New frontier

Proche.

Les mouettes, les oiseaux tournaient autour des caravelles de l’expédition du Vautour, Colombe serait ravie et il toucherait un joli pactole, et les richesses de cette île mystérieuse lui appartiendrait également. Les moyens dont disposait son employeuse transformerait rapidement n’importe quel terrain en un royaume prospère et indépendant, c’était ce que pensait avec certitudes l’homme.

Il ne supportait pas d’être contredit, ses collaborateurs redoutaient son passage sur le pont supérieur de la caravelle en tête de l’expédition. Le regard fixé vers l’horizon, alors qu’ils sortaient de trois jours à lutter contre vents et marées, claquant les talons, le colosse retourna dans la cabine de son état-major. La communication avec les deux autres navires était une priorité, la dizaine d’hommes et de femmes en liaison permanente avec le reste de l’expédition permettait au centre névralgique de l’opération de faire face à n’importe quel problème.

Descendant les escaliers, le bruit des fouets lui arracha un sourire, deux cents esclaves dans chaque cale des navires, ramant, trimant et s’occupant de la vie des hommes du Vautour. Sazowa passa une main dans sa chevelure parfaitement laqué, les bagues de son autre main brillant dans l’obscurité, il siffla et des ténèbres une ombre fantomatique tellement elle était maigre vint lui retirer son manteau des épaules.

- Mademoiselle Tealia, ou en sommes-nous de notre stock de provisions?

- Nous avons encore plus de la moitié de nos vivres, l’eau ne manque pas. Les esclaves mangeront d’ici deux heures, nous devrions ralentir la cadence le temps du repas.

Sa seconde, n’était pas seulement une belle femme, mais issue d’une lignée d’esclavagiste, secrétaire de Christine Colombe, Tealia Brood le complètement parfaitement. Tous les deux, cachaient derrière un joli visage en guise de masque, une âme aussi pourrie que viciée, refusant d’assumer le mal les rongeant.  

Comme il vous en conviendra. Il n’avait pas son mot à dire sur la gestion des esclaves, et tant mieux, car pour Lewis aussi chétive qu’était la cargaison humaine des navires, ils n’avaient eu à déplorer aucune perte depuis le départ de Hand Island. Allumant un cigare, son regard de renard observa les formes généreuses de son associée. Remontant les escaliers, directement en direction de ses quartiers, il se laissa tomber sur son lit double, fixant le plafond de sa chambre. Et posant son cigare, ferma les yeux, s'endormant et rêvant des trésors de Terra Incognita.

***
- Ca…itaine! …. Out! …. Capi.. Owa!

Les coups contre la porte de ses quartiers, et la voix de plus en plus forte hurlant dehors le réveilla.

- Capitaine Sazowa! Réveillez-vous!

Il manqua d’arracher la poignée de la porte, et furieux pétrifia du regard le malheureux troublant son sommeil.

- La vigie de l’Index à aperçue une autre flotte, et au rythme où nous avançons ils nous aurons rattrapés d’ici trente minutes!

Il pousse son subalterne et se précipite vers la salle des communications, ou il trouve en train de s'agiter frénétiquement les officiers de liaisons.

- Trois frégates, un autre navire nettement plus grand derrière, nous n’atteindrons pas notre vitesse de croisière avant un quart d'heure.

- Un pavillon?

Son interlocuteur secoue la tête, et Lewis mord sa lèvre inférieure de frustration, garder son calme en présence de ses hommes avant tout. Ce n’est pas la première fois qu’il doit faire face à un imprévu, des années à protéger des riches misérables, à devoir faire avec des changements de dernière minute.

- Préparez les canons! Maintenez le cap, que le Columbus se tienne prêt à tirer une bordée à tout moment.

Les ordres sont distribués grâce aux escargophones, et croisant les mains, Lewis patiente. Comme son surnom, charognard, engager les conflits n’est pas son fort. Mais il dessine un semblant de stratégie en fonction des informations qu’on lui apporte. Les batailles navales sont une première pour l’ancien agent de sécurité, aussi écoute-il les avis et conseils de chacun. Mais une question le taraude, comment ces navires ont-ils trouvé la position de l’expédition de Colombe? Et pendant qu’il tente de trouver une réponse, qu’il procède à un ratissage large des différentes théories plausible, des explications dont il a besoin, il ne trouve rien.

- Pavillon pirate!

Il tourne son visage d’éphèbe et hausse un sourcil.

- L’Iron Fleet, nous sommes pris en chasse par l’Iron Fleet.

- Qu’est ce que cette supernova débutante ferait sur le Nouveau-Monde? S'enquit un autre de ses hommes.

- La vigie a sans doute mal vu, l’Armure ne possède pas autant de moy…

La table se brise sous le poing du colosse, et ses pupilles se dilatent, les nerfs à vif, Lewis Sazowa ne décolère pas. Supernova ou Empereur, aucune importance. Nous avons notre objectif et notre cap, tant que nous avançons, nous arriverons avant eux sur place, et si en plus il y a des récifs, nous les engagerons là- bas.

-L’un des trois navires semble préparer son flanc pour une salve de boulets, les deux autres continuent d’avancer, et leur vitesse de croisière semble de plus en plus rapide.

Du bout de ses doigts, la demi-géante tapote sur sa cigarette, avant de porter le tube de tabac à ses lèvres. Son avant bras gauche congédie ses lieutenantes, affalée sur son trône, depuis ses quartiers sur le navire amiral de l’Iron Fleet.

- Que les tambours de guerre portent à l’oreille de ces explorateurs damnés.

Lentement, elle se lève, lentement l’Armure met un pas devant l’autre, écrasant son mégot dans le cendrier, si ses lieutenantes ont étés congédiées ce n’est pas le cas de sa moitié, de la seconde de son équipage.

La seconde de son armée, Elizia Sander, écrase également sa cigarette de concert avec l’Armure, avant de planter son regard dans celui de la demi-géante.

- Tu as peur, Izumi. Son ton n'est pas moqueur, sa voix douce et inquiète reflète le ressenti de l'ancienne tueuse à gages.

Un maigre sourire se forme sur le visage de la tatouée, et ses doigts effleurent un instant la balafre transformée par l’encre, en une œuvre d’art. La scarification du lotus, l’avait longtemps terrifiée, ses premières prouesses rencontrant ses premiers échecs.

- Si je n’avais pas peur en cet instant, me suivrais-tu? Ses iris plongent dans ceux de son interlocutrice. Pas besoin de sonder sa plus fidèle alliée, l'âme de son équipage c'est bien l'ancienne noble des Blues.

