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Attentats



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– Tout est clair ?

L’endroit ne correspondait pas tout à fait à l’aspect secret de cette petite réunion. Une large pièce dont les grandes vitres laissaient passer pleinement les rayons du soleil. D’ici, la vue sur l’île était imprenable. La personne qui venait de terminer d’exposer la situation faisait face à l’une de ces fenêtres. Les bas-quartiers étaient presque invisibles.

– Parfaitement clair.
– Bien, partez. Et agissez avec prudence.

Maximilien, la seconde personne présente, tourna les talons avant de prendre la porte. Il avait l’allure d’un ancien soldats ; les quelques cicatrices qu’il arborait sur son visage lui donnait un air des plus sévères. Il avait le crâne entièrement dégarnis, et malgré ce que pouvaient insinuer ses rides, il n’excédait pas la quarantaine d’années d’existence. Il portait un uniforme d’un rouge plus sombre que le sang, loin d’être cérémoniel.

Les longues marches et les interminables couloirs qui le séparaient de la rue en contre-bas lui laissèrent le temps de remettre sa tenue en place, et de s’équiper de fin gants noirs de protection. Une fois en bas, il vérifia une dernière fois que son épée et son arme à feu étaient bien à leur place sur sa ceinture, avant de passer la grande porte, le vent frais du matin fouettant lentement son visage, et de rejoindre les hommes qui avaient été assignés sous ses ordres.


* * * * *


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Lieu sombre. Un sous-sol, probablement. Les planches du dessus craquelaient sous le poids de l’âge. Le jeune homme qui se trouvait en ces lieux planta son couteau en plein dans le corps du rat qui passa près de lui. Un rat, c’était ce qu’il était devenu ces derniers jours. Blessé, et maintenant probablement recherché. Mais il avait toujours une mission à accomplir, et l’échec n’était absolument pas envisageable.

Ses blessures ne seraient bientôt plus qu’un mauvais souvenir, et heureusement pour lui, car la tâche qui l’attendait ne serait pas des plus faciles. Il lui faudra probablement être vif, rapide, et discret. Au dehors, les soldats grouillaient. Et pour cause ; le massacre de la vieille maison duquel il s’était échappé un peu plus tôt avait évidemment fini par faire du bruit. Ils n’apprendraient rien, mais leur présence restait un obstacle de plus pour le jeune homme. Sans compter le géant à qui il avait fait face. Était-il à sa recherche ?

Il frémit à cette idée. Mais prenant son courage à deux-mains, il se releva et prit la direction de l’échelle qui menait à la surface. Il s’était réfugier dans une vieille cabane, parmi les centaines que l’ont pouvait trouver dans les quartiers pauvres de l’île ; une sorte de bidon-ville évolué, crasseux toujours, mais plus vivable. Et bien sûr, pour lui, discret.

Il enfila sa cape et sa capuche, avant de sortir pour se jeter dans le froid de la nuit. Il prit la direction du port, marchant sur un chemin boueux simplement éclairé par la Lune. Il n’avait sur lui que son épée et sa dague. L’escargophone avec lequel il était parvenu à joindre les hauts-quartiers ne lui était plus d’aucune utilité, ainsi s’en était-il débarrassé, par peur de se voir tracer. Il n’était pas raisonnable de tenter de contacter qui que ce soit, et surtout pas ses camarades, ou pire, son patron. Il allait devoir procéder à l’ancienne, c’est-à-dire en personne. Il se dit qu’ils auraient dû prévoir un moyen détourné de communiquer, qu’ils auraient dû être plus prudent.

Chassant ces idées de sa tête, car il était de toute façon trop tard, il se faufila près d’un bâtiment qui marquait l’entrée du port. Bien moins actif qu’en journée, l’endroit n’était tout de même pas totalement désert. Ivrognes, mendiants, femmes de petites vertus ou encore travailleurs chevronnés – bien plus minoritaires que les autres –, patrouillait un groupe de soldat de la marine. Et ils n’étaient sans doute pas les seuls présents.

Depuis l’attaque de la mystérieuse maison, la surveillance de ce port avait doublé voir triplé. Sans doute pas par pure protection des citoyens, mais sûrement par soucis de ne pas effrayer les éventuels marchands et ralentir les échanges commerciaux. Si un groupe de bandit se cacher ici, ils allaient les arrêter. Ou du moins ils donnaient l’impression d’être sur le point de le faire.

Le jeune homme prit alors soin de les contourner, s’introduisant plutôt dans de petites ruelles sombres et hors du champ de vision des soldats. Ils ne connaissaient d’ailleurs probablement pas son visage, mais il ne pouvait pas prendre de risque. L’entrepôt n’était pas très loin, mais l’obligation de se faire le moins visible possible rendait cette distance subitement bien plus longue.

* * *

– Chef, nous avons fait le tour des entrées et sorties. Nous attendons vos ordres.

Maximilien, la main sur le pommeau de son épée, se contenta d’hocher lentement la tête de haut en bas. C’était là le seul résultat de leur enquête : un simple entrepôt. Les informations étaient minces, mais mais l’endroit et les transactions qui semblaient s’y dérouler étaient suffisamment suspectes pour valoir le coup d’œil. Des échanges non répertoriés, des valeurs qui ne correspondaient pas à la marchandise citée, en bref : des détails, ce fut tout ce qu’ils trouvèrent.

La vieille maison qui fut la scène d’un violent combat, fouillée et refouillée ne donna rien. Les quartiers pauvres étaient étrangement calmes. Et le Culte de la Miséricorde l’était tout autant. Et l’instinct du chef de la milice ne le trompait que rarement.

– Laissez une partie de nos hommes les investir. Le gros de nos -faibles- forces passeront par l’entrée principale. Nous sommes ici pour une inspection protocolaire. Tu restes ici pour surveiller cette sortie, mais si les choses se gâtent, ne rentre qu’après avoir envoyé ton rapport d’urgence à la Dame, compris ?

– Compris, chef.

* * *

– Inspection ? En quel honneur ? Fit le premier, qui se présenta comme étant le chef.

Bourru, recouvert de cicatrice et portant à la ceinture ce qui semblait être une masse, il n’y avait aucun doute quant à son rôle de méchant de cette histoire.

– Je veux voir votre mandat. Ou quel que soit le nom.

Maximilien ne se fit pas prier. A la milice privé, on ne faisait pas les choses à moitié. Encore moins dans une situation similaire. Il sorti de l’une de ses poches une feuille jaunie tout ce qu’il y avait de plus officiel. Ordre d’inspection. Tamponné et signé par les personnes en charge de la vérification des marchandises. Du moins, en apparence.

– Quel genre de marchandises entreposez vous ici, exactement ? Fit-il, toisant du regard les autres « employés » de l’endroit.
– Vous n’aviez qu’à consulter le registre. Des-
– Des matériaux de constructions, oui. Je voudrais les voir.

Le chef soupira de manière fort poussée avant de faire signe à ses hommes. Il invita les invités à le suivre dans la pièce qui se trouvait derrière eux : l’entrepôt en lui-même. Maximilien le suivi à tâtons, lançant à ses soldats un regard éloquent. Si il devait se passer quelque chose, c’était maintenant.

L’envoyé de la Dame n’attendit pas plus longtemps ; à la vue du premier mouvement brusque d’en face, il donna l’alerte. Ceux d’en face mirent peu de temps pour réagir, et chacun dégaina son arme avant que les miliciens ne parviennent à leur auteur, leur donnant une chance pour riposter. Sauf pour les quelques malheureux qui avaient subis de plein fouet les premiers échanges de coup de feu.

* * *

Le bruit des armes alerta soudainement le soldat resté à l’extérieur. Il savait ce qu’il lui fallait faire. L’escargophone en main, il composa le numéro qui le lierai alors au plein centre des haut-quartiers de Saint-Urea. Son interlocutrice ne se fit pas prier, et c’est en tentant de contrôler sa voix tremblante qu’il voulu commencer son rapport express, malheureusement trop tard.

L’appareil téléphonique tomba sur le sol boueux, laissant à l’autre bout du fil qu’un simple silence de mort. Les derniers étouffement du soldat ne se firent pas attendre, et la marre de sang s’amplifia sous son corps inanimé.

Un bain de sang. Voilà ce qu’allait trouver le jeune homme en entrant. Voilà dans quoi il allait se jeter : un champ de bataille. Il savait ce qu’il devait faire. Pour sauver ses camarades restant, mais surtout pour sauver sa peau. Effacer les preuves, en lançant le plan plus tôt que prévu. Il venait de tuer son premier homme, et allait possiblement en achever une douzaine d’autres.

En rentrant par l’arrière de l’entrepôt, le jeune ne trouva rien d’autres que du sang, des armes au sol et quelques cadavres encore frais. Il pouvait voir, au loin, que des caisses avaient été fracassées. Elles étaient toutes vides. Mais celle qui l’intéressait était bien à l’abri, au sous-sol. Humide, sombre, il tâtonna quelques instants avant de trouver ce qu’il cherchait. Il ouvrit le conteneur à l’aide d’un pied-de-biche traînant non-loin de là, afin de découvrir l’objet que le bâtiment et ses employés défendaient. Il avait devant lui plusieurs bombes artisanal de taille imposante ; des explosifs suffisant pour faire sauter plusieurs bâtiment de grandes tailles, tel que celui-ci. Il activa le mécanisme de l’une d’entre-elles, et prit le chemin inverse le plus rapidement possible. Il pouvait encore entendre la violence des combats. Et la porte par laquelle il s’était faufilé dans le bâtiment était de nouveau le théâtre d’un violent affrontement. Poussé par la peur, il prit la direction opposé, et couru vers l’une des principales sorties, manquant parfois de trébucher sur un corps.

A l’extérieur, le soleil lui brûla la rétine. Il mit un certain temps avant de se rendre compte qu’il n’était pas seul. Maximilien, blessé et essoufflé et désarmé, reprit automatiquement consistance avant de se jeter sur le jeune homme qui n’eût pas le temps de s’écarter. Le plaquant contre le mur, le chef de la milice lui asséna de multiple coup de poing, avant que son adversaire ne parviennent à se dégager en lui plantant son couteau dans le bassin.

Le jeune se recula, le visage en sang. Maximilien, entraîné, n’hésita pas un seul instant à reprendre l’assaut. Il esquiva et écarta les attaques du jeune, avant de lui asséner un uppercut qui l’envoya au sol. Mais blessé, le chef n’eût pas le temps de l’achever et son adversaire en profita pour se relever tant bien que mal, dans le seul but de fuir le plus possible. Chose qu’empêcha Maximilien, en l’empoignant par la jambe pour le tirer à lui. Le jeune parvint tout de même à le frapper au niveau de sa blessure par le coude, afin de le repousser.

Ils se débâtèrent ainsi pendant de longues secondes qui lui parurent être une éternité. Jusqu’à ce que dans le chaos, il sente quelque chose de froid lui percer le dos. Il n’avait plus le couteau dans les mains.

Il tâtonna quelques instants, tentant de localiser de sa main la blessure, mais une voile gris lui recouvra bientôt la vue, et les derniers sons qu’il perçut signèrent sa fin.

Le temps était écoulé.

* * *

Tel un coup de tonnerre, l’explosion retentit et éclaira la totalité du port, ainsi qu’une bonne partie des quartiers pauvres. L’amplitude de l’explosion était difficile à percevoir, mais elle avait sans nul doute engloutie la totalement de son bâtiment d’origine, et éventuellement les quelques bâtisses environnantes. Ceux qui dormaient à poings fermés furent réveillés en sursaut, tandis que les comploteurs nocturnes furent détournés de leurs basses besognes.

* * *

Attentats 1485203057-urea5

– Chef…
– Je sais.

Dans le bureau sombre de celui qui se faisait appeler Siegfried, trois personnes se tenaient debout.

– Nos oisillons font ce qu’ils peuvent, mais il nous faut une aide extérieur, fit le chef du Culte de la Miséricorde. Numéria, appelle-le. Malmere, va me chercher Horlfsson. Et la fille, si possible.

Une première silhouette prit la porte et disparu dans l’obscurité du couloir. La seconde apporta à Siegfried un petit escargophone avec lequel elle venait de composer un numéro. Celui-ci le plaça à porté de voix et fit signe à Numéria de partir. Le denden sonna de longues secondes, avant qu’un son presque imperceptible indiqua que l’interlocuteur venait de décrocher.

– Il est temps d’honorer notre accord.

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C'est au fond fin d'un couloir que se dirigent alors quatre hommes. Dans un silence aussi profond que les lieux, comme nous introduisant à la prière, le meneur guide sa troupe à travers ce semblant de dédale. Un homme d'une quarantaine d'années, son visage donnant l'impression de se bonifier tel le vin au fil des années. Simplement vêtu mais soucieux du détail quant à son accoutrement ; se démarquant ainsi de ceux qui le suivent, eux le visage respectivement couvert d'une cagoule et habillés d'une tenue de type militaire. Les lieux quant à eux sont tout ce qu'il y a de plus ordinaire dans le genre sombres caves aux couloirs étroits et aux portes bien en rang. Ils ne croisent personne sur leur chemin, seul le bruit des bottes résonne inlassablement dans les locaux jusqu'à leur arrivée à destination. C'est alors que celui en tête de ligne se retourne vers ses associés.

-Allez chercher le reste. Dit-il sans leur adresser un regard pour bloquer le dossier qu'il tient dans la main droite contre ses côtes pour se munir de la bonne clé. -Toi, reste avec moi. Lance-t-il au plus baraqué du trio.

La porte s'ouvre dans un grincement sordide, ouvrant sur une pièce totalement dans la pénombre. Aucun bruit, ne serait-ce que des gémissements, de faibles gémissements, fatigués mais toutefois réguliers. Lumière enclenchée... le tableau apparaît. Un homme, attaché sur une chaise, la tête branlante et couverte d'un épais sac en toile noire. On peut voir qu'il se débat et que sa nervosité ne fait que croître à l'approche des deux individus.
Dans cette petite pièce pouvant accueillir une petite poignée d'hommes, il n'y a que le captif ainsi qu'une table face à lui, une salle d'interrogatoire.

-On va attendre les autres. Lâche le leader avant de se décaler de la porte.

Quelques instants pour tard, les deux types cagoulés rapidement briefés par celui tenant la paperasse sortent chacun leur tour d'une des pièces adjacentes à celles où se trouve en ce moment même un individu en mauvaise posture. Sauf qu'ils ne ressortent pas les mains vides, les deux gorilles. Ils avancent l'un derrière l'autre jusqu'à rejoindre les autres. Mais ils ne reviennent pas les mains vides, chacun des deux semblant porter aisément un homme assis à même une chaise, trimballés comme de vulgaires sacs. Trois captifs occupent désormais la pièce, tous dans une condition similaire. On amène alors une chaise au donneur d'ordres, qui prend tranquillement place face à ses victimes, tout en posant ses feuilles sur la piètre table usée par le temps.

-Retirez leurs cagoules. Qu'il ordonne simplement tout en relisant ses notes. -Bon, bon, bon. Avant toutes choses, messieurs, j'espère que le service vous plaît. Après tout, chacun mérite d'être accueilli et cajolé dans la vie, nous ne pensez pas ? Enfin, cela reste du moins mon avis. Une bonne situation, une belle île où vivre ou passer afin d'y faire rapidement ses petites affaires, c'est stimulant. L'énergie qu'elle dégage, tout ce beau monde qui nous émerveille, et j'en passe... Dit-il avant de marquer une pause. -Maintenant, le souci, c'est quand un élément perturbateur vient s'ajouter à ce beau tableau pour venir mettre en péril la tranquillité des autres, alors qu'ils n'ont rien demandés. Vous me suivez ? Du coup, dans le cas présent -étant donné que c'est moi qui m'occupe de vous en ce moment-, je ne saurai dire si vous avez ou non de la chance d'être tombé sur ma personne. P'têt bien que oui, p'têt bien que non... Mais ce qui est sûr, c'est que moi je suis resté fidèle à mes valeurs ! Ah bah oui ! Vous venez foutre la merde ici et faites sauter des civils qui ont rien demandés. Moi, ainsi qu'mes collègues, on a impérativement des comptes à rendre à quelqu'un, vous savez. La dernière fois qu'on s'est vu, bien on a fait notre boulot, sans plus. Mais on se doutait bien que personne ne dirait rien sur une putain de bombe qui a soudainement explosée quelques heures plus tôt pour faucher toute une équipe de miliciens.

-Vous avez pas d'preuves... Murmure faiblement un des prisonniers, le visage tuméfié et presque méconnaissable.

Sans attendre, les « gardes » présents derrière chacun des détenus se mettent alors à les tabasser violemment.

-On ne me coupe pas quand je parle. Sinon, tout le monde prend. Pour te répondre, petit malin, vous auriez du mieux planquer tout vos documents concernant les ressources d'un certain hangar. On sait bien que la bande de pêcheurs des bas-quartiers a tout raflée avant notre arrivée. Mais c'est ça d'faire le boulot dans la précipitation, on en oublie les détails essentiels.

-N'imp- Tente de prononcer l'un des hommes attachés, tout de suite coupé par celui dont on ne pouvait couper la parole.
-Ah ouais ? Et ça c'est quoi alors ? Rétorque-t-il en posant un à un des documents sur la table, concernant de mystérieux registre de matériaux fantômes. Le blessé, même le visage démoli ne tarde pas à dévoiler son étonnement face à l'exactitude des documents présentés sous ses yeux.
-Et oui, les tocards, mon défunt confrère Maximilien m'aura transmis toutes ses découvertes par Den den au cas où quelque chose lui arriverait. Vous l'avez dans l'os, hein ? Du coup, j'vais faire court et maintenant vous expliquer la raison de ma venue. Dit-il en levant les yeux au ciel pour ensuite désigner et présenter un à un les hommes l'ayant accompagné au départ. -Messieurs, dites à tour de rôle votre nom et votre fonction.
-Scalpel, je te refais le portrait. Dit le premier, et ainsi de suite.
-Acide, spécialiste en douche oculaire.
-Aiguille, je fais connaissance avec tes testicules.
-Donc, vous avez compris, je vous laisse avec eux et chacun à droit à en choisir un. Et surtout, ne vous battez pas, sinon c'est les trois pour tout le monde. Peut-être que si vous êtes coopératif, vous amènerez mes hommes à réfléchir quant à votre sort, c'est gentil non ? Ah, mais j'oubliais... J'ai bien fait attention à ne choisir que les moins dociles. Sur ce, amusez vous bien ! Dit-il avant de se lever, ramasser ses affaires en claquant la porte.

