité, que son petit monde s'écroulait. Fini le temps où il siégeait au sommet de cette cellule. Mais par fierté probablement, il attaqua. Grey n'en espérait pas moins. Il se décala, attrapa le bras de son adversaire, et le cogna brutalement contre les barreaux. Il le frappa, encore et encore, jusqu'à ce que l'os craque. Bien entendu, le mec hurlait. Grey prit une inspiration, et envoya son pied dans la face du gars, qui recula sur le cul jusqu'à se coller au mur, à côté de son larbin. Puis tout bas, il lança :


- C'est pour m'avoir rappelé la Commodore...

Il dirigea ensuite son regard de haine sur les prisonniers des autres cellules. Si certains continuaient de crier leur soif de sang, et en quelques sortes annoncer le changement de chef en cellule 56, d'autres étaient silencieux et effrayés. Effrayés. Cette expression rappela alors au pirate la tête qu'avait fait Aoï en voyant Zarechi transformé il y avait quelques temps. Le pauvre avait été paralysé de terreur, et avait bien failli y passer. Quelle tête ferait-il en voyant son camarade Grey, d'ordinaire si calme, agir de la sorte ? Cette pensée fit office de calmant, à effet immédiat. Le pirate se laissa tomber sur les genoux. Ici depuis une journée et voilà ce qu'il devenait ? Trop de pression et de ressentiments cumulés, finalement relâchés contre des types qui n'en valaient même pas la peine. D'un côté, ça faisait du bien, d'avoir évacué. D'un autre, c'était effrayant.

- Oh putain ! Qu'est-ce qui s'est passé ici ?

Les geôliers avaient rappliqués. Vu leurs réactions, ils ne s'attendaient pas à ça.

- C'est le rouquin, il a du sang frais sur lui. Tires les deux autres dehors, vois dans quel état ils sont.

- Et le nouveau ?

- On va l'envoyer faire un tour dans l'enfer écarlate.

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Une forêt rouge. Tel était le spectacle qu'avait Grey sous les yeux. Près de la porte qui l'avait conduit ici, deux gardes armés. Mais pas des geôliers classiques. Ceux-là, ils avaient un masque avec deux trous pour les yeux et un pour la bouche, ainsi qu'une fourche. Première fois que le pirate voyait ce genre. Et ils ne faisaient qu'attendre, un sourire sadique sur les lèvres tout en regardant le détenu. Grey ne bougeait toujours pas. Il ne comprenait pas pourquoi on l'avait amené ici. Une sorte d'isolement ? Dans ce cas, pourquoi le foutre dans un espace aussi grand ? C'était presque son habitat naturel ! Par contre, il n'en ressentait pas ses effets habituels. L'effet de liberté, de fraîcheur, d'épanouissement. Sûrement parce qu'il était dans une prison. Un coup dans le dos faillit le faire chuter en avant. Il se retourna et vit l'un des gardes.

- Magnes-toi de te barrer. On ne va pas y passer la journée.

Passer la journée à faire quoi ? Enfin, de toute façon, si Grey restait dans le coin, il se prendrait d'autres coups, et peut-être du côté fourche cette fois ! Alors il s'avança dans l'herbe. Une vilaine sensation de coupure s'installa au niveau pied. Et en effet, il saignait. Le pirate chercha à savoir ce qui avait causé ça, et quand il réalisa ce que c'était, le choc fut rude.

*C'est l'herbe... Elle est aiguisée à mort !*

Et de l'herbe, il y en avait ! A perte de vue ! L'espace entre les brins n'était pas énorme. Marcher là-dedans, c'était un coup à finir en sang. Grey jeta un oeil vers les gardiens, qui riaient parce que le détenu venait de prendre conscience de la merde dans laquelle il se trouvait. Mais y'avait pas le choix, sinon, il tâterait de la fourche.

