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Des honneurs pirates


Kurn posa une main légère sur l’escargophone, qui remua légèrement. Il venait d’être nourri, une de leurs dernières feuilles de laitue, et était donc plein d’énergie. Avec un peu de chance, cette fois, la communication sera établie… Si, également, la bouteille pouvait tomber entre les mains de Maxwell ou quelqu’un qui lui donnerait, cela serait idéal.
La rascasse jeta un énième coup d’œil à la porte de sa cabine, verrouillée, comme il se devait. Il avait prétexté une sieste pour que Fantine ne vienne pas le déranger, ce qui, malgré tout, ne semblait pas l’empêcher de venir la plupart du temps. Peut-être pas aujourd’hui, je l’ai occupée avec ce qui ressemble à une canne à pêche.

Ses yeux s’égarèrent sur Respora. Tomoe avait dû répandre la rumeur, à présent, donc les candidats ne devraient pas tarder à arriver. Peut-être même sont-ils déjà à Clock Work Island, leur prochaine destination, qui était toute proche.

Il s’ébroua, se concentra. La mixture familière de culpabilité et d’échec creusa son trou au niveau de son estomac, au point que sa salive devienne aigre. Il signala au denden de s’activer d’une gentille touche sur la joue, et choisit quel autre escargophone appeler. La créature secoua rythmiquement la tête en chantonnant un air sans queue ni tête.

Alors que la mélodie trainait en longueur, Kurn s’affaissa imperceptiblement sur sa chaise, prêta l’oreille à ce qui se passait sur le reste du navire. Les roues à aubes continuaient de tourner, et le bois grinçait dans la houle. Rien que de très normal. Sa main se tendit pour signaler au denden de se rendormir quand il ouvrit la bouche.

« Oui ? Vulkir T’Erlhitan, fils de Vrarr, fils de Torl.
- Vulkir ? C’est moi, Kurn ! »
La voix de son petit frère lui fit chaud au cœur.
« Kurn ! Ca fait des mois qu’on n’a pas de nouvelles ! Tout va bien ?
- Oui, oui, je suis sur Grandline, présentement.
- Woah, Grandline, trop cool ! T’as dû voir de sacrés trucs !
- Oui, oui, effectivement. Tu peux… me passer Grand-Père ?
- Ouais, je l’appelle.
- Il va bien ?
- Il est pas mal malade, on sait pas s’il va continuer longtemps, mais ça lui fera sûrement du bien d’entendre parler de toi.
- Hum… »

Les coins de la bouche de l’homme-poisson tombèrent. Le plus dur restait à venir, et c’était de parler de son échec au patriarche des T’Erlhitan, Torl. Il était déjà grandement affaibli quand il était parti, moins d’un an auparavant, et son état n’avait pas l’air de s’être amélioré. Et pourtant, son esprit restait aussi aiguisé que jamais. En tout cas lors de son départ. La voix résonna enfin dans l’appareil, peut-être à peine plus chevrotante que dans son souvenir.
« Torl T’Erlhitan, fils de Vamar, fils de Barù. Kurn, c’est toi, mon garçon ?
- Oui, Grand-Père.
- Comment cela se passe-t-il, avec le petit Toreshky ?
- Justement… »

On y était. Kurn déglutit difficilement, comme un gamin pris en faute. Sauf que c’était pire. Le serment qu’il avait prêté, il n’avait pas pu l’accomplir. Il ne lui restait qu’à se lancer.
« Maxwell… Je l’ai retrouvé à Poiscaille.
- Excellent, excellent…
- Puis je l’ai perdu à Poiscaille.
- … »
Une quinte de toux l’empêcha d’en dire davantage. Et s’il meurt maintenant, alors que je lui annonce la sombre nouvelle… Cette pensée fit sombrer Kurn un peu davantage.
« Nous avons été séparés à Poiscaille, oui, Grand-Père. A partir de là, j’ai contracté une dette de sang avec une autre pirate, qui m’a sauvé plusieurs fois la vie.
- Mais… Et Maxwell Toreshky ?
- Je n’ai pas de nouvelles depuis.
- Et… Où es-tu ?
- Sur Grandline, près de Clock Work Island.
- Je vois… »

Le silence s’étendit quelques instants, inconfortablement pour Kurn, peut-être de même pour Torl.
« Grand-Père… Commença la rascasse.
- Ecoute-moi bien, Kurn, le coupa l’ancêtre avec un timbre qui avait retrouvé le tranchant de sa jeunesse. Tu as failli à ta mission. Tu as failli à l’honneur des T’Erlhitan. Tu as failli aux Toreshky, à Vladimir et à Maxwell. »

Les mains de l’homme-poisson serraient le bois de la table de toutes leurs forces, et ses doigts prirent une couleur sombre là où les écailles n’étaient pas déjà noires. Nous y sommes.
« Pour toutes ces raisons… Pour tous ces manquements… Moi, Torl T’Erlhitan, fils de Vamar, fils de Barû, Intendant de Vladimir Toreshky, Patriarche des T’Erlhitan… »
Une inspiration.
« Je te déshonnore, et te bannis, Kurn. »
Les yeux du jeune homme-poisson s’écarquillèrent.
« Je jette l’opprobe sur ton nom comme tu as jeté l’opprobe sur le nôtre. »
Ses ongles glissèrent, griffèrent le dessus de la table.
« Et je déclare dès à présent qu’aucun Kurn T’Erlhitan, fils de Vrarr, fils de Torl, n’a existé dans notre noble lignée. »
La rascasse inspira maladroitement de l’air, manquant de s’étouffer, tandis que ses nageoires battaient faiblement dans le vide.
« Puissent les Mânes de Vladimir Toreshky nous pardonner. Puissent-elles nous pardonner. »

D’une voix brisée par l’émotion, Kurn prit la parole :
« Mais… Grand-Père… »
Cependant, l’escargophone s’était déjà rendormi.

Le pirate reprit une inspiration difficile. La pièce semblait tanguer autour de lui, et sa bouche béait sur les mots qu’il aurait voulu dire. Puis les murs de sa cabine semblèrent se rapprocher petit à petit. Il se releva en prenant appui sur la table, dans laquelle ses doigts avaient imprimé une trace profonde. Sa chaise se renversa. Il ouvrit la porte d’un coup d’épaule et sortit sur le pont, inondé par la lumière du soleil.

Quoi ?

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«Naaaan pas cette droite là ! L'AUTRE DROITE ! Rouloulou ! Arrête de faire l'idiot ! Crocodog, tu vas être puni, plus d'os à ronger ou de parabole à te mettre sous la dent, je te préviens ! OH ! Mais tu m'écoutes ?! »

L'homme poisson venait de passer la porte menant au pont pour tomber sur un spectacle plutôt hors norme, mais pas tant quand on avait l'habitude de fréquenter une personne comme Fantine. Cette dernière était totalement ligotée, la tête en bas, au mât du navire, avec la canne à pêche qu'il lui avait laissé en partant en lui expliquant bien comment s'en servir. Le crocodog tenait dans sa gueule un morceau de cette dernière et s'en servait comme d'un bâton à mâcher, pendant que sa maîtresse tentait vaguement de se libérer de sa prise. Et quand elle vit son ami arriver, et lui fit un grand sourire, les joues rouges à cause du sang remontant dans sa tête :

« Ah tiens, salut Kurn, ça va ? Fit-elle tout à fait naturellement.

Comme tu vois, nous, ça va, on s'amuse comme on peut. »

Mais Kurn pouvait être sûr d'une chose, Fantine n'était pas du tout, mais alors PAS DU TOUT, en train de s'amuser présentement. Sauf qu'il n'était pas non plus du tout question qu'elle l'admette. Ça se voyait comme le nez au milieu de la figure qu'elle n'était pas à l'aise, que le nylon était en train de lui cisailler les bras, qu'elle allait aussi très bientôt perdre conscience si elle restait plus longtemps dans cette position. Mais combien de temps tiendrait-elle avant de demander de l'aide ?
Deux minutes, pas plus :

« Tu voudrais pas me libérer ? »

Non, pas vraiment, mais si je ne le fais pas tu vas être pire, pensa très fort la rascasse (et oui moi je fais ça parce que je suis fifolle). En silence, l'homme s'approcha et commença à défaire les nœuds du Crocodog à l'aide d'un poignard.

« Bah quoi, ça va pas ? Demanda Fantine, la tête en bas, les yeux rivés sur le visage de Kurn qu'elle trouvait bien plus crispé que d'habitude.
… Si.
T'as l'air de faire la tête, quand même.

Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Eh Kurn ? Tu me réponds ? Groot ? Grooot ? GROOOOT ?! »

Maintenant que ses jambes étaient libérées et qu'elle manqua de les mettre dans la tête de son ami, plus rien n'allait. Mais c'était toujours ça avec Fantine, dans ce genre de cas : il n'y avait aucune partie d'elle plus tranquille ou moins pire que toutes les autres. C'était comme si elle était, en dépit de toute logique, constamment branchée sur une prise

« Bon ?! Tu peux pas rester calme deux secondes et arrêter de gigoter comme ça ?!
Repoooonds moi !
Y'a rien ! Gronda l'homme en laissant sa partenaire s'écraser par terre sans prévenir. »

Fantine chouina avant de se remettre sur ses jambes, le reste du corps totalement marqué par la mésaventure qu'elle venait de subir. La parabole jeta un coup d'oeil vers le pont pour voir ce qu'il se tramait, le crocodog plongea dans sa niche pour continuer à mordiller le morceau de canne à pêche qu'il avait réussi à récupérer, et Kurn, lui, continua à faire son méchant grognon en lançant un regard fâché à sa vis-à-vis :

« Maintenant, j'aimerais un peu de calme sur ce navire, j'aimerais ne pas regagner le pont dans une heure et voir que plus rien n'a de sens ! J'aimerais que pour une fois tu ne sois pas toi, que tu arrêtes de faire l'idiote, et que tu te comportes comme la personne responsable d'un équipage ! C'est quand même pas trop te demander ?! »

Son ténor avait été fort, ferme, de quoi mettre Fantine au coin s'il l'avait exigé. Mais c'était sans connaître la gamine qui n'avait jamais eu aucun respect pour une quelconque autorité et ce fut avec son petit doigt fin qu'elle planta sur le torse de la rascasse qu'elle répondit sans réfléchir :

« Alors déjà je fais pas l'idiote et ensuite tu me dis que t'as rien ? Tu mens, c'est très mal de mentir à son capitaine ! »

Mais la réplique en elle-même ne fit qu'agacer Kurn, qui tourna les talons, retourna dans sa cabine en claquant la porte et en pestant bruyamment :

« Raaah ! »

*

« YAAAAAAAAAAAAAH GROOT ! RAMENE TOI ON ATTAQUE UN NAVIRE ! »

Quelques heures après cette « dispute » particulière, la jeune fille avait déboulé dans la chambre de son ami en défonçant à moitié la porte presque sortie de ses gonds. Elle annonça la couleur des choses à venir avec un sourire étrangement satisfait. Sur le pont, une cloche sonnait, agité par le Crocodog qui la tenait en gueule en courant sur tout le pont et en agitant fièrement la queue.

« Hein quoi ?! »

La jeune fille traîna Kurn jusqu'à l'extérieur, lui tendant ensuite une longue vue de sa conception. Il n'eut de toute façon qu'à plisser les yeux pour voir un navire d'une taille moyenne à l'horizon, et à lever la tête pour constater que Fantine s'était amusée à peindre avec dieu savait quoi un drap qui faisait désormais office de pavillon pirate. Joie.

« C'est pour que tu arrêtes de faire la tête, on va être de vrais pirates !
Mais-
A L'ASSAAAAAUT ! »

Et sans lui laisser le choix, elle qui avait réveillé des canons quelques minutes après avoir eu cette excellente idée, les laissa tirer à vue sur le navire en question. Avant de s'élancer comme une vraie pirate au bout d'une corde des voiles, tout droit vers... Le bateau, dans son idée, mais surtout tout droit vers la flotte.

Glou.
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Depuis combien de temps je n'ai pas repris forme humaine ? Je ne sais même pas pourquoi j’essaye de faire appel à ma mémoire, je ne me souviens même pas comment je suis arrivé là. Je me suis éveillé dans un foutu tonneau après une soirée trop arrosée sur Armada. Semblerait que ça soit devenu ma petite habitude personnelle.

Combien de temps ai-je passé dans ce tonneau ? Aucune idée. Tout ce qui s'est passé me semble à la fois antédiluvien et proche. La fièvre qui s'était emparée de moi après Navaronne, rendant tout flou. Les brides de mon haki ne m'offrant que des images obscures et incompréhensibles, d'animal difforme, d'objets animés et de très mauvaises parodies de romans policiers. Je ne m'étais traîné en dehors de mon habitacle que sous forme de sable pour trouver à manger et surtout à boire. On avait même déplacé mon tonneau au fond dans cette cale, où même les murs semblaient capable de parler. Je suis resté dans cette torpeur pendant ce qui me semble être une éternité. Aiguisant encore un peu plus mon Mantra dans cette étrange endroit. La navire fourmillé de vie, deux êtres vivants tout ce qu'il y avait de plus classique, mais le reste échappait totalement à ma compréhension, « les voix » qui parvenaient à mes sens semblaient provenir de nul part. Pas de nul part, de partout, et par partout comprenez plutôt de n'importe où. D'êtres dont la nature m'échappaient totalement.

Et comme j'imagine que les choses ne changent véritablement jamais, c'est encore une fois la douce mélodie d'une canonnade qui me fait sortir de ma longue rêverie. Si j'étais en chair et os, j'aurais sans doute laisser échapper un long soupir. Mais je crains que la masse informe de sable que je suis en soit incapable. Les milliers de grain de sable qui composent mon corps se meuvent en dehors du tonneau, soulevant le couvercle qui tombe lourdement sur le sol de la cale. Ce corps sans consistance n'a aucun problème à se glisser entre les barreaux de la cellule où se trouve enfermer le tonneau.

Oui je sais, qui est assez débile pour enfermer un tonneau dans une cellule ? J'en ai fichtrement aucune idées mais j'imagine que je ne vais pas tarder à le découvrir. Le sable s'anime de nouveau, dessinant peu à peu une silhouette humaine. Le sable redevient chair et revoilà Galowyr le pirate en personne. Ma démarche est pataude l'espace d'un instant. Mais on n'oublie pas comment se servir de ses jambes aussi facilement j'imagine. Je cherche de l’œil la sortie, et mon regard fini par se porter vers un escalier. Pas par pas, je me dirige vers la sortie. J'entends comme un murmure.

Tiens il est nouveau celui là non ?

Vrai que je l'ai jamais vu.

Surpris je me retourne, et pourtant personne dans cette foutue cale. Du moins personne que je n'arrive à voir. Juste ces étranges roues qui tournent de part et d'autre. Sans doute mon imagination, la fièvre a beau avoir baissé je dois encore avoir quelques séquelles. Ça doit être le manque de tabac, ça a des effets désastreux sur mon organismes.

Une cigarette fumante aux lèvres. Me voilà de nouveau à l'air libre, la douce caresse de la brise marine sur mon visage m'arrache un sourire. Il disparaît assez vite. Une drôle de bestiole est en train de me grogner dessus. Et quand je parle de drôle de bestiole, c'est pas un singe capable de jouer des cymbales ou un perroquet qui récite l'alphabet cyrillique à l'envers. Non là, c'est l'enfant difforme qu'aurait eu un gros lézard avec un cabot. Et c'est pas beau à voir. Surtout que la bestiole a l'air mauvaise, elle me jappe à la gueule, et essaye même de me mordre quand j’essaye de bouger. Mais bon si elle aime bouffer du sable cette saloperie. Je cherche des yeux un interlocuteur quelconque. Je serais pas difficile du moment que ça a l'air à peu près humain. Voir même s'il n'a pas l'air d'un hybride imparfait entre deux espèces manifestement incompatible, j'en serais tout à fait heureux.

Et pendant que j’essaye de ne pas trop me poser de questions sur le fait que les canons du pont semblent manifestement capables de tirer tout seul sans la moindre présence humaine, voilà qu'un homme poisson colossale surgit des eaux avec une donzelle sur l'épaule manifestement pas mécontente d'avoir du écourter sa baignade. J'aurais eu quelques verres de rhum dans le bide, je suis sur que cette succession d'événement abracadabrantesque ne m'aurait pas déplu. Je suis même sur que voir un canon taper la discute à un autre aurait bien pu me faire marrer. Voir me poser deux trois questions philosophiques sur qu'est ce qu'être vivant. Et si c'est un rêve, j'ai du sacrément m'amuser hier soir. Mais là, ma sobriété alliée à mon incompréhension d'ordre générale sur tout ce qui se passe sur ce maudit rafiot me force à énoncer d'une voix quelque peu agacée une question tout à fait naturel et tout à fait simple.