Au fur et à mesure qu'il s'éloignait, le sourire aux lèvres, il pouvait se délecter de tous ces cris d'horreur et de désespoir.

***

Zone portuaire

Ici, c'est la panique. Toutes les personnes de passage, que ce soit de simples voyageurs ou aventuriers venus faire escale, les commerciaux venus se remplir les poches ou échanger veulent maintenant tous reprendre la mer pour fuir les quartiers pauvres. Même moi, je n'aurais jamais cru qu'une chose pareille aurait pu survenir. Une explosion dans un hangar, des morts sont à déplorer que ce soit chez les innocents que du côté de l'ennemi. Depuis mon arrivée, la tournure des événements est de plus en plus sombre, et je crains aujourd'hui pour ma vie à mesure que je reste sur cette immense île sécurisée, désormais impliqué jusqu'au cou dans diverses affaires vaseuses. Les mensonges d'Isidor ne sont plus à délier à cette heure. Tout cela me dépasse maintenant, et prendre la fuite est la meilleure option avant d'être impliqué dans une affaire pour laquelle je n'ai jamais voulu œuvré au départ.

Le problème est que je n'étais pas à l'hôtel au moment de la détonation, et que l'enseigne était généreusement barricadé et la porte fermée à mon retour. La plupart de mes affaires sont restées dans la chambre, mais moi Hevrard Horlfsson décide aujourd'hui de prendre la fuite pour ma survie, quitte à redémarrer de zéro.

Actuellement pris dans la foule, les gens se débattant comme des fous et beuglant contre le barrage de Marines venus empêcher la populace de grimper sur ces navires. Forcément, les responsables du carnage pouvaient encore se trouver dans les environs, et les rumeurs comme quoi une équipe entière de la dirigeante des lieux s'est retrouvée carbonisée non loin de là alimente parfaitement la panique. A force de bousculades, j'arrive au niveau des autorités qui elles doivent être dix fois plus à cran que la plèbe environnante, se démenant pour repousser tout ce monde. Prenant mon courage à deux mains, j'avance vers l'un d'eux pour me faire entendre.

-Il faut que je passe !
-On a reçu pour ordre de ne faire passer personne, reculez ! Me sonne-t-il une première fois.
Me débattant pour réussir à sortir un document certifiant mon grade, je lui place sous le nez. -Je n'ai rien à voir la dedans, laissez moi passer !
Sauf qu'en de telles situations, le contexte vient me rappeler que les passes-droits sont très volatiles. Un soldat juste à côté de celui avec qui je tente de négocier n'apprécie pas le ton que j'emploie et vient m'asséner un coup de crosse dans le ventre, puis un autre au niveau de la tempe, suffisant à me faire tomber.
-PERSONNE NE PART, MAINTENANT RECULEZ TOUS ! Tonne l'un d'eux avant d'ordonner des tirs de sommations pour faire reculer le bloc avec succès.
Me relevant tout en tenant le coin de la tête, je comprends alors que l'approche direct ne fonctionne pas, et décide alors de me reculer de toute cette foule afin de prendre du recul sur la situation. Mais ce n'est pas sans armure ni épée que je pourrais faire face à ces éventualités. Il faut que je réussisse à entrer dans l'auberge, quitte à enfoncer la porte.



Le trafic dans les rues s'allège de minutes en minutes, remplacé par des escouades de soldats de plus en plus importantes. Arrivé devant l'hôtel toujours fermé, je profite d'instants de calme dans la rue pour me défouler en frappant à la porte.

-Ouvrez ! Dis-je une première fois tout en prenant toujours le soin de regarder par dessus mon épaule.

Comme je m'y attendais, pas de réponses. Je frappe donc de plus en plus fort.

-Ouvrez cette porte ! J'ai loué une chambre et j'y ai laissé des affaires importantes ! S'il y a quelqu'un, ouvrez maintenant ou je défonce cette porte et vient récupérer ce qui me revient de droit ! VOUS CHOISISSEZ.

Au bout d'un moment, alors que je garde l'oreille contre la porte. D'imperceptibles mouvements de plancher parviennent jusqu'à elles. Quelqu'un arrive. Et se déplace lentement vers la porte. Impossible de savoir qui est-ce et ses intentions. C'est donc naturellement que je garde ma main droite au niveau de la ceinture, prêt à dégainer un couteau au cas où. Soudain, un minuscule murmure.

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-Horlfsson, est-ce bien vous ?
-Vous, qui êtes vous ?!
-C'est moi, Anatole. Je vais vous ouvrir, attendez.
-Faites vite. Je crois entendre des soldats venir depuis la rue adjacente.

Mais pas de réponse, et le stress monte à mesure que le bruit remonte de la rue.

-Vite Ana-
-Chut, j'ai la clé, c'est bon.

La porte s'ouvre et, tel un fantôme, je m'évapore dans le bâtiment éclairé de bougies pour refermer la porte à clé. A peine cinq minutes plus tard, des soldats remontaient effectivement la rue, chargés d'interpeller toutes personnes suspectes à entendre les échanges entre eux. Désormais à l'intérieur de l'auberge dans laquelle je réside depuis mon arrivée sur l'île, il m'est possible de souffler un coup.

-Vous avez commis un crime, pour adopter un tel comportement ?
En planque près de la porte à observer la rue depuis l'orifice que m'offrait deux planches contre une vitre, je lui réponds pour ensuite me retourner. -On dira que mon intuition prends des précautions. Et vous, pourquoi avoir barricadé l'auberge en si peu de temps ?
-Par précautions. Me dit-il en s'emparant d'une bougie. -Quelqu'un m'a chargé de vous livrer un message.
-Laissez moi deviner, vous aussi vous êtes du Culte...
-C'est plus compliqué que ça, je n'en fait pas officiellement parti mais je me dois d'accomplir la faveur d'un ami. Malmere a été envoyé pour vous transmettre un message mais, malheureusement, il a été interpellé et arrêté par la Marine après une course poursuite. Il n'a fait que suivre les ordres, et maintenant il est sûrement en danger après avoir voulu accomplir son devoir.
-Et vous allez me demander de jouer les sauveteurs.
-Non, pas du tout même. Malmere a toujours été conscient des risques qu'ils prenaient une fois qu'il a accepté de faire parti du Culte. Donc, il aura réussi à me transmettre un message pour vous avant... Conclut-il, sans terminer sa phrase.
-Lequel ?
-Que Siegfried a réussi à entrer en contact avec la chasseuse, et que la situation actuelle n'est pas du tout anodine. Intimement liée à tout ce que vous avez pu faire sur l'île depuis votre arrivée, ou presque. Bref, il a besoin de vous ainsi que de la fille pour une ultime mission, afin d'enterrer ce problème une bonne fois pour toutes. Les risques sont grands et l'implication du Culte et de votre duo n'est plus à prouver, raison pour laquelle il vous demande une bonne fois pour toute de conclure cette histoire définitivement. Mais tout le monde à encore une chance de s'en sortir, bien que les risques ont désormais pris une ampleur troublante. Ne m'en demandez pas plus, les détails me manquent et mon objectif est maintenant de vous amener vers le Chef en personne -en espérant que cela soit encore possible- et aussi de vous rendre vos affaires. Il s'excuse d'ailleurs de vous mettre une fois de plus au pied du mur, mais il sait que vous comprendrez bien la situation. Montez prendre vos affaires, et rejoignez moi à l'arrière.

Il ne m'a même pas laissé en placer une. Mais le fait de l'avoir laissé dire ce qu'il avait à dire était sûrement la chose la plus sage à faire. Équipé et vêtu d'une large cape pourvue d'une capuche, je le rejoignais dans la pièce derrière le comptoir, une pièce presque vide... à un détail prêt.

-Avant de nous quitter, je tiens à vous dire que c'est le hasard et nul autre facteur qui aura scellé votre implication ici.
-Comment ça ?
-Eh bien, je pense que vous n'aurez jamais eu affaire au Culte si vous seriez parti loger dans une autre enseigne. Je m'explique, cet auberge est celui le plus proche du Culte quand on regarde la carte de Saint-Uréa. Cet endroit est l'un des nombreux point de repère du Groupe, point de repère où chaque gérant est évidemment en relation avec eux. Lorsque Malmere était venu me voir à l'époque, me disant que le Culte était dans l'incapacité d'investir un monastère occupé par ce dénommé Elbert. Et c'est à ce moment que je vous voyez franchir la porte de chez moi, un fier guerrier armés jusqu'au dent. Mon regard aiguisé, ne prenez d'ailleurs pas ça pour une flatterie, aura suffit à vous estimer. Ce n'est qu'ensuite qu'un enfant a été chargé de vous occuper. Voilà tout.
-Un enfant, vous voulez parler de Dylon ?!
-Du calme, je n'en sais pas plus. Mais au vu de tout ce qui se trame dehors et en tant que partisan de la Vérité, je me devais de vous dire tout ça.
-Merci, bien que vous me dites tout cela comme si j'allais mourir.
Il ne répondit pas à cette phrase pour ensuite sortir de sa veste une vieille carte précisément annoté de part en part.

-Reculez. Me demande-t-il avant de poser un genou au sol pour agripper ce qui semble être une fausse plaque de béton, offrant de vieux escaliers pourris menant à l'obscurité. -Le Culte de la Miséricorde se sera approprié de vieilles galeries présentes sous la ville depuis beaucoup de temps déjà. Je vous ai indiqué le chemin menant jusqu'au Culte sur la carte, empruntez bien le chemin indiqué et nul autre, qui sait sur qui -ou quoi- vous pourriez tomber... Voilà, j'ai fait tout ce qui est en mon pouvoir pour vous aider au maximum, Horlfsson.
-Je ne sais pas si je dois vous dire merci mais... vous m'avez été d'une grande aide malgré tout. Et vous, qu'allez vous faire désormais ?
-Fermer la boutique pendant un moment, m'éclipser quelques temps après avoir fait un « petit » détour. Dit-il en souriant légèrement.
-Personne ne mourra. Répondis-je avant de commencer à entrer dans labyrinthe tout en allumant ma lanterne.
-Bonne chance Horlfsson. Cloture-t-il pour ensuite reposer la large plaque au dessus de moi.

Maintenant, j'étais perdu dans les ténèbres tenant un papier en lequel je ne pouvais pas forcément placer toute ma confiance. Mais c'était la dernière chose qui me restait si je voulais survivre et avoir des réponses.

Cette histoire va se terminer, d'une manière ou d'une autre.

    Bizarre. Étrange sensation de ne pas être à sa place, au milieu de quelque chose qui la dépasse et qui ne la concerne pas tout à fait. Entourée de figures connues mais étrangères, Klara écoutait les dires de son interlocuteur sans y prêter grande attention, trop occupée à être perdue dans ses pensées. Elle aurait dû repartir aussitôt après avoir récupérer la prime pour la tête de Davinson. Littéralement sa tête.

    Mais, étonnement, elle avait décidé de prolonger son séjour sur une île qui ne lui était pourtant pas du tout sympathique. D’abord pour sa convalescence, avant de repartir en chasse non plus seule, mais accompagnée pour la seconde fois d’un étrange comparse chasseur à propos duquel elle ne savait quoi penser.

    Ce qui fini par l’embarquer dans cette histoire dont elle ignorait les moindres détails. Et on attendait d’elle un oui.

    Ils l’avaient d’abord contacté au pire moment.


    * * * * *


    Elle se réveilla en sursaut par l’horrible coup de tonnerre qui venait de gronder. Du moins, c’est ce qu’elle pensait les quelques premières secondes qui suivirent. Elle ne comprit que lorsque qu’elle daigna se déplacer jusqu’à la fenêtre de sa chambre d’auberge, après avoir entendu ce qui ne pouvait être qu’une série de cris de panique. Et une intense lumière orangée qui tapissait les murs de légères formes dansantes.

    Face à elle, le désordre : sous la forme de flamme, d’épaisse fumée, et de mouvement de foule. Des civils, d’abord, qui fuyaient où étaient poussés par la curiosité, puis des soldats, tentant comme ils pouvaient de contenir le chaos. Une tâche difficile qui n’intéressait pas particulièrement Klara.

    Après quelques minutes passées devant la vitre à réfléchir, la jeune chasseuse récupéra la pile de vêtement bêtement jetés au pied du lit et s’habilla rapidement, s’équipa de son épée ornée d’un crâne d’un mauvais goût total, qu’elle avait récupéré sur le cadavre encore frais, fruit d’une traque récente, après la perte de sa propre arme.

    Elle fit un tour rapide de sa chambre pour vérifier qu’elle n’oubliait rien, avant de sortir dans le couloir ; elle n’était évidemment pas la seule à s’être réveillé et à ne pas vouloir rester sagement dans son lit. Elle descendit à pas de loup les escaliers menant à la pièce principale de l’établissement, avant de s’engouffrer dehors, relevant son capuchon pour lutter contre la fraîcheur de la nuit. Et ne pas attirer l’attention. Et pour des raisons de style évidentes.

    Elle devait partir, loin. Simple intuition. Il serait probablement impossible de repartir facilement à partir du lendemain. Et son instinct lui dictait un ordre simple et précis : se casser. But simple, mais moyen d’y parvenir probablement inexistant à cette heure. Il ne lui restait plus qu’à devancer la foule de marchands et d’autres visiteurs qui voudront quitter le port d’ici le levé du soleil.

    Oui, trouver un capitaine suffisamment sympathique et soucieux de remplir sa bourse pour accepter de la déposer quelque part, loin. Facile.

    – Excusez-moi.

    La voix féminine qui l’interpella avait un ton parfaitement posé, bien loin du tumulte de la panique générale à quelques lieux d’ici.

    – Klara Eilhart ?

    Elle se retourna.

    – Oui, c’est bien vous. Vous avez peu de chance de partir, vous savez. La Marine se montre redoutablement efficace en cette nuit. Si vous ne voulez pas vous retrouver bloquée et interrogée pendant des heures, vous pouvez me suivre. Je fais partie d-
    – Je le sais très bien. Pourquoi serais-je interroger ? Je n’ai rien à voir avec tout ça.
    – Mais vous avez à voir avec nous.

    * * *

    On l’avait menée jusqu’à un endroit qu’elle connaissait déjà : l’église de la Miséricorde, servant de lieu de recueil mais surtout de quartier général d’un culte bien trop mystérieux pour être honnête. Si la premières heures après l’explosion dans les quartiers pauvres s’était écoulée extrêmement vite, les autres lui parurent être les plus longues qu’elle ai connue depuis bien longtemps.

    Si elle n’était absolument pas prisonnière, elle comprenait tout de même qu’il était plus simple de rester ici. Au port et aux alentours, c’était tout simplement la panique : barrages, blocus, fouilles. Les quartiers s’étaient vu passer au peigne fin. Et tout ceci semblait prendre des proportions un peu trop grandes.

    Mais bon, quand même, c’était long.

    Elle avait, au petit matin, pris la direction du cimetière situé derrière l’église. Un endroit peu reluisant qui avait pourtant un certain attrait : parfaitement entretenue, il se distinguait étonnement du reste des quartiers pauvres, ce qui en disant long sur la condition des habitants. Elle parcouru les tombes, son regard vaguant entre les stèles dédiées à des noms inconnus. Il n’y avait parfois même pas de nom. Elle s’arrêta sur l’une des tombes, avant d’être rejointe par un homme qu’elle n’attendait plus.

    – Intéressant, fit Siegfried.

    Il portait son habituelle tenue encapuchonnée, peu reluisante mais pratique. De forte corpulence et de taille, il dépassait Klara de plusieurs dizaines de centimètres. Le chef du Culte marqua une petite pause, avant de reprendre, voyant l’inexistence de la réponse chez son interlocutrice.

    – Voilà l’une des personnes les plus importante du Culte. Sans lui, les pauvres hères de notre cher quartier n’aurait aucuns recours.
    – Pourquoi ?

    Elle était curieuse.

    – Parce que sans lui, je ne serai pas là. Cet homme est mort dans des circonstances bien tristes.
    – C’est super.

    Mais surtout de mauvaise humeur.

    – Vous comptez enfin me dire pourquoi vous m’avez amené ici ? Fit-elle calmement, en détournant ses yeux de la tombe, pour les diriger vers Isidor, qui la surplombait.

    Heureusement qu’il ne représentait aucune menace, car Klara n’avait évidemment plus son épée sur elle, règle des lieux oblige.

    – Pour vous éviter quelques tracas.
    – …
    – Pour vous éviter quelques tracas, car j’ai besoin de vos services. Une fois de plus. Marchons.

    Ils traversèrent le cimetière pour atteindre ce qui avait dû être un magnifique petit jardin, composé d’une fontaine aujourd’hui inactive, de bancs aujourd’hui écroulés, et des statues aujourd’hui éclatées.

    – J’aurai voulu vous amener plutôt au monastère, à la Maison d’Aballon. L’endroit est magnifique, plus calme encore qu’ici, et surtout plus sûr. Grâce à vous !
    – Quoi, je risque quelque chose ici ?
    – Non. Mais nous ne sommes jamais trop prudent. J’aimerai simplement vous éviter la venue de… soldats, par exemple.
    – Vous êtes donc bien liés à l’explosion de cette nuit.
    – Nous n’en sommes pas à l’origine. Que ce soit de manière directe ou indirecte. Si telle est votre question. Il s’agit là d’un incident regrettable, oui, très regrettable. Et je ne crains que tout ceci ne vienne troubler les quartiers, plus qu’ils ne le sont déjà. Je crains que tout ceci ne vienne mettre en péril ce pourquoi nous œuvrons ici.
    – Vous n’êtes pas obligé de parler avec grandiloquence avec moi. Vraiment pas.
    – Soit. Mais ce que je dis est la stricte vérité. N’y voyez aucune malice, aucun mensonge. Car je ne vais pas passer par quatre chemins ; nous sommes dans une fâcheuse posture.
    – Par « nous », vous voulez dire « vous » ?
    – Je représente le Culte. Écoutez, je sais pourquoi vous êtes venue.
    – Par curiosité.
    – Par intuition, par intelligence. Vous n’auriez pas pu partir d’ici, de toutes façons. Vous savez très bien que l’explosion n’est pas un incident sans importance. Des dizaines et des dizaines de morts et de blessés. Dont des personnes d’importances. Et des innocents. Vous êtes venue parce que vous savez que cet incident est plus que ce qu’il n’y paraît, et vous savez que vous y pouvait quelque chose. Et que, d’une manière ou d’une autre, cet incident vous concerne. Et puis, effectivement, je pense que vous êtes curieuse. Et enfin, vous êtes venu parce que vous vous ennuyez profondément.

