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L'équilibriste

La houle frappe hargneusement au misérable glaçon qui me sert d’embarcation, la mer est agitée. Lentement, le croiseur de la marine s’approche, bientôt je pourrais abandonner ce frêle esquif. Je me relève lentement, manquant de glisser, caressé par les embruns. Toute la fatigue de la bataille se fait sentir dans chacun de mes muscles et à travers les multiples entailles et brulures qui strient ma peau. Enfin, l’imposant bâtiment se glisse bord à bord et une corde m’est lancée. Je m’agrippe au cordage et suis hissé à bord par un groupe de marins qui me saluent « commandant ». Je fais à peine quelques pas pour me dégourdir les jambes que je suis rejoint par les toubibs de bord… faut dire qu’ils ont moins de boulot que prévu. Je tourne la tête vers l’immense tas de débris qui était l’ancienne prison, il disparait déjà à l’horizon. Dans la confusion juste avant l’explosion, j’ai cru comprendre que le Cipher Pol en était à l’origine. Encore une belle preuve que ce gouvernement est pourri, je suis escorté vers une cabine, mais je n’y prête pas réellement attention, trop occupé à écouter mon corps et mon esprit meurtri.

On m’allonge sur le billard, me dessape et les soins commence. Le CP avait il fait le bon choix en dynamitant la prison ? Si on s’arrête à un simple calcul de coup et bénéfices, de nombreux criminels ont été éliminés, des révolutionnaires et des pirates, principalement. Mais dans le lot, de nombreux gardien et marins aussi ont péri. Des collègues dont je ne connais rien pour la plupart, des parfaits inconnus, mais ce sont mes inconnus. Je ne ressens aucune tristesse, aucune peine, juste du dégout et de l’irritation. Le jeune Yama au début de sa carrière se serait enflammé, il aurait frappé du poing, il aurait tempêté. Le mal n’était pas une finalité pensait -il, tout le monde peut changer, s’améliorer. Le capitaine, du moins l’ex-capitaine, le commandant Kogaku donc, lui, en fin de compte n’en avait plus grand-chose à faire. Je continue malgré tout à m’accrocher à la doctrine que je m’étais forgé au début de ma carrière, une doctrine aujourd’hui vide de sens. En fin de compte, je sauve les innocents, je protège mes alliés, et punit les autres. Il m’est impossible de sauver tout le monde.

On me passe une pommade grasse sur mes brulures, je frissonne. Au fond, qu’est-ce que la justice ? Techniquement, l’explosion a éradiqué de nombreuses menaces aux prix du sang que les défenseurs de la loi auraient sans doute payé tôt ou tard. C’est le genre de question que j’évite de me poser en général, me submergeant sous le travail pour étouffer mes pensées. Mais là, je n’ai pas d’échappatoire. Une partie de moi croit encore fermement à la justesse de la tâche que je me suis donné. Monter au sommet de la marine prônant la valeur d’une justice partiale. Qu’il s’agisse du bien ou du mal, quoi que ces notions signifient, il y a toujours une source. Le mal n’existe que dans la tête de fou, les autres ont des raisons pour agir ainsi. Il est impossible de découvrir cela au cours d’un combat, il faut donc tenter de garder tout le monde en vie. Je crois encore fermement que Le sang appelle le sang, donc il faut éviter d’en verser. Mais j’ignore si cette méthode est réaliste, j’ai cessé d’y donner un sens, me contentant de faire disparaitre les menaces. Pourtant malgré tout, je promeus encore ces valeurs de clémences. Le gouvernement, semble penser qu’éradiquer tout simplement les criminels est la solution, dans un sens, on ne peut leur donner tort, c’est un mal nécessaire. Mais peut-on réellement cautionner les horreurs commises par le gouvernement dans ce but ? Je l’ignore.

On m’apporte à manger et j’attaque le plat avec appétit et je suis rapidement rejoint par une présence familière, le colonel d’élite Kass brick. Il est couvert de bandage, l’affrontement ne l’a pas laissé indemne.