- Tu connais déjà la réponse, nous les enverrons par le fond, l’Iron Fleet réclame le prix du fer qu’importe qui doit payer. Nous obtenons toujours notre dû.

Et les portes s’ouvrent, et alors que les guerrières en rangs de chaque côté s’inclinent devant la Capitaine, Izumi ne fixe que l’horizon et leurs proies tentant de fuir. Les bras en croix sur le pont supérieur de l’Hagane No Nami, le vent qui souffle dans les voiles de l’énorme pagode, le bruit des tambours et la douce mélodie qu’ils produisent aux oreilles de la primée, une journée parfaite. La peur était une bonne chose, elle aidait à rester en vie, tant qu’on ne devenait pas prisonnier de ses terreurs, tétanisé par la peur, elle pouvait s’avérer être un combustible plus que correct pour prendre les bonnes décisions et avancer.

- Mes filles, mes sœurs, devant nous trois négriers en direction de terres encore inexplorées, d’une île inconnue et mystérieuse.

Elle allume une nouvelle cigarette et lentement son sourire carnassier s’étale sur son visage. Lentement ses pupilles se dilatent, la voix d’habitude détachée et rigide de la Capitaine prend un autre ton. Depuis qu’elle a été mise au courant, rien n’anime plus les pensées de l’Armure que cette île inexplorée et sauvage, le feu l’animant est très différent de celui des batailles, des conquêtes, l’inconnu ne demandant qu’à être découvert. Que l’île soit minuscule ou non, cela ne change rien. Car dans l’esprit de la pirate, germe doucement une idée folle, loin des sentiers des pillages et des attaques, loin du tumulte des océans.

- Cette île est peut-être habitée par des humains, des créatures repoussantes ou le foyer d’un monstre millénaire, cela ne changerait rien. Je revendiquerai cette île en notre nom, et si les Cieux le veulent, nous peupleront cette île, l’Iron Fleet construira son propre foyer et ne prendra d’ordres de personne. Pour un avenir libre, ou nous dicterons nos propres règles, ces caravelles doivent disparaître, et le log pose récupéré. Pour que nous puissions vivre dans la paix et la tranquillité, pour que nous puissions prospérer, des vies doivent être sacrifiées, pour le bien du plus grand nombre, cette expédition ne doit jamais arriver à son terme.

On pouvait accuser Izumi d’être beaucoup de choses, mais certainement pas une menteuse, l'honnêteté est bien ancrée dans les valeurs de l’équipage. Si l’Armure voyait dans cette opportunité la chance de se tailler un royaume sur des terres vierges de tout passage humain, fonder et établir une communauté, des villes lui donnerait au delà du prestige, un foyer, un endroit, un chez soi. Et que l’Iron Fleet se transforme d’une flotte pirate à une marine militaire d’un royaume indépendant. Beaucoup de rêves, d’ambitions, et avant de poser la première pierre il fallait récupérer la boussole qui les mènerait vers leur future nation.

- Harponnez à vue ! Attrapez moi ces chiens !

Une meute de prédateurs chassant des charognards, contrairement à ces derniers, Izumi et ses troupes n'attendaient pas que leurs proies meurent pour faire ripailles. Se salir les mains, c'était le quotidien des pirates.

- L’Index essuie des tentatives d'harponnage !

L’information fait le tour de la salle, des regards s’échangent. Et c’est Lewis qui se lève une fois de plus pour s’avancer au centre de la pièce. Il faut faire un choix, combattre en infériorité numérique avant d’arriver dans des eaux moins profondes où le navire amiral de l’Iron Fleet ne pourrait naviguer aussi aisément est sa meilleur option. Mais perdre une des trois caravelles maintenant, c’était déjà accepter la défaite.

- A bâbord toute, tir de suppression. Que le Columbus fasse de même, nous devons maintenir à distance ces misérables.

- Nous mettons les bouchés doubles dans les cales monsieur Sazowa, j’en attends de même de la part de vos hommes. Siffla la représentante de Colombe. Le ton était froid et presque hautain, aussi sèche et raiche que le fouet qu'utilisaient ses maîtres-esclavagistes dans les cales des trois navires de l'expédition.

Elle ne perdait rien pour attendre cette murène, contenant sa colère, du haut de ses trois mètres, le colosse se mit en marche en direction du pont supérieur.

- K’tal! Beugla l'ancien agent de sécurité, il sentait l'odeur de la mort et du tabac froid à vomir que traînait partout celui qu'il cherchait. Un cliquetis de bottines cloutées, descendant des escaliers menant à la barre, et l’odeur de tabac froid accompagnant son quartier-maître.

- J’suis dessus. Croassa son second, avant de ricaner à la manière de l'animal avec qui la totalité de l'équipage le comparait. Le corbeau et le vautour, et malgré son physique repoussant, l'intelligence malsaine de cet être immonde, le beau Sazowa savait s'entourer de personnages compétents.

Tout en bas de la pente, le sommet ne fait que s’éloigner.

- K’tal. Le ton de sa voix est glacial, et l'aura meurtrière qu'il dégage subitement provoque un hoquet chez son subalterne.

- Patron? Couine l'homme, à la manière d'un chien battu.

- Tu ne pourras sauver que ta peau, alors tâche de nous garder en vie.

Il ne regarde même pas le balafré lui servant de bras-droit, une charogne de la pire espèce. Pas un pirate, trop froussard pour s’aventurer sans garantie sur le Nouveau Monde, un meurtrier, boucher à la solde de n’importe qui pouvant payer son salaire. Un crachat et un mauvais sourire avant que le quartier-maître improvisé ne se mette à beugler sur ses hommes. Surveiller les siens, mais tant qu’ils naviguaient, chacun était forcé de faire avec l’autre, et la politique de tolérance zéro maintenait l’ordre dans les rangs de ses troupes.

Et maintenant que la tension montait de nouveau d’un cran, ils avaient encore moins d’autres solutions que le choix que de s'entraider.

Et alors que les navires changent de direction, fendant les flots pour se positionner de flanc et couvrir la retraite du Columbus. Les canons crachant des boulets en direction de leurs poursuivants, ces derniers changèrent de cap, ouvrant ce qui semblait être un très grand filet de pêche. Deux frégates à droite, une à gauche et l’immense pagode de guerre continuant de foncer droit devant, plus lente, l’Hagane No Nami comptait sur sa solidité et le danger que représentaient les frégates. Si la flotte expéditionnaire ne se remettait pas rapidement en route, ce n’était pas un seul d’un des bâtiments qui se retrouverait en danger, mais l'entièreté du groupe.

- En avant ! Préparez-vous à tirer sur les frégates ! Ordonne-il de son ton autoritaire habituel.