    Elle ne répondit pas. C’était un portrait tout à fait raisonnable qu’il semblait avoir dressé de la chasseuse.

    – Et je sais aussi qu’en l’état, il y a de fortes chances pour que vous refusiez de m’aider si je vous le demandais ici et maintenant. Aussi, je vous serai gré d’attendre encore quelques temps en notre compagnie.


    * * * * *

    On avait fini par l’inviter à une sortie de réunion qui ne concernait que de rares élus parmi les membres du Culte. Et elle. Qui ne se sentait absolument pas à sa place. La réunion avait commencé par un sermon ennuyant sur la situation, le rôle du Culte, la misère des miséreux et ainsi de suite. Et puis, les choses intéressantes avaient commencée. Plusieurs personnes sortirent, réduisant ainsi encore plus le nombre de figures présente dans la pièce ; une salle plongé dans la pénombre, comme une bonne partie de l’édifice, un lieu dans lequel des tas de sombres dessins semblaient se discutaient entre comploteurs peu scrupuleux. C’était un peu le cas. Si ce n’est qu’ici, le Chef accordait une importance capitale au fait de répéter encore et encore à l’audience qu’ils étaient les bons.

    C’était peut-être vrai. Mais pas entièrement, se dit Klara, au fond de la pièce.

    Enfin, les choses intéressantes allaient débuter. Isidor avait précipitamment quitté la pièce lorsque Numéria, une femme d’un âge que l’on ne pouvait définir et à la chevelure encore plus sombre que la nuit, et qui semblait être l’une des personnes de confiance du Chef du Culte, entra sans frapper, interrompant le discours qui de toute façon touchait à sa fin. Quelqu’un venait d’arriver.

    Elle attendit plusieurs longues minutes, avant d’être finalement rejointe par une autre figure connue, mais tout de fois moins étrangère.

    Un géant se tenait face à elle.

    – Bon dieu, qu’est-ce qui lui est arrivé à celui-là ? s’exclama doucement l’une des silhouettes encapuchonnée.

    En effet, Hevrard Horlfsson semblait revenir tout droit des enfers, sale et las. Klara ne fut même pas surpris de le voir ainsi débarquer. Il n’y avait rien d’étonnant là-dedans. Il avait la mine renfrogné. Siegfried lui a parlé, pensa Klara. Peut-être plus qu’à moi.

    Elle avait raison.

    Elle ne lui adressa qu’un simple signe de la main sans conviction. Ce qui était déjà bien plus qu’envers toutes les autres personnes réunie ici. Seule Numéria ne l’agaçait pas. Elle n’agaçait personne. A part peut-être Siegfried.

    Quant à son acolyte chasseur de prime, elle partageait avec lui quelques aventures et rencontre fortuites et, étonnamment, il ne lui avait pas laissé un souvenir désagréable. Hevrard Horlfsson ne lui était pas étranger, comme les autres. Il lui était même plutôt sympathique. Voilà pourquoi Siegfried lui avait demandé de patienter encore un peu.

    Les quelques rares personnes encore présentes dans la pièce partirent lorsque le chef du culte leur adressa un regard qui se suffisait à lui même. Numéria parti aussi, mais sûrement plus par désintéressement que par interdiction de rester.

    – Enfin. Klara, vous avez suffisamment patienté. Prenez place.

    Lui resta debout. Les mains jointent dans son dos, il commença à faire les cents pas dans la pièce, le regard perdu dans le néant.

    – La situation est grave. Très grave. Et j’en appelle à votre générosité, votre sens du devoir, votre empathie… Non, vraiment, ce que vous voulez. Des gens sont morts cette nuit, et d’autres mourrons si nous ne faisons rien. Je ne le vous cacherez pas ; notre entreprise est en danger. Les seules choses que j’ai actuellement, ce sont des doutes et des théories. Je ne vous en ferai pas part. Pas entièrement. Sachez simplement que des ombres cherchent à nous écraser, par la force et la ruse. Et que je ne compte pas les laisser faire. Vous avez vu ce dont ces ombres sont capable, ainsi vous savez ce qu’il y a en jeu. Fort heureusement, mon influence ne s’étend pas qu’aux bas quartiers. D’autres gens, plus haut, sont aussi soucieux d’aider. De différentes manières, et-
    – Bon sang, venez en aux faits, s’exclama enfin Hevrard, qui semblait se retenir depuis un bon moment, visiblement plus de mauvais humeur que Klara.
    – Comme vous voulez. J’y viens. L’une de ces personnes est aux prises avec ces ombres. C’est là que vous intervenez. Je ne puis vous fournir trop de détails, cette personne s’en chargera à ma place, et bien mieux que moi. Tout ce que je vous demande, c’est d’aider cette personne. Cet ami de la Miséricorde. Je peux vous assurez que vous œuvrez pour le bien. C’est pourquoi la seule chose que je vous demande en premier lieu, c’est de bien vouloir vous entretenir avec cet ami.

    Je suppose que vous connaissez le fonctionnement de notre chère île ? Les strates sont séparés de murailles et de grandes portes, chacune bien gardées. Ainsi, pour se rendre dans l’une des strates supérieurs, ils vous faut un laisser-passer. Et une raison. Ou plus généralement : de l’argent. Ces deux choses vous seront fourni. Vous voyagerez incognitos, ainsi à l’abri des regards, pour vous rendre dans les haut-quartiers, à la rencontre de cet ami, dès que la situation le permettra. Un marchand du nom de Jean de La Marquade. Il possède de nombreux établissements. La plupart liés à l’art. De la Marquade est un individu excentrique et, je dois vous avertir, parfois irritant. Mais c’est un ami de longue date, et son aide nous sera précieuse. Notre accord est simple : si je l’aide, il aidera le Culte. Votre rôle, c’est évidemment d’incarner cette aide que je lui fournie de bon cœur.

    Maintenant, avant de vous en dire plus, j’ai besoin de votre accord de principe. J’attends donc votre réponse.

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    C'est maintenant qu'il faut donner notre accord. Ce genre de grand discours, c'est bien beau ; Mais... je ne vais pas adhérer à une idée aussi dangereuse au quart de tour.

    -Une bombe, et tout ce spectacle ? Lancais-je à voix haute, usant de gestuel afin d'illustrer mes propos, fixés par le reste de l'assemblée constamment occupée à chuchoter à leurs voisins tout en m'observant entre deux. -De ce que je sache jusqu'à maintenant, c'est que vous m'avez envoyé traquer une bande de voleurs de « matériaux », rien là-bas. -Au point où nous en sommes, vous me devez des explications.

    Il me regarde du coin de l’œil, se décale dans ma direction toujours les mains jointes pour retrousser les lèvres et me fixer d'un air des plus neutres. -Bien. Il est vrai que nous n'avons pas pu communiquer ultérieurement après ces événements, et qu'il vous été donc impossible de recevoir davantage d'instructions. Les maigres rapports dont nous avons pu bénéficier concernant cette explosion ayant eu lieu quelques temps plus tôt nous informaient d'une équipe de soldats envoyés par la Dame était en investigation dans ces quartiers pour une intrigante raison. Laquelle vous me demanderez naturellement ; Eh bien, celle-ci aurait reçu un appel accusant ma personne d'être l'auteur de l'explosion.

    Malheureusement, nos recherches ne donnent pour le moment rien quant à la provenance de l'appel. Reprenons, l'équipe aura alors investi un hangar, ce toujours dans le cadre de l'enquête, en raison de registres de matériaux parfaitement erronés. Et c'est malheureusement que, dans l'exercice de leur fonction, ces agents ont trouvés la mort dans l'entrepôt contenant un puissant explosif. L'objectif sera alors de prouver que nous n'avons rien à voir dans cette histoire en invoquant l'aide de l'un des plus fidèles allié du Culte. La tâche se réalisera via De La Marquade, vous procéderez à un simple échange et suivrez ces instructions. La roulotte destinée au transport de la monnaie d'échange sera prête le moment venu. Si j'ai votre accord, vous bénéficierez d'un temps pour vous reposer et vous nettoyer la figure. Surtout vous Horlfsson, c'est une véritable infection.

    Il marque alors une pause avant de jeter un air septique sur chacun de nous. Je ne réagis d'ailleurs pas à sa dernière phrase, point que seul un enfant serait capable de relever dans un moment pareil.

    -L'entreprise est risqué, je le conçois bien. Mais il m'est impossible de me mettre la Dame à dos pour quelque chose dont je ne suis pas l'auteur, peu importe la nature de l'acte. Vos couvertures seront fiables. Nous dit-il. -J'espère que cela répond à votre question ?
    -Eh bien, je n'aurais jamais pu savoir dans quoi je me serais embarqué au départ mais, je suis venu ici pour en terminer une bonne fois pour toute avec tout ça. J'ai bien vu qu'il était impossible de partir de l'île... Alors si c'est la seule solution, je le ferais.

    Je me tourne instinctivement vers Klara, la personne qui m'aura accompagné depuis un moment que je retrouve encore ici. Je pensais qu'elle serait partie... à croire que cette fois, ce n'est plus elle seule qui s'enfonce dans la gueule du loup.

    -Peut-on en discuter dehors ? Que je lui chuchote, la scène observée par Siegfried. Tout se fait alors rapidement, elle me fait un léger signe de tête, chose que je transmet au chef du Culte qui acquiesce tout en montrant d'un signe de tête la porte menant à l'extérieur. Sur des jardins et un cimetière.

    Je m'assois en premier sur un banc quelconque, fatigué par la route dans les égouts et le manque de sommeil, ne prenant même plus compte de mon apparence misérable en ce moment même. Elle me regarde, prête à écouter.

    -Eh bien, je ne pensais pas te revoir sur cette île. Encore moins dans ces circonstances. Lui dis-je avec lassitude, regardant droit devant moi pour lui lâcher un regard ensuite. Elle recule un peu, gênée par l'odeur pour me regarder à nouveau. -J'aurai préféré partir, crois moi. -Fort bien. Bon, nous n'avons pas beaucoup de temps devant nous vu la situation alors je vais faire simple. Ici, il n'y a personne à qui je peux faire confiance à part toi. Quand je t'ai donné rendez-vous sur l'île, tu aurais très bien pu partir et empocher la prime pour disparaître. Mais non, tu es resté.

    C'est alors que je me lève pour étendre tout mon poitrail, fier et droit comme un guerrier à l'époque où j'étais encore avec les miens. J'avais espoir en ce moment, et c'est en tendant le bras que je m'exprime, solennel. -Es-tu avec moi pour en finir une bonne fois pour toute avec tout ça ?
    -Je suppose qu'après ça, on sera quitte. Me dit-elle après avoir brièvement soupiré.
    -Très bien, merci. Je vais retourner voir Siegfried pour voir s'il peut m'aider à me... rafistoler ; Ainsi que pour les instructions. Éventuellement voir aussi pour nous -me- reposer avant ça. Tu devrais en faire de même, nous nous concerterons pour la mission après.

    Et c'est en partant pour quémander la toilette à Siegfried qu'elle m'interpelle.

    -Tu as l'air de pas mal l'apprécier.
    -Il est notre porte de sortie, rien de plus. Et, pour ta gouverne, sache qu'il a assez joué avec ma patience. Il a intérêt à tenir sa parole quant à l'efficacité du plan. Je marche avec toi sur ce coup, comme pour Davinson. Terminai-je avant de repartir pour de bon vers la bâtisse.

    Une fois retourné là-bas, j'informe le meneur de notre approbation et lui demande finalement s'il serait en mesure de m'offrir de quoi me nettoyer.

    C'est vrai, le Culte n'est pour moi qu'une église sombre et poussiéreuse. Mais il faut croire que non, Siegfried peut effectivement m'offrir un bain en ordonnant à quelques fidèles de préparer un bain et aussi de me trouver de nouveaux vêtements à ma taille. Il s'avère que le bâtiment est plus grand que je ne le pensais, j'apprends alors que plusieurs salles me sont inaccessibles et resteront secrètes à mon égard de par le fait que je suis de base étranger à l'entreprise.

    On me guide après quelques minutes à patienter vers une petite pièce dotée d'un duvet à même le sol, quelques bougies ainsi que la fameuse bassine -tout de même imposante-, l'endroit semblant être une sorte de salle de vie m'ayant été aménagée juste pour ce moment, le plumard étant clairement mis au sol récemment.

    Et c'est en commençant à retirer une par une mes pièces d'armure qu'une autre personne vient en toquant timidement. -Je me chargerai de nettoyer votre armure, sir.
    Je reste un peu sans voix, quelque peu gêné et jetant un regard « jaloux » sur ma tenue. Accepte leur hospitalité Hevrard, la suite risque d'être longue. -Je veux bien, merci. Dis-je simplement en déposant les pièces près de la porte.



    Requinqué, c'est alors que je m'allonge tout en plaçant mes armes à côté de moi à même ce fin matelas pour ensuite commencer à déjà fermer les paupières. Je repense à tout ce que j'ai déjà fait pour venir ici, ce que nous nous apprêtons à faire moi et Klara. Que nous risquons nos vies et nos statuts en commettant pareils actes. Et je pense à elle aussi, j'ai plus l'impression de l'avoir emmené dans un nid à problèmes que de l'avoir vraiment aidé. J'espère que tout se finira bientôt... La fatigue me prend, les pensées défilent et Morphée me fauche.

    ***

    A moitié réveillé et un bras devant les yeux, je commence à entendre de l'agitation dans les couloirs et pièces à côté. Des gens parlent et s'activent mais le réveil assez soudain altère ma perception des sons. Une personne entre alors, je me redresse et voit alors Klara, dans une élégante robe rouge, la tête couverte d'un large chapeau de la même couleur. Qu'est ce que cet accoutrement...

    -Il est l'heure. Me dit-elle placidement. Siegfried dit que nous n'allons pas tarder à partir. Des gens viendront te fournir ce dont avec quoi tu dois t'habiller. Sur ce, je retourne terminer mon déguisement.
    -Hmpf... Que je grogne.

    Je me redresse, me fait craquer le dos et la nuque, je suis prêt. En pleine forme, cela m'aura fait du bien. Que la fille soit elle aussi fin prête, c'est maintenant ou jamais.

      – Relève la tête !

      Le garde endormi releva son casque pour voir devant lui. La file n’avait pas bougée d’un poil. La journée allait être longue.

      – Redresse-toi ! Reste sur tes gardes.
      – Y s’passe rien chef.
      – Rien ?!

      Le capitaine s’énerva soudainement, donnant une tape à l’arrière du casque de son sous-fifre. Devant lui, les mêmes personnes se faisaient contrôler. Leur carriole, une simple voiture traîné par un cheval, était remplie de petits sacs que les gardes s’efforçaient de fouiller. Et derrière ce premier convoi, des dizaines et des dizaines d’autres patientaient longuement, formant une file similaire à un serpent, recouvrant tout le chemin sinueux qui partait des bâtisses de bois en contre-bas et menait jusqu’à l’immense porte.

      C’était ici que s’était formé la ferme séparation entre les quartiers pauvres et la cité. La muraille qui séparait était si haute et épaisse qu’il semblait impossible de l’endommager d’une quelconque manière, et la porte de bois qui servait de passage était en fait un immense bloc de bois, qui se soulevait et redescendait grâce à un mécanisme de cordes et de poids. Plusieurs miliciens étaient visible sur les hauts remparts, effectuant une ronde pour s’assurer que personne n’outrepasserait les règles. Et, vers la porte, un groupe de soldat était attroupé, vérifiant et fouillant chaque personnes souhaitant rentrer.

      Et si le passage vers les hauts-quartiers avait toujours été protégé et nécessitait un laisser-passer en règle, les contrôles avait doublés depuis l’incident du port. Et par conséquent, les files d’attente aussi.

      – Allez-y, tout est en règle.
      – Rien… pour le moment, repris le capitaine, en réajustant son uniforme. Mais regarde ! Tout le monde est sur les nerfs dans les quartiers, les gens qui veulent partir ne peuvent pas, tout le monde est suspecté. Le supérieur m’a dit qu’on occupait un poste d’extrême importance !

      Il bomba le torse, tapant le sol de sa lance avec force.

      – En attendant, y s’passe rien.

      La première carriole s’avança, son conducteur fatigué et las d’avoir attendu si longtemps. L’un des soldats fit un signe de main en direction du haut des remparts. Le mécanisme s’activa et la lourde porte se souleva suffisamment pour laisser passer la personne autorisée.

      – Suivant.

      Le prochain convoi s’avança. Le conducteur, un cocher à l’allure rustre et à moitié caché derrière un chapeau rond noir et le col de son long manteau de cuir, étrenna les rênes pour s’arrêter pile au milieu des soldats qui encadraient la route. Derrière lui se trouvait une petite cabine de bois, surélevée, dans laquelle on pouvait apercevoir, sur un fauteuil bien plus confortable que celui du conducteur, une jeune femme qui s’éventait lentement. Son haut chapeau, sa chevelure rosée et sa tenue excentrique lui donnait un air assez peu commun.

      Attentats Bloodb10

      – Laissez-pa-

      Le cocher plongea sa main et en sorti un papier à moitié chiffonné, le tendant au garde avant même qu’il n’ai pu finir sa phrase.

      – Hmm… Sceau officiel… invitation de De la Marquade… transport de marchandises… ( Il fit signe à ses collèges de commencer la fouille ), taxe payée… Vous venez de loin, madame … ?

      Le cocher toussota, aussitôt, la jeune femme pris la parole.

      – Mademoiselle. Mademoiselle Silia Lizeroy. Mon père possède quelques plantations sur Feola. Entre autres. Nos parfums sont réputés, vous savez !

      L’un des gardes invita la jeune femme à sortir de la cabine afin de la fouiller de fond en comble. Il ouvrit une des petites boites en bois que contenait la carriole. Une forte odeur de vanille et de citron s’éleva et fit tituber le garde, qui éternua.

