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Allod ? Oui ? C'est les Blattards à l'appareil

Puisque le log pose constituait leur seule perspective d'évolution en mer, c'est contraints et forcés que Croqdur et son capitaine durent se diriger vers les îles célestes d'Allods. Ni l'un ni l'autre n'avait la moindre idée de la manière dont on atteignait une île en plein ciel, mais repoussant toujours tout au lendemain, ils se mirent d'accord pour voir sur place.
Si ce n'est quelques tentatives d'assassinat entre le cafard et son nouveau matelot, la traversée fut paisible. Paisible jusqu'à ce qu'Elijah mette le feu au mât. Leur embarcation étant relativement étroite et le feu ayant tendance à se faire expansif lorsqu'il y avait du bois autour de lui, cet événement "potache" attira l'attention du capitaine.

- Tu m'expliques ?

L'homme-piranha aurait bien été incapable de mettre des mots sur sa tendance pyromane spontanée. Peut-être était-ce le manque de stupéfiants à bord, ou peut-être était-ce parce qu'il s'était mis à sniffer du sel pour compenser, mais d'un point de vue strictement rationnel - point de vue qu'il s'efforçait de ne jamais arborer - il n'aurait su dire comme ni pourquoi il avait mis le feu au mât.

- Je sais pas trop. J'crois que c'est par solidarité avec les femmes. J'suis pas sûr hein ! Mais ça doit être pour ça. Peut-être. Oh eh puis tu m'emmerdes avec toutes ces questions

Pour le Corsaire, il était inutile de paniquer. Plutôt vain qu'inutile en réalité. Compte tenu de la propagation des flammes, il n'y avait plus rien à faire. Sirotant à même une boîte de conserve qu'il avait perforée de son aiguillon de scorpion, il se régalait au mieux du contenu huileux qu'il ingurgitait.

- Par solidarité avec les femmes mmmh... Ça craint comme derniers mots tu trouves pas ?

Dit-il sa conserve à la main, farfouillant de l'autre à l'intérieur de sa parure de fourrure à la recherche d'un outillage adéquat pour apporter la rétribution méritée à cet homme-poisson qui causait sa perte. L'idée était de le tuer pour s'en servir comme flotteur de fortune une fois leur embarcation réduite en cendres. On faisait avec les moyens du bord, littéralement.
Encore à contempler le mât enflammé dont le crépitement devenait foncièrement alarmant, Elijah cherchait toujours à établir une origine à son geste mal placé.

- Ouais... Le mât.... symbole phallique.... phallus.... patriarcat.... ça se tient non ? Eh puis merde capitaine ! On est entouré d'eau, pas de quoi s'affoler.

Vérifiant scrupuleusement que son Flash-Gun soit chargé au maximum de ses capacités, Joe restait serein.

- Oh mais je ne m'affole pas, j'ai un plan B. B comme "Bye bye Croqdur."

Leur collaboration avait duré un temps. Six heures. Ce qui, pour la plupart des camarades du cafard était une espérance de vie inespérée lorsqu'on était confronté à un Corsaire aussi stupide que retors. L'arme était en joue, restait à appuyer sur la détente quand on les interrompit dans cet instant solennel.
Au loin, une chaloupe de sauvetage approchait. En proue, un marine. Par réflexe, Joe pointa son arme en direction de la mouette qu'il mirait au loin. Sa cible était de toute manière trop éloignée pour qu'il l'abatte correctement.

- Putain d'empêcheurs de tourner en rond, est-ce que je viens les secourir quand ils sont en train de couler moi ? Non ! De quoi je me mêle je te jure...

Bien qu'il fut à présent inutile de se servir de la carcasse encore chaude d'Elijah pour s'approcher de la prochaine île, il n'était toutefois pas exclu de le tuer. Après tout, on pouvait assassiner de manière désintéressée. En un sens, on pouvait dire que Joe savait être altruiste. En un sens très vicieux et biaisé, mais on pouvait le dire.
Hélas, le mât, bien que relativement léger compte tenu de la faible dimension de l'embarcation, suffit à l'assommer lorsqu'il s'écrasa sur son crâne. Avant de perdre ses connaissances, flamboyant - les flammes du mât y étant pour beaucoup - Greed s'était exclamé une dernière fois avec panache pour lâcher un tonitruant :

- Chiasse !

***

Ses paupières s'ouvrirent soudainement et il se redressa tout violemment. Dans un lit d'une infirmerie miteuse, à l'écoute des flots environnant et à la masure l'entourant, il lui semblait se trouvait dans un bateau. Pas de Croqdur à portée, pas d'armes sous la main non plus, pas même de pantalon, ce qui le gêna plus que de rigueur. On l'avait transporté et l'avait soigné après avoir été assommé. Ne se serait-il pas transformé sous sa forme Zoan hybride - plus résistante - qu'il aurait pu voir son périple s'arrêter aussi bêtement.
À sa gauche, assis sur une chaise, un matelot de la marine veillait au grain.

- Ah, vous êtes rév...

Pas le temps de finir sa phrase que le drap sous lequel avait été enveloppé le cafard le recouvra. Privé de sa vue, ce fut son sens du toucher qui fut alors méchamment sollicité. Tabassé par un corsaire, le jeune homme n'avait rien vu venir. Voilà ce qui arrivait quand on entrait dans la marine. Le pauvre mousse devait sûrement être un bizut car personne d'autre n'aurait voulu surveiller une ordure de Blattard telle que Joe.
Le tumulte attira d'autres mouettes qui firent irruption, constatant la verve avec laquelle le cafard martelait le crâne d'un marine qui s'était simplement contenté de surveiller son état de santé.

- Biutag ! On est du même côté je vous rappelle ! Cessez immédiatement !

Du même côté. Hagard, réfléchissant un instant - ce qui chez lui était déjà beaucoup - Joe réalisa qu'il s'était attaqué au bougre par réflexe. Il n'était pas encore habitué à son statut de corsaire.

- Oups.

Lâcha-t-il avec un sourire mesquin dont il était si coutumier. Nez cassé, lèvres ouvertes, ce fut au mousse de s'excuser de son comportement provocateur afin que la situation de ne s'envenime pas. Se levant, impétueux - toujours sans pantalon - Joe grinça des dents devant le troupeau de mouette qui l'avait rejoint.

- Où sont mes armes ?

Gênés, en l'absence de leur supérieur qui lui courait après le deuxième Blattard présent sur la station d'Envol, c'est en balbutiant que le plus téméraire osa lui répondre.

- C'est... c'est le piranha qui les a. Il a dit qu'il avait peur que vous vous blessiez avec.
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PI-RAH-RAH-RAH-RAH-RAH-NAH ! Tape le Cafard, nouveau jeu ! Encore plus fendard et palpitant que tape la taupe ! Pi-rah-rah-rah-nah ! Il est où ton pétard à lumière hein ?! On la ramène moins maint'nant ! Pi-pi-pi-rah-rah-naaaaah !

Il se tordait littéralement de rire, les larmes aux yeux, les bras entourant ses côtes, la gueule si grande ouverte qu'il en aurait pu avaler le corps inanimé du Corsaire d'un coup d'un seul. Oui il avait foutu le feu au mât sans même trop savoir pourquoi, sans doute une impulsion, peut-être s'était-il laissé influencer par la dite cause féministe dont lui parlait souvent le fantôme de sa sœur, lui susurrant à l'oreille d’innombrables arguments pour qu'il rejoigne la cause. Elle lui avait même assuré et rassurée, le fait qu'il soit un mâle avec de gros attributs physique qui en incombait ne posait pas de problèmes, partout sur les mers et les terres, des femmes luttaient pour la cause, portant le sexe masculin entre les jambes. Ce n'était pas une nouveauté et la société avait fini par l'accepter, pourquoi pas lui ? Et puis, argument imparable, foutre le feu à un navire d'autant plus celui de cette enflure de Biutag, ce serait la blague la plus poilante qu'il aurait fait depuis son départ de Citadelle !

Héhé, bieeeeeeeen ! Une bonne chose de faite ! La dame de Montefiore serait fière de moi ! Et maintenant.... Il prit une profonde inspiration, gonflant ses poumons d'air au maximum de leurs capacités. OOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOY ! AU S'COURS ! V'NEZ NOUS AIDER ! Y'A L'FEU AU BATEAU ! Et au Capitaine si vous vous dépêchez pas... Pi-rah-rah...

Agitant les bras au ciel, il sautillait sur place, mimant l'affolement sur son visage afin de presser la chaloupe de sauvetage. Lorsqu'ils les rejoignirent, il les aida à placer Joe sur l'embarcation avant de grimper à son tour, feintant le soulagement d'être finalement sauvé de la morsure des flammes. L'un des matelots tenta de savoir ce qu'il leur était arrivé.

Le Cap'taine Joe Biutag est devenu complèt'ment fou ! Un vrai barge ! Il se tenait la casquette, hurlant qu'ils étaient partout ! Qu'il fallait tout brûler où ils finiraient par nous enlever ! Alors moi j'étais genre ''Mais qui ça ô mon grand Cap'taine ?!'' et lui qui m'disait, la bave aux lèvres, l'regard fou, tremblant comme une feuille ''MAIS EUX ! EUX MON BRAVE CROQ'DUR ! Les... les... LES ESPRITS DE BATEAU ! LES ESPRITS VENGEURS DES MERS !'' Alors moi j'comprenais plus rien, j'étais la genre ''Les quoi ?!'' Mais il écoutait pas, il cognait sur le mât d'sa tête, avant qu'ce soit l'mât qui lui tombe sur la fiole et de l’assomme ! Heureusement que vous êtes arrivés à temps pour nous tirer de là ! Mais j'crois qu'il va avoir d'soins et d'un bon r'pos ! J'me charge de ses armes, il aime pas trop qu'on y touche, mais j'peur que dans son état, il se réveille et tente de se blesser avec, 'faudrait pas qu'on vous rejette la faute d'avoir laissé un Schichibukai se suicider, hein les gars !

C'est qu'il pouvait être foutrement convaincant quand il le voulait, le piranha. Pendant que Joe prendrait du repos, il irait fouiller l'île à la recherche d'un vendeur de drogues, histoire de refaire ses stocks avant l’ascension de l'île céleste. Sniffer des rails de sel marin, y'en avait plein les branchies à la longue.


***


Bon... comment qu'ça marche c'truc d'jà... ?

Assis au sommet d'une maison dont la structure avait été construite à partir d'un navire, une jambe pendante dans le vide, l'autre en appuis sur le bois, il tenait cet énorme bazooka dans les mains. Le Burn-Bazooka était sans doute l'une des armes la plus efficace dans l'arsenal du Cafard, mais surtout la plus tape à l'oeil pour Elijah. Clairement, elle donnait envie d'être manipulée, essayée. Surtout après que le Capitaine lui ait spécifiquement interdit d'y toucher, clamant l'arme comme étant sa propriété, le menaçant d'une mort certaine s'il désobéissait. Mais où était le détenteur d'un fruit du démon en ce moment même pour l'en empêcher ? Il épaula l'arme maladroitement, trop instable pour prendre une visée correcte, l'arme avait déjà été approvisionnée auparavant. Il ne restait plus qu'à charger et

BAOUM

Oups.

Franchement, ce que l'on pouvait être maladroit chez les Blattards. D'un œil admiratif, il observa le gros boulet de canon filer droit devant lui, pour venir s'écraser sur la coque d'un bateau-villa. La déflagration fut si grande qu'il manqua de basculer en arrière sous l'effet de surprise, le souffle de l'explosion frappant son visage illuminé par l'excitation.

Ooooooooooooooh ! TROP COOOOOOOOOOL ! UNE AUTRE ! UNE. AUTRE !

Tandis qu'un trou béant décoré désormais la coque, que les flammes se propageaient déjà sur le reste du bâtiment flottant et qu'une colonne de fumée s'élevait jusqu'aux nuages, il approvisionna une second boulet. Cette fois, il se concentra pour orienter son tir où il le souhaitait.




Mais j'ai enflammé le bois... J'AI ENFLAAAAAAMMEEEEEE LE BOOOOOOOOIS ! PI-RAH-RAH-RAH-RAH-RAH-NAH !

Il pressa la détente et le boulet parti dans une détonation sourde s'écraser directement à l'intérieur de l'édifice en bois, explosant à l'intérieur. Le résultat fut doublement plus jouissif, et le Croq'Dur, en transe, applaudissait le spectacle auquel il assistait. Le verre des vitres se brisa, un mélange de flammes, fumée et tronçons de bois fut expédiés dans toutes les directions vers l'extérieur. Un second incendie vint s'ajouter au premier, et la combinaison des deux offrirent un mauvais cocktail pour la survie du navire. Le pirate amphibien en aurait bien profité d'avantage, mais fut brusquement interrompu par l'arrivée des forces de l'ordre. Et ce par la plus inattendue des manières, puisqu'une folle furieuse armée d'un bâton géant venait de bondir jusqu'à sa position pour tenter de le transpercer de son arme. Pour seul réflexe instinctif, l'homme-poisson opposa le Burn-Bazooka en contre, et les deux métaux se heurtèrent.