- Doucement les filles, ne confondons pas vitesse et précipitation.

Et alors que les boulets explosant dans une gerbe d’eau projettent éclaboussures sur le pont supérieur de l’Hagane No Nami, l’Armure reste parfaitement sereine. Le regard rivé

- Nous sommes presque à portée Capitaine.

Si la rapidité ne joue pas en la faveur de l’énorme pagode, l’armement et la puissance de feu dont dispose le navire amiral de la flotte en essor de l’Iron Fleet, était suffisante pour raser une ville. Et aucune ligne de vue n’était hors de portée des canons de l’Armure et de ses guerrières.

- Feu, sur celui qui fuit en ligne droite.

La stratégie était simple, et il n’y aurait pas de prisonniers jusqu’à l’interception du navire principal et du log pose menant à l’île inconnue. Des dix boulets, une demi-douzaine tombèrent à l’eau, l’un frôla le ponton supérieur de l’Index, arrachant une partie du bois avant de rejoindre les profondeurs. Deux autres arrachèrent un mât qui s’effondra en explosant sur le pont de la caravelle, la voile coulant, le dernier emporta des cabines à l’arrière du navire.

- Encore.

Qu’importe les pertes, qu’importe le nombre de vies qu’elle ferait disparaître. Izumi était en paix avec elle-même, innocents ou non, ils se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment. Prendre le temps d’aborder chacun des trois navires, c’était laisser une chance au navire amiral de filer vers l’île inconnue en toute impunité. Et ça ce n’était pas possible, et même si Izumi transformerait le moindre rocher en un paradis pour les siennes, réparer les crimes et effacer ses meurtres ne sera jamais possible. D’aucun dirait que l’Enfer l'attend, et ses partisans l’enverraient aux cieux, qu’importe la manière dont ils parleraient d’elle après sa mort, l’Armure ne serait plus là pour les écouter.

Avant le début de la fin, elle n’avait que la mort à donner. Pilonner la cible, jusqu’à ce qu’elle coule. Jusqu’à ce que les flots reprennent leurs droits. Le succès de l’opération reposait sur diviser et conquérir, l’Iron Fleet faisait bande à part et n’avait jusqu’à présent réellement rencontrer de flottes adverses, il était trop tard pour s’exercer, c’était maintenant ou jamais. Le temps manquait, et la demi-géante prenait son mal en patience. Avant la mort, Izumi profiterait de ces terres mystérieuses, ce de cette contrée inexplorée, elle et personne d’autre.

- Nous allons l’éperonner, soyez prêtes. Avec toute la vitesse dont nous disposons, on ne s’arrête pas, et trouvez-moi un moyen d’isoler l’un des deux restants. Tonne-elle en couvrant du mieux qu'elle le peut le bruit des canons.

Les directives continuaient de fuser, sa horde de guerrières, marins et fantassins, polyvalents comme l’avait rêvé la capitaine. Tellement loin de son île natale, tellement proche de la grandeur. La fièvre de la gloire, de l’exploration avait pris possession de son corps, ce n’était plus simplement de l’ambition mal placée, mais un désir réel et sincère de s’établir quelque part. Au bout du monde connu,  fonder une communauté, un peuplement et …

- Accrochez-vous !

Impact imminent, pourtant son regard était absent. Insensible à la pression, ses iris pourpres fixant les deux navires plus loin dans le levant, lequel des deux renfermait ce qui l’intéressait ? Et comment faire en sorte de le découvrir plus rapidement, quelle meilleure manière de résoudre cette énigme que de réduire le nombre d’options.

Le bruit sourd, l'explosion de bois alors que l'immense pagode de guerre éventre ce qui semble en comparaison n'être qu'une frêle coque de bois. La secousse qui traverse l'Hagane No Nami ne l'empêche pas de continuer sa folle élancée. Et des deux côtes du navire amiral de l'Iron Fleet, les canons s'ajustent prêt à réduire en charpie, les survivants, esclaves ou membre des forces de sécurité de Sazowa, qu'importe, alors que lentement parmi les débris et les morceaux d'épaves, les survivants s'accrochaient du mieux qu'ils pouvaient.

- Jetez des chaloupes à la mer et accrochez les au navire. Celles qui survivent seront digne de monter à bord. En avant, il nous reste encore une chance sur deux de couler le mauvais.

Le den-den de l'Index restait silencieux, la salle entière muette se retourna vers Lewis, pour y voir le visage déformé par la colère du responsable d'expédition. Mais étrangement il n'explosa pas, ne passa ses nerfs sur le centre de commandement de la flotte sous sa supervision, passant une main dans sa chevelure et faisant fi de la tension et de la peur rampant parmi son équipage.

- Ceux qui étaient en charge de l'Index, dehors et rendez vous utile. Pour le reste, passez moi le capitaine du Columbus et sortez de la pièce. Tout le monde dehors, l'heure n'est plus à la communication, mais à la réaction !

Les visages déconfits de ses hommes s'observèrent une seconde avant de déguerpir en fermant derrière les portes de la salle. Les bureaux, le mobilier, les chaises Sazowa réduisit tout ce qui passa sous ses mains en charpie, avant de se retourner en direction de l'escargophone en liaison avec son dernier navire.

- Capitaine, la perte de l'Index nécessite la prise de mesures drastiques.

Il n'y eu d'abord aucune réponse, si bien que l'espace d'un instant l'ancien garde du corps cru que le Columbus avait également été coulé.

- C'est après le log pose qu'ils en ont, vos ordres sont de nous dépasser. Avec un peu de chance nous gagnerons assez de temps pour que vous puissiez atteindre un port en toute sécurité. Utilisez toute votre vitesse disponible, saignez vos esclaves à blanc, qu'importe les moyens et ce que cela nécessite. J'assumerai mon devoir et mes responsabilités jusqu'au bout, bonne chance capitaine.

Il raccrocha avant de laisser le temps à son interlocuteur de répondre, et sorti de nouveau sur le pont supérieur du Splendide, et afficha immédiatement un sourire en apercevant le dynamisme de son équipage, et l'ordre qui régnait à bord. K'tal était encore plus d'humeur tranchante que d'habitude, et n'hésitait pas à terroriser les plus faibles pour inspirer le reste à faire mieux. La méthode brutale portait ses fruits jusqu'au point de rupture, et Lewis comptait bien ne jamais l'atteindre. Les esclaves dans la cale qui ramaient à un rythme effréné représentait déjà une menace considérable si la situation continuait de lui échapper.

- Le Columbus nous dépasse !