Pas à pas, le pirate s'aventura de plus en plus loin dans cet enfer, en essayant au maximum de placer ses pieds dans les minces endroits dépourvus de lame. Bien entendu, passer entre tout les brins d'herbe était peine perdu, du coup à plusieurs reprises, le pied ou la jambe furent écorchés. Dix minutes plus tard, Grey arriva près d'un début de forêt. Les arbres étaient, évidemment, tout aussi rouges que l'herbe. Et les similitudes ne s'arrêtaient pas là. Grey passa son doigt sur l'une des feuilles, qui laissa couler un filet de sang.

- Tranchant...

- Sortez-moi de làààà !!!

Le pirate se retourna. Mais il n'y avait personne. Le type qui avait gueulé devait être plus loin. D'après la son de la voix, le mec était à bout. C'est vrai que c'était pas le paradis ici, mais si on trouvait un petit espace pas trop pointu, suffisait de s'y poser et d'attendre qu'on nous rappelle. C'était d'ailleurs le plan de Grey ! Il cala ses pieds bien comme il faut entre des brins assassins, et son dos sur une légère partie lisse d'un des arbres. Voilà, plus qu'à attendre.

Maintenant qu'il y faisait gaffe, le pirate nota qu'il y avait pas mal de gueulards de part et d'autre de ce secteur du pénitencier. Ils avaient tous l'air à l'agonie. Ainsi, aucun n'avait autant de jugeote que Grey ? Puis, un bruit attira l'attention du jeune homme, au-dessus de sa tête. Une grosse araignée qui se débrouillait pour se faufiler entre les feuilles acérées s'approchait. Ses yeux étaient fixés sur le détenu, et sa bouche sécrétait un espèce de liquide qui laissait des marques sur les feuilles.

- Qu'est-ce que c'est que ça ?

Il ne le savait pas, mais il savait en revanche qu'il ne faisait pas bon de rester dans le coin. Il s'écarta du tronc d'arbre doucement, recula d'un pas en arrière, se coupant à l'occasion, puis en fit un autre. Il fallait tout faire calmement, pour ne pas affoler la bestiole. Trop tard ! Elle bondit sur le pirate qui dut faire un numéro de contorsionniste pour l'esquiver. Mais l'araignée ne s'avouait pas vaincue ! De nouveau en position, comme si l'herbe tranchante n'était qu'une caresse, elle s'apprêtait à faire un nouveau saut. De son côté, Grey arrivait à peine à se mettre en face d'elle sans se bousiller les pieds. De toute évidence, elle avait l'avantage du terrain. Tant pis, il faudrait faire avec. La bestiole sauta, mais cette fois, grey lui donna un bon coup de pied qui la fit s'envoler dans les branches. Pas conne la bêbête, elle se servit de sa toile pour s'accrocher, et une fois que son fil fut tendu au maximum, elle revint à la vitesse d'un boulet de canon sur Grey. Enfin, pas conne... Le pirate n'oubliait pas où il se trouvait. Et comme il ne voyait pas d'autres solution, il choisit de reculer d'un bond et risquer de s'empaler les pieds pour que l'araignée vienne s'éclater à pleine vitesse contre les herbes piquantes. Et l'effet fut immédiat. Splorch !

- On voit que tu maîtrisais ton environnement, mais à une telle vitesse, même une bestiole comme toi y passe si elle fonce sur cette herbe pointue comme un sabre.

Bon par contre, comme prévu, un pied avait bien morflé. Une petite pointe dépassait du pied du pirate. Mais il s'y était préparé, donc il n'avait pas gueulé. Il le retira par contre délicatement. Puis il déchira un morceau de sa belle tenue rayée qu'il entoura autour du membre blessé. L'autre pied, ça allait. Une nouvelle entaille, c'est tout.