AH ! C'vous ?! J'vous ai croisé tout à l'heure chez l'marines !
Sombre abruti, vous pensez faire quoi là ?! Votre statut de corsaire ne vous donne pas le droit de plonger la Station d'Envol sous le feu !
Ah bon ? Moi j'pensais qu'vous nous léchiez tous l'miches et qu'vous pouviez rien nous faire just'ment ! Pi-rah-rah-nah !
VOUS N'ETES PAS INTOUCHABLES VOUS AUTRES CORSAIRES ! Que tu sois avec l'un des septs Schichibukai n'y change rien !
Pourtant il m'


Il ramassa les phalanges de l'officier supérieur, la Lieutenant Colonel Anna Montanno, pleine face, et fut désarmé du bazooka d'un mouvement habile de lance de son utilisateur. L'arme à feu dégringola jusqu'en bas, avant de se perdre au milieu des caisses de cordages et du matériel de charpente.

Le Cap'taine va pas aimer ça...

Il tenta de se soustraire aux griffes de son assaillante, mais elle le faucha du dos de son arme au niveau des pieds et ce fut à son tour de chuter pour venir s'écraser casque le premier sur le ponton en contrebas. Là, une dizaine de marines tous de la race des anges l'accueillirent très chaleureusement en braquant leurs armes à feu dans sa direction.

Terminé de tes conneries, la poiscaille. On te ramène à ton maître.
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Le maître cracha à même le sol. Sa convalescence n'étant déjà plus que de l'histoire ancienne ; il était maintenant sorti pour arpenter les planches de la station d'Envol. Station qu'il avait d'ores et déjà rebaptisée "l'Armada du pauvre" du fait de sa structure. Du fait de la structure ainsi que de l'intelligence somme toute relative des locaux qu'il lui avait été donné de rencontrer jusqu'à présent.
Tout allié qu'il était du Gouvernement Mondial, le cafard n'était pas dupe ; des ordres avaient été donnés le concernant. Si la confrérie de la mouette s'employait à ne pas trop le coller - un homicide étant si vite arrivé - il était sans cesse épié et entouré d'une pléthore de matelots se croyant discrets.

- La confiance règne...

Lorsqu'un spécimen de l'acabit de Greed venait fureter son nez sur une île contrôlée par le Gouvernement Mondial, le branle-bas de combat était de mise. Plus il serait surveillé de près, moins il ferait de conneries. Plus loin, quelques marines l'ayant devancé s'employaient à faire évacuer tous les établissement que le Blattard en chef se voyait susceptible de fréquenter. Le tour du propriétaire pour Joe n'était rien d'autre qu'une visite de ce qui ressemblait à certains égards à un vaisseau fantôme.
Sans ses armes il se sentait nu, sans victimes potentielles il se sentait seul. Son calvaire prit fin rapidement alors qu'une lance fin s'écraser à deux centimètres de sa joue alors qu'il était innocemment - une fois n'est pas coutume - adossé contre l'un des bâtiments de la station. Attaché autour du javelot, Elijah. Ses lèvres avaient triplé de volume et ses yeux étaient si enflés qu'on ne pouvait plus apercevoir ses prunelles.

- Capitaine ! F'est vous ?

Aussi il lui manquait quelques dents.

- Fa m'fait plaivir de vous r'voir !

Cela lui faisait d'autant plus plaisir que ses chances de survies s'étaient considérablement amoindries depuis qu'il s'était adonné à une séance de tir au pigeon avec du calibre 120 millimètre. Derrière lui, une furie tout de vert vêtue s'approcha la rage au ventre, une rage débordant jusqu'à sa gueule déformée par la colère. Brillant détective lorsqu'il ne s'improvisait pas génocidaire à temps partiel, Joe, sans aucune explication avait plus ou moins saisi de quoi il en retournait.

- C'est à vous ça ?!

Le garçon manqué - lieutenant-colonel de son état - pointa du doigt le piranha qu'elle avait saucissonné autour de sa lance. Ne manquait qu'un petit feu de camp et on aurait pu le faire rôtir à la broche. Joe n'aurait été que trop réceptif à cette idée.

- Maintenant que vous le dites.... ouais... ouais ! Un peu que c'est à moi.

Une larme perla le long des ecchymoses disgracieuses qui constituaient à présent les yeux de son homme d'équipage. L'émotion d'être ainsi reconnu par son capitaine l'avait touché au plus profond de son être. À moins que ce ne fut la douleur de sentir ses os brisés. Toujours est-il qu'Elijah versa tout de même une larme.

- C'est mes provisions de survie en cas de disette à bord. Faut bien que ces sous-races de harengs sur pattes servent à quelque chose hin-hin.

La bougresse n'avait pas le "hin-hin" facile. Furieuse toujours, elle rappela au Corsaire quelle était sa responsabilité dans les "incidents" qui étaient survenu par la faute de son matelot attardé. Peu gradée qu'elle était, elle se permettait néanmoins de prendre un air autoritaire, allant même jusqu'à causer de révoquer la licence de corsaire de son interlocuteur.
Imperturbable - surtout parce qu'il se foutait ouvertement des jérémiades d'une bonne femme - roulant des yeux entre deux accusations, le cafard ne put réprimer toutefois un sourcil se haussant subitement lorsqu'elle menaça son statut de corsaire. Elle jactait, elle jactait, et il était temps qu'elle se taise. Sans la regarder, mains croisées derrière la tête, prenant appui contre le bâtiment derrière lui, le Blattard en chef regardait l'horizon de la station d'un air posé et contemplatif, puis il la coupa dans ses remontrances.

- Vous aimez bien cette île ?

Éberluée, comprenant qu'il n'avait pas écouté un traître mot de ce qu'elle venait de lui dire, c'est le visage toujours autant déformé par la rage qu'elle surenchérit.

- Ce n'est pas une île, c'est une station. Et qu'est-ce que ça peut vous faire que j'aime bien être ici ou non ?!

Contemplatif toujours, Joe, tout vicieux qu'il était savait arborer un visage relativement pur et froid lorsqu'il ne cédait pas à la frénésie du berry ou de l'hystérie mortifère dont il était si coutumier.

- On est affecté à une garnison. On finit par apprendre par connaître les habitants. "Tiens, c'est le petit Billy, il va faire des courses avec sa mère" qu'on se dit tout naturellement. La routine s'installe, et on comprend qu'on tient aux habitants. Qu'on ferait tout pour qu'ils ne soient jamais confrontés au moindre drame.

Soudain plus silencieuse, la jeune officière de marine craignait de comprendre les sous-entendus. Se plaisant à exposer sa sournoiserie, le ton de Joe se fit de plus en plus nasillard, pernicieux, son sourire s'étendit un peu plus à chaque seconde où il poursuivait sa narration des chroniques futures de la station d'Envol.

- Eh puis là un beau jour... faute grave. On contrarie qui il ne faut pas.  Et là, le petit Billy, il se retrouve nez à nez avec du boucanier premier choix. Pas du genre chapeau de paille hein ! Du vrai boucanier, le genre qui pue la poudre et l'hémoglobine.
Et toute ça à cause d'une faute tout bête, juste pour avoir menacé qui il fallait pas, le petit Billy se retrouve avec un collier explosif autour du cou tandis que sa mère est affectée à un bordel quelconque où des sales races de l'engeance de Croqdur...


- F'est moi Croqdur !

- ... la besogneront jusqu'à ce qu'elle crève de la syphilis ou d'une autre joyeuseté de ce genre.

Son sourire s'était alors étendu d'une oreille à l'autre. De ce visage pur et posé, il ne restait rien, juste le vice étalé sur sa gueule de cafard. Anna venait de comprendre pourquoi on avait fait du cafard un Corsaire : il valait mieux l'avoir à ses côtés que dans le dos. Joe tourna la tête pour trouver le regard de la jeune fille qui venait de perdre ses ardeurs en un temps record.

- Vous disiez concernant mon contrat de Corsaire ?

Yeux baissés, les dents serrées autant que ses poings, la furie grommela entre ses dents.

- L... laissez.

Rien n'était plus frustrant que de se sentir impuissant face à plus vil que soi. Mais il en allait de la sécurité de la station et de ses habitants. Menacer Greed n'avait pas été la décision la plus censée qu'elle ait prise de sa carrière. On ne l'y reprendrait plus.
En dépit des dégâts occasionnés par l'hydrocéphale sous les ordres du cafard, elle découpa la corde qui maintenait ce dernier à sa lance plantée dans le bois et repartit avec son arme, tournant - imprudente - le dos au cafard.

- Sergent.

Soufflant des naseaux elle se retourna visiblement contrariée et agacée.

- C'est lieutenant-colonel.

- Ouais si tu veux. Dites à vos hommes d'aller me ramener mes armes. En attendant, accompagnez-nous pour boire un godet. C'est le poiscaille qui régale.

Elijah commençait à se palper les poches ainsi que les côtes. Largement plus vif que son capitaine en temps normal - race amphibienne oblige - il ne l'avait pas vu lui subtiliser sa bourse. Assis à même le sol après avoir été détaché et s'être écrasé, il tendit le bras pour tenter de s'emparer de son argent dont dépendait sa consommation de stupéfiants tandis que son capitaine lui écrasait la gueule de la semelle de sa botte pour le repousser.

- Ne me dites pas non. Ça me contrarierait....
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En attendant, cela le contrariait lui, Elijah Croq'Dur, l'homme-poisson piranha que tout le monde ici semblait pouvoir écraser de son panard sans qu'il ne finisse avec la marque de ses crocs implantée dans la chair. Le respect se mourrait chez les grosses pointures de ce monde, la grosse tête devait être bien lourde pour ces deux protagonistes respectivement Schichibukai et Lieutenant-Colonel. Lui n'était qu'un simple pirate, devenu corsaire malgré lui et tabassé ou humilié régulièrement par l'autre saloperie qu'il se disait être son Capitaine. Cette sale raclure n'avait aucune considération pour lui, sans cesse essayait-il de le tuer, avant de l'épargner, se souvenant qu'il avait besoin de lui pour lui servir de rations en cas de coups durs ou de bouclier amphibien. Si d'ordinaire sa folie l'empêchait de s'attarder sur ce genre de choses, cette fois cette même maladie mentale dont il souffrait venait d’enclencher la sonnette d'alarme signalant que c'en était assez.

Va chier l'insecte, pas touche à mon pognon.

Qu'il lâcha difficilement, sa trombine bleutée piétinée de la plus humiliante des manières, alors qu'il embrassait encore le sol de toute son corps. Quelque chose montait en lui, il pouvait le sentir. Si au départ il s'agissait d'agacement, vexé qu'il était d'être si mal traité par son compagnon d'aventure, le comportement du Biutag le mettait en colère. Ou alors était-ce ses troubles de l'humeur qui faisaient des leurs et s'amusait à jouer avec ses émotions, pressant cette fois le bouton rouge de la fureur et amorçant la révolte du natif de Citadelle. Il l'avait mauvaise, en avait plein le cul de ces conneries et était décidé à ne plus se laisser faire. Et tandis que la botte du Cafard cessa de l'écraser, c'est sans un bruit qu'il se redressa, dépoussiérant ses fringues, calme en apparence. Une qui bouillonnait de l'intérieur, Anna Montanno devait ravaler sa fierté et garder la bouche close face à l'arrogance et la sournoiserie du Capitaine Corsaire.

Dire qu'il en profitait serait un doux euphémisme, il prenait un plaisir jouissif à malmener psychologiquement la pauvre sotte qui avait eu le culot de s'élever contre lui.

Prenez les devants, vous connaissez les lieux, vous saurez nous dénicher le rade idéal.
Soit.
Le hareng tu suis, ça t'évitera d'aller te faire castagner la face par une autre pimbêche mal baisée.
J'viens surtout pour éviter que mon pognon soit dilapidé pour autre chose que ma consommation.
Tu dis l'anguille ?
Rien.


Il serra les poings, et grinça des dents, réprimant une soudaine pulsion meurtrière qui vint secouer l'intégralité de son corps. Le palpitant s'accéléra et ses membres frémirent, il s'apprêtait à y céder lorsque la femme au bâton bien plus grand qu'elle s'éloigna sans dire un mot. Elle aussi avait beaucoup de mal à contenir sa hargne. Le primé à trois cent millions de berrys s'avançait dans les rues de la Station d'Envol au milieu de deux bombes à retardement prêtes à exploser à tout moment, s'en était-il seulement rendu compte ? Quoi qu'il en soit ils se retrouvèrent tous trois assis à une table ronde, à l'étage inférieur d'un long navire à deux étages, sans doute utilisé autre fois pour les croisières. L'endroit était calme, fréquenté mais pas trop. Nul présence d'un tas d'ivrognes enfilant les litrons de gnôle comme on enquille de l'eau plate. Un petit groupe de musiciens animait les lieux, des escargots servant à retransmettre le son amplifiant le son aux quatre coins de la salle.