Le Vautour afficha un sourire carnassier, avant de monter à la barre et d'observer à la droite du Splendide, le Columbus fendant les flots avec la mort aux trousses. Tout se passait exactement comme prévu, c'était le meilleur plan qu'il pouvait réaliser avec les moyens dont il disposait encore. Plus qu'à espérer que l'Armure tomberait dans son piège, chaque navire qui se concentrait sur la poursuite du Columbus était un de moins à la poursuite du sien, et c'était bien le sien qui comptait le plus.

Une première secousse, puis une autre, les gerbes d'eau tombent sur le pont supérieur du Splendide, et K'tal semble encore plus donner de la voix. Sazowa se retourne pour taper du poing sur la rembarde en bois à laquelle il s'accoude et son visage une fois de plus se crispe sous la colère et la pression qui ne fait que s'intensifier.

- Dégage.

Et il jette au sol le navigateur avant de prendre la barre, le Splendide sous son impulsion se mit à zigzaguer pour éviter les tirs et les boulets de canons fusant et tombant de plus en plus proche du navire. D'un coup raiche sur la barre, il n'eu pas besoin de prévenir K'tal de ses intentions pour que ce dernier ne fasse tonner les propres canons du Splendide tandis que Lewis entamait une manœuvre pour de nouveau repositionner son navire. Un flanc à la fois en continuant de foncer vers Terra Incognita, le Columbus lui avait deux frégates à ses trousses et au vu des exclamations de la vigie, cela ne semblait pas bien se passer pour l'équipage de l'autre dernier navire de la première flotte expéditionnaire financée par Christine Colombe. Tout en bas de la pente, le sommet ne fait que s'éloigner, et Lewis avait bien l'impression de continuer de tomber de mal en pis, les expressions ne manquaient pour décrire la situation catastrophique, sa seule garantie c'était que le Splendide ne finirait pas par rejoindre les profondeurs, du moins avant que les pirates n'aient mit la main dessus.

Ils ne tenteraient donc pas de tirs trop proche de la coque au point de faire couler l'expédition et le log pose avec. Le Columbus aurait déjà coulé sinon, et ce n'était pas encore le cas. Incapable de distinguer désormais lequel des deux bateaux abritaient le trésor convoité par l'Iron Fleet, Lewis Sazowa comptait bien capitaliser sur ce répit avant que ne s'abatte l'épée de Damoclès au dessus de sa tête.

- Ils ont harponnés le Columbus !

L'information lui donna un regain d'énergie, filer aussi vite que possible pendant que les prédateurs dévoraient le plus faible du troupeau, mais l'Alpha survivrait. Le Charognard reviendrait se repaître des restes des pirates avec les moyens colossaux de son employeur. Du coin de l'œil, il observa les deux frégates se rapprocher et le début de l'abordage, le temps jouait désormais encore plus contre lui, lorsque les pirates se rendraient compte de la supercherie, le reste de la flotte convergerait pour entièrement écraser l'expédition.

- Attention ! Bâbord toute !

Trop tard.

Il fut projeté contre le sol et perdit connaissance avant même d'entendre la secousse. Le Vautour avait du plomb dans les ailes.

- Comment peux-tu être certaine qu'il s'agit du bon ? Les canons tonnaient, mais Elizia s'était faite entendre. La demi-géante lui tournait le dos, haussant des épaules Izumi tourna légèrement la tête en direction de sa seconde. Une cigarette en bouche, sur laquelle, étrangement elle ne tirait pas vraiment laissant la cendre se consumer, entre son index et son pouce elle écrasa le mégot dans le cendrier.

- Je ne suis certaine de rien Elizia, mais j'ai confiance en les miennes, la vitesse de notre proie est supérieure à celle de l'Hagane, l'Usure et le Volcanique suffiront pour se rendre compte rapidement si notre objectif est sur celui que nous filons ou non.

La demi-géante se tourna entièrement vers l'ancienne tueuse à gages et l'espace d'un instant, un frisson parcouru l'échine de l'ancienne noble. Izumi n'était plus seulement l'Armure, le regard que posa la forgeronne sur son bras-droit n'était pas agressif ni meurtrier, aucune colère, simplement la froideur et une grandeur dépassant son statue de pirate, Elizia ne pouvait réellement poser les mots sur ce qu'elle ressentit mais ce n'était pas du charisme. Autre chose, se sentir si petit en comparaison de la capitaine de l'Iron Fleet que s'en était absurde, mais dans ces prunelles pourpres Izumi avait montrer le vide et l'écart abyssale les séparant. Tout questionnement avait quitté l'esprit d'Elizia, la femme à la chevelure immaculée comme sa capitaine avait perdue tout manque de confiance aussi temporaire qu'il avait été, pire encore elle se sentait presque coupable et honteuse d'avoir douter du plan de la Supernova.

- Tu as entraînée ces femmes, tu connais leurs compétences, leurs aptitudes. Nous connaissons toutes les deux les limites de chacune d'entre elles, nous n'avons pas besoin de certitudes Elizia. Nous n'avons plus besoin de choisir ou concentrer nos forces.

Izumi s'était retournée de nouveau, le ton de sa voix calme, était de nouveau celui qu'elle employait quand elle parlait à sa plus proche conseillère. Amical, avec une certaine douceur, la demi-géante était redescendu et toute tension s'était envolée, une main sur le pommeau de Menteuse à sa ceinture, l'autre posée sur la proue du navire amiral de sa flotte la forgeronne continuait de fixer l'horizon et le dernier des trois navires expéditionnaires.

- Souviens toi, combien nous étions au début. De nos premières exactions je n'ai rien oubliée, des deux dernières années et de qui j'étais non plus. De Las Camp à affronter et survivre un affrontement contre un Empereur, nous avons parcouru les océans, j'ai vécue... Elle s'arrête un instant. Nous avons vécues, traversées et surmontées plus d'épreuves que la majorité des êtres vivants vivront jamais dans leurs vies. Et pourtant, je n'ai jamais ressentie un sentiment d'anxiété pareil, mon corps tout entier, mon être est appelé par la promesse de ce que notre cible renferme.

Elles s'étaient battus contre des ennemis beaucoup plus fort que celui d'aujourd'hui, avec moins de moyens, la victoire leurs appartiendrait, ce n'était désormais plus une question. Mais Izumi se projetait déjà découvrant les côtes de ce territoire inexploré, vierge de la corruption du monde extérieur. La seule question que se posait la demi-géante était très simple.

- Habitable ou non ? Tous nos efforts, notre avenir réside dans la réponse à cette question qui me hante depuis que nous sommes sur la trace de cette expédition.