Quelqu'un peut il m'expliquer qu'est ce que c'est que ce bordel ? On peut pas roupiller tranquille au fond de son tonneau ici ?

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Kurn laissa Fantine tomber d’un peu plus haut que nécessaire, sur le dos, sur le pont, pendant que les canons continuaient de tonner. Sur l’autre navire, qui était maintenu proche par des roues à aubes au summum de l’excitation, l’équipage tentait de lutter contre des boulets en manque d’amour, qui voulaient absolument des câlins.
Une voix attira son attention. A deux mètres à peine, un type demandait ce qui se passait. Manchot, habillé comme un acteur de mauvais théâtre qui imiterait un pirate, avec le cache-œil et un pigeon sur l’épaule… un corbeau, tiens, nota Kurn, il avait l’air perdu, et ignorait copieusement le crocodog qui lui urinait maintenant sur le pied.

Distraitement, la rascasse envoya un revers de la main armé de Respora vers l’inconnu, sentit la lame dentelée mordre, puis passer à travers. Sans un regard de plus, il se tourna vers Fantine, toujours allongée sur le pont. Un petit coup du plat de la main sur le sternum la fit tousser, puis cracher une gerbe d’eau de mer. Elle se plia en deux, roula sur le côté pour expulser le reste. L’homme-poisson secoua la tête.

« Dites, j’ai demandé ce qui se passait, là. »
La nuque de Kurn craqua quand il se tourna vivement. L’inconnu était toujours là, en chair et en os, au même endroit que précédemment, sans la moindre blessure. Le crocodog mordit sauvagement son pied, s’en tira avec une gueule pleine de sable. L’homme lui jeta un regard las tandis que le membre se reformait. Un coup d’œil sur Respora, dont le tranchant était recouvert de grains aussi.
« Keuf… Keuf… Bleuargh ! Cracha Fantine. On est des pirates alors on attaque le nav-keuf !
- Ah oui ? Mais c’est passionnant dites-moi.
- Dis voir, si ça t’intéresse pas, tu n’es pas obligé de rester sur notre bateau, fit Kurn.
- Certaines limitations techniques font que je ne vais pas partir à pied, dit-il raidement.
- Ah, oui. »

Fruit du démon. Sable. Logia ? Et il parlait de tonneau.
« Hé mais… Ce serait pas toi qui piques notre nourri… »
La phrase fut interrompue par une bordée de boulets qui s’écrasèrent dans la coque de leur bateau, suivie par des coups de feu. Ils se jetèrent tous au sol, sauf l’inconnu qui regarda avec un air blasé les balles le traverser.
« Oh et puis, fais ce que tu veux, grommella Kurn.
- Tu veux rejoindre mon équipage ? Demanda Fantine.
- Ca ou autre chose…
- Super ! Tu seras notre mousse ! On n’a pas encore de mousse !
- Mousse ? Mais…
- On y retourne ! Coupa la capitaine. A l’assauuuuuut ! »

L’homme et l’homme-poisson se regardèrent alors que la jeune fille se relevait tant bien que mal puis bondissait sur le navire voisin.
« Oh et puis mousse, c’est pas si pire, par rapport aux autres fois, murmura le logia. »
Le temps mort permit à Kurn de se remémorer son bannissement et son déshonneur. Je ne suis plus le guerrier des T’Erlhitan, je ne suis plus qu’un pirate… Donc, après tout, pourquoi ne pas boire la coupe jusqu’à la lie ?
« Har. Har. Har, fit-il sans entrain. »
Puis la rascasse prit appui sur le bastingage, sentant le bois plié légèrement sous son poids, et sauta sur l’autre bateau en faisant un moulinet avec Respora. Derrière lui, l’inconnu se rematérialisa après être passé en nuage de sable.

L’autre bateau était une caravelle de commerce relativement classique. Le pont était déjà parsemé de trous, sûrement dûs aux boulets de canon qui sautillaient partout. Mais ils n’étaient plus très nombreux, la majorité étant tombée par-dessus bord, dans la mer, où ils devaient couler. Il n’y avait que des combattants face à eux, des mercenaires ou des soldats payés pour assurer la sécurité du transport. Les armes étaient diverses et variées, allant de la hache au sabre d’abordage en passant par des katanas ou autres longs-couteaux. Les marchands doivent être réfugiés dans les cabines ou dans la cale, et laisser les professionnels défendre leurs biens. Il avait lui-même accompli cette tâche de mercenariat de nombreuses fois quand il n’était pas… encore… un pirate…

Les gardes les regardèrent soupçonneusement, surpris de n’avoir que trois assaillants. Il ne fallut qu’un bond à Fantine pour surgir au milieu d’eux, et deux pas à Kurn. Comme à son habitude, la jeune capitaine n’était qu’une tornade bleue alors qu’elle se faufilait partout en distribuant des coups, esquivant les assauts dans tous les sens, par en bas, par en haut, en s’appuyant sur d’autres adversaires proches.
De son côté, Kurn abattit son Meitou horizontalement, envoyant voler le gaillard qui tenta de bloquer l’attaque. Il s’écrasa contre la porte menant aux cabines et la cale, et tomba au sol. Comme s’il coupait du bois, la rascasse ne fit pas dans la finesse, enchainant les grands moulinets de sa lame en profitant de son allonge largement supérieure.

Un ennemi se glissa souplement sous Respora et se rapprocha suffisamment pour donner un coup d’estoc. Le coup de genou en pleine face qu’il reçu fit craquer ses cervicales le fit chuter brusquement, comme un pantin désarticulé.

Oui, pillons leur cargaison, ils ont sûrement à manger, eux… Quoique, probablement pas de laitue sous-marine.
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La jeune fille bondit comme un chat sur l'homme d'équipage qui lui faisait face. Insaisissable, elle échappa par deux fois à la prise de son adversaire avant de lui planter dans la jambe la dague qu'elle lui avait dérobé quelques secondes à peine plus tôt. Le sang gicla et tâcha ses vêtements, en même temps qu'un cri de douleur se mêla aux bruits du combat. Fantine essuya d'un revers de manche ce qui lui salissait le visage en poursuivant de près l'homme qui sautillait sur sa jambe valide en se donnant assez de courage pour retirer la lame de sa jambe meurtrie.

Il n'en eut cependant pas le temps, car arrivée à son niveau, la jeune capitaine l'attrapa par les bras pour le balancer en direction du mousse. L'homme passa à travers le dernier embarqué dans son équipage qui se décomposa en des milliers de grain de sable, avant de basculer par-dessus bord et de tomber à la mer :

« Youhou ! »

Le bras levé, le sourire aux lèvres, elle croisa la mine imperturbable de son nouveau larbin, et ne manqua pas de lui envoyer un deuxième colis qui fit exactement le même trajet que le premier, dématérialisant le borgne au passage. Un grand moment toujours aussi fascinant pour un esprit comme celui de Fantine, qui s'enthousiasmait de peu :

« Encore ? bougonna d'une voix sombre le ténébreux nouveau domestique.
OUAIS ! Et en voilà un autre !
Non mais ça va ouais ? »

La gamine lui tira la langue, avant d'envoyer son petit poing dans le nez d'un opposant. Rien de bien fou, si ce n'est l’enchaînement qui suivit. Elle réussit à faire passer le corps de l'adversaire par-dessus le sien, et à venir lui éclater les cervicales violemment contre le parquet du pont. Il y eut un crac sonore, couvert par le bruit des victimes de l'homme poisson qui s'égosillaient dans leur sang.

« Elle s'amuse, grommela Kurn. »

C'était ça. C'était toujours ça. Fantine s'amusait toujours, qu'importait la situation. Sinon, cette dernière ne valait pas le coup d'être vécu si elle n'était pas amusante.

Et puis, dans le cas présent, l'adversité divertissante commençait doucement mais sûrement à diminuer. Sur la masse d'opposants qui leur tenait tête au début, il n'en restait qu'une dizaine plus si farouche, comme si défendre la cargaison n'avait plus beaucoup d'intérêt maintenant qu'ils étaient confrontés à de vraies vandales. Et pas des mauviettes, il fallait dire. Si la gamine se défendait bien et pouvait se montrer très pénible, il s'avérait que l'homme poisson avait une dent certaine contre eux et de lui émanait une certaine... Mauvaise humeur ?

Ou un truc du genre.