Ode à la gloire de Mallory Gentry, vraiment ? Ce que c'est ringard...
Je vous interdit d'insulter notre illustre Commandeur, tout Corsaire que vous soyez !
Allons, allons, Sergent... je ne faisais qu'émettre un avis. Vous n'allez tout de même pas me retirer mon statut de Corsaire pour si peu, hein ?
Comme si j'en avais le choix.
J'en suis rassuré ! Yahinhinhin... Et ce godet, il vient quand ?
Il arrive.
Pas avec mon pognon.
La ferme l'anguille, tu régales j'ai dit.
Dans tes rêves, la blatte, je paie queuchi !
Tu la boucles et tu racles, c'était pas une option sale hareng grillé !


Il lui décolla un coup de pied vicieux dans l'un des pieds de sa chaise, ce qui fit basculer Elijah sur le côté dont le menton claqua sur le rebord de la table avant de s'écrouler sur les planches. Au même moment, le serveur déboulait.

Trois grosses choppes de ce que t'as de plus fort, je veux sentir mon gosier fondre à la descente du tord-boyau.
PAS AVEC L'THUNES D'MA DROGUE !


Furieux, l'ancien dealer s'était relevé d'un bond, avant d'envoyer valdinguer d'une main la table autour de laquelle ils se trouvaient. Celle-ci alla s'écraser une dizaine de mètres plus loin, sans qu'aucun n'y prête attention, toute l'attention étant centralisée sur l'homme-poisson. L'irritation venait d'atteindre son paroxysme lorsqu'il avait observé cette pourriture de blanc-bec plongé sa sale patte dans sa bourse pour en extirper quelques billets. Ses berrys, ses flouses, ses drogues, pas touche. La peur de voir sa cagnotte personnelle disparaître alors qu'il était à courts de stupéfiants couplée à ses troubles de l'humeur l'avait rendu furibond, incapable de se contrôler. Il transpirait, tremblait de colère, dévoilant ses crocs acérés à quelques centimètres de son Capitaine, prêt à lui déchirer la jugulaire s'il ne lâchait pas ce qui lui appartenait. Sous ses lunettes, ses yeux ingurgités de sang fusillaient son vis-à-vis, la veine sur son front gonflée semblait prête à éclater, à l'image de son propriétaire hybride.

Un conseil Joe, m'cherche pas là-d'ssus.
Eh bien, il en fait du bruit votre clébard Biutag, je le pensais plus domestiqué !
Lâcha une Anna Montanno visiblement très amusée de la soudaine tournure des événements.
N'êtes-vous donc pas capable de le tenir en laisse ?
TOI FERME TON CLAQUE-MERDE LA GRELUCHE !
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On était soudain moins menaçant lorsqu'on était moins armé. D'abord pétri de trouille puis, honteux d'être ainsi maintenu en respect par une vermine qu'il considérait comme une sous-race, à défaut des armes, l'aiguillon de scorpion avait subitement cheminé de dessous le manteau du Blattard en chef. L'appendice, long et sinueux s'était glissé derrière l'assaillant du corsaire pour mieux pointer le dard contre sa nuque.

Lamentable, plaqué au sol, gesticulant comme le cafard qu'il était, Joe brillait dans toute sa splendeur de par sa veulerie sous l'épaisse carcasse de ce matelot qu'il comptait congédier sous peu. Chez lui, les indemnités de licenciement se payaient en hémoglobine et il les versait le sourire aux lèvres.

- Vas-y chiure de mérou, juste pour voir... JUSTE POUR VOIR !

Un drogué irrationnel d'un côté, un hystérique vicieux de l'autre : le drame était imminent. Ce n'était pas la lieutenant-colonel qui interviendrait pour tempérer l'un ou l'autre. Cette dernière observait d'ailleurs avec une bienveillance malsaine cette querelle qui virerait sous peu au tragique. Tout semblait indiquer qu'ils s'entre-tueraient. Les laisser faire, c'était sauver à l'avenir des milliers de vies innocentes et elle le savait pertinemment.

Coutumier des manœuvres vicelardes, toujours à se demander "qui bono" avant de nuire, Joe préférait sa survie à un suicide collectif avec son unique membre d'équipage. Il avait bien compris à quel point leur conflit arrangeait d'Anna qui trempait ses lèvres dans sa bière faisant celle que ça ne regardait pas. Greed devait trouver une solution et vite. Un plan brillant afin de détourner l'attention du piranha et reprendre le dessus. Cet exercice allait nécessiter du tact et de la minutie, mais même en temps de crise, le cafard pouvait faire des miracles.

- Oh ! Derrière-toi ! Un éléphant rose !

Après tout, il n'en fallait généralement pas plus pour distraire un drogué en manque. Elijah eut à peine eut le temps de se retourner, éructant que l'animal fictif lui devait de l'argent, qu'il fut repoussé par son Blattard de capitaine. L'incident grave avait été évité. Pour dissiper d'éventuels malentendus, le corsaire prit - à contrecœur - sur ses deniers propres afin de payer les consommations de l'équipage. Ce serait à la mouette de payer ses propres liqueurs, il n'allait pas non plus financer ceux-là même dont le métier était de le tenir par les couilles. Ce qu'il avait déboursé présentement, il l'ôterait sur la part du butin d'Elijah. Avec les intérêts. Et les annuités. Et la prise en charge de l'inflation. Et tout ce qui lui passerait par la tête pour l'enfler sur les berrys.

Le service postal venait d'arriver. Pus tôt, on avait dépêché des mouettes pour lui rendre ses armes et ceux-ci avaient fait irruption dans la taverne pour les lui remettre. Plus vite ils obéiraient aux injonctions du corsaire, plus vite ils pourraient l'espérer sur les flots, les abandonnant enfin à leur quiétude passée, mise à mal depuis la présence blattarde.
Correctement équipé, Joe n'avait plus aucune raison de fréquenter l'engeance gouvernementale qui s'obstinait à garder un œil sur lui.

- Ce... ce n'est pas tout ce qu'on a trouvé.

Joe aimait les extras et celui-ci avait de quoi laisser rêveur. Une énorme caisse de près de deux mètres de haut lui fut transmise. De ce qu'on lui rapportait, elle avait été trouvée flottant en mer. Maladroitement, à la craie, il avait été écrit au sommet du colis "poure lé blattard" et fut transmis en conséquence au capitaine concerné. Intrigué et lassé de son ami l'éléphant rose, Corqdur vint retrouver le petit comité excité comme une puce. Une puce gavée de stupéfiants.

- Hé ! Hé ! Je peux l'ouvrir ? Hein ?! Hein ?!

Bien que le cafard l'aurait volontiers envoyé chier, l'idée que le cadeau soit en réalité une bombe adressée à sa mouille, ou tout autre genre de piège susceptible de le blesser le rendit prudent quant à la perspective du déballage. En ce sens, Croqdur était un matelot de choix. Si bombe il y avait, elle lui exploserait à la gueule en priorité. Joe prit de l'élan et se cacha derrière le comptoir de la gargote qu'ils venaient de quitter.

- C'EST BON ! TU PEUX OUVRIR !

Sans se demander pourquoi son capitaine - imité des marines environnants - avait agi ainsi, Elijah ne chercha pas midi à quatorze heure et s'apprêtait à dévoiler le "trésor" qui sommeillait dans l'épaisse caisse.

- Je sais pas si j'hallucine - enfin si, je sais que j'hallucine - mais j'ai l'impression que ce qu'il y a dedans vient de bouger. UN PETIT CHAT ! JE SUIS SÛR QUE C'EST UN PETIT CHAT !
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Une bombe hein ?

Teh. Euphémisme.

On retire le couvercle, je bondis aussi sec. Tellement que j’aurais pu le péter avant même que le zig foute les mains dessus, mais le Kiril a dit que le panache c’est important.

- PUTAIN DE MERDE ! JOE ! FILS DE RADASSE ! OU QU’TU T’PLANQUES SALE RACLURE ?! SORS D’TON TR...

Hein ? Un homme-tanche ? Encore un excentrique de la pire des sous-races.

- T’es qui toi ?

Il commence à ouvrir son gouffre à merde, l’air ahuri -ou absent- mais au final, est-ce que j’en ai quelque chose à branler ?

- Ta gueule. Rhétorique, tout ça. JOE !

Je commence à tout retourner, je suis sûr qu’il est fourré quelque part par là et ça me rend encore plus dingue !

- Putain, Joe, j’vais t’démembrer, j’vais te dépecer, j’vais t’bouffer ! ET J’SAIS MÊME PAS DANS QUEL ORDRE !

Et en parlant d’ordre ...

- Qu’est c’que tu fous là toi ?

Il essaie encore d’ouvrir son claque-merde.

- MAIS TA GUEULE J’T’AI DIS ! JOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOE !

J’en aurais vrillé mes cordes vocales. Je m’en étouffe même. Alors après avoir craché mes poumons, je reprends de plus bel.

- Qu’tu m’envoies casser du gris, ça passe. J’aime ça, et tu le sais. J’pourrais te r’mercier MAIS BORDEL DE MERDE, C'ÉTAIT PAS UN CADEAU CA ! TU VOULAIS MA MORT ET T’AVAIS PAS ASSEZ DE COUILLES POUR LE FAIRE TOI-MÊME PENDANT QUE MÔSSIEUR SE DORAIT LA PILULE EN S’TOURNANT LES POUCES J’PARIE !

Je souffle un coup.

- Joe, t’as intérêt de t’montrer ! Tu sais à quel point ça me fout la rage de pas pouvoir m’défouler ! T’ES OU ?!
- Bah ...
- QUOI ? QU’EST-CE QUE TU M’VEUX FACE DE RAIE ?
- Si j’te l’dis, tu vas encore m’envoyer chier.
- Hrhrhr, erreur mon poto, c’est si t’ouvre pas ta gueule qu’j’vais t’souffler dans les branchies.
- C’que t’es contradictoire ... Forcément qu'si tu lui gueules après il va s'planquer ! Là. Il est là.
- VA CREVER SALE MORUE !


De son doigt palmé dégueulasse, il me désigne le comptoir du boui-boui.

- Hin. Hin hin. Comment j’ai pu ne pas m’douter ?

J’avance, lentement, comme un prédateur prêt à fondre sur sa putain de proie. Je savoure cet instant. Et le suiv...


- Dis pas merci surtout ...

Illico, je me retourne sèchement.

- TA. GUEULE. Ou toi aussi j’t’évicère avec les dents.

Il lève les mains en l’air, sans vraiment capter ce qui se passe je crois.

- Relax mec !

Je le snobe et je reprends ma lente marche aussi délicieuse que (et car) carnassière vers le Cafard que je vais me faire un malin plaisir d’écrabouiller !

- SORS DE LA SAC A M...

Ah ? Ah bah à mon tour de lever les mains au ciel ... Le Joe me pointe son arme de faible sur la gueule ...

- Si tu finis ta phrase le balai à chiottes, je te troue le cuir. Si tu me touches, je te troue le cuir et je me fais un collier avec tes os. Hmm ... Quoi que nan. Tu vaux rien. J’te donnerai à bouffer aux requins ... s’ils veulent de toi ... Et crois-moi, ils sont pas difficile sur la bidoche. Hein le Mérou ?
- Va t’faire.
- Okay, okay ! Calme-toi Biutag, je te sens tout tendu !
- Hin hin hin.


Je baisse les bras, je crois qu’on s’est compris.

- Et l’Géronte ?
- Quoi, “et le Géronte” ?
- Tu veux vraiment le remplacer par “ça” ?
que je demande au Joe en montrant le fantasque d’un signe de tête.
- Bah ouais. Je me trimballe déjà un coq, je vois pas où est le problème.
- Pi-rah-rah-rah-nah ! PI-RAH-RAH-RAH-RAH-NAH !


Je grince des dents et je serre les pognes. Lui il pose le doigt sur le chien de son arme.

- Ca te pose un problème ?
- Aucun tant qu’il s’approche pas de moi à moins d’dix pieds sans quoi j’réponds plus de rien.


Clic.

- T’es sûr ?
- Rhoo, Joe ! Oh ! T’as perdu le sens de l’humour ou quoi ? J’déconnais !
- Hin hin. Bien. Alors maintenant, on va se diriger calmement vers l’île flottante. Dans la joie, et la bonne humeur !