Au moins, Grey avait comprit pourquoi les détenus ne restaient pas en place. Avec des créatures qui venaient faire chier, cachées dans les arbres, rester immobile n'était pas idéal. Ils étaient vraiment pas net ces mecs de la prison ! Mettre des bestioles pour essayer de bouffer les prisonniers. Et si encore il n'y avait eu que ça...
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La suite était pire, forcément. Déjà, à cause de la belle plaie qui traversait le pied, Grey avait du mal à marcher. Il pouvait, mais c'était pas super évident. Et il faisait deux fois plus gaffe à où il mettait les pattes, histoire de pas les défoncer encore plus. Ajouté à cela une surveillance constante des arbres meurtriers, habités par des bestioles encore plus meurtrières. Et il y avait les gardes qui chassaient les prisonniers aussi.

- Quoi ?

Oui, les gardes. Ceux avec leurs fourches et leur cagoules. Ils n'étaient pas là juste pour escorter des prisonniers de leur cellule à l'enfer écarlate, et inversement. Ils avaient aussi pour mission de titiller, jusqu'au sang, ceux dont ils avaient la charge. La preuve, les deux mecs qui courent à s'en déchiqueter les pieds, un peu plus loin devant, derrière eux, ce sont pas des bestioles, mais des mecs du pénitencier.

- Ba ça alors...

Que ferait-on sans un bon narrateur, hein ? Grey suivit la scène avec intérêt. Les prisonniers courraient sans jamais se retourner, saignant un peu plus à chaque pas. Mais apparemment, ça avait l'air moins terrible que si les gardes leur mettaient la main dessus. Et bientôt, l'un des coureurs tomba à terre. A l'occasion, ses mains se plantèrent dans l'herbe, et il gueula. Enfin, non, il ruminait. Quand le garde arriva à sa hauteur et qu'il planta sa fourche, là, le prisonnier gueula. Le garde n'était pas stupide, il plantait, mais dans des points non vitaux. Il jouait vraiment ! Le second garde continua de poursuivre l'autre détenu. Oui, un jeu du chat avec la souris.

Grey décida de ne pas s'en mêler. Il était préférable, dans ce genre de cas, de s'occuper de ses affaires. Et justement, ses affaires arrivaient, avec leur fourches. C'était en se retournant pour filer dans la direction opposée qu'il aperçut les deux gardes qui l'avaient escorté jusqu'ici. Il aurait dû se douter qu'il tomberait sur eux à un moment ou à un autre. Mais pas si tôt. Par les ouvertures dans leurs cagoules, on pouvait discerner des sourires. Ils avaient laissé du temps à Grey pour partir devant, se perdre un peu et s'affaiblir, et maintenant, ils venaient s'amuser.


- Enflures...

Bien qu'il n'en eut aucun envie, le pirate se mit à courir. Enfin, c'était un bien grand mot. A cause de son pied, c'était un trot/boitement rapide. Mais les gardes étaient plus vifs, ils courraient comme si rien de dangereux n'était disposé au sol. Fatalement, ils allaient rattraper le détenu. Grey zigzaguait de son mieux entre les arbres, multipliant les écorchures. Il gardait un oeil devant lui, et un oeil sur le sol. Le minimum vital. Et par a coups, il tournait la tête une seconde vers ses agresseurs. Sur le chemin, d'autres détenus firent leur apparition. Comme Grey, ils étaient désireux de pas trop attirer l'attention, alors quand le pirate aux cheveux rouges leur passa devant, suivis par deux chasseurs, ils s'agitèrent comme des abeilles autour de leur nid. Bien sûr, les gardes n'avaient que faire de ces mecs, et leurs balancèrent deux ou trois coups de fourche pour dégager la voie. Bizarrement, Grey était devenu sourd aux hurlements des autres. Maintenant qu'il était la proie, il n'entendait plus que le rythme de son coeur, tambourinant. Comme s'il pressait le pirate de se magner.