-Heureux de te revoir en un seul morceau fiston.

-De même.
-J’ai fait mon rapport au Major, il nous veut dans son bureau dés qu’on aura accosté, donc tente de récupérer pour être opérationnel, on a deux jours pour récupérer.

On échange quelques plaisanteries, les bravades de deux rescapés esquintés. Il m’abandonne alors non sans me glisser une bouteille de bourbon. Je regarde quelques secondes la bouteille ambrée, je m’étais promis de ne plus me réfugier dans la boisson pour fuir mes tourments, mais quelques gorgées ne peuvent pas faire de mal, si ? Cela rendrait déjà cette nuit plus simple à passer… Je m’allonge non sans avoir verrouillé la porte. Finalement, que dois je retenir de ce qui s’est passé. J’ai affronté pirates et révolutionnaire sur le glaçon, j’ai été épargné par un révolutionnaire redevable et j’ai évité un combat contre un pirate qui m’a déjà vaincu une fois et ses alliés grâce à l’explosion. Ma méthode, m’a permit d’éviter un affrontement, j’aurai peut-être pu porter un coup à la révolution en abattant deux de ses pièces, mais finalement, cela n’aurait rien changé, ils auraient été remplacés par d’autres. Donc vaincre les menaces directes et tenter de changer les mentalités est la solution. Ma méthode est donc bonne ? le bien a entrainé le bien, si je suis cette logique simpliste, la destruction de la prison, entrainera le mal… Je m’envoie une bonne lampée d’alcool, je laisse ces interrogations au moi du futur. Je vais me contenter de me dire que ce que je fais est juste et que ma méthode doit remplacer celle du gouvernement, c’est peut-être un rêve idiot, mais c’est simple et ça me plait. Je m’envoie une seconde lampée d’alcool et jette la bouteille par le hublot, le commandant Kogaku ne boit pas pour oublier, il montre l’exemple… Le commandant Kogaku ne se laisse jamais aller, le commandant Kogaku se bat pour la dignité de faibles, le commandant Kogaku sème le bien pour faire pousser le bien. Le comman….

Je suis réveillé, par les toubibs qui m’appliquent de nouveaux bandages, j’ignore le temps qui a passé. Je le laisse finir et retourne sur le pont, il doit être aux environs de seize heures. La sombre masse de Redline s’étend déjà à l’horizon. Donc bientôt le rapport avec le supérieur de l’élite, j’aurai vu du monde ces derniers temps, amiral, amirale en cheffe, colonel d’élite, major, je commence à me créer ma place au sommet du monde… Ce n’est pas le moment de me questionner, ce que je fais est juste. La finalité du gouvernement est juste, mais sa méthode est critiquable. Ce n’est pas le moment de douter, j’ai trop de chose à faire pour encore me perdre dans ce genre de considération.  Alors que je me dirige vers le mess, un marin me rejoint escargophone à la main, c’est Ethan.
Je l’entends à sa voix, il est perturbé, notre perte contre Kyori l’a rendu furieux. La colère a à peu près toujours été son moteur après tout. J’apprend néanmoins une bonne nouvelle, il a remplacé la perte de son bras. Il n’a qu’une envie, se venger. Il est prêt à le faire seul. Je réfléchis quelques secondes, je pense qu’il est dans l’erreur, mais je ne peux pas l’arrêter. Je suis d’accord que l’on doit venger Salem et nos hommes, mais pas comme ça… j’ai promis de ne plus me submerger par mes émotions, mon rôle dépasse ma personne… bien que je sois aussi tenté de me laisser consumer par la colère comme par le passé, je ne peux pas me le permettre. Je lui promets toutefois de l’accompagner.