S'accrochant comme un singe au mât, la jeune fille se balança du bout d'un cordage lâche en admirant son œuvre. Et sur le tableau, il y avait bien quelque chose qui le gênait, c'était probablement ce grand dadais de mousse qui ne faisait pas grand chose pour aider son fidèle second à nettoyer le navire. Alors qu'ils avaient tous besoin des stocks pour continuer l'aventure... Il allait falloir lui apprendre la vie en mer, de toute évidence, il n'y connaissait rien.

« Harharhar ! On est des terreurs des mers, hein, le mousse ?! T'as jamais vu des vrais forbans comme nous je suis sûre !
Ah ça... »

Il semblait pas spécialement convaincu,

« Alors Groot, c'est pas super cool d'être des pirates et d'avoir un larbin qu'on sait même pas d'où il sort ?! demanda-t-elle, se balançant toujours la tête en bas avec un grand sourire tandis qu'on tentait de lui couper la tête à grand coup de sabres qu'elle esquivait sans mal. C'est ça la belle vie ! »

Perdant patience, elle usa de sa technique shopping pour se défaire de ses opposants. En quelques secondes, les vêtements de tous les gens se trouvant dans un rayon de dix mètres d'elle se retournèrent contre leurs porteurs. Et ce que ça pouvait être agréable de ne pas avoir tout le temps à se salir les mains en envoyant quelqu'un d'autre le faire...

« D'ailleurs larbin, sois mignon et sers à quelque chose ! »
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Un repas à cinq berrys dans une taverne miteuse, une discussion avec une mère endeuillée autour d'une bouteille de rhum, une partie de pierre feuille ciseaux Grand Lloyd Barrel ; je pensais avoir tout vu en ce qui concerne les recrutements débiles au sein d'un équipage pirate. Comme d'habitude, il semblerait que je me sois encore bien gouré. Tu me diras c'est pas comme si j'avais autre part où aller pour le moment. Je pourrais certes liquider la donzelle et le mérou, mais j'irais pas bien loin tout seul même sur deux navires.

Par contre je sais pas comment je fais pour tirer un capitaine encore plus stupide que le précédent. Drogo n'était pas une flèche, Lloyd encore moins mais alors la furie aux cheveux bleus … Tu me diras elle m'appelle larbin. Elle aussi. Le Grand Lloyd Barrel fait semble-t-il des émules chez les jeunes capitaines pirates. J'en connais au quartier général de la marine qui n'ont pas fini de pleurer. J'en viens à me demander si le prochain capitaine pirate que je rencontrerais ne sera pas une huître ou je ne sais quel type con comme un mollusque persuadé d'être la réincarnation d'une quelconque divinité païenne. Il me donnera du «mortel » et voudra que je l'appelle Seigneur. Quoiqu’à bien y réfléchir ça aurait presque plus de gueule. C'est pas tout mais c'est que je dois me rendre utile moi. Faudrait pas que la fine fleur de la piraterie ne veuille plus de moi n'est ce pas ?

A vos ordre capitaine !

Capitaine comment d'ailleurs ? Peut importe, j'ai pas spécialement envie de savoir. Un coup d’œil aux cadavres par terre suffit à me faire comprendre que niveau combat, il n'y a plus grand chose à faire. Une jolie petite boucherie. Faut dire qu'un homme poisson géant armée d'une épée d'un calibre équivalent ça fait rarement dans le subtil. On va pas non plus s'effaroucher de quelque mort non ? Manquerais plus que de recevoir une nouvelle leçon sur la piraterie. Mon corps se transforme en sable, glissant entre les planches du pont, me voilà dans la cale pour y trouver un bien triste spectacle. Le dernier bastion du mercantilisme à bord. Cinq types blottis les uns contre les autres à attendre de savoir si les cris d'agonies qui leur parviennent sont ceux des assaillants ou de leurs défenseurs., Un regard suffit pour comprendre que les types sont inoffensifs. Le poiscaille et le capitaine se sont chargés des combattants, ne reste que le menu fretin pour le mousse j'imagine. D'un main tremblante l'un d'eux me tire dessus au pistolet. Les balles ne font que traverser mon corps. Le reste n'est que détail.

Une fois débarrassé des emmerdeurs, je commence à regarder la cargaison du navire. Oh non c'est pas possible. Il semblerait que finalement la journée ne soit pas si mauvaise. Des caisses de cigares, du tabac sous toutes ses formes. Mon regard se porte sur les pauvres hères de tout à l'heure. J'ai bien fait de me contenter de les assommer. Des gens qui vont un si beau métier que d'offrir cette délicieuse plante au monde entier méritent de mourir paisiblement dans leur lit entourés de ceux qui les aiment.  D'un jet de sable j'explose le plafond de la cale. Je me demande bien ce que mes deux nouveaux charmants compagnons peuvent bien faire.

Hey capitaine, j'ai trouvé un paquet de tabac là dessous !

Mon voix pleine d'enthousiasme ne provoque pas chez ma capitaine le résultat escompté.

C'est trooop nul ça … T'as pas plutôt à manger ? Les vrais pirates dans notre genre ça a besoin de force. On a besoin de saucisson, de viande et de …

S'en suit un inventaire du contenu de tout bon garde manger que je ponctue de « hum » histoire de montrer que je suis bien attentif.

Et de la laitue. Ponctue notre ami à branchies.  Je les aurais bien envoyer paître nos petites divas de la piraterie, mais c'est vrai qu'à part le saucisson que je leur ait chouré et la bouchée d'algue immonde, j'ai rien mangé depuis longtemps. Et voilà que je commence à retourner le navire de fond en comble. Maugréant sur le fait que ça soit à moi de le faire, je finis par tomber sur le garde manger alors que ma dernière cigarette tombe en cendres. Je me glisse la part du mousse dans les larges poches de mon manteau. Avant de remonter les vivres, j'allume l'un des cigares que j'ai trouvés. C'est vrai que ça change de la merde que je fume d'habitude. J'ai presque l'impression d'être un type distingué. Beaucoup moins lorsque je ressors de la cale, des saucisses en guise de ceintures et les bras chargés de truc à manger. Un regard faussement peiné, je me tourne vers la tête de goujon.

Par contre pour la laitue … Je suis désolé mais j'ai rien pu faire.
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Pas de laitue. Dommage.

Fantine sauta quelques instants sur place et attrapa une saucisse qu’elle mordit sans hésiter, puis commença à parler, la bouche pleine.
« C’est bon, le mousse, on veut bien te prendre dans mon équipage ! Mais faudra que tu travailles dur pour être un vrai pirate, hein ?
- Hum.
- Et toujours écouter ta capitaine !
- Hum.
- Et le second ! C’est lui, Groot.
- Je m’appelle Kurn T’Erlhi… Juste Kurn, acheva-t-il avec la mine basse.
- Puis y’a le Crocodog, c’est notre troisième !
- Le Crocodog ?
- C’est notre chien !
- Mais il faudra aussi que je l’écoute ?
- Ben oui, c’est notre troisième !
- Ah. Mais après, c’est moi, le Mousse ?
- Non, d’abord, y’a la Parabole, qu’est notre vigie !
- La… Parabole ?
- Oui, elle est là-haut, fit-elle en pointant du doigt le nid-de-pie.
- Coucou, c’est moi !
- Ah oui, une parabole qui parle. Hum.
- Voilà, et t’es notre mousse. Donc faut que tu ranges la nourriture et que tu laves le pont. Les mousses, ils lavent le pont, non, Groot ?
- Oui, ils font ça, je crois. Puis avec le sable, comme ça… »

En haussant les épaules, le Mousse passa sous forme de sable l’écart entre les deux bateaux, puis se dirigea vers la coquerie pour y entreposer toute la nourriture qu’il avait fauchée dans les cales du navire marchand. Kurn cligna des yeux.
« Mais sinon, Fantine, on peut prendre le tabac quand même, non ?
- Ah mais tu vas pas te mettre à fumer !
- Non, non. Mais pour le revendre. Et avoir de l’argent, tu sais ?
- Ah, oui, on peut. Je dirai au Mousse de le faire après.
- Voilà.
- Il est là pour ça.
- Sûrement. »

Un silence interrompu par le Crocodog qui aboya brièvement avant de lapper un peu de sang sur le pont défoncé du navire marchand.
« Dis, Groot, tu penses que c’est du sable animé par le fruit de la vie ? Comme le Bateau et la Parabole ?
- … Je pense que c’est la personne qui a mangé le logia du sable, Fantine.
- T’façon, c’est notre mousse, je retourne faire la sieste.
- Bonne sieste.
- Par contre, je pensais à quelque chose. Il a un nom, mon équipage ?
- Quel équipage ?
- Bah, le nôtre, andouille ! Je suis capitaine, tu sais ? Et toi t’es mon second. Et on a le Crocodog, la Parabole…
- Ah, oui. »

L’équipage. Tout ce qu’il me reste maintenant que j’ai été déshonoré.