      – Grossier personnage… murmura la Lizeroy avec dédain.
      – Je suis juste les ordres, m’dame.
      – Fort bien. Je suis à la tête de cette filière, reprit-elle après un léger blanc.
      – Ah oui.
      – Les bénéfices ont triplés depuis. On exporte un peu partout sur les bleues.
      – Hmhm.
      – De la Marquade, fidèle à lui-même, tenait à rencontrer l’experte derrière tout ça.
      – Je vois.
      – Et cette experte, et bien, fidèle à elle-même, a tenue à rencontrer un si grand et réputé client. Un homme de goût, assurément.
      – ‘parait.
      – Nos échanges épistolaire, bien qu’extrêmement intéressants, ne remplaceront pas une véritable visite en personne.

      Un autre garde vérifia le dessous de la carriole, toqua sur les parois, puis, déçu, revint vers le capitaine, lui signalant que tout semblait être en règle. Le cocher lui adressa un regard éloquent, replaçant son manteau de façon à cacher le coutelas aiguisé qu’il portait à la ceinture. Silia continua de s’éventer et de parler, tout en remontant gracieusement dans sa cabine, à l’abri du soleil.

      – J’espère tout de même que la cité n’a rien à voir avec ce… dépotoirs. Mon dieu, qu’ils aient la décence de se cacher au moins, au lieu d’étaler leur pauvreté ainsi…
      – Oui, oui. Bon séjour.

      Le convoi passa enfin la porte, s’engouffrant ainsi dans la haute cité.

      – Pfff, suivant.

      * * *

      – Je ne pensais pas ça possible, ricana Hevard.
      – Quoi ?
      – Que tu puisse parler autant.
      – Avant aujourd’hui, je me serai jamais imaginée travailler trois fois de suite avec la même personne. Comme quoi, tout est possible.

      Klara, au fond de sa cabine, avait enlevé son chapeau et se grattait les cheveux. Sa tenue entière la démangeait. Combien de temps allait-elle avoir à supporter un tel accoutrement ? Impossible de se battre avec ça. Elle avait dû puiser toutes ses forces pour assumer son rôle de fille de noble richissime. Maintenant, elle n’avait qu’une hâte, c’était d’en finir. Ils étaient passé : c’était le plus important.

      Devant eux s’élevait d’immenses bâtiments, grouillant de vie en cette journée ensoleillée. Le contraste avec les quartiers pauvres était tel que la chasseuse avait du mal à croire qu’elle n’avait pas changé de pays.

      Les rues étaient pavées et parsemée de jolis lampadaires qu’un vieillard s’employerait sûrement à allumer à la nuit tombée.

      On y croisait tout un tas de différentes personnes : des couples, de gardes, des servants accomplissant une quelconque tâche, des artistes, et autres.

      Mais aucun mendiant, aucune prostituée, aucun malade.

      Le convoi passa devant un café d’où émanait des bruits, des chants, et des rires. Quelques personnes se trouvaient devant l’enseigne, profitant du beau temps. Ils la dépassèrent sans s’arrêter. Plus loin encore se trouvait une grande salle de fête, qui semblait, d’après les affiches, accueillir une sorte de vernissage.

      Il passèrent devant un couple, riant et s’embrassant. C’était comme si les événements récents des quartiers pauvres n’étaient jamais arrivés.

      Enfin, ils arrivèrent à leur destination. Un immense portail, ouvrant sur un large chemin de terre entourés de fleurs, menant jusqu’à un somptueux manoir dont les fenêtres laissez entrevoir beaucoup de mouvement. Le garde chargé de surveiller l’entrée leur fit signe.

      – Silia Lizeroy ? Fit-il en direction de la cabine, plongée dans l’obscurité.
      – C’est bien elle, répondit Hevrard.
      – De la Marquade vous attend.

      Il leur ouvrit le portail, qui émit un léger grincement. La voiture s’engouffra lentement dans le domaine. Tout y était parfaitement entretenu et méticuleusement à sa place ; les fleurs, pour la plupart exotiques et inconnues de Klara, la grande fontaine qui décorait l’entrée devant le manoir, les bancs sculptés non pas pour être confortables, mais pour être le plus esthétique possible.

      Le convoi s’arrêta sur le chemin de cailloux qui faisait le tour de la fontaine et qui menait jusqu’aux escaliers de la bâtisse. Deux autres gardes étaient postés à l’entrée. Klara en remarqua trois autres dispersées un peu partout dans les jardins.

      La double-porte d’entrée s’ouvrit soudainement, laissant apparaître un homme mûr, vieillissant mais encore vif, habillé à la manière classique des nobles.

      Attentats B2bea310

      Il prit appuie sur sa canne, plus par habitude et pour la prestance, que par véritable nécessité, puis rejoignit les deux invités.

      – Aaah… Enfin. Charles, emmène l’attelage à l’arrière. Bienvenue !

      Il ouvrit la porte et aida la jeune femme à descendre en lui tendant la main. Elle garda avec elle l’un des coffrets qu’ils transportaient, pour l’apparence.

      – Venez ! Entrons.

      Si l’extérieur était déjà parfaitement ostentatoire, l’intérieur parvenait à l’être encore plus. Des tableaux de tout type recouvraient les murs tapissés de fleurs de lys. Plusieurs tables en bois sculptés jonchait l’entrée. De la Marquade les mena tout deux à l’étage, les invitant à gravir les marches d’un escalier recouvert d’une moquette bleue, digne des plus grands palais.

      Ils traversèrent tout un couloir, avant de rentrer dans une vaste pièce qui servait de bureau. Celui-ci, tout aussi unique que le reste des meubles, était recouvert de papiers soigneusement rangés en pile, de plumes et de pots d’encres, ainsi que d’un plateau d’argent sur lequel étaient disposés des verres et une bouteille de vin.

      L’hôte prit le petit coffret que tenait Klara et le posa sur l’une des commodes qui meublait l’endroit, à côté d’une énorme bibliothèque remplie de manière à ce qu’il n’y ai plus aucun espace dans lequel l’air aurait pu passer. Il prit l’un des flacons de parfum et l’ouvrit, renifla doucement, mais n’eût aucune réaction particulièrement, et resta parfaitement neutre.

      – Hm… Exécrable. Siegfried n’a pas du aller chercher bien loin… Asseyez-vous, chers invités.

      Il prit lui-même place sur un large fauteuil, et posa ses mains sur les rebords. Il remarqua que Klara était entrain d’essayer de rendre sa tenue un peu plus confortable, en tentant de se débarrasser d’éléments superflus et peu pratique.

      – Je vous conseille de conserver vos tenues encore un peu. Vous êtes ici en sécurité. Considérez cette propriété comme étant l’ambassade du Culte dans les hauts-quartiers. Elle l’est le temps que cette affaire se tasse. Mais n’attirez pas l’attention, et encore moins sur moi.

      Il leur servit à tout deux un verre de vin.

      – Les préparatifs ne sont pas tout à fait terminé, aussi permettez-moi d’être votre hôte le temps que vos talents ne soient requis. Miranda est entrain de vous préparer une chambre à chacun, à l’autre bout du couloir. Vous êtes libres de vous y installer à votre aise. Bienvenue dans la haute cité de Saint Urea.

      Après avoir finis leur verre, ils se levèrent et prirent la direction de leurs nouveaux quartiers.

      – Mademoiselle Lizeroy ? l’interpella De la Marquade avant qu’elle n’ait quitté la pièce.
      – Oui ? Répondit Klara, habituée à utiliser ce nom.

      Il lui tendit le coffret de parfum.

      – Reprenez-ça, je n’ai aucune envie de polluer mon espace de travail.

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      Il y a longtemps, à l'époque où tout allait bien.

      -Non, ton enchaînement est désordonné. De pareils attaques contre l'ennemi et tu es mort, tu dois recommencer.

      Le jeune Hevrard reprenait alors son souffle tout en éjectant une sorte de râle et, l'épée toujours solidement tenue, il réitérait sans précision aucune le combo que tentait de lui enseigner son maître, Thorgal.

      -Non, non et non ! C'est toujours aussi mauvais ! S'emporte alors le mentor, saisissant alors son élève au poignet et au niveau de la nuque pour lui asséner un puissant balayage. -Relève-toi. Lui dit-il tout en tendant sa main, tout en lui époussetant le dos, paternellement. -C'était bien mieux hier, Hevrard. Qu'est ce qui t’arrive aujourd'hui ? Tu n'es pas concentré... Pas du tout même. Tu es malade ?
      -Pardonne ma maladresse. C'est juste que..
      -Hum ?

      C'est en gardant le silence quelques infimes secondes et le regard fuyant que le Guerrier en devenir se lançait.

      -Est-ce que... J'aurai un jour le droit à une vie « normale » ?
      -Qu'est-ce que tu entends par une vie normale ? Profiter du bonheur qu'a à offrir la vie ? Ne se soucier de rien, avoir une femme et mettre ta lame au placard ?
      -Oui, dans l'idée.
      -Eh bien, si je devais t'apporter un élément de réponse, -même si ma place n'est pas la plus légitime pour répondre- ce monde n'est pas sûr et je n'ai plus à le prouver, tu l'as bien vu par toi même, non ? De plus, je ne fais qu'honorer la volonté de ton père, dans la plus pure tradition de notre clan. Je ne suis qu'un allié fidèle, comme tu le sais bien, mais je me sens ici chez moi, prêt à défendre les miens.

      Le jeune homme ne répondait pas, comprenant qu'il resterait coincé dans cette vie de perpétuel combat, juste par tradition. Qu'il ne goûtera pas aux plaisirs simples, s'imaginant même se voir interdire celui de la chair. L'incertitude planait dans son cœur en ce moment, le fait d'avoir vu une autre facette de la vie avait perturbé le martial.

      Peut-être était-ce parce qu'il désirait tout simplement autre chose ?

      -Eh, on ne me la fait pas, tu sais. J'ai l'air décrépi et semblant dater de la création du monde dans cette vieille armure, mais j'ai vécu avant toi, mon ami. Dit posément Thorgal, les bras croisés à côté de son protégé, lui tendant un léger sourire, la tête à peine penché.
      -De ? Lui demande Hev timidement et avec étonnement.
      -C'est cette rousse que tu n'arrêtes pas d'observer lorsque nous nous rendons dans la guilde guerrière de l'ile voisine. Lorsqu'elle est dans la pièce, il m'est impossible de te ramener dans le monde des vivants ! Hahahaha !
      -M-Mais non, ce n'est pas vrai. Répondit de plus en plus faiblement l'apprenti, directement trahi par la rougeur lui ayant directement tapissé le visage.

      C'est alors que le maître se place fièrement devant l'élève pour poser ses mains gantés et maillés sur ses épaules. La forêt dans laquelle ils se trouvent se prêtait parfaitement au discours qui allait suivre. Brumeuse, terne, brut et froide.

      -Mêler ce genre de choses dans ce que tu entreprends, c'est perdu d'avance.
      -Jusqu'à maintenant, j'ai surpassé tous les obstacles qui se sont dressés sur ma route ! Si je veux la conquérir, alors je le ferais.
      -Ce n'est pas aussi simple que tu le dis, Hevrard. Les relations et ce que tu fais n'ont rien à voir entre elles, tu fais face à deux mondes différents. L'alchimie entre deux êtres est quelque chose d'incertain, tu sais. Tu peux t'éprendre de quelqu'un pour au final ne récolter que déception, car cette personne n'en aura que faire de toi, peu importe si tu tues ou commet l'impensable pour elle. C'est comme ça, elle pourra peut-être se pencher vers autrui et faire naître des sentiments néfastes tel que la jalousie, et te diriger vers le pire. Aller dans ce sens c'est s'aventurer vers son auto-destruction, car tu ne pourras pas forcément te mettre dans la poche qui tu veux. Par contre, ce que je t'enseigne est bien plus gratifiant, plus véritable que tous ces artifices dont la plèbe se targuera pour s'adapter et se conforter dans sa mesquinerie. Avec ce que je t'offre, tu iras bien plus loin. Tu seras l'Arme, crainte de tous et qui n'usera d'aucune bassesse pour arriver à ses fins, à toutes autres fins.



      Mais aujourd'hui, c'est moi qui décide.

      -Hevrard ? HEVRARD ?! Me tonne Klara, tentant de capter mon attention, totalement perdu dans mes pensées à regarder par la fenêtre de cette belle chambre menant aux jardins. Elle était entré dans ma chambre sans même que je ne m'en aperçoive, à croire que j'aurai sous estimé ses capacités félines, ou bien suis-je totalement à l'ouest.
      -Hm ? Que se passe-t-il ?
      -Le nobliau propose de nous faire visiter les lieux, tu viens ?
      -J'arrive dans cinq minutes. Pour immédiatement me remettre à fixer la fenêtre déposant mon regard sur un vaste jardin parfaitement tondu, jonchés stratégiquement de fleurs aux couleurs aussi pimpantes que jamais.
      -Tu es sûr que ça va ? Me demande-t-elle, tenant sous le bras son petit coffre attitré d'où émane une odeur infecte.
      -Oui, oui.

      Peu convaincue mais non désireuse de forcer le coup, cheveux enneigés m'accorde un simple signe de tête pour tourner les talons et fermer la porte derrière elle.

      Je prends alors le temps de m’asseoir sur ce lit deux places à la couette satinée et à la structure faite de chêne -impeccablement verni-, la lumière en ces lieux circule merveilleusement, se reflétant contre le sol de losanges blancs carrelés. Il y a même une armoire une fond de la pièce, contenant quelques vêtements -étonnement adaptés à ma taille, comme quoi le Culte prévoit vraiment tout- ainsi que d'un imposant bureau lui aussi fait du même bois que le lit. Chapeau et veste retirés, je sors d'une des poches intérieures un petit papier plié en quatre ; Que je prends soin de déplier doucement afin de ne pas perdre sa contenance : une petite clé.

      Donnée par Siegfried, c'est ce qui nous servira de monnaie d'échange une fois que Jean aura rempli sa part du marché. En effet, il sera notre guide et opérateur à travers les hauts-quartiers, moi et Lizeroy ne connaissant ne serait-ce qu'une seule rue de cet endroit. Tout devrait bien se passer, même si le doute me ronge de plus en plus, sans parler que je n'ai ni mon épée ni mon armure, restées au Culte. S'il devait m'arriver quelque chose, Siegfried s'engage à envoyer quelqu'un enterrer mes affaires sur l’île où j'ai vécu avec mon peuple (ayant précieusement gardé les coordonnées depuis toujours).

      Sur ce, il est temps d'aller nous « promener ».

      ***

      Dans les hauts-quartiers, dans un bureau sombre et encombré d'objets et de paperasse en tous genre, allant du simple stylo au globe illustrant les bleus au possible. On aurait l'impression que la poussière s'était installé depuis longtemps jusqu'à former une couche sur toutes les parois possibles de la pièce, donnant même le sentiment de pouvoir obstruer les rayons du soleil passant à travers les vitraux grisâtres. Un homme est présent dans la pièce, vêtu d'une simple chemise blanc cassé au col largement dégagé, bourru et dégarni au possible, son crâne bossu de part en part ne ressemblant qu'à un vulgaire chou-fleur. Il griffonnait sur bon nombres de feuilles à une vitesse folle, se grattant l'arrière de la tête en chuchotant à une allure similaire à son écriture. Soudain, on toquait à la porte. Il redressait la tête, fixant un point quelconque de son bureau, comme bloqué dans une dimension inconnu dont seule la personne qu'il incarnait était la seule entité peuplant ces lieux.

      -ENTREZ. Hurle-t-il en claquant son encrier.
      -Monseigneur. Dit le frêle jeune homme lui luxueusement vêtu tout en s'inclinant.
      -JE N'AI PAS BEAUCOUP DE TEMPS MERLIN, PARLEZ.
      -Il s'avère que les agents de terrains ont remarqués une activité suspecte, Monseigneur.
      -HM ? MAIS DE QUOI PARLEZ-VOUS ? QUELLE ACTIVITÉ SUSPECTE ? VOUS M'EMBROUILLEZ L'ESPRIT MERLIN, JE VOUS AI DÉJÀ DIT QUE JE N’APPRÉCIAIS GUÈRE, VOUS TENEZ A PERDRE VOTRE TRAVAIL ?!
      -Aucunement, Monseigneur. C'est vous même qui avait donné l'ordre de repérer la moindre parcelle de suspicion ou d'activités possiblement illégales chez vos concurrents.
      -AH.... OUI, OUI EN EFFET, JE L'AI BEL ET BIEN DIT. SAVEZ-VOUS POURQUOI D'AILLEURS ?
      -Hum... Si je ne m'abuse, oui, Monseigneur.
      -POURQUOI ? JE VEUX VOUS L'ENTENDRE DIRE.
      -Parce que vous êtes le m-
      -LE ? LE LE LE LE ?
      -Le meilleur.
      -HM ? JE CRAINS DE NE PAS AVOIR ENTENDU. PARLEZ PLUS FORT, JE ME FAIS VIEUX VOUS SAVEZ.
      -Le meilleur.
      -C'EST TOUJOURS LA M-
      -LE MEILLEUR, MONSEIGNEUR. VOUS ÊTES LE MEILLEUR !
      -PAR LES CINQ ÉTOILES, VOUS OSEZ LEVER LA VOIX EN MA PRÉSENCE, MERLIN ?! VOUS TENEZ TANT QUE CA A PERDRE VOTRE TRAVAIL ?
      -N-non, je voulais que vous entendiez bien l'expression de mes pensées à votre égard, M-Monseigneur.
      -BREF. PARLEZ.
      Merlin usait alors d'un fin raclement de gorge, déroulait un parchemin d'apparence solennel, se tint bien pour s'exprimer. -Ce jour à été aperçu, aux alentours de midi, passant La Porte séparant les deux quartiers -en direction du Haut-, une carriole transportant divers marchandises de cosmétiques, cargaison représentées par Dame Lizeroy et son cocher Elliot Makintosh.
      -ATTENDEZ...
      -O-oui ? Répondit le valet, dans un sursaut presque imperceptible.
      -MAKINTOSH... CA ME RAPPELLE QUELQU'UN...
      -Et qui ça, Monseigneur ?
      -EH BIEN MOI, JINTOSH LUI-MEME BOUGRE D'ANE. MAKINTOSH... JINTOSH, VOUS SAISISSEZ ?! BWAHAHAHAHA ! POURSUIVEZ.
      Manquant de s'étouffer face aux perpétuels et littérales crises de son employeur, Merlin reprit aussitôt. -Il s'avère que la caravelle s'est dirigée chez l'un de vos plus grands concurrents, Monseigneur...
      -NE ME DITES PAS QUE...
      -Si Monseigneur, Sire De La Marquade en personne.
      -BON SANG DE BONSOIR, JE M'EN DOUTAIS. LE FOURBE... Il est vrai que j'avais mis de côté l'industrie cosmétique depuis un petit moment, et s'il serait en train de me devancer. Les bénéfices pourraient largement suffire à étendre son commerce sur la durée et ainsi me devancer dans la plus parfaite des discrétions discrète.
      -Que comptez-vous faire, Monseigneur ?
      -DES CE SOIR, VOUS M'ENVOYEZ LE SINGE INSPECTER SA DEMEURE, JE VEUX SAVOIR CE QU'IL EN EST DE CES ÉCHANGES COMMERCIAUX. BIEN COMPRIS ?
      -En êtes-vous bien certain Monseigneur ? La dernière fois que vous l'avez envoyé quelque part, il est revenu avec une patte brisée.
      -NE REMETTEZ GUÈRE MON JUGEMENT ET MES DÉCISIONS EN QUESTION, MÉCRÉANT. C'EST JUSTE QU'IL N’ÉTAIT PAS PRÉPARÉ. LA DERNIÈRE FOIS, C’ÉTAIT UNE ERREUR. MAINTENANT FUYEZ, J'AI DU TRAVAIL ET UN RIVAL A METTRE HORS PISTE.

