Avez-vous déjà entendu parler du rêve Amerzonien ? Non ? C'est que vous n'avez jamais été assez désespéré, tout simplement. Le terme de cauchemar serait plus approprié, mais s'il était utilisé plus personne ne viendrait immigrer sur cette maudite île. Encore une fois, "s'exiler" conviendrait mieux, cet endroit était la décharge humaine du gouvernement, la poubelle du monde, un lieu pire que le suicide puisqu'au moins en crevant la souffrance disparaissait. L'Amerzone était remplie d'hommes et femmes paradoxaux, trop lâches pour crever rapidement et suffisamment courageux pour affronter avec panache une vie de misère en enfer.
L'explication qu'avait trouvée Olek du haut de ses seize ans à cette incohérence était simple, l'humain était un animal qui s'adaptait à tout, pire qu'un cafard pondant ses œufs lorsqu'on l'écrasait, les hommes pullulaient même dans les environnements les plus hostiles, littéralement increvables. Et pourtant, dieu sait qu'ils étaient un paquet à clamser en Amerzone, tous les jours et de mille manières différentes, mais quelque fut la quantité de morts, les vivants étaient toujours plus nombreux. L'endroit était une destination touristique pour la raclure, un havre de paix pour les criminels, un parc d'attractions pour les sociopathes et voyait ses rangs se renflouer aussi certainement qu'un navire d'eau à cause de sa coque trouée. Tout n'était pas noir, l'espoir persistait, grabataire, mais encore vivant. Les gens du coin se plaisaient à penser que tout comme le temps qui transformait les restes et la merde en compost, la vermine d'Amerzone était elle aussi capable d'évoluer, de servir à quelque chose de plus grand et de positif.
Le jeune Olek n'était pas du même avis, il n'y avait rien de positif dans ce trou à rats, sauf si par positif ils entendaient la capacité d'un homme à exacerber ses défauts et enfouir six pieds sous terre ses qualités sous la pression permanente de ce royaume d'aliénés. Ici-bas, la moindre sympathie vous coutait une lame dans le dos, alors qu'un simple excès de violence, secondé par une force suffisante, vous ouvrez les portes d'un monde à la plénitude de vices. Olek l'avait compris très tôt, en Amerzone, une seule chose comptait : le pouvoir, que sa forme fût, physique, intellectuelle, sociale, politique ou financière, il était respecté et surtout craint. Ici, le pouvoir changeait de main quotidiennement, il se gagnait aux cartes, se prenait de force, se voler par plus habiles que soi. Il était en permanence testé, chatouillé et provoqué par des pouilleux opportunistes désireux de connaitre la gloire, aussi sale, courte et grotesque fut-elle.
Le fils de Druss commençait à rentrer dans les annales, au grand dam de son énigmatique et triste père. Sur un territoire où les gangs changeaient de chef plus souvent que la météo et ses saisons, Olek tenait bon à la tête du plus sanguinaire des clans depuis près d'un an. Grâce aux leçons de l'homme qu'il considérait comme son parrain, Red, l'adolescent avait pris possession de la ville; à seize ans il détenait le pouvoir de vie et de mort sur tout son petit patelin, officieusement bien sûr. Ses gars choisissaient d'où la drogue se vendait, par qui et à qui, protégeaient les prostitués et commerces locaux, récoltaient des taxes en échange et luttaient contre les groupes rivaux pour garder leur suprématie. Possédant un talent pour la débauche et la violence, le gamin tout juste sorti de l'adolescence vivait sa meilleure vie, en véritable pacha des bas-fonds. Il louait ses services et ceux de ses hommes au plus offrant, fracassant des têtes et brisant des rotules, allant du littoral aux marécages et jusqu'au désert.
Olek commençait à se faire un nom, ce qui ne présageait jamais rien de bon. Un beau matin, la gueule enfarinée et les mains baignant dans le sang d'un violeur récidiviste chassé jusque dans la jungle, un de ses gars vint le trouver. Les yeux fous et la bave aux lèvres d'avoir couru aussi longtemps, le type reprit difficilement sa respiration, le corps plié en deux et les mains sur les genoux. Olek, impatient, fronça les sourcils et se redressa de toute sa taille, aussi menaçant qu'encourageant, le mec finit par ouvrir une bouche aux chicots de travers rendues noires par l'alcool de poudre.
- Boss ! C'est la Marine ! Ils sont en ville ! Un cuirassé énorme a accosté, ils retournent l'île à la recherche d'un homme !
- Qui ça ?
- Aucune idée, mais ça sent pas bon ! Parait qu'y'a même un vice-amiral à leur tête !