Elizia restait muette, attendant qu'Izumi ne finisse de parler, la demi-géante disait vrai. Il était tellement plus simple de passer sa vie entière à voguer sur les Océans, sans jamais trouver réellement de pied à terre.

- L'Eveillé a réussit son harponnage !

Elizia se retourna en entendant la nouvelle, la forgeronne resta de marbre, ses subalternes ne pouvaient voir pas son visage déformé par la joie l'espace d'un instant avant de reprendre son calme olympien.

- Préparez-vous à l'abordage. Occupez-vous des mâts adverse, immobilisez la cible. Qu'Aera se tienne prête à prendre d'assaut le navire, et chacune à son poste. Maintenez moi au courant si Eleanor et Strenght trouvent le log pose, et doucement sur les esclaves. Nous aurons besoin de tous les bras disponible sur place.

Traversant les rangs de ses filles, l'Armure se prépare à l'impact et à la brutalité des affrontements imminents. Une corde s'enroulant autour de son bras gauche, et alors que l'Hagane percute le flanc du navire désormais immobilisé, que les canons tonnent de chaque côté, Izumi s'élance dans le vide, Menteuse dans la main droite une lame de vent puis une autre s'abat sur le Splendide réduisant au silence une partie de sa batterie de canons menaçant l'Hagane. Menteuse sectionne encore d'une lame de vent un des mâts qui s'écrase en deux sur le pont supérieur du Splendide. Atterrissant en roulant au milieu des rangs ennemis, elle se relève un sourire carnassier qu'elle révèle aux membres de l'expédition encore incertains et n'osant pas se jeter sur elle. Dégainant un autre sabre, alors que ses adversaires reprennent leurs esprits et se jette sur elle, claquant sa langue, elle ne prête pas attention aux cris à sa gauche tandis que Aera et les Immaculées se taillent un chemin en abordant le navire d'exploration de Christine Colombe.

- Ne restez pas là à attendre la mort, bougez vous bande de chiens ! C'est vous ou elles !

Une voix domine les cris des défenseurs, celui qu'elle devine être le quartier maître fouette les airs pour arranger les troupes expéditionnaires.

- Dégagez le chemin pour la Capitaine !

Elizia se jette sur son alter-égo maléfique, second contre second, ne reste plus que le capitaine, la bataille et la mêlée général se répandant petit à petit sur l'entièreté du pont supérieur du Splendide. L'Iron Fleet ne demandait pas, l'Iron Fleet ne demanderait plus. L'indépendance était à portée de bras, Izumi perdit un instant le fil de la bataille, et le retour à réalité l'envoya s'écraser contre un autre mât. Comme un boulet de canon, les combats s'arrêtèrent un instant, alors que le Vautour essuyant le sang sur ses lèvres, le regard noir de haine et un sourire de dément sur le visage, se jetait enfin dans la bataille. Sa jambe droite avait fendu l'air à une vitesse inhumaine, Sazowa de son air supérieur fit deux pas en avant, au milieu des troupes des deux camps, une main pour se recoiffer et un regard plissé en attendant la réaction de l'Armure.

La jeune femme se relevait, le visage fixant le sol, sur le bois du pont supérieur du Splendide, craquant ses articulations et tournant des épaules, craquant son cou et sa mâchoire pour finalement relever la tête. Les pupilles dilatés, comme des billes au fond des ses yeux, deux billes pourpre et les veines apparentes, la Supernova avait une arcade cassée, le visage tuméfié mais aucune blessures autre que superficiels. Et pour cause, la couloir noir qu'avait prit ses avants bras, Menteuse et son autre sabre disparaissait peu à peu, alors que la demi-géante s'avançait de son côté aussi vers son adversaire herculéen. Les lames de vent projetés par les armes de l'Armure rencontrèrent la résistance de Lewis, recouvrant son corps du fluide du combattant, Izumi nota avec agacement que son adversaire maîtrisait lui aussi le fluide de l'armement.

Beaucoup au départ, peu à l'arrivée. L'Iron Fleet avait la supériorité numérique, les espoirs de l'expédition reposait sur les épaules de Lewis Sazowa, et la gueule d'ange le savait très bien, il se mit en garde à la manière d'un boxeur. Sautillant sur place, certain de son agilité et de sa vitesse, il ne craignait pas les armes de la jeune femme, et pour lui prouver sa supériorité et renverser l'issue de la bataille il se projeta d'un bond sur Izumi. La demi-géante recula, et opposa Menteuse recouverte de son haki aux poings s'abattant sur elle. Si le colosse avait débuté les hostilités, Izumi ne perdait pas réellement de terrain, et il devint rapidement évident qu'hormis l'attaque du au manque de concentration de la jeune femme, les deux étaient du même niveau.

Les combats reprirent, la mêlée général se transformant lentement en carnage. Sara et les guerrières en armures dorés se taillaient à chemin à sa droite, Elizia et le Golden Order épaulant l'avancée de leurs sœurs, l'élite de l'équipage dominait les troupes de Christine Colombe, et K'tal semblait bien dépassé en affrontant deux adversaires à la fois.

Sur sa gauche, Aera et les Immaculées encaissait les vagues d'ennemis, ne pouvant dominer et l'emporter sans des pertes inutiles, elles ne tenteraient pas de folie. Ce n'était pas nécessaire, bientôt le flanc droit irait collapser sur les derniers défenseurs du pont supérieur. Et ensuite, et ensuite direction la cale et les entrailles du Splendide, en libérant les esclaves elles acculeraient les derniers hommes du Vautour, et signeraient sa fin.

- Allez chercher Tealia, servez-vous des esclaves imbéciles ! Beugla l'éphèbe, arrachant une partie du mât effondré, il força Izumi à reculer devant la distance qu'il pouvait couvrir avec son arme improvisé. Il l'abattit pour écraser ce qu'il considérait être une insecte à ses yeux, mais Izumi en profita pour sauter dessus, et lui assena un coup de pied empli de haki qu'il encaissa sans broncher de sa propre peau recouvert de la même couleur de jais.

- Le log pose est sur ce navire ! L'information qui lui parvient via le mini escargophone qui en guise de montre à son poignée, retransmet la voix de Rosa la médecin de l'équipage restée sur l'Hagane No Nami pour transmettre les informations entre chaque front.

- Elizia, le log pose est ici ! Trouvez le ! C'est à son tour de sourire, tandis que Lewis affiche une mine déconfite, c'est à elle de rafler la mise. C'est à ses filles de faire leurs preuves, c'est à l'entraînement draconien et les différentes mises en situations réelles de porter leurs fruits. L'aboutissement de l'ensemble de ces efforts doit aujourd'hui être récompensé.