        Dans les bas-quartiers, vers d’anciens quais laissé à l’abandon, un étrange attroupement s’était formé sur la petite bande de terre boueuse, recouverte de déchets. Les pauvres y étaient de plus en plus nombreux. Et, dépassant de plusieurs têtes la plupart des habitants, se tenait au centre de l’attention un homme fort, surélevé par une épaisse caisse de bois. Entouré de personnages encapuchonnés, Siegfried parlait d’une voix forte et maîtrisée.

        – Oui, oui, ce sont de sombre jours pour Saint Urea. Pour votre Saint Urea ! Mais sachez que vous n’êtes pas seuls. Loin de là. Rien ne pourra empêcher la Miséricorde de vous accorder votre dû ! Rien ! Ni les fauteurs de troubles, ni les soldats, personne !

        Des miliciens étaient entrain d’approcher de la scène.

        – C’est pourquoi, moi, Siegfried, vous promets de couvrir l’entièreté des frais de reconstructions et de dédommagement, pour vous et vos familles, pour tout ceux touchés par cet odieuse attaque ! Je m’en assurerai personnellement !
        – Messieurs, fit le chef de la petite troupe de la milice, messieurs, écartez-vous. Les mouvements de foule ne sont pas sûrs.
        – Et pour tout ceux qui se retrouvent à dormir dehors, dans le froid et la nuit, sachez que la maison d’Aballon vous ouvre ses portes ! Le prieuré vous accueillera.
        – Messieurs, ce n’est pas sûr…
        – Mais nous ne craignons pas le danger ! s’exclama Siegfried.
        – Ce n’est pas sûr, et c’est par conséquent interdit… tant que la situation ne sera pas rétablie.
        – Et quand le sera-t-elle, cher soldat ? Quand ?!
        – Dispersez-vous, sans faire de vagues, allez allez.

        * * *

        – Bon sang, soupira Siegfried, en refilant à Numéria sa tenue d’extérieur – un long manteau noir possédant une large capuche dissimulant une bonne partie de son visage –, ils ne nous lâcheront pas.
        – Vous ont-ils… secoué ?
        – Bien sûr que non.

        Il posa ses coudes sur l’un des bancs de la pièce principale de l’église. Ce qui servait de quartier général au Culte de la Miséricorde était bien plus actif qu’à l’accoutumé, et l’endroit était remplis de monde. Des réfugiés, des blessés, ou tout simplement des sans-le-sou. Depuis l’explosion et les blocus et contrôles qu’elle avait engendré, le nombre de gens dans le besoin avait doublé. Plus de travail pour le Culte, plus de dépenses pour le Culte, mais tout de même une aubaine pour le Culte.

        – Ils n’oseraient pas. Non. Mais regarde dehors. Des miliciens. Des agents, partout. Nos moindres faits et gestes sont épiés et reportés.

        Il se releva, las, puis pris la direction du long et sombre couloir qui menait vers la porte de son bureau. Suivit par Numéria, il continua.

        – Continuons d’agir comme à l’accoutumé. Des nouvelles de Malmere ?
        – Non, monsieur. Mais Anatole s’occupe de remédier à son problème.
        – Hmpf.
        – Et…
        – Quoi ?
        – Nous dépensons beaucoup trop. Nous n’avons pas les moyens de s’occuper de tout ceci et de vos projets. Tout simplement pas les moyens. Si la Dame apprend que-
        – Si elle apprends quoi, Numéria ? J’ai effectué, j’effectue et j’effectuerai encore les tâches que l’on m’a assignées en me confiant les rênes de ce projet. Calmer les quartiers. Tenir les pauvres. Et oui, endiguer la progression de la révolution dans ce dépotoir. C’est ce que je fais… à ma manière. Car il est hors de question que cette église devienne le repère d’agents du gouvernement. Et elle le sait très bien. Notre plus grand et unique allié, c’est le peuple. Alors ne fait pas attention à ces questions d’argents. Si tout se passe bien, ce ne sera plus un problème très longtemps.
        – Tout ne semble pas se passer pour le mieux.
        – Les chasseurs et De la Marquade nous feront gagner un temps précieux, en plus de commencer à me disculper. Espérons qu’ils se dépêchent.

        * * *

        Ils avaient commencé par faire le tour de l’une des grandes places de la ville. Puis ils étaient partie manger dans un des plus grand restaurant du quartier, et l’un des meilleurs, selon De la Marquade. Le fait qu’il en soit le propriétaire n’ayant, selon lui, absolument pas altéré son jugement. Ils étaient ensuite passés par différentes boutiques de vêtements, de produits de luxe et de tout un tas d’autres choses dont Klara et Hevrard n’avaient que faire. Lorsque ces derniers proposèrent à leur hôte de visiter l’un des forgerons les plus réputés de l’île, De la Marquade leur indiqua purement et simplement que leur couverture ne le permettait pas. Une couverture qui, à ce moment précis, convenait parfaitement à la chasseuse ; se plaindre faisait partie intégrante du personnage. Car il était évident que De la Marquade cherchait à détourner leur attention pour ne pas répondre à leurs questions. Et il n’y avait pas grand-chose de plus irritant que ça.

        De retour dans la carriole du riche marchand –similaire en taille à celle qu’avait utilisé Hevrard et Klara, mais en bien plus ostentatoire--, le géant profita des parois de bois pour parler en toute liberté.

        – Bon sang, on a passé tout l’après-midi dans ces rues !
        – Vous avez apprécié le petit séjour ? Il reste encore évidemment d’intéressantes choses à voir.
        – Les quartiers pauvres sont entrain de s’enflammer, et vous, vous ne faites faire les boutiques ?!
        – Calmez-vous Elliot, je vous prie. Vous n’avez aucune idée de ce qu’il se passe par ici.
        – Évidemment, vous ne nous avez rien dit. Rien sur notre objectif, rien sur son but, soupira Klara, le visage las et plaqué contre la vitre, observant tranquillement les habitants vaquer à leurs occupations.
        – Précisément ! Vous n’avez pas besoin de tout savoir. Mais… Il vous faut un minimum d’informations, j’en conviens.
        – Je pense qu’il est grand temps de nous les donner.
        – Patience, mon cher. Attendons au moins la fin de la journée, que les préparatifs soient sur la fin. Et puis, le grand jour est peu propice aux complots. Attendons la fin de journée, la nuit est bien plus attrayante pour nos affaires.

        * * *

        Il installa un étrange appareil sur la longue table au centre de la pièce. Une fois celui-ci parfaitement droit et parallèle par rapport aux bords, De la Marquade prit un air de contentement et s’assit sur l’une des chaises, fixant la Lune, haute dans le ciel. Hevrard et Klara s’étaient tout deux assis à l’autre bout, attendant patiemment que le marchand ne leur explique la raison de leur présence dans cette pièce, située face au bureau.

        En face de la table se trouvait un large tableau, vide de toute inscription, aussi blanc que la neige. Finalement, De la Marquade prit la parole.

        – Vous voulez savoir ce que vous faites ici. Je ne peux rentrer dans les détails. N’oubliez pas que vous êtes, dans cette situation, des hommes de mains. Vous n’avez pas conséquent pas besoin de connaître tout les tenants et aboutissants de cette affaire. Mais je vais tout de même partager avec vous les informations les plus importantes pour vous.

        Pour ponctuer sa tirade, le marchand pressa un bouton sur l’appareil, qui s’apparentait plus à un mélange d’escargophone et de coquillage. Soudain, la tableau n’était plus vide.

        – NANDA ?! s’écria Hevrard, bondissant de sa chaise, sans éviter de la renverser dans le mouvement.
        – Mais enfin, calmez-vous Elliot. Ce n’est qu’une image.

        En effet, le blanc du tableau avait laisser place à une image, une sorte de portrait tout à fait réaliste d’un individu hautement laid et grassouillet.

        – Par Asgeir, quel est cet étrange artifice ?
        – La technologie, mon cher. Cet appareil capture des images de notre monde et les projette sur toute surface. Fascinant n’est-ce pas ? La qualité n’est pas exceptionnelle, mais l’objet reste utile. Enfin, pas énormément, mais que voulez-vous, je suis tombé amoureux de ce petit appareil. Par ex-
        – C’est qui, ce gros tas ? Le coupa Klara.
        – Hm. Je vous présente le Vil Jindosh. Marchand, tout comme moi. Riche, tout comme moi. Mais les similarités s’arrêtent ici. Cet être est avide, faible, méchant, corrompu jusqu’à la moelle, et n’a, par dessus tout, pas la moindre once de sensibilité artistique. La rumeur raconte qu’il fut, il y a bien longtemps, un homme respectable. Je ne sais pas si c’est vrai, mais je peux vous assurer que ce n’est plus le cas, et ce depuis très longtemps. Vous avez peut-être déjà pu admirer son œuvre dans les bas-quartiers. Il a racheté plusieurs propriété à leurs habitants, afin de leur permettre de ne plus êtres à la rue. Au final, il a augmenté les taxes et les loyers à un taux si outrancier que ces pauvres gens sont partie d’eux-même. Puis il les a cédé à des hommes peu recommandables, heureux d’obtenir une cachette pour leur contre-bande ou je ne sais quels sombre desseins.
        – Quel rapport avec nos affaires ?
        – Tout, mon cher. Il s’agit là d’un de mes pires ennemis. Il me jalouse, voyez-vous. Et ne recule devant rien. A part devant l’effort personnel, peut-être.
        – Je ne vois pas le rapport avec nos affaires.
        – Disons qu’il est lié. Et notre objectif, c’est de le prouver. Oui, chers invités, voilà ce que nous allons faire : nous allons faire tomber Jindosh.

        Bruits de craquements. Léger courant d’air, alors que la pièce semblait être coupée de l’extérieur, les fenêtres étant bien fermées. Pas toutes. Derrière eux, une très légère ouverture faisait passer un mince filet d’air. Et faisait s’évader les mots.

        Et vers le haut, une paire d’yeux jaunes, visible dans la nuit.

        – ATTENTION ! S’écria Hevrard, bondissant une seconde fois de sa chaise, pour se jeter vers la fenêtre.

        Les yeux avaient disparus. L’intrus s’était suspendu depuis les hauteurs, épiant la conversation avec discrétion. Il était remonté. En passant sa tête, le chasseur pu le voir escalader les murs avec une facilité surréaliste, atteignant bientôt le toit.

        – Il part de l’autre côté ! Lança-t-il à Klara, qui parti avec rapidité dans le couloir.
        – QUI A LAISSEZ PASSER UNE TELLE CHOSE ?! s’écria De la Marquade, perdant son sans froid.

        La colère ne lui allait pas.

        La jeune chasseuse avait descendu les escaliers en quatrième vitesse. L’intrus avait sûrement pris la direction des jardins, c’est à dire de la sortie directe. Il fallait qu’elle le devance. Elle ouvrit avec fracas la porte d’entrée, bousculant au passage une servante qui renversa le linge qu’elle venait de plier avec soin.

        Elle couru dans les jardins, malheureusement retardée par ces affreux jupons qui ne faisaient que la ralentir, et dont elle se débarrassa rapidement pour être totalement libre de ses mouvements. Elle sauta par dessus les bancs et les buissons qui entouraient la grande fontaine. Depuis l’une des fenêtres de l’étage, De la Marquade criait des ordres à ses gardes, sans manquer de les insulter.

        Puis, elle le vit. Une silhouette, au loin, courant vers le portail de sortie. Les deux gardes de l’entrée lui bloquait le passage. Mais l’intrus n’en eut cure, et préféra plutôt les contourner, prenant appui sur l’un des murets qui protégeaient l’endroit, afin d’atteindre une autre partie du domaine, plus petite et plongée dans l’obscurité. Il se faufila entre les buissons, puis trouva un petit bâtiment de pierre, servant probablement de remise, sur lequel il pourrait grimper et atteindre les remparts du manoir, s’évadant ainsi en toute tranquillité. Malheureusement pour lui, la chasseuse avait réussi à le prendre de court, et s’était elle aussi dirigée à cette endroit des jardins. La pierre qu’il reçu en pleine cheville lui fit perdre un premier appuie. La seconde pierre qu’il reçu au crâne acheva de le faire tomber avant qu’il n’ai pu atteindre le toit.

        Le coup de pied qu’il reçut entre les jambes mit fin à la partie.

        Klara fut bientôt rejointe par les gardes, puis par confrère chasseur, et enfin par le maître des lieux. Hevrard tâta du pied le flanc de l’intrus encagoulé, dénichant un petit appareil presque similaire au projecteur.

        – Qu’est-ce donc ? Demanda De la Marquade, essoufflé et en colère.
        – Un escargophone, monsieur, répondit l’un des gardes.
        – Quelle mascarade.

        Le marchand écrasa l’animal-téléphone d’un coup de canne.

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        Les mains enchaînées contre le mur et l'air totalement abruti, le captif ne semble pas comprendre ce qui lui est arrivé. Derrière la porte semblant celle d'une cellule, la petite assemblée composée de moi-même, Klara, Jean et quelques gardes ne cessait de chercher des solutions quant au sort de l'intrus. Qu'on jette son cadavre propose l'un des gardes, comme jamais à cran par la situation de crise venant de se produire sous ses yeux. -aussi agacé lui comme ses collègues par les brimades et menaces de licenciement de leur employeur- Et c'est après de longues minutes de réflexion, la tête baissé à observer sa canne tenue à deux mains que le maître de maison s'exprime.  

        -Messieurs -Madame-, l'implication de cet énergumène dans notre entreprise est absolument évidente. Dit-il tout bas, s'adressant au comité. -Mais il est encore trop tôt pour dévoiler toute nos cartes... Bien trop tôt.
        -Si j'peux m'permettre, Sire, votre rival vous a ouvertement espionné, autant le tuer comme j'ai pro-
        -La ferme. Tonnais-je, ordre approuvé par ma partenaire, se contentant de simplement radoucir son regard à mon égard. -Comportons-nous comme des animaux, et nous nous tomberons dans un  vulgaire piège comme l'un d'eux.
        -Hm... Du calme Eliott, vous auriez pu y mettre la forme dans la manière dont vous vous adressez à mes hommes, figurez-vous.
        -Trêve de mondanités, par tous les dieux. Si vous connaissez la suite, Jean, nous sommes tout ouïe.
        -Naturellement, mais pas ici, vous en conviendrez. Messieurs. Dit-il, s'adressant aux gardes présents. -Vous ne relâchez pas votre attention, il restera là aussi qu'il le faudra.

        Et c'est de nouveau que nous nous rendons dans le bureau de De La Marquade, cette fois-ci assurément sur nos gardes quant à la présence d'espions.

        ***

        Dans un sombre couloir aux plusieurs portes bien alignées, espace familier où le sang aura coulé, deux jeunes hommes se déplacent  dans les couloirs, vêtus tout deux du même uniforme militaire. Cette fois-ci, ils ne sont pas masqués. Faute de grade dû à leur âge, ou bien la situation ne s'y prête pas forcément.  Et c'est en s'approchant au fur et à mesure de leur destination qu'une atroce odeur, plus précisément celle de la charogne, emplit amèrement leurs narines.

        -Le chef aurait pu laisser faire ça à quelqu'un d'autre, c'est vraiment dégueulasse.
        -Tellement, puis c'est pas comme si on avait fait un truc de traviole, t'vois. On fait not' taf, c'est pas à nous d'faire ça. Fin j'vois ça comme une punition, je sais pas toi.
        -Ouais mais qu'est ce que tu vas y faire, hein ? Tu vas dire ça au chef, et ensuite ? Hier il a d'mandé à Ramez de l'faire. Bah t'sais quoi ?!
        -Je sais. Il s'est évanoui avant même d'arriver devant la porte, quelle tafiole aussi celui-là...
        -Hum, tu dis ça mais ça sent pas la rose. Fais gaffe, on atterrit en enfer dans deux secondes, mon pote, hinhinhin. Dit le plus téméraire des deux militaires avant de se saisir d'une clé pour ouvrir la « fameuse » porte. -Protège toi le visage, ça va schlinguer.

        Et en effet, l'odeur est extrêmement nauséabonde. Et pour cause ? La pièce a servi à plusieurs séances de tortures, où les murs sont désormais repeints de sang et de morceaux de chair -ou d'organes-. Tout a séché, et les trois corps présents ayant pu habiter une âme auparavant ne peuvent faire qu'émaner de la compassion concernant les horreurs qu'ils ont du vivre, peu importe la nature de leurs actes. Infliger pareilles tortures à un homme, non, ce n'était pas permis. Mais quand de grands intérêts sont à défendre, les méthodes importent peu pour les dirigeants, tant que le résultat est là.