« Hé mais reviens, on n’a pas trouvé de nom ! T’as une idée de nom, le Mousse ? La Parabole ? »

Sans rajouter un mot, la rascasse rengaina Respora et descendit dans la cale par la trappe de manœuvre. En atterrissant souplement plus bas, il jeta un regard circulaire, observa les tonneaux tous ouverts par le Mousse, dont la plupart laissaient échapper du tabac soigneusement empaqueté pour ne pas qu’il soit gâté par l’humidité. Fantine pourrait utiliser son fruit pour que la cargaison se transporte toute seule, en fait. Enfin, c’est le problème du Mousse, pas le mien, je suppose.
Ses yeux tombèrent sur les cinq marchands tapis dans un coin. L’homme-poisson inclina la tête. L’un d’eux s’agita faiblement en laissant échapper un couinement. Kurn regarda vers le pont, mais plus aucun son ne se faisait entendre. Sa main frôla la poignée de Respora. Oh, après tout, un vrai pirate…

Il essuya doucement la lame sur la veste de belle qualité d’un des commerçants ou armateurs et jeta à peine un regard à celui qui glapissait doucement un peu plus loin, encore intact. Voilà. Un en vie pour colporter la nouvelle. Pour devenir un terrifiant pirate. A défaut d’un pirate aventurier honorable. Fantine sera sûrement contente. Maxwell, moins, mais après ? Cela ne me regarde plus.

Puis il remonta sur le pont avec deux barils de tabac sous les bras, et les passa au Mousse de l’autre côté des deux bastingages.
« Entrepose-les dans la cale, Mousse.
- D’accord, patron.
- Je vais chercher les autres, qu’on continue notre route.
- On va où, d’ailleurs ?
- Clock Work Island.
- Pourquoi ?
- Aucune idée. Parce qu’on peut, je suppose.
- Mais on va y faire quoi ?
- On verra bien. Peut-être que le capitaine a un plan. »
Les deux hommes se regardèrent un moment sans rien dire, puis haussèrent les épaules. Quand ce fut enfin fini, Kurn enjamba l’écart entre les deux bateaux et siffla le Crocodog, qui bondit de l’autre côté de l’espace et alla se blottir dans sa niche.

« Merci, Mousse.
- De rien, c’est mon boulot. En parlant de mousse, on pourrait peut-être s’en boire une…
- Je crois pas qu’on en ait. De toute façon, le capitaine a dit que tu devais nettoyer le pont, avant. Utilise le sable, ça ira vite. »
Une voix jaillit alors des entrailles du bateau.
« Je n’aime pas le sable, il est grossier, agressif, irritant et s’insinue partout...
- Ben faudra faire avec, Bateau.
- C’est déroutant, toutes ces choses qui parlent, non ?
- On s’y fait. »

Puis Kurn lui tourna le dos et partit ressasser dans sa cabine.
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Kurn n'allait pas bien. Et Fantine n'était, pour une fois, absolument pas responsable de ce fait. C'était sans doute ça le plus perturbant dans cette histoire : de ne rien avoir à faire avec l'histoire. Elle avait beau reprendre depuis leur départ d'Armada toutes les bêtises qu'elle avait enchaîné, aucune n'aurait pu, de près ou loin, affectée l'humeur de son second avec autant d'intensité. Alors qu'il allait s'enfermer dans sa cabine, la capitaine sut que son rôle était de faire quelque chose pour lui :

« Cher mousse, nous avons une mission ! Fit-elle en se tournant vers le borgne. »

L'homme redressa la tête, intrigué, ou presque, par ce que la gamine qui lui servait désormais de meneuse d'hommes avait à lui dire.

« Groot ne va pas bien.
Comment ça ?
Bah il fait la tronche !
Il est pas comme ça tout le temps ?
Alors si, mais là, il fait la tronche pour de vrai de vrai, genre ça se voit quand même !
Ouais, ça se voit capitaine. Beaucoup.
Il est malheureux, ça se sent aussi !
On va peut-être pas poussé jusque l-
Mousse...
J'ai rien dit capitaine, il est malheureux, ça se sent.
Il faut faire quelque chose pour régler ça !
On est obligé ?
Non, pas du tout, mais ça va nous distraire jusqu'à arriver à Clock Work.
Vous passez toujours le temps comme ça ?
C'est à dire ?
En faisant... N'importe quoi ?
Les trois quart du temps disons.
Et le dernier quart ?
On dort et on mange.
 »

Un emploi du temps bien rempli, à l'évidence. D'autant plus maintenant que Fantine préparait son plan pour redonner le sourire à Kurn. Plan qu'elle montra méthodiquement au crocodog, à la parabole et au mousse pour tout bien leur expliquer. Pour l'aider, un tableau, des fils et des punaises avec des dessins grossiers de choses et d'autres.

Si bien qu'ils finirent tous trois sur le mousse à faire des patés de sable quand Kurn revint sur le pont pour prendre l'air. Et devant ce spectacle déroutant, autant pour le second que pour le borgne qui jouait les baby-sitters et les litières pour chien, tout en faisant quelques sculptures plutôt bien réussies, l'homme poisson ne sut trop quoi dire.

« EH T'AS VU GROOT, ON PEUT FAIRE DES CHATEAUX DE SABLES AVEC LE MOUSSE ! C'EST GRAVE BIEN ! TU VIENS ? »

Pas intéressé, qu'il marmonna avant de faire demi-tour et de retourner à sa cabine.
Pas intéressé.

« C'est apparemment pas si bien tes patés de sable. Tu es vraiment nul, mousse.
Désolé hein, je fais c'que j'peux capitaine.
Je sais bien, t'inquiète, je t'en veux pas trop. Tu peux refaire le château steuplait ?
 »

*

Quelques heures plus tard, ce fut au tour du plan B d'être mis en branle, alors que Fantine était venue frapper à la porte de la cabine pour tirer l'homme de ses pensées métaphysiques sans doute passionnantes, accompagnée du mousse qui ne la quittait plus d'une semelle, semblant comprendre que trop s'éloigner et ne plus la surveiller risquait d'apporter plus d'ennuis qu'autre chose.

« EH GROOT, ON VA JOUER A UN JEU QUI S'APPELLE TROUVE POURQUOI LE BORGNE EST MANCHOT !
Ah bon ?
LE MOUSSE VA NOUS DIRE SI ON EST CHAUD OU FROID ! TU COMMENCES ?
 »

Kurn referma la porte. Sans ajouter un seul mot. Et cette tentative ne fut qu'un échec supplémentaire.

*

« EH GROOT ! J'AI FAIT A MANGER ! »

La voix de Fantine perça dans tout le navire. La table était montée, les petites assiettes ébréchés étaient placées dans les grandes un peu cassées, tous les plats avaient été utilisé pour dresser la tablée. L'équipage était autour. Le crocodog, lapant déjà sa gamelle, la parabole, pensive, ne sachant pas ce qu'elle faisait là, et le mousse, plutôt content d'avoir un vrai repas. Kurn termina par arriver dans la pièce ou une bonne ambiance et une bonne odeur régnaient, contemplant le spectacle un temps avant de demander tout à fait sérieusement :

« Est ce que tu viens de préparer absolument tous nos vivres ?
Oui, comme ça, on a beaucoup de choix !

On les remettra au frigo après c'est pas grave ! »

Depuis quand il jouait les rabats-joie quand il s'agissait de bouffe, celui-là ?
Fantine ne se laissa pas démonter. Elle attrapa un saladier dans lequel il y avait de la laitue pas sous-marine mais ça y ressemblait quand même de loin alors dans le doute peut-être que ça allait marcher. Un grand sourire sur les lèvres, elle attendit devant l'air dépité de son ami qui fit simplement volte face pour partir en râlant.

« Non ? »

Pas de laitue. Il boudait. Et très très fort. C'était au-delà de ce qu'elle avait imaginé.

« Non mais là, je comprends pas, on a même de l'algue ou de la mousse, je sais pas là, mais ça pue comme il aime.
Sinon, on lui demande ce qui va pas et puis voilà ?
On devrait lui demander ce qui ne va pas et puis voilà, ouais !
C'est exactement ce que je viens de dire.
J'ai parfois de très bonnes idées, tu trouves pas ?