Bientôt, le jeune homme fut fatigué, et dut se résoudre à se retourner pour faire face à ses poursuivants. Mais pourquoi était-il si fatigué ? Il avait déjà courut plus longtemps que ça, dans des conditions plus dures. Alors, pourquoi ? De toutes façons, ils étaient presque à sa portée. S'il avait continué à courir, il aurait peut-être reçu une fourche dans le dos. Là, ils allaient sûrement attaquer au corps à corps.

- On n'en peut plus ? T'es pas très marrant. On t'a pourtant laissé pas mal de temps. Enfin, ça aurait pu être pire, tu aurais pu te faire avoir par une araignée.

Sans trop savoir pourquoi, Grey sourit.

- Ouais, j'en ai croisé une. Elle est clouée au sol maintenant.

- Oh, mais c'est qu'il s'y croit. Te monte pas la tête pour une seule bête. C'est vrai que y'en a pas beaucoup qui s'en sortent, mais si tu savais ce que réservaient les autres niveaux...

Puis, s'adressant à son partenaire, l'homme cagoulé demanda :

- Il est à combien déjà, celui-là ?

- 11 Millions, j'crois. Pas notre meilleur prise. Si on se dépêche, y'en aura peut-être un autre plus coriace à chopper.

- T'as raison, finissons-en !

Le garde bondit sur le pirate, piques de fourches près à percer. C'était sans compter la combativité du garçon. Jamais il ne se laisserait descendre sans combattre, même si c'était en enfer ! Alors Grey esquiva. Le chasseur était surpris, mais il ne s'arrêta pas pour autant. D'un geste rapide, il envoya l'autre côté de sa fourche sur sa proie. Grey l'arrêta d'une main, et tira violemment dessus. Si le garde ne lâcha pas son bien, il fut néanmoins emporté avec. Ce qui lui valut une mandale dans la poire. En tombant par terre, ce type venait de comprendre un peu mieux la souffrance des détenus. Bah oui, ses chaussures étaient conçues pour résister au tranchant de l'herbe, mais pas le reste. Saignant par plusieurs petits trous, il se releva quand même. Grey planta la fourche dans le sol, et toisa fièrement son adversaire de toute sa hauteur.

- Tu fous quoi, merdeux ? T'as pas compris. T'es pas là pour survivre, t'es là pour mourir à petit feu. On s'amuse avec toi, autant de fois qu'on veut, jusqu'à ce que t'en crèves !

- Dans ce cas, faudra y aller à fond...

Le gardien regarda ce pirate qui osait le défier. Il allait attaquer de nouveau, et cette fois, son compagnon viendrait. Grey retira la fourche du sol, et se prépara au combat. Il avait reçu un entraînement au bâton quand il était plus jeune. Bien qu'il n'ait plus trop pratiqué depuis, il avait toujours trouvé que ce genre d'arme était très instinctif dans son utilisation.

Cette fois, c'est l'autre qui prit l'initiative. Normal, lui il avait encore son arme. Ce fut fourche contre fourche. Les piques s'entremêlèrent, bloquant les deux opposants dans un concours de force pour voir qui prendrait le dessus. Bien sûr, le problème venait du deuxième, qui n'allait pas attendre bien gentiment l'issue de ce duel. A cause du coup de poing qui venait au ventre, Grey se décala, et perdit la bonne prise qu'il avait sur sa fourche. Malgré lui, il perdit donc le duel d'armes, et lâcha prise. Le gardien sans arme enchaîna avec un autre coup de poing, puis un autre. Cette fois encore, Grey ressentit la même impression que face au Chef de cellule.


*Il n'a pas le niveau...*

La seule chose qui rendait ce combat presque équitable, c'était la nature du terrain. Le pirate devait sans cesse surveiller ses pieds, et fatalement s'écorcher, tandis que l'autre pouvait tout lâcher sans calculer sa position. Mais ce n'était pas suffisant. Grey bloqua l'un des coups avec son bras, et contre-attaqua sans bouger ses pieds pour éviter plus de douleur. Uniquement par les mains, il repoussa, avec trois coups puissants, son agresseur. L'autre revînt à la charge maintenant qu'il avait démêlé les fourches. Il en tendit une à son compagnon, et se placèrent l'un en face de l'autre, avec leur proie au milieu.

