Voir Orange et mourir. Mourir de honte quand on appartenait à la 473eme division de la marine. Jurer de protéger la veuve et l'orphelin, de répandre la Justice et faire respecter la loi pour se retrouver à servir de taxi pour l'une des pires ordures à visage humain ayant souillé terre et mer, là était l'infamie. Seulement, dans la marine comme ailleurs, ce que le bas peuple appelait vulgairement "l'enculage hiérarchique" avait cours. On reniait ses idéaux pour mieux courber l'échine afin de ne pas subir un blâme. Le glorieux corps constitué qu'était la marine du Gouvernement Mondial se voyait une fois de plus entachée d'une impureté, une impureté du nom de Joe Biutag.
À bord, on le craignait. Sa réputation avait fait le plus gros, son caractère pernicieux ayant achevé de convaincre de sa capacité de nuisance. Lui, un vulgaire matelot, un écumeur de fond, et encore, de bas-fonds, le cafard, le bien-nommé, il trônait aujourd'hui impérieux en proue, son épais manteau de fourrure noire recouvrant sa frêle silhouette tandis que son regard restait masqué de la visière de cette casquette de marine par-dessus laquelle il avait eu l'irrévérence d'inscrire "pirate" en lettres de sang. Que de chemin parcouru pour une pareille vermine. Les nuisibles avaient la vie dure, d'autant plus lorsque le sceau du Gouvernement Mondial couvrait leurs méfaits.
Ce long chemin, il l'avait fait aussi bien au sens propre que figuré. On avait été le chercher jusqu'aux confins de la quatrième voie de Grand Line, là où l'autorité du Gouvernement Mondial n'était que trop peu répandue, là où l'œil attentif du conseil des cinq étoiles ne pouvait le scruter.
Là où il enfreignait ostensiblement tous les termes du contrat qui le liait au G.M. Pillage de marchandises, massacres de civils et mises en esclavage au programme. Aucune preuve évidemment, s'il était assez malhonnête pour flouer ses co-contractants, il regorgeait de suffisamment de malice pour le dissimuler au mieux. Seulement les rumeurs enflaient et la marine ne pouvait rester les bras croisés, il en allait de sa réputation.
Cette même réputation qui l'empêchait aussi d'assassiner Biutag dans les règles de l'art. Ce faisant, les autres capitaines corsaires auxquels ils étaient liés se seraient méfiés et il n'était pas bien prudent de se les mettre à dos en ces temps troublés. Alors, ce caillou dans la chaussure qu'était le cafard devait bénéficier de mesures exceptionnelles, à sa mesure en somme.
On l'avait convoqué à Marie Joie. Bien évidemment, on ne convoquait pas un capitaine corsaire, ceux-là étaient soit trop cons soit trop fiers pour obéir à la moindre injonction d'un quelconque état-major. Il allait sans dire que Joe faisait partie des cons.
Si cette sordide engeance s'illustrait par sa capacité de nuisance accrue, elle brillait aussi par son assujettissement à toute forme de manipulation correctement rodée. Une promesse de pactole scintillant était un steack juteux suffisant pour faire saliver ce clébard de Blattard qui n'avait d'ailleurs pas tardé à accourir. Pourtant, il avait fait la sourde oreille des mois durant aux missives dont les enveloppes furent recouvertes d'une mouette bleue.
S'il savait être retors, il péchait par excès de prévisibilité dès lors où l'argent était en jeu. Dans ces moments malheureux, la bave lui venait aux lèvres et seul le cerveau reptilien demeurait fonctionnel. C'était sa faiblesse et ses rares alliés aussi bien que ses ennemis n'hésitaient jamais à en profiter, quitte à se brûler en attisant un feu qu'ils ne pouvaient pas toujours éteindre.
À Marie Joie ce n'était pas un trésor qui l'attendait, mais une escorte censée le mener là où coulerait le lait et le miel. On avait prétexté qu'à force d'œuvrer avec l'ardeur qui était la sienne - c'est à dire piller le tout venant, de préférence lorsqu'il était désarmé - le malheureux corsaire risquait de s'épuiser à la tâche. Dans sa grande mansuétude, le Gouvernement Mondial avait décidé de lui offrir des vacances.
- Et un bateau.
Des vacances et un nouveau bateau - celui avec lequel il était parvenu jusqu'à Red Line ayant principalement flotté jusque là par la force du saint esprit. Aveuglé par l'avarice - on ne se faisait pas appeler Greed pour rien - il n'en restait pas moins lucide sur les intentions de ceux-là même qui juraient ne vouloir que son bien.
À force de trop chercher à baiser son monde, celui-ci préférait ne plus lui tourner le dos et cherchait à l'écarter. Pour un temps en tout cas. Dans ces moments là, il fallait obéir pour faire amende honorable mais ne pas se priver de gratter quelques suppléments au passage. Un bateau c'était peu cher payer pour garder le cafard en laisse ne serait-ce que quelques semaines.