… Ahun. »

Fantine sauta de son siège et attrapa le borgne par le bras pour le forcer à en faire autant. L'homme n'eut même pas le temps de prendre le morceau de saucisson qu'il s'était découpé qu'il se fit traîner jusque devant la cabine du second :

« C'est toi qui demandes du coup !
Hein ?
Allez, fais pas ta chochotte !
Pourquoi vous le faites pas vous même capitaine ?
Bah parce que j'ai fait tout le reste déjà et que je suis fatiguée.
Il va vous gronder, c'est ça ?
Pas du tout...

Boh, ça doit pas être si terrible. »

Fantine haussa les épaules. A dire vrai, elle n'en savait rien. Elle n'avait jamais affronté un homme poisson qui faisait très fort la tête.
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Pourquoi est ce que j'obéis docilement aux caprices de la gamine ? Non mais c'est vrai ça, qu'est ce que j'en ai à cirer de pourquoi le mérou géant tire la tronche ? J'imagine qu'on se laisse facilement prendre au jeu. J'en ai marre de réfléchir à ce que je dois faire, aux conséquences éventuelles, à la voie que je dois suivre. Obtempérer aux ordres c'est bien plus simple. Surtout des ordres aussi crétins que ceux qu'on me donne.  J'en viens presque à m'amuser. De l'amusement, de la bouffe et du tabac voilà un salaire qui mérite bien qu'on se fasse appeler mousse. Il sera toujours te temps de leur fausser compagnie sur Clock Work puisque c'était apparemment la destination vers lequel se dirigeait le bateau parlant d'une façon qui suscitait bien plus mon intérêt que les états d'âme du goujon géant. Mais un ordre du capitaine est un ordre, et un mousse ça obéit aux ordres.

Du moins ça essaye. D'un geste hésitant je toque à la porte du second, réfléchissant à la façon la moins ridicule d'aborder le sujet et à ce qui pourrais bien tracasser un fier gaillard dans son genre. Pas de réponses … Le contraire m'aurait un peu étonné, un regard vers le capitaine pour comprendre que l'effort fourni est loin d'être suffisant pour qu'elle considère le travail comme accompli. Je laisse échapper un long soupir avant de laisser mon corps se changer en sable. Utiliser un logia pour faire l'assistante sociale, j'imagine que je vais vraiment finir par toucher le fond à ce rythme. Mon corps se reforme de l'autre côté de la porte, l’œil à moitié fermé de peur de tomber sur un spectacle que je n'étais pas sensé voir, du style homme poisson sans vêtement ou pire. Pas d'anatomie ichtyenne ou je ne sais quelle horreur de la nature, non juste un grand dadais qui regarde le plafond de sa cabine l'air pensif.

Je peux rentrer ?

Tentative d'humour maladroite, voir totalement ratée pour un observateur objectif. Mais bon là on est dans un domaine qui surpasse de loin mes (maigres) compétences. Et pendant que la question de savoir ce que je fous là tourne en boucle dans mon pauvre crâne, le poisson me gratifie d'une réponse fort synthétique.

Non.

Réponse qui laisse rarement place à la discussion en temps normal, on en conviendra. Et bien elle en laisse encore moins lorsque celui qui la prononce est un homme poisson gigantesque qui se redresse de tout son long. C'est dans ces moments là où on comprends aisément pourquoi on engage ce genre de type comme vigile plutôt que des types taillés comme le capitaine, mais je m’égare. Je cherche péniblement mes mots.

Bon écoutes Gr...

C'est Groot ou Kurn déjà ? Non parce que la question semble ne pas avoir été totalement tranchée, les gens sur ce navire semblant alternativement employer l'un puis l'autre. Ne prenons pas de risques.

Bon écoutes Grurn

Kurn …

C'est le capitaine qui m'envoie, veux savoir pourquoi tu lui tire la tronche.  

Sors de là Mousse.

J'ai jamais été rembarré de manière aussi sobre. La classe homme poisson sûrement. Il n'a pas l'air tellement enclin à la discussion, son énorme main pointe vers la porte m'indiquant bien aimablement la direction de la sortie.

Je comprends que t'ai pas envie d'en parler avec le petit personnel, par contre faudrait vraiment envisager de lui en parler à elle hein … C'est jamais facile d'avouer ce genre de truc, et je comprends que tu l'évite, surtout que sur un petit espace comme un navire ça peut devenir vite gênant. Et oui, il y a la différence de taille et puis évidemment il y a le fossé racial. Mais après tout tu sais les mœurs ont changés, bon certes morphologiquement ça posera toujours certains problèmes, mais c'est plus aussi mal vu qu'avant. Puis bon vous êtes des pirates alors les conventions sociales hein vous pouvez bien les piétiner.

Le regard emprunt à la fois d'un certain énervement et d'une totale incompréhension me fait rapidement abandonner la théorie de la romance cachée. C'est dommage c'était ma préférée.

Je t'ai dit de sortir Mousse.

Pas avant d'avoir une réponse à ma question.

L'énorme paluche de la rascasse fait exploser mon visage en une giclée de sable. Bon c'est que je commence à perdre patience moi. Puis ce petit jeu ne m'amuse plus spécialement. On va très vite abréger le processus. Et pour ça rien de plus simple. On supprime les intermédiaires. Suivant ma tête, le reste de mon corps se change tout entier en sable avant de réapparaître dans le dos du second. Je suis sûrement en train de faire une grosse connerie. Mais j'ai pas meilleure stratégie en tête.

Mon pied vient frapper l'homme poisson, après tout c'est lui qui a commencé. L'homme poisson entraîne dans son mouvement la porte de la cabine avant de tomber dans le couloir où attend toujours le capitaine. Sauf que figurez vous que la petite a la fâcheuse habitude d’écouter aux portes. Et là voilà sous l'énorme masse du poisson et de la porte. C'était peut être pas une si bonne idée que ça finalement … Oh puis après tout c'est pas mon problème.

Il avait pas spécialement envie de me répondre, du coup je me suis dit que finalement vous préféreriez lui poser directement la question capitaine.
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Kurn resta un peu plus longtemps que nécessaire affalé sur le battant désormais dégondé de la porte, regardant la coursive du navire et sentant vaguement Fantine s’agiter dessus en cherchant à donner de la voix. Puis il se décala et se redressa, regardant la petite fille écarter le bois puis lui donner quelques coups de pieds tandis qu’il disait ‘’Aïe ! Non, pas avec les pieds ! Ouille !’’.

« Bon alors, Groot Kurn Talitane fils de Vroum fils de Tartare, ça suffit, maintenant, de bouder !
- Je boude pas.
- Genre tu boudes pas ! Moi j’m’y connais en bouderies, et ça c’en est une grosse !
- Je veux juste pas parler. Je vais sur le pont. Amusez-vous bien. »

Derrière lui, le mousse haussa les épaules.
« On est d’accord qu’il boude, hein ?
- Oui, capitaine, il boude carrément ! »

En sortant, l’homme-poisson remarqua que le temps était au grand bleu, totalement à l’opposée de ce qu’il éprouvait. La mer avait la teinte turquoise des grands jours et le soleil chauffait agréablement ses écailles. Il s’ébroua et alla s’asseoir à la poupe, à côté de la roue qui commandant le gouvernail. L’eternal posé à côté continuait de pointer la bonne direction, que le navire suivait scrupuleusement. Au moins, le navire semblait mieux s’y connaître qu’eux en navigation, et les voiles se ferlaient ou se déployaient toutes seules si nécessaire.
« Tu sais quand on arrive, Gouvernail ?
- Aucune idée, patron. Si on arrive, on s’arrêtera au port ?
- Il y a des chances.
- Mince.
- Pourquoi ?
- J’aime bien naviguer. Alors que dans le port…
- Je vois. »

Bizarrement, c’est plus simple de parler aux éléments du bateau qu’aux autres. Ca n’a jamais été facile de parler à Fantine.