L'adolescent n'aimait pas ça, que venait foutre un gradé de la Marine en Amerzone ? La mine sombre, il s'essuya les mains à même le corps et cracha presque ses ordres avant de partir en courant.
- Va dire aux gars de faire profil bas, je vais voir c'est quoi ce bordel !
L'explication qu'avait trouvée Olek du haut de ses seize ans à cette incohérence était simple, l'humain était un animal qui s'adaptait à tout, pire qu'un cafard pondant ses œufs lorsqu'on l'écrasait, les hommes pullulaient même dans les environnements les plus hostiles, littéralement increvables. Et pourtant, dieu sait qu'ils étaient un paquet à clamser en Amerzone, tous les jours et de mille manières différentes, mais quelque fut la quantité de morts, les vivants étaient toujours plus nombreux. L'endroit était une destination touristique pour la raclure, un havre de paix pour les criminels, un parc d'attractions pour les sociopathes et voyait ses rangs se renflouer aussi certainement qu'un navire d'eau à cause de sa coque trouée. Tout n'était pas noir, l'espoir persistait, grabataire, mais encore vivant. Les gens du coin se plaisaient à penser que tout comme le temps qui transformait les restes et la merde en compost, la vermine d'Amerzone était elle aussi capable d'évoluer, de servir à quelque chose de plus grand et de positif.
Le jeune Olek n'était pas du même avis, il n'y avait rien de positif dans ce trou à rats, sauf si par positif ils entendaient la capacité d'un homme à exacerber ses défauts et enfouir six pieds sous terre ses qualités sous la pression permanente de ce royaume d'aliénés. Ici-bas, la moindre sympathie vous coutait une lame dans le dos, alors qu'un simple excès de violence, secondé par une force suffisante, vous ouvrez les portes d'un monde à la plénitude de vices. Olek l'avait compris très tôt, en Amerzone, une seule chose comptait : le pouvoir, que sa forme fût, physique, intellectuelle, sociale, politique ou financière, il était respecté et surtout craint. Ici, le pouvoir changeait de main quotidiennement, il se gagnait aux cartes, se prenait de force, se voler par plus habiles que soi. Il était en permanence testé, chatouillé et provoqué par des pouilleux opportunistes désireux de connaitre la gloire, aussi sale, courte et grotesque fut-elle.
Le fils de Druss commençait à rentrer dans les annales, au grand dam de son énigmatique et triste père. Sur un territoire où les gangs changeaient de chef plus souvent que la météo et ses saisons, Olek tenait bon à la tête du plus sanguinaire des clans depuis près d'un an. Grâce aux leçons de l'homme qu'il considérait comme son parrain, Red, l'adolescent avait pris possession de la ville; à seize ans il détenait le pouvoir de vie et de mort sur tout son petit patelin, officieusement bien sûr. Ses gars choisissaient d'où la drogue se vendait, par qui et à qui, protégeaient les prostitués et commerces locaux, récoltaient des taxes en échange et luttaient contre les groupes rivaux pour garder leur suprématie. Possédant un talent pour la débauche et la violence, le gamin tout juste sorti de l'adolescence vivait sa meilleure vie, en véritable pacha des bas-fonds. Il louait ses services et ceux de ses hommes au plus offrant, fracassant des têtes et brisant des rotules, allant du littoral aux marécages et jusqu'au désert.
Olek commençait à se faire un nom, ce qui ne présageait jamais rien de bon. Un beau matin, la gueule enfarinée et les mains baignant dans le sang d'un violeur récidiviste chassé jusque dans la jungle, un de ses gars vint le trouver. Les yeux fous et la bave aux lèvres d'avoir couru aussi longtemps, le type reprit difficilement sa respiration, le corps plié en deux et les mains sur les genoux. Olek, impatient, fronça les sourcils et se redressa de toute sa taille, aussi menaçant qu'encourageant, le mec finit par ouvrir une bouche aux chicots de travers rendues noires par l'alcool de poudre.
- Boss ! C'est la Marine ! Ils sont en ville ! Un cuirassé énorme a accosté, ils retournent l'île à la recherche d'un homme !
- Qui ça ?
- Aucune idée, mais ça sent pas bon ! Parait qu'y'a même un vice-amiral à leur tête !
L'adolescent n'aimait pas ça, que venait foutre un gradé de la Marine en Amerzone ? La mine sombre, il s'essuya les mains à même le corps et cracha presque ses ordres avant de partir en courant.
- Va dire aux gars de faire profil bas, je vais voir c'est quoi ce bordel !