        -Bordel de merde... Ramez aurait vu ça, l'aurait fait un arrêt cardiaque.
        -Je crois que j'vais... Blrgh... ! Mais c'était trop tard, une large galette repeignait déjà une bonne partie du sol.
        -J't'avais prévenu. Et après tu te permets de cracher sur les camarades. Allez, on s'y met à fond et ce sera fini au plus vite. On en tire un chacun et on s'prend le dernier ensemble.
        -Ouais ouais. Répondit celui ayant vomi à l'instant, s'essuyant la bouche d'un revers de la main.

        Des trois cadavres, deux gisent au sol, des parties du corps précisément charcutées, et l'horreur semblait encore visible sur leurs visage, tellement ce qu'ils ont endurés devait être atroce. Le troisième, quant à lui, est retenu à une chaise, la tête entièrement recouverte d'un semblant de sac attaché à l'arrière via de simples fils. Une fois la première besogne faite, le duo va  devoir s'attaquer au dernier cadavre. Nettoyer la pièce et les incinérer, c'était les instructions.

        Ça et seulement ça, rien d'autre.  

        Attentats The-collector-50104c200fc41

        -Pourquoi est-ce qu'on lui a foutu un masque, bordel ?
        -Pose pas d'questions, on fait ce qu'on a à faire. Qu'est ce que c'est glauque, putain. J'aurai pas aimé être à sa place, le chef peut vraiment s'montrer atroce, un vrai boucher.
        Le premier commence alors à tâter son masque tout en lui tournant autour, à inlassablement poser des questions, comme si c'est par exemple possible de voir en dessous de ce fameux masque, semblant lié à la peau via des jours où le sang et les plaies pourries ont séchés, servant de sève naturelle.
        -Par contre j'vais mettre des gants, moi. Dit le plus assuré des deux. -Hors de question que j'le touche, il doit être rongé par les vers à l'heure qu'il est.
        -O-Ouais, envoie m'en une paire aussi, s'teplait.  
        -OK.

        Se baissant pour ouvrir son petit sac en bandoulière présentant l’attirail parfait pour nettoyer ce genre de scène macabre, le soldat en fouille l'intérieur pendant que son collègue continue à tourner autour du mort tout en murmurant des absurdités, histoire de cacher son angoisse.

        Et c'est finalement, animé par une curiosité brûlante que l'impensable se produit. Déterminé à découvrir le résultat d'une barbarie sans nom, c'est en tirant innocemment sur l'un des fil tenant le « masque », que la bête se réveille...

        Les liens au niveau des mains déjà détachés par des jours et des jours de contorsion, le premier jeunôt n'a aucune chance d'esquiver le fin morceau de métal qui vient se loger sous son menton, chutant immédiatement, le regard empli de terreur. Criant des mots pouvant assurément provenir d'une langue inconnu tellement ceux-ci sont incompréhensibles, le « mort-vivant » se rue sur le second, lui aussi n'ayant eu le temps de rien. Frappé à maintes reprises à la poitrine les poings serrés, le téméraire commence à perdre conscience, ne pouvant se dégager des assauts répétés de son terrifiant agresseur. Mais le masqué n'en a pas terminé avec, pas du tout, même.

        Incapable de faire quoi que ce soit, le courageux devenu faiblard se voit fouiller ses poches, se faisant subtiliser son escargophone de service, refusant tant bien que mal de le céder dans un ultime bras de fer. Les deux sont faibles, mais « l'autre » a eu la patience d'attendre, de se libérer de ses chaînes, récupérant ne serai-ce qu'un tout petit peu d'énergie pour le moment venu.

        Les deux jeunes soldats inexpérimentés gisent alors, là, pris par surprise par un individu qui semble-t-il, au vu de son état, revenu d'entre les morts. Incapable de parler correctement du au sang ayant séché et les plaies ayant pourries contre le masque, la victime de Scalpel hurlait à la mort en ce moment-même, tentant de décoller cette paroi -provoquant un bruit des plus sordides- insidieuse au niveau de la bouche, faisant tomber les croûtes et perler le sang au sol, se mélangeant au vomi du craintif. Haletant, titubant dans ce fin couloir, il a enfin les lèvres libérées. Composant un numéro frénétiquement en cherchant une sortie, on répondait au bout du fil.

        -Hm ?
        -Maître ?! MAITRE ?! C-c'est K-orshit...
        -...
        -L-L'opération est un v-véritable échec. Tout le monde est mort ! Je me r-retire... Un géant nous ai tombé dessus à la planque, la milice a gâché l-l'explosif... P-plus rien...
        -Tu ne m'apprends rien, pauvre chien. N'oublie pas les sommes que j'ai du débourser pour que chacun puisse remplir son rôle.
        -O-Oui mais j-.... J'AI TROP SOUFFERT, JE N'EN PEUX PLUS MAITRE... Hurlait le masqué au bout du fil, complètement à bout et sanglotant presque.
        -Et que dirais-tu de récolter toute la cagnotte de tes camarades « morts », pour une dernière tâche d'une facilité déconcertante ?   Après ça, tu pourras revenir.
        -N-n...
        -Réfléchis bien, tes chances de survie en m'écoutant grandiront davantage. Et tu sais bien que les pauvres merdes que vous êtes n'ont rien eu de mieux dans leur vie que mon arrivée, prêt à leur offrir l'incommensurable en échange de loyaux services ?
        -Grrmbl.. -Je n- ne sais p-pas où je suis...
        -Tu demanderas ton chemin. Alors, partant ou préfères-tu encore plus que l'on traîne ta carcasse dans la fange comme on aura sûrement du s'amuser à le faire ?
        -Parlez M-Maitre, je v-vous écoute.
        -Déjà ne me donne pas d'ordre, satané bâtard. Tu visualises bien les Bas Quartiers ? Je ne me suis pas fait chier à vous expliquer pendant des jours, j'espère ?
        -N-
        -Bien. Alors... la dernière chose qu'il te reste à faire... C'EST DE ME BUTER CETTE CATIN D'ISIDOR ! ET FAIS LE BIEN SOUFFRIR. Au boulot, rat d'égouts.

        Plus personne au bout du fil. Escargophone écrasé, l'homme masqué se tourne, talonné par le seul survivant se tenant faiblement la poitrine, sûrement du à un poumon perforé.

        -J'en ai pas fini avec toi. Lui dit le parfait inconnu.
        -F-fils de pute, j'vais t'crever la gueule... Renvoie le soldat confirmé en devenir, les dents serrées par la colère procurée par la perte de son camarade.

        Et celui au masque fit tranquillement machine arrière.

          – Emballez le tout, et dépêchez vous bon sang ! s’exclama de la Marquade, s’adressant à ses hommes.

          Occupés à remplir un chariot de matériel divers et varié, notamment en verre, le marchand prit ensuite la direction de son bureau, où l’attendaient ses invités plus que pressés. Leur hôte n’était plus aussi calme qu’il le fut à leur arrivée. Il tapota sa canne sur le sol à un rythme effréné, ce qui le détendait peut-être, mais qui dans un même temps agaçait au plus haut point les deux chasseurs de prime.

          – Vous partez ce soir. Pas dans ces tenues. Armés. Un convoi vous attendra dans les jardins.
          – En direction de ce Jindosh ? Demanda Hevrard.
          – Tout à fait. Mes hommes iront avec vous. Votre boulot, c’est de protéger le convoi et d’assurer la sécurité et la réussite de la mission. Rien de plus.
          – Et vos hommes, c’est quoi leur boulot ?
          – Tout simplement d’attirer le regard des autorités compétentes sur les crimes de cet immonde personnage.

          Le voir énervé n’avait absolument rien d’impressionnant.

          – Jindosh est au courant que quelque chose se trame contre lui. Les chances que tout ceci ne tourne mal sont élevées. Vous n’êtes plus ces nobliaux en visite, compris ? Vous êtes des gardes du corps. Engagé par moi. Si vous vous retrouvez dans une situation fâcheuse, dites simplement cela.
          – Et pour l’intrus ? Demanda nonchalamment Klara.
          – Nous avons trouvé… un moyen de s’entendre. Tout le monde s’y retrouve. Malgré l’impression que peuvent donner mes hommes, nous ne sommes pas des barbares. Simplement des hommes d’affaires. Bien. Une dernière chose, suivez-moi je vous prie.

          Malgré leur petit séjour chez le marchand, les deux chasseurs n’avaient vu qu’une petite partie du manoir. Il leur restait encore tout un dédale de salle à découvrir, et c’est justement dans l’une que les mena leur hôte. Non loin de l’entrée, au rez-de-chaussé, se trouvait une grande salle tout aussi ostentatoire que les autres, mais au contenu mille fois plus utilitaire ; de l’armement, purement et simplement. Elle était certes arrangé de tel manière à ressembler à une exposition, mais restait une salle d’arme tout de même. Et quelles armes.

          Des épées de toutes tailles, glaives, épées longues, courtes, dagues, toutes ornées et sculptées d’une magnifique manière. Leurs lames acérées et brillantes étaient un véritable travail d’orfèvre, bien que sans doute loin des prouesses des forgeurs de Meitous. Mais ce n’était pas tout ; tout un mur de la salle était habillé de crochet auxquels tenaient différentes armes à distance ; des fusils, de pistolets plus petit, et même des armes moins évolués comme des arbalètes. Le contenu de cette salle devait valoir une véritable fortune.

          – Équipez-vous… Dans les limites du raisonnable.

          Et il les laissa ainsi, devant la premier endroit véritablement intéressant pour eux dans ces hauts-quartiers.

          * * *

          Trois convois différents les attendaient dans les jardins faisant face au manoir.

          – Du matériel, pour mes différentes enseignes. Vous grimperez dans la voiture de droite. Et vous ferez un léger détour. Quand aux autres, elles prendront différents chemins pour brouiller les pistes. Simples mesures de sécurités. L’acrobate que vous avez judicieusement attrapé nous sera, au final, très utile. Il se trouve que Jindosh ne semble pas traiter ses hommes comme il se doit… Financièrement, s’entend. Disons simplement que je suis un meilleur employeur. Il fera un faux rapport à son ancien patron, le menant sur une fausse piste. Des questions ?

          Ils étaient maintenant très différent de quand ils étaient arrivés ; exit la tenue excentrique de Klara et le long manteau d’Hevrard, place à des ensembles taillés pour le voyage et les combats, alliant tissus et cuirs. Chacun s’était équipé comme il se devait, et Klara avait opté pour un glaive similaire à son ancienne arme, mais ô combien plus jolie, et de qualité bien supérieure. La lame brillait en reflétant la lune, et le manche, noir, était orné d’une tête de loup sculpté en argent. Bien que relativement grande, l’arme était bien plus légère que ce à quoi elle s’attendait. Elle avait également pioché dans les lames plus courtes, tout comme Hevrard, au cas où.

          Ils ne répondirent pas et se contentèrent de grimper dans le convoi qui leur était désigné, en même temps que quelques autres hommes de De la Marquade. Celui-ci alpagua Hevrard et l’invita à rejoindre le convoi à la sortie du domaine.

          – Quoi encore ?
          – Isidor ne vous aurez pas donné… quelques instructions à mon égard ? Une certaine compensation…
          – Oui, il m’en a donné. « Après que tout soit terminé, pas avant ». Les voilà vos instructions.
          – Hmpf.

          * * *

          Les routes étaient bien calmes, à cette heure. Et si l’on pouvait encore apercevoir quelques énergumènes errer, souvent à moitié saoule, à la sortie des cafés ou autres, des gens rentrant simplement chez eux, ou encore quelques gardes de la milice locale, la ville restait en grande partie déserte. Et effroyablement silencieuse.

          – Où vont les autres carioles, exactement ? Demanda Klara, ennuyée par le trajet.
          – La première se dirige vers les Trois-Canards, une brasserie appartenant à Jindosh, expliqua Adel, l’un des hommes de confiance du marchand et qui dirigeait le petit groupe. La seconde est un véritable ravitaillement pour un établissement du patron. Vous connaissez p’tête, c’est le-

          Il fut interrompu par des bruits provenant de la ruelle qu’ils venaient d’emprunter. Ils ralentirent, aux aguets. La main sur la poignée de leurs armes, tous étaient sur le qui-vive.

          Pulu Pulu Pulu…

          – Pfiou, bon sang d’bois cette frousse. Quoi ?! Chuchota Adel à l’escargophone qu’il venait de décrocher. La transmission n’était pas bonne.
          – Krr… Première… attaquée… Krrr… gardes… att… Non ! Gotcha.
          – Bordel, c’est une…
          – On sait, constata calmement la chasseuse.

          Face à eux se tenait trois hommes, encapuchonnés et à peine visible dans la nuit. Ils ne firent aucun bruit en dégainant leurs lames. L’un des hommes de mains voulu dégainer son arme à feu, mais Adel eu tôt fait de l’en dissuader.

          – Ils veulent pas d’boucan, et nous non plus.

          D’autres hommes se trouvaient sur les toits environnant, ainsi que derrière le convoi, les empêchant de fuir.

          Lorsque ceux-ci se décidèrent à attaquer, tous sortirent du convoi et dégainèrent à leurs tours, dans le plus grand des silences.

          Un premier homme de De la Marquade se fit empaler sans avoir eu le temps de réagir. Hevrard para deux attaques simultané de ses adversaires, avant de les repousser contre le mur, puis de les taillader avec force, leur arrachant un léger cri, perdu au milieu des entrechoquement de lames. Adel se défendait à l’aide d’une lame incurvée, qui s’accorda parfaitement avec la tendance qu’il avait de s’attaquer aux cous de ses ennemis. Les têtes tombaient dans le camp adverse.

          Klara para une première attaque, puis une deuxième, avant de repousser l’homme qui lui faisait face d’un coup de botte bien placé, le pliant en deux suffisamment longtemps pour que son épée ornée puisse l’atteindre dans le buste, transperçant ses côtes d’un coup d’estoc, avant d’effectuer une volte-face en dégainant sa dague, tranchant directement la gorge d’un assaillant qui tentait de l’atteindre par derrière.

          Bientôt, la ruelle retrouva un calme plat, et les derniers embusqués tombaient au sol, répandant une marre de sang qui aurait pu faire défaillir une bonne partie de la population de la ville.

          Adel releva la capuche d’un des cadavre, révélant une face tailladé de toute part. Il examina rapidement les corps, découvrant des tatouages similaires, des blessures et des armes de basse qualité.

          – Les gangs des quartiers pauvres. On dirait bien qu’ce taré en a engagé quelques uns. On a toujours su qu’il était proche de ces criminels. Parfait.
          – Parfait ?
          – Une preuve de plus ajouter à not’ dossier. Si il en fallait encore une. Il est mort ? Fit-il en s’adressant à l’un de ses hommes qui tâtait le pouls de la victime de leurs rangs.
          – Ouais…
          – Bordel.

          Cependant, tous n’était pas mort. Pas encore. Un des corps se mit à se mouvoir, dans un râle de douleur, tâtonnant le sol à la recherche de quelque chose de spécifique. Un escargophone.

          – Oh là.

          Adel le retourna comme un vulgaire déchet, avant d’appuyer légèrement sa botte contre sa blessure ensanglantée.

          – Tu peux parler ?

          Aucune réponse. Il appuya un peu plus fort.

          – Arrgghhoui !
          – Bien. Compose le numéro de ton employeur, et on te laisse la vie sauve. Qui sait, p’tête même que l’patron se sentira généreux devant ton obéissance. Compris ?
          – Hng… O-ouais.

          Il toucha l’animal de ses doigts en sang, avant de le tendre légèrement vers Adel. Il fit signe à l’un de ses hommes de bâilloner le blessé. L’interlocuteur décrocha.

          – C’est fait.
          – TOUS ?
          – Tous.
          – ET LA CARGAISON ?
          – Des plantes chef, ‘pis d’l’alcool. Plein d’alcool. Hinhin.
          – BORDEL.

          Jindosh raccrocha. L’homme de main de De la Marquade se baissa vers le blessé.

          – T’as d’la chance. Toi, fit-il en direction d’un de ses sbires, reste avec lui, panse sa blessure, et appelle le second convoi. Si ils se sont pas fait avoir, dit leur de rappliquer. Qu’ils mettent en scène l’attaque. Après, fait ton rapport au patron.
          – Compris.
          – Bien. Continuons, la voie devrait être libre à présent.

          * * *

          – ‘tain c’qu’on s’fait chier.
          – Ouaip.
          – C’quand même pourri comme poste, nan ?
          – Ouaip.
          – Et l’boss qui nous paye une misère…
          – Ouaip.
          – ‘pis t’as vu comment qu’il nous traite en plus ?
          – Ouaip !
          – Comme des chiens ouais, comme des chiens ! Mais bon… C’mieux que la misère des bas-fonds, hein.
          – Ouaip…
          – Ca t’dit qu’on aille s’en jeter un après la relève ? Doit encore y’avoir des p’tites maisons closes d’ouvertes quequ’part, hinhin.
          – …

          Aucune réponse. Il comprit lorsqu’il tourna la tête vers son collègue. Avant de sombrer lui aussi et de s’écrouler au sol, rejoignant son camarade dans les limbes du sommeil profond. Klara fit signe à ses collègues de la rejoindre. Elle se massa la main. Le convoi s’approcha lui aussi, lentement, presque sans bruit. Hevrard la rejoignit, suivi de deux autres hommes qui entrèrent dans le domaine en tant qu’éclaireur. Les deux suivant s’occupèrent de mettre les deux assommés à l’abri des regards.

          Adel, qui attendait le rapport de ceux partis en éclaireur, afficha une mine inquiète à l’écoute de leur rapport.

          – Hm… Pas bien d’monde là-dedans… Bizarre. Mais pas d’temps à perdre, Silia, Eliott, vous connaissez votre job. Couvrez-nous. Mais pas de mort, et le moins de bruit possible.
          – On sait.

          Le convoi s’enfonça dans l’entrée du domaine de Jindosh. Bien moins resplendissant que celui de son rival, il servait tout de même d’étalage de richesse, mais le tout était si peu entretenue qu’il donnait une impression bien plus macabre, comme s’il s’agissait des vestiges d’une époque lointaine, ou l’endroit et son propriétaire étaient au sommet de leur gloire.