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Le Cafard, le Coq et le Piranha, aventures épiques d'un improbable trio de forbans à la gouaille aussi grande que leurs ambitions ! Pognon, castagne et défonce. Injures, coups bas et menaces à foison. Embarquez au sein de l'équipage le plus détesté de toute la Grand Line, où l'ambiance y est si explosive qu'on oserait pas y allumer son briquet ! Ou à chaque instant, vous
La ferme, Elijah.
...risquez de vous faire castagner la fiole pour un pet de travers, un éternuement trop bruyant, un berry volé ! Ou simplement parce que
Oy l'homme-tanche, met la en sourdine on t'as dit !
...vous avez eu le malheur de naître d'une race différente de la leur, eux les deux raclures de racistes, les
Mais tu vas la fermer sale chiure de hareng fumé à la fin ?!
…cruels et impitoyables monstres sanguinaires, affamés de richesse et assoiffés de sang, tuant, menaçant, escroquant, maltraitant les plus faibles, les démunis et ne faisant qu'une bouchée des
Bordel, c'qu'il est chiant... l'géronte lui aurait déjà dézingué le portrait d'ce que j'dis, ça aurait pas traîné !
… pauvres et sans défense
Foutu mérou, si tu t'arrêtes pas de jacter et rapido, le Coq ici présent qui nous a fait la désagréable surprise de ramener ses miches ici, va te montrer pourquoi il était connu autrefois connu comme l'un des membres de l'équipage des Saigneurs des Mers.
…petits poissons comme le chétif Elijah Croq'Dur
RAH ! J'VAIS LUI TAMPONNER LA BOBINE A LA POISSONNAILLE, J'VAIS EN FAIRE D'LA FRITURE !
...qui n'a jaaAAAaAaAAAaaaaAAAAaaaaAAAAAAH !


L'histoire voulue que ce pauvre Elijah n'eut jamais l'occasion de terminer sa phrase, brusquement agrippé par un Mahach furibard, puis sauvagement tabassé pour être réduit au silence. Il avait trouvé en la personne du punk un véritable cogneur, bien plus redoutable que le Capitaine, qui lui se basait sur des menaces s'appuyant sur ses innombrables armes ou son terrible dard empoisonné de sa fichue queue de scorpion. Le visage tuméfié, ensanglanté, l'homme-poisson se remettait de ce passage à tabac, maugréant qu'il aurait préféré que de ce colis géant qu'il avait ouvert au bar, ce soit un petit chat qui en soit sorti. Croq'Dur était le genre à adorer les petits chats, ces petites boules de poils avec lesquelles il aimait beaucoup s'amuser. Notamment à un petit jeu intitulé ''C'est toi le chat'' dont il n'avait de cesse de jouer quand il errait dans les rues de Citadelle étant gamin.

Dites les coupaings, vous connaissez le jeu C'est toi le Chat ? T’attrapes un chat, tu lui tords les pattes, lui arrache les moustaches, te les colle sur le nez, mange ses entrailles et... C'EST TOI LE CHAT ! Pi-rah-rah-nah !
Très intéressant, tu veux pas essayer la version piranha ?
Tu chopes un homme-tanche, lui casse la trogne...
Lui tord le cou, lui arrache les dents...
… t'en fais un dentier et...
…C'EST TOI LE PIRANHA ! YAH-HIN-HRHR !


Il était dans sa phase de délires, celle qui surgissait systématiquement après un moment passé sans consommer quoique ce soit qui puisse s'apparenter à des substances illicites, quelque chose, n'importe quoi, qui soit en mesure de le faire planer. Ainsi fonctionnait le piranha dont le principal carburant était la drogue. A la fois déclencheur de ses problèmes psychologiques, et désormais seule solution viable pour y palier, même si l'aurait souhaité, il n'aurait pu s'en passer. Aussi étrange que cela puisse paraître, le gamin de la forteresse avait besoin d'être shooté pour ne plus être sujet à ses défiances mentales, pour ne plus subir de violentes hallucinations, ou que son humeur ne se joue pas à la roulette. En se mettant en l'air, il s'épargnait ainsi d'être livré en pâture à sa maladie. Or, depuis qu'ils avaient quitté Citadelle, il n'avait rien eu à se mettre sous la dent...

Ooooooooh ! La belle pooooooooooomme !
Oy Biutag, tu l'as déniché où c'lui-là d'jà ? C'est quoi son problème sérieux ?
C'est une usine d'acide dont la production a été arrêtée malgré elle, il est là son problème. Sale chiure de sous-race, concentre-toi ! On bouge, direction l'île flottante !
C'qu'elle est roooooooooooooonde ! Et veeeeeeeerte !
Il a l'air complètement azimuté...
J'ai dit. Concentre. Toi. Saloperie !


Visiblement, marteler le crâne, ou plutôt s'acharner sur le casque sous lequel se cachait le crâne du désaxé se révélait être la méthode payante pour y faire rentrer l'information.

CONCENTRE ! POMME ! VERTE ! EUH NON ! ÎLE FLOTTANTE ! BATEAU ! POOOOOMME ! POMME ! POMME ! BATEAAAAU !  AAAAAAAH ! LES IMAGES DÉFILENT TROP VIIIIIIITE ! CAP'TAINE ! UN AUTRE COUUUUUP !

Le Cafard frappa encore, avec beaucoup de cœur.

AH ! BATEAU ! STOP ! Euh... Cap'taine, le navire, il est parti en fumée en arrivant, souv'nez-vous, j'y ai foutu l'feu ! PIR-RAH-RAH-RAH-NAH !
Ah le con ! Hrhrhr !


Finalement, il aurait peut-être était plus judicieux de le laisser à ses hallucinations. Quoique...

Sista... ?
Sista ? Qu'est-ce qu'il bave encore, le poiscaille ?
Sista Elisabeth ! T'es venue toi aussi ?!


Illuminé par la soudaine apparition de sa petite sœur, toute son attention focalisée sur sa présence et uniquement la sienne, Elijah se rapprocha, excité. Cela faisait des semaines qu'elle n'était pas venue lui rendre visite. Il tenta de la prendre dans ses bras, mais elle s'esquiva au dernier moment, poussant un ricanement malicieux, s'évaporant dans les airs pour réapparaître sur l'épaule du seul élément représentant la justice en ces lieux. La tête du piranha se braqua sur la Lieutenant-Colonel, qui eut un mouvement de recul en le constatant, il faisait clair dans sa tête que le poisson était totalement dérangé. Ce dernier se rapprocha, pas à pas, tendant l'oreille, tentant de comprendre ce que souhaitait lui dire la petite fille.

Qui... elle ?! Ooooooh ! J'vois, merci sista !

Il se tourna vers son Capitaine et le type à la crête, affichant la mine du type qui venait de trouver la solution à leur problème.

Cap'taine ! Problème réglé ! Elle va nous filer un navire !
Qui ça elle ? Le fantôme de ta soit-disant sœur ?
NON ! ELLE !


Agile et vif, il venait de bondir sans prévenir par-dessus Anna, avant de lui bloquer les membres supérieurs dans son dos, et de la menacer de ses mâchoires, les plaçant à quelques centimètres de sa gorge, prêtes à mordre dans la chair.

Foutu pirate dégénéré ! Relâche-moi avant de le regretter !
Le regretter ? Seriez-vous aveugle, Sergent ?
C'qu'il a l'air d'avoir des dents à vous découper un steak de mammouth en un rien d'temps, l'poiscaille !
COUIC COUIC COUIC ! MORTE MONTANA !
C'est Montanno, abruti ! Et inutile de me menacer pour obtenir un navire, je serais heureuse de vous fournir les moyens nécessaires pour débarrasser la Station d'Envol de votre présence !
Oh ? Vraiment ? Ce que la Marine peut être généreuse avec ses petits hôtes...
On veut un flottant, avec assez de barbaques et de picole pour tenir une année !
Et naturellement, vous n'oublierez pas de l'enduire de Gel Céleste pour rendre l’ascension possible.
Ouais ! Et on veut des cookies aussi ! Et un éléphant rose ! J'AI PAS EU MON ÉLÉPHANT ROSE ! Quoi ? Oh, bien pensé ! Et un coffre rempli de poupées sirènes pour Elisabeth !
Si vous voulez votre navire, il faudrait songer à ordonner à votre bête de foire de
Ouuh, elle l'a traitée de bête de foire, moche...
C'QUI LA BÊTE DE FOIRE ?! HEIN ?!
Je crois que tu étais visé la sale race.
Remarque elle a pas tort la gonzesse, t'as vraiment une sale gueule.
AH LA POUFIASSE ! J'VAIS M'LA FAIRE !
Du calme sale chiure de hareng ! On a besoin d'elle en vie pour accéder à l'île céleste, relâche-la.
Pouah... Désolé sista, c'pas pour aujourd'hui l'volcan buffet...
Après vous, Sergent. Yah-hin-hin !
Hrhrhr !
Pi-rah-rah-rah-nah !


Le trio infernal se laissa conduire jusqu'à l'un des nombreux hangars de la ville flottante, où les attendait leur embarcation, quasiment prête à l'emploi. Une fois les vivres stockés en fond de cale et le Gel Céleste appliqué sur la coque, les Blattards pourraient prendre leur envol pour rejoindre leur prochaine destination, le port aérien d'Akeem.


Dernière édition par Elijah Croq'Dur le Lun 10 Juil 2017 - 21:04, édité 1 fois
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Il ne fut question ni de "barbaque" ni de "picole" et encore moins de "cookies". Un voilier tout ce qu'il y avait de plus rudimentaire avait été affrété pour le trio de gougnafiers dont le capitaine était assermenté par le Gouvernement Mondial. Dans l'histoire de la marine, jamais fonctionnaire n'avait jusque là fait preuve d'autant de célérité pour obéir aux ordres. Virer les Blattards de la station, qu'ils ne soient alors plus que le problème de l'île d'Akeem, c'était en effet très tentant lorsqu'on avait été amené à les subir toute la sainte journée.

Un gel avait été immédiatement étalé le long de la coque et la vermine corsaire fut immédiatement priée de bien vouloir prendre place à bord. Plus tôt ils auraient débuté leur ascension, plus tôt les mouettes pourraient souffler. Car ce n'était pas reposant de laisser des prédateurs en liberté et d'être en plus contraint de les fréquenter. À présent, pour les marines affectés à la station, la triste engeance blattarde n'était plus que de l'histoire ancienne alors qu'ils observaient le voilier s'élever lentement. Leur calvaire était terminé.

- Berrangère ! Fous-moi ça par dessus bord !

Chez les Blattards en revanche, la vie était un perpétuel calvaire qui n'en finissait jamais. "Ça" c'était Elijah. Empreint d'un lyrisme spontané, ne perdant jamais une occasion de taper sur les nerfs de ses camarades de flibuste, flotter dans les airs lui avait donné de l'inspiration pour s'abandonner à la chanson. Déjà le manque d'oxygène en altitude se faisait ressentir. Le punk, rétif à toute forme d'autorité - surtout lorsqu'elle émanait d'un capitaine qui l'avait abandonné en territoire hostile quarante-huit heures auparavant - se saisit du cafard par le col.

- C'est Berringer ! Et si tu m'appelles encore une fois par mon nom de famille, JE TE PUL-VÉ-RISE !

De son côté, le piranha ne s'était arrêté de chanter que pour mieux se moquer de Mahach.

- Ah ce nom de con ! On va t'appeler Bébère ! Aaaah que Salut Bébère ! Ça va bien Bébère ? Une tite bière Bébère ?

Les deux subalternes de Greed apprenaient lentement à faire connaissance. Ayant quelques carences lorsqu'il s'agissait de sociabiliser sereinement - on n'était pas pirate pour rien - tous deux entreprirent de se mettre sur la gueule, jusqu'à ce que mort s'ensuive de préférence.
Un voilier tout neuf pourtant. Voiles déchirés, mât fendu, coque percée, le punk et l'amphibien de service avaient su redoubler de créativité pour approfondir leur relation.

C'est branlant et chancelant que le bateau avait atteint le port d'Akeem. Pressé de quitter ces deux cons qui lui empoisonnaient l'existence - à qui il le leur rendait bien - le cafard à peine à quai enjamba le bastingage avec hâte et trouva sur l'embarcadère un chef de port pour le moins estomaqué de constater les dégâts de leur vaisseau.
Joe se saisit de la joue du bonhomme et la tira avec condescendance.

- Bon, t'as deux jours pour me réparer ça. Ordre du Gouvernement Mondial ! C'est du sérieux, on rigole pas.

"Ah" et "Euh" furent les principales exclamations que le docker trouva à lui rétorquer, ne sachant pas trop à qui il avait affaire. Les informations circulaient assez mal de la surface aux îles Célestes. Cela faisait des mois que le cafard était affublé du titre de Greed mais tous hélas n'avaient pas reçu la bonne nouvelle.

- M... mais vous êtes des pirates ? Comment vous êtes montés ici ?!

Alors qu'il se dirigeait déjà vers le centre de l'île à la recherche de moyens de s'en mettre plein les fouilles, le cafard se retourna un air faussement choqué affiché sur son visage qui criait "vermine" du front au menton.

- Ah bah ça ! Sous prétexte que j'ai une balafre, que je sois lourdement armé, que mes matelots aient une sale gueule et qu'il y ait un jolly roger en haut du mât ça fait de moi un pirate ? Bonjour les stéréotypes !