- La différence entre toi et moi Sazowa, c'est que mes filles tiennent leurs langues, même sous l'emprise de l'alcool ou d'autres substances. Se moqua Izumi d'un ton cynique, le fer rencontra de nouveau les poings puissants de l'homme de Colombe. Un voile d'incompréhension se posa sur son visage un instant, la forgeronne ne quittait pas des yeux le Vautour, son corps instinctivement contrait les attaques évidentes de son adversaire. Puis quelque chose changea dans son regard, et il comprit. Et en prenant connaissance, en trouvant la réponse à la question qui le hantait depuis le début de cette course poursuite, il tressaillit de rage.

De manière consciencieuse, Izumi avait ses recherches et son travail. Une opportunité comme celle-ci ne se refusait pas, et passer à côté l'aurait rendu malade. Elle avait un nom sur son employeur et le sien, et Colombe ne lui faisait pas peur. L'Iron Fleet ne cesserait de s'agrandir, Izumi ne cesserait de gagner en force, et dans son sillon tout l'équipage s'endurcirait. De cette organisation militaire, de cette idée qui se dessinait désormais nettement dans l'esprit de la capitaine et des siennes, naîtrait quelque chose dépassant toutes ses attentes.

Les charognards n'auraient pas leurs place dans le rêve de la demi-géante.

- Avancez ! Ils sont en déroute ! Un coup de crosse pour briser le crane d'un insolent, et Strenght prit appui sur son corps pour relâcher deux cartouches de son fusil à pompe, la chevrotine explosa les corps des malheureux se repliant. Les IronBorn derrière elle, engoncés derrière leurs armures et plus proche de l'automate que de l'humain aux premiers abords, les guerrières de la cinquième lieutenante de l'équipage ne faisait pas dans la dentelle. Le log pose n'était pas sur ce navire, et cette nouvelle avait rendue folle de rage Strenght, les ordres de Rosa par le biais de l'escargophone l'avait poussée à intensifier le rythme et la pression sur les défenseurs du Columbus. Elle repoussa un coup d'épée avec l'Usage Modérée de la Force, sa pétoire qui ne l'avait pas quittée depuis Las Camp, toujours présente, toujours parfaitement lustrée et en état de fonctionner à n'importe quel moment.

Un coup de pied qui projette par dessus bord l'adversaire de Vitalia "Strenght", et Eleanor la troisième lieutenante de l'Iron Fleet intervenait pour aider celle avec qui elle partageait tant. La même haine de l'esclavage, la même juste rage que les deux femmes délivraient sur les hommes de Colombe. Eleanor était une longue jambe, et dans des combats aussi rapprochés que ça, elle excellait. Les Filles Du Serpent continuaient de faire feu et avançaient en rang serrés, à l'abris derrière les Ironborns qui faisaient office de première ligne contre les défenseurs du Columbus, qui avaient rapidement abandonnés le pont supérieur pour se barricader à l'arrière du navire dans les cabines menant aux niveaux inférieurs du navire.

- Les esclaves, nous devons sauver les esclaves. S'enquit WhiteDawn, le destin apprendrait à ces misérables ce qu'il en coûtait d'enchainer et de priver la liberté des êtres vivants. Une sorte de thérapie pour celles qui avaient vécus trop de fois dans la peur, de finir vendu. Ou de perdre jusqu'à sa propre identité, de n'être qu'un mannequin, une coquille vide aux ordres d'un maître. Un coup de pied, puis un autre, pour faire un trou dans le plancher.Pousse toi, Eleanor. Strenght pointe son arme vers le sol, et en appuyant sur la détente, explose le bois et ouvre un nouveau chemin. Levant sa main droite, elle intime à plusieurs dizaines d'Ironborn de la suivre, un clin d'œil en direction de la longue jambe. Presque immédiatement, des cris, des coups de feu et les combats qui se propagent à tous les niveaux.

La troisième lieutenante esquisse un léger sourire avant d'esquiver d'un bond une autre attaque adverse. La chute du Columbus n'est désormais plus qu'une question de temps. En se barricadant, sous l'impulsion d'un Capitaine lâche et prêt à tout pour sauver sa vie, il condamna ses troupes avec. La supériorité numérique de l'Iron Fleet marchait comme l'avait anticipée l'Armure. Un signe de la tête et les Filles du Serpent se remirent en marche et à l'instar de Vitalia, Eleanor sauta accompagnée de ses guerrières pour descendre dans les ponts inférieurs du navire expéditionnaire, les esclaves sa priorité. Conformément aux règles de l'équipage, seul les femmes auraient une chance de repartir avec l'Iron Fleet, si Izumi libérait sans distinction de sexe, la demi-géante ne sauverait que les femmes.

Izumi avait gagné dès l'instant ou son regard s'était posé sur l'expédition et ce qu'elle renfermait. S'attaquer à plus fort qu'elle ? Quel intérêt ? Pourquoi s'infliger des épreuves trop difficiles, alors qu'il était tellement plus plaisant de vaincre plus faible que soit, si elle cherchait l'adrénaline elle affronterait des adversaires de son niveau.

Comme elle le faisait actuellement, le souffle légèrement saccadé, elle prenait de grandes inspirations, les cheveux tombant le long de son visage. Le Vautour n'avait visiblement pas rencontré pareil embûche depuis un moment, il semblait nettement plus noyé dans le combat que la Supernova, sortir la tête de l'eau, analyser après chaque round l'état physique et le comportement, l'attitude reflétant le mental de son ennemi.

- Te penses-tu suffisamment forte et préparée pour l'emporter contre mon employeuse, pirate ?La question était sincère, avançant en crabe, tournant autour d'Izumi comme elle tournait autour de lui, c'était à son tour de poser les questions. Rien n'obligeait la jeune femme à lui répondre, mais d'un air narquois, en restant sur ses gardes, elle lui répondit ainsi. Penses-tu que Christine Colombe, ferait mieux que toi ?Répondre à une question par une autre, et toujours redonner la patate chaude à l'adversaire. Si il réfléchissait, il perdrait en réactivité, si il répondait, il prenait le risque de définitivement se saper le moral. Mais en avait-il besoin ? Survivre, même le type le plus démoralisé au dos du mur se transformait en bête sauvage, à condition d'en avoir dans les tripes. Face à la mort, la véritable personnalité de chacun se révélait, Lewis ne changeait pas, il lui semblait inconcevable d'être dans pareil position, pourtant alors que des cris s'intensifièrent derrière lui, le Vautour enterra pour de bon l'idée d'atteindre Terra Incognita, il pouvait encore s'en sortir en négociant sa vie contre celle de l'Armure. Il lui suffisait juste de prendre l'avantage, puisant dans ses réserves il s'élança de nouveau vers la demi-géante, Izumi grimaça puis se prépara à recevoir le choc de l'attaque.