J’utilise ma détermination reforgée pour écarter de mon esprit toute pensée des jours précédant, c’est dans le passé. Je dois aller de l’avant comme je fais toujours, j’ai déjà perdu trop de compagnons pour les compter, j’ai vu mes deux mentors disparaitre, je me dois de me dépasser pour ne plus échouer… encore.  Je voulais faire quoi encore ? J’ai oublié…  Je suis alors rejoint par le colonel qui me propose de manger un bout, ah oui, c’était ça. Je le suis, je dois avancer ne pas penser.  

On accoste enfin en début de soirée, on laisse les soldats s’occuper du navire et on descend sur le quai. On remonte l’embarcadère et tombe sur une figure familière, si l’on peut catégoriser le visage du gars de familier. Adossé à une caisse, Moloch, nous attend, dur à dire s’il s’agit d’un effet de style ou le contrecoup du mal qui le ronge. Il se détache sa longue carcasse et s’approche de nous un sourire blafard s’étendant sur son visage vérolé.

-T’as fait du chemin gamin, le major vous attend.

On emboite le pas du colonel d’élite et Kass Brick se rapproche de son égal pour lui échanger quelques mots. Nous sommes vites rejoint par une escouade de marin qui nous emboite le pas. Dans les rues, les badauds nous dévisagent, certains sourient, certains se cachent et d’autre font des messes basses. Manifestement un rassemblement de cador de la marine inquiète, faut avouer que l’élite n’a jamais eu trop bonne réputation. Au final nous sommes plus des individus que des fonctions…  Nous sommes plus connu en tant qu’électron libre incontrôlable que pour notre rang dans la force. Est-ce que me forcer à jouer les bons soldats n’est pas en phase avec ma nouvelle position ? devrais-je me laisser guider par mes pulsions ? Encore une question sans réponse.

On arrive rapidement au pied de l’immense caserne de la marine, un bâtiment carré et brut, un monolithe qui représente la force et l’implacabilité de la marine, ici, dans la capitale du monde. On monte une série de marches, traverse quelques couloirs, échangeant quelques anecdotes sur le shampoing et finalement, la porte imposante des quartiers du major s’offre à nous. Un soldat en faction nous fait rentrer et on pénètre dans le bureau du gradé. Une pièce assez sobre, un imposant bureau en son centre, un feu ronflant dans une cheminée, quelques casiers à bouteilles et documents. Et au milieu de tout ça, le major qui nous fixait strictement, assez raide depuis un fauteuil simple.

-Brick, Kogaku, Moloch installez-vous messieurs.

On s’exécute, après quelques secondes, le major se met à parler, il nous demande à chacun de faire notre rapport. Moloch commence, parlant d’une mission dont il revenait juste, Brick parle de Jotunheim, et je reprends ensuite. Je finis mon récit par la décision du CP, ne sachant pas trop si je devais louer cet acte. Mais pensant toutefois que ce n’était pas la pire des solutions, mais pas la meilleure. Il nous écoute, le visage fermé, il prend quelques secondes pour verser du thé et prendre une gorgée avant de me demander de narrer la bataille du G5.  Je lui donne alors le même compte-rendu que j’avais fait pour Kenora il y a quelques jours de cela. Il hoche la tête. La conversation reprend après quelques secondes, après qu’un soldat nous ait amené une collation. On s’engage dans un débat sur la situation actuelle du monde, les rapports de force après les récents évènements, je n’ai pas grand-chose à dire, mais le major semble décidé à avoir mon avis sur les questions. La conversation continue, mais une idée reste, il faut que la marine ressort grandie des divers évènements. La marine d’élite doit en profiter pour briller, il nous faut quelques coups d’éclats. La nuit a bien avancé quand il décide de nous congédier. Mais alors qu’on s’approche de la porte, sa voix rocailleuse nous  arrête une dernière fois.

-Kogaku, mes deux colonels semblent vous trouver compétent, si vous m’impressionné, il n’est pas impossible que je vous fasse rejoindre leur rang… mais avant toute chose… Ne me décevez pas !
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