          Comme convenu, il y eu peu de résistance jusqu’à l’arrivée au manoir. Trop peu. Aucunes lumières ne sortaient des fenêtres. Mais ce n’était pas tout à fait leur destination ; ce qui intéressait les hommes de De la Marquade, c’était les sous-sols. Grâce aux informations que leur avait fourni l’acrobate capturé, ils savaient où trouver les différentes entrées ; et si la principale se trouvait dans l’enceinte même du manoir, une seconde, plus pratique, se trouvait sur le côté, dans le bâtiment qui accueillait les convois de marchandises, sorte d’écurie déguisée pour ne pas ressembler à un tas de foin et d’excrément.

          L’entrée était dissimulée derrière une sorte de réserve, remplie d’étagère contenant toute sorte d’objet, allant du simple outil d’entretiens aux armes blanches, poussiéreuses. Un léger râle se fit entendre, puis un fracas.

          Le petit groupe pénétra l’endroit, laissant derrière eux deux autres gardes, qui pour séquelles ne garderaient qu’un simple mal de crâne.

          – Commencez à décharger le matériel. Vous deux, engouffrez vous à l’intérieur. Nettoyez l’endroit si nécessaire, fit-il à l’adresse des deux chasseurs. Les autres, surveillez l’extérieur. Sifflez en cas de pépin.
          – J’sais pas siffler chef.
          – Imite un animal alors, fais pas chier.

          Des fioles, des béchers, de pillons et tout un tas d’autres ustensiles d’alchimie en tout genre furent débarqués du chariot. De la poudre également. Ils attendirent tout de même que le duo soit descendu pour finir de décharger le reste, plus organique.

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          Depuis une pièce totalement obscure du bâtiment principale, le maître des lieux secrètement guette. Accompagné d'une demi-douzaine d'hommes, généreusement armés et observant la scène se déroulant sous leurs yeux à l'aide de longues-vues, le chef stoppe l'espionnage en se raclant la gorge -laissant deviner une certaine extinction de voix dû aux hurlements perpétuels-

          -Bon, tout le monde est à sa place. Vous contemplerez à mes côtés la chute de mon plus grand rival ainsi que celle de ses acteurs.
          -Héhé, dernière ligne droite, n'effet chef. Prononce l'un des gardes du corps, observant toujours attentivement l'équipe adverse  pénétrer dans le complexe dissimulé.

          ***

          Bureaux privées de la milice, peu après l'attaque du premier convoi

          Terminant un rapport d'intervention relatant l'évasion de l'un de ses prisonniers, le chef milicien connu sous le nom de Fletcher songe à la petite soirée qu'il pourra s'octroyer, avec toutefois un goût amère au fond du gosier. En effet, il s'agit là d'un second dérapage, d'un nouveau manquement se devant être de plus en  plus insupportable aux yeux de sa supérieure suprême : La Dame. Les qualités, l'expérience et les compétences de l'homme en question ne sont pas à remettre en doute, pas du tout ; Mais la situation est telle que les événements relatés ne disposent d'aucunes liaisons permettant de faire le lien dans tout ça... Jusqu'à maintenant.

          Occupant le bureau voisin, l'un de ses collègues spécialisés dans les technologies diverses -personnalité issue de la Brigade Scientifique- travaille à l'heure actuelle sur la conversation retenue entre le prisonnier en fuite et un mystérieux individu. Son écrémage de la bande son terminé, il frappe à la porte du bureau de Fletcher, sans attendre pour entrer.

          -C'est bon, j'ai terminé.
          -Alors ? Répond-t-il simplement, cessant net son activité pour s'ancrer dans son siège.
          -Le Den Den était en miettes, j'ai pas pu récupérer grand chose. Hormis le plus important.
          -Ah ouais ? Fais péter.

          Et il s’exécute, activant un escargophone dont la fonction était de capter des sons pour les rejouer.

          « -TU ME BUTES CETTE CATIN D'ISIDOR ! »
          -Je vois. Donc Monsieur Ferembach se serait fait un ennemi... Bon sang Algo, je pense qu'on tient le bon bout. Ecoute, ça a commencé quand des témoignages disaient avoir vu un colosse entrer dans une baraque pour tout retourner. Les voisins et les passants ont entendus l'bordel, plus de doutes là dessus. On y voit ensuite les types du Culte investir la case pour tout vider, y'avait plus rien à notre arrivée. Par la suite la Dame est contactée, disant qu'Isidor prépare un attentat contre elle. Maximilien tombe sur ce hangar, et là, magie...
          -Boum.
          -Exactement.
          -Alors comme ça quelqu'un conspirerait contre le chef du Culte ? Quel intérêt ?
          -C'est ma théorie. Pour ce qui est de la raison, j'en sais rien. En tout cas, j'suis sûr d'une chose.
          -Quoi ?
          -La bombe devait pas péter à ce moment-là. Il y a eu changement de plan, et le fait que l'autre tocard ait directement contacté son dirigeant qui lui demande d'accomplir une dernière tâche... c'est plus que louche.
          -Une opération qui aurait mal tourné, hein ? C'est plausible, en effet. Enfin... après, j'peux pas t'aider, mon travail s'arrête là.
          -T'en a déjà fait beaucoup, va te reposer auprès de ta femme.
          -Ouais, à demain.

          Ca y est, il était définitivement seul dans cette caserne, en cette heure tardive. De toute manière le travail allait bientôt se terminer, Fletcher pourra alors rentrer chez lui. Sauf que la nuit lui réservait quelque chose d'autre. A vrai dire, elle ne faisait que commencer.

          PuluPuluPuluPuluPulu

          Ce n'est l'animal sur le bureau qui sonne, mais un escargophone rangé dans la poche intérieure de son manteau. Il se lève alors et en profite pour se poster devant la fenêtre, le regard perdu sur les Hauts Quartiers, joliment colorés cette nuit.

          -Fletcher.
          -Hey, c'est Marlon. Z'allez pas m'croire, hinhinhinhin.

          Si le Culte dispose d'espions un peu partout, pourquoi les autres ne peuvent pas faire de même afin de se tenir au jus des possibles événements intéressants, qui plus est quand ceux-ci sont liés avec une affaire actuelle. Marlon est l'un d'eux, soûlard à la retraite ne reculant pas devant quelques situations tendues à cafter contre une bourse bien remplie. Après, à savoir si tous les tuyaux que reçoit la milice sont avérés, c'est une autre histoire.

          -J'suis pas d'humeur, alors réfléchis bien à ce que tu vas me dire si tu veux pas bouffer à la paille pendant deux mois.
          -Nan,nan m'sieur. Ce soir c'est du solide, dur comme fer !
          -Marlon, accouche.
          -Tout à l'heure, y'a à peu près une heure, trois carrioles prêtes à craquer et aux gardes blindées sont sortis d'nul part ! C'faisait du bruit, du coup j'ai sorti l'museau. N'a deux qui sont partis à toute blinde, mais j'ai réussi à suivre l'aut ! Parce qu'on fait pas partir trois chariots en pleine nuit par c'te période tendue, si ?
          -C'est tout ? Bor-
          -Nan, nan, nan, m'sieur, l'meilleur arrive après. Au bout d'un moment l'bazar s'est engouffré dans une ruelle. Et là... t'as une tripotée d'types qu'leur est tombé d'ssus. J'me suis caché pendant c'temps, et c'est là que j'les ai vu !
          -Continue... Me cuisine pas.
          -Un type et une nana, l'type qui conduisait la carriole était une sacrée bête putain ; c't'eux qui ont défoncés les types d'en face, des mal sapés qu'savaient nin s'battre. Et s'sont aventurés après dans c'vieux domaine là. A qui l'appartient d'ailleurs ? Kinode, Mishon, Jixton... Rah-
          -Attends. Qu'est ce que tu viens de me dire sur le conducteur ?
          -Monté comme un taureau, m'sieur. Voyez ce que j'veux dire ? Vous paraissez p'tit à côté d'lui. La grosse barbe et des tresses, voyez l'délire ?
          -Tu en es sûr ? Lui répondit Fletcher, le nez déjà fourré dans le dossier relatant les dits témoignages de l'effraction. Les termes employés pour décrire l'individu étaient en effet d'une nature plutôt familière, ce qui pouvait sûrement concorder avec la description que venait de lui donner Marlon. Peut-être que l'intuition du militaire ne le mènerait nul part, mais l'expérience le porterait à croire que plusieurs signalements décrivant sur un géant barbu sur un court intervalle, semblant tout droit venu des Glaciers via un drakkar amenuisait davantage le cas de la simple coïncidence. Perplexe, l'appareil posé sur le bureau à fixer le sombre paysage s'offrant à lui.
          -Hm ? Alors ? Bonne info nin ? Ca vaut c'que ça vaut hein ? Hinhinhin c'tombait bien j'avais un peu soif en plus, chef. Allo ? Allo ?! RAH, FAIS CHIER. M'FAIT TOUT DIT L'MEME COUP !

          Et c'est sans une once d'hésitation que le fier soldat s’éclipse de son bureau en un instant, n'animant plus que les locaux d'une course effrénée.

          ***

          -C'est bon, la voie est libre. Dis-je assurément aux types derrière moi et Klara. C'est beaucoup trop désert, et ces caves le sont à un point des plus inquiétants.
          -Bon, montez la garde l'temps qu'on accomplisse la besogne, et on s'casse. OK pour vous ?
          -Oui, faites vite.

          C'est alors que les gardes plus profondément dans le sous-sol. On pouvait entendre du bois craquer frénétiquement, la caisse va s'ouvrir. J'étais tenté, tout comme ma partenaire de pénétrer dans la pièce afin d'attiser cette étrange curiosité. Mais l'ennemi guette probablement, et l'inattention n'est pas permise. En plus, en l'absence de lumière, il est assez difficile de nous repérer.



          Ca fait quelques minutes que nous sommes en train de monter la garde, et tout se passait bien jusqu'au moment où joindre le guet dehors était impossible. Il ne répond pas, rien n'y fait, et les laisser ici tout seul ne soit pas la meilleure des idées afin d'assurer la marche à suivre.

          ***

          Une balle en pleine gorge donne en effet du mal à s'exprimer. Surpris par une dizaine d'hommes armés de mitraillette, le pauvre homme seul et armé d'un pistolet et d'une épée n'eut même pas le temps de réagir à cela. Le piège de Jindosh est en train de se refermer. Et c'est tous avec le doigt sur la gâchette que s’apprêtent à entrer en trombe l'armée privée du noble à la réputation déchue. Et c'est au moment de vouloir pousser la petite porte menant aux escaliers que la situation prend alors une tournure bien différente, jouant en la faveur d'un parti inattendu.

          -GRENADE ! Hurle l'un des tireurs.

          Un fumigène est en train d'enfumer la salle, tous le monde tousse, et tente de tirer un peu partout afin d'avoir l'auteur d'un tel acte. C'est alors que l'une des grandes fenêtres de l'étage explose littéralement au passage d'un individu vêtu d'une tenue militaire. Fletcher est là, prêt à en découdre. Faute de personnel en cette heure tardive et guidé par son instinct, l'heure n'est plus à la rigolade. Il passe à l'action.

          -MORTS AUX ENNEMIS DE LA DAME ! L'HONNEUR DE MES FRERES TOMBES AU COMBAT SERA LAVE !


          Dernière édition par Hevrard Horlfsson le Dim 23 Avr 2017 - 17:22, édité 1 fois

            Les rénovations de la Maison d’Aballon avaient stoppé. Et pour cause : le nombre de personnes présentes empêchait toute activités. Circuler entre les réfugiés était un véritable calvaire, et il fallait en plus de cela se farcir les innombrable membres du culte vêtus de noir, ainsi que des bénévoles qui avaient tenus à aider. Car évidemment, les plus démunis sont étrangement souvent les plus serviables.

            Siegfried, chef du Culte de la Miséricorde, n’avait pas menti. Le monastère récemment débarrassé des squatteurs et criminels venait d’être reconverti temporairement en refuge. Les récents éventements avaient été suivis d’une hausse de la criminalité au sein des quartiers pauvres, et les incessants blocus n’avaient fait qu’envenimer la situation. Sans compter les fouilles, contrôles, et arrestations de la part des miliciens.

            Isidor, chef du Culte et envoyé de la Dame dans les bas-quartiers, était inquiet. Peu de nouvelles de la part de Jean de la Marquade, sorte d’associer de longue date qui s’était récemment révélé être un contact particulièrement utile. Pas de nouvelles non plus de certains membres du Culte, des sbires bienveillants et pleins de volonté qui n’auraient pu partir ainsi sans un mot.

            S’inquiéter, c’était son quotidien. Le laisser transparaître était en revanche plus rare. Et cette tâche devenait de plus en plus difficile à mesure que les vivres et les moyens du Culte fondaient, et que les nouvelles de la part des hauts-quartiers se faisaient de plus en plus rare.

            Et la multitude de réfugiés bouffaient son temps, ce dont il se serait bien passé. Mais il avait besoin d’eux. Même des plus étrangers d’entre eux.

            – Oh la vache.
            – A-A-a-A-Aidez moi !
            – Bon sang, soutenez-le !

            Le nouvel arrivant était similaire aux autres. Sale, pas d’affaires avec lui. Une tenue en miette, couvrant son visage et une bonne partie de son corps. Et pour cause. Tout n’était plus que ruine. Comme le monastère peu de temps auparavant.

            Le visage brûlé et déchiqueté, il faisait peur à voir. Le membre du culte qui l’avait soutenu et avait eu un aperçu du carnage eût tôt fait de replacer la capuche qui le cacher aux yeux du monde, et l’emmena à l’intérieur de la pièce principale. Numéria fut la première à l’accueillir à l’intérieur, choquée et intriguée.

            – J-je vous en sup-p-plie…
            – Du calme. Allongez-le quelque part.
            – Si-Siegfried… I-ils disent qu’il peut… qu’il p-peut aider…
            – Oui oui. Il va vous aider.
            – Je… je peux le v-voir ?
            – Bientôt. Comment t’appelles tu ?
            – K-Korshit.


            * * * * *


            Le domaine s’était transformé en champ de bataille en moins de temps qu’il en faut pour dire putsch. Le premier coup de feu à l’extérieur avait alerté le duo de chasseurs, les poussant à sortir de leur petit local.

            L’un des sbires faisant le guet était là, étalé à leurs pieds, dans une toute fraîche flaque de sang. Il avait l’arme sortie, mais n’avait eu le temps de s’en servir.

            Klara n’eût même pas à réagir, tant Hevrard fut rapide pour la pousser sur le côté à la vue des mercenaires qui leurs fit soudainement face. Ils évitèrent la salve de tir de peu. Le géant s’apprêta à lancer l’un de ses couteaux dans la glotte d’un des tireurs, mais fut arrêter par Klara qui lui rappela que, malgré tout, ils devaient se contenter de les assommer.

            Bien sûr, dans la limite du possible. Elle n’entendait pas se laisser trucider simplement pour mener à bien une mission qui ne la concernait même pas. Dans quelques jour à peine, maximum, elle serait loin d’Urea. Probablement entrain de suivre les traces d’un quelconque pirate primé. Totalement libre. Mais en attendant, elle et son compagnon d’arme actuel devaient se débarrasser de leurs adversaires.

            Fort heureusement pour eux, ils venaient de vider leurs chargeurs dans le mur qui leur faisait face. Et c’est au moment de recharger que Klara s’élança vers eux, suivi du géant. Elle sauta sur l’ennemi le plus proche, le renversant au sol pour lui asséner un coup du revers de son épée courte sur le côté du crâne, avant de se retourner et de balayer celui qui se tenait juste à côté, qu’Hevrard ne manqua pas d’assommer avant qu’il n’ai eu le temps de toucher le sol, d’un coup de poing bien placé.

            Les autres, peu nombreux, tentèrent tout de même de réagir et jetèrent leurs armes, inutiles à ce stade. Dans la petite mêlée, l’un d’eux parvint à toucher légèrement Klara à la hanche, formant une entaille loin d’être profonde. Elle se vengea en lui assénant un coup de crosse dans la gorge qui lui coupa la respiration, après avoir paré une seconde attaque.

            Ils furent cependant interrompu par l’arrivée d’un autre acteur. Fletcher avait réussi avec une facilité déconcertante à se hisser à leur niveau, laissant derrière lui une multitude de sbires vaincus. Agissant plus par instinct que par professionnalisme, il avait pris les devants et rien ne semblait pouvoir l’arrêter. Et ce n’était sûrement pas ses cris pleins de nationalisme qui allait persuader Hevrard et Klara de lui faire face ; leur mission concernait Jindosh, et se mêler aux autorités, peu importe la manière, ne semblait pas être une bonne idée.

            – Où est-il ?

            Les mercenaires ne lui répondirent que par le feu. Mais le militaire était rapide, bien trop rapide pour eux. Comme si il était animé par une sorte de furie, Fletcher s’élança vers eux, tira un coup de son barillet dans les jambes d’un premier sbire, avant d’enfoncer le manche de son épée de service dans l’estomac d’un autre, qui se recroquevilla. Un troisième mercenaire tenta de tirer une salve dans sa direction, mais fut prit de court pas le milicien qui avait bondis sur le côté et lancé dans un geste fluide et précis une autre grenade. Sans causer de dommage, celle-ci explosa cependant dans un flash blanc qui aveugla la plupart des protagonistes présents. Le sbire recroquevillait ne voyait plus rien, et n’entendait que des coups secs et des râles. Avant d’entendre le bruit d’une arme à feu que l’ont charge.

            Pointant le canon sur son crâne, le militaire reposa sa question une dernière fois.

            * * *

            Ils étaient parvenus à s’éloigner des combats et à s’engouffrer une nouvelle fois dans les sous-sols, d’où venait des bruits suspects. Adel et les autres étaient peut-être en danger. Et il fallait absolument partir d’ici au plus vite.

            Klara et Hevrard s’avançaient à pas de loup dans ces dédales sombres. Ils étaient maintenant sous le manoir. Ils passèrent devant une cave à vin qu’ils avait visité un peu plus tôt. Elle était poussiéreuse mais devait bien valoir une petite fortune. Le reste n’était que pièce de stockages diverses et variées.

            Ils débouchèrent finalement sur un long couloir, qui se finissait en escalier menant au manoir, d’où provenait de fortes voix. Ils arrivaient. Derrière les deux chasseurs résonnait la voix de Fletcher, qui approchait lui aussi.