Si la maîtrise du haki de l'armement allait à son adversaire, la capitaine ne cherchait pas véritablement à imposer son rythme à Sazowa, que lui colosse dicte le jeu et prenne l'initiative lui allait entièrement. Un grognement, et deux lames de vents projetés par Menteuse pour s'assurer que la distance entre elle et son opposant ne se réduise trop, à bout portant les poings du Vautour ne pardonneraient pas.

Prendre son mal en patience, ce n'était pas grave si la forgeronne se contentait de contrer, de parer ou d'esquiver les attaques du responsable d'expédition. Ce n'était pas la tête du colosse que désirait la pirate à la chevelure immaculée, mais ce qui lui permettait de maintenir un cap vers une île légendaire, Lewis s'entêtait et se renfermait dans ce duel, avait-il d'autre options ? Pensait-il qu'en venant à bout de l'Armure, son équipage déposerait les armes ? C'était une approche logique, et la seule encore viable dans une situation aussi catastrophique que celle-là.

Elizia et Sara avaient repoussées K'tal et le gros des défenseurs du pont supérieur, les corps jonchant le sol appartenaient en grande majorité à l'équipage du Splendide.

- J'ai !

Hurla Elizia, instantanément l'attention se porta sur elle, et comme des enragés les hommes du Vautour se jetèrent sur elle, pour s'empaler sur les lames des guerrières de l'Ordre Doré. Ce fut également à ce moment que Tealia et une partie de ses maîtres esclavagiste débarqua avec des esclaves autour d'eux en guise de rempart humain, la secrétaire de Colombe découvrit avec l'horreur l'ampleur des dégâts, et la situation désastreuse du Splendide. Immédiatement ou presque, une partie des enchaînés se dispersa, lorsqu'ils virent que les guerrières de l'Armure se contentaient de les pousser et ne cherchait pas à les éliminer, Tealia blêmit encore plus.

Le sang qui coula ne fut pas le sien, Elizia utilisa sa maîtrise des cordages pour ligoter la dernière arrivée sur le champ de bataille.

- K'tal ! Cria Lewis, s'attendant à entendre la voix désagréable de son second, mais tellement précieuse à cet instant.

Une tête roula à ses pieds, et il ne baissa même pas les yeux pour la regarder. Ses derniers hommes succombaient, mais lui ne se rendait pas. Comme un lion en cage, même acculé la force incroyable et la puissance qui était sienne lui garantissait une victoire contre n'importe laquelle des soldates de l'Armure.

- Trois minutes, pour sauver ce que vous pouvez en bas. Annonça Izumi. Et tu penses que je vais vous laissez faire ? Beugla en chargeant comme un buffle la jeune femme. Il ne reçut aucune réponse, les fous et les désespérés n'avaient pas besoin de réponse.

Juste d'être entendu.

- Le Columbus est notre.

Il faudrait des réparations, des travaux pour adapter le navire au modèle des frégates de l'Iron Fleet, un nouveau mât, des nouveaux canons. Il faudrait des efforts, mais le Columbus avait changé de propriétaire, un navire de plus pour la flotte de fer. Izumi avait désormais suffisamment de ressources pour opérer en indépendant, et plus encore, rien ne semblait arrêter l'ascension de l'Armure, pourtant la demi-géante ne laissait rien paraître, car la jeune femme considérait encore que ce temps perdu ne se rattraperait pas.

Bien plus, il lui en fallait tellement plus. A chaque fois que les rangs de son équipage grandissaient, Izumi haussait un peu plus le niveau de ses attentes. Repayer le soutien de ces femmes, de ses filles, la forgeronne connaissait le nom de chacune de ses filles. Et chaque fois qu'une vie s'arrêtait, que l'Iron Fleet pleurait ses disparues, c'était un visage qui jamais ne s'effaçait de la mémoire de l'Armure. Pour les vivantes et surtout pour les mortes, la capitaine pirate ne se reposerait pas avant d'avoir construit un refuge, un pays pour ses disciples. Le sacrifice de sa personne, n'était qu'un faible prix à payer pour ce qu'elle possédait. Il lui était bien évidemment hors de question de mettre des mots sur ce qu'elle ressentait face à tout son équipage, et il n'y avait nul besoin de le faire, peu bavarde pourtant chacune de ses guerrières jamais n'avait remit sa loyauté en question.

Alors quand Lewis tenta de se jeter sur Elizia, ce fut Izumi qui intercepta le coup, et la douleur qui lui transperça le corps ne l'empêcha pas de protéger sa seconde. Prenant appuie sur sa jambe gauche, elle repoussa Sazowa, et l'attrapa de son bras droit par les cheveux avant d'écraser son visage dans le sol du navire. Un grognement et l'ancienne tueuse à gages tournait les talons en laissant échapper un juron. L'objectif restait le même, qu'importe l'état de l'Armure et le nombre de mortes, qu'importe le rang, la position, chaque membre de l'équipage savait que les prochains mois seraient rudes et potentiellement mortels.

Et elles n'avaient même pas encore accosté sur l'île, ni découvert les rivages de cette dernière. Un souffle rauque, une sensation de vertige lancinante, Izumi secoue la tête, le combat n'est pas encore terminé. Le Vautour n'est pas mort, le charognard se relève en titubant, le charognard est dans le même état que son adversaire, le sang qui coule le long de son visage, il retire des morceaux de bois de son corps sans jamais quitter la femme des yeux. L'ancien agent de sécurité s'accroche à ce qu'il peut, prendre la vie de l'Armure et l'emmener avec elle en enfer, le log pose file vers le navire amiral des pirates, il est trop tard pour le rattraper. Le laisser seul sur le Splendide et couler le navire, c'est probablement ce qu'elles comptaient faire non ?

- Evacuez le navire !

Eata sonna la retraite, les esclaves fuyaient par dizaines les cales, remontant sur le pont supérieur tandis que les dernières poches de résistances du Splendide tenaient encore bon. Couvrir les esclaves libérés restait la priorité, un front unifié maintenant à distance les sbires du Vautour, les passerelles de l'Hagane No Nami assaillit par les femmes et hommes trop heureux de se voir délivrés de leurs chaînes pour questionner l'identité de leurs libératrices. Le rideau allait bientôt tomber, le spectacle touchait à sa fin. Le Capitaine coulerait avec son navire, Sazowa ne pourrait se dérober à l'adage, Izumi ne le permettrait pas.