« Ca va pas, second ?
- Ah. Non, pas trop. »
La roue se tut quelques instants.
« Vous allez partir quand on accostera ?
- Je ne sais pas encore. »
Partir. Retrouver Maxwell, envers et contre tout l’honneur des T’Erlhitan. Repartir de la recherche effectuée il y avait déjà plusieurs mois… L’idée n’était pas sans présenter un certain attrait. Revenir à cette simplicité-là, peu importait le bannissement, le déshonneur…
« Il y a ce type, que je devais protéger. Une vieille dette familiale.
- Hmhm.
- Je l’ai retrouvé, puis j’ai commencé. Mais après quelques heures, nous avons été séparés par les événements.
- Ahun.
- Et c’est là que Fantine m’a sauvé la vie, tu vois ?
- Mmh.
- Puis tout s’est enchainé tellement vite, après. Il y avait la dette de sang envers Fantine, et…
- Je vois…
- Tu vois pas du tout, hein ?
- En fait, c’est un peu compliqué pour moi, patron. Je suis une roue de gouvernail, et pour être tout à fait franc, ça demande quasiment toute ma concentration de rester dans le cap de l’eternal pose.
- Ah. Désolé, alors.
- Mais je suis sûr que ça t’a fait du bien de parler.
- Peut-être, mais je ne suis pas plus avancé. »

Après un léger silence, la roue commença à chantonner un air sans queue ni tête. Kurn soupira et passa sa main sur la lame de Respora. Puis un murmure juste en-dessous de lui attira son attention.
« …tira pas !
- Mais on va pas le forcer à rester, si ?
- Si !
- Dites. Je vous entends, hein.
- Zut.
- Ca fait longtemps que vous êtes là ?
- Depuis le début, répondit le Mousse. Aïe !
- On vient d’arriver ! Assura Fantine.
- Ah. Faut que j’aille m’asseoir ailleurs ?
- Tu vas rester, hein ?
- …
- Ah, il a pas l’air d’avoir envie.
- Arrête, Mousse !
- J’essaie juste de rendre service, moi.
- Puis c’est qui ce type que tu devais protéger, d’abord ? Celui de Zaun ?
- Lui ? Non. C’était juste du travail, ça. C’était Maxwell Percebrume. Une histoire compliquée qui n’a plus d’importance, maintenant. Je crois.
- Tu vois, tu veux bien en parler !
- Maxwelle Percebrume ? Encore un illustre nul des blues, ça. »

Le poing de Kurn serra la poignée de Respora et envoya par réflexe un coup horizontal vers la tête du Mousse, en sachant pertinemment que cela passerait au travers, comme toutes les attaques précédentes. Il y a un mélange de défouloir et de frustration, en fait, à frapper le vide. Mais, forcément, la tête se désagréga en nuage de sable qui se reforma immédiatement avec un air blasé.
La cible suivante sur la trajectoire du Meitou se trouva être Fantine, qui sauta en arrière en activant son fruit du démon. Le gouvernail glapit brusquement « Pas le bateau ! » tandis que la lame mordait profondément le bois du pont.

« Oups, désolé, Bateau, fit Kurn en fermant fort les yeux. »

Puis ce qu’il tenait en main s’agita au bout de son bras, l’épée se détachant d’elle-même du bateau. Elle tendit ensuite une gueule béante bien trop garnie de dents suintant le poison vers les deux humains qui se trouvaient juste en face d’elle. Un autre soubresaut anima le bras de la rascasse.

Etrange.
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Bon, ok. Ne pas se faire décapiter par Kurn, c'était le premier objectif. Fantine posa le pied sur la lame avant de sauter sur son ami, dans le but de le déstabiliser et de le faire tomber. Il n'en fut rien, vu que Groot était bien trop stable sur ses appuis pour se laisser avoir bêtement. Mais au moins, elle n'était plus dans la zone dangereuse de cette épée très moche qu'elle n'appréciait pas vraiment, donc moins de risques de se faire découper en petits morceaux. Néanmoins, rester agripper à Kurn, c'était une autre histoire, maintenant que la rascasse tenter de se défaire d'elle :

« Mais faut que tu démontes le bateau pièce par pièce pour être enfin content ?!
Non mais j'ai pas fait exprès ! Tu vas me lâcher ouais !
Prend toi en au mousse, au moins ça laisse pas de marques !
Ça va pas devenir une habitude...
Mais tu veux pas juste me foutre la paix ?
Et tu veux pas juste arrêter de faire la tête !
Je fais pas la tête...
Non bah voyons, et là tu fais quoi ?!
C'est pas parce que tu montres ma tête que ça va donner plus de poids à-
Alors arrête, j'ai cessé d'écouter après « parce que ».
Ah ouais sympa.
Ils vont se battre comme ça longtemps ? Demanda le mousse en tirant une clope un peu tordue de ses affaires. »

En arrière plan, Fantine passait dans le dos de la rascasse pour ne plus le lâcher, pendue à son cou, manquant de l'étrangler à moitié. L'homme-poisson tentait vaguement de se défaire de cette sangsue en se secouant, sans que ça n'ait d'effets. Le mousse poussa un petit soupir, spectateur et presque admiratif du fait que le ridicule ne tuait pas.

« Oh bah ça peut prendre quelques heures oui.
Je parle à qui, là ?
A moi !
Moi ?
La roue.
Ah... Et l'autre roue, elle parle ? Demanda-t-il, curieux.
Oh, c'est pas la plus bavarde. Elle fait surtout son boulot.
Étonnant ça.
Tu sais, c'est pas parce que j'ai envie d'être tranquille que je fais forcément la tête.
Tu te fouuuus de moi là, non ?!
C'est pas mon genre.
C'est totalement ton genre ! Même dans le ventre du monstre t'étais pas si chiant !
Je suis pas chiant !
SI TU L'ES !
Étonnant, ils s'épuisent pas.
Comme je te disais.
Vous avez l'habitude j'imagine ?
Oh bah tu peux demander à n'importe quoi ici.
Mais tu veux quoooooi ? Un aquarium dans ta chambre c'est ça ?! Des spots lumineux aussi ?!
Hein, quoi ?!
Si c'est que ça, on en récupère un et on te l'installe et ça sera comme chez toi !
J'ai rien demandé !
Tu pourras barboter et arrêter de faire la tête !
C'est totalement raciste ce que tu dis...
Ah parce que tenter de m’éviscérer avec ton couteau de pêche géant, c'est pas raciste ?
Non, c'est mérité !
On arrive bientôt ? »

Kurn tenta vaguement de se cogner le dos à l'une des parois en bois pour se défaire de Fantine, mais cette dernière glissa avant au sol, comme si elle avait prévu le mouvement. L'homme poisson s'encastra à moitié dedans, et ça n'empêcha pas la gamine de s'agripper à son genou gauche en hurlant toujours de toutes ses forces pour lui vriller les oreilles de sa voix criarde.

« Encore quelques heures, annonça le gouvernail.
Ah chouette, quelques heures de soap maison, ça va être génial.
Du soap ?
Ouais, un truc dans lequel j'ai déjà tourné, parce que je suis-
Groot, tu vas sourire oui !
Mais lâche moi bordel !
Pas tant que tu souriras pas !
Tu vas descendre d'ici ?! Arrête de toucher mes pics, tu sais comment ça va se terminer !
Aaaaaah !
Voilà ! Voilà, qu'est-ce que je disais !
Groot, je vais vomir...
Ah non mais tu te débroui-
Bleurp !
J'en ai marre, tellement marre.
C'est mieux qu'un soap en fait.
Mais t'es une célébrité ou quoi ? Demanda le mât.
Moi ? Ah oui, un truc comme ça, j'ai fait quelques films mais pas du niveau de ça si vous voulez mon avis.
Sympa, on promène une star alors...
Haha, une star, c'est ça.
Enfin... la fin de ta carrière a du être tragique.
… Comment ça tragique ?
Bah tu te retrouves mousse de deux débiles quand même.
Ouais certes. Mais j'ai fait pire avant.
Ah putain, pas de bol.
Comme vous dites... »

Le mousse tira sur sa cigarette en contemplant ses deux patrons.
Ça n'était que pour quelques heures. Et à coup sûr, ça allait passer vite.
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Et c'est comme ça que j'ai trouvé le fruit du sable au beau milieu d'un tournage.

C'est vrai que c'est pas commun ça comme histoire.

Il m'arrive toujours des trucs complètement dingues, même si discuter avec des éléments d'un navire je crois qu'on peut dire que je suis passé au stade supérieur.

C'est pas plus con que de discuter avec un piaf.

C'est pas faux oui. Même si ça me paraît plus conventionnel de parler avec des animaux. Hein Vautour ?

Pas de « croaaaaaa », je me demande bien où a pu passer ce maudit piaf tiens. Il se montrera bien le moment venu, comprenez l'heure du repas. Pour l'instant il y a des spectacles bien plus intéressant sur ce navire.