Tandis que Joe s'adonnait au foutage de gueule ostentatoire - discipline où il excellait - ses deux "sales gueules" de matelot quittèrent l'embarcation à leur tour, échauffant leurs articulations, prêts à en découdre sans même comprendre de quoi il en retournait. Le cafard s'était rapproché un peu plus du chef de port au fur et à mesure qu'il cherchait à le faire culpabiliser d'avoir eu l'esprit si peu ouvert après les avoir discriminés sans vergogne - à juste titre d'ailleurs - et le tapota son index au niveau du buste lui étant présenté.

- Mon bateau. Réparé. Après-demain. Non négociable.

Joe savait présenter ses arguments avec tact. Il ne le faisait jamais, mais ça ne l'empêchait pas de savoir comment faire. Accentuant la menace blattarde, les immondes doigts palmés de son drogué de subalterne se retrouvèrent sur les épaules du malheureux docker. D'une voix étouffée, inquiétante, il approcha sa mâchoire pleine de dents tranchantes de l'oreille de son nouveau camarade et lui demanda presque langoureux :

- Vous avez des cookies ?

Au moins ainsi, le personnel du port savait à quoi s'en tenir. C'était une triplette de sociopathes qui était venue à leur rencontre. Malgré cela, le chef de port chercha à négocier les délais de réparation fantasques qu'on lui avait imposé.

- C'est à dire qu'il faut que vous compreniez que...

Le verbe "comprendre" fit remuer les oreilles du cafard.

- Teu teu teu !

Accompagné d'un sourire mesquin et d'un regard qui en disait long sur l'étendue de son altruisme, le Blattard en chef écarta un pan de son manteau de fourrure afin de mieux dévoiler les Flash Guns qui s'y trouvaient. Son Bazooka étant resté à bord pour ne pas le salir.

- De par mon expérience, je puis vous assurer que ce sont ceux qui ne sont pas armés qui doivent faire l'effort de comprendre ceux qui le sont. Ça s'appelle le bon sens.

Cela avait beau s'appeler le bon sens, des esprits peu avertis y auraient vu là une menace.
Mahach fouillait dans les caisses qui se présentaient à lui. On ne lui avait pas mis sa gnôle à bord, qu'à cela ne tienne, il la trouverait dans les innombrables cargaisons du port. Une arrivée remarquée ; un capitaine retors, un punk vandale et un piranha qui décidément aimait les cookies, il n'en fallait pas plus pour attirer les badauds. Avec eux les mouettes. Fini la régulière, c'était un commandant de l'élite cette fois qui était chargé d'encadrer les Blattards.
Traversant la foule, le chef des "Fous volants" s'interposa calmement.

- Messieurs, vous étiez attendus.

Attendus et bon bienvenus.

- Nous nous chargerons des réparations au plus vite.

Et il fit un signe de tête aux dockers pour que ceux-ci se mettent au travail au plus vite. Comme à la station d'Envol, on voulait les Blattards partis le plus tôt possible.

- C'est fou comme la marine est sympathique. Toujours à se mettre en quatre pour qu'on passe un agréable séjour aussi pour qu'on parte plus vite j'ai l'impression.... non ça doit être de la paranoïa. Hin-hin

Adressant un sourire aussi vicieux que possible au commandant s'étant déplacé à contrecœur pour les renontrer, Joe n'eut pas le temps de demander à ce dernier de les emmener quelque part où passer le temps d'ici à ce que le Log Pose ne recharge puisque devancé par son matelot.

- Y nous paie un godet le commandant ?
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La caboche blanchie du commandant devant mon audace se met à tourner presque mécaniquement, comme un automate, vers la mienne qui se paie un rictus satisfait. J’aime pas la mendicité, mais j’apprécie les dons spontanés.
Voyant que j’en démords pas, il ronchonne.

- Grmbl, soit.

Parfait, héhé. Le Joe a l’air d’accord avec moi, et l’autre sous-race a l’air ... euh ... bah ... ailleurs, je dirais ... Je saurais pas dire. Il me paraît content, peut être trop même. Les yeux dans le vague, de la bave au bord des lèvres ...

- Oh ouais ... Des coo-kies ! ♪

‘Fin bref, il tourne les talons, on suit. Un ponton et quelques dizaines de mètres plus tard, une petite troupe de marins nous rejoint. Elle salue en parfaite synchro, je sais pas si je dois me marrer ou gerber.

- Commandant Krowly, la garde dans les usines a été relevée.
- Entendu, suivez-nous, j’aurais à vous parler à la caserne.
- Bien, Commandant.

- Des usines ? que lance machinalement le Joe, pour tuer le temps. Pas que ça l’intéresse, mais la petite ballade jusqu’au rade a repris, et il veut sûrement pas mourir d’ennui.
- Affirmatif. Nous y raffinons le gel avec lequel nous enduisons les navires.

C’est bien beau tout ça mais qu’est ce que j’en ai à foutre ? Sauf que ...
Sauf que je jette un oeil par dessus le garde-fou, et quand je vois toute cette flotte, un sourire vicieux me fend la gueule.

- Eh, Machin ? que je dis à l’ahuri en lui donnant un coup de coude. Pour toute réaction, il me regarde avec des yeux de merlan frit. Tu crois que si j’te fous dans une barrique de gel tu d’viens un homme-poiscaille des cieux ?

Avant même que le son qui est sorti de ma bouche parvienne à ses oreilles et percutent son ciboulot, le dernier arrivé joue les petits je-sais-tout.

- Je ne pense pas. Tout ce que vous risquez de faire, c’est de rendre inflammable votre camarade. Bien que nos traitements limitent ce risque ...
- Dommage ...
- Ouais, le ciel c’est que de la mer inversé en fait ...
- J’parlais pas de ça. J’aurais bien foutu l’feu à ta carcasse, hrhrhr !


Voyant que les bleus commencent à tirer une gueule de trois pieds de long, le Biutag tonne entre ses dents un :

- La ferme !

Pis feignant un semblant d’intérêt, il reprend :

- Et pourquoi vous les surveillez ? Vous avez à faire à des vols ou des sabotages ?
- Vous venez aux renseignements pour mettre en oeuvre vos mauvaises intentions ?


Je crois que pour la première fois de ma vie, j’ai vu le Joe tirer une moue !

- Je demandais, c’est tout ... qu’il boude en faisant mine de donner un coup de pied dans un caillou inexistant.
- Eh bien depuis que la Klik de Klank a disparu de nos radars, nous avons ne pouvons pas dire que notre quotidien soit bousculé ...
- Refoulez-la Chubb, nous ne sommes pas des guides touristiques ! Et puis nous arrivons.


Ah ! Là on peut causer ! Un p’tit rade comme je les aime ! Un peu miteux et poussiéreux mais pas trop ! Là je me réveille enfin ! Krowly pousse la porte un peu agacé, ses mecs le suivent, et nous qu’on ferme la marche, sous le regard intrigués des quelques poivrots venus s’abreuver comme les braves gens le font.

- Trouvez-vous une place, je vais parler au tavernier.

On se fait pas prier, devant les marins qui bougent pas d’un poil. Les Blattards ont le sourire jusqu’au oreilles, bien que je sache pas si la rascasse en a. Comment alors les messes basses entre Krowly et le barman au crâne qu'a l’audace de reluire plus que ses verres.

- Oh, bonjour Commandant !
- J’ai promis à ces gus de leur payer un verre. Mettez-leur un truc pas trop fort, histoire qu’ils ne troublent pas l’ordre public ...
- Une bière ?
- Une limonade.
- Avec toute le respect que je vous dois Commandant ... Avec ça ... Vous risquez surtout de vous attirer leurs foudres ...
- Bon, bon. Va pour une bière ... Enfin, deux et un cookie.
- Un cookie ?!
- Euh ... oui ... Vous avez des garçons il me semble, non ? Alors vous devez bien avoir ça ... Si ça me permet de m’en débarrasser ... Enfin bref, bon courage.


Et le voilà qui revient vers nous alors que le mastroquet s’affaire dans son coin.

- Voilà, la commande est passée. Vous m’excuserez, mais le devoir m’appelle.

Aucun au revoir, aucun salut : Krowly se barre, talonné par ses hommes.

- Au revoir et merci, Commandant ! que siffle le Cafard, amusé par son faux zèle.

Le tavernier redescend.

- Et voilà ! Deux pintes et un ... cookie. En voilà un qui pourrira pas les dents de mes gosses, hahaha ! Pas vrai ?
- Pi-rah-nah ! C’est encore meilleur quand c’est volé !


Le chauve le regarde, surpris et gêné. Il reste con comme ça un moment avant de secouer la tête pour se tirer du blocage qu’il vient d’avoir et de retourner bosser. Joe trépigne de satisfaction devant son bock pendant que moi j’y plonge ma gueule. J’avale goulument la première gorgée, celle qui fait du b...

- Bordel mais c’est pas d’la binouze ça ! que je gueule en me levant d’un trait. C’est d’la pisse de chat ! J’voulais bosser mon Haki de l’Empathie en étant de plus en plus bourré, j’fais comment moi maintenant ?
- Putain Mahach, merde ! Mais boucle-la !


Je flingue le Joe du regard autant qu’il vient de me le faire. J'ai attiré l'attention de tout le monde, mais j'm'en branle ! Pas comme le Joe qu'essaie de calmer les choses.

- Ah, ouais, c’est vrai, toi du moment qu’c’est gratuit ...
- Je veux pas d'histoire, compris ?!


Je me rassieds comme un sac, vexé.

- Ouais. Capice. Mais sache juste que si c’te pisse éventée coulait en rivière, l’autre abruti pourrait nager d’dans sans mal !

D’ailleurs, je le regarde. L’est en extase le gars ! Les yeux au plafond, presque révulsés, il les cligne frénétiquement en remuant ses doigts recourbés et en couinant un petit “Hmm-hmm-hmm-hmm ! ♪” aigu.

Teh. Île de merde.
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Il couinait, s'extasiait, le tant attendu biscuit sec aux pépites de chocolat entre ses doigts palmés, les yeux brillants d'admiration devant un tel chef-d’œuvre. Encore intact, il s'était contenté de le lécher, frémissant à chaque contact avec sa langue, tout tremblotant de joie. Ses papilles gustatives s'apprêtaient à prendre feu, et il fallait se préparer. Savourer l'instant, déguster, ne pas se précipiter et engloutir le tout. Il avait eu du mal à l'obtenir, il ne le gâcherait pas bêtement. Dans sa bulle, il n'entendait pas le punk hurler sa haine à tout l'établissement, ni le Capitaine Cafard tentant de l'apaiser. Il cala le cookie dans un coin de sa gueule, sans le croquer, le plaçant contre ses lèvres et commença à le sucer comme une friandise. Oh, ce qu'il pouvait remercier en cet instant ce couple d'aubergiste d'avoir découvert la recette d'un gâteau aussi délicieux. Sa mère lui avait raconté l'origine du cookie quand il était petit, un soir où ils n'avaient eu qu'un malheureux morceau de pain rassis à se mettre sous la canine pour le dîner.

Elijah, encore trop immature et ne comprenant pas totalement la situation difficile dans laquelle se trouvait sa génitrice à l'époque, lui avait reproché d'être fauchée, pleurant et criant que s'il avait toujours faim, c'était de sa faute. Elle l'avait alors prise dans ses bras, le serrant avec tout l'amour qu'une mère pouvait porter pour son fils, avant de calmement s'excuser, et de lui promettre une chose. Qu'un jour, quand le petit garçon-piranha serait assez grand pour voyager, elle l'amènerait sur l'île de Bausstaune, où une femme merveilleuse du nom de Ruth avait mis au point la recette d'un biscuit aux brisures de chocolat si délicieux que le monde entier avait tenté de s'arracher son secret. Ensemble, ils iraient là-bas et dégusterait autant de cookies que le voudrait Elijah, sans restriction. Séchant ses larmes, essuyant sa morve sur les vêtements de sa mère, l'amphibien avait alors retrouvé le sourire, s'imaginant déjà croquant dans l'un de ses merveilleux biscuits.

Dites les gars, on ira sur Bausstaune un jour ?

Il avait balancé cela à l'attention de ses deux camarades, après s'être finalement décidé à arracher un morceau de ses dents, entamant la dégustation. C'était foutrement bon, personne n'irait dire le contraire. Plusieurs longues minutes s'écoulèrent ainsi, chacun étant anormalement silencieux, plongé dans ses pensées avares, sa mastication intensive, ou dans sa bière au goût désagréable de pisse de kangourou nain suivant de qui il s'agissait. Les Blattards étaient anormalement calmes, cela en devenait limite plus effrayant de les voir ainsi inactifs, comme s'ils attendaient le moment propice pour se déchaîner. Il était difficile de croire pour qui avait eu vent de de leur réputation qu'ils pouvaient simplement tuer le temps pendant que l'on effectuait les réparations sur leur navire. Et pourtant il s'agissait bien de cela, le Capitaine ne souhaitant pas faire de vagues, le reste de l'équipage obéissait pour une fois.