Pour son bien-être - paraît-il - mais surtout pour diminuer drastiquement les abordages sur la quatrième voie de Grand Line, on lui offrait une cure sur Orange. On avait même dépêché un lieutenant-colonel pour la peine. Que d'argent de temps et d'énergie perdu pour cet atout incertain que constituait Joe pour le Gouvernement Mondial.
C'est ainsi que la 473e division de marine s'était retrouvée à devoir transporter à son bord cet encombrant passager dépourvu de tout sens des civilités. Parce que c'était "tous frais payés", il avait vidé le garde-manger, insulté les matelots et pissé du haut de la vigie, car... pourquoi pas après tout ? Passer des années traqué par la sainte congrégation de la mouette pour enfin les humilier était un délice de fin gourmet dont le cafard ne se privait pas. La modération n'était pas son fort, le respect d'autrui encore moins.
Seulement, alors qu'ils accostaient enfin - un soupir de soulagement général s'étant échappé du fond des cages thoraciques de tout l'équipage - le colis Biutag pouvait enfin sévir dans un espace moins confiné. Il avait sauté du haut du bastingage pour rejoindre la terre ferme, davantage pour montrer son empressement de prendre des vacances bien imméritées qu'autre chose, s'était bien évidemment mal réceptionné et avait boité comme si de rien n'était en direction du plus proche débit de boisson des environs.
- Ya-hin-hin, les couillons ! « Vos consommations seront à nos frais » qu'ils ont dit ! M'en vais mener le G.M à la faillite comptable, tu vas voir ça va pas traîner Hin-hin ! Avait-on pu l'entendre persifler au loin du pont de la frégate l'ayant mené jusqu'à Orange.
Atterré par le comportement exécrable de ce fléau qu'il avait amené jusqu'à ses terres, le lieutenant-colonel avait toutefois un sourire satisfait s'étirant le long de ses lèvres. Ce n'était pas que des vacances qu'on lui avait offert généreusement. Quelque part dans la garnison d'Orange, un autre cadeau l'attendait. Un cadeau peut-être plus empoisonné encore que le fiel du cafard.
Le Gouvernement Mondial ne se laissait jamais avoir deux fois. Un fou était sous sa responsabilité ? Qu'à cela ne tienne, il convenait de lui attribuer le garde-fou adéquat. Tout chien avait vocation à finir en laisse, Greed ne faisait pas exception.
La porte d'un bar lointain fut enfoncée d'un coup de botte ; l'île entière put entendre un énergumène vociférer à l'intention du tenancier :
- Fais cracher la vinasse enfoiré ! Je viens te dévaliser avec l'assentiment du conseil des cinq étoiles ! Ya-hin-hin
À bord, on le craignait. Sa réputation avait fait le plus gros, son caractère pernicieux ayant achevé de convaincre de sa capacité de nuisance. Lui, un vulgaire matelot, un écumeur de fond, et encore, de bas-fonds, le cafard, le bien-nommé, il trônait aujourd'hui impérieux en proue, son épais manteau de fourrure noire recouvrant sa frêle silhouette tandis que son regard restait masqué de la visière de cette casquette de marine par-dessus laquelle il avait eu l'irrévérence d'inscrire "pirate" en lettres de sang. Que de chemin parcouru pour une pareille vermine. Les nuisibles avaient la vie dure, d'autant plus lorsque le sceau du Gouvernement Mondial couvrait leurs méfaits.
Ce long chemin, il l'avait fait aussi bien au sens propre que figuré. On avait été le chercher jusqu'aux confins de la quatrième voie de Grand Line, là où l'autorité du Gouvernement Mondial n'était que trop peu répandue, là où l'œil attentif du conseil des cinq étoiles ne pouvait le scruter.
Là où il enfreignait ostensiblement tous les termes du contrat qui le liait au G.M. Pillage de marchandises, massacres de civils et mises en esclavage au programme. Aucune preuve évidemment, s'il était assez malhonnête pour flouer ses co-contractants, il regorgeait de suffisamment de malice pour le dissimuler au mieux. Seulement les rumeurs enflaient et la marine ne pouvait rester les bras croisés, il en allait de sa réputation.
Cette même réputation qui l'empêchait aussi d'assassiner Biutag dans les règles de l'art. Ce faisant, les autres capitaines corsaires auxquels ils étaient liés se seraient méfiés et il n'était pas bien prudent de se les mettre à dos en ces temps troublés. Alors, ce caillou dans la chaussure qu'était le cafard devait bénéficier de mesures exceptionnelles, à sa mesure en somme.
On l'avait convoqué à Marie Joie. Bien évidemment, on ne convoquait pas un capitaine corsaire, ceux-là étaient soit trop cons soit trop fiers pour obéir à la moindre injonction d'un quelconque état-major. Il allait sans dire que Joe faisait partie des cons.