Bon tu fais plus la tête maintenant ?

Mais puisque je te dis que je fais pas la tête.

Mais si tu fais la tête !

Mais pas du tout.

MAIS SI !

Pas du tout !

Tout en regardant amusé le spectacle j'écrase ma cigarette sur le sol de la cave avant de la balancer derrière moi  provoquant la colère du navire.

Oh je suis un navire pas un poubelle !

Désolé …

C'est que ça devient vraiment super perturbant de pouvoir se faire engueuler par le moindre élément du mobilier. Surtout que certains semblent m'apprécier beaucoup moins que d'autres. Me retournant vers la roue à aube, je poursuis notre conversation à voix basse.

J'ai l'impression que Bateau ne m'aime vraiment pas.

Oh tu sais, il est un peu misanthrope faut pas y prêter trop d'attention. Au final c'est un chic type qui fait bien son boulot.

MAIS SI !

Pas du tout !

Ça dure depuis combien de temps maintenant ?

Aucune idée, j'ai arrêté de compter au centième tour

Ce qui m'impressionne moi c'est l'énergie dont ils font preuve. Surtout le capitaine, c'est comme si elle avait toujours un truc sous la main à lui balancer, sans parler du moment où elle lui a mordu l'oreille, une vraie furie.

Oh Kurn est pas mauvais non plus, t'as vu comment il l'a éjecté de ses épaules la troisième fois. Tu sais c'est pas toujours marrant dans la cale, heureusement qu'ils viennent faire le spectacle de temps en temps.

J'imagine que la vie de roue à aube c'est pas tout les jours facile.

Hof, on est même pas sensé être vivant, se plaindre ça serait un peu poussé le bouchon trop loin.

Si être en vie ça empêchait les gens de se plaindre … Même si la supériorité des roues à aube sur l'espèce humaine ne m'étonnerait qu'à moitié. Surtout quand on voit certains spécimens.

Tu pourrais proposer à ton ami producteur de venir filmer ici. Je suis sur que ça aurait un certains succès. Les gens adorent regarder des idiots s'engueuler. Tu trouves deux, trois autres crétins, dont ce fameux Grey dont tu m'a parlé tout à l'heure et tu enferme tout ce beau monde sur le navire et tu laisse tourner les caméras 24 heure sur 24, je suis sur que ça aura un succès fou.

C'est que tu ferais un super producteur en fait.

Oh tu sais je fais déjà un métier que j'aime, j'ai pas spécialement envie d'en changer. Sans parler du fait que j'ai toute ma famille ici, l'autre roue est pas très bavarde mais on est taillé dans le même bois. Puis je suis pas sûr que le monde du show business soit prêt à s'ouvrir à une modeste roue à aube.

Quand je pense que la seule conversation sensée que j'ai eu sur ce navire c'est avec une roue. Tu me diras chez les Avalons c'était avec un chat, comme quoi il y a des constantes dans la vie. Bon je crois qu'il est temps d'intervenir quand même. On va pas tarder à arriver, faudrait pas que ça continue trop longtemps et au rythme où c'est parti on en a encore pour un jour ou deux. Et je connais qu'une méthode pour régler ce genre de problèmes : une bonne paire de claques.


Baf !

Baf !

C'est pas un peu fini vos conneries ? Capitaine faut pas harceler vos subordonnées comme ça, alors oui il fait la tronche et c'est pas ultra agréable, mais vous pourriez bien lui laisser un peu d'intimité  non ? Surtout qu'on va plus tarder à arriver, vous avez plus besoin de vous distraire. Quant à toi Kroot.

Kurn …

Peu importe. La fierté mal placé ça va bien cinq minutes. Un second ça doit la vérité à son capitaine surtout quant on lui doit la vie.

Donc maintenant vous vous expliquez bien gentiment, je vais faire une sieste sur le pont et quand on arrive à Clock Work je veux plus entendre parler de vos bêtises.


Dernière édition par Galowyr Dyrian le Dim 28 Fév 2016 - 23:12, édité 1 fois
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Fantine et Kurn se retournèrent en se tenant la joue. Puis ils s’exclamèrent, à un volume sonore au diapason des discussions précédentes :
« Hé ho, le Mousse, là ! Tu fais quoi ?! »
Le binôme se regarda en plissant les yeux, puis la capitaine tendit la main vers son comparse homme-poisson.
« Une trêve ?
- Vendu. »

Alors que le mousse s’allongeait confortablement sur le pont histoire de profiter du beau temps, deux furies lui sautèrent dessus et passèrent à travers le sable, s’écrasant sur le bois. Mais ils ne se laissèrent pas abattre et commencèrent à brasser les grains pour les écarter le plus possible, dans le but de trouver le Mousse caché quelque part par là.

Ce dernier se reforma quelques pas plus loin.
« Non mais écoutez, même vous devriez comprendre que… »
Il fut interrompu par le Crocodog qui lui bondit au visage pour lui arracher une bouchée de sable, qui revint se mettre en place.
« Je suis du sable, vous ne pouvez pas me toucher.
- Oui mais t’es le Mousse ! Tu dois nettoyer le pont !
- Et si j’ai pas envie ?
- Comment ça ‘’pas envie’’ ? T’es le mousse, tu nettoies le pont. C’est ton boulot, non ?
- Ah. Je suppose.
- En plus, t’es le meilleur mousse de Grand Line !
- Ah ?
- Donc tu nettoies le pont ! Tu te reposeras quand ce sera fini. »

Puis la jeune fille entraina la rascasse dans les profondeurs du navire, devant un tas d’objets hétéroclites qu’ils avaient récupérés comme ça, à Armada, ou à Navarone. Des trucs et des bidules achetés puis jetés dans la cale une fois qu’ils eurent fini de faire n’importe quoi avec.
« Je t’avais dit que le kit de bricolage Sable Fin nous serait super utile ! J’avais tout prévu, pasque j’suis une capitaine comme ça, moi ! »
Elle lui tendit un seau en plastique bleu et une pelle rouge, et s’arma d’un moule en forme de soleil et d’un râteau.
« Oui, avec ça, c’est sûr que…
- Il pourra pas lutter ! »

La lumière du soleil sur le pont les aveugla momentanément, puis ce fut un bruit très déroutant, un genre de ronronnement qui provenait de tout autour d’eux. Puis il y eut un petit gémissement suivi d’un soupir. Il leur fallut un moment pour comprendre que c’était le bateau qui se faisait refaire une beauté par le mousse, qui ponçait avec application le pont avec son fruit. Enfin, qui était allongé dans un coin en regardant le sable gratter toutes les saletés incrustées dans le bois.
« Tu peux faire moins de bruit ? Ca me met mal à l’aise, demanda le Mousse.
- Mais c’est trop agréable, et c’est la première fois qu’on me masse le…
- Oui, bon, hein. »

Fantine et Kurn jaillirent de son angle mort et le pelletèrent furieusement, le tassant aussi serré que possible dans le moule et le seau avant de les plaquer contre le pont pour l’empêcher d’en sortir. Sans succès, encore.
« Ca vous fatigue pas ?
- Psst Groot, je crois que ça marchera pas.
- Enfin je sais pas pourquoi je vous demande, vous avez quand même passé des heures à vous renvoyer la balle tout à l’heure.
- Moi non plus, Fantine. Il faudrait passer à autre chose. Une autre méthode.
- Enfin vous faites ce que vous voulez, moi, ça me fait rien…
- Tu veux dire… Pas physique ?
- Juste que bon, je trouve pas ça très sympa.
- Voilà. Psychologique.
- Puis d’ailleurs, vous murmurez quoi ? C’est pas très poli.
- Mais genre quoi ?
- Dites, vous m’écoutez ?
- Je ne sais pas, remplacer l’alcool par de l’eau, le tabac par du papier, ce genre de trucs.
- Oh et puis merde.
- Haaaa, des blagues.
- Je vous écoute même plus.
- On peut voir ça comme des blagues, oui.
- Lalalala.
- Cool, on fait ça jusqu’à Clock Work ! »

Les jours qui suivirent furent faits de vexations quotidiennes et subtiles. Les bouteilles d’alcool prenaient leurs jambes à leur cou, littéralement, quand elles voyaient le Mousse approcher. Le sable du logia servait de toilettes sèches. Le tabac disparaissait mystérieusement et les roues à aubes avaient l’air complètement défoncées.

Pas de doute, le trajet se passe bien.

Mais déjà Clock Work Island était en vue, et jamais le navire n’avait été aussi propre.
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