Hey Joe, Bébère ! On joue à un jeu ?
Si je te dis non, tu vas lâcher l'affaire ?
Non ! Pi-rah-rah-nah !
C'est bien ce que je pensais...
Bébère ?
J'te jure que si t'arrêtes pas avec c'surnom con d'anguille... j'vais te
Roh allez c'est bon ! J'arrête ! Une partie d'cartes ?
On a pas de cartes.
Pas grave ! Ca se joue sans cartes ! Le 21, vous connaissez ?
Le quoi ?
Un peu que j'connais l'poiscaille, j'ai plié toutes les poches à gnôles des rades des Blues sur le 21 !
Les Blues ? C'quoi ça ?
Laisse tomber le mérou, on a pas le temps pour ça. Mahach, t'expliques ?
D'quoi, c'que c'est le Blues ? J'pensais on avait pas le temps... ?
Putain de... pas un pour rattraper l'autre dans cet équipage d'abrutis... Le jeu le balais à chiottes ! Explique ces foutues règles du jeu !


Y'a le Biutag qui perd patience, affligé devant si peu d'intelligence. Le Mahach qui flingue le Biutag du regard, l'imaginant crever de ses poings. Et le Croq'Dur qui assiste à la scène, hilare, en admiration devant tant de haine.
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Les règles furent expliquées.

- C'est de la merde.

Les règles furent refusées.

- Bordel Joe tu peux pas juste dire "c'est de la merde" et nous envoyer chier comme ça.

- La preuve que si puisque je viens de le faire.

Raisonnement implacable et même élémentaire lorsqu'on y réfléchissait. "C'est de la merde" ou non, Elijah avait de son côté fait signe au tavernier de lui apporter un autre cookie. Auriculaire gauche levé et pousse droit baissé, tel était le mode d'expression universel pour solliciter un cookie. C'était en tout cas ainsi que l'on procédait dans le monde merveilleux d'Elijah Croqdur, un monde où les pilules poussaient sur les arbres et où le bon sens n'avait pas cours.
Intrigué, celui à qui le signe avait été adressé était perplexe. N'ayant pas ses accès à "Elijah World" il devait deviner ce que ce signe étrange pouvait bien vouloir dire et agir en conséquence. Était-ce une insulte coutumière des forbans de la surface ? Un remerciement ? Une crise d'arthrite aigu ? Pour le deviner, le bougre devait se référer au contexte de la discussion à leur table. Entre deux "Ta gueule" et trois "Va chier cafard", le tavernier pensait avoir entendu parler de jeu de carte.
Ni une ni deux, il fouilla dans un des tiroirs à portée de main et s'en alla apporter le tribut aux Blattards.

Joe avait placé le canon d'un de ses Flash Dials sous le menton du punk, ce dernier ayant orienté son cran d'arrêt en direction des roustons du cafard. Interrompus dans leur discussion, ils adressèrent un regard pour le moins circonspect en direction du malpoli venu les déranger pour déposer un jeu de carte sur la table.
Figé son petit doigt en l'air et son pouce vers le bas, c'est dans un gémissement qu'Elijah lui dit :

- Mais qu'est-ce que tu fous ? Et... et le cookie ? Non mais t'as été élevé où ?!

Vexé de ne pas avoir été compris, persuadé d'avoir pourtant été clair de par l'emploi de son signe on ne peut plus précis, il se dressa violemment de sa chaise, menaçant.

- Tu... T'as... Qu...

Partagé entre la rage et les réactions chimiques contradictoires dans ses veines, il convulsait presque. Cette absence de cookie l'avait profondément heurté. Yeux presque larmoyants, dents tranchantes déployées hors de son immense gueule, il nourrissait quelques projets définis à l'encontre de leur hôte pourtant on ne peut plus aimable.

- De... B... P... putain.

Il commençait à articuler.

- P'tit doigt vers le haut et pouce vers le bas, c'est pourtant clair non ?! T'es rien qu'un.... qu'un.... un manouche intergalactique ! Ouais, voilà ce que t'es ! Et au nom de la lune, je vais te défoncer la gueule et bouffer tes restes !

C'était la chimie qui parlait. Il en avait ingurgité une certaine dose qui le faisait actuellement planer dans l'espace. D'où le registre des insultes couplées aux menaces.
Derrière lui, le bruit des cartes que l'on mélangeait. Joe et Mahach avaient su outrepasser leurs différences et avaient convenu tacitement qu'un poker des familles leur ferait le plus grand bien. Le cafard imita le signe universel enjoignant à s'asseoir, à savoir braquer qui de droit de son arme.

- Assis Croqdur.

Dissipé, le piranha ne se fit pas attendre. Il avait déjà oublié jusqu'à l'histoire du cookie pour la plus grande joie de tavernier qui venait de voir sa vie défiler devant ses yeux. D'un autre signe, plus compréhensible celui-ci, Mahach fit comprendre à l'intrus qui leur avait apporté les cartes de dégager de leur vue. Ce dernier ne se fit pas prier.

- Chacun met un million sur la table.

- J'ai pas un million.

La partie commençait bien. Toutefois, cette contrariété n'enragea pas le Blattard en chef comme cela pouvait le faire dès lors où les événements ne se déroulaient pas comme il le désirait. Au contraire, à certains égards, notamment à la vue d'un sourire en coin et de ses yeux qui se plissaient, on aurait juré qu'il s'en réjouissait.
Sortant de son manteau un papier pré-rempli où il ne restait qu'à compléter d'un montant en berries ainsi qu'une signature, le cafard le présenta à son matelot. Avenant, il lui faisait un prêt d'un million de berries.

- Merci bien cafard ! T'as une sale gueule mais t'es bien généreux.

Passant outre le compliment de l'amphibien, Joe plia le contrat pour le ranger d'où il l'avait sortit. De son intonation posée et nasillarde où il lui répondit "Merci à toi", on devinait qu'il venait de faire un mauvais coup. Mahach avait en tout cas eu le temps de lire "Taux d'intérêt de 1000%" ce qui le dissuada à l'avenir de demander de l'argent à son capitaine.

- Mahach distribue.

Et tous s'emparèrent des cartes leur étant assignées. Quand il était question d'argent, tous étaient soudain plus calmes, on aurait presque entendu une mouche voler si Elijah n'avait pas mangé tous les insectes passant à sa portée. Les cartes ouvertes furent distribuées à leu tour, la petite blinde était de dix-mille berryes ; la guerre totale pouvait commencer.

Allod ? Oui ? C'est les Blattards à l'appareil  Langfr-150px-01_of_hearts_A.svgAllod ? Oui ? C'est les Blattards à l'appareil  Langfr-150px-Jack_of_hearts_fr.svgAllod ? Oui ? C'est les Blattards à l'appareil  Langfr-150px-10_of_clubs_-_David_Bellot.svg

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J’aime pas bien ça quand y’a “miser de l’argent” et “Joe” dans la même phrase. ‘Fin, la phrase c’est plutôt “Jouer au poker avec Joe”, mais c’est pareil. Je suis sûr qu’il peut tricher quand il s’agit de gagner de l’argent.

Je regarde mes cartes. Mouais. Une paire. Y’a difficilement pire, parce qu’y a surtout mieux. Je peux peut être miser sur un brelan, au mieux un full avec pas mal de chance ...
Je regarde les deux zigs qui me servent d’équipage. Joe est concentré, il laisse rien paraître. Hmm ... Soit il a jeu de merde, soit pour une fois il arrive à contenir sa joie. Ca m’étonnerait pas de lui, pour ramasser du fric il serait prêt à tout, même à se changer en cureton. Putain on dirait un comique de répétition tout naze ! “Joe pour ramasser du flouze il serait capable de ...” et tu complètes par ce que tu veux.

La tension commence à être palpable, on en oublierait presque ce qui se passe autour. Et j’aime pas être tendu, alors je tise une gorgée.
Ah. Ouais. J’avais oublié. C’est de la pisse de chat. Je la recrache dans le bock aussi sec. Y’a aucun des deux qui moufte pour une fois. Trop concentrés.

- Machin, t’es p’tite blinde ...

La tanche se met à frapper des poings sur la table, manquant pas de tout faire trembler ce qu’il y a dessus. Même Joe et moi on a sursauté !

- D'OÙ QUE TU ME TRAITES DE PETIT MORCEAU DE BOIS ? C’EST TOI LE PETIT MORCEAU DE VIEUX CORDAGE ! PI-RAH-RAH-RAH-NAH !

On se regarde avec le Cafard, c’est un peu bizarre. On sait pas si on doit être choqu...

- Hé ! Profites-en pas pour zieuter mes cartes !
- Yahinhin ! T’as qu’à pas me laisser l’occasion de les voir, abruti de coq !


Je soupire. C’est dingue, tout me fait chier.

- Bon. C’que j’voulais t’dire le poisseux, c’est qu’c’est à toi d’jouer ...
- Dame de coeur à vous l’honneur ! ♪
- Joue ! Mise ta petite blinde !


Au tour du Biutag de s’exciter. Au fond, ça me fait marrer : même une simple partie de carte, ça peut pas bien se passer chez les Blattards !
Eli’ commence à rameuter tout son pèze sur la table, de colère je le lui repousse et paie à sa place. Et moi la grosse. Le Joe suit.

Du coup le jeu peut enfin continuer. Je crame une carte, et je sers le turn.


Allod ? Oui ? C'est les Blattards à l'appareil  Langfr-209px-Queen_of_hearts_fr.svg


Putain, Dame de coeur, ça m’arrange pas. Bordel, on aurait presque dit une prédiction du Mérou ! Mais plus important : ça pue la couleur à plein nez ... Si le Cafard sort une quinte flush royale, je l’étripe. Manquerait plus qu’il soit vénal ET veinard ...
Attends ! Attends attends attends ! Si ça se trouve, le Croq’Dur fait le mariole "Je sors un adage tout pourri pour faire genre", mais il cache bien son jeu le salopard ...

Rhaa j’aime pas ça. Je vais devoir me méfier des deux, je peux pas laisser filer un putain de million comme ça, connement ...
Je me grille une clope, ça me détendra.
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Le désaxé poussa une grimace avant de rabattre son tapis de jetons vers lui, il ne comprenait décidément rien à ce foutu jeu. Au départ, quand l'autre empoté de barman pas foutu de piger les signes pourtant évident qu'il lui adressait, avait ramené un paquet de cartes, il avait cru comprendre que les Blattards joueraient au Trou du Cul. Voilà pourquoi, tout naturellement, il avait signalé que le joueur possédant la Dame de Cœur en main devait lancer les hostilités. Petite blinde que lui avait rétorqué le soiffard à tête de poulet, dès lors ils avaient perdu le piranha. Il zyeutait avec attention les deux cartes en sa possession avec une telle intensité qu'on aurait réellement cru qu'il se concentrait. Qu'il s'impliquait dans ce qu'il faisait, savait ce qu'il se passait. 5 et 2 dépareillé, une assez mauvaise main pour un joueur un tant soit peu connaisseur.

Tout ce que le Croq'Dur avait en tête, c'est que toutes les deux étaient noires et que donc forcément cela devait donné lieu à un combo extraordinairement puissant ! Il avait donc de quoi rabattre le caquet de ses deux compagnons de voyages. Lorsqu'il leva le regard de son jeu pour suivre la carte qui sortait au turn, sa cervelle déglinguée et gangrenée par la folie entra en action une fois de plus. L'hallucination tomba et dès lors, toute la vision du jeu fut chamboulée. La partie s'anima, littéralement, sous les yeux ébahis mais dissimulés derrière ses lunettes, du poiscaille. Sa bouche s'ouvra en grand et il laissa échapper un son trahissant à la fois sa surprise et son admiration, c'était foutrement trop cool. Alignées l'une à côté de l'autre, les trois cartes du flop s'étaient dressées sur leurs jambes, bras croisés. La Dame de Coeur sortie au turn alla les rejoindre, de sa démarche majestueuse.

Y'a comme qui dirait les fesses qui se serrent pour les deux compères de l'homme-poisson, qui lui ne remarque rien, trop obnubilé par l'hallucination servie par sa maladie. Mahach comme Joe ont de belles mains potentielles, et la promesse de les améliorer au dernier tirage, mais ils ne sont pas stupides, ils se méfient des autres. C'est de là que vient toute l'attraction du poker, l'excitation, le frisson qui vous parcourt les membres à chaque décision prise. C'est au Cafard de miser, il n'a encore rien touché jusque-là, mais sa main peut se révéler être très efficace si la dernière carte est la bonne. Il le sait, la couleur est une menace, mais à ce stade, une simple paire pourrait le battre. Ce qu'il sait également, c'est qu'il faut savoir se montrer agressif par moment pour obtenir ce que l'on veut. Ou au moins apeuré l'un des deux adversaires et en faire se coucher ne serait-ce qu'un seul. Il avance les jetons, plantant son regard dans celui du punk, et annonce avec assurance la somme.

Trente milles.