- Normalement, on ne tue pas les détenus qui ne sont pas condamnés à mort. Mais il arrive que de temps en temps, un accident arrive. Et comme t'as pas l'air normal... Enfin, c'est pas comme si quelqu'un allait te pleurer.

Et d'un regard entendu, ils passèrent à l'attaque. C'est justement parce qu'ils se firent ce signe de l'oeil que Grey put ne pas se faire embrocher. Chacun donna un coup en direction d'un bras, alors Grey se tourna de 90 degrés. Les fourches le griffèrent au niveau du ventre et du dos, mais rien de grave. Entre les deux armes, le pirate saisit les manches, et cette fois fit un tour complet sur lui-même. Ce fut tellement inattendu que les deux gardes lâchèrent leur fourche sans lutter. Après quoi Grey les jeta au loin, pour finir par un puissant coup de poing dans l'un, et un coup de talon plus fort encore dans la face de l'autre.

Essoufflé, le pirate regarda les perdants. Ils étaient assommés. Il ne devaient même pas sentir les épines s'enfoncer dans leur peau. Et maintenant, quoi ? Grey venait de tabasser ceux qui devaient le ramener dans sa cellule. Et à l'abri des regards comme ils l'étaient, sous les daguifères, y'avait peu de chance que quelqu'un ait remarqué la scène. Pas d'escarméras apparents non plus. C'était bien sa veine. Même pas un clampin pour venir le ramener dans sa cellule.

Ne sachant pas quoi faire d'autre, Grey se contenta de s'aménager un coin sans herbe, grâce aux fourches, et de s'y poser pour récupérer un peu. Il s'épuisait de plus en plus, et ce juste pour un petit combat de rien du tout. Est-ce que l'air dans le coin était tellement malsain que ça faisait perdre aux prisonniers toute leur combativité ?



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Combien de temps s'était-il écoulé ? Dix minutes, quinze ? Pas plus de vingt. Si peu de temps, mais tellement quand on le passait au milieu de cris d'effroi et de souffrance. C'était un coup à rendre dingue. Grey, lui, n'avait pas bougé de sa petite place aménagée, et pourtant, il continuait de se sentir de plus en plus faible. Pourquoi ? Est-ce qu'un produit avait été glissé dans la bouffe ? On lui avait donné un médoc pour ne plus frapper ses petits camarades de cellule ? Ca semblait complètement nulle comme raison. Mais c'était un fait, petit à petit, le pirate perdait ses forces. Alors, quand arrivèrent d'entre les arbres de nouveaux gardiens, le détenu ne put que grogner.

- Là-bas ! Ils sont par terre ! Hé, l'autre aussi est avec eux !

Grey se releva lentement. D'autres adversaires. Il ne pouvait pas les considérer autrement, vu qu'ils auraient sûrement envie de lui faire payer ce qu'il avait fait aux autres.Tant pis, il se battrait. Il n'allait pas salir l'honneur des Bloody Sorrow en se laissant maltraiter. De toutes façons, il était déjà en prison, et il n'en ressortirait plus, son cas ne pouvait pas s'aggraver. Les deux geôliers brandirent leur fourche. Le pirate aussi en avait, celles des précédents chasseurs. Quand l'un des agresseur lança sa fourche pour empâler le jeune homme, ce dernier fit de même. Les lances improvisées s'entre-mêlèrent et tombèrent au sol dans un fracas métallique. L'autre gardien commença à courir, arme levée. Grey préféra avancer lui aussi, pour avoir sa petite plateforme en dernier recours, plus tard. Alors il lança la deuxième fourche devant lui qui se planta dans le sol, près du garde qui approchait. L'homme rit de ce tir si lamentablement effectué. Mais c'était sans compter sur l'ingéniosité du détenu, qui sauta pour se retrouver un instant sur le manche de la fourche plantée, pour ensuite rebondir dessus et enchaîner par un coup de pied ! S'il n'y avait pas eu....l'autre.