            Les deux s’élancèrent vers dans le couloir pour rejoindre leurs alliés, qui semblaient aux prises avec les mercenaires qui descendaient depuis le manoir. Les bruits s’intensifiaient à mesure que le duo s’approchait. Ils purent finalement entendre Adel crier des ordres à ses hommes, excédé. Les mercenaires tentaient d’ouvrir la grande porte de bois qui les bloquaient, derrière laquelle se trouvait le reste des hommes de De la Marquade.

            Finalement, la porte céda aux coups des mercenaires. Ils se trouvaient tous dans une vaste salle sombre et remplie de matériel de chimie. Quelques coups de feu fusèrent, mais prit dans les deux sens, les hommes de Jindosh ne se batturent pas bien longtemps avant de s’écrouler au sol.

            – Oh merde, fit Adel, allant au contact des deux chasseurs. Vous n’avez rien à faire là.
            – Il faut partir. Maintenant ! S’exclama Hevrard.
            – Sortez, sortez ! Surveillez le passage dehors !

            Dans l’entrebâillement de la porte, Klara pût apercevoir l’un des corps gisant sur le sol. Entièrement brûlé, il portait sur lui les restes d’un uniforme qu’elle n’aurait pu distinguer sans l’insigne qui avait été épargné par les dégâts.

            * * *

            Il y était presque, il pouvait le sentir. Proche des coupables. Ce qui l’avait mené jusqu’ici n’était qu’une piste fine et fragile, mais tout jusqu’ici lui donnait raison. La résistance, les mercenaires, et le convoi qu’il avait trouvé avant d’entrer dans les sous-sols. Il aura très certainement quelques ennuis à la fin de toute cette histoire. Mais la milice s’était, depuis l’explosion dans les quartiers pauvres, affranchie de toute paperasses et de procédures. Ils répondaient aux ordres de la Dame avant tout, et les ordres étaient clairs : trouver les coupables. Et c’était précisément ce qu’il était entrain de faire.

            Devant lui, la plupart de ses adversaires potentiels avaient été assommés. Il restait entièrement sur ses gardes ; Jindosh avait, semblait-t-il, d’autres ennemis que lui. Il s’avança vers le bout du couloir. Une étrange odeur lui parvint aux narines.

            De la fumée s’élevait en face de lui, provenant de l’une des pièces qui précédaient les escaliers menant à la surface, directement au sein du manoir. Il se précipita vers l’incendie.

            Les sbires du marchands reprenaient consciences un à un, mais le militaire n’en avait cure. Devant lui, parmi les amas de verre, d’ustensiles et de produits chimiques rongés par le feu, il devina la silhouette d’un cadavre, lui aussi en proie à l’incendie. Mais au travers des flammes, il pouvait clairement distinguer l’uniforme qui recouvrait le mort, ainsi que son insigne; il portait les mêmes.

            * * *

            – Tant pis pour les chevaux, fit Adel, qui vérifiait régulièrement derrière lui s’ils n’étaient pas suivis.
            – Qu’est-ce que vous avez foutu ? Lui rétorqua Hevrard.
            – Notre mission. Ce qu’est pas l’cas de tout le monde ! C’était quoi, tout ces cons ?
            – Jindosh est pas aussi stupide que vous le pensiez. Il y avait quelqu’un d’autre, aussi. Bien plus fort et entraîné qu’eux. Quelqu’un d’officiel.
            – Bon sang.

            Le petit groupe se précipitait dans les ruelles calmes des hauts-quartiers. Le jour ne s’était toujours pas levé.

            – Le patron a appelé, mais la communication s’est coupée subitement.
            – Alors allons-y, fit Klara.

            Ce fut bizarrement elle qui prit les devants.

            * * *

            La grille était ouverte, et les gardes introuvables. La petite troupe, fatiguée, n’était visiblement pas au bout de ses peines. Le domaine restait cependant extrêmement calme. Comme si rien ne s’était passé.

            – L’patron… chuchota Adel.
            – Chut.

            Les jardins étaient déserts. Les locaux d’entretiens également. Aucun garde, aucun corps, rien. Adel tenta une nouvelle fois de joindre son employeur, sans succès.

            – J’vais faire le tour et entrer par l’arrière, adressa-t-il aux deux chasseurs, avant d’inviter ses hommes à le suivre.

            Klara et Hevrard pénétrèrent donc seuls par l’entrée principale de la bâtisse. Pas de trace des servants non plus. Le rez-de-chaussé était désert. Ou presque. Tandis qu’ils s’approchaient doucement de bruit suspects provenant de l’une des portes de l’aile Est, ils faillirent se faire surprendre par deux silhouettes qui semblaient faire une ronde dans le manoir. Plongé dans l’obscurité, les deux chasseurs n’eurent heureusement aucun mal à se dissimuler dans une alcôve. Un simple coup d’oeil suffisait à comprendre que les deux gardes n’étaient pas d’ici. Aussi, d’un simple regard Hevrard et Klara se mirent d’accord quant au fait que ces deux là seraient bien mieux couchés au sol, les yeux révulsés et l’esprit profondément ancré dans le Néant.

            Ils attendirent alors qu’ils soient passés devant eux pour discrètement les rejoindre et les assommer dans un mouvement parfaitement synchronisé. Fier d’eux, ils durent cependant reprendre leur concentration lorsqu’ils entendirent un juron qui leur parvenait de l’étage.

            * * *

            – Allons… Jean… Voyons…
            – Cessez cette mascarade.
            – Voyons… Jean… Donne nous le code, qu’on en finisse.
            – Non.
            – Où bien je tue votre ami.
            – Vous n’en ferez rien.
            – Ah… Tu penses ? Allons… C’est bien mal me connaître…
            – Je ne vous ai jamais vu avant.
            – … C’est vr-
            – PATRON !
            – Allons, qu’est-ce que c’est encore…
            – Une embuscade, ordure.

            * * *

            Ce n’était pas des combattants. Leur chef l’était encore moins. Et ils étaient pourtant parvenus à vaincre De la Marquade et les gardes restés chez lui avec une facilité déconcertante. Et pour cause : le noble s’était rendu de lui-même dès l’arrivée des ravisseurs en voyant qu’ils avaient pris en otage l’un de ses plus grand ami, et surtout le chef cuisinier du restaurant dans lequel ils avaient été plus tôt dans la semaine. Le perdre aurait signifier perdre toute une clientèle fidèle. Et riche. Après s’être rendu, les ravisseurs ont consigner les gardes et les servants dans différentes pièces du manoir, avant de prendre à part De la Marquade dans son bureau, à la recherche de son coffre-fort. Il l’avaient trouvé, mais n’étaient pas parvenus à faire cracher le code au noble.

            – Vous étiez prêt à vous sacrifier pour un cuisto’, chef ?
            – Si je le perds, c’est quoi ? 60 % du chiffre d’affaire qui s’en va ? Hors-de-question. Je savais que vous n’alliez pas tarder. Si vous pouviez me détacher maintenant…
            – Attendez… fit Klara.

            L’épée toujours dégainée, elle la pointa vers Adel, qui s’apprêtait à libérer son employeur.

            – J’ai quelque chose à vous demander.
            – Bon sang. Adel, dépêche-toi enfin. Elliot, contrôlez votre amie.
            – Non. Ce peut être instructif, répliqua simplement le géant.

            Lui-même menaça l’homme de main de la pointe de son épée.

            – Bon sang. Je pensais pourtant que Siegfried vous avez envoyé pour aider.
            – C’est le cas. En échange, nous aimerions quelques réponses. Sur ce qu’on a vu dans les sous-sols de Jindosh, par exemple.
            – … Adel, tu peux sortir.
            – Patron ?!
            – Il reste, fit Hevrard, qui ne voulait pas qu’il s’empresse d’aller libérer les autres gardes.
            – Soit. Qu’avez-vous vu ?
            – Un certain cadavre.
            – Hmpf. Bon sang Adel.
            – Je leur avais dit de-
            – Oui, oui. Bon. Par où commencer ? Il y a de cela déjà quelques années, Siegfried–avant qu’il ne devienne ce qu’il est –et moi avions conclu une sorte d’arrangement. Je lui fournirai une aide dans les hauts-quartiers en cas de situation de crise, en échange de quelque chose de mon souhait. La situation de crise, elle est arrivé le soir de l’explosion. Il m’a appelé, et nous avons tout deux discuter des termes de notre collaboration. … A la suite de l’explosion, la plupart des cadavres étaient in-identifiables. Sauf une personne. Son uniforme rompait tout doutes sur sa personne. Siegfried est… informé. Loin d’être stupide. Il a très vite compris que ce n’était pas bon pour lui. Voyez-vous, si je ne m’abuse, il est loin d’être dans les bonnes grâces de notre chère dirigeante, en ce moment. Elle l’a placé là où il est aujourd’hui, mais il se détache d’elle de plus en plus. Il a sa propre façon d’agir, ses propres idées. Et le Culte est de plus en plus populaire. Et puissant. Ce qui en fait quelqu’un de potentiellement dangereux.

            Alors, après ces malheureux événements, il a décidé qu’il était temps pour moi d’honorer ma part du marché. Le but, comme vous l’avez compris, était simple ; éloigner le plus possible les soupçons de sa personne. Alors nous avons convenu tout deux d’une marche à suivre. Les soupçons allaient être… relocalisés, sur une personne qui, honnêtement, le mérite amplement. L’idée était simple. Faire porter le chapeau à Jindosh en disposant, disons, certaines preuves… Et en introduisant chez lui cette personne décédée.
            – Vous m’avez fait m’asseoir au dessus d’un cadavre de milicien.

            La lame de Klara n’était plus dirigée vers Adel.

            – Nous avons fait ce qu’il fallait. Vous savez ce qu’il va se passer maintenant ? Maintenant, Jindosh va tomber. Le cadavre, toute notre mise en scène chez lui, les attaques de convoi, notre cher acrobate qui espionnait pour son compte et le mercenaire que vous avez capturé ont tout deux accepté de témoigner contre lui. En échange d’une certaine rémunération. Et, d’une façon où d’une autre, d’après le rapport d’Adel, cet ordure à même réussi à attirer un milicien gradé chez lui. A l’exact bon moment. Il n’y a plus rien à faire pour lui. Quant à la présence là-bas d’une de mes voitures, de certains de mes hommes et les gardes assommés avant l’arriver de l’autre énergumène, disons simplement qu’il fut facile d’édulcorer quelque peu la vérité un peu plus.

            Cette nuit, Jindosh a décidé de s’en prendre directement à moi. D’abord en attaquant mes convois –convois tout à fait honnêtes –, dont un qu’il aura rapatrié dans son domaine. Ce qu’il n’avait pas prévu en revanche, c’est qu’engager parmi ses hommes des criminel des bas-quartiers, et bien, cela présente quelques risques. Cette nuit, une partie de ces hommes ont décidé de le trahir. Ce qui a mal tourné. Enfin, il a décidé de s’attaquer finalement à ma personne, en organisant ce faux cambriolage – et c’est, pour cette fois, la stricte vérité –. Ces hommes qui recouvrent le sol de mon bureau ont été envoyé par Jindosh. Ils allaient me tuer après avoir récupérer le contenu de mon coffre. Une simple mise en scène car, je le lui concède volontiers, Jindosh n’est pas si stupide. Il a décidé de commettre tout ceci après avoir entend certaines rumeurs prétendant que nous souhaitions le faire tomber. Mais ça, les autorités compétentes ne le sauront pas. Ou plutôt ne le croirons pas.

            Aujourd’hui, l’une des personnes les plus corrompues de l’île va tomber. Les financements des gangs des bas-quartiers vont chuter avec lui. Ce sont eux qui vous ont attaqué. Lié à tout ces derniers événements, les blocus vont cesser, les pauvres ne seront plus harcelés par la milice. Et Siegfried retrouvera sa tranquillité.

            Vous avez apaisé les tensions dans les quartiers pauvres. La situation aurait pu être bien pire, mais vous avez agis. Voilà ce que vous avez fait.

            – Vous m’avez fait m’asseoir au dessus d’un cadavre de milicien. Et fait passé au milieu de ses collègues.
            – Bon sang, vous ne m’avez donc pas écoutéeh-OH !

            Ses pieds ne sentaient plus le sol. Détaché par Hevrard, il fut immédiatement plaqué contre la fenêtre de son bureau. Le géant le maintint ainsi pendant de longues secondes, avant de le laisser retomber sur le côté d’un geste saupoudré de violence. Adel aurait préféré intervenir, mais ne voulant pas se faire possiblement trancher la gorge par Klara, il se ravisa.

            – Et qu’est-ce que vous a promis Siegfried, exactement ? s’exclama le géant.
            – Ça ne vous regarde pas.
            – Bon. Il n’y a qu’un moyen de le savoir. Silia.

            Il plongea une main dans une de ses longues poche pour en sortir un mince clef, qu’il jeta en direction de Klara.

            * * *

            Sous la carriole qu’elle et Hevrard avaient utilisé pour venir ici se trouvait une petite trappe dissimulée. Sa colère s’intensifia lorsqu’elle vit de ses propres yeux, en arrivant au niveau de la voiture, le large espace aménagé sous les sièges, qui avait dû contenir le cadavre de Maximilien, anciennement chef milicien. Elle parvint tout de même à s’en détacher, et, après avoir tâter aveuglement le bois pendant quelques seconde, à en sortir un coffret d’acier, noir, parfaitement hermétique. Elle s’assit en tailleurs dans le local, peu pressée de remonter. Elle préférait le silence et la tranquillité. Elle ouvrit le coffret avec la clef que lui avait donner Hevrard.

            Son contenu ne l’étonna pas, mais provoqua chez elle une curiosité plus inhabituelle qu’à l’accoutumé. Elle savait ce que c’était. Elle en avait entendu parler. Et s’était même renseignée à leurs sujet, infiniment intéressant. Ils faisaient partie de bon nombre de contes et d’histoires. Et concernaient parfois des héros légendaires. Ou d’incarnations du Mal.

            La décision qu’elle allait prendre était entièrement poussée par cette curiosité qu’elle ne se connaissait pas, et par l’envie de prendre sa revanche sur le noble.

            * * *

            – Laisse, fit Klara, étrangement calme. Ça n’a plus aucune valeur maintenant.
            – Hm.

            Hevrard n’insista pas, et sortie du bureau en poussant au passage Adel.

            – Qu-… Quoi ? C-comment ça, sans valeur ?!

            Le duo ne lui répondit pas et tout deux étaient déjà entrain de descendre les larges escaliers du manoir, puis prirent la direction de la sortir sans plus attendre. Il était temps pour eux de partir d’ici.

            * * *

            Il tourna la petite clef qui était restée dans la serrure. Et ouvrit le coffret. Un large sourire rassuré lui déforma le visage sans qu’il ne put le contrôler. Il prit la chose de sa main tremblante. Il trouvait ça absolument magnifique. Un fruit parfaitement blanc, immaculé, à la forme tout à fait extraordinaire. Il était en effet recouvert de petites pointes qui pointaient vers le bas, comme des crocs acérés. Oui, pour De la Marquade, la chose était absolument magnifique, mais surtout d’une valeur inestimable. Il soupira, avant de tourner le fruit dans sa main, et perdit son sourire.

            Quelqu’un avait déjà croqué dedans.


            * * * * *


            – Alors ? Demanda Numéria, épuisée de s’occuper de tout les réfugiés.
            – Ses blessures… C’est dû à de la torture, Numéria. Une boucherie, frémit l’un des hommes de mains d’Isidor.
            – Et il tiens encore debout ?
            – Il est particulièrement robuste, physiquement. Mais mentalement, c’est une autre histoire… Il délire. Gustave est entrain de l’interroger. Je sais pas ce qu’il fait, ça fait des plombes qu’il y est.
            – Remplace moi ici, je vais les chercher.

            * * *

            Quand elle rentra dans la pièce, elle ne remarqua pas tout de suite le cadavre qui gisait sur le sol, uniquement recouvert de quelques vêtements rapiécés. Sous lui, une immense flaque de sang. Quand elle baissa les yeux vers lui, il était trop tard. Quelqu’un habillé de la même manière que les membres du Culte l’agrippa par le coup et la projeta contre le mur. Son visage était affreux. Korshit pointa vers elle une sorte de surin et plaqua son autre main sur sa bouche pour l’empêcher de crier.

            – V-vous… vous allez me mener jusqu’à l-lui. S-sans un mot.

            Elle prit une mine effrayée et acquiesça lentement. Il retira sa main, et elle ne fit pas un bruit. Il l’obligea à ouvrir la porte, puis à traverser la pièce principale, pleine de réfugiés, sans attirer l’attention. C’était un simple membre du Culte, et elle l’emmenait simplement voir leur chef. Elle joua le jeu, jusqu’à ce qu’ils arrivent près du petit local qui avait été temporairement transformé en bureau pour Siegfried. Ils étaient un peu plus éloigné de la foule maintenant, et seuls quelques membres du Culte passaient par là. Korshit la poussa en avant pour qu’elle s’avance et toque à la porte.

            Ce qu’elle fit, avant de crier pour alerter Siegfried lorsque celui-ci commençait à ouvrir. Il étouffa son cri en plantant violemment le petit surin dans sa gorge, avant de s’élancer dans le bureau. Numéria porta faiblement sa main sur son cou, recouvert de rouge, avant de s’écrouler au sol, crachotant du sang en tentant de respirer.

            Prévenue par sa sous-fifre, Isidor ne se laissa pas prendre par surprise. Korshit, étonnement rapide et vif malgré ses blessures, tenta de le planter au niveau du buste. Mais il n’en fit rien. Le coup de poing qu’il se prit sur le côté de la tête l’envoya voler à l’autre bout de la pièce. Il n’eût pas à prendre la peine de se relever, quelqu’un d’autre le fit pour lui.

            Après s’être assuré que Numéria n’était pas laissée seule, il s’empara du crâne de Korshit et le souleva contre le mur.

            – De la torture, remarqua Isidor. Supporteras-tu une autre session ? Je ne le pense pas. Dis moi le nom de celui qui t’envoie, et tu vivras.
            – … E-e-ep-ephra-
            – Je te remercie.

            Le chef du Culte de la Miséricorde lui écrasa le crâne contre le mur qui lui faisait face, avant de lâcher son emprise sur ce cadavre qui s’affala sur le sol comme une vulgaire poupée de chiffon.

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