Au tour d'Elijah, toujours perdu dans son monde où la démence est reine. Il fut brusquement rappelé à l'ordre par le cran d'arrêt de l'ex Saigneur qui s'enfonça dans le bois de la table à quelques centimètres de sa main palmée.

Bordel le caillé, t'es avec nous ou quoi ?!
TAPIS !
Oy oy... avant de t'enflammer les branchies, t'as compris les règles au moins ?
Laisse-le Mahach, s'il veut envoyer tous ses jetons, c'est son droit.
Tu parles, toi ça t'arranges bien...
Quoi ? T'as pas les roustons suffisamment bien accrochés pour envoyer ton tapis toi aussi ? Tu m'as l'air tout pâle, ça va pas tête de coq ? Yahinhinhin !
Répète un peu, l'nuisible ?!
Moins de bagou, plus d'action.
Tapis.
Tapis ?
TAPIS !
ALORS ALLONS TOUS A TAPIS ! YAHINHINHINHIN !


Elijah n'en croit pas ses yeux, mais lorsque les deux Blattards poussent l'intégralité de leurs jetons vers l'avant, la paire de cartes respective à chacun vient se placer en gardien devant le tas de jetons de son propriétaire, comme les gardes d'une forteresse. Puisqu'ils ont tous décidé de payer pour voir la river, et l'abattage final, chacun peut découvrir avec plus ou moins de frustration la combinaison des autres. Croq'Dur est rapidement mis de côté par le Capitaine et son second, qui se fusillent du regard. Chaque camp montre les crocs, les cartes vivantes au yeux du piranha brandissent les armes, prêtes à en découdre avec l'ennemi. Quand vient l'heure de la river...

La carte du dessus du paquet est brûlée, littéralement dans l'esprit du poiscaille qui l'observe disparaître sous un feu ardent. La suivante se dévoile alors aux yeux de tous.

Allod ? Oui ? C'est les Blattards à l'appareil  02_of_10

AAAAAAAAH ! PI-RAH-RAH-RAH-NAAH ! GAGNE ! J'AI LA CARTE ! LA CARTE ! CAAAAAAAAAAAARTE !

Lorsque le deux de trèfles était apparu, le sang de l’amphibien à la peau bleutée n'avait fait qu'un tour, et il avait bondi de sa chaise, jetant ses bras sur l'amas de jetons au centre de la table, pour tout rafler. Il pensait réellement avoir gagné, puisqu'il avait la même carte dans sa main.

VIRE TES SALES PATTES ÉCAILLEUSES DE MON FRIC LA TANCHE ! PAIRE DE DIX ! J'EMPOCHE LE PACTOLE ! Merci les gars, hrhrhr !
Saleté de pourriture de chançard de mes deux... Va pourrir en enfer... maudite tête de coq...
Mais...


Impuissant, le malheureux pirate aux dents acérées s'était vu méchamment refoulé d'un revers de main de Mahach, qui eu tôt fait de ramener l'argent vers lui avant qu'un de ses collègues tentent de l'entuber. Toujours sous le coup de ses visions démentielles, il assista au carnage qui se jouait sous ses yeux, le duo de cartes du punk soutenu par les cartes communes taillèrent en pièces le reste des cartes des joueurs, annihilant tout élan de contestation, et assurant la victoire de l'ancien Saigneur des Mers. La vision fut si brutale que le drogué en laissa couler des larmes de tristesse, pleurant les âmes des défunts. Il tourna la tête en direction du Capitaine Blattard, cherchant du réconfort dans son malheur. Le Shichibukai avait le faciès déchiré par la colère. Les yeux exorbités, injectés de sang, serrant les dents et les poings jusqu'au sang, tremblant de tout son corps, bavant à tel point qu'on aurait pu croire qu'il convulsait.

Mon pognon... mon pognon... mon pognon... mon pognon...
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Une seule solution : l'annihilation.
Non pas qu'il était mauvais joueur ou trop proche de ses sous, Greed se sentit d'humeur à exterminer ce qui respirait autour de lui. Paisiblement, tout sourire même, presque aimable, il posa ses cartes sur la table avec délicatesse. Prenant appui de ses mains sur cette même table, le cafard se redressait, lentement, accompagnant avec son ascension une forme de pression étouffante.

Au fond, il savait quand s'arrêter à temps, se montrer raisonnable lorsque cela s'avérait nécessaire. D'aucun - mauvais esprit - aurait prétendu qu'un comportement aussi inattendu de sa part relevait de la fantasmagorie, du songe, et pourtant, Joe semblait avoir reconnu sa défaite, abandonnant une maigre partie de sa fortune à ses équipiers bien aimés.
Se dirigeant jusqu'à l'envers du comptoir, là-même où il avait rangé certaines affaires, il farfouilla sous le regard interrogateur de ses deux matelots. Peut-être allait-il sortir une bonne bouteille et, bon perdant, servir un verre à tout le monde, alors ils riraient ensemble, complices, amis.

Oui, cela relevait décidément du fantasme.
Se redressant de derrière le comptoir, son Burn Bazooka tenu d'une main, la canon perché sur son épaule, il effectua un salut amical à ses camarades avant que son visage ne reprit sa forme habituelle, rancunier, haineux même, dents serrées et les yeux gorgés de veines.
Le boulet de canon avait percuté la table de jeu sans même que les victimes en devenir n'eurent le temps de réagir. La surprise mêlée à l'incompréhension avait suffit à les maintenir cul vissé à leur chaise.

Ce n'est que lorsque la fumée provoquée par l'impact se dissipa que le Corsaire - qui par cette "ruse" gagnait toujours au poker - s'avança en direction du corps de ses matelots. Ils étaient meurtris, laids - plus que d'habitude - sanguinolents. Quelques râles et gémissement leur échappait de la gorge en même temps que quelques décilitres de sang.
Heureusement pour eux, leur capitaine était un homme magnanime. S'étant saisi d'une fourchette dans les tiroirs qui lui avaient tendu les bras, il se pencha au dessus de chacun d'eux, et avec une joie non dissimulée, perfora à l'envie ceux qui avaient vogué à ses côtés. Il y allait gaiement. Ce n'était plus que des corps sans vie qu'il déchiquetait à présent, mais il jubilait tant et tant que ses coups de fourchette se multiplièrent à une vitesse affolante. Il riait le cafard, il riait fort, il riait de bon cœur alors que le sang pourri de ses deux hommes d'équipage giclait abondamment, recouvrant ce qu'il restait du sol, des murs et du plafond. Sans faiblir, il les charcutait, il s'acharnait, il.....

- Oh ! Joe ! T'es avec nous ?

Ce rappel à la réalité lui avait fait l'impression d'une chute libre. Clignant des yeux, presque paniqué, Mahach et Croqdur étaient assis devant lui, vivants, le perçant du regard. Effectivement, ce n'avait été qu'un songe, un rêve lucide qui ne demandait qu'à aboutir.

- Ah... Je... Mmh... Oh la la ! Il faut que j'aille derrière le comptoir, j'ai oublié de prendre une fourchette pour... pour touiller ma bière.

Croqdur et le punk s'observèrent avant de porter à nouveau le regard sur leur capitaine.

- Nan mais tu m'prends pour le dernier des cons ou quoi ? C'est encore un coup à ce que t'ailles choper ta chiasse d'artillerie pour nous canarder. Tu restes ici !

- Pira-RHA-RHA-RHA ! Même moi je l'avais deviné ! MÊME MOI !!! PIRHA-RHA-RHA-RHA ! Tout le monde sait qu'une bière ça se touille avec une cuillère !

Tandis que la poiscaille jubilait après avoir laissé entendre malgré lui qu'il était le plus con de la bande - ce qui était un mérite en soi - Mahach gonfla les muscles et montra les dents.

- Mon pognon Biutag ! Aboule !

Recouvrant à peine de ce rêve si délicieux, petite moue innocente plaquée sur sa gueule, bras autour de son magot, le serrant contre lui comme s'il l'avait accouché, il lâcha d'une petite voix.

- Je le voudrais que je ne le pourrais pas.

Compte tenu de ses magouilles, la dernière en date consistant à soumettre Elijah à l'impitoyable logique de la dette - piraterie parmi les pirateries - Greed avait amassé un beau pécule au cours de sa carrière. Son affaire d'esclavagisme tournait toute seule, le pognon entrait à foison. Un million de berries, c'était une broutille pour un corsaire de son acabit, et pourtant, c'était tout. Cafard rimait avec avare.

- Mince j'aurais dû penser à cet argument avant de filer mon oseille...

- Ah putain cafard tu vas faire pleuvoir les berries ! C'est à la régulière qu'ça s'est joué ! Crache le grisbi !

"À la régulière". Cela avait tonné comme la foudre dans la tête du cafard. Son prétexte en or massif pour ne pas payer venait de lui tomber dessus. Quand il était question d'argent, Joe pouvait faire preuve d'une roublardise peu commune. Comme dans son fantasme, il se redressa en prenant appui sur la table, puis il pointa le punk du doigt.

- Monsieur Croqdur ! Mettez cet homme aux arrêts ! Un tribunal naval devra être tenu sur le champ afin de le juger pour tricherie.

Puisque les mauvais joueurs formaient la coalition la plus soudée - l'argent étant le ciment de bien des relations - Elijah prêta main forte à son capitaine pour tacler le vainqueur. Puisqu'il n'y avait aucune limite à la mauvaise foi, ils sollicitèrent le propriétaire des lieux - s'étant fait tout petit - pour qu'il en appelle à la marine.
Ceux-là surgirent avant même que le barman ne sorte. Prudents, ils étaient restés à proximité. Le commandant Krowly en tête, ils n'avaient pas manqué une occasion de profiter de la discorde blattarde et, avec la perspective d'éliminer un élément gênant, se prêtèrent au jeu, jusqu'à enserrer Mahach de menottes en granit marin.

- Fumiers ! Enculés ! Enlevez-moi ça ! Un tribunal naval c'est totalement con de toute façon ! On n'est même pas en mer !

C'était un argument qui se valait.

- Ouais mais....

Joe réfléchit un instant, un prétexte lui suffisait.

- On est sur une île, une île c'est sur l'eau, comme un bateau. Donc l'un dans l'autre... ça le fait. Hein que ça le fait ?

Aussi bien la marine que Croqdur acquiescèrent sans vergogne.

- MAIS ON EST SUR UNE ÎLE CÉLESTE BORDEL !!!

Mahach gesticulait au mieux, ceinturé par une demi douzaine de marines qui peinaient à le maintenir immobile en dépit du granit marin. Sa dernière plainte avait fait son petit effet puisqu'il avait laissé coi l'assemblée. Un tribunal naval était régi par des lois bien plus dures que celles dont s'embarrassait un procès conventionnel, il était capital que cette législation s'applique pour que Joe n'ait pas à payer son million.
Croqdur vint à la rescousse. Mains collées sur ses tempes, il tremblait de tout son être, c'était sa manière à lui de réfléchir, cela nécessitait qu'il rebranche son cerveau et pouvait prendre un peu de temps.

- Classe de CM1 ! Madame Bouli ! Tout... Tout me revient ! L'eau qui tombe du ciel.... L'évaporation... La condensation... H2O ! C'est ça ! On est entouré d'H2O à cause du cycle de l'eau ! Par conséquent, les nuages étant remplis de flotte par la condensation, on est teeeeeechniquement sur les flots.

C'était sans doute l'explication la plus vaseuse que qui que ce soit dans le bar ait pu entendre de sa vie. Mais il fallait faire avec les moyens du bord et on applaudit à tout rompre afin de compenser le manque de crédibilité de la thèse avec un semblant de soutien populaire. Seul Elijah crut à la sincérité de l'ovation. Il se grattait l'arrière du crâne, gêné, à feindre l'humilité.

- Oh vous savez... rien n'aurait possible sans le pouvoir de la drogue...

Les rôles furent vite assignés. Joe serait le juge, Crowly avait insisté pour être le procureur et seul un individu à la psyché aussi merdique pouvait faire un avocat à la défense assez efficace pour enfoncer Mahach, Elijah se fit un plaisir d'endosser ce rôle-ci.

- Nous pouvons commencer.

S'impatientait le commandant. Mais trop exigeant - trop chiant surtout - Joe, les bras croisés prononça un "non" catégorique. Il lui fallait une greffière.

- Un de mes hommes se chargera de rédi....

- Comme si ça savait écrire un marine !

Quand il était question de cracher sur la confrérie de la mouette, les Blattards savaient s'unir pour rire de bon cœur, oubliant presque un instant qu'ils cherchaient à se lyncher entre eux.

- Je vais en trouver un moi de scribouillard.

Quittant le tribu-bar, Joe ne revint qu'une minute plus tard accompagné d'une demoiselle en haillons, les fers autour des poignets.

- La voilà ma greffière !

- Mais... mais... d'où vous l'avez sortie celle-là ?

- Oh... d'ici et là...