Si cette sordide engeance s'illustrait par sa capacité de nuisance accrue, elle brillait aussi par son assujettissement à toute forme de manipulation correctement rodée. Une promesse de pactole scintillant était un steack juteux suffisant pour faire saliver ce clébard de Blattard qui n'avait d'ailleurs pas tardé à accourir. Pourtant, il avait fait la sourde oreille des mois durant aux missives dont les enveloppes furent recouvertes d'une mouette bleue.
S'il savait être retors, il péchait par excès de prévisibilité dès lors où l'argent était en jeu. Dans ces moments malheureux, la bave lui venait aux lèvres et seul le cerveau reptilien demeurait fonctionnel. C'était sa faiblesse et ses rares alliés aussi bien que ses ennemis n'hésitaient jamais à en profiter, quitte à se brûler en attisant un feu qu'ils ne pouvaient pas toujours éteindre.
À Marie Joie ce n'était pas un trésor qui l'attendait, mais une escorte censée le mener là où coulerait le lait et le miel. On avait prétexté qu'à force d'œuvrer avec l'ardeur qui était la sienne - c'est à dire piller le tout venant, de préférence lorsqu'il était désarmé - le malheureux corsaire risquait de s'épuiser à la tâche. Dans sa grande mansuétude, le Gouvernement Mondial avait décidé de lui offrir des vacances.
- Et un bateau.
Des vacances et un nouveau bateau - celui avec lequel il était parvenu jusqu'à Red Line ayant principalement flotté jusque là par la force du saint esprit. Aveuglé par l'avarice - on ne se faisait pas appeler Greed pour rien - il n'en restait pas moins lucide sur les intentions de ceux-là même qui juraient ne vouloir que son bien.
À force de trop chercher à baiser son monde, celui-ci préférait ne plus lui tourner le dos et cherchait à l'écarter. Pour un temps en tout cas. Dans ces moments là, il fallait obéir pour faire amende honorable mais ne pas se priver de gratter quelques suppléments au passage. Un bateau c'était peu cher payer pour garder le cafard en laisse ne serait-ce que quelques semaines.
Pour son bien-être - paraît-il - mais surtout pour diminuer drastiquement les abordages sur la quatrième voie de Grand Line, on lui offrait une cure sur Orange. On avait même dépêché un lieutenant-colonel pour la peine. Que d'argent de temps et d'énergie perdu pour cet atout incertain que constituait Joe pour le Gouvernement Mondial.
C'est ainsi que la 473e division de marine s'était retrouvée à devoir transporter à son bord cet encombrant passager dépourvu de tout sens des civilités. Parce que c'était "tous frais payés", il avait vidé le garde-manger, insulté les matelots et pissé du haut de la vigie, car... pourquoi pas après tout ? Passer des années traqué par la sainte congrégation de la mouette pour enfin les humilier était un délice de fin gourmet dont le cafard ne se privait pas. La modération n'était pas son fort, le respect d'autrui encore moins.
Seulement, alors qu'ils accostaient enfin - un soupir de soulagement général s'étant échappé du fond des cages thoraciques de tout l'équipage - le colis Biutag pouvait enfin sévir dans un espace moins confiné. Il avait sauté du haut du bastingage pour rejoindre la terre ferme, davantage pour montrer son empressement de prendre des vacances bien imméritées qu'autre chose, s'était bien évidemment mal réceptionné et avait boité comme si de rien n'était en direction du plus proche débit de boisson des environs.
- Ya-hin-hin, les couillons ! « Vos consommations seront à nos frais » qu'ils ont dit ! M'en vais mener le G.M à la faillite comptable, tu vas voir ça va pas traîner Hin-hin ! Avait-on pu l'entendre persifler au loin du pont de la frégate l'ayant mené jusqu'à Orange.
Atterré par le comportement exécrable de ce fléau qu'il avait amené jusqu'à ses terres, le lieutenant-colonel avait toutefois un sourire satisfait s'étirant le long de ses lèvres. Ce n'était pas que des vacances qu'on lui avait offert généreusement. Quelque part dans la garnison d'Orange, un autre cadeau l'attendait. Un cadeau peut-être plus empoisonné encore que le fiel du cafard.
Le Gouvernement Mondial ne se laissait jamais avoir deux fois. Un fou était sous sa responsabilité ? Qu'à cela ne tienne, il convenait de lui attribuer le garde-fou adéquat. Tout chien avait vocation à finir en laisse, Greed ne faisait pas exception.
La porte d'un bar lointain fut enfoncée d'un coup de botte ; l'île entière put entendre un énergumène vociférer à l'intention du tenancier :
- Fais cracher la vinasse enfoiré ! Je viens te dévaliser avec l'assentiment du conseil des cinq étoiles ! Ya-hin-hin