Un énorme bonhomme bleu, une hache dans le dos, qui apparut de nulle part et donna un coup de poing sur un Grey surpris. Le pirate eut tout juste le temps de parer le coup, mais fut violemment repoussé en arrière. Jusqu'à la petite zone plate qu'il s'était crée en fait.

- Une force de la nature, on dirait.

Par contre, s'il avait une forme humanoïde, il n'avait pas l'air d'avoir le cerveau qui allait avec. Dans son comportement, c'était plus une bête. Et contrairement aux autres gardes, ce machin bleu ne laissait rien deviner de ce qui pouvait se cacher en-dessous sa cagoule.

- Allez, Bluegori ! Rétames-moi ça !

Drôle de nom. M'enfin, bizarre ou pas, il faisait ce qu'on lui ordonnait. Il se jeta sur le pirate, façon bourrin, pour essayer de l'attraper de ses gros bras. Mais s'il avait la puissance physique pour lui, son défaut de cerveau le rendait facile à toucher. La preuve, après avoir esquivé le brassage d'air, Grey contre-attaqua par un coup de pied retourné. Mais le gorille recula peu, explosant quelques épines au passage.

- Un épiderme solide aussi...

Mais cette fois, plus que de l'observation, c'était de l'exaspération dans ses mots. Grey le ressentait, il s'affaiblissait au cours du combat. A ce rythme, il ne tiendrait pas plus de cinq minutes. Le Bluegori revînt à la charge, hache en main. L'arme partit de haut en bas, et trancha le sol ! Mais pas le pirate, qui une fois encore, fit un pas de côté. Il voulut réagir, prépara son poing, mais le Bluegori décida que plutôt que de retirer son arme du sol, il allait directement donner un coup du plat de la lame. Grey fit un joli vol plané en arrière, méchamment secoué. En fait, il ne put se rétablir, et s'étala sur une des si peu nombreuses pierres plates du coin. Coup de bol. Sinon, il se serait enfoncé de plusieurs centimètres sur les épines, et ça aurait été la mort.

*Tiens, ça remue, on dirait que j'ai une dent pétée...*

Le Bluegori était prêt à remettre ça. Il gigotait sur place, attendant son adversaire. Il allait voir... Enfin, le piprate n'était pas en super forme, il commençait à avoir des vertiges. Tant pis ! Grey cracha sa dent qui alla s'égarer dans l'herbe, et bondit à son tour sur l'ennemi. Il en pouvait pas renoncer sous prétexte d'avoir un peu faibli ! Il donna un coup de poing qui frappa le vent, esquive adversaire oblige, après quoi le plat de la hache l'envoya se plaquer au sol brutalement. C'était son petit coin aménagé sans épines. Mais qu'est-ce qu'il y avait comme sang... Pourtant, Grey ne s'était que peu battu ici, la quantité était complètement disproportionnée par rapport aux dommages faits par le Bluegori. En revanche, si près du sol, les yeux du détenu voyaient beaucoup mieux les gouttes du liquide pourpre disséminées un peu partout aux alentours. Ce n'était pas si évident à remarquer à la base, vu que tout dans cette forêt était aussi rouge. Ce constat ne signifiait qu'une chose...

*Je me vide de mon sang petit à petit depuis que je m'écorche sur ce terrain... Depuis le début... Même pas été foutu de m'en apercevoir... C'est pitoyable...*

Fini. Plus la force de parler. Plus la force de bouger. Rien d'autre que de lever les yeux vers les gardes et le monstre bleu. Puis finalement, ça devient flou. Les personnages s'effacent, remplacées par des silhouettes, puis par le noir total.
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