Greed préféra ne pas faire savoir à son interlocuteur qu'il l'avait sortie d'une geôle tenue par la marine, et qu'il avait, ce faisant, plus ou moins trompé la vigilance des gardes. Une révolutionnaire pure souche, le genre rebelle sans cause ascendante casse-couille avait été sortie de sa cellule pour que débute la parodie de procès. C'était une triste assemblée que celle-ci.

- Que le procès en tricherie débute !

- Joe... y'a des cartes qui sont tombées de ta manche.

- Que le procès en tricherie et tentative d'imputation du crime à son capitaine débute !

- Oh p'tain...

La plus belle Justice était encore celle appliquée par les criminels aux innocents.
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C'tte pourriture de Joe va essayer de m'enfoncer, le laisse pas faire la tanche ! Pigé ?! Et quand l'autre pédale de Crowly voudra y rajouter son grain de sel, rejette tout ce qu'il dit ! L'mieux, c'est encore que tu brailles ''Objection !'' dès que l'un d'eux l'ouvre. T'saisis, l'camé ?
Bien reçu, bien reçu !
J'compte sur toi hein ! Si jamais tu me la mets à l'envers, j'te promet que
La parole est à la défense.
OBJECTION !
Mais quel con...
Objection accordée, la défense ne souhaite donc pas faire de déclaration. La parole est à l'accusation.
QUOI ?! NON MAIS TU T'FOUS D'MOI ?! MAIS T'ES AUSSI CON QU'UN
Silence dans la salle ou je fais évacuer la salle et suspend l'audience !
T'AS PAS LE DROIT DE ME PRIVER D'UNE DEFENSE SALE
Accusé, faites silence, dernier avertissement ou ce procès durera bien moins longtemps que prévu.
JE VAIS TE
La ferme, Machou ! Et laisse-moi faire, je gère !


Le brave Elijah ne comprenait rien à ce qui était en train de se dérouler ici, mais il était plein de bonne volonté et avait à cœur de briller en public. Et de défendre son tout nouvel amis, également. Le pauvre était accusé d'un crime qu'il n'avait pas commis. Jamais il n'avait eu le moindre doute quant à l'identité du véritable coupable dans toute cette histoire, ce vil et fourbe de Capitaine Blattard était décidément trop rusé pour se laisser dépouiller de ses thunes sans réagir. L'ancien Seigneur des Mers et l'homme-poisson ne seraient pas trop de deux pour faire tomber le vaste complot qui prenait forme dans cette taverne aménagée en tribunal de fortune. Un papier dans une main, un crayon dans l'autre, il veillait à ce qu'aucun ne puisse déceler ce que contenait ce document qu'il présenterait comme la preuve principale de l'innocence de son client. Se raclant la gorge, il fit quelques pas au milieu de l'espace vide autour duquel tous étaient rassemblés, préparant rapidement son plaidoyer.

Monsieur le juge, laissez-moi vous rappeler les faits. Il est présenté que mon client ici présent, se serait révélé coupable de tricherie et tentative d'imputation du crime à son capitaine. Et sur quelles preuves solides les accusations sont-elles fondées ? La parole de l'accusation, le capitaine lui-même. Ce même capitaine qui est connu pour avoir maintes fois abusé de ses compagnons de voyage, usant de pression psychologique et de sévices physique pour parvenir à ses fins. Ce même capitaine qui n'hésiterait pas à vendre sa propre personne pour s'enrichir d'un bon milliard de berrys. Qui irait jusqu'à brûler un bâtiment remplis d'esclaves pour quelques pièces ! Qui trahirait son équipage pour devenir riche ! QUI NE SUPPORTE PAS LA PERTE D'UN SEUL ET UNIQUE BERRY !

Cet homme qui se joue de tous, arborant une mine consternée, désemparée, accablé de ce vol honteux dont il affirme avoir été la victime. Une honnête partie de poker entre camarades forbans en attendant que notre vaisseau soit en mesure de voler jusqu’aux Allods, qu'il vous dira. Entre copains, à l'ancienne, cartes bluff bière et cookie, la détente. JUSQU'A CE QUE LE PREVENU NE SE MONTRE COUPABLE DE TRICHERIE ! REMPORTANT LE POT DE LA PLUS LAMENTABLE DES FACONS, LA PLUS ILLEGALE DES VICTOIRES ! DEVONS-NOUS LAISSER CET HOMME S'EN TIRER A SI BON COMPTE ? FAUT-IL LE LAISSER REPARTIR EN HOMME LIBRE, LIBRE DE VOLER DE NOUVEAU A LA PROCHAINE PARTIE ? Ou rendrons-nous, ici même, aujourd'hui, justice à ses pauvres âmes qui n'attendent que cela pour tenter de passer à autre chose.

Car il s'agit bien de sévices morales, une douleur psychologique qui mettra du temps à se refermer tant la plaie est profonde. Cette partie de cartes n'était pas la première à laquelle le coupable prenait part et ne sera certainement pas la dernière, mais nous pouvons mettre un terme à cela, cette vaste escroquerie qui n'a que trop durée... Je me tiens devant vous et vous invite à réfléchir aux dommages que ce criminel pourrait encore occasionné s'il parvenait à repartir de ce tribunal lavé de tous soupçons. Nous ne pouvons permettre cela. Les criminels doivent répondre de leurs actes, ils doivent être jugé avec fermeté et réfléchir en prison à leurs délits ! C'est pourquoi, en tant qu'avocat de la défense, parle au nom de mon client pour une peine de prison maximale sans possibilité de liberté conditionnelle et un dédommagement d'une hauteur de trois cent millions de berrys par membre de l'équipage des Blattards.

J'ajouterai ceci à votre encontre, Monsieur Mahach... votre carrière de criminel est terminée !
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Posé devant sa table, mains croisées, Joe demeurait inerte. On ne pouvait pas rationnellement espérer de lui l'émission d'une petite larme à l'issue du plaidoyer, mais au moins une réaction, un mouvement de sourcil ou bien une crise d'hystérie aussi bruyante que spontanée dont il savait si bien gratifier son assistance en temps normal. Mais rien. D'ailleurs il ne prit pas la parole, si bien que tous les regards de l'assemblée se tournèrent vers lui. On n'aurait su dire si en cet instant s'il avait cherché à faire monter la pression ou s'il n'avait su pas quoi dire - ce qui eut été une première - mais le silence agaçait la salle qui souffrait déjà de devoir subir ce tribunal fantoche.

Puis Joe tomba comme raide mort.

Avant de pousser le moindre cri de joie, les marines présents se montrèrent scrupuleux au point de vérifier si un souffle de vie était resté accroché à la gorge du cafard. Un officier prit le pouls, se retourna vers l'assemblée qui retenait son souffle et ajouta un air grave affiché sur le visage.

- Il vit...

Si ce n'est des soupirs de lamentation et un "Putain de chier !" lâché par l'accusé, personne ne manifesta son ressenti sur le diagnostic énoncé. C'était d'ailleurs heureux car le cafard se redressait déjà. Rien ne pouvait le terrasser, pas même les trois crises cardiaques qu'il venait d'essuyer d'un coup. Son cœur n'eut-il pas été aussi atrophié, la doléance des trois-cent millions de berries réclamés par l'avocat inconscient aurait eu raison de lui.
Une main agrippée au niveau de son palpitant, bave aux lèvres, réémergeant à peine et cherchant déjà à se redresser, le Blattard en chef trouva un second souffle pour éructer sur une fréquence frôlant les deux-cent décibels :

- COMBIEN ?!!

- Trois-cent millions ! Trois-cent millions ! Un milliard ! Mille milliards ! L'infini même ! Allez ! Crève ! Crève !

Mahach tirait le diable par la queue espérant qu'il ne se penche à nouveau sur le cas de son juge et bourreau en devenir. Seulement, même les enfers se refusaient à accorder l'hospitalité au cafard ; pour Mahach, pas de salut. Si peu de salut même que celui-ci s'écroula au sol dans un cri déchirant lorsqu'une balle de mousquet vint se loger dans son genou. Son capitaine était plus éloquent avec un barillet rempli de poudre qu'avec sa prose sournoise.
Puisque la marine - impuissante face à un spécimen de con pareil - était en principe chargée de garantir l'ordre et éviter les incidents de ce genre, on se manifesta à voix haute mais pas trop pour faire comprendre à Greed qu'il outrepassait certains de ses privilèges.

- Bah quoi ?! Vous ne voyez pas qu'au péril de ma vie je viens de tirer sur un dangereux pirate primé ? Quelque part je vous ai tous sauvé. Vous pouvez dire merci.

Juridiquement parlant, l'argumentaire se tenait. En tirant sur un pirate, même sous ses ordres, le Blattard en chef respectait ses prérogatives.

- VOUS ALLEZ DIRE MERCI OUI OU MERDE ?!!!

À contrecœur, et surtout pour ne pas se risquer à être ciblés à leur tour, les marines venus assister à la parodie de procès afin qu'elle ne vire pas au drame marmonnèrent quelques "merci" à l'intention leur "sauveur". Ainsi, la mascarade était absolue.

Nerveux comme toujours, d'autant plus après ses crises cardiaque, Joe enleva sa casquette vivement, comme cherchant à repeigner ses cheveux gras entre ses doigts avant de déposer à nouveau son couvre-chef sur le sommet de son crâne. Il rassemblait ses esprits et cela était généralement de mauvaise augure.

- Bon... ne nous laissons pas distraire. Maître Croqdur ?

- Oui ?

- Je vous condamne à la peine de mort.

- C'est à dire qu'à la base c'est pas moi qu'on jug...

D'un sobre geste de la main Joe intima à la sardine de la boucler, puis il reporta son attention sur le principal intéressé, à savoir Mahach qui était jugé pour un motif que tous dans le bar avaient oublié.

- Accusé Mahach ?

- ENCULÉÉÉÉÉÉ ! MON GENOU PUTAIN !!!

Rancunier de par nature, à plus forte raison quand on venait de lui loger une balle dans la rotule sans même qu'il n'ait eu le temps d'enclencher son fruit, Mahach gisait à terre à pousser mille jurons.

- Enculé toi même. Je vous condamne à la peine de mort.

Sa sentence savamment administrée, le juge abattit tel un marteau la crosse du mousquet utilisé pour perforer Mahach et se leva vivement avant de s'adresser aux mouettes présentes qui ne savaient plus où se mettre.

- Voilà une bonne chose de faite. Bon... butez-moi tout ça, versez moi la prime pour l'autre créteux et servez-moi à bouffer. Ça creuse de rendre la justice.

Restait pour la marine à faire comprendre au capitaine corsaire qu'ils n'étaient pas à son service tout en cherchant à trouver les bons mots pour éviter les balles. Le plus simple eut été de lui servir à manger afin d'éviter le drame. Leur tentative de diplomatie devrait attendre car un de leurs camarades fit une irruption fracassante.

- La... la lieutenant révolutionnaire qu'on avait capturé la semaine dernière...

Déglutissant d'abord, il reprit son souffle.

- Elle s'est faite la malle ! Pourquoi y'a un pirate avec une balle dans le genou par terre ?

Une goutte de sueur perla le long de la tempe de Joe. Cette greffière qu'il s'en était allé chercher en prison n'était plus dans la salle. Le tumulte aidant, elle leur avait faussé compagnie.
Tout portait à croire qu'il s'agissait de ladite révolutionnaire. Pareille bévue pouvait avoir des répercussions sur le titre de capitaine corsaire accordé au cafard.

Branle-bas de combat immédiat. Tous les sous-officiers envoyèrent leurs hommes quadriller la zone en un temps record. La marine savait être efficace aussi longtemps qu'on ne sabotait par son travail. Ainsi, les Blattards se retrouvaient à nouveau seuls. Cela ne durerait qu'un temps car il faudrait leur demander des comptes pour l'évasion involontaire d'une révolutionnaire.

- Eh bah ! En voilà des gougnafiers ! Même pas capable de nous exécuter. Le bon personnel se perd, moi je vous le dis !

- Mais ferme ta gueeeeeeule....!

- Maintenant que j'y pense - parce que ça m'arrive - c'est pas toi qui avait ramené une prisonnière tout à l'heure Joe ? Joe ? Eh oh ? Tiens ça sent pas un peu le cramé non ?

Le cafard n'aimait pas les adieux déchirants, d'autant moins lorsqu'il était pressé de déguerpir pour ne pas qu'on remonte l'évasion jusqu'à lui. Alors, désespéré, il avait craqué une allumette au milieu des litres de rhum situés derrière le comptoir avant de foutre le camp par la même fenêtre utilisée par la greffière leur ayant fait faux bond quelques minutes plus tôt.
Détalant avec le courage qu'on lui connaît, Joe s'en allait retrouver son embarcation et fausser compagnie à ses anciens membres d'équipage. Ce n'était pas qu'il les haïssait plus que de rigueur, simplement qu'il préférait tout leur mettre sur le dos avant de les quitter. Les quitter, avec un regret cela dit, un remord lui rongeant déjà son petit cœur malmené.

- Merde, j'aurais dû demander qu'on me verse la prime de Mahach...








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