Bien que les deux adversaires semblaient égaux en tout point, lorsque Izumi se dressa en travers du chemin de Lewis, l'espace d'un instant, elle lui para bien plus grande qu'elle ne l'était. La froideur de son regard, l'intensité de la haine et la colère qui brûlait en son fort intérieur décontenança l'employé de Colombe. Il ne comprenait pas, et l'Armure n'aurait sans doute pas comprit si la situation s'était déroulée il y a deux ans. Sortie de son cocon de solitude, par la force et la dédication de celles qui l'accompagnait, le Vautour lui rappelait l'un des multiples futurs qu'elle aurait pu emprunter, si l'Iron Fleet ne l'avait pas forgé. L'Armure, ce surnom n'était plus aux goûts du jour, dépassé, la figure solitaire et renfrogné de la demi-géante avait changé, au delà de l'abandon de son heaume, et sa tête désormais en affiche et mise à prix, Izumi s'était lentement ouverte au monde extérieur. Le plus grand équipage de femmes que l'histoire avait connu depuis l'Impératrice Amazone Boa Hancock, et encore au rythme ou ça allait bientôt ce serait des milliers de guerrières qui combattraient sous la bannière et le Jolly Roger de l'Iron Fleet.

Elle ne pouvait pas perdre, elle inspira profondément avant d'hurler en vidant tout l'air disponible dans ses poumons, une rage primitive rappelant ses premières exactions. De ses entrailles cri puissant transperça le champ de bataille et Eleanor jura l'avoir entendu depuis le Columbus, guttural et terrifiant à la hauteur de ce qu'elle devait être aujourd'hui et à jamais si elle pouvait réaliser ses rêves. Les lames de vents qui s'abattirent comme une bourrasque, comme un vent furieux et vengeur sur le colosse le firent reculer, son corps couvert de haki lui évitait d'être tailladé mais il perdait tout de même du terrain. Et surtout, le pont supérieur du Splendide était progressivement réduit en charpie, et Lewis se retrouva à sauter pour garder rester à niveau et éviter de tomber trop bas.

Izumi elle avançait, réprimant une poussée de larmes tant elle avait mal, la demi-géante avançait. Son adversaire perdait pied, elle dictait enfin le déroulé du combat, la patience et la résilience dont elle avait fait preuve tout au court du combat payaient enfin. Un sourire niais se dessina sur le visage tuméfié de la jeune femme, les vertiges revenaient et elle n'avait plus la force de lutter. Les cris d'Elizia ne lui parvenaient pas, le monde, le paysage et l'horizon devenaient de plus en plus flou, secouant la tête la pirate manqua de tituber.

- Nous ne méritons pas de souiller cette terre de nos pas.

Elle retira son plastron, manquant d'étouffer en cherchant la brise terriblement absente. Sazowa jurait, mais elle ne l'entendait pas non plus. Il trébucha et tomba au travers du pont inférieur en le traversant de tout son poids, et termina sa chute dans la cale, le charognard n'avait pas encore rendue son dernier souffle, il se relevait péniblement. Izumi s'appuya sur Menteuse pour rester debout. Qu'est ce qu'elle avait mal aux côtes, les canons ne tarderaient pas à envoyer par le fond le Splendide et l'expédition financée par Christine Colombe, une première secousse la fit tomber à genoux.

- Izumi !

Elizia ? La voix de sa seconde la ramena à la réalité, crachant un mélange de bile et de sang, elle se redressa comme un fantôme. A sa droite la dernière passerelle pas relevée de l'Hagane No Nami, devant elle et plus exactement au dessus d'elle, sa plus fidèle conseillère le visage livide trahissant les émotions et la peur de la femme. Idiote marmonna la forgeronne avant d'avancer vers le bord du Splendide. Une autre secousse la projeta contre le rebord du bâtiment, et Izumi abandonna l'idée d'atteindre la passerelle. Et Elizia l'avait comprit, car elle était déjà suspendue à la rembarde du navire de l'Hagane No Nami, ses cordages et son art du Rope Action lui donnant le champ libre dans ses dangereuses manœuvres.

- L'Armure !

Au revoir charognard, aujourd'hui les rôles s'inversent, adieu Lewis Sazowa homme de peu de foi, préférant diriger par la peur que la confiance, achetant la loyauté plutôt que de la mériter. Adieu, esclavagiste, adieu petit homme malgré un physique herculéen. Izumi s'élance saute hors du Splendide alors qu'Elizia enlace son corps de cordes, et ensuite tout est noir. Les abysses et les limbes ne l'emprisonnent pourtant pas si longtemps que ça, un premier réveil à la lueur de la table d'opération de l'Hagane, une autre perte de connaissance, des souvenirs brumeux lorsqu'on la transporte jusque dans ses quartiers puis de nouveau plus rien, en sursaut elle se redresse la fièvre la renvoie brutalement à la réalité. Des bandages sur tout une toute partie du corps et un mal de crâne à assommer un monstre marin, mais elle respire et est en vie.

- Nous avons ce que nous voulions. Fermant les portes derrière elle, Elizia parle doucement avant de poser sur le lit et à portée de l'Armure l'objet de ses convoitises.

- Sazowa ? S'enquiert la demi-géante, chaque mot lui coûte mais qu'importe, pas besoin de longs discours pour avoir les réponses à ses interrogations. Aucune trace de lui, nous sommes partis lorsque le Splendide était en proie aux flammes et coulait. Tu ne veux pas savoir comment nous t'avons récupérée ? Le ton légèrement moqueur de l'ancienne tueuse à gages ne rencontre que la mine renfrogné de l'Armure qui lève avec toute sa force son majeur droit en direction de sa plus proche conseillère. Soit, mais sache que si tu veux savoir pourquoi tu as aussi mal au crâne je te conseille de demander à Eata qui est en ce moment même entrain de colmater la brèche causée par ton "saut". Ceci explique cela, quant au nombre d'esclaves que les pirates avaient libérés, cela attendrait que la Supernova soit un peu plus en forme. Il était l'heure de panser ses blessures et de se préparer pour l'expédition.

- Tu as reçus un appel, mais tu étais inconsciente alors j'ai répondu. Avant que ne puisse demander de quoi il en retourne, l'autre continue. Azeglio, le capitaine des Sandstorms, l'opération dont il te parlait va bientôt commencer. Il voulait savoir si tu étais toujours partante.

- Et quelle a été ta réponse ? Demande en souriant d'avance l'Armure en fixant sa seconde.

- Que nous étions déjà en route, et qu'il avait intérêt à ne pas décevoir.